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Indigènes de la République

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Message  Copas Sam 6 Sep - 8:34

Dinky a écrit:
Un communiqué du PIR datant de janvier 2009 et toujours d'actualité.

Nous soutenons Hamas, le Jihad islamique, les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, les Brigades al-Naser Salah ad-Din et les autres forces de la résistance armée

Apparemment, ce genre d'insanité n'a pas l'air de gêner ici.

C'est du campisme, pas mieux que ceux qui soutiennent Assad au nom de "l’ennemi commun" (on les entend moins en ce moment), c'est à dire qui soutiennent un régime fasciste (et non des forces fascisantes).

Après les les brigades des martyrs d'Al-Aqsa sont des groupes armés du Fatah (il me semble qu'ils ne portent plus ce nom, mais...), donc de résistance nationale, les Brigades al-Naser Salah ad-Din sont des groupes armés de résistance nationale (qui ont aggloméré des combattants de plusieurs tendances), le Jihad islamique (palestinien) est un petit groupe qui mélange islamisme, nationalisme arabe et "progressisme", pour ce dernier groupe, un extrait d'une interview (un peu datée), d'un membre de leur direction :

Anouar Abu Taha - Il existe deux interprétations du mot jihad. Le premier désigne la lutte contre les mécréants; le second, le combat contre l'injustice. C'est ce deuxième sens que notre mouvement donne à ce mot. Notre jihad est une opposition armée à l'occupation israélienne et aux Etats qui y contribuent sur le terrain. Les cibles légitimes ne sont donc pas les Occidentaux ou les juifs, mais toute personne qui occupe notre terre. C'est pourquoi le Jihad Islamique a condamné al-Qaïda et les attentats du 11 septembre.

Le Hamas est quand à lui ce qu'on en sait, une organisation réactionnaire de résistance, basée sur l'islamisme et ayant une intense activité sociale (comme l'avait les frères en Egypte).

De fait le PIR soutient l'ensemble des organisations de la résistance du peuple palestinien et traite de la question de Gaza.
Si il y a à discuter c'est de cela, on discute bien avec d'autres campistes.
Le PIR n'est ni le hamas, ni le jihad isalmique, ni le Fatah.
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Message  Toussaint Dim 7 Sep - 21:37

MO2014, bien du courage, camarade, ici il y a de tout, des camarades et des ennemis, la gauche révolutionnaire et la gauche qui se dit révolutionnaire mais reste coloniale, voire raciste. Et sur la Palestine, certains se sont bien gardés de se solidariser avec la résistance, adoptant ainsi, quelles que soient les contorsions verbales, une posture de passivité devant l'agression israélienne. Les mêmes que tu retrouveras en train d'insulter les Indigènes et de relayer les campagnes anti-musulmanes.
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Message  MO2014 Lun 8 Sep - 0:50

La résistance dans la durée est la seule à même de vaincre l'état colonial d’Israël. Le soutien ferme aux formations qui la mènent et à la population martyrisée par les bombardements est le devoir des militants anti-colonialistes. Pour le reste, je suis d'accord avec toi Toussaint, les autres continueront avec leurs arguties et leurs contorsions pour tenter de maquiller leur renoncement au combat concret, la résistance et son soutien.

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Message  Copas Lun 8 Sep - 5:24

Toussaint a écrit:MO2014, bien du courage, camarade, ici il y a de tout, des camarades et des ennemis, la gauche révolutionnaire et la gauche qui se dit révolutionnaire mais reste coloniale, voire raciste. Et sur la Palestine, certains se sont bien gardés de se solidariser avec la résistance, adoptant ainsi, quelles que soient les contorsions verbales, une posture de passivité devant l'agression israélienne. Les mêmes que tu retrouveras en train d'insulter les Indigènes et de relayer les campagnes anti-musulmanes.  

On retrouve les mêmes avec les mêmes attitudes trouillardes et réactionnaires sur les soulèvements populaires dans la zone dite arabo-musulmane, le refus de reconnaissance que des peuples puissent se soulever contre la tyrannie, la négation que ce sont là pour l'essentiel de grosses classes ouvrières.
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Message  MO2014 Lun 8 Sep - 18:34

Sous l’islamophobie, le fascisme et un antifascisme complice
Fifth Annual International Conference on Islamophobia Studies
Publié le 5 mai 2014 par Houria Bouteldja, Membre du PIR

Intervention d’Houria Bouteldja à la 5ème conférence internationale sur l’islamophobie de Berkeley (17 avril 2014)

Une fois de plus, merci aux organisateurs pour cette invitation. Je tiens aussi à rendre hommage à leurs efforts pour la tenue de cette conférence de haute qualité. Comme chaque année, je vais parler au nom du Parti des indigènes de la république. Mais cette fois, je vais ajouter la casquette du collectif Mamans Toutes Egales (MTE) auquel le PIR appartient. C’est un collectif qui lutte pour l’abrogation de la circulaire qui exclut les mères voilées des sorties scolaires. Si je me fais représentante du collectif ici ce soir, c’est bien entendu pour le faire connaître et dénoncer cette discrimination inique à l’encontre de mères de famille et de leurs enfants.

En guise d’introduction, je voudrais commencer par dire que la situation en France et en Europe est préoccupante. La crise économique aidant, nous observons partout sur le continent la progression inquiétante des forces d’extrêmes droites, fascistes ou néo-nazies. Ces nationalismes radicaux sont de plus en plus décomplexés. Une partie d’entre eux participent démocratiquement aux différentes échéances électorales et s’institutionnalisent tranquillement. Le Front National français est la troisième force politique de l’hexagone, et sa présidente est une femme de poigne qui ne cache pas ses ambitions à la magistrature suprême et qui pour atteindre cet objectif ne recule devant rien pour rendre son parti respectable. Et elle y réussit admirablement. Il faut reconnaître que cette tâche lui est facilitée. En effet, l’islamophobie, et plus exactement, le racisme d’État anti-musulman est un sport national. Le champ politique blanc qui va de l’extrême droite à l’extrême gauche est gangréné. Il faut cependant être précis dans nos analyses. L’islamophobie institutionnelle n’est pas un produit de l’extrême droite. C’est un produit de la social-démocratie représentée d’abord et avant tout par la gauche institutionnelle (le PS) et la droite républicaine. Un des symboles intellectuels de cette sociale démocratie est le philosophe Alain Finkielkraut qui vient de rentrer à l’Académie Française. En fait, on peut interpréter cela comme une récompense faite par la France pour services rendus. Il est en effet un illustre islamophobe, un des pires néo-conservateurs des dix dernières années. Mais aussi un grand sioniste. La France sait reconnaître ses grands hommes. Finkelkraut qui a été élu au fauteuil de Félicien Marceau devra prononcer son éloge. Cet académicien s’est illustré par ses activités antisémites et pro-nazies qui lui ont valu, en janvier et octobre 1946, d’être condamné par contumace à 15 ans de travaux forcés par le Conseil de guerre de Bruxelles et d’être déchu de sa nationalité. J’attends l’éloge avec une certaine jubilation…C’est donc sous administration de la droite républicaine que la loi islamophobe de 2004 est passée avec le soutien de la gauche institutionnelle. Précisons également que la gauche de gauche, parfois institutionnelle (PC) ou non à la fois anticléricale, bouffeuse de curés, coloniale et eurocentrique a largement participé au climat islamophobe et a en grande partie soutenu la loi de 2004. Parfois quand elle ne l’a pas ouvertement soutenue, elle ne l’a pas combattue non plus, sauf exceptions, ce qui revient au même. De plus, mis à part une petite minorité comme le groupe Action Antifasciste (AFA), le Collectif Antifasciste Paris-Banlieue ou l’appel des libertaires contre l’islamophobie1 qui a suscité des débats très virulents dans la communauté libertaire, une grande partie de la frange la plus radicale et la plus antifasciste de la gauche française continue de suspecter les musulmans et les femmes voilées et continuent de scander « ni Dieu ni Maître ». Un slogan révolu, peut être pertinent dans le cadre d’enjeux passés où l’Église était au pouvoir mais qui est ridicule aujourd’hui quand on sait que l’islam n’est pas une religion d’État et surtout qu’elle est la religion des nouveaux prolétaires, des classes subalternes, des plus pauvres que les antifascistes prétendent défendre. En juin dernier, une série d’agressions contre des femmes voilées ont eu lieu dans la banlieue parisienne par des groupes d’extrême droite ne suscitant que très peu de réactions. Pourtant, seules des femmes étaient ciblées, l’une d’entre elles a même perdu son bébé. Les antifascistes n’ont pas beaucoup réagi, les féministes non plus mis à part une petite minorité d’entre elles. A la même période, un jeune antifasciste blanc, Clément Méric, a été agressé et tué par ces mêmes milieux d’extrême droite. La réaction a été immédiate et l’émotion a aussitôt pris une dimension nationale. Certes, il s’agissait d’un assassinat. Je ne remets pas en cause ici la légitimité de la rage qui s’est emparée des milieux antifascistes. Mais force était de constater que les milieux de gauche, antifascistes et antiracistes se sont fortement mobilisés pour protester contre l’assassinat de Clément Méric dans toutes les grandes villes françaises et qu’ils ont été terriblement absents des mobilisations organisés par les musulmans. C’est un constat amer mais il n’est pas nouveau. Je vous propose quelques explications pour comprendre cet état de fait2 :

   La plupart des antifascistes n’envisagent pas l’antiracisme comme un combat politique mais comme un combat moral. Ainsi, ils ne comprennent pas que l’antiracisme est un combat contre une oppression institutionnelle et non contre des sentiments diffus portés par des individus malveillants, qu’il englobe les résistances anticoloniales, le combat contre l’apartheid en Afrique du sud et contre la ségrégation aux États-Unis. Ils ne comprennent pas cette unité.

   La plupart des antifascistes ne comprennent pas que les luttes décoloniales des populations post-coloniales sont une composantes majeure du combat contre le fascisme et qu’il faut les traiter comme des égaux avec leur propre agenda, leurs priorités et non pas comme une espèce à protéger.

   Ils ne comprennent pas que les musulmans sont des victimes et que l’islam est une religion dominée tant à l’intérieur des démocraties libérales occidentales qu’à l’extérieur dans le cadre des relations impérialistes. Or, eux, voient dans les manifestations de « conservatisme » ou de « dogmatisme religieux », le signe du fascisme. Ce sont des raccourcis mais ils sont efficients.

La résultante de ce constat, c’est qu’il n’y a pas de solidarité spontanée entre l’antifascisme et l’antiracisme, parfois ils rentrent même en conflit. Il y a même eu dans le passé des collusions entre l’antifascisme et l’impérialisme contre les luttes d’indépendances. Voici trois exemples édifiants :

   En 1937, en France, le Front Populaire, né dans le creuset de l’antifascisme mais qui était aussi un mouvement populaire puissant, représentant les classes laborieuses a dissout l’Étoile Nord-Africaine qui luttait pour la fin de l’indigénat et pour l’indépendance nationale de l’Algérie. Le mobile était que l’Étoile Nord-Africaine avait des accointances avec les fascistes. La vérité c’est que le Front Populaire sur la question coloniale était à peine réformateur et non révolutionnaire. Souvenons-nous du projet de loi Blum-Viollette qui promettait de donner le droit de vote à 20 000 indigènes (pas plus !) mais qui n’a même pas été avalisé par le Sénat3. Quant au code de l’indigénat, il n’a même pas été égratigné. Même si les antifascistes ne se revendiquent pas explicitement de cette expérience, le Front populaire reste exemplaire d’un antifascisme « par en-haut » dont il est nécessaire de faire le bilan historique pour rompre définitivement avec sa forme réformatrice et par conséquent coloniale. Messali Hadj avait pourtant prévenu : « Un gouvernement de Front populaire devra s’attacher à renoncer à la politique de la race privilégiée qui a inspiré jusque-là toute la législation et l’organisation administrative dans les colonies »4.

   Un deuxième exemple de malentendu entre les antifascistes et les anticolonialistes : les antifascistes européens ont aidé à l’effort de guerre contre l’Allemagne nazie en collaboration avec leurs États respectifs. De nombreux anticolonialistes du Maghreb et d’Afrique ont refusé de participer à la libération car ils ne comprenaient pas pourquoi ils devaient restaurer des impérialismes démocratiques.

   Dernier exemple : Nous sommes au moment du Front Populaire en Espagne entre 36 et 39. L’hostilité du gouvernement aux revendications nationalistes marocaines est telle qu’elle provoque par dépit une indifférence des Marocains aux malheurs de la république confrontée au putsch de Franco. Certains iront même jusqu’à combattre dans les troupes franquistes. Non seulement, le passage au Front Populaire n’a pas provoqué de changement notable dans la politique coloniale espagnole mais en plus celui-ci s’est privé d’un des rares soutiens, le peuple marocain, qui aurait pu changer la donne face au franquisme.

On voit ici, que l’intérêt de classe des prolétaires et antifascistes européens ne correspondait pas aux intérêts des damnés de la terre.

Il est possible de dépasser ces antagonismes car il va de soi que le fascisme est l’ennemi des post-colonisés, des musulmans mais aussi des classes populaires blanches et non blanches. Pour cela, il est nécessaire d’articuler anti-fascisme et anti-colonialisme, antifascisme et antiracisme. Mais tout ceci reste théorique car rien ne se fera si l’antifascisme n’est pas décolonisé. Il est urgent que les antifascistes fassent leur aggiornamento, c’est-à-dire qu’ils affrontent leur blanchité (dit autrement leurs intérêts de race) car tant qu’ils focaliseront toute leur énergie contre l’extrême droite, ils négligeront deux questions prioritaires : la transformation de la gauche et les alliances avec celles et ceux qui subissent de plein fouet le racisme et qui sont les cibles privilégiées du fascisme. Pire que cela, ils seront complices du fascisme même s’ils prétendent le contraire du haut de leur radicalité de façade. Mais si on leur dit « aujourd’hui, il va falloir envisager des alliances avec des barbus et des femmes voilées, pire avec des mosquées », ils peuvent faire des syncopes. Nous, nous sommes évidemment très conscients de cela, c’est pourquoi nous savons que des alliances se construisent sous la pression et le rapport de forces, ce qui signifie créer notre propre existence politique pour inventer nos alliés. Comme le disait Abdelmalek Sayyad, un grand sociologue algérien : exister, c’est exister politiquement.

Je voudrais conclure par un vœu. L’année dernière, cette conférence avait fait une déclaration dénonçant la montée de l’islamophobie en France. Cette déclaration avait été suivie par la tenue d’une conférence internationale à Paris en décembre dernier qui fut un énorme succès. Je souhaite vivement que cette expérience se renouvelle et que nous trouvions en France les forces pour la réitérer. J’ajoute que cette conférence a eu des effets bénéfiques en Europe puisque des organisations britanniques, hollandaises, belges et peut-être allemandes souhaitent suivre l’exemple français et organiser des rassemblements politiques du même type à la même période. Aussi, je ne peux pas ne pas remercier Hatem Bazian et Ramon Grosfoguel ici présents pour leur dévouement et leur engagement auprès de nous. J’espère de tout cœur que cette collaboration entre Berkeley et les milieux antiracistes français se poursuive et continue de faire des petits. Merci.

Houria Bouteldja, membre du PIR



1 Libertaires et sans-concessions contre l’islamophobie !

2 Cette analyse est inspirée par l’intervention de Félix Ewanjé-Epée et Stella Magliani-Belkacem « Quel antiracisme pour quel antifascisme ? » à l’occasion des 6èmes rencontres interdépartementales pour un avenir sans fascismes le 19 janvier 2013 à Voiron à l’initiative de Ras L’Front Isère.

3  Article de Messali Hadj, suite à la dissolution de l’ENA, publié dans La Gauche Révolutionnaire, n° 15, 1er mars 1937.

4 La revendication des libertés publiques dans le discours politique du nationalisme algérien et de l’anticolonialisme français (1919-1954), (source : Journal El Ouma sept-oct. 1936.)
indigenes-republique.fr/sous-lislamophobie-le-fascisme-et-un-antifascisme-complice/

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Message  MO2014 Dim 14 Sep - 15:47

Lettre à Éric Zemmour, l’« israélite »
Publié le 12 juin 2014 par Houria Bouteldja, membre du PIR

Très cher,

Pas la peine de t’emballer par ma manière un peu cavalière de d’interpeller. Tu ne trouveras rien dans cette lettre qui puisse satisfaire tes bas instincts. La première chose que tu dois savoir c’est que, par égard pour ma personne, je ne m’autoriserai pas à descendre dans tes égouts.
Si je préfère le terme « israélite » à « juif » c’est pour te faire mal. Pour te titiller. Pour te rappeler, malgré l’illusion de triomphe qui caractérise les parvenus de ton espèce, que tu ne fais pas partie de la race des seigneurs. Tu n’es pas blanc malgré tes efforts pour atteindre cette dignité.

« Israélite ». C’est comme ça que tu t’es défini toi-même un jour sur un plateau de télé. Et c’est sous cette épithète que la République que tu chéris tant vous a enfermés toi et ta famille. Ou plus exactement où elle vous a euphémisés en tant que Juifs1tout en collaborant au projet d’extermination physique de vos cousins Ashkénazes lors de la « parenthèse » vichyste. Et comble de malchance, non seulement tu es juif mais en plus tu es arabe (ou berbère mais c’est pareil). Tu es un cumulard. Tu me fais peine à voir. Tu t’appelles Zemmour quand d’autres s’appellent Klugman, Klein, Finkelstein. Tu n’as même pas eu la grâce de naître aryen ! Et dans ta haine contre nous, Musulmans et autre racaille, c’est la détestation de ta race que tu exprimes. En tant que Juif et en tant qu’Arabe. D’abord, Tu nous en veux de résister à l’assimilationnisme auquel la République nous contraint alors que toi et ta famille y avez cédé (note que je ne vous en blâme pas étant donné la virulence de l’antisémitisme ). Nos foulards, nos barbes ostentatoires, nos mosquées, nos viandes halal te rappellent trop le sacrifice identitaire auquel tu as dû te soumettre. Oui tu nous en veux de résister. Tu nous détestes aussi parce qu’on te rappelle que tu es arabe et ça c’est pire que juif. Et te voilà loyal serviteur des artisans de ta disparition. Je ne t’apprends rien sur le décret Crémieux n’est-ce pas2 ? C’est ton syndrome de Stockholm. Ton amour pour ton oppresseur est un puits sans fond. Après avoir tué ton père et ta mère, tu veux tuer l’histoire. Cachez moi ces bougnoules qui me rappellent trop mon exil intérieur. Comme tout supplétif, tu as toujours été en tête des croisades contre nous : voile, burqa, racailles des banlieues. Et tu ne t’en lasses pas. Tu viens de récidiver. Tu dis : « Vous ouvrez le Coran à n’importe quelle page et il y a écrit : ‘Il faut tuer les Juifs, il faut tuer les Chrétiens ». Tu sais que les Musulmans sont dans l’hexagone depuis plus d’un siècle ? Alors je te pose une question très bête : pourquoi n’ont-ils pas obéi plus tôt à ces ordres divins? Hein ? Que répondrais-tu si d’aventure un journaliste poussait l’irrévérence jusqu’à te poser la question ? Je ris à l’idée de cette folle audace mais faisons comme si. Je vais t’aider. Très simple. Nos parents étaient illettrés. Ils ne pouvaient donc pas lire le Coran. Par contre, nous on sait lire et je ne te dis pas les dégâts que ça peut occasionner…Ahh ! Je savais que cette explication te plairait. Elle est taillée pour les minables comme toi. Elle ne peut que te ravir le cœur. Et moi, ça me fait plaisir de te faire plaisir. Cela dit, je te reconnais une certaine cohérence. Tu n’aimes pas le foulard. Mais la kippa et les papillotes non plus. Elles t’agressent, toi le juif honteux. Moi c’est le contraire. J’aurais de la sympathie pour tes coreligionnaires si je ne devinais chez une grande partie d’entre eux un parti pris pro-sioniste. Parce que, tu vois, je trouve normal et même vital d’exprimer sa personnalité historique et son identité bafouée. Sur ce point, les Juifs d’ « affirmation » ont raison de résister. Une vraie politique de la « diversité » consisterait à les soutenir comme on doit soutenir par principe les Noirs et les Musulmans contre la lessiveuse nationale-républicaine.

Comme tu me fais pitié, je vais te donner un conseil non pas d’amie mais de codétenue. Nous, indigènes de la république, sommes dans la ligne de mire. Ok. Mais les Juifs (lorsque la bonne conscience blanche s’épuisera – et crois moi, ça s’use ces choses-là) seront les prochains sur la liste. Tu ne peux pas t’imaginer à quel point les artifices rhétoriques des faiseurs d’opinion ont travesti la réalité. Depuis que tout le monde est convaincu mordicus que les islamo-bamboulas sont aujourd’hui le fer de lance de la judéophobie, il en oublie le bon vieil antisémitisme gaulois, sournois et tapis dans l’ombre. Elles sont nombreuses les oreilles indigènes dans les bistrots, les bureaux, les usines, les cages d’escaliers à recevoir les confidences des « vrais » Français sur la « juiverie internationale ». Tu les entends comment ils susurrent à nos oreilles qu’ils croient complices ? Tu les entends tous ces murmures, ces bruissements ? Dans ta famille, ils sont certains à en avoir conscience. Demande à Askolovitch. Il a une idée sur la question. Si j’étais toi, tu vois, je me méfierais grave de tes amis philosémites. Ils sont comme toi, les islamophobes d’aujourd’hui, mais aussi les antisémites d’hier et probablement ceux de demain. Je te proposerai bien de méditer la mise en garde de Fanon sur ce sujet, mais je préfère l’économiser pour ceux qui le méritent. Et pourtant…Souviens toi de Raymond Barre et de ses « Français innocents tués près de la synagogue de la rue Copernic3. Souviens-toi de l’allocution de Chirac un certain 14 juillet 2004 dans laquelle il a exclu ses « compatriotes juifs et musulmans» de la francité4. Comme je suis un peu perverse, ce lapsus d’État avait égayé ma journée. Qui dort par terre ne peut pas tomber de son lit. Moi, j’ai l’avantage de savoir qui je suis : une indigène. Chirac ne peut pas m’atteindre.En revanche, à l’époque, Finkielkraut, un autre prétendant à la blanchité, s’était étranglé. Reconnais que c’était un spectacle que seuls les fins gourmets pouvaient apprécier. C’était franchement savoureux !

Et pour finir, parce que je ne peux pas conclure sans t’achever, sache que si nous combattons le soralisme et l’antisémitisme qui le sous-tend c’est pour ne pas connaître ton destin de petite frappe et de renégat. La seule chose qui me chagrine c’est que si incha Allah notre lutte contre le racisme républicain devait aboutir, elle bénéficierait à des connards comme toi.

Bien cordialement à toi,

Houria Bouteldja, membre du PIR

MO2014

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Message  MO2014 Lun 15 Sep - 11:27

Féministes ou pas ? Penser la possibilité d’un « féminisme décolonial » avec James Baldwin et Audre Lorde
Houria Bouteldja 14 septembre 2014


Je dois confesser que je n’ai pas de réponse définitive à cette question : « Faut-il être féministe ou pas ? » Je ne suis pas choquée lorsque des femmes indigènes se disent féministes comme je ne suis pas choquée lorsqu’elles rejettent cette identité. Nous vivons un moment complexe, et cette complexité rend plus difficile notre autodéfinition. Quoi qu’il en soit, il existe un besoin de clarifier, d’analyser pour mener des luttes adaptées à notre condition de femmes non blanches vivant en Occident. Pour les besoins de l’analyse, je vais utiliser le concept de « féminisme décolonial » bien qu’il ne me satisfasse pas complètement mais il est un compromis entre une certaine résistance au féminisme expérimentée à la fois en Occident parmi les populations non blanches et dans le Tiers-monde et la réalité massive et inquiétante des violences multidimensionnelles faites aux femmes non blanches, violences produites par les États et le néo-libéralisme[1]. En d’autres termes, il est un compromis entre le racisme et le sexisme institutionnels, il est un compromis entre la résistance au féminisme, à ses formes occidentalo-centrées[2] et sa pénétration effective dans les mondes non-blancs, puis son adoption, puis sa réappropriation par une partie des femmes indigènes. Dans cette réflexion, je me suis permise d’inviter Audre Lorde et James Baldwin, et de m’inspirer du débat qu’ils ont accordé en 1984 à la revue « Essence Magazine »[3]. Un échange passionnant entre une femme noire et un homme noir, entre deux militants radicaux de la cause noire, l’une féministe et l’autre probablement pas du point de vue de ce que l’on entend par « féminisme » en Occident.

Le « féminisme décolonial » est ainsi un concept qui s’élabore dans le cadre d’un Etat, d’institutions et d’une société blanches, impérialistes, bourgeoises et patriarcales. C’est aussi un concept qui ambitionne de rendre compte de la condition concrète des femmes non blanches au travers des urgences qui sont les leurs en prenant en compte l’imbrication des rapports de classe, de race et de genre. J’ajoute que je suis membre d’une organisation politique décoloniale qui lutte contre le racisme structurel et l’impérialisme. Et c’est en tant que telle que j’aborde la question spécifique des femmes.

Si ce féminisme devait voir le jour en France, quels seraient ses fondements ? J’en vois cinq principaux :
1/ Réinscrire le féminisme comme phénomène politique dans l’espace et dans le temps et comprendre ses conditions d’émergence historique.

Trop souvent, les féminismes du sud, féminismes islamiques compris, appréhendent le mouvement féministe comme un phénomène a-historique, universel et naturel. Il est aussi vu comme un signe intrinsèque de progrès. La subjugation est telle que des féministes musulmanes par exemple n’hésitent pas à faire des anachronismes historiques pour inscrire le féminisme dans la genèse de l’histoire islamique. Toute la dignité de l’islam est alors contenue dans la capacité de ces militantes à prouver qu’il est bien féministe dans la lettre et sexiste dans la lecture qu’en a fait le patriarcat local. Seul hiatus dans cette construction rhétorique : le féminisme comme mouvement politique n’existait pas à l’époque de la révélation. Il n’en devient pas moins à leurs yeux un étalon de mesure de la modernité et rend l’islam, religion qui a précédé le féminisme dans le temps, tributaire de celui-ci (ce qui devrait être un comble pour les croyants). Je préfère préciser ici que je n’ai rien contre cette démarche que je peux défendre lorsque des femmes la revendiquent et qui devient nécessaire face à des pouvoirs de plus en plus coercitifs et misogynes, qui effectivement n’hésitent pas à mobiliser la légitimité coranique. Je pense juste qu’elle pêche par adhésion aveugle au paradigme de la modernité, par l’idée que les conflits de genre sont d’abord déterminés par la nature des sociétés islamiques et moins par les structures économiques et politiques globales et les rapports Nord/Sud. J’y reviendrai. Ainsi les sociétés où le mouvement féministe est inexistant ou marginal sont considérées comme accusant un retard civilisationnel. Aussi, de ce point de vue, il convient de rattraper ce retard et d’opérer des greffes dans des espaces/temps différents en faisant fi des réalités socio-historiques, voire géopolitiques des pays concernés, de l’impact de le modernité dans les rapports de genre et dans leur transformation, mais aussi en négligeant les conditions historiques d’apparition du féminisme qui en font un phénomène spécifique à l’Europe et plus largement à cet espace géopolitique qu’on appelle Occident et qui comprend l’Europe de l’ouest, les Etats-Unis d’Amérique, le Canada et l’Australie. Si l’on définit le féminisme comme 1/ un phénomène politique se donnant pour horizon de détruire le patriarcat et de mettre fin à la domination structurelle du genre masculin sur le genre féminin, 2/ dans le cadre d’un Etat de droit égalitaire et citoyen, alors, oui le féminisme est bien un phénomène occidental. Mon hypothèse, que je soumets à votre critique, est que ses conditions d’émergence ne sont elles-mêmes pas un simple jeu de hasard ou le fruit d’une conscience féministe spontanée des femmes blanches. Je pense que cette conscience féministe peut aussi être analysée comme produit d’un système politique et économique déjà existant. Aussi, il convient de remonter aux conditions structurelles et historiques qui ont permis le féminisme. Ainsi, me semble-t-il, on ne peut pas ne pas resituer les prémices de la possibilité du féminisme dans un moment géopolitique précis : celui de l’expansion capitaliste et coloniale rendue possible par la « découverte de l’Amérique » et dans autre moment fondateur : la révolution française, elle-même condition de l’émergence de l’Etat de droit et de l’individu citoyen. La révolution française devient ainsi une promesse : celle de la reconnaissance de la citoyenneté universelle, pleine et entière. Cette promesse n’a évidemment pas été tenue puisque cette citoyenneté était au départ réservée aux hommes mais celle-ci devenait par la force des choses un horizon possible pour les femmes puisque dorénavant, grâce aux principes de la révolution, elles allaient pouvoir résoudre l’équation : si l’individu est un citoyen, et que la femme est un individu, alors la femme est une citoyenne de plein droit… Ce n’est pas un hasard si le club des citoyennes républicaines révolutionnaires‏ est officiellement fondé le 10 mai 1793 soit quatre ans après la révolution et qu’elles réclament le droit de se constituer en corps d’armée au service de la révolution. C’était une façon de réclamer la citoyenneté. Elles diront joliment « prouvons aux hommes que nous politiquons aussi bien qu’eux »[4]. Le féminisme tel que défini plus haut mettra longtemps à se développer (son apogée se situe dans les années 70) mais sera toujours contenu dans le cadre des démocraties libérales fondées sur l’idée d’égalité des citoyens et dans lesquelles les femmes blanches ont obtenu des droits, certes par leur lutte propre, mais aussi grâce à la domination impériale. N’oublions pas qu’à l’époque de la révolution, la traite négrière existe déjà et que la France est partie prenante de ce commerce. Précisons ici, que les conflits d’intérêt « de race » entre le sud et le nord, ne sont pas fixés à cette époque. Les peuples du nord qui n’étaient pas encore tout à fait « blancs » pouvaient envisager des convergences dangereuses avec les peuples colonisés. En France, la révolution française coïncide avec la révolution haïtienne et interagit avec elle. Les sans-culottes manifestent pour demander l’abolition de l’esclavage contre « l’aristocratie de l’épiderme ». Mais les Etats coloniaux en voie de constitution ont toujours su habilement intégrer certaines couches du prolétariat et des femmes à travers leur bras social ou politique. C’est aussi comme cela que la race blanche fut inventée. Pour revenir à la question des conditions d’apparition du féminisme, il faut donc souligner deux phénomènes qui vont structurer les futurs Etats-nations : l’expansion capitaliste et coloniale et l’avènement des démocraties. Il n’est pas inutile de rappeler ici que l’Europe deviendra le théâtre de luttes qui se résoudront dans des guerres épouvantables, des conflits de classe extrêmement rudes et des négociations à l’intérieur des frontières des Etats-nations coloniaux, que ces luttes renforceront les droits citoyens grâce et la plupart du temps au détriment des peuples colonisés. « L’histoire de l’Occident écrit Domenico Losurdo se trouve face à un paradoxe. La nette ligne de démarcation, entre Blancs d’une part, Noirs et Peaux-rouges de l’autre, favorise le développement de rapports d’égalité à l’intérieur de la communauté blanche[5] ».Et Sadri Khiari de poursuivre : « Le principe de la démocratie capitaliste, c’est la liberté individuelle et l’égalité politique. Les races en sont la négation. Elles en sont aussi indissociables. La modernité bourgeoise, qui s’installe au tournant du XVIIIè et XIXè siècles, se développe en effet au croisement de deux mouvements contradictoires et néanmoins complémentaires, la libération des individus du carcan des hiérarchies statutaires indispensables à l’affirmation de l’Etat moderne et à l’épanouissement du Capital, et l’expansion impériale qui leur est tout autant nécessaire »[6]. Retenons donc dans cette partie que la promotion des femmes blanches se fait après la révolution française et pendant l’expansion coloniale. Nous pouvons en dire autant du mouvement ouvrier. C’est ce que j’ai appelé en sous-titre « les conditions d’émergence historique ».
2/ Comprendre les conditions de pénétration du féminisme dans les sociétés du Sud et dans les Suds à l’intérieur des Nords.

Audre Lorde interpelle James Baldwin qui lui reproche de trop charger les hommes noirs : « Je ne blâme pas les hommes noirs. Ce que je dis, c’est qu’il faut que nous revoyions nos façons de combattre notre oppression commune parce que si on ne le fait pas, on s’entre détruira. Il faut que nous commencions à redéfinir ce qu’est une femme, ce qu’est un homme et comment nouer nos relation. » Il lui répond : « Mais cela exige de redéfinir les termes de l’Occident.»

Prolongeons ici la réflexion de Baldwin : C’est bien l’expansion du capitalisme à travers le monde qui a exporté les systèmes politiques, les conflits qui structurent le monde blanc entre la gauche et la droite et entre progressistes et conservateurs, les Etats-nations, les langues, les modes de vie, les codes vestimentaires, les épistémologies, les structures de pensée… Il n’y a aucune raison de penser que le féminisme y ait échappé. Pour moi, le féminisme fait effectivement partie des phénomènes européens exportés. La puissance de l’impérialisme est telle que l’ensemble des phénomènes qui structurent le champ politique, économique, culturel occidental se sont imposés dans le monde avec plus ou moins de bonheur : parfois ils se heurtent aux résistances des peuples, parfois ils pénètrent comme dans du beurre. Ils deviennent réalité. Ils informent et façonnent le quotidien. Mais, tous ces pays ont des histoires spécifiques et surtout des systèmes économiques et politiques spécifiques qui déterminent et façonnent entre autre les rapports de genre. Précisons ici qu’avant la « grande rencontre » avec l’Occident, il y a des espaces où les rapports de domination de genre n’existaient pas, il y a même des régions du monde où le genre féminin n’existait pas[7]. Il y a des régions où au contraire, il y avait un patriarcat local spécifique, c’est à dire non christiano-centré et pas forcément hétéro sexiste. En fait, avant la grande nuit coloniale, il y avait une extrême diversité dans les rapports humains qu’il ne faut pas ici idéaliser mais qu’il convient de souligner. Comme le rappelle Paola Bacchetta[8], « Les colonisateurs n’ont pas seulement imposé leurs propres notions de genre et de sexualité à des sujets colonisés. L’effet de cette imposition a été d’empirer notablement la situation des femmes et des minorités sexuelles ». Avec un recul de 50 ans, nous savons, notamment grâce aux intellectuels décoloniaux d’Amérique latine que si les indépendances formelles ont bien eu lieu, la « colonialité du pouvoir », elle, n’a pas disparu. En effet, les jeunes nations libérées ont marché dans les pas de leurs anciens maîtres, ont copié leurs systèmes politiques sans les critiquer, adopté les formes des Etats-nations européens et français en particulier dont les limites avaient douloureusement été éprouvées pendant les deux guerres dites mondiales, les formes de juridiction, de démocratie, de rapport à la citoyenneté, à la liberté, à l’émancipation… La diversité des formes sociales a ainsi fait place à une homogénéisation progressive. La diversité a soit disparu, soit s’est métamorphosée. Parfois elle a résisté et s’est recomposée. C’est ce qui s’est passé dans la majorité des cas. Le féminisme comme idée mais aussi comme forme de lutte devient donc parfois une réalité qu’il faut accepter quand les femmes s’en emparent et le redéfinissent, qu’il soit séculier, islamique ou articulé aux cultures locales mais accepter de refuser si les femmes le rejettent. Soulignons ici qu’il apparaît dans le Tiers-monde au tournant du XXème siècle, au moment des grandes contestations anticoloniales et de la formation des grandes utopies libératrices (socialisme, nationalisme, islam politique…) mais qu’il sera toujours arc-bouté à la critique radicale de l’impérialisme[9]. Précisons également, qu’en Egypte, il sera concomitant du féminisme européen. On pourrait penser que ce hasard affaiblit l’argument des origines occidental du féminisme. Cela serait d’une part négliger le rôle de la propagande coloniale qui n’avait de cesse d’accuser l’Orient pour sa supposée misogynie ontologique (tout en étant foncièrement patriarcal) et d’autre part, les premiers pas des pays colonisés vers la construction des Etats Nation « démocratiques ». Dans ce contexte, les mouvements révolutionnaires ou réformistes allaient forcément se mouler sans s’y réduire à des schémas prédéfinis (nationalisme, marxisme, féminisme). Mais poursuivons : avant de penser strictement le féminisme, strictement les rapports de classe, il faut penser quel système politique, la forme de l’Etat, les rapports Nord-Sud et bien entendu le capitalisme et ses formes néo-libérales. C’est ce que suggère Baldwin lorsqu’il conditionne la redéfinition de la féminité et de la masculinité à une remise en cause de l’Occident. Mon postulat est qu’on ne peut pas penser le type de relations sociales, la famille, les rapports de genre ou la sexualité si on ne pense pas la nature de l’Etat et si on ne pense pas les rapports Nord-Sud, le néolibéralisme et ses métamorphoses. Plus encore, il faut questionner la notion d’égalité, d’émancipation, de liberté, de progrès, voire refuser de se conformer au modèle libéral de l’individu. Un individu qui ne souffre aucune entrave à sa liberté de jouir et de s’accomplir, un étalon de la modernité qui « fait écho au désir de consommer, sert de moteur au marché, et permet de détourner l’attention des injustices économiques et sociales qui résultent de la discrimination et des formes structurelles de l’inégalité »[10]. Nous avons besoin d’une pensée globale qui pense une alternative à une civilisation occidentale en déclin et qui a atteint ses limites. En d’autres termes, penser le genre et quels types de relations hommes/femmes ne peut pas faire l’économie d’une remise en cause radicale de la modernité occidentale et d’une réflexion sur son alternative civilisationnelle.
3/ Prendre en compte l’imbrication des oppressions que les femmes subissent en tant que sujets coloniaux à l’intérieur des métropoles impérialistes ou en tant que sujet de l’empire dans les pays du Sud.

Les femmes blanches subissent au pire deux oppressions : de classe si elles sont pauvres et de genre. Les femmes du sud subissent pratiquement toujours et systématiquement les trois oppressions : de genre, de race et de classe. L’imbrication des trois fait qu’elles sont souvent écrasées par le poids de leur condition[11]. Je vous donne un exemple qui m’a beaucoup frappée. A la question, pourquoi n’avez-vous pas porté plainte, la victime of color d’un viol répond à l’interviewer noir : « Je n’ai jamais porté plainte parce que je voulais vous protéger. Je ne pouvais pas supporter de voir un autre homme noir en prison« [12]. Je vous laisse méditer cet exemple. Je lui ajoute celui de nombre d’amies chicanas vivant aux États-Unis auprès desquelles j’ai appris beaucoup et notamment comment elles s’organisent face à la menace du viol à l’intérieur de leur communauté. Entre la violence masculine interne et la pression policière qui vise essentiellement les hommes, elles mettent en place des systèmes de veille et d’alarme qui peuvent dissuader les agresseurs mais qui restent précaires. Mais entre elles, la chose est entendue. On ne fait jamais appel aux forces de l’ordre. Vous comprenez bien que cette situation est intenable et que la marge de manœuvre de nombre de femmes non blanches est extrêmement tenue. C’est ce qu’Audre Lorde dit : « Il est vital de traiter sans relâche la question du racisme, et du racisme blanc contre le peuple noir – de le reconnaître comme un domaine légitime de recherche. Nous devons aussi examiner la manière dont nous avons absorbé le sexisme et l’hétérosexisme. Ce sont là les normes du dragon dans lequel nous sommes nés – et nous devons examiner ces distorsions avec la même ouverture et la même implication que celles mobilisées contre le racisme… ». Audre Lorde se montre exigeante en tant que femme et elle a raison. Nos communautés ne peuvent pas faire l’économie de cette introspection. J’ajoute que les hommes of color doivent apprendre à aimer les femmes of color et comprendre leur sacrifice comme elles comprennent la nécessité de les protéger[13]. Je disais plus haut que le féminisme est un phénomène politique occidental. Mais cela ne signifie pas que les femmes du sud n’ont pas développé avant l’ère coloniale, pendant et après des stratégies et des formes de lutte qui leur sont propres et qui sont adaptées à leur milieu et à leur condition matérielle. Je crois pour ma part et grâce à l’expérience de nos modèles historiques, de nos mères, grand-mères, grandes sœurs, que les femmes of color ont toujours résisté et qu’elles nous ont transmis un sens aigu de la dignité. Les récits, les poésies, les chansons témoignent de leur lucidité quant à la violence masculine. Elles n’ont pas de leçons à recevoir. J’entends souvent des femmes de mon entourage dire : « Mon modèle c’est ma mère » ou « Nos vrais modèles, ce sont les femmes de chez nous ». Il est important d’envisager notre bien être en tant que femmes à partir de cet héritage sensible.
4/ Intégrer l’oppression spécifique du genre masculin non blanc

James Baldwin : « Les femmes en savent bien plus que les hommes ». Audre Lorde : « Et pourquoi ? Pour les mêmes raisons qui font que les Noirs savent ce que les Blancs pensent. C’est une question de survie ».

Oui, les femmes, de part leur condition, en savent plus, et c’est pour cette raison qu’elles ont toujours été plus stratèges…ou rusées diront d’autres. Elles savent notamment qu’il n’y a pas que le genre féminin qui est dominé. Le genre masculin non-Blanc l’est tout autant, voire plus en milieux blanc.

« Sais-tu ce qui arrive à une homme lorsqu’il a honte de lui-même, lorsqu’il ne trouve pas de boulot ? Lorsque ses chaussettes puent ? Lorsqu’il ne peut protéger personne ? Lorsqu’il ne peut rien faire ? Sais-tu ce qui arrive à un homme lorsqu’il ne peut pas faire face à ses enfants parce qu’il a honte de lui-même ? Ce n’est pas comme être une femme… », dit James Baldwin.

L’homme non-Blanc était et reste la cible privilégié du racisme colonial. Sa sexualité est bestiale, il est un voleur, violeur et un voileur de femmes. En Europe, les prisons regorgent de Noirs et d’Arabes, les contrôles au faciès ne concernent que les hommes et ils sont les principales cibles de la police. C’est aux yeux des femmes de leur communauté que les hommes non blancs sont diminués. Et c’est bien ces mêmes femmes qu’ils tentent désespérément de reconquérir souvent par la violence. Dans une société castratrice, patriarcale et raciste (ou subissant l’impérialisme), exister, c’est exister virilement. Un féminisme décolonial ne peut pas ne pas prendre en compte ce « trouble dans le genre » masculin indigène car l’oppression des hommes rejaillit immédiatement sur les femmes. Je dirais même qu’il en est une donnée cardinale. C’est là que l’affirmation « l’homme indigène n’est pas notre ennemi principal » prend tout son sens.

James Baldwin dit : «L’homme noir a un pénis. Et ils le lui ont arraché. Un homme noir est un *****lorsqu’il essaie d’être un modèle pour ses enfants et qu’il essaie de protéger sa femme. C’est un crime majeur dans cette république. Et tout homme noir sait cela. Et toute femme noire en paie le prix. Et tout enfant noir également ». Audre Lorde ajoute : « Les flics tuent les hommes et les hommes tuent les femmes. Je parle de viol, je parle de meurtre ».

En effet, ce sont elles qui subissent de plein fouet l’humiliation qui leur est faite. La castration virile, conséquence du racisme structurel, est une humiliation que les hommes font subir à leurs femmes, sœurs, filles. En d’autres termes, plus la pensée hégémonique dira que les hommes racisés sont barbares, plus ils opprimeront les femmes de leur entourage. Ce sont les effets du patriarcat blanc et raciste qui exacerbent les rapports de genre en milieux indigène. C’est pourquoi un féminisme décolonial doit avoir comme impératif de refuser radicalement les discours et pratiques qui stigmatisent les hommes non-blancs et qui dans le même mouvement innocente le patriarcat blanc pourtant structurel en Europe. Je crois percevoir qu’Audre Lorde en a conscience lorsqu’elle dit à Baldwin : « Il est vital pour moi d’être capable de t’écouter, d’entendre ce qui te définit, et pour toi de m’écouter, et entendre ce qui me définit. Car aussi longtemps que nous évoluerons à l’intérieur de ce vieux modèle, il ne servira à personne comme il ne nous a jamais servis ».

Cela a des implications politiques et stratégiques. Cela signifie que nous devons engager avec les hommes, une réflexion sur la masculinité comme nous y invite le très lucide James Baldwin lorsqu’il dit à Lorde : « Il n’y a aucun modèle de masculinité dans ce pays qu’on peut respecter. Une partie de l’horreur d’être noir américain est d’être piégé dans le fait de jouer le rôle de l’imitation d’une imitation ».

Ainsi un féminisme décolonial doit se donner comme objectif de détruire l’imitation de l’imitation. Ce qui sera nécessairement un travail d’orfèvre. Il faudra en effet deviner dans la virilité testostéronée de mâle indigène, la part qui résiste à la domination blanche, la canaliser, en neutraliser la violence sexiste pour l’orienter vers un projet de libération commun. On ne naît pas homme indigène, on le devient.
5/ Repenser la solidarité internationale et favoriser les alliances Sud-Sud

Je pense d’abord, qu’avant de penser la solidarité du Nord vers le Sud, il faut en priorité penser la solidarité et le dialogue Sud-Sud. Il est urgent de récréer une fraternité des damnés de la terre et de réinsérer les luttes dans l’histoire anticoloniale et anti-impérialiste, renouer avec l’esprit de la tricontinentale en quelque sorte. Pourquoi ? S’il est vrai que les conflits d’intérêt, fractures et divisions sont fort nombreux (entre Etats-nations, ethniques, religieux, de genre, de couleur), il existe une unité de condition de la majorité des peuples du sud qui subissent une double violence : celle militaire, politique, économique et culturelle de l’occident et celle autoritaire et dictatoriale de leurs propres gouvernants. La convergence des luttes entre femmes maliennes, marocaines et guatémaltèques est plus cohérente que celle plus artificielle entre les femmes du Sud et les femmes européennes. En effet, je ne pense pas qu’il existe un universel féminin car les intérêts qui unissent les hommes blancs et les femmes blanches sont bien plus puissants que ceux qui peuvent unir les femmes blanches et les femmes des Suds. Pensons à ceci : pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la minorité des femmes occidentales (dominées par le patriarcat de leur société respective) ont un capital économique, politique et symbolique dix fois plus important que la majorité des hommes de la planète[14]. Ce fait parfaitement indéniable mais non pensé bat en brèche l’idée d’une sororité universelle fondée sur l’oppression de genre. Penser qu’il puisse y avoir une solidarité pure entre les femmes du Sud et les femmes du Nord simplement parce qu’elles sont femmes et victimes du patriarcat sans que les conflits d’intérêt ne surgissent, c’est croire qu’il puisse y avoir convergence d’intérêt entre bourgeois et prolétaires.

Pour autant, je ne pense pas qu’il faille refuser la solidarité du Nord vers le Sud. Au contraire, il faut la développer. Mais j’aimerai ici apporter une nuance. Il y a un Nord of color et il y a un Nord blanc anti-impérialiste. Et chacun de ces groupes a sa propre mission. Le degré de dépendance des peuples du Sud est tel que souvent cette solidarité se négocie à partir des conditions posées par les progressistes occidentaux. Le rôle des non-Blancs d’Occident, qui ont globalement une sensibilité tiers-mondiste plus forte et plus authentique (de part leur statut de victimes historiques du colonialisme) peuvent devenir des forces d’influence à la fois pour faire progresser l’anti-impérialisme en milieu blanc mais également pour contraindre les anti-impérialistes blancs à ne pas conditionner leur soutien par l’adhésion des peuples du Sud à leurs « valeurs », à leurs agendas. C’est-à-dire combattre leur impérialisme pour ce qu’il est et cesser d’exiger des victimes qu’elles donnent des certificats de bonne conduite anticapitaliste, féministe, marxiste, séculaires, progressiste… Cela pourrait commencer, comme le suggère la stimulante Silvia Federici[15], par une critique radicale de la nouvelle division internationale du travail (NDIT) dont le caractère antiféministe est largement éprouvé et qui intègre les femmes du Tiers-monde dans l’économie mondiale pour en exploiter férocement la force de travail au profit du Nord : substitution du patriarcat local par un patriarcat néolibéral, extrême paupérisation, retour de nouvelles formes d’esclavage, trafic international des bébés, massification du travail domestique, massification de la prostitution et de l’industrie du sexe…Cela étant dit, nous-mêmes, les non-Blancs du Nord, sommes privilégiés. Nos intérêts objectifs divergent de ceux des peuples du Sud. Nous devons en avoir conscience et ne pas nous substituer à leurs luttes. Si je devais résumer la situation, je préconiserai trois démarches complémentaires : les peuples du Sud sous domination impérialiste doivent établir leur propre agenda, cesser de regarder vers le Nord et privilégier des alliances Sud-Sud. Les non-Blancs du Nord doivent s’allier prioritairement avec les non-Blancs du Nord. Il est urgent d’accélérer le développement des forces de résistances décoloniales dans le Nord. Celles-ci doivent avoir deux objectifs : lutter contre le racisme structurel des sociétés blanches et combattre l’impérialisme de leurs Etats respectifs en créant des synergies à travers l’Europe, l’Australie et les Etats-Unis. Il faut dès à présent envisager de grands rassemblements internationaux des peuples non-Blancs de l’intérieur de l’Occident. Enfin, les Blancs antiracistes et anti-impérialistes doivent comme les non-Blancs combattre les politiques impérialistes et néolibérales de leur pays, aider à décoloniser leurs organisations et renoncer à dicter la meilleure façon de lutter. L’ensemble de cette démarche pourrait s’apparenter à une division internationale du travail militant pour à la fois contenir les effets dévastateurs de la crise du capitalisme qui est aussi une crise de civilisation et participer à la transition vers un modèle plus humain, tout simplement.

Je voudrais conclure avec une citation de Baldwin que je veux faire mienne et dans laquelle je devine une forte spiritualité et en même temps un potentiel libérateur : « Je crois que le sens noir de la masculinité et de la féminité est bien plus sophistiqué que le sens occidental ».

Houria Bouteldja

Berkeley, 15 avril 2014

[1]A ce propos, lire l’excellent « Comprendre la violence sexiste à l’ère du néolibéralisme » de Tithi Bhattacharya http://revueperiode.net/comprendre-la-violence-sexiste-a-lere-du-neoliberalisme/

[2] Le féminisme européen est évidemment pluriel. Il peut être d’Etat, libéral, néolibéral, impérialiste ou au contraire radical, antilibéral, anti-impérialiste et antiraciste. C’est de sa version dominante dont il sera question ici.

[3]http://sonofbaldwin.tumblr.com/post/72976016835/trigger-warning-ableist-speech-sexism-revolutionary

[4] Une histoire de la révolution française, Eric Hazan, éditions La Fabrique

[5] Domenico Losurdo, Le péché original du XXe siècle, éditions Aden.

[6] Sadri Khiari, La contre-révolution coloniale en France de de Gaulle à Sarkozy, éditions La Fabrique

[7] The invention of women, Oyéronké Oyewumi, University of Minnesota Press

[8] « Réflexions sur les alliances féministes transnationales »

[9] « Les nations obscures. Une histoire populaire du tiers monde », De Vijay Prashad, Editions Ecosociété

[10] Emancipation et Egalité : une généalogie critique, Joan Scott

[11] Sur les limites de la notion d’intersectionalité, lire : http://indigenes-republique.fr/race-classe-et-genre-lintersectionalite-entre-realite-sociale-et-limites-politiques/

[12]http://www.huffingtonpost.com/gordon-braxton/this-sexual-assault-victi_b_5125310.html?utm_hp_ref=fb&src=sp&comm_ref=false

[13] A propose de la notion de sacrifice, lire : http://indigenes-republique.fr/universalisme-gay-homoracialisme-et-mariage-pour-tous-2/

[14] Voir « la matrice du pouvoir », Ramon Grosfoguel / https://www.youtube.com/watch?v=mVC5G49Ps4M

[15] Reproduction et lutte féministes dans la nouvelle division internationale du travail, Silvia Federici http://revueperiode.net/reproduction-et-lutte-feministe-dans-la-nouvelle-division-internationale-du-travail/

MO2014

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Message  Eugene Duhring Lun 15 Sep - 20:44

MO2014 a écrit:Féministes ou pas ? Penser la possibilité d’un « féminisme décolonial » avec James Baldwin et Audre Lorde
Houria Bouteldja 14 septembre 2014


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3/ Prendre en compte l’imbrication des oppressions que les femmes subissent en tant que sujets coloniaux à l’intérieur des métropoles impérialistes ou en tant que sujet de l’empire dans les pays du Sud.

Les femmes blanches subissent au pire deux oppressions : de classe si elles sont pauvres et de genre. Les femmes du sud subissent pratiquement toujours et systématiquement les trois oppressions : de genre, de race et de classe. L’imbrication des trois fait qu’elles sont souvent écrasées par le poids de leur condition[11]. Je vous donne un exemple qui m’a beaucoup frappée. A la question, pourquoi n’avez-vous pas porté plainte, la victime of color d’un viol répond à l’interviewer noir : « Je n’ai jamais porté plainte parce que je voulais vous protéger. Je ne pouvais pas supporter de voir un autre homme noir en prison« [12]. Je vous laisse méditer cet exemple. Je lui ajoute celui de nombre d’amies chicanas vivant aux États-Unis auprès desquelles j’ai appris beaucoup et notamment comment elles s’organisent face à la menace du viol à l’intérieur de leur communauté. Entre la violence masculine interne et la pression policière qui vise essentiellement les hommes, elles mettent en place des systèmes de veille et d’alarme qui peuvent dissuader les agresseurs mais qui restent précaires. Mais entre elles, la chose est entendue. On ne fait jamais appel aux forces de l’ordre. Vous comprenez bien que cette situation est intenable et que la marge de manœuvre de nombre de femmes non blanches est extrêmement tenue. C’est ce qu’Audre Lorde dit : « Il est vital de traiter sans relâche la question du racisme, et du racisme blanc contre le peuple noir – de le reconnaître comme un domaine légitime de recherche. Nous devons aussi examiner la manière dont nous avons absorbé le sexisme et l’hétérosexisme. Ce sont là les normes du dragon dans lequel nous sommes nés – et nous devons examiner ces distorsions avec la même ouverture et la même implication que celles mobilisées contre le racisme… ». Audre Lorde se montre exigeante en tant que femme et elle a raison. Nos communautés ne peuvent pas faire l’économie de cette introspection. J’ajoute que les hommes of color doivent apprendre à aimer les femmes of color et comprendre leur sacrifice comme elles comprennent la nécessité de les protéger[13]. Je disais plus haut que le féminisme est un phénomène politique occidental. Mais cela ne signifie pas que les femmes du sud n’ont pas développé avant l’ère coloniale, pendant et après des stratégies et des formes de lutte qui leur sont propres et qui sont adaptées à leur milieu et à leur condition matérielle. Je crois pour ma part et grâce à l’expérience de nos modèles historiques, de nos mères, grand-mères, grandes sœurs, que les femmes of color ont toujours résisté et qu’elles nous ont transmis un sens aigu de la dignité. Les récits, les poésies, les chansons témoignent de leur lucidité quant à la violence masculine. Elles n’ont pas de leçons à recevoir. J’entends souvent des femmes de mon entourage dire : « Mon modèle c’est ma mère » ou « Nos vrais modèles, ce sont les femmes de chez nous ». Il est important d’envisager notre bien être en tant que femmes à partir de cet héritage sensible.
4/ Intégrer l’oppression spécifique du genre masculin non blanc

James Baldwin : « Les femmes en savent bien plus que les hommes ». Audre Lorde : « Et pourquoi ? Pour les mêmes raisons qui font que les Noirs savent ce que les Blancs pensent. C’est une question de survie ».

Oui, les femmes, de part leur condition, en savent plus, et c’est pour cette raison qu’elles ont toujours été plus stratèges…ou rusées diront d’autres. Elles savent notamment qu’il n’y a pas que le genre féminin qui est dominé. Le genre masculin non-Blanc l’est tout autant, voire plus en milieux blanc.

« Sais-tu ce qui arrive à une homme lorsqu’il a honte de lui-même, lorsqu’il ne trouve pas de boulot ? Lorsque ses chaussettes puent ? Lorsqu’il ne peut protéger personne ? Lorsqu’il ne peut rien faire ? Sais-tu ce qui arrive à un homme lorsqu’il ne peut pas faire face à ses enfants parce qu’il a honte de lui-même ? Ce n’est pas comme être une femme… », dit James Baldwin.

L’homme non-Blanc était et reste la cible privilégié du racisme colonial. Sa sexualité est bestiale, il est un voleur, violeur et un voileur de femmes. En Europe, les prisons regorgent de Noirs et d’Arabes, les contrôles au faciès ne concernent que les hommes et ils sont les principales cibles de la police. C’est aux yeux des femmes de leur communauté que les hommes non blancs sont diminués. Et c’est bien ces mêmes femmes qu’ils tentent désespérément de reconquérir souvent par la violence. Dans une société castratrice, patriarcale et raciste (ou subissant l’impérialisme), exister, c’est exister virilement. Un féminisme décolonial ne peut pas ne pas prendre en compte ce « trouble dans le genre » masculin indigène car l’oppression des hommes rejaillit immédiatement sur les femmes. Je dirais même qu’il en est une donnée cardinale. C’est là que l’affirmation « l’homme indigène n’est pas notre ennemi principal » prend tout son sens.

James Baldwin dit : «L’homme noir a un pénis. Et ils le lui ont arraché. Un homme noir est un *****lorsqu’il essaie d’être un modèle pour ses enfants et qu’il essaie de protéger sa femme. C’est un crime majeur dans cette république. Et tout homme noir sait cela. Et toute femme noire en paie le prix. Et tout enfant noir également ». Audre Lorde ajoute : « Les flics tuent les hommes et les hommes tuent les femmes. Je parle de viol, je parle de meurtre ».

En effet, ce sont elles qui subissent de plein fouet l’humiliation qui leur est faite. La castration virile, conséquence du racisme structurel, est une humiliation que les hommes font subir à leurs femmes, sœurs, filles. En d’autres termes, plus la pensée hégémonique dira que les hommes racisés sont barbares, plus ils opprimeront les femmes de leur entourage. Ce sont les effets du patriarcat blanc et raciste qui exacerbent les rapports de genre en milieux indigène. C’est pourquoi un féminisme décolonial doit avoir comme impératif de refuser radicalement les discours et pratiques qui stigmatisent les hommes non-blancs et qui dans le même mouvement innocente le patriarcat blanc pourtant structurel en Europe. Je crois percevoir qu’Audre Lorde en a conscience lorsqu’elle dit à Baldwin : « Il est vital pour moi d’être capable de t’écouter, d’entendre ce qui te définit, et pour toi de m’écouter, et entendre ce qui me définit. Car aussi longtemps que nous évoluerons à l’intérieur de ce vieux modèle, il ne servira à personne comme il ne nous a jamais servis ».

Cela a des implications politiques et stratégiques. Cela signifie que nous devons engager avec les hommes, une réflexion sur la masculinité comme nous y invite le très lucide James Baldwin lorsqu’il dit à Lorde : « Il n’y a aucun modèle de masculinité dans ce pays qu’on peut respecter. Une partie de l’horreur d’être noir américain est d’être piégé dans le fait de jouer le rôle de l’imitation d’une imitation ».

Ainsi un féminisme décolonial doit se donner comme objectif de détruire l’imitation de l’imitation. Ce qui sera nécessairement un travail d’orfèvre. Il faudra en effet deviner dans la virilité testostéronée de mâle indigène, la part qui résiste à la domination blanche, la canaliser, en neutraliser la violence sexiste pour l’orienter vers un projet de libération commun. On ne naît pas homme indigène, on le devient.
5/ Repenser la solidarité internationale et favoriser les alliances Sud-Sud

Je pense d’abord, qu’avant de penser la solidarité du Nord vers le Sud, il faut en priorité penser la solidarité et le dialogue Sud-Sud. Il est urgent de récréer une fraternité des damnés de la terre et de réinsérer les luttes dans l’histoire anticoloniale et anti-impérialiste, renouer avec l’esprit de la tricontinentale en quelque sorte. Pourquoi ? S’il est vrai que les conflits d’intérêt, fractures et divisions sont fort nombreux (entre Etats-nations, ethniques, religieux, de genre, de couleur), il existe une unité de condition de la majorité des peuples du sud qui subissent une double violence : celle militaire, politique, économique et culturelle de l’occident et celle autoritaire et dictatoriale de leurs propres gouvernants. La convergence des luttes entre femmes maliennes, marocaines et guatémaltèques est plus cohérente que celle plus artificielle entre les femmes du Sud et les femmes européennes. En effet, je ne pense pas qu’il existe un universel féminin car les intérêts qui unissent les hommes blancs et les femmes blanches sont bien plus puissants que ceux qui peuvent unir les femmes blanches et les femmes des Suds. Pensons à ceci : pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la minorité des femmes occidentales (dominées par le patriarcat de leur société respective) ont un capital économique, politique et symbolique dix fois plus important que la majorité des hommes de la planète[14]. Ce fait parfaitement indéniable mais non pensé bat en brèche l’idée d’une sororité universelle fondée sur l’oppression de genre. Penser qu’il puisse y avoir une solidarité pure entre les femmes du Sud et les femmes du Nord simplement parce qu’elles sont femmes et victimes du patriarcat sans que les conflits d’intérêt ne surgissent, c’est croire qu’il puisse y avoir convergence d’intérêt entre bourgeois et prolétaires.

Pour autant, je ne pense pas qu’il faille refuser la solidarité du Nord vers le Sud. Au contraire, il faut la développer. Mais j’aimerai ici apporter une nuance. Il y a un Nord of color et il y a un Nord blanc anti-impérialiste. Et chacun de ces groupes a sa propre mission. Le degré de dépendance des peuples du Sud est tel que souvent cette solidarité se négocie à partir des conditions posées par les progressistes occidentaux. Le rôle des non-Blancs d’Occident, qui ont globalement une sensibilité tiers-mondiste plus forte et plus authentique (de part leur statut de victimes historiques du colonialisme) peuvent devenir des forces d’influence à la fois pour faire progresser l’anti-impérialisme en milieu blanc mais également pour contraindre les anti-impérialistes blancs à ne pas conditionner leur soutien par l’adhésion des peuples du Sud à leurs « valeurs », à leurs agendas. C’est-à-dire combattre leur impérialisme pour ce qu’il est et cesser d’exiger des victimes qu’elles donnent des certificats de bonne conduite anticapitaliste, féministe, marxiste, séculaires, progressiste… Cela pourrait commencer, comme le suggère la stimulante Silvia Federici[15], par une critique radicale de la nouvelle division internationale du travail (NDIT) dont le caractère antiféministe est largement éprouvé et qui intègre les femmes du Tiers-monde dans l’économie mondiale pour en exploiter férocement la force de travail au profit du Nord : substitution du patriarcat local par un patriarcat néolibéral, extrême paupérisation, retour de nouvelles formes d’esclavage, trafic international des bébés, massification du travail domestique, massification de la prostitution et de l’industrie du sexe…Cela étant dit, nous-mêmes, les non-Blancs du Nord, sommes privilégiés. Nos intérêts objectifs divergent de ceux des peuples du Sud. Nous devons en avoir conscience et ne pas nous substituer à leurs luttes. Si je devais résumer la situation, je préconiserai trois démarches complémentaires : les peuples du Sud sous domination impérialiste doivent établir leur propre agenda, cesser de regarder vers le Nord et privilégier des alliances Sud-Sud. Les non-Blancs du Nord doivent s’allier prioritairement avec les non-Blancs du Nord. Il est urgent d’accélérer le développement des forces de résistances décoloniales dans le Nord. Celles-ci doivent avoir deux objectifs : lutter contre le racisme structurel des sociétés blanches et combattre l’impérialisme de leurs Etats respectifs en créant des synergies à travers l’Europe, l’Australie et les Etats-Unis. Il faut dès à présent envisager de grands rassemblements internationaux des peuples non-Blancs de l’intérieur de l’Occident. Enfin, les Blancs antiracistes et anti-impérialistes doivent comme les non-Blancs combattre les politiques impérialistes et néolibérales de leur pays, aider à décoloniser leurs organisations et renoncer à dicter la meilleure façon de lutter. L’ensemble de cette démarche pourrait s’apparenter à une division internationale du travail militant pour à la fois contenir les effets dévastateurs de la crise du capitalisme qui est aussi une crise de civilisation et participer à la transition vers un modèle plus humain, tout simplement.

Je voudrais conclure avec une citation de Baldwin que je veux faire mienne et dans laquelle je devine une forte spiritualité et en même temps un potentiel libérateur : « Je crois que le sens noir de la masculinité et de la féminité est bien plus sophistiqué que le sens occidental ».

Houria Bouteldja

Berkeley, 15 avril 2014

[1]A ce propos, lire l’excellent « Comprendre la violence sexiste à l’ère du néolibéralisme » de Tithi Bhattacharya http://revueperiode.net/comprendre-la-violence-sexiste-a-lere-du-neoliberalisme/

[2] Le féminisme européen est évidemment pluriel. Il peut être d’Etat, libéral, néolibéral, impérialiste ou au contraire radical, antilibéral, anti-impérialiste et antiraciste. C’est de sa version dominante dont il sera question ici.

[3]http://sonofbaldwin.tumblr.com/post/72976016835/trigger-warning-ableist-speech-sexism-revolutionary

[4] Une histoire de la révolution française, Eric Hazan, éditions La Fabrique

[5] Domenico Losurdo, Le péché original du XXe siècle, éditions Aden.

[6] Sadri Khiari, La contre-révolution coloniale en France de de Gaulle à Sarkozy, éditions La Fabrique

[7] The invention of women, Oyéronké Oyewumi, University of Minnesota Press

[8] « Réflexions sur les alliances féministes transnationales »

[9] « Les nations obscures. Une histoire populaire du tiers monde », De Vijay Prashad, Editions Ecosociété

[10] Emancipation et Egalité : une généalogie critique, Joan Scott

[11] Sur les limites de la notion d’intersectionalité, lire : http://indigenes-republique.fr/race-classe-et-genre-lintersectionalite-entre-realite-sociale-et-limites-politiques/

[12]http://www.huffingtonpost.com/gordon-braxton/this-sexual-assault-victi_b_5125310.html?utm_hp_ref=fb&src=sp&comm_ref=false

[13] A propose de la notion de sacrifice, lire : http://indigenes-republique.fr/universalisme-gay-homoracialisme-et-mariage-pour-tous-2/

[14] Voir « la matrice du pouvoir », Ramon Grosfoguel / https://www.youtube.com/watch?v=mVC5G49Ps4M

[15] Reproduction et lutte féministes dans la nouvelle division internationale du travail, Silvia Federici http://revueperiode.net/reproduction-et-lutte-feministe-dans-la-nouvelle-division-internationale-du-travail/


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Houria Bouteldja

Berkeley, 15 avril 2014

[1]A ce propos, lire l’excellent « Comprendre la violence sexiste à l’ère du néolibéralisme » de Tithi Bhattacharya http://revueperiode.net/comprendre-la-violence-sexiste-a-lere-du-neoliberalisme/

[2] Le féminisme européen est évidemment pluriel. Il peut être d’Etat, libéral, néolibéral, impérialiste ou au contraire radical, antilibéral, anti-impérialiste et antiraciste. C’est de sa version dominante dont il sera question ici.

[3]http://sonofbaldwin.tumblr.com/post/72976016835/trigger-warning-ableist-speech-sexism-revolutionary

[4] Une histoire de la révolution française, Eric Hazan, éditions La Fabrique

[5] Domenico Losurdo, Le péché original du XXe siècle, éditions Aden.

[6] Sadri Khiari, La contre-révolution coloniale en France de de Gaulle à Sarkozy, éditions La Fabrique

[7] The invention of women, Oyéronké Oyewumi, University of Minnesota Press

[8] « Réflexions sur les alliances féministes transnationales »

[9] « Les nations obscures. Une histoire populaire du tiers monde », De Vijay Prashad, Editions Ecosociété

[10] Emancipation et Egalité : une généalogie critique, Joan Scott

[11] Sur les limites de la notion d’intersectionalité, lire : http://indigenes-republique.fr/race-classe-et-genre-lintersectionalite-entre-realite-sociale-et-limites-politiques/

[12]http://www.huffingtonpost.com/gordon-braxton/this-sexual-assault-victi_b_5125310.html?utm_hp_ref=fb&src=sp&comm_ref=false

[13] A propose de la notion de sacrifice, lire : http://indigenes-republique.fr/universalisme-gay-homoracialisme-et-mariage-pour-tous-2/

[14] Voir « la matrice du pouvoir », Ramon Grosfoguel / https://www.youtube.com/watch?v=mVC5G49Ps4M

[15] Reproduction et lutte féministes dans la nouvelle division internationale du travail, Silvia Federici http://revueperiode.net/reproduction-et-lutte-feministe-dans-la-nouvelle-division-internationale-du-travail/

A vomir !!
Pourquoi ne pas déplacer cette intervention dans le fil féminisme et susciter les commentaires qu'elle mérite ?
J'attends de voir comment Toussaint justifiera cette merde ??

Eugene Duhring

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Message  MO2014 Mar 16 Sep - 13:54

Eugene Duhring a écrit:
A vomir !!
Pourquoi ne pas déplacer cette intervention dans le fil féminisme et susciter les commentaires qu'elle mérite ?
J'attends de voir comment Toussaint justifiera cette merde ??

Justement des thèses très proches ont été promues, il y a quelques jours, dans le fil consacré au Féminisme à propos de l'excellent livre d'Ali Zahra, "Féminismes islamiques"
https://forummarxiste.forum-actif.net/t77p165-feminisme#94428

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Message  MO2014 Jeu 18 Sep - 23:59

Samedi 20 septembre à l'Iremmo, 5 rue basse des carmes, 14h
Conférence exceptionnelle de Zouhair Lahna : 51 jours à Gaza

Publié le 12 septembre 2014 par PIR

Indigènes de la République - Page 11 Zouhair-400x225

Zouhair Lahna, chirurgien, a passé 51 jours à Gaza lors des raids israéliens. 51 jours, c’est aussi la durée de cette agression entre frappes aériennes, assassinats politiques, liquidation de combattants et de crimes de guerre. Il a été malgré lui un témoin privilégié de ces « dégâts collatéraux » faits de civils, enfants et femmes. Mais aussi acteur avec les équipes de sauvetage pour réparer et soigner aux urgences de l’hôpital Shifa de Gaza ou celui de Nacer à Khan Younes.

Il sera accompagné de Youssef Boussoumah (PIR) qui proposera un bilan général des mobilisations pro palestiniennes de cet été et avec qui nous tenterons d’envisager l’avenir de la solidarité avec la Palestine.

Zouhair Lahna est chirurgien obstétricien marocain et acteur associatif. Ancien chef de clinique des Universités de Paris VII et membre de Médecins Sans Frontières, il a participé à plusieurs opérations humanitaires à travers le monde, dont la dernière à Gaza.
Youssef Boussoumah est membre du PIR et fondateur des CCIPPP (Campagnes Civiles Internationales pour la Protection du Peuple Palestinien)

La conférence aura lieu samedi 20 septembre à l’Iremmo, 5 rue basse des carmes, 14h.

PAF : 2€

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Message  Carlo Rubeo Sam 20 Sep - 11:23

Indigènes de la République : derrière le "féminisme islamique", le racisme et le patriarcat

Les groupes anti-avortement dans leur propagande destinée au grand public mettent en avant la question du statut du fœtus, qu’ils assimilent à un être vivant, pour justifier leur combat contre un droit essentiel pour toutes les femmes, qu’elles en fassent ou non usage dans leur vie.

Ce mensonge sur le fœtus leur permet de contrecarrer l’attachement très fort des femmes à la liberté de disposer de leur propre corps : la plupart des mouvements contre l’avortement ne veulent pas se montrer comme des ennemis de la liberté , et la présentation de l’IVG comme le meurtre d’un autre être vivant leur permet de justifier idéologiquement l’interdiction éventuelle de l’avortement. Les femmes ne sont pas des objets, "d’accord" , dira le militant d’extrême-droite "mais le fœtus non plus".

En réalité, un des fondements idéologiques et pratique de l’opposition à l’avortement est tout autre : ses partisans en France, sont tous également des idéologues racistes pour qui le monde est divisé en « civilisations » ou en « races », engagées dans une guerre à mort. Dans cette guerre, la question démographique est essentielle à leurs yeux. La femme est l’outil nécessaire de la reproduction et son corps ne peut lui appartenir, il appartient au « peuple », ou à la « communauté » .

La plupart des militants d’extrême droite qui se battent contre l’IVG ont naturellement suffisamment de culture scientifique pour savoir que le fœtus n’est pas un être humain.

Mais ils savent que le mouvement de libération des femmes a créé partout la prise de conscience, l’autonomie, et que la domination patriarcale a marqué le pas : des femmes aujourd’hui, partout dans le monde, ne se vivent plus comme redevables de quoi que ce soit à ceux qui les oppressent, et ne se sentent plus le devoir d’être de simples machines à produire les futurs soldats.

D’un coté, les fascistes ne mettent donc pas nécéssairement en avant la sauvegarde de la "civilisation blanche" ou "européenne" dans leur liste d’arguments contre l’avortement.
De l’autre, la plupart d’entre eux ont aussi une propagande raciste ouverte, et n’hésitent pas à présenter les femmes des peuples considérés comme inférieurs comme uniquement préoccupées de "pondre des mômes" pour que "leurs hommes" gagnent la guerre par la seule force du nombre.

Rien de neuf sous le soleil du racisme occidental. Mais l’intégration d’une partie des personnes issues de l’immigration dans la petite-bourgeoisie dominante a eu lieu depuis quelques années déjà, cette conception essentialiste de la « femme orientale », de la poule pondeuse et heureuse de l’être a trouvé de nouveaux défenseurs inattendus, issus de la gauche, et qui ont la particularité de se réclamer anti-colonialistes et féministes.

Et notamment les Indigènes de la République, et leur porte parole Houria Bouteldja.

Houria Bouteldja s’est toujours définie comme féministe : cependant, on aura bien du mal à trouver dans ses discours et ses interventions publiques ce que signifie positivement son féminisme. On trouvera des critiques, parfois justifiées, contre le féminisme bourgeois et ses dérives racistes, notamment à propos du port du voile. On trouvera aussi dans les collaborations des Indigènes avec Christine Delphy des développements sur ce qu’ils appellent les féministes « blanches ».

Mais Houria Bouteldja a récemment participé à un colloque sur le « féminisme islamique » en Espagne.

Dans son intervention, on cherchera en vain une définition du féminisme islamique ou du « féminisme décolonial » dont elle se revendique.

De fait ses propos dans le cadre de ce colloque sont clairs : pour elle, être féministe « décoloniale », c’est ne pas répondre à certaines questions. Car ce sont les questions qui posent problème…
Par exemple : se demander si le féminisme est compatible avec l’islam, c’est déjà être impérialiste et faire comme les journalistes « français », alors Houria Bouteldja ne se pose pas la question.

Intellectuelle de la petite bourgeoisie française, Houria Bouteldja ne peut en fait pas réaliser que les questions que l’on se pose ou pas sont liées à notre statut dans le réel : le féminisme n’est pas une posture idéologique qu’on choisit ou pas, mais une réponse à une oppression immédiate en premier lieu.
Grâce aux combats des femmes des siècles passés, Houria Bouteldja n’a pas à se poser la question : elle a accès à la contraception et à l’IVG , elle peut vivre sa vie et notamment voyager , assister à des colloques et y prendre la parole.

Ce n’est pas le cas de toutes les femmes sur toute la planète, évidemment.
Et toutes les femmes, sur toute la planète n’ont pas accès aux mêmes choix que Houria Boutelja : l’IVG par exemple est interdite et réprimée dans de nombreux pays. Et même dans ceux où elle est autorisée, y accéder est souvent une autre affaire, notamment en France, notamment pour les femmes prolétaires.

Etre féministe, ce n’est pas imposer l’usage de l’IVG aux femmes, ce n’est pas non plus ériger un modèle de comportement social en référence absolue. C’est simplement se battre pour que toutes les femmes puissent choisir.
C’est aussi poser une solidarité universelle avec toutes les femmes : non pas pour dire "toutes pareilles", mais pour faire en sorte que nous soyons tous égaux.

Or, dans ce colloque, Houria Bouteldja définit son « féminisme » de manière totalement inverse : selon elle, toutes les femmes de la planète ne vivent pas dans le « même espace-temps ». Et ne pas le reconnaître, c’est s’ingérer de manière impérialiste.
La porte-parole des Indigènes de la République donne donc un exemple de l’ingérence : celle de militantes « occidentales » en voyage en Palestine qui ont demandé à des femmes si elles avaient accès à l’IVG.
Cette question est selon Houria Bouteldja une ingérence parce que « Les palestiniennes ne comprenaient même pas qu’on puisse leur poser ce genre de questions tellement selon elles l’enjeu démographique en Palestine est important. Leur perspective est tout à fait autre. Pour beaucoup de femmes palestiniennes, faire des enfants est un acte de résistance face au nettoyage ethnique israélien. »

Les Indigènes de la République se sont fondés notamment sur l’idée que la parole des « néo-colonisés » en France était confisquée par les « élites blanches de la gauche » et qu’elle devait être reprise par les principaux concernés.
Mais on voit ici que ce n’est pas la confiscation de la parole aux concernées en général qui leur pose problème : dans un colloque féministe, Houria Bouteldja n’hésite pas à parler à la place d’autres femmes , "les" palestiniennes, en se fondant sur un récit qui lui a été faite par une non-palestinienne sur UNE discussion avec DES femmes palestiniennes.

Dans la tête de Bouteldja, il y a donc sur cette planète des femmes qui ont le droit de s’exprimer en leur propre nom et d’autres qui peuvent très bien être « représentées » par d’autres.
Il y a des femmes qui peuvent très bien se définir collectivement contre la société dans laquelle elles évoluent, qui peuvent remettre en cause l’ « espace-temps » qu’on leur impose, faire vivre une contre-culture collective et individuelle.

Houria Bouteldja prétend refuser l’intégration à la société occidentale dans laquelle elle vit et la soumission à ses normes oppressives, elle revendique le droit d’être une « Indigène de la République » et pas seulement une « française ».
Mais ce droit à l’auto-détermination , elle ne le reconnait pas à toutes les femmes : dans d’autres « espaces-temps », par exemple en Palestine, les femmes sont « les » Palestiniennes, et la résistance des femmes en Palestine, c’est….faire des enfants et répondre à l’enjeu démographique, point barre.
Soit très exactement ce que les dominants de la société où elles vivent leur demandent de faire. Soit très exactement ce que leur environnement sociologique immédiat leur impose par la propagande et aussi par la contrainte.

Il n’y pas un modèle fasciste qui n’impose l’oppression brutale, le patriarcat, et la négation de tout droit individuel sans s’appuyer sur la justification de la guerre. Cette guerre la plupart du temps n’est même pas une invention, car sous le règne du capitalisme, le monde entier est en guerre perpétuelle.
Pour autant, l’existence des guerres , des agressions contre une population ne justifient pas les agressions et la domination exercée par des membres de cette population contre d’autres membres de cette population.

En Palestine, les femmes qui résistaient activement à l’occupation israelienne ont été les premières victimes du Hamas : le mouvement féministe palestinien était dans les années 70 bien plus puissant et bien plus en pointe que dans de nombreux pays européens.
Le Hamas l’a attaqué et détruit physiquement, imposé la terreur et désigné les femmes qui lui résistaient comme des « collabos ».

Dans l’espace-temps d’Houria Bouteldja, ceci n’a jamais existé : il y a des pays où les femmes n’ont pas d’histoire. Dans le discours de Bouteldja, "les" palestiniennes sont un groupe homogène, a-historique où les individus ne sont qu’un objet au service d’un objectif "global", la "Résistance" , comme les Indigènes de la République appellent le Hamas.

A tout observateur objectif, ce discours de la porte-parole des Indigènes de la République en rappelle un autre : celui du colonisateur « humaniste » des siècles passés, celui qui se fondait sur le mythe du Bon Sauvage. Pour contrecarrer les critiques et les combats des premiers anti colonialistes qui dénonçaient l’état de misère matérielle et morale dans laquelle vivait l’immense majorité des population des pays envahis, certains colonialistes expliquaient que les dites populations souhaitaient vivre de cette manière, dans « le respect de leurs traditions »…traditions qui n’incluaient naturellement pas l’accès à l’électricité ou au contrôle des naissances par exemple.

D’ailleurs le droit imposé par les coloniaux a le plus souvent été non seulement un droit répressif féroce, mais également la reconnaissance de certaines « coutumes », notamment en droit civil, donc en ce qui concerne la gestion des rapports sociaux au quotidien, ce qui incluait notamment le statut de la femme et des règles oppressives. Le tout au nom du respect des « sociétés indigènes ». Le plus souvent ce droit civil se référait à l’ordre religieux.

L’ethno-différentialisme n’est donc pas d’invention récente, et ce que dit Houria Bouteldja n’est pas particulièrement original.
C’est tout simplement la parole raciste et sexiste classique, la même que celle du Bloc Identitaire ou des groupes anti IVG.

Elle permet notamment d’exercer une contrainte supplémentaire sur les femmes qui cherchent à se battre et à se libérer : si intégrer la norme patriarcale est un acte de Résistance, alors à l’inverse, la combattre est une collaboration avec l’ennemi.
Objectivement, ceci est totalement faux : par exemple, le pouvoir israelien couvre les crimes d’honneur commis sur les territoires qu’il contrôle, arguant le plus souvent qu’il s’agit d’affaires que les arabes doivent régler entre eux. Les féministes palestiniennes pourchassées par le Hamas sont criminalisées comme n’importe quelles autres résistantes par la police et l’armée israelienne.
Mais le rôle international de groupes comme les Indigènes de la République est important, car il s’agit bien d’isoler de toute solidarité extérieure ces femmes qui se battent à la fois contre la domination du pouvoir israelien et contre le patriarcat.

En propageant l’idée qu’il y aurait des "espaces temps" différents , on propage aussi l’idée que la libération antisexiste n’est pas à l’ordre du jour pour certaines femmes.
Et pourquoi s’arrêter aux Palestiniennes ? Après tout, les "Indigènes", les femmes issues de l’immigration en France vivent-elles dans le même espace temps que les "blanches" ?
Peuvent-elles se comprendre, toute discussion commune n’est-elle pas une ingérence d’un côté, une trahison de l’autre ?

Les Indigènes ont déjà commencé à présenter les choses de cette manière dans les luttes : certes, les dirigeantes comme Houria Bouteldja n’hésitent pas à s’allier avec les mouvements féministes post modernes les plus radicaux, et s’offrent le soutien d’intellectuelles comme Christine Delphy, mais pour mieux acter la séparation : il n’est pas question de revendications et d’approches communes, mais au contraire d’alliance au sommet, tandis qu’à la base, les unes défendront leur sexualité post genrée et les autres leur droit à porter le voile.

Chacun son pré-carré et les vaches à lait seront bien gardées.

Mais arabe ou pas, Houria Bouteldja est juste le produit de la classe moyenne de culture française, dont elle partage le statut social et le glissement global vers des valeurs réactionnaires, différentialistes et racistes.
Travailler avec les Indigènes de la République, pour une féministe, c’est la même chose que travailler avec n’importe quel groupe religieux ou politique opposé à l’avortement.

Par Luftmenschen
Carlo Rubeo
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Message  MO2014 Sam 20 Sep - 14:32

Ce texte est l'exemple caricatural de la lorgnette orientaliste selon lequel l'occident serait le détenteur universel de l'histoire y compris celle de sa critique (matérialisme historique,...etc.) et du féminisme qui par "essence" ne peut être "qu'universel" c'est à dire celui du monde blanc colonialiste ou post colonialiste. Comment ne pas voir la sainte alliance du Front National à certains élément du gauchisme en passant les laïques dont le texte ci dessus est une illustration d'un islam fantasmé comme concept essentialiste. Cette thèse essentialiste est directement issus du colonialisme où sexisme et discriminations racistes sont inséparables.  Cette essentialisme ne résiste pas à l'observation des conditions d'existence et de croyance, de lutte et de combats aussi hétérogènes que celles de l'Algérie, de l'indonésie, de l'Arabie Saoudite... Cette variété heurte de front la vision coloniale de la femme indigène monolithique que ne devrait se libérer avant tout de l'Islam en suivant les bons conseils d'un certain gauchisme blanc.

Si chaque réflexion émancipatrice met en bonne place le patriarcat celui se matérialise sous des formes qui dépendent directement des conditions d'existence s'inscrivant dans des modèles de dominations particuliers. Les différences salariales, les violences conjugales, les réseaux de traites de prostitution, la pornographie et l'aliénation vestimentaire ou d'apparence physique... etc.  sont hiérarchisées comme secondaires par rapport aux traditions musulmanes qui seraient "incompatibles" avec le féminisme.

Il faut ensuite noter que le terme islamophobie comme matérialisation moderne du racisme est totalement absent du texte au profit de la lutte contre les croyances et traditions musulmanes. Il sera peut être d'accord avec Manuel Valls qui , il y a quelques jours, faisait de l'antisémitisme sont ennemi principal en déclarant " « Se dire antisioniste ou nier le droit à l'existence de l'Etat d'Israël en voulant éviter l'accusation d'antisémitisme n'est pas possible »," , épousant ainsi la propagande de l'état d’Israël fer de lance de l'occident impérialiste sur place. Notre ami n'a sans doute pas vu la résistance exemplaire, civile et combattante, à Gaza ou  la mobilisation en défense des populations palestiniennes de Gaza à Paris cet été ou nous avons vu des milliers de musulmanes voilées ou non dans la rue contre la politique colonialiste d’Israël. Ce Luftmenschen préfère diriger ces coups contre ceux les musulmans de tradition ou croyance qui ne peuvent se libérer n'est ce pas puisqu'ils devraient d'abord se libérer de l'Islam...

Quand à l'absence de définition de « féminisme décolonial » il suffisait juste de lire le texte ci-dessus pour voir que dès les premières lignes une définition était proposée :
..il est un compromis entre une certaine résistance au féminisme expérimentée à la fois en Occident parmi les populations non blanches et dans le Tiers-monde et la réalité massive et inquiétante des violences multidimensionnelles faites aux femmes non blanches, violences produites par les États et le néo-libéralisme. En d’autres termes, il est un compromis entre le racisme et le sexisme institutionnels, il est un compromis entre la résistance au féminisme, à ses formes occidentalo-centrées et sa pénétration effective dans les mondes non-blancs, puis son adoption, puis sa réappropriation par une partie des femmes indigènes....
Le « féminisme décolonial » est ainsi un concept qui s’élabore dans le cadre d’un Etat, d’institutions et d’une société blanches, impérialistes, bourgeoises et patriarcales. C’est aussi un concept qui ambitionne de rendre compte de la condition concrète des femmes non blanches au travers des urgences qui sont les leurs en prenant en compte l’imbrication des rapports de classe, de race et de genre.

MO2014

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Message  Carlo Rubeo Sam 20 Sep - 18:19

Afin d'éviter les fantasmes racialistes typiques de la petite-bourgeoisie intellectuelle, je tiens à préciser ici que le camarade qui diffuse le texte au dessus et rédige le texte ci dessous n'est pas blanc.


Mme Bouteldja falsifie CLR James au service d’un « antisémitisme progressif »... imaginaire !

Une citation criminelle de Mme Houria Bouteldja circule sur les réseaux sociaux pour justifier les actes antisémites commis par les exploités. Je ne ferai aucune publicité aux propos indignes de cette dame qui s’identifie à Mohammed Merah (http://mondialisme.org/spip.php?article1822) pour faire le buzz et flatter son ego. Je me contenterai ici de procéder à une explication et une mise en contexte élémentaire du texte de CLR James qu’elle falsifie et dont elle extrait la citation suivante :

« Les mouvements qui cherchent à “faire sortir les Juifs de Harlem ou du quartier sud” ont une solide base de classe. Ils constituent les réactions du nègre revanchard qui cherche un secours économique et quelques remèdes à son orgueil de race humilié. Que ces sentiments puissent être exploités par des idiots fanatiques, des Nègres antisémites ou Nègres affairistes, cela ne saurait changer leur base fondamentalement progressive. Cet aspect progressif ne peut en aucune façon être confondu avec l’insatisfaction de la petite bourgeoisie blanche démoralisée qui cherche un refuge dans le fascisme. La réaction américaine peut financer et financera probablement ou encouragera quelques-uns de ces mouvements (Bilbo et Back to Africa) afin d’alimenter la malveillance. Mais les Nègres sont des prolétaires, des semi-prolétaires et des paysans dans leur composition sociale. Le cours général de l’histoire américaine est tel que tout mouvement fasciste d’étendue nationale (aussi déguisé soit-il) sera obligé d’attaquer la lutte des Nègres pour l’égalité. »

Ce qui est progressif pour CLR James ce n’est PAS DU TOUT L’ANTISEMITISME mais la revendication de vouloir émigrer en Afrique (rappelons qu’à l’époque Marcus Garvey avait encore beaucoup d’influence chez les Noirs américains, beaucoup plus que les trotskystes en tout cas) et la fierté de ses origines africaines !!!

La citation est extraite d’une résolution du Workers Party de 1943 (le Workers Party étant une scission du parti trotskyste américain « officiel ») et d’un passage qui traite du nationalisme noir pas du pseudo caractère « progressif » de l’antisémitisme chez les prolétaires noirs !!! C’est le nationalisme noir américain – du moins quand il est répandu chez les PROLETAIRES noirs, pas chez les petits-bourgeois – qui intéresse CLR James et le Workers Party, et pour lequel ils ont les yeux de Chimène.

C’est la lutte des Noirs américains pour « les droits démocratiques et le socialisme » qui les intéressent, contrairement au PIR de Mme Houria Bouteldja qui se foutent du socialisme comme de leur première chemise, mais sont effectivement des nationalistes de la pire espèce – comme ceux que combattait CLR James, en tout cas dans les années 30 et 40.

Avant et pendant la seconde guerre mondiale, CLR James se battit dans le parti trotskyste (SWP) puis dans le Workers Party pour que la « question noire » ne soit pas mise de côté, mais centrale pour le parti.

CLR James n’avait à ma connaissance aucune complaisance pour l’antisémitisme (et s’il en avait eu il faudrait le dénoncer, et pas du tout s’en féliciter comme Mme Bouteldja).

Ce texte écrit par lui fait partie d’une résolution du Workers Party, parti qui se réclamait de la révolution russe et de la lutte des classes, des quatre premiers congrès de l’Internationale communiste, de la révolution socialiste mondiale, de la révolution permanente, PAS DE LA LUTTE DES RACES et PAS DU NATIONALISME comme le PIR et Mme Bouteldja. Quelques lignes plus loin que la citation manipulée par Mme Bouteldja la résolution du Workers Party dit clairement :

« Le parti prévient le mouvement ouvrier que les éléments fascistes et profascistes, dans leurs efforts pour abattre les organisations ouvrières, ne manqueront pas d’utiliser la tension raciale croissante dans le pays, comme les Nazis ont utilisé l’antisémitisme en Allemagne. »

Cette résolution prend clairement parti contre l’antisémitisme, explique que les éléments fascistes et profascistes utiliseront l’antisémitisme et les tensions raciales croissantes aux Etats-Unis pour « abattre les organisations ouvrières ». L’antisémitisme y est clairement condamné comme une arme de division au service de la bourgeoisie, mais surtout un moyen d’écraser le mouvement ouvrier.

CLR James a pris position à plusieurs reprises contre l’antisémitisme comme par exemple dans ce texte antérieur sur la deuxième guerre mondiale « Why Negroes Should Oppose the War » (Pourquoi les Noirs devraient s’opposer à la guerre) écrit en 1939 et où il déclare : « Il existe aujourd’hui plus de 150 millions de Noirs dans le monde. Il y en a quinze millions en Amérique. Ce sont les personnes les moins bien payées, les plus humiliées, les plus méprisées dans le pays, et dans le Sud, où vivent les quatre cinquièmes d’entre eux, ils sont traités comme les Juifs en Allemagne. Nous savons comment cette grande "démocratie" terrorise les Noirs dans le Sud et comment elle les discrimine dans le Nord. »

Ces citations montrent que, contrairement à Mme Bouteldja, CLR James voyait une similitude entre les persécutions hitlériennes contre les Juifs en Allemagne en 1939 et le racisme de la démocratie américaine à la même époque. Il ne cautionnait absolument pas l’antisémitisme ni en Allemagne ni aux Etats-Unis et ne lui trouvait rien de « progressif » contrairement à cette porte-parole des Indigènes de la République.

On peut ne pas partager les opinions trotskystes de CLR James à l’époque puis son soutien ensuite au panafricanisme. C’est mon cas. On peut considérer que cette résolution est particulièrement malvenue en 1943 alors que le judéocide a commencé et que l’on est parfaitement au courant de la situation des Juifs en Allemagne. C’est mon cas, bien qu’il soit très facile aujourd’hui de juger des erreurs des révolutionnaires qui nous ont précédés.

Encore faudrait-il décrire ce que le Workers Party (dont faisait partie CLR James) a écrit et fait contre l’antisémitisme aux Etats-Unis, contre les organisations pronazies, etc. Je n’ai pas enquêté à ce sujet. Je rappelle quand même que les grands journaux américains annoncèrent en novembre 1942 (dans les pages intérieures pas en première page) que deux millions de Juifs avaient déjà été tués en Europe. Que le PC américain (donc je suppose aussi les trotskystes de l’époque qui les suivaient de près dans toutes leurs initiatives...), des intellectuels dits progressistes (comme Ben Hecht qui joua un rôle important mais bien d’autres), des acteurs et metteurs en scène célèbres de Hollywood et des dirigeants syndicalistes tentèrent – en vain malheureusement – d’obliger l’administration Roosevelt à intervenir pour sauver les Juifs qui n’avaient pas encore été massacrés en Europe. Et en tout cas dénoncèrent l’antisémitisme aux Etats-Unis comme en Europe.

Présenter CLR James comme un partisan du prétendu caractère « progressif » de l’antisémitisme est une FALSICATION ignoble de sa pensée, falsification tout à fait cohérente avec l’idéologie réactionnaire des Indigènes de la République.

Y.C., Ni patrie ni frontières, 23/07/2014

PS. Une partie des écrits de CLR James ont été publiés aux Editions Syllepse (http://www.syllepse.net/lng_FR_srub_102_iprod_556-sur-la-question-noire.html). Mieux vaut lire les textes de James que les commentaires des universitaires ou demi-intellectuels postmodernes qui tentent d’enrôler CLR James sous leur bannière en châtrant ses convictions révolutionnaires et... prolétariennes (le gros mot est lâché).

***
Quelques précisions sur le contexte des rapports entre Juifs et Noirs américains dans les années 30 et 40, notamment à New York. Précisions essentielles pour comprendre le passage de la résolution du Workers Party cité par la faussaire Bouteldja qui profite de l’ignorance de ses lecteurs – l’étude de la réalité complexe des rapports entre Juifs et Noirs américains ne fait pas partie des programmes des collèges ou des lycées en France, on peut donc raconter n’importe quoi sur le sujet sans risque d’être contredit – pour cacher sa propre ignorance. Ce qu’il y a d’intéressant c’est que son intervention a été prononcée devant un parterre d’universitaires et de militants qui apparemment n’ont pas réagi non plus. De là à penser qu’eux aussi pensent qu’il existe un "antisémitisme progressif" il n’y a qu’un pas, que je n’hésite pas à franchir tant que les propos de Dame Bouteldja n’auront pas été publiquement dénoncés...

1° Une campagne a commencé dans les années 30 à Harlem « N’achetez pas dans des magasins qui ne sont pas prêts à vous employer ». En clair si un commerçant blanc (juif ou pas) n’employait pas de salariés noirs il fallait le boycotter. Un nationaliste noir fut traité de "Hitler noir" par l’Association des commerçants (dont faisaient partie des commerçants juifs) mais ce militant nationaliste fut défendu par Claude McKay, écrivain jamaïcain naturalisé américain, et qui ne le considérait pas du tout antisémite. On se trouve donc face à des appréciations divergentes sur cette campagne qui n’était pas dirigée contre les Juifs, mais contre les commerçants, ce qui n’est pas pareil... sauf pour les antisémites. Première confusion des genres.

2) La plupart des membres du PC de Harlem étaient Juifs. Certains Noirs méfiants vis-à-vis du PC américain avant le New Deal le sont devenus davantage quand les communistes ont pris plus de poids sous Roosevelt dans les services sociaux ; cela a donc donné naissance à raisonnements antijuifs et anticommunistes chez certains Noirs. Deuxième confusion des genres.

3) De nombreux Juifs contrôlaient des dancings et des salles de théâtre. Comme tous les patrons, quelles que soient leurs origines, ils exploitaient les musiciens et artistes noirs. Cela alimenta un mécontentement croissant des artistes noirs et du public noir qui faisaient vivre ces établissements et avaient l’impression que le fric n’était pas réinvesti à Harlem ou sur place. On en a un écho dans un film de Spike Lee (Mo Better Blues) dans lequel le patron du héros saxophoniste est juif (cela se passe dans les années 80) et où les remarques ambiguës sur les Juifs pullulent ce qu’aucun critique n’a remarqué bien sûr. Troisième confusion des genres.

D’autres infos suivront en fonction de ce que je trouverai comme articles sur le Net ou des extraits de livres sur la question très complexe des rapports entre les Juifs et les Noirs aux Etats-Unis...

Mais déjà, rien qu’avec les trois éléments de contexte ci-dessus on voit qu’il ne s’agissait pas d’antisémitisme racial stricto censu mais d’un mélange d’anticommunisme (enfin d’anti PC stalinien mais peu importe ici), de ressentiment anti-commerçants et anti-patrons (d’un anticapitalisme populaire plutôt positif et qui peut expliquer – expliquer et non excuser, surtout 70 ans plus tard – la formulation de la résolution du Workers Party) et d’antisémitisme économique "classique".

Tout cela la faussaire Bouteldja le cache à ses lecteurs....

PPS. Ceux qui s’intéressent aux positions politiques de Mme Bouteldja et de son parti, le PIR pourront lire :

http://www.mondialisme.org/spip.php?article1822
Carlo Rubeo
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Indigènes de la République - Page 11 Empty Re: Indigènes de la République

Message  MO2014 Sam 20 Sep - 20:32

Épinglé sur la discussion précédente notre chevalier en croisade contre l'Islam change de sujet en commençant par dire un idiotie que son ami YC n'est pas "blanc" en nous laissant entendre que c'est une question biologique alors qu'il s'agit d'un question reliée à des siècles de colonialisme et d'exploitation.

On peux déjà apprécier la méthode polémique avec un texte qui est ni cité et ni référencé livre ses conclusions en opposant "antisémitisme" en insinuant que Houria B. est antisémite propos de son texte sur Merrah. Que dit Houria sur les victimes :
"Au nom de Printemps des quartiers, je voudrais ici exprimer notre profonde tristesse aux familles, aux pères et aux mères des victimes, adultes et enfants de l’effroyable tuerie de Toulouse et Montauban et réitérer nos condoléances."

En fait ce que ne supporte pas l'auteur c'est le fondement anti-colonial du combat des indigènes.

Comme Manual Valls, combattre la politique sioniste et colonialiste d’Israël expose aux accusations, justifiées selon lui, d'antisémitisme... Un texte du 13 mai permettrai de répondre sérieusement aux élucubrations de YC :

L’arrière-garde répond à Manuel Valls

par Sherine Soliman, Membre du PIR
Valls ennemi de la Palestine

Le 19 mars dernier, Manuel Valls (qui n’était pas encore à Matignon) s’est rendu au grand rassemblement contre l’antisémitisme organisé par le Conseil Représentatif des Institutions Juives de France (CRIF), en mémoire des victimes juives de la tuerie de l’école Ozar Hatorah qui avait eu lieu deux ans plus tôt, jour pour jour. Cet après-midi là, à Paris, c’est tout un défilé de pseudo intellectuels, de représentants ou référents religieux, d’hommes et de femmes politiques qui se tenaient très solennellement à la tribune. Etaient notamment présents Anne Hidalgo (nouvelle maire de Paris), Meyer Habib (député franco-israélien, vice président du CRIF), Roger Cukierman (président du CRIF), Harlem Désir (conseiller d’Etat du gouvernement Valls), Hassen Chalghoumi (L’imam préféré des médias et du CRIF), Marek Halter, Patrick Klugman (avocat qui arrive à être à la fois militant sioniste ET antiraciste… oui, c’est magique), Claude Goasguen, Gil Taïeb ou encore l’inévitable Bernard-Henri Lévy (qui pense que l’armée coloniale d’Israël est « l’armée la plus morale du monde »). Sur la grande scène déployée à l’occasion sur fond d’une Tour Eiffel scintillante, on se passait fraternellement le micro afin que chacun puisse y aller successivement de sa condamnation sincère, de sa douleur vive, de son émotion intense et de son engagement inconditionnel et total face à ce terrible fléau omniprésent qu’est l’antisémitisme dans la société française et dans le monde. « La haine des Juifs : ça suffit ! » pouvait-on lire sur le pupitre de la tribune.

Si ma peine et mon émotion pour les innocentes victimes de Mohammed Merah sont réelles et sincères, je ne peux cependant m’empêcher d’observer le lyrisme larmoyant dont nous ont gratifiés ces penseurs, ces élus et représentants avec une gêne immense. Cette gêne, c’est d’abord celle que font naître en moi les ignobles accents d’opportunisme qui enrobaient les discours et postures de nombreux intervenants, toujours prompts à s’indigner ostensiblement et très audiblement du sort de certaines victimes, mais toujours beaucoup plus discrètement du sort de millions d’autres (ou de ne pas s’en indigner du tout d’ailleurs, les Palestiniens, depuis plus d’un demi siècle, en savent quelque chose) ; et cette gêne – plus pressante encore – c’est celle du racisme réel qui sourd des raisonnements des uns et des autres continuant de hiérarchiser, de façon plus ou moins directe – les races et les peuples. Et ce, à l’endroit même d’un rassemblement prétendant s’ériger contre la haine et se revendiquant de la mémoire d’innocentes victimes.

Ce qui s’est dit ce jour là à la tribune est proprement incroyable – je pèse mes mots – et je suis sidéré par les propos qui ont émané de l’ensemble de cette vaste comédie mystificatrice. Ce genre de rassemblement, les discours qui s’y tiennent et les intervenants qui s’y montrent sont des indicateurs très fiables et on ne peut plus parlants de l’état de racisme dans lequel baigne la France.

Je pense aussi que certains des discours tenus ce soir ne font pas du tout honneur à la mémoire de ces victimes que furent Jonathan Sandler et ses enfants Arié, Gabriel et Myriam Monsonego. Celui de Manuel Valls, particulièrement, grince encore diaboliquement dans ma conscience tant la mémoire et le souvenir nobles sur lesquels il s’appuie en sont bafoués. Purement et simplement, il instrumentalise de la manière la plus abjecte qui soit la mémoire des victimes qu’il prétend honorer, et ce à des fins politiques et idéologiques scandaleusement racistes. Vous allez pouvoir en juger par vous-même en lisant la retranscription des mots qu’il a tenus lors de cette journée de commémoration.

Mais je le répète : l’exercice de démagogie victimaire et idéologique auquel se sont livrés les différentes personnalités de la tribune aura bien atteint des sommets d’aberrance intellectuelle et morale. Et pour ce qui est de Manuel Valls, donc : jamais encore à ma connaissance un homme politique français si haut placé n’avait publiquement, de manière aussi claire et assumée, assimilé l’antisionisme et l’antisémitisme. Assimilation qui revient à dire – pour nous et de notre point de vue qui est celui de centaines de millions de colonisés ou postcolonisés sur terre – que l’antiracisme et l’anticolonialisme (c’est-à-dire l’antisionisme) c’est l’antisémitisme. Aberration vous disais-je…

Le sionisme, qui est pour une grande partie de l’humanité – dont nous sommes – une idéologie politique fondamentalement raciste et colonialiste infériorisant les Arabes, est ainsi devenu dans les mots de Manuel Valls une réalité positive à laquelle nous n’avons plus le droit de nous opposer : « cette critique de l’Etat d’Israël, basée sur l’antisionisme, c’est l’antisémitisme d’aujourd’hui ». Le propos est donc clair : français – et surtout français issus de l’immigration postcoloniale, français musulmans, français arabes et noirs – soumettez-vous à l’acceptation inconditionnelle de la colonisation de vos frères Palestiniens. Et si les jeunes juifs de France – ceux à l’avant-garde de nos valeurs – pourront continuer d’aller faire leur service militaire dans les rangs de l’armée coloniale de l’État d’Israël pour contribuer au maintien de l’apartheid et de la colonisation racistes des Arabes Palestiniens, vous, les Arabes de France, ne pourrez bientôt même plus ne serait-ce que vous déclarer antisionistes. Car « l’antisionisme, c’est la porte ouverte à l’antisémitisme » prévient Valls. Et bien entendu, un service militaire dans l’armée de notre « État frère » pour contribuer activement à la poursuite de l’apartheid et de son expansion : c’est une initiation à l’humanisme le plus moral qui puisse être (un humanisme à l’avant-garde…).

Comment un tel discours peut-il passer aussi tranquillement ? Qu’attendons-nous pour nous lever, enfin, tous ensemble ?

Je laisse Manuel Valls vous le dire avec ses mots :

«Il y a 2 ans, le 19 mars 2012, on a tué des hommes, on a tué un homme et des enfants parce qu’ils étaient Juifs. On a tué des enfants juifs, ce qui n’était pas arrivé depuis le 2ème Guerre Mondiale. Et la France fut saisie, et nous le sommes encore, par l’horreur de ce crime. Bernard Henri-Levy a eu raison, il y a un instant, de nous obliger à réfléchir sur les raisons, sur le pourquoi : pourquoi nous en sommes arrivés là ? Et dans ce pays, qui est celui des Lumières, qui est celui des valeurs universelles qui sont les nôtres mais que nous pensons aussi celles du monde, et pour lesquelles aujourd’hui encore, des hommes, des femmes se battent dans leur pays au risque de leur vie, nous nous sommes dit : ça n’est pas possible. Nous ne pouvons pas revivre ces drames et ces actes. Et cela oblige à une très grande lucidité. Et la lucidité c’est de se dire que depuis un certain nombre d’années, les actes antisémites, les actes anti-juifs sont en progression. Il ne faut rien cacher, il faut faire toute la transparence pour mieux combattre cet antisémitisme. Et cet antisémitisme, il est celui, rance, vieux, d’une partie de l’extrême droite française. Mais cet antisémitisme, aussi, et c’est la nouveauté, il se nourrit de la haine d’Israël, il se nourrit de l’antisionisme, parce que l’antisionisme, c’est la porte ouverte à l’antisémitisme (applaudissement); parce que la mise en cause de l’état d’Israël, État ami, État frère, que l’on peut évidemment critiquer comme on critique tout gouvernement démocratique – ça vaut pour la France, ça vaut pour Israël (…) cette critique de l’État d’Israël, basée sur l’antisionisme, c’est l’antisémitisme d’aujourd’hui. C’est le refuge de ceux qui n’acceptent pas l’État d’Israël. Et c’est pour ça qu’il faut être d’une très grande détermination. L’antisémitisme aujourd’hui il se nourrit dans nos quartiers populaires des ambigüités sur le discours à propos d’Israël, et c’est tous – la représentation nationale mais tous ceux qui ne peuvent pas accepter que la haine se déverse dans nos quartiers au nom de la critique d’Israël : nous devons faire corps, nous devons êtres unis pour combattre cet antisémitisme nouveau qui est né, qui se nourrit de cet antisionisme ; qui se déverse sur la toile, sur internet. Et il nous faut réfléchir, il nous faut travailler, il nous faut aussi, si nécessaire, légiférer pour le combattre, car nous ne pouvons pas accepter au nom même de la mémoire de la Shoah, au nom même de la mémoire d’Ilan Halimi, au nom même de la mémoire de ceux que Merah a tués le 19 mars 2012 : nous ne pouvons pas l’accepter. Et donc nous devons résister, résister, résister face à cet antisémitisme. Et c’est la raison pour laquelle, chers amis, (…) nous ne pouvions pas accepter que la parole de Dieudonné M’bala M’bala, nourrie du néonazi Alain Soral, se propage dans des salles, pendant des semaines ; et je suis fier d’appartenir à un pays qui a dit non, qui a dit non, qui a dit non, qui a dit que nous n’accepterions pas que la parole antisémite, raciste, que la haine se déverse, et nous devons aller désormais jusqu’au bout, la justice, les services fiscaux, mais bien au delà ! Car il appartient à la société de se poser la question de savoir pourquoi il y a des millions de visiteurs sur le site de cet individu ; pourquoi il y a des milliers de personnes, qui en toute connaissance de cause assistent à ce type de spectacle ; cela nous renvoie à des questions auxquelles il faut apporter des réponses. Et enfin, chers amis, c’est aussi un message d’espoir. Il nous faut réfléchir, il nous faut être lucide, il faut résister, mais ce message d’espoir est le suivant, et je m’adresse aux Juifs de France, je m’adresse aux français Juifs, pour leur dire une seule chose, qui vient du fond du cœur (…) : Juifs de France, sans vous, la France n’est plus la France. Sans les Juifs de France, la France n’est plus la France. Nous avons besoin de vous, comme nous avons besoin de tous les français, pour bâtir l’espoir, pour bâtir un avenir meilleur, pour faire vivre la République. Soyez fiers de ce pays ! Soyez fiers des valeurs de la République ! Soyez fiers d’être français ! Soyez fiers d’être Juifs et français, soyez fiers de le proclamer au monde ! Les Juifs français sont plus que jamais des français à l’avant garde de la République et de nos valeurs ! »

Je vous répète donc plus directement le message qui vous est adressé : Indigènes de France, c’est un fait indéniable que vous êtes les vecteurs de ce nouvel et innommable antisémitisme qui ronge la France : cet antisémitisme postcolonial. L’antisémitisme est en augmentation, il faut le répéter par dessus tout (même si les crimes policiers, les discriminations à l’emploi, à l’embauche et à la culture vous touchent vous, vous les non-juifs arabes, noirs, musulmans ; même si ce sont des lois islamophobes qui sont votées, même si…) Et en cela, obéissant à la « lucidité » et à la « transparence » qu’impose la situation : vous tous qui êtes issus d’une histoire marquée et bouleversée par le racisme et le colonialisme : sachez qu’aujourd’hui vous n’avez plus le droit de vous opposer au sionisme, même s’il s’agit justement d’un pur produit idéologique hérité de cette vision du monde occidentale qui a infériorisé votre race, votre peuple et votre culture pendant des siècles ; même si le sionisme participe activement de cette vision du monde qui à couté la vie à des dizaines et dizaines de millions de vos ancêtres, grands-parents ou parents ; même si dans les faits, il se traduit encore aujourd’hui par 6 millions de réfugiés Palestiniens, par des millions de victimes arabes, par l’immense camp de concentration qu’est Gaza, par la colonisation quotidienne qui s’opère sur le pur critère racial, par l’apartheid… Vous entendez bien? Le nouveau premier ministre de France vous l’a dit haut et fort : si vous résistez – ne serait-ce que rhétoriquement – à ce racisme et à ce colonialisme qui s’abat à coups de bombardements et de phosphore blanc sur vos frères Palestiniens : vous serez antisémites ! Vous serez racistes ! Attention ! Encaissez donc sans broncher, et mettez vous à ramper sur les talons de Chalghoumi et Désir pour être les Arabes, les Noirs, les Musulmans bien dociles, bien soumis et bien assimilés dont la République a besoin pour que la France reste « ce pays qui est celui des Lumières, qui est celui des valeurs universelles qui sont les nôtres » ( valeurs qui nous ont permis, tout le monde le sait, de passer outre l’esclavage, la colonisation, la collaboration … et de soutenir aujourd’hui l’apartheid israélien). Voilà précisément ce que vous demande, ce que vous intime très clairement le nouveau premier ministre de la République coloniale française Manuel Valls.

Presque chaque phrase tirée de ce discours pourrait finalement donner lieu à un long commentaire décolonial en contrepoint, tant le racisme y transpire à chaque tournure. Je vous laisse goûter de nouveau ce magnifique appel : « tous ceux qui ne peuvent pas accepter que la haine se déverse dans nos quartiers au nom de la critique d’Israël : nous devons faire corps, nous devons êtres unis pour combattre cet antisémitisme nouveau qui est né, qui se nourrit de cet antisionisme ». D’une part, Manuel Valls dépolitise et déshistoricise totalement cette critique de l’implantation coloniale israélienne qui émane de nos quartiers populaires; dans un geste rhétorique purement colonial, il réduit ainsi cette rage anticolonialiste à l’égard de l’entité sioniste à un antisémitisme primaire et gratuit (et c’est logique : pourquoi des postcolonisés et indigénisés issus de l’immigration se sentiraient-ils humainement concernés par le sort d’un peuple frère qui reste, lui, très activement colonisé depuis des décennies ? …). D’autre part, on remarque sans mal les associations racialisantes et indigénisantes sous-tendues par ces propos ; associations qui s’appuient encore une fois sur un imaginaire raciste et colonial qui ne dira pas son nom mais qui se décline clairement ainsi : quartiers populaires = Arabes/Africains/postcolonisés = Musulmans = antisémites = choisissez votre camp !

Et à ceux qui ne l’auraient pas perçu (s’il y en a), Valls leur fait comprendre en même temps, toujours à ceux-là qui ne peuvent tolérer cette haineuse critique de l’implantation coloniale européenne en Palestine, qu’il faut aussi faire corps pour soutenir ce lumineux racisme et cet islamophobie d’État qui se déversent et rayonnent chaque jour dans nos institutions.

C’est ainsi : entre les quartiers populaires et les institutions, entre les Barbares et la civilisation, entre la Palestine et Israël ; entre l’ « avant garde » et l’arrière-garde de la République : Manuel Valls réaffirme et renforce plus que jamais la frontière coloniale et raciale.

Je me garderai toutefois de reprendre l’ensemble de ce discours, et je laisse le soin au lecteur d’en apprécier les multiples saveurs.

Pour ma part, je me contenterai de revenir sur la seule dernière phrase prononcée par Valls :

« Les Juifs français sont plus que jamais des français à l’avant garde de la République et de nos valeurs ».

La première question qui me vient est la suivante : qui sont « les Juifs français » dont manuel Valls semble nous dire – dangereusement – qu’ils forment une seule et même communauté de valeurs, comme une sorte de bloc monolithique et homogène ? Je n’ai pas la réponse, mais j’imagine – ou plutôt je constate, en suivant le raisonnement boiteux de Valls – que le CRIF, que BHL, que Cukierman, Meyer et tous les Juifs présents à la tribune (ainsi que la LDJ déployant ses drapeaux en face), et dont beaucoup soutiennent officiellement la colonisation de la Palestine, en sont les parfaits représentants. N’est-ce pas le message qui nous fait passer Valls en s’exprimant ainsi, en de telles circonstances ? Et nous devrions donc en conclure, pour suivre Valls de nouveau, que les BHL ou Cukierman, que ces hommes qui soutiennent le racisme et le colonialisme à l’encontre des nôtres, sont à l’avant-garde de « nos » valeurs ?

Ces hommes là – qui ne représentent aucunement tous les « Juifs français » – sont peut-être à l’avant-garde des valeurs de cette république coloniale française en accord avec celles de l’État colonial d’Israël, mais ils n’ont absolument rien en commun avec les valeurs que nous autres militants antiracistes et anticolonialistes partageons. Rien à voir non plus avec les valeurs des Juifs antisionistes – ceux qui n’entrent pas dans la définition vallsienne des « Juifs de France ».

Ces propos sonnent donc bien comme une nouvelle aberration raciste de la République que nous condamnons sans aucune réserve. D’ailleurs, il n’est guère besoin d’être vigilant pour voir combien ce racisme se retourne aussi contre les Juifs eux-mêmes : en associant les « Juifs de France » à un ensemble de « valeurs » prétendument supérieures, en les associant à l’ « État frère d’Israël » et surtout en les liant aussi fermement au sionisme : Manuel Valls essentialise cette communauté. Il la confine dans les limites très problématiques de la vision du monde ultra-sioniste et colonialiste du CRIF (vision à laquelle, lui, souscrit bien évidemment pleinement), et favorise, en cela, l’antisémitisme. C’est Valls lui-même, par ce genre d’amalgame de plus en plus fréquents (Juifs = Sionistes), qui nie l’heureuse et évidente diversité des Juifs ; diversité grâce à laquelle certains parmi eux s’élèvent pourtant depuis longtemps, et parfois radicalement, contre le sionisme et le racisme inhérent aux fondations de l’Etat juif et de sa base coloniale.

Non Manuel Valls, malgré ce que tu penses et cries sur tous les toits, tous les Juifs ne sont pas des sionistes ; tous les Juifs ne sont pas des colonialistes.

Mais au delà du problème que représente l’essentialisation, par Valls, des Juifs français en une communauté supérieure et favorable à la colonisation raciste, il en est un autre encore plus important : c’est celui du persistant « engrenage concurrentiel » que vient nourrir ce discours, et qu’avaient déjà dénoncé les Indigènes de la République lors de l’affaire Halimi. Le communiqué publié à l’époque pointait du doigt « le traitement politico-médiatique de ce crime et alerte l’opinion sur les dangers d’une stratégie politicienne fondée sur l’exacerbation des différences communautaires, ethniques ou religieuses » et soulignait que « le traitement d’exception accordé au racisme anti-juifs risque de construire ces derniers en boucs émissaires potentiels et de creuser les oppositions entre les différentes composantes de la société française dont un des fondements reste la hiérarchisation ethnique et raciale. L’Appel des indigènes de la république l’avait d’ailleurs pointé du doigt dés 2005 : « Comme aux heures glorieuses de la colonisation, on tente d’opposer les Berbères aux Arabes, les Juifs aux « Arabo-musulmans » et aux Noirs ». [1]»

A la lumière des réactions médiatiques et politiques qui s’étaient levées lors du crime d’Ilan Halimi et de celles que l’on observe encore aujourd’hui lors de la commémoration des victimes Juives de Merah, on ne peut donc que souscrire au commentaire de Sadri Khiari lorsqu’il affirmait, en 2008, qu’« il y a une politique qui s’enracine dans l’histoire coloniale et qui est réactivée aujourd’hui en fonction des enjeux contemporains. Cette politique alimente le racisme anti-juif tout en opposant entre elles les différentes catégories stigmatisées de la population. » Et les ressorts principaux de cet «engrenage concurrentiel », ajoutait-il à juste titre, « ne sont pas à chercher du côté des victimes du racisme (comme c’est presque toujours le cas) mais d’abord du côté des logiques d’un système basé sur les hiérarchisations ethniques et du côté des politiques concrètes et des stratégies de ceux qui dominent.[2] »

Les choses sont donc très claires et on ne peut plus limpides. Je les résumerai ainsi : quand l’un des plus hauts représentants de la République place publiquement les Juifs français « à l’avant garde de nos valeurs et de la République » – et ce, encore une fois, aux côtés des représentants juifs français d’un courant radicalement acquis à la cause de la colonisation raciste et de l’apartheid – il met les autres minorités de ce pays derrière ; il place les Arabes et les Noirs, les Musulmans des quartiers populaires en dessous, à l’endroit où « la haine se déverse au nom de la critique d’Israël » , c’est-à-dire dans le camp de l’animosité, de la sous-humanité et du terrorisme en puissance. Par ces mots, il disqualifie purement et simplement leur résistance antiraciste et anticolonialiste et vise, une fois de plus, à exacerber les différences communautaires en affichant un philosémitisme aussi soutenu que l’est son mépris à l’égard des postcolonisés arabes et noirs.

Cependant, j’aimerais tout de même terminer sur une note positive, et là je m’adresse essentiellement à mes frères et sœurs Arabes, Noirs, Asiatiques, Rroms de France et issus de toutes les minorités indigénisées et discriminées - : vous qui n’êtes en rien à l’avant-garde des valeurs de ce pays, vous qui avez « vocation à partir», vous qui êtes trop visibles, vous qui parlez un « sabir » navrant face à notre belle langue, vous qui n’êtes pas assez « white, blancos », je vous le dis : restez confiants car votre tour viendra ! Suivez ces exemples vivants qui balisent ce féérique chemin républicain vers la reconnaissance  et la désintégrité : les Rachida Dati, les Fadela Amara, les Rama Yade, les Chalghoumi, les Harlem Désir, les Christiane Taubira : tous ces descendants d’esclaves ou de colonisés qui savent aujourd’hui accepter – avec un grand sourire – le sionisme, le racisme et le colonialisme prônés par Valls doivent vous faire entendre raison, et vous faire rêver !

Et qui sait, peut-être que les Arabes et Noirs de France seront-ils aussi un jour « à l’avant-garde de nos valeurs et de la République ! » (encore un effort pour abandonner le voile, les mosquées, le halal, la Palestine, la responsabilité française au Rwanda, le pillage de l’Afrique, Lumumba, Um Nyobé et Sankara, votre histoire et quelques autres petits détails du même genre). Peut-être aussi, après quelques compromis, verra-t-on bientôt un premier ministre français dire, une grande émotion dans la voix, à nos frères et sœurs Rroms de « proclamer au monde leur fierté » d’être ce qu’ils sont ! (d’ici là, aucun élu ne pensera plus à regretter qu’Hitler n’ait pas fini le travail à l’endroit de votre peuple, n’ayez crainte[3]) Peut-être que cela arrivera, oui. Mais « Rrom » ne s’est pas fait en un jour… Et en attendant votre heure mes amis, « el Blanco » qui glorifie la supériorité morale d’une communauté ethnico-religieuse – sur le plan objectif des valeurs et de la démocratie bien sûr – demande sèchement à la vôtre de se barrer de nos blanches rues. Soyez bons joueurs et obtempérez. Quittez nos trottoirs, quittez vos bidonvilles, et passez votre chemin le plus discrètement possible.

Et toujours à vous, mes frères non-juifs issus des minorités, mais cette fois plus sérieusement – mes frères Asiatiques, Arabes, Africains, Antillais, mes frères Rroms – : même si la France, par la voix de son nouveau premier ministre, nous met une nouvelle fois derrière, même si la France nous rabaisse de nouveau sur son échelle de valeurs ; même si elle essaye encore de nous inférioriser et de nous emprisonner dans les rouages de son odieux engrenage concurrentiel : rions-lui au nez ! A cet opportuniste qui prétend qu’une autre communauté ethnico-religieuse nous serait supérieure en valeurs : rions de ses propos racistes, rigolons à sa face ; laissons les simples d’esprits adhérer à sa hiérarchie coloniale et raciste. Et offrons lui simplement un sourire sombre, déterminé, aiguisé, chargé de milliards de promesses de résistance, d’antisionisme et de révolution.

Et pour conclure en réponse à cette nouvelle tentative de mystification républicaine, je poserai cette citation du combattant antiraciste et anticolonialiste radical Frantz Fanon. Ce héros, durant la guerre de libération Algérienne, commentait en ces termes la façon dont les discours anesthésiants venus de France étaient perçus par les colonisés :

« Les démagogues (…) ont désormais la tâche difficile. La praxis qui les a jetées dans un corps à corps désespéré confère aux masses un goût vorace du concret. L’entreprise de mystification devient, à long terme, pratiquement impossible

Prends-en bonne note Manuel Valls. Tu peux continuer autant que tu le souhaiteras d’essayer de nous diviser, de nous hiérarchiser, de nous inférioriser et de nous mettre dans le rang – à l’arrière garde – de ta République raciste. Mais tu verras : le « goût vorace du concret » des indigènes que toi et les tiens essayez de mettre au pas ne fera que grandir, et il te rendra la tâche bien difficile : à plus ou moins long terme, il te la rendra impossible.

Et ces derniers mots, toujours de Fanon, que je cite en regardant Manuel Valls droit dans les yeux et en pensant à tous les résistants, à tous les colonisés et postcolonisés du monde, à tous les indigénisés discriminés et marginalisés en lutte dans nos quartiers populaires en France – dans ces quartiers où se déverse chaque jour l’amour pour la Palestine, l’amour pour ses colonisés et pour leur résistance héroïque – :

« Faire sauter le monde colonial est désormais une image d’action très claire, très compréhensible et pouvant être reprise par chacun des individus constituant le peuple colonisé. »


Sherine Soliman, Membre du PIR

[1] Communiqué du Mouvement des indigènes de la république, Meurtre d’Ilan Halimi, 1 mars 2006.

[2] Sadri Khiari, dans Réponse à Philippe Corcuff concernant le communiqué des Indigènes de la république sur le meurtre d’Halimi.

[3] «Comme quoi Hitler en a peut-être pas tué assez, hein» : propos tenus par le député-maire de Cholet Gilles Bourdouleix le 21 juillet 2013. L’apologie de ce crime contre l’humanité lui a valu la sanction exemplaire de… une amende pharamineuse de 3000 euros avec sursis ! Comme vous le constatez une nouvelle fois, la République ne rigole pas avec le racisme, et le deux-poids deux-mesures n’existe pas.

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Message  Carlo Rubeo Sam 20 Sep - 21:49

MO2014 a écrit:Épinglé sur la discussion précédente notre chevalier en croisade contre l'Islam change de sujet en commençant par dire un idiotie que son ami YC n'est pas "blanc" en nous laissant entendre que c'est une question biologique alors qu'il s'agit d'un question reliée à des siècles de colonialisme et d'exploitation.

MO2014 a écrit:c'est à dire celui du monde blanc colonialiste ou post colonialiste.

CQFD Wink


Toujours à propos du racialisme du PIR, et de leur lecture identitaire du monde héritée de la géopolitique coloniale :


« Indi...gènes » ? « Indi...génat » ? « Indi...génisé » ? Des « concepts » indi...gents !

(…) Indigènes est à l’origine un terme utilisé par les colons ou les autorités coloniales pour désigner les peuples présents avant eux sur les territoires exploités et opprimés par les puissances occidentales. Le mot « indigènes » est utilisé par l’Appel des Indigènes comme un stigmate retourné contre l’Etat et les institutions racistes français (un peu comme les Afro-Américains utilisent entre eux le mot « nigger », nègre).

Mais il a aussi pour les Indigènes d’autres sens :

1) un « indigène » serait un membre des classes les plus exploitées , ce que les marxistes appellent un prolétaire. Dans ce cas pourquoi donc avoir introduit un nouveau concept ?

2) ce terme est généreusement attribué à ceux qu’ils appellent des « Blancs » à condition qu’ils soutiennent la cause des... Indigènes.

Cette définition à plusieurs étages (« ethnique », national, social et politique) est surtout fondée sur de bons sentiments.

Elle rappelle une définition qu’un jour Edgar Morin avait donnée de la judéité : pour lui, était Juif tout individu qui se sentait en empathie et en solidarité totale avec les souffrances du peuple juif. Cette définition très généreuse, universaliste, faisait également écho au fameux slogan de Mai 68 « Nous sommes tous des Juifs allemands » qui avait une résonance à la fois internationaliste et anationaliste, mais était riche en ambiguités de toute sorte, comme on a pu le voir par la suite avec l’apparition de nouvelles formes d’antisémitisme au nom de l’antisionisme mal compris.

Si la démarche de Morin avait un côté sympathique, les références obsessionnelles à la couleur de la peau qui parsèment la prose des Indigènes nous incitent à douter que leurs intentions soient aussi claires. Mais surtout leur démarche repose sur une exigence absurde Tout comme, dans un autre registre, des profs humanistes mais très maladroits tentent de convaincre des élèves d’origine maghrébine ou africaine que l’extermination des Juifs d’Europe serait le seul étalon de mesure et de compréhension de l’horreur des autres génocides, nos « Indigènes » déclarent d’abord que les « premières victimes de l’exclusion sociale » seraient les « personnes issues des colonies (...) et de « l’immigration post-coloniale » puis que « indépendamment de leurs origines effectives, les populations des “quartiers” sont “indigénisées” ».

Ces deux affirmations sont contradictoires :

- la première met l’accent sur la couleur de la peau ou l’ « ethnie » (sans le dire, ce que beaucoup traduisent par la « race », voir les insultes courantes du type « Nique ta race », « sale race », etc.), comme étalon de toutes les exclusions sociales,

- la seconde met l’accent sur les discriminations sociales qui touchent tous les prolétaires, qu’elle que soit leur couleur de peau, leur passeport et leur lieu de naissance.

Comme les Indigènes n’ont pas réussi à résoudre cette contradiction (et il faut reconnaître que la question de l’imbrication entre les facteurs de classe, les facteurs nationaux et les facteurs dits « ethniques » est loin d’être simple), ils ont élargi le pseudo-concept d’Indigènes à tous les habitants des quartiers populaires mais à une condition : tout « Blanc » doit s’identifier à un indigène, un ex-colonisé, un post-colonisé ou un ancien esclave africain. Les « Indigènes » voudraient que tout prolétaire s’identifie immédiatement, à la cause anticolonialiste la plus radicale et retourne l’image négative qu’il risque d’avoir dans la tête en s’identifiant aux colonisés d’antan, aux immigrés d’aujourd’hui.

Il est difficile d’imaginer une démarche plus acrobatique, d’autant plus que cette démarche est à sens unique : c’est le prolétaire « blanc » qui doit se sentir coupable des crimes de « sa » classe dominante et se débarrasser de son fardeau de complice du racisme, du colonialisme et du « post-colonialisme ». Le « non Blanc » et ses compagnons de route tiersmondistes n’ont rien d’autre à faire qu’à se complaire dans leur posture de supériorité morale.

Y.C. Ni patrie ni frontières n° 10

Si ma peine et mon émotion pour les innocentes victimes de Mohammed Merah sont réelles et sincères, je ne peux cependant m’empêcher d’observer le lyrisme larmoyant dont nous ont gratifiés ces penseurs, ces élus et représentants avec une gêne immense.

... Ou comment se tirer une balle dans le pied ...
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Message  MO2014 Dim 21 Sep - 19:50

Décidemment notre Croisé YC s'est fait une spécialité de combat contre le PIR, contre les militants anti-racistes et anti-colonialistes comme Saïd Bouamama ou Houria Bouteldja, et combat même le concept "d'islamophobie".
Dans le texte ci dessus il combat l'utilisation du terme "indigène", rappelons lui L’Appel des Indigènes de janvier 2005 :


NOUS SOMMES LES INDIGENES DE LA REPUBLIQUE !


Rendu public en Janvier 2005, cet appel à été signé par des milliers de personnes.

Discriminés à l’embauche, au logement, à la santé, à l’école et aux loisirs, les personnes issues des colonies, anciennes ou actuelles, et de l’immigration post-coloniale sont les premières victimes de l’exclusion sociale et de la précarisation. Indépendamment de leurs origines effectives, les populations des « quartiers » sont « indigénisées », reléguées aux marges de la société. Les « banlieues » sont dites « zones de non-droit » que la République est appelée à « reconquérir ». Contrôles au faciès, provocations diverses, persécutions de toutes sortes se multiplient tandis que les brutalités policières, parfois extrêmes, ne sont que rarement sanctionnées par une justice qui fonctionne à deux vitesses. Pour exonérer la République, on accuse nos parents de démission alors que nous savons les sacrifices, les efforts déployés, les souffrances endurées. Les mécanismes coloniaux de la gestion de l’islam sont remis à l’ordre du jour avec la constitution du Conseil français du Culte Musulman sous l’égide du ministère de l’Intérieur. Discriminatoire, sexiste, raciste, la loi anti-foulard est une loi d’exception aux relents coloniaux. Tout aussi colonial, le parcage des harkis et enfants de harkis. Les populations issues de la colonisation et de l’immigration sont aussi l’objet de discriminations politiques. Les rares élus sont généralement cantonnés au rôle de « beur » ou de « black » de service. On refuse le droit de vote à ceux qui ne sont pas « français », en même temps qu’on conteste « l’enracinement » de ceux qui le sont. Le droit du sol est remis en cause. Sans droit ni protection, menacées en permanence d’arrestation et d’expulsion, des dizaines de milliers de personnes sont privées de papiers. La liberté de circulation est déniée ; un nombre croissant de Maghrébins et d’Africains sont contraints à franchir les frontières illégalement au risque de leurs vies.

La France a été un Etat colonial… Pendant plus de quatre siècles, elle a participé activement à la traite négrière et à la déportation des populations de l’Afrique sub-saharienne. Au prix de terribles massacres, les forces coloniales ont imposé leur joug sur des dizaines de peuples dont elles ont spolié les richesses, détruit les cultures, ruiné les traditions, nié l’histoire, effacé la mémoire. Les tirailleurs d’Afrique, chair à canon pendant les deux guerres mondiales, restent victimes d’une scandaleuse inégalité de traitement.

La France reste un Etat colonial ! En Nouvelle Calédonie, Guadeloupe, Martinique, Guyane, Réunion, Polynésie règnent répression et mépris du suffrage universel. Les enfants de ces colonies sont, en France, relégués au statut d’immigrés, de Français de seconde zone sans l’intégralité des droits. Dans certaines de ses anciennes colonies, la France continue de mener une politique de domination. Une part énorme des richesses locales est aspirée par l’ancienne métropole et le capital international. Son armée se conduit en Côte d’Ivoire comme en pays conquis.

Le traitement des populations issues de la colonisation prolonge, sans s’y réduire, la politique coloniale. Non seulement le principe de l’égalité devant la loi n’est pas respecté mais la loi elle-même n’est pas toujours égale (double peine, application du statut personnel aux femmes d’origine maghrébine, sub-saharienne…). La figure de l’« indigène » continue à hanter l’action politique, administrative et judiciaire ; elle innerve et s’imbrique à d’autres logiques d’oppression, de discrimination et d’exploitation sociales. Ainsi, aujourd’hui, dans le contexte du néo-libéralisme, on tente de faire jouer aux travailleurs immigrés le rôle de dérégulateurs du marché du travail pour étendre à l’ensemble du salariat encore plus de précarité et de flexibilité.

La gangrène coloniale s’empare des esprits. L’exacerbation des conflits dans le monde, en particulier au Moyen-Orient, se réfracte immédiatement au sein du débat français. Les intérêts de l’impérialisme américain, le néo-conservatisme de l’administration Bush rencontrent l’héritage colonial français. Une frange active du monde intellectuel, politique et médiatique français, tournant le dos aux combats progressistes dont elle se prévaut, se transforme en agents de la « pensée » bushienne . Investissant l’espace de la communication, ces idéologues recyclent la thématique du « choc des civilisations » dans le langage local du conflit entre « République » et « communautarisme ». Comme aux heures glorieuses de la colonisation, on tente d’opposer les Berbères aux Arabes, les Juifs aux « Arabo-musulmans » et aux Noirs. Les jeunes « issus de l’immigration » sont ainsi accusés d’être le vecteur d’un nouvel anti-sémitisme. Sous le vocable jamais défini d’« intégrisme », les populations d’origine africaine, maghrébine ou musulmane sont désormais identifiées comme la Cinquième colonne d’une nouvelle barbarie qui menacerait l’Occident et ses « valeurs ». Frauduleusement camouflée sous les drapeaux de la laïcité, de la citoyenneté et du féminisme, cette offensive réactionnaire s’empare des cerveaux et reconfigure la scène politique. Elle produit des ravages dans la société française. Déjà, elle est parvenue à imposer sa rhétorique au sein même des forces progressistes, comme une gangrène. Attribuer le monopole de l’imaginaire colonial et raciste à la seule extrême-droite est une imposture politique et historique. L’idéologie coloniale perdure, transversale aux grands courants d’idées qui composent le champ politique français.

La décolonisation de la République reste à l’ordre du jour ! La République de l’Egalité est un mythe. L’Etat et la société doivent opérer un retour critique radical sur leur passé-présent colonial. Il est temps que la France interroge ses Lumières, que l’universalisme égalitaire, affirmé pendant la Révolution Française, refoule ce nationalisme arc-bouté au « chauvinisme de l’universel », censé « civiliser » sauvages et sauvageons. Il est urgent de promouvoir des mesures radicales de justice et d’égalité qui mettent un terme aux discriminations racistes dans l’accès au travail, au logement, à la culture et à la citoyenneté. Il faut en finir avec les institutions qui ramènent les populations issues de la colonisation à un statut de sous-humanité.

Nos parents, nos grands-parents ont été mis en esclavage, colonisés, animalisés. Mais ils n’ont pas été broyés. Ils ont préservé leur dignité d’humains à travers la résistance héroïque qu’ils ont mené pour s’arracher au joug colonial. Nous sommes leurs héritiers comme nous sommes les héritiers de ces Français qui ont résisté à la barbarie nazie et de tous ceux qui se sont engagés avec les opprimés, démontrant, par leur engagement et leurs sacrifices, que la lutte anti-coloniale est indissociable du combat pour l’égalité sociale, la justice et la citoyenneté. Dien Bien Phu est leur victoire. Dien Bien Phu n’est pas une défaite mais une victoire de la liberté, de l’égalité et de la fraternité !

Pour ces mêmes raisons, nous sommes aux côtés de tous les peuples (de l’Afrique à la Palestine, de l’Irak à la Tchétchènie, des Caraïbes à l’Amérique latine…) qui luttent pour leur émancipation, contre toute les formes de domination impérialiste, coloniale ou néo-coloniale.

NOUS, descendants d’esclaves et de déportés africains, filles et fils de colonisés et d’immigrés, NOUS, Français et non-Français vivants en France, militantes et militants engagé-es dans les luttes contre l’oppression et les discriminations produites par la République post-coloniale, lançons un appel à celles et ceux qui sont parties prenantes de ces combats à se réunir en Assises de l’anti-colonialisme en vue de contribuer à l’émergence d’une dynamique autonome qui interpelle le système politique et ses acteurs, et, au-delà, l’ensemble de la société française, dans la perspective d’un combat commun de tous les opprimés et exploités pour une démocratie sociale véritablement égalitaire et universelle.

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Message  MO2014 Mar 23 Sep - 23:28

Conférence exceptionnelle de Zouhair Lahna : 51 jours à Gaza

Zouhair Lahna, chirurgien, a passé 51 jours à Gaza lors des raids israéliens. 51 jours, c’est aussi la durée de cette agression entre frappes aériennes, assassinats politiques, liquidation de combattants et de crimes de guerre. Il a été malgré lui un témoin privilégié de ces « dégâts collatéraux » faits de civils, enfants et femmes. Mais aussi acteur avec les équipes de sauvetage pour réparer et soigner aux urgences de l’hôpital Shifa de Gaza ou celui de Nacer à Khan Younes.


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Message  MO2014 Ven 26 Sep - 1:07

Un curieux « appel des musulmans de France » contre l’EIL mais pas contre la nouvelle expédition militaire occidentale
Publié le 25 septembre 2014 par PIR

Un certain nombre d’organisations musulmanes – et pas des moindres – ont cru bon de signer un appel[1] afin de condamner l’Etat islamique (EIL), en Irak, et d’inviter la « communauté internationale » à l’action.

Cet appel prétend parler au nom des musulmans de France, dont il se félicite de la réaction « spontanée », « responsable » et « unanime ». Or, cette unanimité n’existe que dans l’imagination de ces mêmes signataires qui, sur la base d’une « spontanéité » douteuse, s’improvisent porte-parole des musulmans de France. Effectivement, au moment où un touriste français vient d’être exécuté de manière effroyable – ce qui fait de lui une victime de la nouvelle expédition militaire française en Irak – cet appel ne fait qu’exprimer une collusion inadmissible avec le pouvoir politique français et une irresponsabilité atterrante vis à vis des musulmans de ce pays.

Pour commencer, il fait complètement l’impasse sur les conditions politiques qui ont permis l’émergence de l’EIL, en Irak, suite aux interventions impérialistes, notamment aux deux guerres du Golfe, et à la déstabilisation systématique de cette région du monde, dont les processus internes sont invariablement instrumentalisés par les intérêts géostratégiques des puissances occidentales. Si l’EIL est effectivement un monstre – cela ne fait aucun doute pour nous – il est d’abord le monstre de l’Otan – p

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Message  verié2 Ven 26 Sep - 17:38

un appel qui non seulement usurpe sans vergogne la voix des musulmans de France mais vise également à assurer la promotion de ses auteurs au sein des dispositifs de l’Etat. Le tout aboutissant à renforcer cette étrange instance nationale-républicaine qu’on appelle « l’Islam de France » et, par la même, l’appareil répressif permettant de maintenir à leur place d’indigènes les musulmans de France.
Le PIR
Même si c'est le PIR qui l'écrit, cela semble évident. Développer un appareil religieux musulman capable d'encadrer une partie de la population au service de la bourgeoisie et de l'impérialisme français fait partie des objectifs revendiqués par nombre de politiciens bourgeois plus intelligents que les islamophobes primaires. Les tentatives dans cette direction ne datent pas d'hier, à commencer par la construction de la Grande mosquée de Paris qui remonte à... 1926. Son recteur est d'ailleurs resté en place sous le régime de Vichy, même s'il a, semble-t-il, réussi à jouer double jeu en cachant quelques Juifs et résistants. Aujourd'hui, ce projet revient à l'ordre du jour à une échelle plus vaste et les candidats à bénéficier de la manne étatique, au nom du concordat, ne manquent pas...

Les manifestations "de Musulmans" contre EILL s'inscrivent dans le cadre d'un mouvement d'allégeance à l'Etat et d'union nationale, de soutien à l'impérialisme français. Ce qui n'empêche pas, évidemment, que l'indignation de nombre de participants à ces manifestations puisse être sincère.

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Message  MO2014 Mar 7 Oct - 15:33

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«Homeland» est la série télévisée la plus raciste, Laura Durkay

Un petit Chaperon Rouge blond et blanc perdu au milieu d’une forêt de loups musulmans sans visage: c'est ainsi que les créateurs de "Homeland" ont choisi de représenter la cinquième saison de leur série, où l’agent de la CIA Carrie Mathison est en poste au Pakistan. C’est également la synthèse parfaite de tout ce qui ne va pas avec cette série.

Depuis son premier épisode, "Homeland", qui reprend dimanche, n’a cessé de multiplier des stéréotypes islamophobes comme si ses auteurs étaient payés au cliché. Pourtant la série, créée par les vétérans Howard Gordon et Alex Gansa et l’ancien parachutiste israélien Gideon Raff, continue d'accumuler les récompenses, les éloges de la critique et attire des millions de téléspectateurs.

Pour commencer, la série est truffée d'erreurs élémentaires sur l'Islam et le Moyen-Orient. Laila Al Arian en souligne quelques-unes des plus évidentes : vous n'avez pas besoin d'enterrer le Coran après que quelqu'un l’ait fait tomber sur le sol; Issa, le fils du leader terroriste Abu Nazir, voit son nom mal prononcé par tout le monde tout au long de la série; Roya Hammad - est là pour nous rappeler que même une arabe occidentalisée habillée en tailleur n’est pas digne de confiance - est censée être palestinienne, mais a un prénom perse.

De façon générale, "Homeland" vend sans scrupule des stéréotypes absurdes et préjudiciables. La série a atteint le summum de l’idiotie quand, par exemple, au début de la saison deux, la chic rue Hamra de Beyrouth a été dépeinte tel un univers de jeu vidéo rempli de musulmans effrayants dans lequel Mathison doit se déguiser pour éviter d'être repérée. La vraie rue Hamra est un quartier cosmopolite proche de l'université américaine et rempli d'expatriés, où des chaînes occidentales comme Starbucks et Gloria Jean's se disputent les clients et où personne ne regarderait à deux fois une femme blanche, blonde, aux yeux bleus et aux cheveux découvert. L'Islam lui-même est présenté comme sinistre et suspect: Brody prie secrètement dans son garage accompagné d'une musique angoissante, et un imam scandalisé que des fidèles aient été tués lors d'une opération de police dans sa mosquée s'avère dissimuler des informations concernant le complice de Brody Tom Walker, prisonnier de guerre devenu terroriste.

Ces erreurs s'ajoutent à quelque chose d'important: La structure entière de "Homeland" a pour base le mélange de toutes les manifestations de l'islam politique, des Arabes, des musulmans et de l'ensemble du Moyen-Orient pour représenter une menace terroriste mondiale à la Frankenstein qui n'existe tout simplement pas.

Le grand méchant de la première saison est Abu Nazir, un membre d'Al-Qaïda (et de toute évidence le remplaçant de Ben Laden) qui prépare un attentat contre les États-Unis avec l'aide potentielle du Marine devenu terroriste Nicholas Brody. Au début de la saison deux, nous voyons Abu Nazir se réunir avec un dirigeant du Hezbollah (qui bat aussi, bien entendu, sa femme) à Beyrouth. Quant à la saison trois, nous apprenons qu'un attentat meurtrier contre le siège de la CIA a été en fait financé par le gouvernement iranien, et que le terroriste présumé Brody est caché dans l'état voyou du Venezuela.

En quelques étapes, la série a soigneusement concocté la liste de tous les boucs émissaires actuels de la politique étrangère américaine (Le lien avec l'EIL sera sans doute l’objet de la saison cinq).

Il y a juste un tout petit problème: Al-Qaïda et le Hezbollah ne s'entendent pas du tout en réalité. Le Hezbollah se bat actuellement contre le Front al-Nusra, la filiale d'Al-Qaïda en Syrie. Iran et Al-Qaïda étaient sur des bords opposés lors de la guerre sectaire en Irak au milieu des années 2000. Et à l'heure actuelle, les États-Unis coopèrent de facto avec l'Iran pour soutenir le gouvernement central chiite de l'Irak contre les forces sunnites de l'EIL.

Mais tout cela est beaucoup trop nuancé pour "Homeland", dans lequel les musulmans ne peuvent jouer que deux rôles : des terroristes ou alors des collaborateurs zélés des services de renseignement américains (Ce dernier rôle est d’ailleurs souvent joué par des femmes, qui ont bien sûr besoin de la protection de la CIA contre leurs maris musulmans violents, incarnés par le meurtrier Majid Javadi dans la saison trois). Quand la femme de Brody découvre qu'il est secrètement musulman et lui brandit le Coran en criant: «Ce sont les gens qui t'ont torturé!" elle n'est pas juste mélodramatique. Elle exprime la philosophie de base de la série. Les musulmans - qu'ils soient arabes, iraniens ou pakistanais - sont des terroristes brutaux qui ne sont pas dignes de confiance, et ils sont tous là pour nous tuer.

Il est facile de dire que "Homeland" est juste une série télévisée, un thriller qui nécessite naturellement des méchants diaboliques et de grands enjeux. Mais ces mêmes stéréotypes sur les Arabes et les musulmans sont utilisés politiquement pour justifier davantage les actions dans le monde réel – guerres américaines, opérations secrètes et frappes de drones, détention et torture des prisonniers par la CIA, violences policières racistes, surveillance nationale et frontières militarisées. Dans ce contexte, "Homeland" n'est pas seulement un divertissement bêtifiant, mais un dispositif qui ne fait que perpétuer les idées racistes ayant des conséquences réelles sur la vie des gens ordinaires.

Source : http://www.washingtonpost.com/posteverything/wp/2014/10/02/homeland-is-the-most-bigoted-show-on-television/

Traduit de l'anglais par AB, membre du PIR

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Message  verié2 Mar 7 Oct - 16:07

Il est facile de dire que "Homeland" est juste une série télévisée, un thriller qui nécessite naturellement des méchants diaboliques et de grands enjeux.
Je n'ai pas vu Homeland, mais nous subissons actuellement un déluge de séries TV pro impérialistes, à la gloire de la CIA et autres services de barbouzes, par exemple Blacklist.

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Message  MO2014 Jeu 9 Oct - 8:39

Nous réapproprier Malcolm

Nous publions ci-dessous, avec l’aimable autorisation des éditions Amsterdam, l’introduction du dernier livre de Sadri Khiari, « Malcolm X. Stratège de la dignité noire » :

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Malcolm est une icône. Un mythe. C’est le cas en France comme ailleurs. Reconnu par de larges franges de la gauche radicale, son prestige s’étend dans les quartiers populaires aux populations issues de l’immigration noire, arabe et musulmane, bien au-delà des seuls milieux militants. D’une certaine manière, la séduction qu’il exerce peut être comparée à l’envoûtement que suscite « le Che » parmi les Blancs. Comme lui, il n’échappe pas non plus à une certaine instrumentalisation, voire à la marchandisation.

En général, quand une personnalité fait consensus, il est bon de s’en méfier. De s’interroger ensuite sur les raisons de cette unanimité. Moins célèbre sûrement que Martin Luther King, Malcolm n’a pas le même « usage » que ce dernier. King est le pape. Au-dessus de la mêlée. On n’a pas le droit de ne pas l’aimer. King est bon. Il a fait un rêve. Il est mort. King est une valeur universelle. Plus, il est le concept même d’universel. Comme Gandhi et les autres saints de la politique. Il repose au Panthéon du Panthéon. Peu y entrent. Mandela n’en est pas loin mais il prend son temps avant de nous faire ses derniers adieux. Mandela a vraiment une bonne bouille. Avec ses cheveux tout blancs, on dirait un vieux sage africain dans un conte pour enfant catholique ou de gauche. Il sourit et il a une colombe blanche sur la tête. J’aimerais en avoir un dans mon jardin. Mandela, ce qu’on aime chez lui, c’est qu’il a été communiste et qu’il ne l’est plus. Il a été un partisan de la violence et y a renoncé. Surtout, il a fait la paix avec les Blancs de son pays. Grand seigneur, il leur a pardonné vingt-cinq années de cachot. Il est d’autant plus admirable qu’il a libéré le monde blanc du terrible régime d’apartheid qui le souillait et rappelait trop les heures néfastes du colonialisme. Pretoria faisait tâche dans le paysage de la bonne conscience occidentale. Elle jetait un soupçon de racisme sur les anciennes puissances coloniales. État ou individu, il était inconvenant de soutenir officiellement le pouvoir afrikaner. En dehors de quelques groupuscules nazis et identitaires blancs, seule Israël s’y autorisait. Mais Israël n’a pas besoin d’excuses puisque tout le monde, y compris les tribus d’Amazonie, doit des excuses à Israël. Pour l’éternité . Le monde doit beaucoup à Mandela.

Malcolm ce n’est pas pareil. Même mort, il n’accédera jamais au Panthéon du Panthéon. Mais on lui doit beaucoup aussi. Il a prouvé que même le pire de ces salauds de racistes antiblancs pouvait voir la lumière. Ne s’est-il pas lui-même rapproché de Martin Luther King ? Enfant terrible de l’antiracisme, il serait rentré au bercail, peu de temps avant sa mort. Malcolm est celui auquel le Blanc a pardonné.

En fait, ce que je dis là n’est vrai qu’en partie. Malcolm n’ira pas au Panthéon du Panthéon, mais il n’ira pas non plus au Panthéon. Malcolm est beaucoup trop noir pour ça. Lui, ne fait pas consensus chez les « non-racistes » mais seulement chez les antiracistes déclarés. Et encore ! On lui sied gré de s’être « repenti » à la fin de sa vie, on le remercie d’avoir été assassiné. Mais, quand même, il n’est pas fiable. Trop noir, je l’ai dit ; probablement trop musulman aussi. Je vais être plus précis : En France, Malcolm fait consensus dans les franges les plus militantes de l’antiracisme blanc et dans l’ensemble de l’antiracisme non-blanc. Dans cette mesure, il faut donc aussi s’en méfier. En vérité, Malcolm, on ne lui demande que d’être un symbole. Malcolm est la bonne conscience radicale de la lutte antiraciste. J’aime Malcolm donc je suis radical.

On se réclame de Malcolm… mais on s’inspire de Martin Luther King. On le cite, mais on n’oserait pas prononcer ou écrire des phrases aussi fortes et incisives que les siennes. Malcolm mord à pleines dents dans la viande rouge du Blanc. Nous, on va chez le dentiste. Malcolm est une référence à laquelle on ne se réfère pas. On a du mal, en effet, à voir le rapport entre la politique de celui-ci, dans ses variations, et la politique de ceux qui s’en réclament en France. Le Black Panther Party (BBP) suscite les mêmes dispositions. Je respecte les morts et les détenus politiques mais je me dois de le dire, ce qui fait fantasmer chez les militants des Panthers, c’est leurs vestes en cuir noir. Ce sont surtout les gauchistes qui frissonnent d’émotion à la pensée du BBP. Marxistes, léninistes, maoïstes, le fusil en bandoulière, ouverts à des alliances multicolores : c’est comme ça qu’on les voit et pour ça qu’on les aime. Et aussi, on apprécie beaucoup qu’ils se soient fait massacrer par le FBI.

Malcolm, donc, on s’en réclame tout en pratiquant la politique de ceux-là mêmes qu’il n’a jamais cessé de dénoncer. Entendons-nous bien, je n’affirme pas qu’il serait judicieux d’appliquer en France la politique de Malcolm X, si tant est qu’il ait eu une politique homogène et constante. Je suis convaincu par contre que l’une des préoccupations principales de Malcolm X, au moins à partir de 1963, a été de penser une stratégie politique et de la mettre en œuvre. Je prétends également que cette réflexion stratégique et l’esprit qui l’a animée peuvent être riches d’enseignements pour nous aussi bien dans ses certitudes, dans ses hésitations avouées que dans ses points aveugles et ses limites. Or, dans les mouvements indigènes (J’emploie la notion d’indigène non pas bien sûr dans le sens littéral du terme mais dans celui que lui a donné le Parti des indigènes de la république. En référence au régime de l’indigénat qui astreignait les populations des colonies françaises à un statut racialisé d’exception, la notion d’indigènes de la république met en lumière les continuités coloniales qui cantonnent les Français issus de l’immigration coloniale à un statut de sous-citoyens.) en France, rares sont ceux qui s’attachent à Malcolm X au-delà du symbole. Disons même que, de manière générale, il n’y a pas de discussions stratégiques. Ce qui est bien dommage. « Le leader noir américain, a dit un jour Malcolm, manque d’imagination. C’est son plus grave défaut. Il n’a pas de pensées, de stratégie que déterminées par l’homme blanc, son approbation, ses conseils . » Cela nous ressemble beaucoup.

En France, me semble-t-il, Malcolm a acquis la notoriété qui est la sienne grâce au film de Spike Lee. Il est même fort probable que beaucoup ne le connaissent qu’à travers ce film. Les plus intéressés auront peut-être lu l’autobiographie dont il est inspiré. C’est là qu’on touche la raison principale de l’attrait qu’il exerce : n’importe quelle personne issue de l’immigration peut s’identifier sans peine au parcours de Malcolm. Si l’on omet, bien sûr, sa trajectoire politique. Et si l’on ne se reconnaît qu’imparfaitement dans la vie de Malcolm, on a toujours un oncle, un cousin, une cousine, qui s’est heurté aux mêmes obstacles que celui-ci. Malcolm a été un enfant pauvre, pauvre et noir, victime de toutes les violences du racisme. Particulièrement doué, il se cogne la tête contre le mur de la ségrégation raciale. Sans plus d’espoir, il renonce alors à une scolarité qui s’annonçait brillante. Il ne croit plus en rien. Il s’anéantit dans la drogue et la délinquance et connaît les rigueurs de l’enfermement carcéral. En prison, il « rentre dans le dîn » qui lui dit tout ce qu’il est et insuffle de l’espoir dans le désespoir. C’est la première rédemption. Mais il se trompe encore, car il choisit le mauvais « dîn » ou, en tout cas, une version altérée de la juste foi. Embarqué dans la Nation of islam (NOI), il dit des tas de choses justes sur nous et, surtout, sur les Blancs, des choses que tous nous avons envie d’entendre sinon de dire. Mais il en fait trop, peut-être. Il en fait tellement qu’on a presque peur d’éprouver tant de joie à l’écouter. On est donc soulagé lorsqu’il prend son indépendance, reconnaît le « vrai islam » et renonce à prêcher la haine du Blanc. C’est la deuxième rédemption. J’ai quelques scrupules à poursuivre mais je vais le faire : Malcolm est assassiné par les forces du Mal. Il va au paradis. Des héros. Des hommes de bien. C’est la troisième rédemption. Fin du roman. Ainsi, si tout, dans la première partie de sa vie, nous rapproche, les deux épisodes suivants nous emportent également. Malcolm est l’archétype classique de celui qui n’a rien que la mouise, et qui par la force de sa volonté force le destin à lui sourire. C’est le Pur – comme nous tous, au fond – qui l’emporte sur l’Impur. Il meurt mais ses idées subsistent. Son élan fondamental est le nôtre.

À travers Malcolm X, nous reconnaissons ce que nous sommes et nous reconnaissons nos espérances. Chaque indigène partage un peu de sa fierté retrouvée et recouvre sa dignité. Le portrait de Malcolm X accroché à un mur incite à la résistance. Et à ce titre, la figure mythique de Malcolm X est essentielle. L’ironie dont j’ai fait preuve est malvenue. Quand bien même, de Malcolm X, on ne retient que le roman de sa vie, c’est déjà beaucoup. Il n’en demeure pas moins que ce serait encore mieux si l’on en retenait aussi l’apport et les interrogations politiques qui étaient les siennes. Car, s’il a longtemps, trop longtemps, accordé sa confiance et obéi à Elijah Muhammad (Elijah Muhammad est alors le Guide de la La Nation of Islam (NOI). Cette organisation, connue aussi comme Black Muslims, a été fondée vers 1930 par Wallace D. Fard, un vendeur ambulant de Détroit qui disparait mystérieusement en 1934. Elijah Muhammad (1897-1975), de son vrai nom Elijah Pool, fils d’un prêcheur baptiste de Géorgie, sera son successeur et dirigera cette organisation jusqu’à sa mort. L’idéologie développée par la NOI est un syncrétisme mêlant le nationalisme noir séparatiste et racialiste à une inspiration islamique à bien des égards fort éloignée du dogme musulman. Petite organisation jusqu’à la fin des années 1950, la NOI parviendra à conquérir une audience de masse, notamment dans les ghettos noirs des grandes villes industrielles du Nord, grâce à l’activisme et au charisme de Malcolm X. En 1975, l’un des fils d’Elijah, Warith Deen Muhammad, prendra les rênes du mouvement ; il adoptera l’islam sunnite orthodoxe et rejettera le nationalisme noir, suscitant la sécession d’un certain nombre de dirigeants historiques de l’organisation parmi lesquels Louis Farrakhan, qui reprendra l’héritage idéologique de la Nation of islam au sein d’un nouveau mouvement du même nom.), Malcolm a pensé sa parole, il a pensé son action, il a pensé sa politique. C’est bien sûr encore plus le cas dès lors que germent ses premiers doutes et qu’il perçoit les limites de la démarche de la NOI. Sa pensée s’emballe avec la rupture et il ne cessera plus de formuler de nouvelles idées, de les tester, de tâtonner, de les modifier, au risque d’ébranler ses partisans. Malcolm, je l’ai cité plus haut, blâme les autres dirigeants noirs de manquer d’imagination stratégique et de s’en remettre à leurs conseillers blancs plutôt que de penser par eux-mêmes. Son cerveau à lui, au contraire, est tout entier occupé à réfléchir la stratégie. Il ne passe pas son temps à geindre, à s’indigner, à hurler sa colère, à dire « on en a marre » – autant de manière d’interpeller les Blancs, de leur confier la solution du problème, de crier sa propre impuissance. Non, Malcolm ne conteste pas, il se bat.

Malcolm est trop réaliste pour renoncer à la lutte. « Comment se débarrasser du singe qui est cramponné à notre dos ? », s’interroge-t-il de façon lancinante ; comment les Noirs peuvent-ils se libérer eux-mêmes de l’oppression qui les accable depuis tant et tant de siècles ? À partir de cette question qui est aussi une exigence fondamentale, il tente de définir un horizon qui lui paraît accessible, de discerner les moyens et les étapes qui peuvent y conduire ; il pèse les rapports de forces et leurs dynamiques respectives ; il intègre les configurations locales à la situation nationale et celle-ci au contexte mondial ; il analyse les formes et les mouvements de la conscience noire, ses seuils et ses potentiels ; il estime l’adversité, considère ses manifestations avouées et celles qu’enveloppe le masque de l’amitié ; il identifie les alliances souhaitables et le contenu politique qui les rendra possibles ; il évalue les conjonctures, les moments de l’affrontement et ceux du contournement, les voies directes et les chemins de traverse. Malcolm pense aussi l’organisation, non comme un simple problème technique mais comme une dimension de l’équation stratégique à résoudre, déterminée elle-même dans sa forme et ses mécanismes par les choix stratégiques établis. Ses réflexions sur ces questions, les solutions qu’il a forgées, les écueils auxquels il s’est heurté, les limites qui étaient les siennes, sont notre héritage.

Encore faut-il savoir en tirer profit. Penser nous-mêmes de manière autonome ce qu’il a dit, écrit ou fait. Ne pas craindre d’insulter sa mémoire, de l’interpréter, de le tordre si nécessaire. L’honorer, c’est parfois le trahir si lui être fidèle, c’est poursuivre son combat.

Il est intéressant de noter comment Malcolm introduit ses interventions publiques. Après les remerciements d’usage, son discours du 16 février 1965 – mais je pourrais en citer d’autres – commence ainsi : « Si je suis ici, c’est pour parler avec vous de la révolution noire, en marche sur cette terre, des formes qu’elle prend sur le continent africain et de son impact sur les communautés noires. Non seulement ici, en Amérique, mais aussi aujourd’hui en Angleterre, en France, et dans toutes les anciennes puissances coloniales. (…) Afin que vous et moi connaissions la nature de la lutte dans laquelle vous et moi sommes engagés, nous devons connaître les différents éléments qui entrent en jeu, au niveau local et national, mais aussi sur le plan international . » Malcolm est obsédé par « ce que nous devons faire » et il ose des réponses, fussent-elles provisoires. Il ébauche une « ligne d’action » et saisit chaque occasion pour la défendre.

Ce petit livre n’a qu’une prétention modeste. Il se veut une introduction aux problématiques stratégiques développées par Malcolm X au cours de la période, sans doute la plus fructueuse, qui sépare sa rupture avec la NOI de ce 21 février tragique où il nous a quittés. Je suis convaincu en effet que l’expérience du mouvement noir américain et, plus particulièrement, les leçons et les questionnements qu’en a tirés Malcolm, peuvent être d’un grand intérêt pour nos propres combats en France. Bien plus que l’expérience des luttes anticoloniales dans les anciennes colonies. Avec les Noirs américains, nous avons en partage une histoire et un présent, une histoire qui est toujours notre présent. Celle d’un transfert forcé dans les métropoles impériales déterminé par la colonisation de nos pays d’origine et celle d’un enracinement, sous le statut de races inférieures, dans ces mêmes métropoles. Nous sommes des « colonisés de l’intérieur », des indigènes de la république, comme nous disons en France. Une condition que résume le slogan : « Si nous sommes ici, c’est que vous étiez là-bas. »

Quiconque observe, non pas avec des yeux de sociologue badin mais avec ceux des militants noirs, la condition noire aux États-Unis, y découvrira, comme grossie à la loupe, la condition de l’immigration coloniale et des quartiers populaires en France. Une telle affirmation choquera ou fera sourire de ma naïveté militante un Blanc acquis au mythe de la puissance intégratrice du fameux « creuset républicain ». La République française aurait cette vertu immanente de fondre l’étrangeté dans le commun. Ça traîne un peu parfois, mais ça finit par se faire. La Grande Révolution française n’a-t-elle pas aboli les distinctions statutaires et autres « privilèges » ? La République n’a-t-elle pas aboli l’esclavage puis la colonisation ? Les Italiens, les Espagnols, les Polonais ne font-ils pas partie de la nation ? Tout le monde aujourd’hui n’est-il pas citoyen, à égalité devant la loi, soumis, ajoute le gauchiste, au même exploiteur capitaliste ? N’est-il pas indécent de comparer les souffrances terribles des Noirs américains avec les discriminations, certes injustes et désobligeantes, que subissent nombre d’immigrés et leurs enfants ? Je ne m’encombrerai pas, ici, à répondre à ces arguments qui n’en sont pas. Je l’ai fait ailleurs, d’autres l’ont fait avant et après moi, en particulier dans la littérature militante. Ce que l’on y trouve, notamment, et ce depuis des décennies, ce sont des mots d’ordre, des slogans, des protestations, des revendications, des témoignages, des récits de batailles, des fragments d’analyse, des esquisses de stratégie, toutes ces choses auxquelles peu prêtent attention et qui suffisent, en vérité, à établir la proximité des conditions noire aux États-Unis et indigène en France. Je risque une phrase : nul besoin pour comprendre une société d’analyser les ressorts de sa reproduction ; il suffit d’écouter les résistances et les luttes qu’elle suscite, en son intérieur et en son extérieur, pour constater qu’aux États-Unis et en France ce sont les mêmes préoccupations, les mêmes questionnements, les mêmes colères, les mêmes solutions qui sont pensés, mis en pratique, « praxis tés » si j’ose dire, par les Noirs américains et les indigènes de l’Hexagone. Le même ennemi aussi : le Blanc. Le même allié-contraint : le Blanc.

Que l’on pense bien sûr aux revendications d’égalité sociale ou d’égalité dans la citoyenneté – c’est-à-dire in fine dans l’accès au pouvoir politique -, que l’on pense également aux revendications liées à la reconnaissance culturelle ou aux multiples formes de reconnaissance sociale, de reconnaissance de la dignité humaine, du droit au respect ou à l’honneur ; que l’on pense bien sûr aux batailles contre l’omniprésence policière dans les ghettos ou les quartiers populaires, au problème des prisons comme dispositif central de contrôle et de subalternisation, aux luttes contre la ségrégation urbaine et plus largement spatiales, et l’on ne pourra que convenir de leur convergence des deux côtés de l’Atlantique. Que l’on pense, encore, aux différentes approches qui animent les résistances, celles qui se réclament de l’intégration et celles qui s’y opposent, celles qui cherchent à tout prix la mixité raciale dans ses formes d’organisation et celles qui la rejettent en pratique ou par conviction, celles qui s’évertuent à s’allier aux Blancs et celles qui affirment leur autonomie coûte que coûte. Que l’on pense, toujours, aux identifications mobilisées dans les luttes, celles qui se construisent à partir des notions de nation, de peuple ou de race et celles qui se réclament seulement d’un combat universel pour les droits en tant qu’être humain, celles qui se réclament d’une remémoration voire d’une reviviscence des cultures, des traditions, des croyances et des normes d’une origine supposée ou connue, celles qui se revendiquent plutôt d’un métissage multiculturel cosmopolite ou celles qui prônent l’assimilation et la normalisation dans le monde blanc hégémonique, celles pour finir qui défendent leur collectivité définie d’une manière ou d’une autre ou celle qui inscrivent leur action dans le cadre des luttes générales de l’émancipation, que l’on pense à tout cela et, par-delà les particularités propres à l’histoire des deux pays, l’on ne pourra que reconnaître une identité substantielle – au sens fort du terme – entre les Noirs américains et les populations issues de l’immigration en France. Pour clore cette liste qui est loin d’être exhaustive, je n’oublierai pas non plus de souligner la volonté souvent affirmée de réhabiliter les histoires dominées, d’entretenir la mémoire des luttes contre l’esclavage et la colonisation ou de préserver l’héritage des résistances menées par les générations antérieures. Notons, enfin, l’empathie pour les luttes des autres peuples opprimés en Asie, en Afrique ou sur le continent américain. Toutes ces problématiques, ces points d’ancrage de la conscience politique, qui suscitent des controverses, qui divisent et attisent les résistances, des plus moléculaires au plus massives, qu’elles s’expriment dans le quotidien, à l’échelle individuelle ou collective, dans des batailles sociales, politiques ou artistiques, sont communes au monde noir américain et au néo-indigénat français – on aboutirait à la même conclusion en examinant les contenus et les formes des contre-résistances que je désignerais comme blanches. Si ce livre échoue à faire percevoir cette homologie, c’est donc un mauvais livre.
Certes, il s’adresse principalement à des lecteurs, sinon connaisseurs, du moins attentifs aux résistances de l’immigration et des quartiers populaires. Il est indiscutable également que mon point de vue est extrêmement situé voire biaisé. Ma lecture de Malcolm est forcément distordue par l’expérience indigène à travers laquelle je parle et par le dessein qui est le mien. J’espère cependant pouvoir suggérer que la pratique politique de Malcolm, ses interrogations et les réponses qu’il a formulées conservent, aujourd’hui, dans le contexte français, une pertinence pour penser notre propre action.

Ce livre n’a donc pas pour ambition de faire œuvre de « malcolmologie ». Je n’en ai guère les moyens. On pourra me reprocher, à juste titre, une connaissance certainement rudimentaire de l’histoire états-unienne contemporaine et même des mouvements de résistance noire qui l’ont marquée. Je connais par trop, pour en être contrarié, ce genre de censure opposée aux militants pour les empêcher de prendre la parole. Et j’anticipe, sans difficulté, le procès en démagogie que pourrait susciter cette dernière remarque. Je suis convaincu, pour ma part, qu’un regard militant saisit les enjeux, dans un lieu et un moment particulier, bien plus sûrement qu’un regard « scientifique » et de manière certainement plus utile pour un autre militant.

Je n’y serai pas indifférent mais je ne chercherai pas, dans cet ouvrage, à suivre chronologiquement l’évolution de la pensée politique « malcolmienne » ni à en faire une périodisation. Mon propos est plutôt d’en dégager des thématiques importantes pour les débats français que d’en retracer l’histoire. Du reste, malgré la rupture de Malcolm avec la NOI qui s’accompagne de révisions idéologiques et politiques majeures, il me semble que les continuités demeurent tout aussi importantes. On a pu tenter également de distinguer différents Malcolm dans la brève période qui a suivi cette rupture. Il me paraît quant à moi que l’intensité de ses réflexions au cours de ces quelques mois, les contradictions qui sont les siennes, les chevauchements manifestes des différents moments de sa pensée politique, rendent inopérante une approche qui s’attacherait avant tout à repérer les seuils et les étapes franchis. Les hésitations, les inflexions ondoyantes ou par saccades, les changements, les oscillations, les revirements, les approximations aussi, les excès polémiques, les raccourcis et les hyperboles, caractères d’une pensée bouillonnante et du discours oral conçu pour orienter, mobiliser, provoquer ou simplement convaincre, tout cela, on s’en doute, prête aux interprétations les plus diverses, à des malentendus de lecture voire aux extrapolations les plus fantaisistes. À cela aussi, il est difficile d’échapper et je n’y échapperai pas. Mais je pense qu’un des moyens d’éviter les quiproquos consiste à rejeter la tentation simplificatrice d’une lecture « évolutionniste » de sa trajectoire.

Surtout, je crains fort que ce type de démarche participe le plus souvent de la construction du mythe de la « rédemption » de Malcolm. Elles tendent couramment à dessiner une trajectoire malcolmienne s’inscrivant dans une courbe ascendante – et prédéterminée – qui l’aurait conduit de l’obscurité primitive d’un combat national, racial, religieux, confus et bourré de superstitions – qu’on comprend et pardonne, bien sûr – à une politique de l’Universel, que cet universel soit marxiste, musulman, ou libéral démocratique à la manière d’un Martin Luther King (avec la prétendue « rencontre manquée », empêchée par une mort brutale et injuste, digne des plus mauvaises tragédies amoureuses).

Une introduction réflexive à la pensée stratégique de Malcolm X se heurte à une autre difficulté. Malcolm n’a pas produit d’ouvrage où serait exposé de manière systématique le propos qui est le sien. Celui-ci, dans ses métamorphoses et ses continuités, doit être reconstruit à partir de fragments épars, d’intuitions plus ou moins développées de discours en discours, restées à l’état d’ébauche ou abandonnées, parfois explicites, souvent non. Malcolm ne choisit pas ses mots au hasard, son franc-parler légendaire est aussi l’expression de la rigueur intellectuelle qu’il s’impose. Mais ses idées, il ne les dit pas toujours dans un langage formel dont le sens ne laisserait pas de place au doute. Malcolm parle et il parle beaucoup sous la forme de récits et d’images, d’illustrations plus ou moins suggestives, de mots d’ordre, de tâches à accomplir, qui nécessitent d’être traduits pour les intégrer à la réflexion qui est la sienne. Mais peu importent, au final, les modalités d’énonciation qu’il a choisies. À la science imprécise glanée dans des lectures sans doute hétéroclites, au savoir dit « intuitif » de sa condition, produit de son expérience de vie et de l’observation attentive des siens, Malcolm ajoute la connaissance stratégique qu’il recueille de son combat contre l’oppression raciale. Seule son obstination lucide à découvrir les moyens de défaire la domination blanche pouvait le conduire à se poser les bonnes questions. À nous, bien sûr, d’en tirer le meilleur parti...

http://indigenes-republique.fr/nous-reapproprier-malcolm/

MO2014

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Message  MO2014 Ven 10 Oct - 9:31

Génération Gaza 2014 : enjeux et stratégies
Publié le 9 octobre 2014 par Houria Bouteldja et Youssef Boussoumah, membres du PIR

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I. Indigènes versus gauche blanche ou la bataille de l’autonomie versus l’unité

Nous nous réjouissons qu’en dépit d’une invasion meurtrière et barbare de plus de 50 jours, l’armée israélienne a été incapable d’atteindre ses objectifs. Non seulement, l’agresseur Israélien n’a pas réussi à imposer sa volonté à Gaza mais en plus celui-ci s’est vu imposer une négociation avec la Résistance – ce qui est en soi une punition car ce n’est pas dans ses habitudes de morgue hautaine. Cela a le mérite de rappeler à Israël et au monde que jamais le hold-up de 1948 ne sera légitime et que sans résistance il n’y a plus de peuple palestinien. C’est pourquoi nous pouvons l’affirmer, Gaza, comme en 2009 et en 2012, a remporté cette dernière bataille. Et nous en sommes fiers.
Ce n’est pourtant pas cette victoire que nous souhaitons commenter ici mais celle, bien plus modeste et bien moins risquée que nous prétendons avoir remporté, nous indigènes de France, dans ce qu’il faut bien appeler la bataille française pour Gaza. Depuis quelques années, nous assistons à une recomposition du mouvement de solidarité pro-palestinien. L’agression israélienne a précipité cette évolution et a mis en évidence de nouvelles fractures et de nouvelles alliances au sein du champ politique blanc et non blanc. De nouveaux rapports de force se dessinent grâce notamment à la ferveur et à la ténacité de la « génération Gaza », fer de lance des mobilisations.

Acte 1 : Les indigènes entrent en scène

Le 13 juillet 2014, ce n’est pas la gauche qui écrit la première page de ce qui allait devenir un mouvement de mobilisation exceptionnel et d’une rare détermination depuis 2009[1], mais la « Génération Gaza ». Les indigènes ont donné le « la ». En effet, les colonisés de l’intérieur prennent toute la mesure de la tragédie qui se joue à Gaza la martyre et créent un collectif informel et affinitaire. Il est composé des organisations Palestiniennes comme le GUPS-Paris (Union générale des étudiants de Palestine), PYM-France (Mouvement des jeunes Palestiniens), Génération Palestine ou encore le Fatah-France, des organisations issues de l’immigration postcoloniale, comme le Parti des indigènes de la république (PIR), un service d’ordre (remarquable) composé de volontaires musulmans ainsi que des organisations de la gauche radicale comme le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) ou l’Union juive française pour la paix (UJFP)[2]. Nous connaissons la suite : entre 20 000 et 30 000 personnes, principalement jeunes, souvent Arabes et musulmans, répondent à l’appel. La manifestation est exemplaire. Et ce pour trois raisons. D’abord parce que son initiative revient à des militants et organisations qui se situent dans la frange radicale du mouvement pro-palestinien (principalement non blanc). Ensuite, parce qu’ayant agi de façon spontanée, ils se sont affranchis des lourdeurs et frilosités organisationnelles et notamment celles du Collectif national. Enfin, par la grande proportion de jeunes (moyenne d’âge 25 ans), par l’énergie, la radicalité des mots d’ordre, la fierté identitaire et l’encadrement. En un mot, la qualité politique de l’ensemble. Et, faut-il le souligner, derrière le mot d’ordre de soutien à la résistance armée et ses différentes expressions politiques. Nous ne nous attarderons pas sur les provocations de la LDJ qui ont suffisamment été mises en lumière et qui n’ont pas réussi à altérer la puissance politique de cette manifestation. Au contraire, ces dernières sont l’exacte confirmation du défi politique que revêt le potentiel politique de ce « tiers-peuple » pour le mouvement sioniste et pour le pouvoir en place. Le succès est fulgurant et surprend les organisateurs eux-mêmes. De l’aveu de beaucoup, on a rarement vu une manifestation si massive, si déterminée, si jeune, si basanée…et si féminine. Les quartiers ont occupé la rue comme rarement. La prochaine manifestation est aussitôt annoncée. Elle aura lieu le samedi suivant, 19 juillet, à Barbès mais sera interdite.

S’appuyant sur les provocations de la LDJ/CRIF qu’il a laissées s’opérer et qu’il a couvertes, le pouvoir tente de museler cette jeunesse d’une part avec l’incroyable répression que l’on sait et d’autre part, en autorisant de façon quasi automatique la manifestation du collectif national du 23 juillet. Il tente de diviser le mouvement de solidarité entre les modérés menés par la gauche blanche et les radicaux à dominante indigène. Bien qu’interdite, les organisations palestiniennes et le PIR maintiennent leur appel à mobilisation. Le NPA également mais pas L’UJFP. Si la présence du NPA ne soit pas surprenante, il faut tout de même souligner l’attitude d’Ensemble (membre du Front de gauche) qui, dans un tract du 15 Juillet, a clairement exprimé son soutien à la résistance du peuple palestinien[3], et a appelé à rester mobilisé malgré les interdictions. En revanche, si le PC et le Collectif national ont dénoncé l’interdiction, ils n’ont pas appelé à braver l’interdit. Notons que c’est le pôle clairement antisioniste qui a maintenu sa volonté de braver les interdictions et que c’est ce pôle qui est le plus en phase avec la « Génération Gaza ». Dix mille personnes répondent à l’appel. Nous connaissons la suite : une magnifique démonstration de la détermination et de la puissance indigène en gestation. Mais aussi une répression inouïe[4] qui a contraint les cadres traditionnels à bouger, voire à reprendre la main.

À l’issue de ce premier grand acte, et contrairement au déni de la classe politique, l’indigène est l’acteur principal tant sur le fond que sur la forme. La gauche blanche (mis à part le NPA et quelques exceptions) est au mieux observatrice, au pire, très embarrassée par une réalité à laquelle elle se dérobe depuis tant d’années. Elle ne tardera pas à reprendre la main… avec la bienveillance du pouvoir. Heureusement pour elle, elle jouera ce deuxième acte avec plus de dignité qu’à l’accoutumée mais il est vrai que la barbarie israélienne et la bêtise conjuguée des officines sionistes et du gouvernement Valls l’auront plutôt aidé.



Acte 2 : La gauche blanche reprend la main



Dans son édition du 25 Juillet 2014, le journal Le Monde salue le succès de la manifestation autorisée du 23 juillet organisée par le collectif national[5]. Il la prend comme point de référence de mobilisation réussie, écrivant ainsi : « D’après le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, il n’y a jamais eu de suspense concernant l’issue de la demande puisqu’il a déclaré mardi qu’il n’avait « jamais été question d’interdire » cette manifestation, contrairement aux rassemblements de samedi 19 et 26 juillet qui l’avaient été car ils présentaient selon le ministre « suffisamment d’éléments témoignant de risques de dérapage ». Ainsi, le ministère de l’intérieur donne un blanc-seing aux organisations de la gauche blanche et tente de créer la division, voire l’opposition entre les manifestants respectables et ceux qui ne le sont pas. En d’autres termes, la gauche reprend le leadership de la solidarité propalestinienne avec l’aval des autorités publiques.

Ainsi, le 23 juillet, le Collectif national prend l’initiative de la manifestation, soit dix jours après la première et 4 jours après la première manifestation interdite – bref, très tard par rapport au déclenchement de l’agression israélienne. Il ne pouvait plus décemment rester muet et mettre en péril sa crédibilité mais nous imaginons sans peine le malaise qui devait l’habiter devant le spectacle de la rue indigène, sa ferveur, la répression dont nous étions les victimes – ils sont tout de même de gauche – et les accusations d’antisémitismes qui, même si elles seront immédiatement démontées, marquent les mobilisations pro palestiniennes d’un stigmate infamant et sèment le doute dans les états-majors de gauche qui y croient en partie et qui par conséquent redoutent toujours la présence trop massive et trop ostentatoire d’indigènes dans ses rangs. Terrible dilemme que de prétendre représenter les classes populaires et de s’en défier en même temps mais telle est la réalité de la gauche française. Nous connaissons la suite. La manifestation est saluée par l’ensemble des observateurs. Personne ne manque à l’appel : Jean-Luc Mélenchon, Clémentine Autain, Esther Benbassa, Dominique Voynet, Pierre Larrouturou, Pierre Tartakowsky…Le ban et l’arrière ban de la gauche de gauche sont réunis et même un certain nombre de représentants du PS comme Razzy Hammadi, Yann Galut, Pascal Cherki ou encore Alexis Bachelay…pour dire « stop à l’agression », « stop au blocus de Gaza », « sanction contre Israël ». Des mots d’ordre – il faut le reconnaître – tout à fait respectables. Le PIR s’est joint à cette manifestation sans états d’âme car notre ligne était claire depuis le début : faire que les mobilisations en Occident soient les plus massives possibles et respecter en cela notre mot d’ordre de soutien à la résistance qui devait revêtir un contenu concret et conjoncturel : soutenir la résistance c’est soutenir ses revendications[6] ce qui était le cas de cette mobilisation. De très nombreux indigènes venus de tous les quartiers répondent présent. À la fin du parcours, la manifestation est immédiatement dispersée parce qu’il ne faut pas tenter le diable. La presse salue la prouesse. La gauche respire un grand coup. Champagne !

Mais l’agression sioniste sur Gaza continue. Les manifs doivent continuer. Nous ne sommes pas au bout de nos peines. Un dernier défi restait à accomplir : contrecarrer les plans du gouvernement et les espoirs du mouvement sioniste qui misaient sur la division du mouvement entre les respectables – les Blancs – et les non respectables – les indigènes, et ainsi atteindre un objectif ultime : peser à l’international pour renforcer la résistance palestinienne et fragiliser le mouvement sioniste en Occident. On pourrait même ajouter un objectif du point de vue de la gauche de gauche : affaiblir le PS en s’appuyant sur des mobilisations populaires qui, il faut bien le dire, manquent en France. Mais « la Génération gaza » n’est pas tout à fait le peuple auquel aspire la gauche. Quant au PC, veut-il vraiment embarrasser le PS ?



Acte 3 : Mais les indigènes ne lâchent pas l’affaire



L’interdiction de la manifestation de Barbès a été vécue comme une atteinte à notre dignité. Les attaques contre Gaza se sont accrues. Cette fois, nous appelons à manifester à République, le 26 juillet. De manière assez inattendue, une partie du Collectif national se joint à l’appel, ce que nous vivons comme un pas dans la bonne direction car il faut désormais massifier le mouvement et retirer au pouvoir la possibilité de justifier une interdiction. Il faut donc la jouer fine. Le ministère de l’intérieur exige des garanties de sécurité et de maintien de l’ordre. Pour remplir cette condition, il exige la présence du Parti communiste et du service d’ordre de la CGT. Un bras de fer s’engage au sein du Collectif national pour obtenir l’accord du PC et de la CGT qui ne viendra jamais[7]. Pierre Laurent soigne sa prose mais ne trompe personne[8]. Cela fait longtemps que le PC nous a habitués à sa politique de l’autruche. Les indigènes n’ont pas la mémoire courte et se souviennent de sa lâche défection la veille d’une manifestation pro palestinienne de protestation contre la visite officielle d’Ariel Sharon en France suite à des attentats terroristes en Angleterre. Nous insisterions sur cette « anecdote » si nous pensions que le PC en avait honte mais nous avons un doute sur ce point. Donc, passons. Ainsi, le peuple indigène et ses représentants officieux qui, de fait, sont à l’initiative cette fois, n’inspirent pas confiance au PC et aux syndicats. Le gouvernement annonce l’interdiction de la manifestation. L’AFPS la dénonce mais renonce à manifester dans ces conditions[9]. Pourtant le Parti de gauche et les Verts maintiennent leur appel et déclarent qu’ils manifesteront en dépit d’une éventuelle interdiction. Le suspense durera jusqu’au samedi, 13h, jour de la manifestation. Le pouvoir tergiverse, hésite, et au final, bien qu’ayant officiellement interdit le rassemblement n’ose pas prendre la décision de le disperser. L’interdiction de la semaine précédente a fait couler beaucoup d’encre dans la presse internationale et la réputation de la patrie des droits de l’homme est mise à mal. Un rassemblement toléré a donc lieu. Tout se passe bien jusqu’à la dernière demi-heure. En cause, quelques provocations, une poignée de manifestants prêts à en découdre, l’impossibilité pour les organisateurs de maîtriser les mouvements de foule car le matériel, sono, camion ont tous été confisqués par les forces de l’ordre. Aussi sommes-nous en droit de nous interroger sur la présence d’organisations qui, alors qu’elles ne faisaient pas partie des négociateurs, ont été autorisées à entrer sur la place avec une sono puissante et des slogans qui laissent pensifs (« Nous sommes des Français, nous ne sommes pas antisémites »), alors que les organisateurs prévoyaient des discours de soutien à la résistance, pour la levée du blocus, l’ouverture du passage de Rafah, la dénonciation du couple Valls/Hollande, de l’Union européenne, l’absence hautement problématique du PC et de la CGT, des sanctions contre Israël, le renforcement de BDS… Oui, nous nous interrogeons… La manifestation dégénère. Désormais, nous savons que nous ne pouvons pas nous permettre de risquer le délitement de la mobilisation. Une prochaine manifestation interdite découragerait les manifestants, userait la volonté des organisateurs. Il fallait donc obtenir le droit de manifester légalement. Seul le collectif national pouvait le permettre. Le NPA, l’UJFP, le PIR et la FTCR en avaient conscience. Ils feront tout pour que cela se fasse en dépit d’une certaine mauvaise volonté chez une partie droitière du camp blanc comme une partie gauchiste du camp indigène.

Contrecarrant les plans du gouvernement et les espoirs du mouvement sioniste, le Collectif informel et le Collectif national finissent par trouver un point d’accord pour agir de concert. Les grosses organisations, partis et syndicats ne pouvaient plus se permettre la politique de la chaise vide. Peut-être la crainte de laisser le champ libre aux seuls indigènes ? Peut-être parce que les convictions anti-impérialistes ne sont pas complètements éteintes ? Peut-être la gravité de la situation à Gaza ? Peut-être pour jouer un semblant de bras de fer avec le gouvernement ? Peut-être les effets de la débâcle des municipales ? Et peut-être un peu de tout cela… Toujours-est-il que l’ensemble du Collectif national finit pas s’associer à notre Collectif informel pour organiser une grande manifestation nationale au-delà des querelles et rivalités de chapelle. Le pari est réussi. Aux mots d’ordre de la manif du 23 juillet, s’ajoute celui de soutien à la résistance sur l’insistance du NPA et de l’UJFP qui craignaient la défection de certaines associations palestiniennes. Quant au PIR, il insiste pour que les Palestiniens prennent la tête du cortège principal. La manifestation a lieu le 2 août. Elle se passe bien. Mabrouk !

Tout se passe bien ? Regardons de plus près pour prendre la juste mesure du rapport de force qu’a pu imposer la Génération Gaza. D’abord, tout comme en 2009, le départ se fait avant l’heure officielle. Le carré de tête et le service d’ordre assuré principalement par la CGT est pressé de partir. Tout cela nous rappelle un peu Gaza 2009. À la fin du parcours tout le monde se barre. Elle est dispersée pour certains à cause, pour d’autre grâce à… une pluie divine.

Sur le plan politique, c’est un service minimum. D’abord par l’absence des grands dirigeants : Jean-Luc Mélenchon, Alexis Corbière, Pierre-François Grond, Clémentine Autain, Pierre Laurent manquent tous à l’appel. Ensuite par l’absence de sono, de mégaphone dans le cortège d’Ensemble, de tracts, de banderole, de sono dans le cortège du PG (mais un simple mégaphone !). Quant à la CGT et au PC, on sent qu’ils traînent des pieds. La CGT nationale et le PC se contentent de mots d’ordre pacifistes classiques. Respectivement ils diront « Gaza, assez de sang, la paix maintenant » et « Solidaires du peuple palestinien ». Il faut bien avouer que c’est un moindre mal quand on les compare à la CGT Paris qui se singularise par un slogan que Netanyahou n’aurait pas récusé : « Arrêt immédiat et sans conditions des combats ». C’est justement ce qu’Israël demandait ! Quant à la FSU, elle appellera mais ne viendra pas. Original. Plus surprenante en revanche, l’absence de certains libertaires et notamment d’Alternative libertaire et de la CNT.

On peut admettre qu’en période estivale ces forces puissent être désorganisées. Mais l’ensemble de ces éléments donne le sentiment que la gauche blanche s’inscrit de manière paradoxale dans le mouvement. Tactiquement, elle remplit son rôle mais, sur le plan stratégique, elle a tendance à suivre le mouvement et non à se mobiliser spontanément ce qui marque un recul de son engagement sur la Palestine. L’absence de tracts et de mots d’ordres fermes sur la plupart des banderoles est significative et se révèle inquiétante sur le long terme. Mais de notre point de vue, ce qui explique au mieux le manque d’investissement de la gauche de gauche, c’est qu’elle a globalement été traînée dans la mobilisation, littéralement par la force indigène, qu’elle n’a pas le total leadership et le contrôle, ce qui n’est pas dans ses habitudes. L’alliance avec la Génération Gaza reste précaire, n’en doutons pas.



II. Les leçons d’une mobilisation exceptionnelle



1/ Évolution des rapports de force et radicalisation tendancielle

Ce qui a changé par rapport à Gaza 2009, ce ne sont pas tant les mots d’ordre qui étaient sensiblement les mêmes mais le rapport de force imposé par la « Génération Gaza » et les organisations politiques indigènes les plus à même de représenter et d’encadrer cette dynamique qui ont su à la fois maintenir la flamme, entretenir l’autonomie de leurs revendications et jouer les équilibres avec les forces de gauche en ayant conscience des forces et faiblesses de la gauche pro palestinienne mais aussi du pouvoir et des organisations non blanches. Rappelons à titre d’exemple que le PIR était en 2009 persona non grata dans les manifestations du Collectif national et que nous avions été mis en dehors du cordon officiel de la manif au motif que nous soutenions le Hamas. Nous déclarions en effet que « dans une guerre coloniale, nous n’hésitons pas : nous sommes toujours aux côtés du peuple colonisé et des forces qui mènent effectivement la résistance ». Rappelons également que le leadership incontesté était celui du Collectif national. Déjà, la dynamique populaire en faveur de la résistance avait fait craindre le pire au Collectif national qui, on s’en souviendra longtemps, était parti 30 minutes avant l’heure officielle pour éviter de mélanger son cortège avec la masse des indigènes qui venaient de toute l’Île-de-France à l’appel des mosquées. Nous avons donc manifesté avec un écart de 500m au moins avec le cortège officiel, ce qui ne manque pas de piquant. Rappelons également que l’affirmation et l’autonomie indigène était pour le PIR son objectif premier. Les indigènes de la république n’existaient que depuis 2005. Notre volonté était effectivement d’organiser les indigènes sur une base politique autonome et d’imposer à un monde blanc particulièrement eurocentrique et islamophobe l’idée que la résistance islamique était tout aussi légitime que les autres. Cette idée a fait son chemin. Sur le plan national, de nombreuses associations musulmanes et/ou antisionistes ont fait ce travail localement comme nous l’avons fait à Paris. Nous pouvons à titre d’exemple citer des villes comme Lyon et Lille. Ajoutons aux acquis de Gaza 2014 la défiance grandissante à l’égard du PS parmi la jeunesse de l’immigration post-coloniale, ce qui ne peut pas manquer de nous réjouir. Espérons une rancune tenace qui ne faiblira pas à l’approche des prochaines présidentielles[10].



2/ Mais où sont les « morts aux Juifs ? »

Mis à part les milieux sionistes et les médias aux ordres, la plupart des observateurs se sont accordés à reconnaître que les manifestations de Paris comme de province se sont déroulées dans le respect du cadre prévu par les organisateurs. Cette observation était aussi partagée en Belgique[11]. Les slogans et les mots d’ordre, qu’ils soient pensés par les organisateurs ou spontanés par les manifestants restaient très politiques et n’ont jamais dérivés vers la judéophobie. Ce qui nous frappe en tant que membres du PIR, ce n’est pas tant l’absence de slogans dits antisémites que leur présence passée dans les rangs des manifestations organisées par les Blancs antiracistes et pro palestiniens. Beaucoup ont la mémoire courte mais lors de la deuxième intifada, c’est bien dans les mobilisations du Collectif national qu’il a fallu pendant des années faire la chasse aux slogans et aux pancartes antijuives et négationnistes. Cette tendance s’est progressivement atténuée lorsque des mouvements de l’immigration radicalement antisionistes sont apparus. Nous observons aujourd’hui la confirmation de cette tendance. Ce qui nous pousse à penser que c’est la faiblesse de la gauche sur l’antisionisme qui laisse le champ libre à l’expression antisémite. En d’autres termes, lorsque l’antisionisme est assumé, il désamorce les tendances judéophobes et complotistes qui remplissent le vide politique. Ce n’est pas le moindre de leurs paradoxes : ce sont les milieux les plus ostensiblement anti antisémites qui génèrent de par leur frilosité et leurs corsets idéologiques une judéophobie des indigènes. L’exemple de l’Allemagne est à ce titre très éloquent. La question palestinienne y est totalement prisonnière de l’histoire du nazisme et de la mauvaise conscience nationale. Une véritable chape de plomb pèse sur cette histoire. On imagine sans mal les dérives que cela peut occasionner. Les manifestations de l’été dernier en sont d’ailleurs une belle illustration[12]. Nous ne pouvons que saluer à ce propos le rôle exemplaire de l’Union juive française pour la paix (UJFP) ou l’IJAN, dont le travail politique permet de défendre dans le débat public que « juifs » et « sionistes » ne se superposent pas, et ainsi de lutter contre les accusations d’antisémitisme qui ressortent au sein du gouvernement, ou de certains journaux (comme Libération ou Charlie Hebdo par exemple) à chaque mobilisation.

Pour autant, il ne faut pas non plus fanfaronner. Le mouvement pro palestinien radical reste encore très fragile, en proie à de nombreuses contradictions et à la merci de nombreux parasitage dont il est coutumier. Nous en avons fait les frais cet été.



III. Vers un front pro-palestinien plus radical ?



Comme nous l’avons toujours dit, la solidarité en faveur de la Palestine n’évoluera pas tant que celle-ci restera prisonnière de la gauche blanche. Mais, paradoxalement, nous l’avons dit également, cette même gauche est indispensable[13] à un mouvement de solidarité international que réclament les Palestiniens. Or, à ce jour, seules les grandes organisations blanches rassurent les Palestiniens sur le plan politique et diplomatique. C’est un fait. Et c’est là que réside le dilemme. Il est évident pour nous et depuis longtemps que les indigènes doivent s’organiser en dehors du Collectif national qui, pris dans ses enjeux propres et ses contradictions, n’est pas en mesure pour l’heure d’accepter la radicalité de la Génération Gaza qui, elle, ne s’embarrasse pas des frontières de 1967, soutient la résistance armée de manière décomplexée et n’a pas hérité de la Shoah comme « religion civile[14] ». Pour autant, l’autonomie n’est pas une promenade de santé. Nous ne pouvons pas nous bercer d’illusion. La « Génération Gaza » n’appartient à aucune organisation indigène. Elle est spontanée, certes déterminée mais n’est pas organisée. Elle ne pèse que ponctuellement et seulement lorsque la barbarie israélienne affronte la résistance farouche des palestiniens. C’est là que la réflexion stratégique s’impose. Il faut d’un côté imposer un rapport de force sur une base plus radicale, susceptible de rassembler la « Génération Gaza », organiser politiquement les indigènes pour pouvoir peser à la fois sur le Collectif national et sur la politique française, et en même temps trouver les courroies de transmission avec tout le mouvement de solidarité avec la Palestine pour que, lorsque l’actualité l’exige, nous puissions former les regroupements les plus larges possibles. L’expérience de cet été nous autorise à croire en cette possibilité.

Dans un texte paru en avril 2014[15], Houria Bouteldja, dressant un bilan des trente ans de la marche pour l’égalité, préconisait déjà la construction de trois grands fronts, l’un d’entre eux ayant pour mission de s’opposer à la politique pro-sioniste de la France (il va de soi en dehors du Collectif national). Elle écrivait : « Un large front serait ainsi l’espace de la re-politisation de l’antisionisme mais également l’affirmation de sa nécessité {…}. Il aura forcément comme colonne vertébrale le refus du sionisme sous quelque forme que ce soit et une action déterminée contre la politique pro-israélienne du pouvoir français, contre le soutien à Israël de l’État, des forces politiques et de l’Union Européenne sur les plans politiques, économiques et culturels. ».



Il ne tient qu’à nous de faire vivre la Génération Gaza contre et avec le mouvement de solidarité pour que vive la Palestine !



Houria Bouteldja et Youssef Boussoumah, membres du PIR

génération gaza



Notes

[1]Le collectif national rassemblera moins de 500 personnes le 11 juillet aux Invalides.

[2]L’appel et les signataires  http://indigenes-republique.fr/agression-sioniste-vive-la-resistance-palestinienne/



[3]Tract d’Ensemble, « Halte à l’agression israélienne ! Solidarité avec le peuple palestinien ! », https://www.ensemble-fdg.org/content/halte-lagression-isralienne-solidarit-avec-le-peuple-palestinien

[4]Chiffres de la répression

[5]Composé de : http://plateforme-palestine.org/-Les-membres,140-

[6]La fin de l’agression contre le peuple palestinien, la levée complète du blocus de Gaza, en place depuis 2006, l’ouverture du poste-frontalier de Rafah avec l’Égypte, la liberté de mouvement pour les habitants de Gaza dans la zone frontalière avec Israël, la suppression de la « zone tampon », interdite aux habitants de Gaza, à la frontière, l’autorisation de pêcher jusqu’à 12 milles marins des côtes de Gaza, la libération des prisonniers arrêtés de nouveau après avoir été relâchés dans le cadre de l’accord d’échange avec le soldat israélien Gilad Shalit en 2011.

[7] Communiqué du PCF après interdiction de la manifestation de samedi : http://www.pcf.fr/57369

[8]Communiqué de Pierre Laurent, secrétaire national du PCF : http://www.pcf.fr/57369

[9]Manifestation à Paris de samedi 26 juillet : nouvelle interdiction : http://www.france-palestine.org/Manifestation-a-Paris-de-samedi-26

[10]Présidentielles 2017 : Notre serment de Gaza au PS http://indigenes-republique.fr/presidentielles-2017-notre-serment-de-gaza-au-parti-socialiste/



[11] Solidarité avec Gaza : des dérapages ? http://www.tayush.com/apps/blog/solidarité-avec-gaza-des-dérapages

[12]http://www.tabletmag.com/scroll/179842/berlin-protesters-chant-jew-jew-cowardly-pig-come-on-out-and-fight

[13]Nous sommes les indigènes de la république, Sadri Khiari et Houria Bouteldja, éditions Amsterdam

[14] Expression empruntée à Enzo Traverso

[15]À Farida Belghoul et aux héritiers de la Marche « des beurs » http://indigenes-republique.fr/a-farida-belghoul-et-aux-heritiers-de-la-marche-des-beurs-deuxieme-partie/

http://indigenes-republique.fr/generation-gaza-2014-enjeux-et-strategies/

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MO2014

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Message  Prado Ven 10 Oct - 9:57

MO2014 a écrit:Génération Gaza 2014 : enjeux et stratégies
Publié le 9 octobre 2014 par Houria Bouteldja et Youssef Boussoumah, membres du PIR
(...) Sur le plan politique, c’est un service minimum. D’abord par l’absence des grands dirigeants : Jean-Luc Mélenchon, Alexis Corbière, Pierre-François Grond, Clémentine Autain, Pierre Laurent manquent tous à l’appel. Ensuite par l’absence de sono, de mégaphone dans le cortège d’Ensemble, de tracts, de banderole, de sono dans le cortège du PG (mais un simple mégaphone !). Quant à la CGT et au PC, on sent qu’ils traînent des pieds.
(...) Quant à la FSU, elle appellera mais ne viendra pas. Original. Plus surprenante en revanche, l’absence de certains libertaires et notamment d’Alternative libertaire et de la CNT.
On peut admettre qu’en période estivale ces forces puissent être désorganisées. Mais l’ensemble de ces éléments donne le sentiment que la gauche blanche s’inscrit de manière paradoxale dans le mouvement.(...)

Si je suis bien, le récit s'arrête à la manif du 2 août. Et ensuite ? Le 9 août, je crois bien que le PIR n'a pas organisé de cortège. Est-ce que je me trompe ?

Prado

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Message  Dinky Ven 10 Oct - 10:47

Mais l’ensemble de ces éléments donne le sentiment que la gauche blanche s’inscrit de manière paradoxale dans le mouvement.(...)

Le martelage répugnant du PIR, pour diviser de façon raciste ceux qui veulent être solidaires des Palestiniens, ne faiblit pas.
Il apparait clairement que la préoccupation de ces gens-là n'a rien à voir avec la volonté de s'unir pour dénoncer la politique criminelle d'Israel et de ses soutiens impérialistes.

Dinky

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