Grèce
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Re: Grèce
Babel a écrit:Autant je rejoins les critiques formulées par ce texte au sujet des ambiguïtés contenues dans la récente déclaration du SU, autant celui-ci me semble particulièrement évasif sur le plan des propositions.
A mon avis, le plus gros problème posé par le texte de Philippe Alcoy est qu'à la question : "Quelle position prendre si en Grèce un gouvernement annule les mémorandums et les mesures d'austérité et suspend le paiement de la dette, provoquant une crise en Europe", il répond en quelque sorte : "C'est une affaire entre bourgeois, on en reparlera lorsqu' un gouvernement nationalisera les entreprises stratégiques et appliquera un programme révolutionnaire". C'est une position typiquement sectaire. Tant qu'à faire, je préfère encore celle exprimée par le texte, fort critiquable, du BE de la IV.
A noter que, dans une interview (très intéressante) publiée sur le site de Mediapart et reprise par le site de la Gauche Anticapitaliste, Stathis Kouvelakis fait une analyse inverse de celle de Philippe Alcoy concernant l'évolution récente de Syriza :
"Quelles que soient les conséquences, Syriza ne reculera pas et rejettera toute poursuite en l’état du Mémorandum. Paradoxalement, à l’inverse de la loi qui voudrait que la pente vers la modération soit irrésistible quand on s’approche du pouvoir, cette position s’est précisée au prix de vifs débats internes dans la foulée des résultats du 6 mai, au fur et à mesure que Syriza est paru porté par une dynamique électorale majoritaire".
Ceci dit, que les sectaires se rassurent, il est bien peu probable que Syriza soit en mesure de former un gouvernement sans des alliés situés à sa droite, qui mettraient un veto à des mesures conduisant à un affrontement avec l'UE.
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: Grèce
Babel a écrit:
A lire également, l'interview publiée sur le site du NPA de Tania Vrisaki, militante du Sek et d'Antarsya, à la fois tonique et combattive.
Merci de l'avoir signalée, je l'avais zappée. D'autant qu'elle pointe ce qui manque forcément dans une critique sectaire car abstraite des tentations réformistes : un programme d'action - que ce soit dans l'organisation d'un mouvement antifasciste militant capable de s'opposer physiquement aux nazis en rassemblant largement la population, ou dans la mise en œuvre d'organes de contrôle ouvrier. C'est de l'organisation de telles instances plus que de la formulation exacte du programme de nationalisation à effectuer que les possibilités de victoires dépendront - car parler de "nationalisation sous contrôle ouvrier" est une bien belle chose, mais si les organes de contrôle ouvrier n'existent pas, ça ne veut pas dire grand chose, ou alors une vague participation de bureaucrates syndicaux à un conseil d'administration....
Dernière édition par sylvestre le Sam 9 Juin - 17:17, édité 1 fois
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Grèce
Même inquiétude que Sylvestre, notamment en lisant ceci,
dont j'aimerais bien pouvoir vérifier l'exactitude
(ce que perso suis incapable de faire...)
dont j'aimerais bien pouvoir vérifier l'exactitude
(ce que perso suis incapable de faire...)
Syrisa est-il impliqué dans les luttes sociales aujourd’hui dans cette période électorale ?
Non d’une manière générale. Ils sont impliqués dans certaines luttes bien sûr, mais pour les freiner, alors qu’en ce moment il faudrait les accentuer, les généraliser, c’est le seul moyen d’imposer quoi que ce soit à la bourgeoisie.
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Grèce
Toujours pour info, les commentaires du KKE, traduits en français, sur la rencontre Tsipras avec les diplomates des pays impérialistes (G20)
http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-alexis-tsipras-chef-de-syriza-rassure-les-diplomates-des-etats-unis-et-des-grandes-puissances-capit-106639103.html
http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/article-alexis-tsipras-chef-de-syriza-rassure-les-diplomates-des-etats-unis-et-des-grandes-puissances-capit-106639103.html
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Ressources Inprecor
http://orta.dynalias.org/inprecor/fiches/grece.html
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Echange entre Bureau de la IV et section grecque
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article25492
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Grèce
Le texte de Morsu peut se lire ici : http://tendanceclaire.npa.free.fr/contenu/autre/morsugrece.pdf
Gaston Lefranc- Messages : 777
Date d'inscription : 26/06/2010
Re: Grèce
Merci.Gaston Lefranc a écrit:Le texte de Morsu peut se lire ici : http://tendanceclaire.npa.free.fr/contenu/autre/morsugrece.pdf
En anglais. Il faudrait traduire ce document pour que chacun puisse s'en saisir et en débattre. La réponse du Bureau exécutif à la lettre de la section grecque m'a paru d'une désinvolture inquiétante.Roseau a écrit:http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article25492
Babel- Messages : 1081
Date d'inscription : 30/06/2011
Re: Grèce
Oui, j'espère aussi que ce sera traduit. Le sujet est crucial, et la lettre de l'OKDE dit l'essentiel, de façon très claire et limpide ... et la réponse de la direction du SUQI noie le poisson, biaise, esquive.
Gaston Lefranc- Messages : 777
Date d'inscription : 26/06/2010
Lettre de l'OKDE Spartakos au BE de la IV en fr.
Chères et chers camarades du Bureau exécutif de la Quatrième Internationale,
Il ya quelques jours, nous avons reçu un e-mail contenant un lien vers votre déclaration « L’avenir des travailleurs de l’Europe se décide en Grèce », qui est publié sur les sites d’Inprecor et d’International Viewpoint.
Nous avons été très surpris de réaliser que c’était une déclaration concernant la Grèce, les luttes sociales de classes qui se déroulent dans le pays au cours des dernières deux années et demi, sans que vous n’aviez tenté de s’adresser au préalable à la section grecque ou du moins certains de ses membres. Vous auriez dû le faire ne serait-ce que pour votre propre information, car nous aurions pu vous indiquer les inexactitudes dans le contenu de la déclaration et dans les références à des positions politiques (de SYRIZA), qui ne sont plus valables. Votre attitude met en lumière la déficience des connaissances du Bureau exécutif de ces sujets. Elle dévoile aussi le manque de coordination au sein de la IVe Internationale. Nous tenons à souligner que ce n’est pas la première fois que notre section est ostensiblement ignorée et que les décisions, relatives au mouvement et à l’environnement politique dans lequel nous agissons, sont prises sans nous interroger sur les positions de la section, sans même exprimer un intérêt pour ses choix politiques et pour les problèmes qu’une déclaration qui s’oppose à ces choix peut créer. OKDE-Spartakos est une organisation politique avec une direction et avec un processus collectif de décision en ce qui concerne ses orientations politiques et ses choix. Au moins vous devriez être intéressé par ses choix. Il n’est pas toujours facile pour nous de traduire nos textes dans d’autres langues, mais le rôle de la IVe Internationale reste de coordonner toutes les sections afin d’éviter des malentendus, des erreurs et des distorsions.
Camarades, vous savez que la section grecque a pris la décision politique de participer à au projet anti-capitaliste unitaire de la gauche, celui d’ANTARSYA. Nous construisons ce front tout en faisant face à ses contradictions, aux désaccords politiques et aux différentes traditions politiques. Nous consacrons beaucoup de notre temps politique et personnel pour renforcer ce front de la gauche anticapitaliste et pour sa réussite, en appliquant ses choix auxquels l’OKDE-Spartakos a contribué. Par conséquent, comme vous pouvez le comprendre facilement, une déclaration comme celle publiée conduit à mettre en question nos décisions politiques et la crédibilité de notre organisation aux yeux de nos alliés. Cela nous prive de l’appui de notre organisation internationale et la présente comme un pendule, oscillant au gré du vent (électoral). Cela sape nos efforts pour approcher ANTARSYA de l’Internationale.
Pour être plus concret, vous vous concentrez sur et vous proposer comme un fer de lance de la lutte politique en Grèce, le plan d’urgence de 5 points de SYRIZA, que son leadership a utilisé dans les négociations avec la Nouvelle Démocratie, le PASOK, les Grecs indépendants et la Gauche démocratique pour former un gouvernement. Ce plan comprend, par exemple, le point 4 sur la suppression de l’immunité des ministres, une demande qui n’est pas pertinente pour la gauche et qui a été mise à l’ordre du jour par les populistes et l’extrême droite. Soit dit en passant, ces 5 points ont été récemment réexaminés par SYRIZA lui-même, qui cède continuellement aux pressions exercées par la classe dominante. Le plus récent développement, c’est que SYRIZA ne promet plus d’annuler de façon unilatérale le mémorandum, mais de le remplacer par un nouveau plan économique national renégocié avec les créanciers et l’Union européenne. SYRIZA ne parle pas de nationalisation des banques (encore moins du contrôle des travailleurs), mais de « contrôle public » par l’État. C’est quelque chose de différent du point 2 des cinq points de Syriza, qui, soit dit en passant, ne concernait que les banques qui ont déjà reçu la généreuse aide de l’État. Il y a réellement une question, c’est quelle demande considérons nous comme vraiment transitoire : le moratoire de trois ans de paiement de la dette, que propose SYRIZA, ou celle de l’annulation de la dette avancé par ANTARSYA ? A qui demandera-t-on de payer la dette après ces trois ans ? Sauf si nous pensons que de nos jours, au milieu de la plus grande crise du capitalisme après la Seconde Guerre mondiale et dans un pays qui a vécu dans des conditions de guerre de classe durant trois ans, un programme de transition serait un luxe et que ce dont nous avons besoin c’est tout simplement un « plan d’urgence » démocratique-bourgeois.
Il est étonnant que la déclaration ne propose même pas un vote critique ou un effort pour un accord programmatique, mais un alignement politique total sur SYRIZA et son plan d’urgence !
Nous sommes tous conscients de l’importance que la formation d’un gouvernement à la gauche de la social-démocratie à la prochaine élection aurait pour les travailleurs en Grèce et dans toute l’Europe. Un tel fait pourrait améliorer leur confiance en soi et contribuer, dans certaines circonstances, à une nouvelle montée des luttes. Toutefois, SYRIZA fait de son mieux afin de prévenir le développement d’un tel processus en faveur du peuple travailleur. Le seul espoir pour que cela se produise c’est l’existence d’une force anticapitaliste crédible à sa gauche. Sinon, après quelques mois, un éventuel gouvernement SYRIZA va s’effondrer laissant le champ libre à un gouvernement de droite, comme cela c’est passé dans d’autres cas en Europe (Italie...), ou, pire encore, à un virage à l’extrême droite. Nous pensons qu’il est crucial pour la gauche anti-capitaliste grecque et en particulier pour ANTARSYA d’avancer une tactique de front unique, mais, en même temps, elle doit préserver son indépendance politique et le programme de transition anti-capitaliste avec le quel elle a conduit les difficiles luttes dans les syndicats, les entreprises et parmi les jeunes. ANTARSYA ne doit pas se transformer en une force plus à gauche qui courre après les illusions administratives réformistes. Camarades, une gauche anticapitaliste existe en Grèce, et elle ne peut pas se dénier au nom des 5 points, qui mettent de côté le rejet unilatéral des mémorandums, l’annulation de la dette et la nationalisation des banques et des grandes entreprises sous contrôle ouvrier.
Il est significatif qu’au moment où vous demandez aux travailleurs grecs de voter pour un gouvernement de gauche, qui abolirait les mémorandums et toutes les contre-réformes réactionnaires du travail, SYRIZA a déjà commencé à parler d’une renégociation des mémorandums afin de ne pas perdre des voix, cédant aux pressions des médias et de la classe dominante. Il suffit de dire que le président de SYRIZA a proposé comme Premier ministre du gouvernement de transition, G. Arsenis, un ancien ministre de l’Éducation du PASOK, qui était un ennemi des travailleurs, des jeunes et du mouvement de masse qui a résisté à ses réformes, qui fut responsable de milliers d’enseignants au chômage et de l’accentuation des barrières d’accès au second ou au troisième cycle de l’éducation, touchant surtout les enfants de la classe ouvrière et des couches pauvres (nous nous demandons juste, où cela devrait arrêter ?). Un autre exemple : SYRIZA ne promet plus d’annuler toutes les mesures d’austérité, mais seulement de rétablir les salaires au niveau où ils étaient avant février 2012, c’est à dire au bout de deux années d’austérité et de luttes sociales (ce qui signifie un salaire minimum de 751 euros, contributions aux fonds obligatoires et taxes inclus...). Malgré tout cela, ANTARSYA rencontré SYRIZA et accepté de coopérer et de marcher ensemble dans les luttes. Toutefois, en cas d’un gouvernement de gauche, ANTARSYA aura une attitude critique, en soutenant les mesures progressistes et en s’opposant activement à tout recul.
Nous sommes d’accord pour lutter en faveur des États-Unis socialistes d’Europe. Mais comment est-ce possible ? En défendant « l’UE des peuples » et ses mécanismes supranationaux bourgeois, comme le fait la gauche réformiste, ou par la lutte de classe coordonnée à l’échelle européenne afin de détruire l’UE ? En dissimulant ou en révélant aux yeux des travailleurs et des chômeurs le fait que l’UE sert les intérêts du capital international et impose des restrictions aux travailleurs, dont une majorité la considère encore comme une institution progressiste ? La zone euro, la monnaie Euro et les politiques d’austérité qui ont accompagné leur existence depuis le début ne seraient pas quelque chose qui doit être combattu par les travailleurs en Grèce et dans toute l’Europe ? Est-ce que l’UE se désintègrera elle-même ou bien les classes ouvrières d’Europe doivent la défier, en ayant une contre-proposition ?
Malheureusement nous nous rendons compte avec angoisse que la IVe Internationale n’est pas capable de jouer le rôle qu’elle doit jouer dans cette période historique et nous nous demandons où nous allons... Bien que la IVe Internationale est une coordination internationale des petites organisations révolutionnaires dans le monde entier, sa parole et ses déclarations ont un poids considérable et une résonance dans l’avant-garde internationale des travailleurs, qui devient de plus en plus massive et politisé. Elle devrait offrir une orientation, avec toutes les forces à sa disposition, pour l’accomplissement d’un programme de transition qui rompt avec le capitalisme. Cela est encore plus valable pour la Grèce, où la montée des mouvements des travailleurs met à l’ordre du jour les aspects d’un tel programme, comme cela s’est produit en octobre dernier, quand nous avons eu les premiers signes d’un défi direct contre prérogatives dirigeantes des employeurs, avec tous les services publics occupés par des travailleurs. La IVe Internationale doit cultiver la conviction que la révolution est possible aujourd’hui.
Au nom du Comité central du OKDE-Spartacos (section grecque de la IVe Internationale)
Eleni Lalou
Il ya quelques jours, nous avons reçu un e-mail contenant un lien vers votre déclaration « L’avenir des travailleurs de l’Europe se décide en Grèce », qui est publié sur les sites d’Inprecor et d’International Viewpoint.
Nous avons été très surpris de réaliser que c’était une déclaration concernant la Grèce, les luttes sociales de classes qui se déroulent dans le pays au cours des dernières deux années et demi, sans que vous n’aviez tenté de s’adresser au préalable à la section grecque ou du moins certains de ses membres. Vous auriez dû le faire ne serait-ce que pour votre propre information, car nous aurions pu vous indiquer les inexactitudes dans le contenu de la déclaration et dans les références à des positions politiques (de SYRIZA), qui ne sont plus valables. Votre attitude met en lumière la déficience des connaissances du Bureau exécutif de ces sujets. Elle dévoile aussi le manque de coordination au sein de la IVe Internationale. Nous tenons à souligner que ce n’est pas la première fois que notre section est ostensiblement ignorée et que les décisions, relatives au mouvement et à l’environnement politique dans lequel nous agissons, sont prises sans nous interroger sur les positions de la section, sans même exprimer un intérêt pour ses choix politiques et pour les problèmes qu’une déclaration qui s’oppose à ces choix peut créer. OKDE-Spartakos est une organisation politique avec une direction et avec un processus collectif de décision en ce qui concerne ses orientations politiques et ses choix. Au moins vous devriez être intéressé par ses choix. Il n’est pas toujours facile pour nous de traduire nos textes dans d’autres langues, mais le rôle de la IVe Internationale reste de coordonner toutes les sections afin d’éviter des malentendus, des erreurs et des distorsions.
Camarades, vous savez que la section grecque a pris la décision politique de participer à au projet anti-capitaliste unitaire de la gauche, celui d’ANTARSYA. Nous construisons ce front tout en faisant face à ses contradictions, aux désaccords politiques et aux différentes traditions politiques. Nous consacrons beaucoup de notre temps politique et personnel pour renforcer ce front de la gauche anticapitaliste et pour sa réussite, en appliquant ses choix auxquels l’OKDE-Spartakos a contribué. Par conséquent, comme vous pouvez le comprendre facilement, une déclaration comme celle publiée conduit à mettre en question nos décisions politiques et la crédibilité de notre organisation aux yeux de nos alliés. Cela nous prive de l’appui de notre organisation internationale et la présente comme un pendule, oscillant au gré du vent (électoral). Cela sape nos efforts pour approcher ANTARSYA de l’Internationale.
Pour être plus concret, vous vous concentrez sur et vous proposer comme un fer de lance de la lutte politique en Grèce, le plan d’urgence de 5 points de SYRIZA, que son leadership a utilisé dans les négociations avec la Nouvelle Démocratie, le PASOK, les Grecs indépendants et la Gauche démocratique pour former un gouvernement. Ce plan comprend, par exemple, le point 4 sur la suppression de l’immunité des ministres, une demande qui n’est pas pertinente pour la gauche et qui a été mise à l’ordre du jour par les populistes et l’extrême droite. Soit dit en passant, ces 5 points ont été récemment réexaminés par SYRIZA lui-même, qui cède continuellement aux pressions exercées par la classe dominante. Le plus récent développement, c’est que SYRIZA ne promet plus d’annuler de façon unilatérale le mémorandum, mais de le remplacer par un nouveau plan économique national renégocié avec les créanciers et l’Union européenne. SYRIZA ne parle pas de nationalisation des banques (encore moins du contrôle des travailleurs), mais de « contrôle public » par l’État. C’est quelque chose de différent du point 2 des cinq points de Syriza, qui, soit dit en passant, ne concernait que les banques qui ont déjà reçu la généreuse aide de l’État. Il y a réellement une question, c’est quelle demande considérons nous comme vraiment transitoire : le moratoire de trois ans de paiement de la dette, que propose SYRIZA, ou celle de l’annulation de la dette avancé par ANTARSYA ? A qui demandera-t-on de payer la dette après ces trois ans ? Sauf si nous pensons que de nos jours, au milieu de la plus grande crise du capitalisme après la Seconde Guerre mondiale et dans un pays qui a vécu dans des conditions de guerre de classe durant trois ans, un programme de transition serait un luxe et que ce dont nous avons besoin c’est tout simplement un « plan d’urgence » démocratique-bourgeois.
Il est étonnant que la déclaration ne propose même pas un vote critique ou un effort pour un accord programmatique, mais un alignement politique total sur SYRIZA et son plan d’urgence !
Nous sommes tous conscients de l’importance que la formation d’un gouvernement à la gauche de la social-démocratie à la prochaine élection aurait pour les travailleurs en Grèce et dans toute l’Europe. Un tel fait pourrait améliorer leur confiance en soi et contribuer, dans certaines circonstances, à une nouvelle montée des luttes. Toutefois, SYRIZA fait de son mieux afin de prévenir le développement d’un tel processus en faveur du peuple travailleur. Le seul espoir pour que cela se produise c’est l’existence d’une force anticapitaliste crédible à sa gauche. Sinon, après quelques mois, un éventuel gouvernement SYRIZA va s’effondrer laissant le champ libre à un gouvernement de droite, comme cela c’est passé dans d’autres cas en Europe (Italie...), ou, pire encore, à un virage à l’extrême droite. Nous pensons qu’il est crucial pour la gauche anti-capitaliste grecque et en particulier pour ANTARSYA d’avancer une tactique de front unique, mais, en même temps, elle doit préserver son indépendance politique et le programme de transition anti-capitaliste avec le quel elle a conduit les difficiles luttes dans les syndicats, les entreprises et parmi les jeunes. ANTARSYA ne doit pas se transformer en une force plus à gauche qui courre après les illusions administratives réformistes. Camarades, une gauche anticapitaliste existe en Grèce, et elle ne peut pas se dénier au nom des 5 points, qui mettent de côté le rejet unilatéral des mémorandums, l’annulation de la dette et la nationalisation des banques et des grandes entreprises sous contrôle ouvrier.
Il est significatif qu’au moment où vous demandez aux travailleurs grecs de voter pour un gouvernement de gauche, qui abolirait les mémorandums et toutes les contre-réformes réactionnaires du travail, SYRIZA a déjà commencé à parler d’une renégociation des mémorandums afin de ne pas perdre des voix, cédant aux pressions des médias et de la classe dominante. Il suffit de dire que le président de SYRIZA a proposé comme Premier ministre du gouvernement de transition, G. Arsenis, un ancien ministre de l’Éducation du PASOK, qui était un ennemi des travailleurs, des jeunes et du mouvement de masse qui a résisté à ses réformes, qui fut responsable de milliers d’enseignants au chômage et de l’accentuation des barrières d’accès au second ou au troisième cycle de l’éducation, touchant surtout les enfants de la classe ouvrière et des couches pauvres (nous nous demandons juste, où cela devrait arrêter ?). Un autre exemple : SYRIZA ne promet plus d’annuler toutes les mesures d’austérité, mais seulement de rétablir les salaires au niveau où ils étaient avant février 2012, c’est à dire au bout de deux années d’austérité et de luttes sociales (ce qui signifie un salaire minimum de 751 euros, contributions aux fonds obligatoires et taxes inclus...). Malgré tout cela, ANTARSYA rencontré SYRIZA et accepté de coopérer et de marcher ensemble dans les luttes. Toutefois, en cas d’un gouvernement de gauche, ANTARSYA aura une attitude critique, en soutenant les mesures progressistes et en s’opposant activement à tout recul.
Nous sommes d’accord pour lutter en faveur des États-Unis socialistes d’Europe. Mais comment est-ce possible ? En défendant « l’UE des peuples » et ses mécanismes supranationaux bourgeois, comme le fait la gauche réformiste, ou par la lutte de classe coordonnée à l’échelle européenne afin de détruire l’UE ? En dissimulant ou en révélant aux yeux des travailleurs et des chômeurs le fait que l’UE sert les intérêts du capital international et impose des restrictions aux travailleurs, dont une majorité la considère encore comme une institution progressiste ? La zone euro, la monnaie Euro et les politiques d’austérité qui ont accompagné leur existence depuis le début ne seraient pas quelque chose qui doit être combattu par les travailleurs en Grèce et dans toute l’Europe ? Est-ce que l’UE se désintègrera elle-même ou bien les classes ouvrières d’Europe doivent la défier, en ayant une contre-proposition ?
Malheureusement nous nous rendons compte avec angoisse que la IVe Internationale n’est pas capable de jouer le rôle qu’elle doit jouer dans cette période historique et nous nous demandons où nous allons... Bien que la IVe Internationale est une coordination internationale des petites organisations révolutionnaires dans le monde entier, sa parole et ses déclarations ont un poids considérable et une résonance dans l’avant-garde internationale des travailleurs, qui devient de plus en plus massive et politisé. Elle devrait offrir une orientation, avec toutes les forces à sa disposition, pour l’accomplissement d’un programme de transition qui rompt avec le capitalisme. Cela est encore plus valable pour la Grèce, où la montée des mouvements des travailleurs met à l’ordre du jour les aspects d’un tel programme, comme cela s’est produit en octobre dernier, quand nous avons eu les premiers signes d’un défi direct contre prérogatives dirigeantes des employeurs, avec tous les services publics occupés par des travailleurs. La IVe Internationale doit cultiver la conviction que la révolution est possible aujourd’hui.
Au nom du Comité central du OKDE-Spartacos (section grecque de la IVe Internationale)
Eleni Lalou
Antonio Valledor- Messages : 160
Date d'inscription : 01/06/2012
Réponse au Comité centrale de l’OKDE-Spartakosa (s
Chers camarades,
D’abord, nous aurions du vous consulter avant de publier la déclaration du Bureau exécutif de l’internationale. Dont acte.
C’est l’urgence de la situation comme la nécessité de marquer notre solidarité avec le peuple grec et toute la gauche radicale, qui nous a conduits, à aller vite.
Nous sommes en désaccord avec votre réaction à la déclaration.
Celle-ci ne traite pas de votre orientation ou de vos choix de construction. Nous n’abordons pas, non plus les rapports d’Antarsya vis-à-vis de Syriza, ni la question électorale, ni les problèmes de caractérisation de Syriza, ni ce que devrait être l’ensemble d’une démarche transitoire. Sur toutes ces questions, les avis sont partagés, dans l’Internationale, et même dans la section grecque.
Nous abordons une seule question : face au déchainement de la « troïka » contre Syriza qui refuse d’appliquer ces mêmes plans d’austérité, devons nous ou pas soutenir Syriza dans cette opposition à la politique actuelle de la classe dominante grecque et à celle de l’Union Européenne.
Notre réponse, comme celle de la presque totalité des sections de l’Internationale est claire : il faut soutenir Syriza, qui jusqu’ à ce jour s’est opposée aux politiques d’austérité notamment en refusant de constituer ou de soutenir un gouvernement appliquant ces politiques.
Vous abordez alors une autre question renvoyant aux formulations des cinq principales revendications de Syriza en expliquant que ces dernières ne relèvent pas d’un programme de transition. Nous savons que Syriza est une coalition dominée par des réformistes de gauche. Nous savons qu’ils ne partagent pas notre conception du programme transitoire. C’est vrai aussi que les formulations des revendications de Syriza ont souvent changé, mais au-delà des formulations, ils rejettent les « Mémorandum » de l’UE, s’engagent sur un moratoire de la dette, rejettent les mesures d’austérité déjà appliquées, et surtout, jusqu’ à ce jour, refusent tout accord avec les plans de l’UE. Une position qui, par delà bien des variations dans les déclarations de dirigeants de Syriza, vient d’être officiellement réaffirmée, semble-t-il (http://www.okeanews.fr/syriza-le-manifeste-economique-pour-les-prochaines-elections/)
Par définition, une revendication transitoire n’est souvent (voire généralement) pas explicitement anticapitaliste, puisqu’elle part du niveau de conscience réellement existant : elle doit être d’emblée considérée légitime par une large partie de la population. C’est le combat pour sa mise en œuvre, dans une situation de crise ouverte, qui « révèle » ses implications anticapitalistes et permet de hausser le niveau de conscience et de lutte. De notre propre point de vue, le rejet du mémorandum et des mesures d’austérité, le moratoire sur la dette en vue de son annulation – au moins pour la plus grande part –, peuvent effectivement correspondre au niveau de conscience présent tout en constituant des points de rupture permettant à une dynamique transitoire de s’enclencher ?
Encore une fois, dans ces conditions, devons nous ou pas participer à la solidarité avec le peuple grec et ce refus de Syriza appuyé par toute la gauche radicale grecque et internationale ? Notre réponse, est, oui, nous devons être solidaires.
Voilà ce que dit la déclaration, ni plus, ni moins. Les pressions des classes dominantes sont énormes. Il est probable que des différenciations apparaitront, que des réorganisations se feront, que nous devons être attentifs à tout cela, mais à cette étape, Syriza tient bon, et il faut les soutenir, car nous aurons d’autant l’écoute de leurs militants et de leurs électeurs que nous les aurons soutenu contre les ennemis du peuple grec. Nous ne pensons pas qu’une politique, qui au nom des futures trahisons possibles, conduise les révolutionnaires à s’opposer à Syriza, soit la bonne. Nous préférons une politique unitaire, d’unité des organisations de la gauche radicale, d’unité syndicale, et d’unité du mouvement d’en bas, en particulier en stimulant toutes les expériences d’auto-organisation. C’est aussi le sens de notre prise de position pour une convergence Syriza, Antarsya et KKE, et ce dans la perspective d’un gouvernement de gauche anti-austérité. C’est en tout cas une proposition qui se discute pour opposer un bloc anti austérité en opposition à la ND et au PASOK.
Nous savons que les obstacles à cette politique unitaire sont immenses, en particulier à cause de la politique du KKE, mais face à l’ampleur des attaques capitalistes, il n’y a pas d’autre voie que de proposer les voies et les moyens de l’unité des travailleurs.
Cette perspective doit se combiner avec le rassemblement de tous les anticapitalistes qui sont dans Antarsya mais aussi dans certains secteurs de Syriza et au-delà, dans le mouvement syndical et associatif.
Etant donné l’importance de la Grèce, la discussion continuera. Elle devra aborder l’ensemble des questions, mais dans une telle situation, il est du devoir des révolutionnaires et de la IV e Internationale de rechercher les voies pour mener une politique unitaire et anticapitaliste.
le 6 juin 2012
Bureau exécutif de la IVe Internationale
D’abord, nous aurions du vous consulter avant de publier la déclaration du Bureau exécutif de l’internationale. Dont acte.
C’est l’urgence de la situation comme la nécessité de marquer notre solidarité avec le peuple grec et toute la gauche radicale, qui nous a conduits, à aller vite.
Nous sommes en désaccord avec votre réaction à la déclaration.
Celle-ci ne traite pas de votre orientation ou de vos choix de construction. Nous n’abordons pas, non plus les rapports d’Antarsya vis-à-vis de Syriza, ni la question électorale, ni les problèmes de caractérisation de Syriza, ni ce que devrait être l’ensemble d’une démarche transitoire. Sur toutes ces questions, les avis sont partagés, dans l’Internationale, et même dans la section grecque.
Nous abordons une seule question : face au déchainement de la « troïka » contre Syriza qui refuse d’appliquer ces mêmes plans d’austérité, devons nous ou pas soutenir Syriza dans cette opposition à la politique actuelle de la classe dominante grecque et à celle de l’Union Européenne.
Notre réponse, comme celle de la presque totalité des sections de l’Internationale est claire : il faut soutenir Syriza, qui jusqu’ à ce jour s’est opposée aux politiques d’austérité notamment en refusant de constituer ou de soutenir un gouvernement appliquant ces politiques.
Vous abordez alors une autre question renvoyant aux formulations des cinq principales revendications de Syriza en expliquant que ces dernières ne relèvent pas d’un programme de transition. Nous savons que Syriza est une coalition dominée par des réformistes de gauche. Nous savons qu’ils ne partagent pas notre conception du programme transitoire. C’est vrai aussi que les formulations des revendications de Syriza ont souvent changé, mais au-delà des formulations, ils rejettent les « Mémorandum » de l’UE, s’engagent sur un moratoire de la dette, rejettent les mesures d’austérité déjà appliquées, et surtout, jusqu’ à ce jour, refusent tout accord avec les plans de l’UE. Une position qui, par delà bien des variations dans les déclarations de dirigeants de Syriza, vient d’être officiellement réaffirmée, semble-t-il (http://www.okeanews.fr/syriza-le-manifeste-economique-pour-les-prochaines-elections/)
Par définition, une revendication transitoire n’est souvent (voire généralement) pas explicitement anticapitaliste, puisqu’elle part du niveau de conscience réellement existant : elle doit être d’emblée considérée légitime par une large partie de la population. C’est le combat pour sa mise en œuvre, dans une situation de crise ouverte, qui « révèle » ses implications anticapitalistes et permet de hausser le niveau de conscience et de lutte. De notre propre point de vue, le rejet du mémorandum et des mesures d’austérité, le moratoire sur la dette en vue de son annulation – au moins pour la plus grande part –, peuvent effectivement correspondre au niveau de conscience présent tout en constituant des points de rupture permettant à une dynamique transitoire de s’enclencher ?
Encore une fois, dans ces conditions, devons nous ou pas participer à la solidarité avec le peuple grec et ce refus de Syriza appuyé par toute la gauche radicale grecque et internationale ? Notre réponse, est, oui, nous devons être solidaires.
Voilà ce que dit la déclaration, ni plus, ni moins. Les pressions des classes dominantes sont énormes. Il est probable que des différenciations apparaitront, que des réorganisations se feront, que nous devons être attentifs à tout cela, mais à cette étape, Syriza tient bon, et il faut les soutenir, car nous aurons d’autant l’écoute de leurs militants et de leurs électeurs que nous les aurons soutenu contre les ennemis du peuple grec. Nous ne pensons pas qu’une politique, qui au nom des futures trahisons possibles, conduise les révolutionnaires à s’opposer à Syriza, soit la bonne. Nous préférons une politique unitaire, d’unité des organisations de la gauche radicale, d’unité syndicale, et d’unité du mouvement d’en bas, en particulier en stimulant toutes les expériences d’auto-organisation. C’est aussi le sens de notre prise de position pour une convergence Syriza, Antarsya et KKE, et ce dans la perspective d’un gouvernement de gauche anti-austérité. C’est en tout cas une proposition qui se discute pour opposer un bloc anti austérité en opposition à la ND et au PASOK.
Nous savons que les obstacles à cette politique unitaire sont immenses, en particulier à cause de la politique du KKE, mais face à l’ampleur des attaques capitalistes, il n’y a pas d’autre voie que de proposer les voies et les moyens de l’unité des travailleurs.
Cette perspective doit se combiner avec le rassemblement de tous les anticapitalistes qui sont dans Antarsya mais aussi dans certains secteurs de Syriza et au-delà, dans le mouvement syndical et associatif.
Etant donné l’importance de la Grèce, la discussion continuera. Elle devra aborder l’ensemble des questions, mais dans une telle situation, il est du devoir des révolutionnaires et de la IV e Internationale de rechercher les voies pour mener une politique unitaire et anticapitaliste.
le 6 juin 2012
Bureau exécutif de la IVe Internationale
Antonio Valledor- Messages : 160
Date d'inscription : 01/06/2012
Re: Grèce
Antonio Valledor a écrit:
Il est significatif qu’au moment où vous demandez aux travailleurs grecs de voter pour un gouvernement de gauche, qui abolirait les mémorandums et toutes les contre-réformes réactionnaires du travail, SYRIZA a déjà commencé à parler d’une renégociation des mémorandums afin de ne pas perdre des voix, cédant aux pressions des médias et de la classe dominante.
(...)
Au nom du Comité central du OKDE-Spartacos (section grecque de la IVe Internationale)
Eleni Lalou
Dans la version en anglais publiée sur le site d'ESSF, cette lettre est datée du 30 mai (elle n'est pas datée sur le site de l'OKDE). Deux jours plus tard, le 1er juin, SYRIZA annonçait que l'acte fondateur du nouveau gouvernement serait d'annuler les memorandums.
===============================================
Extrait d'un témoignage lu sur le site du Parti du travail de Belgique (PTB) :
"Nous rendons une visite de solidarité au piquet de grève de l’usine de câbles d’acier Helliniki Halivourgia, à 10 kilomètres du centre. Ici, on utilise de l’acier récupéré en Roumanie et dans d’autres pays de l’Est. 369 personnes y travaillent. Le patron ne leur laisse pas le choix : soit les salaires baissent de 40 %, soit 180 travailleurs sont licenciés. Ceux-ci refusent de choisir entre la peste et le choléra et sont en grève depuis plus de 200 jours. L’entreprise réalise pas mal de profit : la production est montée de 196 à 266 tonnes. Mais le patron impose malgré tout des économies drastiques.
Pour les travailleurs, il s’agit d’une grève de principe. Ils exigent le maintien de l’emploi et la réintégration des plus de 100 personnes déjà licenciées, et ce, sans aucune baisse de salaire.
Le grève est soutenue autant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. 800 000 euros ont été rassemblés dans un fonds de soutien. Chaque gréviste reçoit 100 euros par semaine.
Sofia est mère de deux enfants : une fille de 18 ans et un garçon de 20. Son mari travaille à l’usine depuis 22 ans ; il y a donné le meilleur de lui-même. Le travail est dangereux et malsain, et il y a beaucoup d’accidents.
Les femmes des grévistes se sont réunies en un comité dans lequel elles se rassemblent chaque semaine pour discuter des problèmes : faire vivre une famille avec 100 euros par semaine est impossible. Comme elles ne pouvaient plus payer leur facture d’électricité et qu’on les menaçait de la couper, elles sont allées négocier avec la compagnie d’énergie. Et elles ont obtenu un résultat : tant que durera la grève, elles ne devront plus s’acquitter de leur facture.
Une des femmes du comité avait des problèmes de garde pour son vieux père malade. On l’a aidée à trouver des personnes pour le garder. Des professeurs du syndicat se sont proposés pour donner des leçons particulières aux enfants qui en ont besoin. Le soutien scolaire est en effet devenu impayable.
Sofia nous demande de raconter tout ce qui se passe ici. Les sept mois de grève commencent à peser. Sans solidarité, ils n’y arriveront pas. Et, si cette situation touche particulièrement la Grèce, toute l’Europe est concernée".
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: Grèce
Marche antifasciste à Thessalonique contre le parti néo-nazi Aube Dorée
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Grèce
Les manifestations indiquées par Sylvestre étaient appelées par le KEERFA, mouvement "contre le racisme et la menace fasciste" ( http://www.antiracismfascism.org ) et le Syndicat des travailleurs immigrés.
Autres photos impressionnantes ici : http://reelnews.co.uk/massive-anti-fascist-protests-across-greece/ Dans le cortège du Syndicat des travailleurs immigrés, on voit quelques drapeaux de DEA (Gauche ouvrière internationaliste), une organisation qui serait bien impliquée dans les activités de défense des droits des migrants (DEA, qui provient d'une scission du SEK, est membre de Syriza).
Sur l'affiche violette qu'on voit dans toutes ces manifs, on lit (sauf erreur) :
"Dehors les neo-nazis !"
"Les travailleurs unis ne seront jamais vaincus !" (εργάτες ενωμένοι ποτέ νικημένοι)
Autres photos impressionnantes ici : http://reelnews.co.uk/massive-anti-fascist-protests-across-greece/ Dans le cortège du Syndicat des travailleurs immigrés, on voit quelques drapeaux de DEA (Gauche ouvrière internationaliste), une organisation qui serait bien impliquée dans les activités de défense des droits des migrants (DEA, qui provient d'une scission du SEK, est membre de Syriza).
Sur l'affiche violette qu'on voit dans toutes ces manifs, on lit (sauf erreur) :
"Dehors les neo-nazis !"
"Les travailleurs unis ne seront jamais vaincus !" (εργάτες ενωμένοι ποτέ νικημένοι)
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: Grèce
On peut ajouter que Petros Konstantinou, coordinateur de KEERFA, est conseiller municipal à Athènes pour Antarsya et fait partie du SEK. D'après mes infos le SEK est impliqué depuis plusieurs années dans la construction de ce mouvement.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Une bonne contribution au débat
La Grèce, l’anticapitalisme et nous : Pour une stratégie « du caillou dans la chaussure »
LCR-SAP (Belgique)
LCR-SAP (Belgique)
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Grèce
C’est là :Roseau a écrit:La Grèce, l’anticapitalisme et nous : Pour une stratégie « du caillou dans la chaussure » LCR-SAP (Belgique)
http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?view=article&id=2509:la-grece-lanticapitalisme-et-nous-pour-une-strategie-l-du-caillou-dans-la-chaussure-r&option=com_content&Itemid=53
Le SDN de la section belge adopte une démarche et une orientation politique (point 3 de sa conclusion) qui me semblent plutôt justes :
- pas d’alignement sur Syriza mais constitution d’un front commun contre la réaction ;
- développement d’une campagne autonome autour d’un programme d’urgence anticapitaliste.
(Un telle orientation adoptée jusqu'au bout impliquerait de facto un soutien sans faille aux forces anticapitalistes regroupées dans Antarsya. Toutefois, la phrase finale du texte la tempère quelque peu, en renvoyant la question de ses "formes et modalités concrètes (être ou non une composante de la coalition Syriza, appeler ou non à voter pour Syriza le 17 juin)" à un problème "tactique" que seuls les "anticapitalistes en Grèce" peuvent être en mesure de trancher...)
A noter que le même site propose une chronique toujours aussi passionnante de Grigori Panagiotis, offrant un aperçu vivant du climat social actuel, http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?option=com_sectionnav&view=article&Itemid=53&id=2490
Enfin, on y trouve une prise de position vigoureuse de Yorgos Mitralias, résolument pro-Syriza, « SYRIZA ou la percée magistrale d’une expérience unitaire unique et originale » : http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?option=com_sectionnav&view=article&Itemid=53&id=2493
L’ensemble de ces contributions présente, à mon sens, l’avantage de poser ce débat de première importance en termes clairs et précis.
Merci à Antonio Valledor d’avoir pris le temps de traduire l’échange entre le BE de la QI et OKDE.
Babel- Messages : 1081
Date d'inscription : 30/06/2011
Re: Grèce
Après la section britannique de la IV, après le bureau exécutif, voici maintenant la direction de la section belge qui fait part de la politique qu'elle recommande en Grèce... sans jamais faire référence (ou si peu) à celle définie par les instances de la section grecque.Babel a écrit:Le SDN de la section belge adopte une démarche et une orientation politique (point 3 de sa conclusion) qui me semblent plutôt justes :Roseau a écrit:La Grèce, l’anticapitalisme et nous : Pour une stratégie « du caillou dans la chaussure » LCR-SAP (Belgique)
- pas d’alignement sur Syriza mais constitution d’un front commun contre la réaction ;
- développement d’une campagne autonome autour d’un programme d’urgence anticapitaliste.
Le texte des camarades belges est sûrement très intelligent (bien que pas mal contestable) mais il serait bien plus instructif de connaître la position de l'OKDE-Spartakos. Après les élections du 6 mai, sa direction a écrit une longue résolution détaillée (avec notamment une partie sur les limites d'ANTARSYA et des propositions pour une politique de front unique) qui, à ma connaissance, n'a jamais été traduite du grec.
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: Grèce
Siriza cherche à négocier, dans le fond, puisque ils veulent rester dans la zone euro, quoique ils disent. Est qu'il peuvent réussir à renégocier? Je ne crois pas, puisque ils le font en négociant dans les hauteurs, pas en appelant le peuple à se mobiliser, les seuls qui appellent à mobilisation sont l'Aube Dorée et Antarsia.Prado a écrit:
Dans la version en anglais publiée sur le site d'ESSF, cette lettre est datée du 30 mai (elle n'est pas datée sur le site de l'OKDE). Deux jours plus tard, le 1er juin, SYRIZA annonçait que l'acte fondateur du nouveau gouvernement serait d'annuler les memorandums.
On pourrait imaginer un gouvernement capitaliste antinéolibérale comme celui de Chavez en Grèce, sans mobilisation social?. La grand force de Chavez pour faire des reformes à été l’énorme mobilisation du peuple vénézuelien qui est arrivé jusqu’à au contrôle ouvrier de l'industrie pétrolière. En plus le processus s'est fait dans un contexte de boom , ou les impérialistes avaient besoin du pétrole, pas en situation de crise comme maintenant en Grèce.
Babalu- Messages : 152
Date d'inscription : 08/09/2010
Re: Grèce
Puisque comparaison est faite, rappellons aussi que Chavez disposait d'une organisation au sein de l'armée.
C'est la mobilisation populaire de masse et cette organisation qui ont fait échouer le coup de force militaire de 2002.
C'est la mobilisation populaire de masse et cette organisation qui ont fait échouer le coup de force militaire de 2002.
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Grèce
Il a le mérite de conclure en disant qu'il ne se prononce pas sur certaines questions pour lesquelles seule une section sur place peut répondre. Bon rappel.Prado a écrit:
Le texte des camarades belges est sûrement très intelligent (bien que pas mal contestable) mais il serait bien plus instructif de connaître la position de l'OKDE-Spartakos. Après les élections du 6 mai, sa direction a écrit une longue résolution détaillée (avec notamment une partie sur les limites d'ANTARSYA et des propositions pour une politique de front unique) qui, à ma connaissance, n'a jamais été traduite du grec.
Dernière édition par Roseau le Lun 11 Juin - 15:14, édité 1 fois
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Un texte d'un camarade de l'OKDE Spartakos
[Europe Solidaire Sans Frontières] - http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article25498
Français > Europe & France > Union européenne
Grèce : la pendule
SKOUFOGLOU Manos
3 juin 2012
On constate généralement l’existence d’un certain retard entre les luttes des classes réelles et agissantes et leur traduction sur le terrain des élections. Toutefois, les récentes élections en Grèce montrent au contraire une image de l’avenir : la collision frontale entre deux camps socio-politiques : la gauche et l’extrême droite. Cette dernière ne se réduit pas à la seule montée du parti néonazi Aube Dorée, c’est aussi la partie « non-économique » du programme du parti des Grecs indépendants (une scission de la Nouvelle Démocratie qui se prononce contre le Mémorandum et accepte le programme économique de SYRIZA). Elle s’incarne aussi dans le virage à droite de la Nouvelle Démocratie (ND, démocrates-chrétiens). Pour les travailleurs, la période à venir peut se résumer par la formule : de grandes opportunités et de grands dangers.
Dans cette confrontation, la gauche a actuellement une certaine avance politique en raison de la progression de la SYRIZA, mais aussi du poids du Parti communiste (KKE). Malgré son incapacité à profiter de la dynamique vers la gauche la plus significative de ces 30 dernières années, le KKE reste un parti qui disposant d’une influence notable dans la classe ouvrière et d’une forte base militante. Sans cette dernière, le KKE aurait subi encore plus durement la dynamique en faveur de SYRIZA.
En même temps, le poids de la gauche – même s’il est historiquement surprenant – reste très fragile. La progressition électorale de SYRIZA est hors de proportion avec la faible hausse de ses adhésions. Elle reflète essentiellement un phénomène de désaffection massive contre les deux principaux partis traditionnels (ND et PASOK). Ce phénomène n’est pas, qualitativement, très différent du décollage de la Gauche démocratique (DIMAR) de Kouvelis observé dans les sondages en février dernier. Il s’agit, pour le dire brièvement, d’une surprise.
L’actuel leadership politique de la gauche est du à la légitimité morale dont elle jouit à la suite de ses luttes et de son opposition de toujours au Mémorandum. Elle semble avoir le soutien de certaines couches sociales et d’une partie des travailleurs qui ne sont pas nécessairement d’accord avec son programme, mais qui souhaitent voir mettre en œuvre une politique active contre le Mémorandum. Malgré tout, si on observe les choses sobrement, la gauche n’a pas cessé d’être minoritaire. Il s’agit certes d’une minorité importante, mais c’est encore une minorité. Il s’agit, somme toute, d’un phénomène un peu étrange : les deux tiers de la population s’opposent au mémorandum, mais seulement environ un tiers soutient la gauche.
Dire que les autres partis qui se prononcent contre le Mémorandum (les Grecs Indépendants, les Verts, l’extrême droite) ne s’y opposent pas de manière conséquente ou le font par opportunisme n’a pas beaucoup de sens. Car ce qui compte dans le résultat électoral, ce n’est pas les intentions réelles de ces partis : ils ont obtenu leurs scores pour ce qu’ils disent et non pour ce que, probablement, ils pensent secrètement.
Il y a probablement deux raisons à ce phénomène. Tout d’abord, une grande partie de la classe ouvrière n’est pas encore convaincue que le Mémorandum est quelque chose de plus qu’une conséquence de la corruption des politiciens et/ou de leur passivité contre les « Européens ». En d’autres termes, ils n’ont pas encore fait le lien entre le Mémorandum, son contenu de classe et la crise du capitalisme. La contribution de la gauche parlementaire a, dans ce sens, été médiocre car elle s’est limitée (en particulier SYRIZA et DIMAR) à une rhétorique électorale anti-Mémorandum, avec un caractère de classe vague. Deuxièmement, il y a une fraction de la classe bourgeoise grecque elle-même qui est aujourd’hui contre le Mémorandum. Kammenos, président des Grecs indépendants, et Kyrtsos, un éditeur bien connu d’un journal bourgeois qui a soutenu la candidature du parti d’extrême droite LAOS, représentent cette fraction. Mais il est également probable qu’une partie de la bourgeoisie grecque compte également sur Tsipras (leader de SYRIZA), comme ils le faisaient avec le PASOK au début des années 80. Il y a déjà, par exemple, le cas de Tragas, un célèbre journaliste et rédacteur en chef de droite, qui se prononce aujourd’hui en faveur de la SYRIZA.
Cela ne signifie évidemment pas que le succès de SYRIZA est accueilli positivement par la classe bourgeoise. Pour cette dernière, il s’agit d’une défaite. La bourgeoisie se trouve dans une impasse politique réelle. Tout d’abord, elle est fragmentée entre différents projets stratégiques qui correspondent à des fractions adverses du capital. C’est la principale raison pour laquelle Samaras (leader de la ND) tente depuis les élections de réunifier un « front de centre-droit pro-européen », avec quelques résultats mais pas encore satisfaisants (de son point de vue). Deuxièmement, elle voit son hégémonie s’affaiblir. Elle n’est plus convaincante. Ce qui a changé, en particulier depuis les élections du 6 mai, c’est qu’elle a échoué à persuader les gens, non seulement parce que son chantage politique n’a pas fonctionné, mais aussi parce que son lien politico-économique fondamental avec les travailleurs et en particulier avec la classe moyenne (le « contrat avec le peuple » informel qui sert à renouveler périodiquement sa domination) est aujourd’hui profondément fissuré. L’articulation de la petite propriété privée et de la connexion individuelle avec le pouvoir par la médiation des « politiciens », en d’autres termes le mécanisme grec d’adhésion de la conscience des masses, ne fonctionne plus. Il est probable que cette courroie de transmission n’est pas encore brisée, mais elle est profondément gripée et elle peut être définitivement cassée. Cela crée un potentiel nouveau pour renverser le pouvoir de la bourgeoisie.
La classe bourgeoise a deux choix possibles, tous deux difficiles. Le premier consiste à accepter un compromis temporaire en laissant la gauche s’exposer dans la gestion du système. Mais cela implique le danger de voir la confiance et la combativité des travailleurs augmenter à court terme. Le deuxième choix est d’instaurer un régime de type bonapartiste sauvage – « si les travailleurs ne peuvent pas être contrôlés par de bons moyens, ils le seront par de mauvais ». On doit malheureusement constater que ni le fascisme, ni une dictature ouverte ne sont des éventualités à exclure de manière absolue en Grèce. Cependant, ils signifient également de sérieux problèmes pour la bourgeoisie elle-même. Sur le plan « opérationnel », elle n’est pas préparée pour quelque chose de ce genre. Par conséquent, son premier choix serait un retour à la normalité par le biais de la collaboration de classe.
Les organisations de la classe ouvrière se sont pas plus préparées que la bourgeoisie à quelque chose de radicalement différent. La montée électorale de la gauche et les pics du mouvement de masse ne sont pas synchronisés. Le rôle de premier plan joué par la gauche réformiste depuis les élections coïncide avec une pause du mouvement de masse. Par conséquent, nous ne pouvons pas compter sur un soutien immédiat ou sur la pression exercée par de nouvelles assemblées massives, des grèves, des manifestations etc. Au moment précis où la gauche a le plus grand potentiel objectif de faire reculer le pouvoir politique du Capital, la classe ouvrière n’est pas en train de remettre directement en question son pouvoir économique.
Les travailleurs ne voient pas encore la gauche comme le bras politique de leur propre lutte de classe, mais comme un corps entier dans lequel ils « investissent » tous leurs espoirs. « On vote Tsipras, de sorte que quelque chose va changer ». En terme de conscience sociale, ce n’est malheureusement pas si différent de : « On vote Aube Dorée, de sorte que certains vont recevoir une bonne fessée au Parlement ».
Une parenthèse : je peux accepter que certaines personnes déclarent qu’elles ne savaient pas ce qu’est l’Aube Dorée, ce pourquoi elles ont voté pour ce parti. Malheureusement, le problème est que la plupart de ses électeurs savent très bien qui ils sont et ont voté en leur faveur en toute connaissance de cause. L’indifférence n’est pas une excuse, c’est, en soi, un ingrédient du fascisme. Le malentendu ou la tromperie, la « fausse conscience » de la réalité ne sont pas ses principales caractéristiques, tout comme elles ne le ne sont pas non pour tous les phénomènes politiques en général. La « fausse conscience » de la réalité est un ingrédient matériel inséparable de la réalité elle-même. Les relations matérielles à notre époque capitaliste sont ce qu’elles sont seulement en combinaison avec les formes dans lesquelles elles se reflètent dans la conscience de notre époque. Elles ne pourraient pas subsister dans la réalité sans ces formes de conscience, comme le disait Karl Korsch. Ici, la réalité et la conscience coïncident, ce qui signifie qu’affronter le fascisme est un problème beaucoup plus complexe que d’informer simplement les gens sur les crimes des néonazis.
La popularité du parlementarisme est en train de sombrer. Il est très révélateur qu’à l’occasion des élections les plus importantes de ces trois dernières décennies, le taux de participation n’a connu aucune croissance sinificative, au contraire. Il est également remarquable qu’après le 6 mai, les sondages indiquaient qu’une grande majorité de ce qu’on nomme de manière métaphysique « l’opinion publique », ne voulait pas de nouvelles élections et préférait voir se dégager un accord pour un gouvernement de coalition. A l’évidence, cela était impossible avec les partis qui avaient été aussi durement sanctionné dans les urnes.
Il y a un paradoxe supplémentaire : peu après les élections, de nombreuses personnes voulaient voir Syriza devenir le premier parti – comme l’on montré plusieurs sondages – mais en même temps, personne n’était pressé de concrétiser ce souhait puisque ces mêmes personnes ne voulaient pas de nouvelles élections. Cela signifie qu’il y a peu d’espoir à avoir sur le terrain électoral. L’indifférence ou la haine envers le parlementarisme n’apporteront cependant pas des conséquences progressistes, comme l’espèrent les anarchistes. Le problème, avec la désillusion populaire envers la démocratie parlementaire, c’est qu’il ne s’agit pas seulement d’une désaffection avec le parlementarisme, mais aussi avec la démocratie tout court. Comme le disait Trotsky, tant que ne surgiront pas de nouvelles structures de pouvoir auto-organisés qui permettent d’articuler le rejet du parlementarisme avec l’espérance révolutionnaire, le fascisme recueillera les fruits du désespoir de la petite-bourgeoisie. « Stohos », un journal fasciste, a écrit en première page, sans aucune auto-censure : « La solution ne viendra pas des élections, mais des casernes de l’armée ».
Dans un tel contexte, il est réaliste de penser qu’un gouvernement de gauche, ou avec la participation de la gauche, puisse jouer un rôle important. Le second cas de figure, celui d’un gouvernement de collaboration de classe, serait d’évidence tellement catastrophique que ce serait une perte de temps de l’analyser en détail. Il suffit seulement de rappeler que Syriza n’est pas, par principe, opposée à former un tel gouvernement, comme le prouve, avant et après les élections, sa manière de s’adresser aux Grecs Indépendants, qui se situent à sa droite. Son mot d’ordre est « Pour un gouvernement de coalition où les forces de gauche seront centrales ».
Mais, que dire par rapport à un gouvernement de la gauche, ou plutôt de La Gauche (les majuscules ont leur importance comme nous le verrons plus loin) ? Il est clair que nous ne pouvons pas être indifférents face à une victoire partielle (car nous savons bien que les choses ne changeront pas réellement par le vote), mais importante, qui s’exprimerait par la constitution d’un gouvernement de gauche dirigé par Syriza. Ce serait, avant toute chose, une vengeance historique contre la droite. Mais, en analysant les choses plus sobrement, il faut se rendre compte que les conséquences positives d’un tel gouvernement pour un projet d’émancipation du prolétariat ne sont pas si certaines. Nous trouvons dans l’histoire une série d’exemples de gouvernements de gauche qui ont joué un rôle positif pour le développement de processus révolutionnaires (par exemple le Nicaragua ou le Chili, malgré leurs limites) et autant d’autres qui n’ont servis qu’à la conciliation de classe ou, pire encore, à la répression directe de processus révolutionnaires (comme ce fut le cas en Allemagne après la Première guerre mondiale et en France et en Italie après la Seconde).
Un gouvernement réformiste de gauche est un pendule qui, en conséquence des pressions auxquelles il est soumi, s’inclinera vers des positions progressistes ou bien réactionnaires. Au plus il sera fortement tiré d’un côté, au plus il oscillera fortement vers le côté opposé si on le lache. Si un gouvernement de ce type échape à tout contrôle de ceux qui le tirent vers la gauche, alors que « Dieu nous aide » ! La gauche est seulement « La Gauche » aux yeux de ceux qui sont traditionnellement de gauche, ce qui signifie qu’elle a une force morale (avec majuscule) seulement pour eux. En cas d’échec ou de trahison d’un gouvernement de gauche, la déception amènera tous les autres à se convaincre qu’ « ils sont tous pareils ». Fasse que la chance soit avec nous dans ce cas, car les seuls qui ne seront pas assimilés à cet échec et à cette trahison, ce seront les mercenaires prétoriens de l’Aube Dorée.
Un gouvernement de gauche est, sans aucun doute, une meilleure chose pour le mouvement ouvrier qu’un gouvernement de droite. Mais cela doit être aussi considéré à partir d’une perspective historique. La maturation des conditions objectives et, surtout, des conditions subjectives pour la révolution n’est pas un processus cumulatif. Nous devons évaluer la perspective d’un gouvernement de gauche à partir de ce critère et, pour le moment, on ne peut en tracer avec certitude. Il est vrai qu’un gouvernement populaire de Syriza éleverait à court terme la confiance des travailleurs en eux-mêmes. D’autre part, il n’y a pas grand-chose à dire sur son programme ; il se situe à droite du programme du PASOK quand ce dernier est arrivé au pouvoir en 1981. Le PASOK, au moins, avait mené à bien certaines nationalisations de grandes entreprises. Syriza parlait également de nationalisations avant les élections du 6 mai, mais elles se retrouvent exclues de son « plan d’urgence » et par les conditions posées par ses alliés potentiels pour former un gouvernement. Aujourd’hui, elle ne parle plus que d’un « contrôle public » des banques qui ont été généreusement financées par l’Etat, et cela semble même y compris aller trop loin dans l’agenda de Tsipras, qui se présente disposé à s’engager à « faire tout ce qui est possible pour que le pays se maintienne dans la zone euro ». Cet engagement politique semble être nécessaire pour faire place aux ex membres de la bureaucratie du PASOK qui sont entrés, ou qui vont entrer, au sein de Syriza (comme Katseli, ancien ministre de l’Economie et plus tard collaborateur au plan d’ajustement de Papandréou, ou encore Kotsakas, lui aussi ex ministre et proche collaborateur de Tsohatzopoulus, actuellement en prison pour corruption).
La situation d’impasse actuelle du mouvement de masse, ainsi que la nécessité de négocier avec DIMAR et/ou le PASOK, restreignent sévèrement le potentiel progressiste qu’aurait un gouvernement dirigé par Syriza. C’est pour cela que nous ne pensons pas que notre principal mot d’ordre pour la prochaine période doit être « Pour un gouvernement de gauche », bien que nous ne soyons pas indifférents face à une telle perspective. Mais l’émergence d’un tel gouvernement ne dépendera pas de nous (OKDE et Antarsya). Ce que doivent être nos tâches, au cas où un tel gouvernement vient réellement à surgir, c’est de tirer le pendule de la lutte des classes vers la gauche, de soutenir toutes les mesures progressistes et toutes les nouvelles revendications des travailleurs et de nous opposer à toutes les mesures réactionnaires.
Sans aucun doute, l’orientation de certains secteurs militants en faveur d’un gouvernement de gauche, en tant que « solution » immédiate, est en grande partie le reflet de la crainte et de la répulsion que nous ressentons tous face au spectre du fascisme. Mais il n’est pas tout à fait certain, bien que cela puisse servir de réconfort, qu’un tel gouvernement puisse constituer une barrière effective contre le fascisme. Il faut prendre en compte le fait que, dans la majorité des cas où le fascisme s’est imposé dans l’histoire, il l’a fait après la défaite ou la dégénerescence de gouvernements de gauche ou de gouvernements progressistes avec la participation de la gauche. Il y a même un exemple très récent en Grèce, celui de Kaminis, social-démocrate de gauche et actuel maire d’Athènes, qui avait reçu le soutien d’une partie de la gauche (au premier et au second tour) afin de freiner la montée de l’Aube Dorée aux élections municipales de 2010 (où elle a finalement obtenu 5,3% des votes). Es-ce que cela a fonctionné ? Un an et demi plus tard, les néonazis ont pratiquement doublé leur score à Athènes.
En obtenant 1,2%, Antarsya n’a pas échoué aux dernières élections si nous considérons qu’aux élections parlementaires de 2009 elle faisait 0,36%, ce qui constituait déjà à l’époque le meilleur résultat obtenu par les anticapitalistes. Le résultat obtenu le 6 mai dernier est, par contre, en dessous du potentiel de la période telle actuelle, bien que le fait que nous ayons eu à souffrir du « vote utile » en faveur de Syriza constitue une excuse logique. En tous les cas, il serait erroné d’affirmer que le maintien d’une candidature autonome d’Antarsya était une erreur. Il n’y a pas de différence de critère essentielle pour évaluer cette décision après les élections comme avant ces dernières vu que l’objectif de la candidature d’Antarsya était de se construire comme organisation, de stabiliser sa base militante, de propager son programme, etc. Si nous voulons faire un bilan adéquat, nous ne pouvons pas seulement aborder les choses en termes de pourcentages, de chiffres, mais aussi avec des élements plus importants par rapport à la lutte des classes, comme par exemple le fait qu’au cours de notre campagne nous avons gagné l’adhésion du président du syndicat du métro d’Athènes. La raison de maintenir notre indépendance était plus profonde que l’estimation selon laquelle nous n’aurions pas un nombre suffisant de sièges pour former un hypothétique gouvernement des gauches...
Pour conclure : les résultats électoraux du 6 mai sont un tremblement de terre politique. Ils ont révélé et élargi la profonde brèche ouverte par une situation dont le potentiel est véritablement révolutionnaire – et non pas pour un futur indéterminé, mais bien pour la période qui est devant nous. La profondeur de cette brèche suscite le vertige et la crainte, y compris dans nos rangs – et c’est le cas pour moi. Car un abîme peut cacher le meilleur comme le pire, et accentuer les contradictions jusqu’au point d’ébullition a toujours été un projet risqué. Il est beaucoup plus risqué que la solution « douce » et progressive d’un gouvernement de gauche. Mais si nous pensons réellement que la révolution est une possibilité, la première chose que nous devons faire est de prendre le risque d’accentuer les contradictions politiques et sociales.
En guise de récapitulatif, et pour revenir au pendule :
1. La lutte entre la gauche et la droite correspond, en dernière instance, à la lutte entre la classe ouvrière et la bourgeoisie. « En dernière instance » ne signifie pas toujours « directement ou de manière visible ». Ce que nous (OKDE, Antarsya, les communistes révolutionnaires) devons faire, c’est montrer cette connexion à l’avant-garde. Cela signifie : le retour immédiat dans les rues pour l’action (grèves, occupations, etc.) mais aussi pour des manifestations politiques – contre les gouvernements de collaboration de classe, pour le retrait immédiat du Mémorandum et l’annulation de la dette publique, ou pour n’importe quelle autre revendication politique nécessaire. Tel doit être notre rôle, aussi bien avant qu’après les élections, et non comme une manière d’aller à la « pêche aux voix »
2. L’unité entre les travailleurs autochtones et immigrés est une priorité que Syriza est en train de laisser de côté pour de ne pas effrayer une partie de l’électorat. Il est interpellant que la réaction du maire de Patras (qui fut soutenu dans le passé par Syriza) devant le récent pogrom raciste contre les immigrés a été demander plus de patrouilles policières contre l’immigration illégale. Dans ce sens, la propagande de solidarité n’est pas suffisante (bien que cela reste utile). Nous devons montrer, dans la pratique, que les intérêts des travailleurs grecs et des étrangers sont les mêmes (malgré le fait que, parfois, ces derniers sont opprimés par les premiers). Cela implique de mobiliser cette partie invisible de la classe ouvrière ; les immigrés eux-mêmes. Leur lutte démontrera que nous avons un ennemi commun, le patronat et tout en permettant la possibilité d’améliorer leurs droits et leurs conditions de vie, cela affaiblira les tensions au sein de la classe ouvrière. Il faut, dans la pratique, se centrer plus sur l’immigration. En outre, cela sera beaucoup plus efficace pour freiner le fascisme.
3. Antarsya est aujourd’hui suffisamment grande et visible que pour proposer un véritable front unique de la classe ouvrière dans son sens originel : ni comme une coalition électorale ou un élément d’appoint du réformisme, ni comme une simple convergence dans les luttes. Nous devons proposer clairement, explicitement et publiquement un accord d’action commune qui devra inclure les partis de gauche (KKE, SYRIZA), les organisations communistes extra-parlementaires, les groupes anarchistes, les collectifs, les syndicats… Nous n’avons pas besoin – et nous ne pouvons pas avoir – d’un programme commun, mais nous pouvons nous rassembler autour de 5 ou 6 points : autodéfense commune contre les néonazis et action conjointe antifasciste ; organisation commune des grèves, des occupations et des réquisitions sous contrôle ouvrier des entreprises qui ferment ; participation conjointe dans les assemblées ou dans les comités sur les lieux de travail et dans les quartiers ; campagnes de solidarité internationale. C’est d’une telle proposition dont nous avons urgemment besoin, et non d’un virtuel consensus gouvernemental qui ne peut être viable, et qui ne serait par conséquent que propagandiste.
4. Le programme de transition que nous avançons est un contre-poids suffisant face au projet réformiste d’un hypothétique et peu probable gouvernement de gauche. Cependant, ce n’est pas encore assez concret. Nous devons démontrer qu’une alternative révolutionnaire est possible. Cela est indispensable afin de convaincre face aux arguments « possibilistes » auxquels Syriza commence à succomber – et y compris à propager. Nous devons démontrer que le rejet unilatéral du Mémorandum impliquera un isolement international et que l’expropriation des banques provoquera la démission de membres du gouvernement. Nous devons étudier d’autres exemples historiques des luttes des exploités et des opprimés : les mesures révolutionnaires en Russie, à Cuba ou en Chine ; l’autogestion en Algérie et en Amérique latine et y compris les mesures progressites prises par Chavez. Tout cela doit être fait dans le but de marquer dans les consciences le potentiel authentique de l’utopie. Comment est-ce que la solidarité internationale pourra pratiquement éliminer les pressions exercées par la bourgeoisie internationale ? Comment obtenir les expropriations sans indemnisation et sans provoquer un effondrement ? Qu’es-ce qu’exactement le contrôle ouvrier et comment fonctionne-t-il ? Cette dernière question, en particulier, est un élément clé pour montrer la différence essentielle entre un gouvernement radical de gauche et un gouvernement révolutionnaire des travailleurs.
5. L’UE et l’union monétaire sont en train de devenir des questions cruciales dans un sens fondamental : une monnaie, un concept de marché anonyme, une force mystique et fétiche sont utilisés pour semer la terreur et mettre un terme aux revendications et aux besoins élémentaires des opprimés. Syriza accepte totalement ce chantage et facilite la tâche de la bourgeoisie dans sa volonté de masquer les véritables oppositions : classe ouvrière contre capital, gauche contre droite, Mémorandum contre anti-Mémorandum, tout est réduit à une question de « pro » et d’« anti » européistes. « La réorientation vers l’Europe » se transforme en serment de loyauté au système. Syriza fait ce serment au moment précis où la zone euro et la monnaie commune sont plus que jamais des mécanismes du capitalisme pour imposer son austérité. Notre tâche ne consiste pas à démontrer avec des critères capitalistes d’économie politique qu’une monnaie nationale est meilleure, mais bien d’expliquer qu’il est faisable, et même souhaitable, de brandir cette épée (la sortie de l’euro) au dessus de nos têtes.
6. Le dernier point du bilan du pendule dépend des conditions objectives, mais il se décide finalement par les conditions objectives. Nous avons plus que jamais besoin de puissantes organisations politiques collectives capables d’agir sur les sables mouvants de la conscience sociale. Je parle ici des partis révolutionnaires. Même s’il y a eu, dans des circonstances historiques déterminées, des révolutions victorieuses dirigées par des partis qui n’étaient pas suffisamment ou consciemment révolutionnaires (Cuba, Chine), il n’y a pas de situation révolutionnaire qui puisse se résoudre de manière révolutionnaire en l’absence de partis indépendants des travailleurs, clairement à gauche et en confrontation avec un gouvernement réformiste. Ces organisations sont une condition indispensable pour un processus révolutionnaire victorieux. D’autre part, elles sont également une condition fondamentale pour résister contre le développement rapide de l’extrême droite au cas où un gouvernement de gauche faillirait à ses tâches. En Grèce, nous pensons que la création d’un tel parti dépendra principalement du développement d’Antarsya (dans son ensemble, ou plus probablement au travers de scissions et de fusions avec d’autres courants encore). Il est donc crucial qu’Antarsya existe comme formation autonome.
Paradoxalement, le score électoral n’est pas important, les structures des sujets politiques se construisent en participant aux élections. Si on ne participe pas, les masses pensent qu’on n’existe pas. Cela n’est pas nécessairement une bonne chose, mais c’est encore ainsi. Antarsya est parvenue à évoluer d’un forum de la gauche extra-parlementaire à un courant politique visible et réel dans la classe ouvrière, non seulement grâce à son rôle dans la direction des luttes, mais aussi grâce à ses campagnes électorales. Il est probable qu’Antarsya n’obtienne pas un bon résultat au scrutin du 17 juin. Cependant, je crois que si elle ne se présente pas de manière indépendante, elle aura un problème pour la continuité de sa propre existence. Ce qui est en jeu, ce n’est pas la crédibilité d’Antarsya en général, mais bien la préservation de l’unité de ses plus de 3.000 militants d’avant-garde. Dans le cas contraire, nous risquerions de perdre ce que nous avons construit pendant des années de dur labeur. Les élections peuvent être une tâche ingrate, mais il faut la mener à bien.
7. Il y a une autre raison pour laquelle je suis extrêmement sceptique par rapport à une collaboration électorale ou pour le choix d’un vote « critique » en faveur de Syriza, bien qu’on ne puisse nier qu’une telle proposition s’appuie sur des arguments pertinents. Tous les votes ont la même valeur dans les urnes. Il est prouvé qu’il n’y a pas de plus grande illusion que celle de croire que l’on peut soutenir un parti sans se faire aucune illusion. Par illusion, nous faisons référence à l’influence que l’on donne à un parti pour la seule crédibilité qu’offrent ses soutiens.
Je suis persuadé qu’Antarsya, malgré ses erreurs bureaucratiques, exerce sur Syriza une pression bien plus efficace en restant à l’extérieur que les organisations anticapitalistes qui ont décidé de faire partie de son processus de « recomposition » ou qui pratiquent l’entrisme dans cette coalition. Quelles sont les organisations les plus influentes sur Tsipras après les dernières élections ? Le PASOK nous offre un exemple historique des désillusions du passé qui ont coûté très cher au trotskysme ; le concept selon lequel le réformisme peut réellement changer de cap, ou, du moins, se discréditer aux yeux de ses partisans au travers d’une activité et par la pression internes de groupes révolutionnaires sur ses directions bureaucratiques. Il est paradoxal qu’un courant qui est né en tentant de construire des partis véritablement révolutionnaires a souvent sous estimé l’importance de l’indépendance des partis révolutionnaires – je ne parle pas tant du programme, mais de la tâche difficile de l’organiser comme un sujet collectif autonome.
On pourrait penser qu’il ne s’agit là que de mots. Mais la théorie, les mots, sont la même chose que la pratique : c’est un aspect de la réalité non moins « réel » que ce que nous appelons habituellement le « matériel ». Pour le dire comme Marx ; ils ne sont pas « en dehors du monde, pas plus que le cerveau d’un homme serait en dehors de lui parce qu’il ne se trouve pas dans son estomac. »
Manos Skoufoglou, juin 2012
Membre de l’OKDE-Spartakos et d’Antarsya
* Traduction : Ataulfo Riera
Français > Europe & France > Union européenne
Grèce : la pendule
SKOUFOGLOU Manos
3 juin 2012
On constate généralement l’existence d’un certain retard entre les luttes des classes réelles et agissantes et leur traduction sur le terrain des élections. Toutefois, les récentes élections en Grèce montrent au contraire une image de l’avenir : la collision frontale entre deux camps socio-politiques : la gauche et l’extrême droite. Cette dernière ne se réduit pas à la seule montée du parti néonazi Aube Dorée, c’est aussi la partie « non-économique » du programme du parti des Grecs indépendants (une scission de la Nouvelle Démocratie qui se prononce contre le Mémorandum et accepte le programme économique de SYRIZA). Elle s’incarne aussi dans le virage à droite de la Nouvelle Démocratie (ND, démocrates-chrétiens). Pour les travailleurs, la période à venir peut se résumer par la formule : de grandes opportunités et de grands dangers.
Dans cette confrontation, la gauche a actuellement une certaine avance politique en raison de la progression de la SYRIZA, mais aussi du poids du Parti communiste (KKE). Malgré son incapacité à profiter de la dynamique vers la gauche la plus significative de ces 30 dernières années, le KKE reste un parti qui disposant d’une influence notable dans la classe ouvrière et d’une forte base militante. Sans cette dernière, le KKE aurait subi encore plus durement la dynamique en faveur de SYRIZA.
En même temps, le poids de la gauche – même s’il est historiquement surprenant – reste très fragile. La progressition électorale de SYRIZA est hors de proportion avec la faible hausse de ses adhésions. Elle reflète essentiellement un phénomène de désaffection massive contre les deux principaux partis traditionnels (ND et PASOK). Ce phénomène n’est pas, qualitativement, très différent du décollage de la Gauche démocratique (DIMAR) de Kouvelis observé dans les sondages en février dernier. Il s’agit, pour le dire brièvement, d’une surprise.
L’actuel leadership politique de la gauche est du à la légitimité morale dont elle jouit à la suite de ses luttes et de son opposition de toujours au Mémorandum. Elle semble avoir le soutien de certaines couches sociales et d’une partie des travailleurs qui ne sont pas nécessairement d’accord avec son programme, mais qui souhaitent voir mettre en œuvre une politique active contre le Mémorandum. Malgré tout, si on observe les choses sobrement, la gauche n’a pas cessé d’être minoritaire. Il s’agit certes d’une minorité importante, mais c’est encore une minorité. Il s’agit, somme toute, d’un phénomène un peu étrange : les deux tiers de la population s’opposent au mémorandum, mais seulement environ un tiers soutient la gauche.
Dire que les autres partis qui se prononcent contre le Mémorandum (les Grecs Indépendants, les Verts, l’extrême droite) ne s’y opposent pas de manière conséquente ou le font par opportunisme n’a pas beaucoup de sens. Car ce qui compte dans le résultat électoral, ce n’est pas les intentions réelles de ces partis : ils ont obtenu leurs scores pour ce qu’ils disent et non pour ce que, probablement, ils pensent secrètement.
Il y a probablement deux raisons à ce phénomène. Tout d’abord, une grande partie de la classe ouvrière n’est pas encore convaincue que le Mémorandum est quelque chose de plus qu’une conséquence de la corruption des politiciens et/ou de leur passivité contre les « Européens ». En d’autres termes, ils n’ont pas encore fait le lien entre le Mémorandum, son contenu de classe et la crise du capitalisme. La contribution de la gauche parlementaire a, dans ce sens, été médiocre car elle s’est limitée (en particulier SYRIZA et DIMAR) à une rhétorique électorale anti-Mémorandum, avec un caractère de classe vague. Deuxièmement, il y a une fraction de la classe bourgeoise grecque elle-même qui est aujourd’hui contre le Mémorandum. Kammenos, président des Grecs indépendants, et Kyrtsos, un éditeur bien connu d’un journal bourgeois qui a soutenu la candidature du parti d’extrême droite LAOS, représentent cette fraction. Mais il est également probable qu’une partie de la bourgeoisie grecque compte également sur Tsipras (leader de SYRIZA), comme ils le faisaient avec le PASOK au début des années 80. Il y a déjà, par exemple, le cas de Tragas, un célèbre journaliste et rédacteur en chef de droite, qui se prononce aujourd’hui en faveur de la SYRIZA.
Cela ne signifie évidemment pas que le succès de SYRIZA est accueilli positivement par la classe bourgeoise. Pour cette dernière, il s’agit d’une défaite. La bourgeoisie se trouve dans une impasse politique réelle. Tout d’abord, elle est fragmentée entre différents projets stratégiques qui correspondent à des fractions adverses du capital. C’est la principale raison pour laquelle Samaras (leader de la ND) tente depuis les élections de réunifier un « front de centre-droit pro-européen », avec quelques résultats mais pas encore satisfaisants (de son point de vue). Deuxièmement, elle voit son hégémonie s’affaiblir. Elle n’est plus convaincante. Ce qui a changé, en particulier depuis les élections du 6 mai, c’est qu’elle a échoué à persuader les gens, non seulement parce que son chantage politique n’a pas fonctionné, mais aussi parce que son lien politico-économique fondamental avec les travailleurs et en particulier avec la classe moyenne (le « contrat avec le peuple » informel qui sert à renouveler périodiquement sa domination) est aujourd’hui profondément fissuré. L’articulation de la petite propriété privée et de la connexion individuelle avec le pouvoir par la médiation des « politiciens », en d’autres termes le mécanisme grec d’adhésion de la conscience des masses, ne fonctionne plus. Il est probable que cette courroie de transmission n’est pas encore brisée, mais elle est profondément gripée et elle peut être définitivement cassée. Cela crée un potentiel nouveau pour renverser le pouvoir de la bourgeoisie.
La classe bourgeoise a deux choix possibles, tous deux difficiles. Le premier consiste à accepter un compromis temporaire en laissant la gauche s’exposer dans la gestion du système. Mais cela implique le danger de voir la confiance et la combativité des travailleurs augmenter à court terme. Le deuxième choix est d’instaurer un régime de type bonapartiste sauvage – « si les travailleurs ne peuvent pas être contrôlés par de bons moyens, ils le seront par de mauvais ». On doit malheureusement constater que ni le fascisme, ni une dictature ouverte ne sont des éventualités à exclure de manière absolue en Grèce. Cependant, ils signifient également de sérieux problèmes pour la bourgeoisie elle-même. Sur le plan « opérationnel », elle n’est pas préparée pour quelque chose de ce genre. Par conséquent, son premier choix serait un retour à la normalité par le biais de la collaboration de classe.
Les organisations de la classe ouvrière se sont pas plus préparées que la bourgeoisie à quelque chose de radicalement différent. La montée électorale de la gauche et les pics du mouvement de masse ne sont pas synchronisés. Le rôle de premier plan joué par la gauche réformiste depuis les élections coïncide avec une pause du mouvement de masse. Par conséquent, nous ne pouvons pas compter sur un soutien immédiat ou sur la pression exercée par de nouvelles assemblées massives, des grèves, des manifestations etc. Au moment précis où la gauche a le plus grand potentiel objectif de faire reculer le pouvoir politique du Capital, la classe ouvrière n’est pas en train de remettre directement en question son pouvoir économique.
Les travailleurs ne voient pas encore la gauche comme le bras politique de leur propre lutte de classe, mais comme un corps entier dans lequel ils « investissent » tous leurs espoirs. « On vote Tsipras, de sorte que quelque chose va changer ». En terme de conscience sociale, ce n’est malheureusement pas si différent de : « On vote Aube Dorée, de sorte que certains vont recevoir une bonne fessée au Parlement ».
Une parenthèse : je peux accepter que certaines personnes déclarent qu’elles ne savaient pas ce qu’est l’Aube Dorée, ce pourquoi elles ont voté pour ce parti. Malheureusement, le problème est que la plupart de ses électeurs savent très bien qui ils sont et ont voté en leur faveur en toute connaissance de cause. L’indifférence n’est pas une excuse, c’est, en soi, un ingrédient du fascisme. Le malentendu ou la tromperie, la « fausse conscience » de la réalité ne sont pas ses principales caractéristiques, tout comme elles ne le ne sont pas non pour tous les phénomènes politiques en général. La « fausse conscience » de la réalité est un ingrédient matériel inséparable de la réalité elle-même. Les relations matérielles à notre époque capitaliste sont ce qu’elles sont seulement en combinaison avec les formes dans lesquelles elles se reflètent dans la conscience de notre époque. Elles ne pourraient pas subsister dans la réalité sans ces formes de conscience, comme le disait Karl Korsch. Ici, la réalité et la conscience coïncident, ce qui signifie qu’affronter le fascisme est un problème beaucoup plus complexe que d’informer simplement les gens sur les crimes des néonazis.
La popularité du parlementarisme est en train de sombrer. Il est très révélateur qu’à l’occasion des élections les plus importantes de ces trois dernières décennies, le taux de participation n’a connu aucune croissance sinificative, au contraire. Il est également remarquable qu’après le 6 mai, les sondages indiquaient qu’une grande majorité de ce qu’on nomme de manière métaphysique « l’opinion publique », ne voulait pas de nouvelles élections et préférait voir se dégager un accord pour un gouvernement de coalition. A l’évidence, cela était impossible avec les partis qui avaient été aussi durement sanctionné dans les urnes.
Il y a un paradoxe supplémentaire : peu après les élections, de nombreuses personnes voulaient voir Syriza devenir le premier parti – comme l’on montré plusieurs sondages – mais en même temps, personne n’était pressé de concrétiser ce souhait puisque ces mêmes personnes ne voulaient pas de nouvelles élections. Cela signifie qu’il y a peu d’espoir à avoir sur le terrain électoral. L’indifférence ou la haine envers le parlementarisme n’apporteront cependant pas des conséquences progressistes, comme l’espèrent les anarchistes. Le problème, avec la désillusion populaire envers la démocratie parlementaire, c’est qu’il ne s’agit pas seulement d’une désaffection avec le parlementarisme, mais aussi avec la démocratie tout court. Comme le disait Trotsky, tant que ne surgiront pas de nouvelles structures de pouvoir auto-organisés qui permettent d’articuler le rejet du parlementarisme avec l’espérance révolutionnaire, le fascisme recueillera les fruits du désespoir de la petite-bourgeoisie. « Stohos », un journal fasciste, a écrit en première page, sans aucune auto-censure : « La solution ne viendra pas des élections, mais des casernes de l’armée ».
Dans un tel contexte, il est réaliste de penser qu’un gouvernement de gauche, ou avec la participation de la gauche, puisse jouer un rôle important. Le second cas de figure, celui d’un gouvernement de collaboration de classe, serait d’évidence tellement catastrophique que ce serait une perte de temps de l’analyser en détail. Il suffit seulement de rappeler que Syriza n’est pas, par principe, opposée à former un tel gouvernement, comme le prouve, avant et après les élections, sa manière de s’adresser aux Grecs Indépendants, qui se situent à sa droite. Son mot d’ordre est « Pour un gouvernement de coalition où les forces de gauche seront centrales ».
Mais, que dire par rapport à un gouvernement de la gauche, ou plutôt de La Gauche (les majuscules ont leur importance comme nous le verrons plus loin) ? Il est clair que nous ne pouvons pas être indifférents face à une victoire partielle (car nous savons bien que les choses ne changeront pas réellement par le vote), mais importante, qui s’exprimerait par la constitution d’un gouvernement de gauche dirigé par Syriza. Ce serait, avant toute chose, une vengeance historique contre la droite. Mais, en analysant les choses plus sobrement, il faut se rendre compte que les conséquences positives d’un tel gouvernement pour un projet d’émancipation du prolétariat ne sont pas si certaines. Nous trouvons dans l’histoire une série d’exemples de gouvernements de gauche qui ont joué un rôle positif pour le développement de processus révolutionnaires (par exemple le Nicaragua ou le Chili, malgré leurs limites) et autant d’autres qui n’ont servis qu’à la conciliation de classe ou, pire encore, à la répression directe de processus révolutionnaires (comme ce fut le cas en Allemagne après la Première guerre mondiale et en France et en Italie après la Seconde).
Un gouvernement réformiste de gauche est un pendule qui, en conséquence des pressions auxquelles il est soumi, s’inclinera vers des positions progressistes ou bien réactionnaires. Au plus il sera fortement tiré d’un côté, au plus il oscillera fortement vers le côté opposé si on le lache. Si un gouvernement de ce type échape à tout contrôle de ceux qui le tirent vers la gauche, alors que « Dieu nous aide » ! La gauche est seulement « La Gauche » aux yeux de ceux qui sont traditionnellement de gauche, ce qui signifie qu’elle a une force morale (avec majuscule) seulement pour eux. En cas d’échec ou de trahison d’un gouvernement de gauche, la déception amènera tous les autres à se convaincre qu’ « ils sont tous pareils ». Fasse que la chance soit avec nous dans ce cas, car les seuls qui ne seront pas assimilés à cet échec et à cette trahison, ce seront les mercenaires prétoriens de l’Aube Dorée.
Un gouvernement de gauche est, sans aucun doute, une meilleure chose pour le mouvement ouvrier qu’un gouvernement de droite. Mais cela doit être aussi considéré à partir d’une perspective historique. La maturation des conditions objectives et, surtout, des conditions subjectives pour la révolution n’est pas un processus cumulatif. Nous devons évaluer la perspective d’un gouvernement de gauche à partir de ce critère et, pour le moment, on ne peut en tracer avec certitude. Il est vrai qu’un gouvernement populaire de Syriza éleverait à court terme la confiance des travailleurs en eux-mêmes. D’autre part, il n’y a pas grand-chose à dire sur son programme ; il se situe à droite du programme du PASOK quand ce dernier est arrivé au pouvoir en 1981. Le PASOK, au moins, avait mené à bien certaines nationalisations de grandes entreprises. Syriza parlait également de nationalisations avant les élections du 6 mai, mais elles se retrouvent exclues de son « plan d’urgence » et par les conditions posées par ses alliés potentiels pour former un gouvernement. Aujourd’hui, elle ne parle plus que d’un « contrôle public » des banques qui ont été généreusement financées par l’Etat, et cela semble même y compris aller trop loin dans l’agenda de Tsipras, qui se présente disposé à s’engager à « faire tout ce qui est possible pour que le pays se maintienne dans la zone euro ». Cet engagement politique semble être nécessaire pour faire place aux ex membres de la bureaucratie du PASOK qui sont entrés, ou qui vont entrer, au sein de Syriza (comme Katseli, ancien ministre de l’Economie et plus tard collaborateur au plan d’ajustement de Papandréou, ou encore Kotsakas, lui aussi ex ministre et proche collaborateur de Tsohatzopoulus, actuellement en prison pour corruption).
La situation d’impasse actuelle du mouvement de masse, ainsi que la nécessité de négocier avec DIMAR et/ou le PASOK, restreignent sévèrement le potentiel progressiste qu’aurait un gouvernement dirigé par Syriza. C’est pour cela que nous ne pensons pas que notre principal mot d’ordre pour la prochaine période doit être « Pour un gouvernement de gauche », bien que nous ne soyons pas indifférents face à une telle perspective. Mais l’émergence d’un tel gouvernement ne dépendera pas de nous (OKDE et Antarsya). Ce que doivent être nos tâches, au cas où un tel gouvernement vient réellement à surgir, c’est de tirer le pendule de la lutte des classes vers la gauche, de soutenir toutes les mesures progressistes et toutes les nouvelles revendications des travailleurs et de nous opposer à toutes les mesures réactionnaires.
Sans aucun doute, l’orientation de certains secteurs militants en faveur d’un gouvernement de gauche, en tant que « solution » immédiate, est en grande partie le reflet de la crainte et de la répulsion que nous ressentons tous face au spectre du fascisme. Mais il n’est pas tout à fait certain, bien que cela puisse servir de réconfort, qu’un tel gouvernement puisse constituer une barrière effective contre le fascisme. Il faut prendre en compte le fait que, dans la majorité des cas où le fascisme s’est imposé dans l’histoire, il l’a fait après la défaite ou la dégénerescence de gouvernements de gauche ou de gouvernements progressistes avec la participation de la gauche. Il y a même un exemple très récent en Grèce, celui de Kaminis, social-démocrate de gauche et actuel maire d’Athènes, qui avait reçu le soutien d’une partie de la gauche (au premier et au second tour) afin de freiner la montée de l’Aube Dorée aux élections municipales de 2010 (où elle a finalement obtenu 5,3% des votes). Es-ce que cela a fonctionné ? Un an et demi plus tard, les néonazis ont pratiquement doublé leur score à Athènes.
En obtenant 1,2%, Antarsya n’a pas échoué aux dernières élections si nous considérons qu’aux élections parlementaires de 2009 elle faisait 0,36%, ce qui constituait déjà à l’époque le meilleur résultat obtenu par les anticapitalistes. Le résultat obtenu le 6 mai dernier est, par contre, en dessous du potentiel de la période telle actuelle, bien que le fait que nous ayons eu à souffrir du « vote utile » en faveur de Syriza constitue une excuse logique. En tous les cas, il serait erroné d’affirmer que le maintien d’une candidature autonome d’Antarsya était une erreur. Il n’y a pas de différence de critère essentielle pour évaluer cette décision après les élections comme avant ces dernières vu que l’objectif de la candidature d’Antarsya était de se construire comme organisation, de stabiliser sa base militante, de propager son programme, etc. Si nous voulons faire un bilan adéquat, nous ne pouvons pas seulement aborder les choses en termes de pourcentages, de chiffres, mais aussi avec des élements plus importants par rapport à la lutte des classes, comme par exemple le fait qu’au cours de notre campagne nous avons gagné l’adhésion du président du syndicat du métro d’Athènes. La raison de maintenir notre indépendance était plus profonde que l’estimation selon laquelle nous n’aurions pas un nombre suffisant de sièges pour former un hypothétique gouvernement des gauches...
Pour conclure : les résultats électoraux du 6 mai sont un tremblement de terre politique. Ils ont révélé et élargi la profonde brèche ouverte par une situation dont le potentiel est véritablement révolutionnaire – et non pas pour un futur indéterminé, mais bien pour la période qui est devant nous. La profondeur de cette brèche suscite le vertige et la crainte, y compris dans nos rangs – et c’est le cas pour moi. Car un abîme peut cacher le meilleur comme le pire, et accentuer les contradictions jusqu’au point d’ébullition a toujours été un projet risqué. Il est beaucoup plus risqué que la solution « douce » et progressive d’un gouvernement de gauche. Mais si nous pensons réellement que la révolution est une possibilité, la première chose que nous devons faire est de prendre le risque d’accentuer les contradictions politiques et sociales.
En guise de récapitulatif, et pour revenir au pendule :
1. La lutte entre la gauche et la droite correspond, en dernière instance, à la lutte entre la classe ouvrière et la bourgeoisie. « En dernière instance » ne signifie pas toujours « directement ou de manière visible ». Ce que nous (OKDE, Antarsya, les communistes révolutionnaires) devons faire, c’est montrer cette connexion à l’avant-garde. Cela signifie : le retour immédiat dans les rues pour l’action (grèves, occupations, etc.) mais aussi pour des manifestations politiques – contre les gouvernements de collaboration de classe, pour le retrait immédiat du Mémorandum et l’annulation de la dette publique, ou pour n’importe quelle autre revendication politique nécessaire. Tel doit être notre rôle, aussi bien avant qu’après les élections, et non comme une manière d’aller à la « pêche aux voix »
2. L’unité entre les travailleurs autochtones et immigrés est une priorité que Syriza est en train de laisser de côté pour de ne pas effrayer une partie de l’électorat. Il est interpellant que la réaction du maire de Patras (qui fut soutenu dans le passé par Syriza) devant le récent pogrom raciste contre les immigrés a été demander plus de patrouilles policières contre l’immigration illégale. Dans ce sens, la propagande de solidarité n’est pas suffisante (bien que cela reste utile). Nous devons montrer, dans la pratique, que les intérêts des travailleurs grecs et des étrangers sont les mêmes (malgré le fait que, parfois, ces derniers sont opprimés par les premiers). Cela implique de mobiliser cette partie invisible de la classe ouvrière ; les immigrés eux-mêmes. Leur lutte démontrera que nous avons un ennemi commun, le patronat et tout en permettant la possibilité d’améliorer leurs droits et leurs conditions de vie, cela affaiblira les tensions au sein de la classe ouvrière. Il faut, dans la pratique, se centrer plus sur l’immigration. En outre, cela sera beaucoup plus efficace pour freiner le fascisme.
3. Antarsya est aujourd’hui suffisamment grande et visible que pour proposer un véritable front unique de la classe ouvrière dans son sens originel : ni comme une coalition électorale ou un élément d’appoint du réformisme, ni comme une simple convergence dans les luttes. Nous devons proposer clairement, explicitement et publiquement un accord d’action commune qui devra inclure les partis de gauche (KKE, SYRIZA), les organisations communistes extra-parlementaires, les groupes anarchistes, les collectifs, les syndicats… Nous n’avons pas besoin – et nous ne pouvons pas avoir – d’un programme commun, mais nous pouvons nous rassembler autour de 5 ou 6 points : autodéfense commune contre les néonazis et action conjointe antifasciste ; organisation commune des grèves, des occupations et des réquisitions sous contrôle ouvrier des entreprises qui ferment ; participation conjointe dans les assemblées ou dans les comités sur les lieux de travail et dans les quartiers ; campagnes de solidarité internationale. C’est d’une telle proposition dont nous avons urgemment besoin, et non d’un virtuel consensus gouvernemental qui ne peut être viable, et qui ne serait par conséquent que propagandiste.
4. Le programme de transition que nous avançons est un contre-poids suffisant face au projet réformiste d’un hypothétique et peu probable gouvernement de gauche. Cependant, ce n’est pas encore assez concret. Nous devons démontrer qu’une alternative révolutionnaire est possible. Cela est indispensable afin de convaincre face aux arguments « possibilistes » auxquels Syriza commence à succomber – et y compris à propager. Nous devons démontrer que le rejet unilatéral du Mémorandum impliquera un isolement international et que l’expropriation des banques provoquera la démission de membres du gouvernement. Nous devons étudier d’autres exemples historiques des luttes des exploités et des opprimés : les mesures révolutionnaires en Russie, à Cuba ou en Chine ; l’autogestion en Algérie et en Amérique latine et y compris les mesures progressites prises par Chavez. Tout cela doit être fait dans le but de marquer dans les consciences le potentiel authentique de l’utopie. Comment est-ce que la solidarité internationale pourra pratiquement éliminer les pressions exercées par la bourgeoisie internationale ? Comment obtenir les expropriations sans indemnisation et sans provoquer un effondrement ? Qu’es-ce qu’exactement le contrôle ouvrier et comment fonctionne-t-il ? Cette dernière question, en particulier, est un élément clé pour montrer la différence essentielle entre un gouvernement radical de gauche et un gouvernement révolutionnaire des travailleurs.
5. L’UE et l’union monétaire sont en train de devenir des questions cruciales dans un sens fondamental : une monnaie, un concept de marché anonyme, une force mystique et fétiche sont utilisés pour semer la terreur et mettre un terme aux revendications et aux besoins élémentaires des opprimés. Syriza accepte totalement ce chantage et facilite la tâche de la bourgeoisie dans sa volonté de masquer les véritables oppositions : classe ouvrière contre capital, gauche contre droite, Mémorandum contre anti-Mémorandum, tout est réduit à une question de « pro » et d’« anti » européistes. « La réorientation vers l’Europe » se transforme en serment de loyauté au système. Syriza fait ce serment au moment précis où la zone euro et la monnaie commune sont plus que jamais des mécanismes du capitalisme pour imposer son austérité. Notre tâche ne consiste pas à démontrer avec des critères capitalistes d’économie politique qu’une monnaie nationale est meilleure, mais bien d’expliquer qu’il est faisable, et même souhaitable, de brandir cette épée (la sortie de l’euro) au dessus de nos têtes.
6. Le dernier point du bilan du pendule dépend des conditions objectives, mais il se décide finalement par les conditions objectives. Nous avons plus que jamais besoin de puissantes organisations politiques collectives capables d’agir sur les sables mouvants de la conscience sociale. Je parle ici des partis révolutionnaires. Même s’il y a eu, dans des circonstances historiques déterminées, des révolutions victorieuses dirigées par des partis qui n’étaient pas suffisamment ou consciemment révolutionnaires (Cuba, Chine), il n’y a pas de situation révolutionnaire qui puisse se résoudre de manière révolutionnaire en l’absence de partis indépendants des travailleurs, clairement à gauche et en confrontation avec un gouvernement réformiste. Ces organisations sont une condition indispensable pour un processus révolutionnaire victorieux. D’autre part, elles sont également une condition fondamentale pour résister contre le développement rapide de l’extrême droite au cas où un gouvernement de gauche faillirait à ses tâches. En Grèce, nous pensons que la création d’un tel parti dépendra principalement du développement d’Antarsya (dans son ensemble, ou plus probablement au travers de scissions et de fusions avec d’autres courants encore). Il est donc crucial qu’Antarsya existe comme formation autonome.
Paradoxalement, le score électoral n’est pas important, les structures des sujets politiques se construisent en participant aux élections. Si on ne participe pas, les masses pensent qu’on n’existe pas. Cela n’est pas nécessairement une bonne chose, mais c’est encore ainsi. Antarsya est parvenue à évoluer d’un forum de la gauche extra-parlementaire à un courant politique visible et réel dans la classe ouvrière, non seulement grâce à son rôle dans la direction des luttes, mais aussi grâce à ses campagnes électorales. Il est probable qu’Antarsya n’obtienne pas un bon résultat au scrutin du 17 juin. Cependant, je crois que si elle ne se présente pas de manière indépendante, elle aura un problème pour la continuité de sa propre existence. Ce qui est en jeu, ce n’est pas la crédibilité d’Antarsya en général, mais bien la préservation de l’unité de ses plus de 3.000 militants d’avant-garde. Dans le cas contraire, nous risquerions de perdre ce que nous avons construit pendant des années de dur labeur. Les élections peuvent être une tâche ingrate, mais il faut la mener à bien.
7. Il y a une autre raison pour laquelle je suis extrêmement sceptique par rapport à une collaboration électorale ou pour le choix d’un vote « critique » en faveur de Syriza, bien qu’on ne puisse nier qu’une telle proposition s’appuie sur des arguments pertinents. Tous les votes ont la même valeur dans les urnes. Il est prouvé qu’il n’y a pas de plus grande illusion que celle de croire que l’on peut soutenir un parti sans se faire aucune illusion. Par illusion, nous faisons référence à l’influence que l’on donne à un parti pour la seule crédibilité qu’offrent ses soutiens.
Je suis persuadé qu’Antarsya, malgré ses erreurs bureaucratiques, exerce sur Syriza une pression bien plus efficace en restant à l’extérieur que les organisations anticapitalistes qui ont décidé de faire partie de son processus de « recomposition » ou qui pratiquent l’entrisme dans cette coalition. Quelles sont les organisations les plus influentes sur Tsipras après les dernières élections ? Le PASOK nous offre un exemple historique des désillusions du passé qui ont coûté très cher au trotskysme ; le concept selon lequel le réformisme peut réellement changer de cap, ou, du moins, se discréditer aux yeux de ses partisans au travers d’une activité et par la pression internes de groupes révolutionnaires sur ses directions bureaucratiques. Il est paradoxal qu’un courant qui est né en tentant de construire des partis véritablement révolutionnaires a souvent sous estimé l’importance de l’indépendance des partis révolutionnaires – je ne parle pas tant du programme, mais de la tâche difficile de l’organiser comme un sujet collectif autonome.
On pourrait penser qu’il ne s’agit là que de mots. Mais la théorie, les mots, sont la même chose que la pratique : c’est un aspect de la réalité non moins « réel » que ce que nous appelons habituellement le « matériel ». Pour le dire comme Marx ; ils ne sont pas « en dehors du monde, pas plus que le cerveau d’un homme serait en dehors de lui parce qu’il ne se trouve pas dans son estomac. »
Manos Skoufoglou, juin 2012
Membre de l’OKDE-Spartakos et d’Antarsya
* Traduction : Ataulfo Riera
Antonio Valledor- Messages : 160
Date d'inscription : 01/06/2012
Re: Grèce
mes camarades ont participé directement, je me rappelle très bien, les militaires ont hésite les deux premiers jours, jusqu'à que la réaction du peuple les a fait comprendre que le coup allait finir en guerre civil ....Roseau a écrit:Puisque comparaison est faite, rappellons aussi que Chavez disposait d'une organisation au sein de l'armée.
C'est la mobilisation populaire de masse et cette organisation qui ont fait échouer le coup de force militaire de 2002.
Babalu- Messages : 152
Date d'inscription : 08/09/2010
Re: Grèce
Babalu a écrit:mes camarades ont participé directement, je me rappelle très bien, les militaires ont hésite les deux premiers jours, jusqu'à que la réaction du peuple les a fait comprendre que le coup allait finir en guerre civil ....Roseau a écrit:Puisque comparaison est faite, rappellons aussi que Chavez disposait d'une organisation au sein de l'armée.
C'est la mobilisation populaire de masse et cette organisation qui ont fait échouer le coup de force militaire de 2002.
Exact. C'est le nombre et la force qui ont vaincu le coup.
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Interview d'un membre de la direction de Syriza
Par Pagina 12, en espagnol
Incohérence réformiste, tant sur l'économie que sur l'armée
http://www.pagina12.com.ar/diario/elmundo/4-196046-2012-06-10.html
Incohérence réformiste, tant sur l'économie que sur l'armée
http://www.pagina12.com.ar/diario/elmundo/4-196046-2012-06-10.html
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
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