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Indigènes de la République

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Message  verié2 Mar 2 Juil - 18:06

On ne combat pas le racisme par le communautarisme. Et, parmi les signataires de cet appel, ceux qui se disent de gauche ou d’extrême gauche et le soutiennent font preuve d’inconscience, voire de démagogie, en s’accrochant ainsi aux basques des barbus. (LO - Sophie Gargan)
Passons sur l'emploi du terme méprisant "barbus". LO ne se permettrait pas d'utiliser un épithète du même genre pour qualifier des Juifs religieux.

Donner des leçons sur le communautarisme, c'est une chose, être capable d'offrir une alternative en menant la lutte antiraciste sur le terrain en est une autre. Certes le PIR est avant tout l'émanation d'intellectuels qui ambitionnent de devenir les porte-parole de "leur communauté", mais le développement du communautarisme est avant tout le produit de la discrimination, du racisme, des relents coloniaux et de l'incapacité du mouvement ouvrier, LO comprise, de les combattre.

Franchement, à Argenteuil, lors des meetings de riposte aux agressions de femmes voilées, c'était désespérant de ne pas voir l'extrême-gauche ni même le PC, même pas en tête du mouvement, mais massivement présents. Quand on constate qu'il a fallu 15 jours à LO pour réagir à ces agressions dans son hebdo, sans même évoquer deux meetings de 1500 et 1000 habitants de la ville, comment s'étonner que d'autres forces prennent la tête des réactions populaires ? Et comment le leur reprocher ?

Sans doute la comparaison entre la situation des descendants d'immigrés en France 2013 et celle des descendants d'esclaves aux Etats-unis dans les années trente est excessive. Mais on ne peut exclure une "communautarisation" plus forte dans les années à venir si le mouvement ouvrier ne prend pas clairement en charge la lutte contre l'islamophobie et la laisse à des organisations comme le PIR, le CCIR voire à des religieux. Il ne s'agit pas de flatter les préjugés religieux et les pratiques rétrogrades mais de montrer que nous sommes pas dupes des campagnes qui stigmatisent les musulmans sous couvert de laïcité et de féminisme. Des campagnes qui constituent des points d'appui pour les racistes et fascistes, encouragés à passer à l'acte. Et, si les populations concernées s'organisent pour se défendre, même si ce n'est pas, en partie par notre faute, sur des bases de classes mais communautaires, elles auront néanmoins raison de le faire et nous devrons les soutenir.

Et cette comparaison entre le PIR et le FN, ces accusations d'intégrisme contre Ramadan sont grotesques et ne font que déconsidérer ceux qui les prononcent.

verié2

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Message  sylvestre Jeu 4 Juil - 10:55

Article intéressant sur les positions d'Houria Bouteldja et la lutte LGBT en articulation avec les luttes des "indigènes"
sylvestre
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Message  Toussaint Mer 24 Juil - 23:01

Sainte Caroline contre Tariq Ramadan, le livre de Sadri Khiari en téléchargement gratuit
par Sadri Khiari

Avec l’autorisation des éditions La Revanche et de l’auteur, le site du Parti des indigènes de la république offre à ses lecteurs, en téléchargement gratuit, l’essai de Sadri Khiari, "Sainte Caroline contre Tariq Ramadan. Le livre qui met un point final à Caroline Fourest." Toujours d’actualité, cet ouvrage rigoureux et mordant est à ce jour la tentative la plus complète de décrypter les ressorts racistes et islamophobes de la rhétorique fourestienne mais également les enjeux politiques qui lui ont assuré le succès que l’on sait. A travers Caroline Fourest, c’est tout un pan de la gauche française dont sont mises au jour les représentations profondément européocentristes.

http://www.indigenes-republique.fr/IMG/pdf/S.Khiari_-_Sainte_Caroline_contre_Tariq_Ramadan.pdf
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Message  Toussaint Mer 7 Aoû - 14:24

lundi 17 décembre 2012

Quitter l’univers colonial


par Sadri Khiari, membre du PIR

Il y aurait beaucoup à dire - à apprécier et à critiquer - sur l’internationalisme tel qu’il a été porté par le mouvement ouvrier, et notamment par ses tendances les plus radicales, au cours du siècle dernier. Idéal généreux d’émancipation humaine, il a connu des moments glorieux dont il m’est difficile de parler sans émotion. Les deux exemples qui me viennent immédiatement à l’esprit sont l’extraordinaire mouvement de solidarité suscité par la révolution espagnole et, évidemment, puisque cela me concerne directement, le soutien apporté par de nombreux mouvements internationalistes, communistes ou anarchistes, aux luttes anticolonialistes.

Je pourrais évoquer quantité d’autres exemples. Il se trouve qu’un ami m’a envoyé récemment un court extrait d’un texte de Trotsky datant de mai 1938 que je mourrais d’envie de partager à mon tour sans en trouver l’occasion. Cette conférence me la fournit. Le voici, il est magnifique : « Supposons que, dans la colonie française d’Algérie, éclate demain une rébellion, sous la bannière de l’indépendance nationale et que le gouvernement italien, poussés par ses propres intérêts impérialistes, livre des armes aux insurgés. Quel devrait être dans ce cas, le comportement des ouvriers italiens ? J’ai délibérément pris l’exemple d’une révolte contre un impérialisme démocratique et d’ingérence en faveur de rebelles par un impérialisme fasciste. Les ouvriers italiens doivent-ils empêcher l’envoi d’un navire avec des armes pour les Algériens ? Supposons qu’un quelconque gauchiste réponde à cette question par l’affirmative. Tout révolutionnaire, de concert avec les ouvriers italiens et les Algériens rebelles, rejetterait avec indignation cette réponse. Même si dans l’Italie fasciste à ce moment éclate une grève générale des marins, dans ce cas les grévistes doivent faire une exception en faveur des navires qui apportent de l’aide aux esclaves coloniaux, sinon ils seraient des syndicalistes jaunes, et non des ouvriers révolutionnaires » [1].

En ces temps de guerres impériales, d’interventions ou de menaces d’intervention impérialistes ici ou là, ces phrases pourraient être longuement commentées, tant du point de vue des militants de gauche agissant dans le cadre d’un Etat impérialiste que du point de vue des militants agissants dans un pays en révolution auxquels un Etat impérialiste, en fonction de ses propres calculs, fournit une aide militaire. Mais là n’est pas le sujet de cette communication. Je me bornerais ici à souligner une des idées fortes de ce paragraphe, en l’occurrence : la priorité absolue que devraient donner les ouvriers au soutien à la lutte anticoloniale menée dans un pays dominé y compris lorsque ce soutien se fait au détriment de leurs propres luttes et risquent de les diviser eux-mêmes. Bon, je m’arrête pour en venir à ce dont je voudrais parler ici et qui n’est pas nécessairement sans rapports.

La question coloniale, sous une forme renouvelée, se pose désormais au cœur des métropoles impériales. Elle s’était déjà posé de cette manière aux Etats-Unis à travers la question noire. A propos de l’esclavage et de la guerre de sécession Marx avait proposé, quant à lui, des réponses inspirées d’une approche internationaliste. Au XXème siècle, le Parti communiste américain et les organisations trotskistes avaient également abordé de front cette problématique. Les Afro-américains, hélas, ne sont toujours pas sortis de l’auberge. La domination raciale, ce colonialisme intérieur, est toujours omniprésente aux Etats-Unis. Elle se double de plus en plus d’une autre forme de conflictualité raciale engendré par l’afflux massif de populations immigrées, originaires notamment des pays d’Amérique Latine.

C’est cela la forme nouvelle de colonialisme surgie au cours de ces dernières décennies et qui interroge profondément l’internationalisme traditionnel : l’émigration massive de populations du sud vers les métropoles impériales, leur stabilisation et leur reproduction. J’aborderai plus particulièrement cette question à partir du cas de la France où la gauche radicale a une fâcheuse tendance à oublier dans ses réflexions stratégiques l’importance décisive de populations opprimées issues des anciennes colonies et de ses « territoires d’Outre-mer ».

La gauche radicale ne méconnait pas totalement le lien étroit qui associe l’oppression subies par les populations issues de l’immigration et la domination impérialiste néo-coloniale. Elle n’en retient cependant qu’une des facettes, occultant ce qu’expliquait pourtant le sociologue Abdelmalek Sayyed, en l’occurrence que l’immigré n’est jamais seulement un immigré. Il demeure un émigré, indissociablement émigré-immigré. Lorsqu’en outre, il est originaire d’un pays colonisé ou dépendant et qu’il s’installe dans un Etat impérial, comme la France, un Etat producteur, en son propre sein, de hiérarchies raciales, l’émigré-immigré se déplace, en fait, dans un même continuum de relations de pouvoir marquées par la colonialité. Alors même qu’il s’insère dans la trame du pouvoir capitaliste, il reste, dans son statut social, politique, culturel, symbolique, pris, enserré dans les rapports coloniaux ou néo-coloniaux de domination. En cela, il se distingue réellement des immigrations intra-européennes. En cela, contrairement à ces dernières, il transmet à sa descendance son propre mouvement d’émigration-immigration et le rapport colonial qui en est la matrice. Pour la gauche radicale, cependant, une fois en France, l’immigré n’est plus qu’immigré et les générations qui le prolongent des Français comme les autres, non pas soumis aux rapports impérialistes néo-colonialistes mais à un manque de droits, à des préjugés racistes et aux discriminations qui en seraient la conséquence.

A cette incompréhension de la spécificité de l’immigration issue des anciennes colonies s’ajoute une vision réductrice de la notion de racisme. L’une des dimensions du rapport néo-colonial qui échappe, en effet, à la gauche, c’est qu’il perpétue également le rapport racial produit par la colonisation. Cette dernière, identifiée généralement à une période révolue de l’expansion impériale, est comprise par la gauche comme occupation de territoire, comme une forme d’oppression nationale doublée d’une exploitation de type capitaliste. Or, c’est sous l’angle des rapports sociaux qu’elle a développés qu’il faut appréhender la colonisation. Et l’une des caractéristiques sinon la caractéristique fondamentale de ces rapports sociaux, c’est leur racialisation. Le colonialisme moderne, en effet, cette forme sociale qui a accompagné la modernité capitaliste et étatique, c’est la construction d’une hiérarchisation sociale mondiale basée sur la notion de race, c’est la constitution d’une stratification statutaire des pouvoirs, fondement de la suprématie blanche, à tous les niveaux du lien social. On peut l’appeler colonialité ou racialité des rapports de pouvoir, elle continue d’être reproduite à l’échelle internationale par les nouvelles formes de domination impérialiste, indépendamment de l’occupation de territoires.

Dans son écrasante majorité, cependant, la gauche persiste à interpréter le racisme d’un point de vue moral. Il serait une idéologie venant d’un passé pré-moderne, toujours vivace, l’expression de la haine de l’Autre, du rejet de la différence, d’une intolérance qui viendrait des âges les plus obscures, une disposition qu’attiseraient les forces les plus réactionnaires, relayées de manière démagogique par la bourgeoisie pour diviser les classes populaires.

L’incapacité à saisir le racisme dans la profondeur de ses rapports avec le capitalisme et l’impérialisme, n’est pas sans conséquences sur l’action que la gauche radicale mène sur le front de la lutte antiraciste. Elle se borne ainsi à une attitude pédagogique (« L’ennemi, c’est le banquier, pas l’immigré »), et agit contre les différents types de discriminations comme le ferait n’importe quelle association de défense des droits de l’homme, tout en l’accompagnant parfois d’un discours anticapitaliste. La démarche d’ensemble vise à favoriser l’intégration de tous dans la lutte considérée comme principale, en l’occurrence la lutte anticapitaliste.

Cette stratégie, finalement plus droitsdelhommiste qu’anticapitaliste ou internationaliste, a cependant lamentablement échoué. Les couches subalternes blanches sont de plus en plus sensibles à la rhétorique raciale, dans ses expressions nouvelles, tandis que les populations issues de l’immigration regardent la gauche, y compris la gauche radicale, avec méfiance. L’illusoire « Français, immigrés, même patron, même combat », version hexagonale du « prolétaires de tous les pays unissez-vous », ne fait recette ni chez les uns ni chez les autres. Ce n’est pas par hasard.

La gauche vitupère, donc, contre les forces politiques racistes, accusées d’opposer les travailleurs blancs aux travailleurs issus de l’immigration. Elle n’a pas tort. Ou seulement pour une part. Elle fait le même reproche aux mouvements qui, comme le Parti des indigènes de la république, affirment la nécessité de l’indépendance politique des populations issues de l’immigration. Elle a tort. Complètement. Elle ne perçoit pas, en effet, que, outre d’autres formes de hiérarchisations sociales propres notamment aux logiques capitalistes ou patriarcales, le monde du travail est déjà divisés, stratifiés, par les rapports raciaux et que les classes populaires blanches, en tant que groupe, que collectif, et non pas comme somme d’individus, ont des privilèges par rapport à l’ensemble des populations des anciennes colonies.

Ce sont ces privilèges, reposant sur la domination impériale et les rapports raciaux qui la prolongent en métropole, qui hiérarchisent les classes populaires et développent en leur sein des conflictualités qu’entretiennent à leur profit les classes dirigeantes. Dans l’entreprise comme dans les quartiers populaires, nous n’avons pas seulement les prolétaires, travailleurs, précaires ou chômeurs, qui s’opposent aux classes supérieures. Nous avons également les prolétaires blancs qui défendent leurs maigres privilèges de Blancs ou de « vrais Français » face aux prolétaires issus des colonies. La convergence entre les deux, induite par leur confrontation objective à un même système capitaliste, n’existe qu’à l’état de potentiel, un potentiel dont la réalisation se heurte à la barrière raciale qui structure l’ensemble du corps social. Loin d’être une vertu immanente aux rapports de production capitaliste, l’unité de classe ne saurait prendre forme autrement qu’en termes d’alliances conflictuelles qui dépendent pour exister de l’action stratégique, c’est-à-dire à la fois de la capacité des populations issues de l’immigration à s’organiser de manière indépendante autour de leurs propres enjeux et de la capacité des forces prolétariennes blanches à intégrer une démarche internationaliste.

Nous en sommes cependant encore loin. Car, l’internationalisme réclame à son tour d’être revisité. La gauche française a tenté de prendre la mesure des mutations impliquées par la dernière mondialisation et par la construction de l’Union européenne pour concevoir de nouvelles politiques en France, intégrées dans un projet internationaliste renouvelé, dont elle a cru un temps trouver l’ébauche au sein de l’altermondialisme. Il est vrai que l’internationalisme doit revêtir une nouvelle formulation. Il ne peut plus être compris uniquement en termes de solidarité entre les prolétariats par delà les frontières ni même en termes de convergence du prolétariat des Etats dominants avec les peuples colonisés et opprimés. On n’en trouvera pas cependant l’alternative si on fait l’impasse sur les transformations internes à l’Hexagone provoquées par l’afflux des populations originaires des anciennes colonies et leur enracinement en France. Cela peut sembler paradoxal mais les différentes mondialisations historiques, qui dans leurs logiques et dans leurs formes ne se sont sans doute pas succédées mais superposées, n’ont pas seulement développé des formes de globalisation de la lutte des classes dans un espace dépourvu pour partie de frontières, elles ont aussi juxtaposé des espaces et internalisé des frontières. Il est important, de ce point de vue là, de saisir les modalités et l’ampleur des bouleversements qu’implique l’internalisation des rapports coloniaux dans l’espace français. Non pas qu’ils en étaient complètement extérieurs à l’époque de l’Empire, mais, aujourd’hui, les rapports entre groupes racialisés, dominants et dominés (qu’autrefois, dans les territoires occupés, on appelait colons et colonisés), se tissent à la fois sur deux territoires - les pays dépendants et la puissance dominante - et sur un même territoire, le territoire français, lui-même reconfiguré, en fonction d’enjeux raciaux. Avec le territoire, c’est l’ensemble des relations sociales, des conflictualités et des enjeux politiques au sein de l’Hexagone, qui est profondément remodelé.

Autrement dit, une stratégie de classe dans les limites de l’espace politique français ne peut se concevoir qu’internationaliste et un internationalisme revu et corrigé doit intégrer nécessairement une nouvelle dimension, à savoir le déplacement partiel de l’espace de la lutte décoloniale et anti-impérialiste sur le territoire français où il se superpose et croise l’espace de la lutte des classes. Il faut désormais substituer à un internationalisme, conçu comme un rapport au-delà des frontières, un internationalisme domestique dont la question raciale, dans toutes ses dimensions, serait centrale. En un mot, un internationalisme décolonial.

Or, penser un internationalisme décolonial implique de rompre avec l’économisme profond qui caractérise l’acception du capitalisme qui me semble hégémonique encore au sein de la gauche radicale française. Une telle rupture aurait des conséquences importantes et positives sur sa manière de concevoir la lutte anticapitaliste. Le capitalisme est en effet principalement saisi, en France, à travers ses modalités économiques d’exploitation et la lutte politique anticapitaliste est principalement appréhendée comme une lutte contre l’exploitation capitaliste. Les rapports immédiats de production qui, selon Marx, détermineraient « en dernière instance » l’ensemble d’une formation sociale donnée, tendent ainsi à devenir la première instance de la politique. On le sait, pourtant, et Marx lui-même ne s’est pas privé de le répéter, que le Capital n’est pas qu’un rapport de production. C’est beaucoup d’autres choses. Et la lutte contre le capitalisme, si elle doit briser le rapport d’exploitation, doit briser ou démanteler aussi beaucoup d’autres choses. Plus encore, je dirais que la lutte politique a d’abord pour objet le pouvoir d’Etat et non pas le pouvoir dans l’usine.

N’importe quel militant appartenant à la gauche radicale me reprochera de formuler ainsi des évidences et, certes, on trouvera dans la littérature et dans la pratique des différents mouvements de la gauche radicale une certaine attention à d’autres dimensions de la société bourgeoise. Elles demeurent cependant subordonnées à la question du capitalisme comme rapport d’exploitation et n’acquièrent de réelles légitimités qu’après avoir subi une mise en forme qui les « articulerait » à ce rapport d’exploitation.

Le féminisme, pour donner cet exemple, a en gros trouvé les moyens de cette mise en forme, aidé par la puissance des mouvements de femmes dans les années 1970 et par les nombreuses femmes présentes dans les organisations de gauche. La lutte antiraciste, non. Elle y parvient d’autant moins que, bien que victimes directes des rapports de production capitalistes, les populations issues de l’immigration semblent n’en n’avoir rien à battre. Le principal de leur combat est ailleurs. Il se développe autour de questions dont la gauche radicale ne saisit pas toujours le rapport avec la domination du capital ou qui lui paraissent sinon négligeables du moins secondes. Elles se résument en trois mots : dignité, respect, honneur. Que signifient politiquement ces trois mots ? Ils expriment la volonté d’en finir avec un statut ; un statut non-dit mais furieusement actif ; un statut qui n’est pas immédiatement lié à l’exploitation économique mais à toutes les dimensions du lien social ; le statut de race inférieure. Alors qu’un militant blanc anticapitaliste devrait y voir une mise en cause du Capital et de l’Etat bourgeois impérial à partir d’une autre perspective, il y voit une inversion dommageable des priorités, quand il n’aperçoit pas dans certaines revendications des populations immigrées (ainsi du droit de pratiquer leurs cultes comme ils l’entendent), une menace contre les acquis du mouvement ouvrier ou, dans les revendications culturelles, une entreprise de diversion encouragée par la bourgeoisie.

La conséquence d’une telle myopie, on en a eu un exemple ahurissant, il y a quelques années lorsque la majorité de la gauche radicale s’est alliée de fait aux partis bourgeois pour interdire le port du voile musulman à l’école. Plus généralement, ce qu’il faut noter pour le regretter, c’est l’impasse stratégique que révèle l’indifférence dramatique de la gauche radicale à l’égard d’une fraction importante du prolétariat des quartiers populaires, en l’occurrence les non-blancs.

Certes depuis la révolte de novembre 2005, la gauche radicale, à l’instar de tous les partis, semblent s’y intéresser plus que ce n’était le cas auparavant. Il n’en demeure pas moins qu’elle n’est pas prête à prendre en compte ce qui fait sa spécificité en tant que groupe dominé racialement, c’est-à-dire notamment ses revendications les plus importantes telles qu’il les exprime lui-même, sa culture de résistance dans ce qu’elle a de particulier, les formes et les contenus à travers lesquels il se politise et se radicalise, enfin sa volonté affirmée d’autonomie politique. Tout cela, qu’un internationalisme décolonial permettrait d’appréhender et de reconnaître, est perçu comme infra-politique, non-anticapitaliste, régressif voire parfois réactionnaire par la majorité de la gauche radicale.

Plutôt que de procéder aux révisions qui s’imposent, cette dernière fait généralement le choix conservateur de l’entre-soi blanc où l’on est sûr de parler le même langage, d’avoir les mêmes valeurs et de partager les mêmes enjeux. A la recomposition stratégique, peut-être douloureuse, qui permettrait de construire des passerelles entre le prolétariat blanc et le prolétariat non-blanc, elle ne cesse de préférer la recomposition tactique entre Blancs. Que d’exemples pourrais-je donner, en effet, de tentatives de recomposition qui ont vu, ces dernières années, se regrouper, se séparer, se rassembler à nouveau, différentes composantes de la « gauche de la gauche », sacrifiant systématiquement la question raciale et anti-impérialiste sur l’autel de l’unité, pour finalement se retrouver bon gré mal gré contraintes de s’allier au sein d’un Front de gauche, charpenté par des forces antilibérales, certes, mais également nationales-républicaines !

Si, comme je le crois, l’objectif politique de la gauche radicale est de prendre le pouvoir pour démanteler les mécanismes du capital, alors elle n’a pas d’autres choix, quitte à perdre certains alliés au sein du monde blanc, que de se tourner vers les catégories à la fois les plus exploités et les plus opprimés que sont les masses prolétariennes issues des anciennes colonies et aux conditions que fixeront celles-ci. C’est la condition d’un nouveau bloc social révolutionnaire qui, pour continuer à parler comme on le faisait dans les années 60, sera décolonial ou ne sera point !

[1] Léon Trotsky, Il faut apprendre à penser, 20 mai 1938.


Toussaint
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Message  Toussaint Sam 10 Aoû - 14:40

vendredi 9 août 2013
La banlieue rouge tient à rester une banlieue blanche

par Sadri Khiari

Au tournant des années 1960 et 1970, marqué par la puissance du mouvement ouvrier, y compris dans le tissu urbain. L’État social est encore une réalité, même si s’amorce timidement un certain désengagement notamment en terme de logement social. La colonisation et le traumatisme de la décolonisation ont moins de dix ans. Le nombre d’immigrés issus des colonies a connu un nouvel essor. L’héritage de la colonisation est encore tout à fait direct et transparent dans les modalités de gestion de cette immigration, aussi bien dans les entreprises, dans l’habitat que dans le traitement politique et administratif. Et bien sûr dans les représentations dominantes. Nous sommes alors dans un contexte politique et économique bien différent de sa réalité actuelle. Pourtant, dans les quartiers populaires, la résistance blanche est déjà bien réelle. Elle est conduite principalement par le PCF ; ce même PCF dont une des forces, dans la première moitié du XXe siècle, résidait dans sa capacité à intégrer les immigrés européens, mais qui fait alors le choix de défendre les ouvriers blancs au détriment des travailleurs immigrés d’origine coloniale. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et jusqu’à la fin des années 1970, les « Banlieues rouges » étaient fières d’être ce qu’elles étaient, c’est-à-dire le territoire où se prolongeaient les luttes sociales, où les acquis de ces luttes s’inscrivaient dans l’espace de vie et de résidence de la classe ouvrière. Dans les grands ensembles, se côtoient les ouvriers qualifiés mais aussi les couches mieux loties du salariat (employés, techniciens ...), sur lesquelles s’appuient principalement les municipalités communistes. Les projets de rénovation urbaine qu’elles impulsent semblent alors pouvoir garantir aux travailleurs l’accession à un cadre urbain et à des normes de logement « modernes », reflets d’une mobilité sociale et culturelle qui les rapprocherait des conditions d’habitation, des manières d’être et de vie des classes moyennes. Car l’ambition du prolétaire est de ressembler au petit-bourgeois. Et l’ambition de la ville prolétaire est de ressembler à la ville petite-bourgeoise. La ville tout entière veut voir progresser son niveau de vie ; elle veut changer de statut, pour s’élever en dignité. Et la dignité française impose d’être blanc. La banlieue rouge tient à rester une banlieue blanche.

Dans ces conditions, la contrariété des élus communistes face à l’afflux d’immigrés (surtout algériens et marocains, à cette époque) dans leurs communes n’a rien de surprenant. Car la présence des immigrés fait baisser la valeur sociale et symbolique de la ville. Ils sont non seulement arabes mais, de surcroît, condamnés à faire partie des couches subalternes de la classe ouvrière, dont se désintéressent largement le PCF et son bras syndical, la CGT. J’ai écrit « contrariété » un peu par politesse. En fait, j’aurais dû dire : ils sont fous de rage ! Tous ces bougnoules, misérables, qui vivent n’importe comment, tirent la commune vers le bas. Et il y a d’autant moins de raisons de les accueillir qu’ils vont coûter plein de fric. En plus, il n’y a rien à attendre d’eux sur le plan électoral puisqu’ils n’ont pas le droit de vote ! C’est ce que pense alors un élu communiste avant de fermer la porte au nez d’un ménage immigré qui souhaite être relogé dans un HLM. Dès le début des années 1960, relayée par le PCF, la résistance blanche s’exprime déjà par la volonté d’écarter et de distribuer dans l’ensemble de l’espace urbain tous ceux dont la présence, trop visible, souille la ville. A la fin de la décennie et dans le courant des années suivantes, tandis que le gouvernement multiplie les décisions destinées à faire porter sur les communes de gauche le poids financier des logements sociaux et la charge de l’accueil des étrangers, la question de l’immigration et, plus particulièrement, des indigènes obsède les élus communistes. Ceux-ci mènent alors campagne pour s’opposer à l’installation sur leurs communes d’immigrés dont ils réclament la dispersion. Sans employer le terme, ils revendiquent, en 1969, la « préférence nationale » : « A l’heure où des centaines de milliers de familles françaises attendent un logement, le financement du relogement des travailleurs immigrés ne peut et ne doit en aucun cas être à la charge du budget communal. » Le fardeau symbolique, politique et budgétaire que représentent les immigrés est ainsi un enjeu de la lutte entre gouvernement de droite et élus communistes, entre villes rouges et villes bourgeoises. A juste titre, il est vrai, les responsables du PCF appréhendent les immigrés comme un boulet que la droite leur balance dans les pattes. Et le prolétariat blanc s’en défend.

Sous le couvert de prétextes sociaux, d’alibis « antiracistes » ou au nom de la « défense des travailleurs immigrés contre les marchands de sommeil », eux-mêmes souvent immigrés, les communistes veulent purger leurs villes du « surplus » d’indigènes. Un tract diffusé à Gennevilliers en 1973 ne fait d’ailleurs pas mystère de la volonté de mobiliser les « bons Français » contre l’immigration : « Nous appelons la population tout entière à soutenir l’action du conseil municipal pour stopper d’abord et réduire ensuite le pourcentage de l’immigration dans notre ville. » Le PCF adoptera graduellement un langage moins explicite, mais il ne changera guère de politique au cours des décennies suivantes. Il perdra ses principaux bastions urbains, mais ses successeurs de la droite ou du PS, qui rivaliseront d’efforts pour miner la « conscience ouvrière » et disloquer les espaces de résistance, se feront également les porte-parole des couches populaires blanches paniquées par leur déclassement social et statutaire, aggravé par les bouleversements économiques et les métamorphoses du champ politique. Car, avec la décomposition de la puissance politique indépendante de la classe ouvrière et des organes qui la représentent, ce qui se joue, ce n’est pas seulement le démantèlement des acquis sociaux, c’est en même temps leur statut de citoyen. Citoyenneté sociale dans l’entreprise, citoyenneté « urbaine », enracinée dans les municipalités, citoyenneté politique à travers leurs représentations parlementaires, les travailleurs perdent peu à peu la plupart des médiations qu’ils ont conquises et qui leur permettaient de n’être pas simple « force de travail » mais plus que cela : corps politique indépendant, nation dans la nation, avenir de la nation. Le suffrage universel lui-même perd sa signification. En d’autres termes, ce qui se délite avec la fin de l’État-providence et que s’effiloche une citoyenneté médiée à la fois par l’État et les institutions propres à la classe ouvrière, ce sont deux choses : d’une part leur intégration dans l’Etat-national et, d’autre part, leur dignité en tant que communauté de travailleurs. La nationalité se vide de tout contenu social et citoyen, sinon par rapport à ceux qui ne sont pas nationaux ou considérés comme tels ; elle n’a plus, ou plutôt elle tend à ne plus avoir pour seule dimension que la « francité », mélange instable des mythes historiques confectionnés par la IIIe République et d’une ferme croyance en la supériorité européenne, chrétienne et blanche. La nationalité décitoyennisée fait alors voir son noyau racial ; la « blanchitude » est le dernier privilège accordé par la République aux classes populaires blanches. Et ce privilège d’être « bien français » et « bien blanc » doit absolument être protégé contre les hordes indigènes qui s’emparent de la France.

Cet enjeu devient d’autant plus crucial dans les zones urbaines périphériques que s’en échapper tient de plus en plus souvent du rêve inaccessible. Pauvreté, chômage, précarité, hausse générale des loyers et du foncier interdisent à de nombreux habitants des quartiers populaires, y compris aux couches supérieures de la classe ouvrière, tout espoir de relogement ou d’accession à la propriété dans des espaces résidentiels mieux lotis. Plus : des secteurs qui avaient autrefois les moyens de dédaigner les logements sociaux sont désormais contraints d’y avoir recours. L’aggravation des différenciations internes au monde du travail et des différenciations au sein du parc social, consécutive notamment au désengagement graduel de l’État et à l’adoption de normes managériales de gestions du logement social, contribue à confiner les couches les plus vulnérables du prolétariat blanc dans les segments urbains les plus défavorisés, caractérisés par une présence de plus en plus massive d’indigènes. La fuite n’étant plus guère possible, il ne reste plus au prolétariat blanc qu’à défendre mordicus sa supériorité statutaire.

Olivier Masclet a publié un long ouvrage, particulièrement révélateur, où il analyse les processus urbains à travers lesquels certaines couches des classes populaires s’engagent dans la résistance blanche. Je suis tenté d’en citer un long passage : « L’éventualité que certains ménages français quittent ces immeubles au cas où leur "aspect arabe" s’accentuerait ne constitue qu’un aspect de la pression qui s’exerce sur les responsables de l’Office. Elle se manifeste aussi et peut-être surtout sur le terrain électoral. Les bâtiments Lénine et Diderot sont de ceux qui à Gennevilliers fournissent au Front national le plus de suffrages (avec les immeubles en accession à la copropriété). Ces électeurs ne sont pas seulement perdus pour la municipalité, ils sont aussi les portes-parole de "la cause sécuritaire" qui s’est peu à peu imposée à l’ensemble des locataires. Contraints de vivre à proximité de bâtiments peuplés de familles immigrées, se sentant menacés par des jeunes qui "traînent" près de chez eux, les locataires français des bâtiments municipaux font en permanence état de leur peur et de leur ressentiment. Le maintien des ménages français dotés de revenus moyens et le tri des locataires ont en effet pour autre conséquence d’accroître le sentiment de vulnérabilité, voire les dispositions répressives des Français captifs. Le rassemblement de retraités, de femmes seules, de ménages ouvriers pauvres, de Français aux revenus moyens qui n’ont pas pu suivre la trajectoire collective de sortie des HLM aboutit à coaliser en une même expression de rejet des Arabes les ressentiments engendrés par le vieillissement, la précarisation de la condition salariale, le dénuement familial, l’élévation des normes de consommation en matière d’habitat, la solitude. A la manière d’un "effet pervers", ce durcissement des opinions résulte d’une politique de sélection des ménages qui tente de préserver la valeur sociale du quartier. Il oblige alors la municipalité à transformer ces immeubles en de véritables ’bunkers" pour protéger leurs occupants des "risques" de l’environnement. » On aura compris que « l’environnement », ce sont les indigènes !

Les classes populaires blanches vivent ainsi la présence des immigrés dans leur « environnement » comme un déclassement statutaire, d’autant plus difficile à vivre qu’elles ont multiplié les sacrifices dans l’espoir vain de ressembler aux classes moyennes. Olivier Masclet note encore que « les habitants [des quartiers] qui se sentent à la fois relégués socialement, dépossédés territorialement et menacés dans leur avenir sont disposés à compenser leur déclassement en valorisant le fait qu’ils sont français ». Mais, comme le signale Abdelmalek Sayad, le fait que de nombreux immigrés et leurs enfants sont désormais français déprécie, en quelque sorte, la nationalité française. Celle-ci devient une nationalité « au rabais ». Pour défendre son statut symbolique, le souchien se trouve alors dans l’obligation de défendre la « qualité » de la nationalité française : être un « vrai Français » signifie désormais être blanc, européen et d’origine chrétienne. Le prolétaire blanc ne fait pas partie de la classe dominante, mais il fait partie de la communauté dominante. Une gratification assurément loin d’être négligeable.

La résistance populaire blanche apparaît dans ce cas comme un effet pervers de la lutte des classes. Ainsi la fameuse « mixité sociale », qui figure au centre de l’offensive raciale contre la Puissance indigène, est-elle également, écrit Sylvie Tissot, « l’arme pauvre des communes pauvres ». Elle constitue « l’un des rares outils laissés à disposition de ces villes, quand leurs voisines plus riches peuvent fermer de manière extrêmement efficace leurs territoires aux populations "indésirables", sans l’aide de dispositifs d’action publique, voire en les contournant si nécessaire ». Défendre son statut de Blanc, c’est aussi, dans ce contexte particulier, une forme de la lutte prolétarienne contre la déchéance qu’entraînent les politiques patronales et néolibérales ; une forme, certes vaine, à la fois antagonique et complémentaire de la résistance blanche bourgeoise, mais néanmoins réelle. Il parait ainsi particulièrement simpliste, voire naïf, de parler d’« articulation » entre la lutte antiraciste ou décoloniale et la lutte des classes populaires sans prendre en compte que cette dernière s’articule déjà avec la lutte statutaire blanche. C’est leur double condition - dominés socialement et dominants statutairement - qui fait des classes populaires blanches à la fois une médiation et un enjeu capital pour la stratégie du Pouvoir blanc. Il ne s’agit pas simplement de « diviser » la classe ouvrière ou de détourner les travailleurs français contre le « bouc émissaire » que seraient les immigrés. Mais, plus encore, alors que progresse le démantèlement de l’État social et que le nationalisme français coïncide de moins en moins avec les intérêts des classes dominantes, il s’agit d’unifier les Blancs, par-delà leurs oppositions sociales, au sein d’un Pacte républicain recomposé autour de sa dimension raciale. La catégorie de « quartiers sensibles », qui dit et contribue à faire la territorialisation des clivages sociaux, représente un moment privilégié de cette stratégie. Les quartiers populaires sont, en effet, la traduction dans l’espace d’un rapport de forces politique. « La ville du colon, écrivait Frantz Fanon, est une ville en dur, toute de pierre et de fer. C’est une ville illuminée, asphaltée, où les poubelles regorgent toujours de restes inconnus, jamais vus, même pas rêvés (...). La ville du colon est une ville de blancs, d’étrangers. La ville du colonisé, ou du moins la ville indigène, le village nègre, la médina, la réserve est un lieu mal famé, peuplé d’hommes mal famés. On y nait n’importe où, n’importe comment. On y meurt n’importe où, de n’importe quoi. C’est un monde sans intervalles, les hommes y sont les uns sur les autres [...]. La ville du colonisé est une ville affamée, affamée de pain, de viande de chaussures, de charbon, de lumière. La ville du colonisé est une ville accroupie, une ville à genoux, une ville vautrée. C’est une ville de nègres, une ville de bicots. »

L’auteur des Damnés de la terre ne décrit pas ici une fracture territoriale mais bien la transposition de la fracture coloniale dans la configuration urbaine. De même que, à l’époque glorieuse des « banlieues rouges », les luttes menées à partir et au sein de ces territoires constituaient une extension spatiale de la lutte des classes au niveau des entreprises, un moment de la lutte des classes, de même, aujourd’hui, les luttes menées dans les quartiers ne doivent pas être comprises comme liées à des problèmes essentiellement urbains mais comme le cadre spatial d’une lutte raciale globale. Il n’en résulte pas pour autant que les « communautés imaginées » à l’échelle des cités soient simplement imaginaires. Elles sont à la fois imaginaires et réelles. Le « quartiérisme », qui en est l’une des figures politiques, n’est pas seulement le reflet d’une fausse conscience mais aussi l’expression de la connaissance d’une réalité tout à fait réelle : celle de la distribution et de la hiérarchisation des populations au sein d’espaces résidentiels différenciés. Le quartiérisme ne voit pas que ces hiérarchies recouvrent la matérialisation dans le processus urbain de conflits sociopolitiques dont la logique se construit en dehors des quartiers. Le quartiérisme apparaît comme le frère jumeau du syndicalisme le plus étroit qui confine la lutte des classes au cadre de l’entreprise.

Sadri Khiari

Extrait de son livre : La contre-révolution coloniale en France. De de Gaulle à Sarkozy, 2009, La fabrique éditions
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Message  nico37 Mar 10 Sep - 22:32

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Message  Toussaint Mer 11 Sep - 4:39

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Message  sylvestre Mer 18 Sep - 12:55

A Farida Belghoul et aux héritiers de la Marche des « beurs ». Du bon usage d’un héritage.
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Message  Toussaint Ven 27 Sep - 17:22

La Marche pour l’égalité, un moment fondateur

Publié le 22 septembre 2013 par Sadri Khiari



Nous publions ci-dessous un extrait d’un essai paru en janvier 2009 aux éditions La Fabrique, intitulé « La Contre-révolution coloniale en France. De de Gaulle à Sarkozy ». Analysant les prolongements de la Marche pour l’égalité de 1983, l’auteur y affirme notamment que celle-ci, malgré ses ambivalences et ses faiblesses, constitue le moment fondateur d’un nouveau rapport de force, caractérisé par le mouvement ascendant de la Puissance politique indigène.

La Marche pour l’Egalité et contre le Racisme de décembre 1983 a fait beaucoup de bruit sur le moment avant de sombrer dans les oubliettes de la mémoire française. Peu aujourd’hui, y compris parmi nous, s’en souviennent. Certains, cependant, en gardent quelques traces dans leurs têtes. Qu’était-ce déjà ? La « Marche des beurs », un « grand moment de fraternité », l’émergence de SOS-Racisme ? On sait plus trop. Certains la mythifient, oubliant les luttes de l’immigration qui l’ont préparé. Il devient impossible d’en souligner les limites sans prendre le risque de se faire bastonner. D’autres sont plus désabusés ou carrément intransigeants : la Marche n’aurait été qu’un gigantesque spectacle, téléguidé par l’Elysée ou manipulé par les gauchistes. Nombreux, souvent acteurs ou témoins directs des mobilisations des années 1980, en font la critique au regard de ses prolongements ultérieurs qu’ils appréhendent, du reste, avec une sévérité imméritée. Plutôt que de saisir cet événement du point de vue de la dynamique historique – nécessairement longue et contradictoire – dans laquelle il s’est inscrit, ils l’interprètent de biais, à travers leurs propres espoirs déçus, les défaites subies, l’échec – relatif, à mon avis – des projets politiques et organisationnels qu’ils ont eux-mêmes porté ou dans lesquels ils ont cru.

La Marche a pourtant représenté un tournant majeur, un basculement historique ; elle a ouvert une nouvelle période. Depuis 1968, il y avait eu, certes, en France des mobilisations de plus grande ampleur que cette manifestation qui a réuni, selon les estimations favorables, 100 000 personnes ; il y a eu d’autres conflits, des crises sociales parfois bien plus spectaculaires. Il n’en a résulté, cependant, que du bricolage institutionnel. Même quand elles ont été engagées par des partis politiques, les luttes les plus importantes sont restées finalement des luttes syndicales, inscrites dans la continuité républicaine. Polarisées généralement autour de la question de la redistribution des richesses, elles ont rarement contesté, ou alors seulement à la marge, les fondements politiques du Pacte républicain. Les combats dits « sociétaux » ont parfois mobilisé beaucoup de monde ; ils ont induits certaines transformations culturelles, idéologiques, sociales, qu’on ne peut évidemment négliger. Ces évolutions, cependant, apparaissent comme la conséquence de l’onde de choc produite par la grande crise politique de mai-juin 1968 et non comme le résultat de nouvelles ruptures. Quand on en tire le bilan, 25 ans plus tard, l’élection de Mitterrand en mai 1981 n’a pas non plus représenté l’événement historique que l’on dit. Le long intérim assuré, dans les instances de l’Etat, par les équipes de gauche qui se sont substituées aux politiciens et autres technocrates de droite, s’est inscrit dans la continuité républicaine, rétif même à bousculer les institutions mises en place par de Gaulle. Si l’accession au pouvoir des socialistes a profondément renouvelé le champ politique, c’est peut être uniquement, qu’on le regrette ou qu’on s’en félicite, dans la mesure où elle a accéléré le dépérissement du Parti communiste et, plus généralement, contribué à la dissolution de la puissance politique indépendante de la classe ouvrière et à son potentiel de remise en cause du Pacte républicain, au moins dans certaines de ses dimensions.

Pour le dire avec Sayad, « l’irruption sur la scène publique, donc sur la scène politique, de la jeunesse de l’immigration » a été, en elle-même, le vecteur d’un bouleversement du champ politique. Elle a constitué, « à n’en pas douter, ajoute-t-il justement, le fait essentiel de cette décennie, l’avant-dernière du siècle. » Elle « marque une rupture» parce que « la revendication des « droits civiques », la revendication de l’engagement politique au sens plein du terme et, par suite, du déplacement sur le terrain proprement politique des luttes qui, traditionnellement, étaient confinées dans le seul espace concédé aux immigrés, à savoir les luttes directement liées au travail et menées sous la bannière du travail, est reprise un peu partout.» Elle « marque une rupture », parce qu’elle accomplit la conscience que « la défense des immigrés, l’amélioration de leur condition, leur promotion sur tous les plans ne peuvent plus être assurées aujourd’hui que si elles se situent délibérément et ouvertement dans le champ politique, que si les immigrés eux-mêmes et, surtout, leurs enfants s’y engagent directement et engagent leur action dans la sphère politique.» Sans projet politique clair, sans stratégie, sans organisation, ne concernant immédiatement qu’une petite minorité de personnes, la Marche pour l’Egalité apparaît pourtant comme le premier événement depuis mai 1968, parce qu’il a amené l’immigration à l’existence politique. Et cette existence politique a questionné la République elle-même, construite sur la négation de l’existence politique indigène. Certes, la plupart des Marcheurs ne la contestaient pas explicitement ; ils se réclamaient bien souvent de ses « valeurs » ; nombreux parmi eux pouvaient encore croire que le pouvoir socialiste était différent de ceux qui l’avaient précédé, qu’il pouvait avoir pour ambition de mettre en conformité le faire et le dire de la République. Cependant, la mobilisation de dizaines de milliers d’indigènes, suivie avec complicité par des centaines de milliers d’autres, a bousculé en pratique certaines des assises fondamentales du Pacte républicain. La nation France, ses contours culturels, son identité ethno-centrée, son rapport au monde, les frontières de la citoyenneté qu’elle a instauré, percutés par les colonisés de l’extérieur trente ans plus tôt, ont été, emboutis par l’irruption des colonisés de l’intérieur sur la scène politique, en décembre 1983. La Marche, indissociable, comme événement, des résistances indigènes qu’elle a galvanisées, indissociable également de la contre-offensive qu’elle a suscitée, a fait tout bonnement chavirer le champ politique hexagonal ; elle l’a transfiguré. Bien calée depuis les années 1960 sur les luttes internes au Pouvoir blanc malgré les poussées des luttes de travailleurs immigrés, la scène politique s’est retrouvée à nouveau charpentée autour de son axe national-racial. Non pas que celui-ci ait auparavant cessé d’exister ou de déterminer la réalité politique française, mais il ne s’exprimait plus directement comme l’un des ressorts majeurs des conflits d’hégémonie à l’intérieur des frontières de l’Hexagone. Désormais, deux plans de conflits se chevauchent et se croisent, sans jamais se confondre, le plan des luttes politiques « traditionnelles » ou républicaines et le plan des luttes décoloniales. La Marche a ainsi représenté l’acte de naissance d’un rapport de force indigénal, enraciné immédiatement et durablement dans la réalité hexagonale, le moment de cristallisation d’une nouvelle matérialité politique, d’un nouveau rapport de force racial. Elle n’a pas été, comme beaucoup d’entre nous le déplorent, une « occasion manquée », une défaite à cause de ces imbéciles de SOS-Racisme et autres conspirations mitterrandiennes, mais un formidable point de départ, malgré les imbéciles en question, malgré les manœuvres socialistes. La Marche a ouvert un nouveau cycle politique en France, lui-même scandé par des cycles plus court de luttes, d’offensives et de contre-offensives, de déplacements des fronts, de périodes d’avancées et d’autres de retraits ou de cessez-le-feu provisoire, opposant les forces indigénales et les forces blanches.

Cette première grande offensive indigène s’est développée jusqu’aux années 1990. Elle a pris dans un premier temps, la forme de nouvelles marches sur Paris (Convergence 84 pour l’égalité, en 1984, suivie l’année d’après par la Marche pour les droits civiques). Toujours imposantes, elles ont cependant rassemblé moins de monde que la Marche de 1983. On y a vu à tort, à mon avis, le signe d’un déclin, de l’effet mortifère des divisions. Ce n’est pas le cas, même si les divergences qui ont opposé les différents pôles indigènes engagés dans la résistance ont pu effectivement susciter des désenchantements, inéluctables, en vérité, au lendemain d’un grand mouvement de mobilisation. Ce qui a assurément décliné, par contre, c’est le soutien des courants de gauche qui appréciaient dans la « Marche des beurs » les illusions intégrationnistes qui l’ont caractérisé. Les manifestations suivantes, plus fermes dans leur volonté d’autonomie politique, ne pouvaient que rompre le consensus apparent de l’hiver 1983, dissuader les Blancs de s’engager dans le mouvement (pour l’appuyer ou le « récupérer ») et inquiéter certains des nôtres, encore prisonniers de leurs illusions républicaines. A posteriori, c’est toujours facile à dire, mais il me semble vraiment que le choix de la clarté politique était justifié, quand bien même il devait conduire à amoindrir les capacités immédiates de mobilisation. A l’espoir, chimérique, qu’il suffisait d’un gigantesque « tous ensemble » à Paris pour influencer la politique, se sont substituées de multiples tentatives d’organisation, de définitions politiques et d’élaborations stratégiques, dont il est vain de penser qu’elles pouvaient progresser de manière linéaire et aboutir rapidement sans polémiques, sans heurts et sans divisions. Celles-ci ont découragé nombre d’entre nous, mais elles étaient inévitables alors que naissait à peine le mouvement et qu’il devait – qu’il doit encore ! – s’inventer lui-même, s’arracher aux forces blanches, construire son propre espace politique, son propre regard, avant de pouvoir s’unifier durablement. Il faut au contraire se féliciter que, malgré sa jeunesse, celle de son apparition et celle de la plupart de ses membres, malgré la faiblesse de ses acquis politiques et de l’expérience accumulée, malgré la puissance de l’hostilité qu’il a suscité, il a pu néanmoins continuer pendant au moins une dizaine d’années à produire un foisonnement de cadres de résistance organisés ou de réseaux plus ou moins informels, capables d’intervenir sur de nombreux plans – social, politique, culturel, spirituel – et d’agir sous différentes formes – constitution de mouvements indépendants et autres associations, luttes « sur le terrain », incursions dans le champ médiatique, expérimentations électorales, ou tentatives d’infiltration des partis blancs. Ce qui est décisif dans cette période, ce n’est pas leurs hésitations politiques, l’éclatement des résistances, leur incapacité à s’unifier autour d’un projet clair, la dépendance de nombre d’entre elles par rapport aux forces blanches. C’est bien plutôt, dans un contexte de recul des luttes sociales et politiques en France qui durera jusqu’au milieu des années 1990, leur profusion, la floraison de ses formes et de ses domaines d’intervention, la jeunesse de ses acteurs, la pléthore des personnes directement engagées dans ses luttes, qui les ont appuyées un moment ou seulement observées avec sympathie, le rayonnement des idées nouvelles. Surtout, à travers tout cela, ce qui a été cruciale, c’est que du fait même que de nombreux indigènes se sont engouffrés dans le champ politique, une problématique réfractaire à l’ordre national-racial s’est trouvée posée.

La réaction blanche a été brutale. Elle s’est déployée sur une myriade de fronts, a développé différentes stratégies d’endiguement. L’élan de la Marche s’est essoufflé à partir des années 1990. Elle a déserté nos mémoires. Souvent, les jeunes frères et sœurs des marcheurs ne croient plus en rien, terrassés par la violence économique, sociale et policière dans les quartiers. Les espaces de lutte qui avaient acquis le plus de visibilité se sont effilochés, émiettés ; nombreux ont été vassalisés à la périphérie du Pouvoir blanc, clientélisés, pris en otages ou, simplement, graduellement enchaînés par les multiples compromis nécessaires à la survie de quelques activités ; les réseaux se sont détissés ; d’innombrables militants ont été découragés, se sont résignés, ont pris leur pantoufles, ou se sont recroquevillés sur la seule animation d’une résistance local, sur des causes fragmentaires mais vitales ; l’effort de clarification politique s’est asséché ; des expériences accumulées ont été dilapidées. Tout cela est vrai, mais tout cela n’est vrai que dans une certaine mesure : celle qui n’appréhende les progrès d’une puissance politique que comme une accumulation continue de forces et non comme une respiration. Qu’il y ait eu, à partir des années 1990, des défaites, des reculs, une certaine perte de substance, ne fait guère de doute. Mais ces formules sont par trop unilatérales. Elles manquent un pan entier de la réalité. Elles sont distordues par la tendance à ne voir la progression des rapports de force qu’à travers les notions d’événements, de ce qui est censé faire l’« actualité » dans le prisme du regard sélectif des médias blancs pour lesquels l’actualité réelle des immigrés ou de leurs enfants, leurs luttes et leurs résistances, restent largement invisibles.

Plutôt que de regretter la désagrégation de certaines formes de luttes indigènes, il faut souligner le déplacement des résistances, la multiplication des fronts, l’apparition de significations inédites. Les tentatives de constituer une force unifiée de l’immigration et de ses enfants ont échoué, mais, à vrai dire, le contraire eut été étonnant, compte tenu de la jeunesse du mouvement. Ce qui importe, c’est que ces tentatives aient été constamment renouvelées. Certaines dynamiques de lutte se sont amoindries comme, depuis les grandes grèves de l’automobile en 1983-1984, celles des travailleurs immigrés, à l’instar des luttes générales de la classe ouvrière. D’autres ont pris le relais, comme celle des sans-papiers, qui, malgré les épreuves et les revers, ne cessent de rebondir depuis les grandes mobilisations de 1996 jusqu’à nos jours. (…)

Le principal foyer de cette puissance (indigène) est indiscutablement les quartiers indigénisés. Les tentatives d’organisation politique y ont toujours été timides et précaires, concentrées sur l’action locale, rarement en mesure, également, d’impulser de vastes mobilisations populaires. Il ne faut pas, pour autant, sous-estimer la multiplicité et la diversité des espaces et des formes de la résistance qui se sont développées depuis les années 1980, souvent dans l’urgence, généralement articulée autour de revendications liées au traitement d’exception auquel sont soumises les populations issues de la colonisation qui y résident. Contre les brutalités et le harcèlement policiers, le racisme, l’accès et les conditions de logements, le chômage, les discriminations à l’Ecole, les carences des infrastructures municipales, la ségrégation religieuse à l’encontre des musulmans, les restrictions apportées, de fait, au droit d’association, l’exclusion des instances représentatives, les expulsions, la double-peine, autant de questions qui ont suscité une pluralité d’actions et de mouvements de protestation qui ont souvent donné naissance à des espaces de lutte structurés, plus ou moins pérennes. La contre-offensive blanche, à l’échelle nationale et locale, la volonté de soudoyer les animateurs des nouvelles associations, de museler, d’asphyxier, de marginaliser, les espaces de résistances les plus rebelles, ont eu, certes, des effets délétères, fortement visibles encore. Elles n’ont pas cependant aboli toutes les solidarités ; elles n’ont pas éteint la révolte profonde de la jeunesse des cités ; ni bridé toute forme de contestation organisée.

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Message  Toussaint Mer 20 Nov - 2:08

du 25 au 30 novembre 2013 à Lille

La semaine pour l’égalité et contre le racisme


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Reprenons la Marche enclenchée en 1983 !

Quelles leçons tirer des expériences de luttes passées ?
En présence de : Mognis Abdallah, Alima Boumediene, Kaissa Titous, Salika Amara, le Collectif « Quelques unes d’entre nous »

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Programm en pdf de la semaine:
http://indigenes-republique.fr/wp-content/uploads/2013/11/programme_semaine_egalite.pdf


Cinéma l’Univers – Lille – 25/26 novembre 2013
La Maison de Quatrier Vauban – Lille – 27/28 novembre 2013
La Condition Publique – Roubaix – 29/30 novembre 2013
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Message  Toussaint Sam 30 Nov - 13:13

SOS Racisme… des potes qui nous voulaient du bien

Publié le 26 novembre 2013 par Sadri Khiari


Indigènes de la République - Page 10 Julien10
Julien Dray, Jean-Luc Mélenchon et Marie-Noëlle Lienemann défilent contre le racisme


Le succès de SOS-Racisme a généralement été appréhendé comme une simple opération de « récupération », concoctée dans les cabinets de Mitterrand et favorisée par « l’immaturité » des mouvements « beurs ». Dans sa thèse sur le traitement médiatique de l’association anti-raciste, P. Juhem [1] a mis en lumière les multiples déterminations qui ont rendu possible la « récupération ». Plutôt que de recourir à l’hypothèse fantaisiste d’une vaste manipulation engagée par une sorte de « comité central » des médias dominé par les socialistes, il a tenté de repérer les logiques spécifiques au champ médiatique, la pluralité des facteurs (enjeux internes, compétitions, stratégies commerciales, évolution du profil idéologique des journalistes, etc.), qui ont convergé pour aboutir à une gigantesque campagne de promotion de SOS-Racisme, sans minimiser, pour autant, la volonté politique de certains responsables socialistes – en premier lieu, Mitterrand – et l’efficacité de leurs interventions dans un contexte favorable.

Les énormes subventions reçues, le soutien de plus en plus affirmé de la gauche, des médias et de nombreux intellectuels ont incontestablement contribué, en effet, au succès de SOS-Racisme. On doit y voir également l’effet de dispositifs propres au système postcolonial. La « récupération » apparaît comme une menace inhérente à celui-ci – ce qui ne signifie pas inévitable – et non pas comme le seul produit d’intérêts politiques circonstanciés et de stratégies habilement menées. On a parfaitement raison de condamner de ce point de vue la politique du PS mais il est tout aussi important de saisir pourquoi, malgré leur bonne volonté, de nombreux militants antiracistes ont pu jouer le jeu d’une entreprise d’exclusion/inclusion.

Au début des années 80, « les Beurs deviennent trop subversifs » [2]. La Marche pour l’Egalité et les multiples formes d’action qui l’ont précédé ou suivi donnent aux jeunes issus de l’immigration une formidable visibilité qui inquiète, dans un contexte politique mouvant. L’abandon des promesses qui avaient conduit Mitterrand au pouvoir et l’adoption d’une politique de rigueur ne suscite pas la mobilisation sociale qu’espérait l’extrême gauche. La tendance politique dominante, notamment au sein de la jeunesse lycéenne et étudiante, n’est plus à la contestation mais plutôt à la désaffection vis-à-vis de l’engagement politique tandis qu’avec le recul des paradigmes marxistes s’imposent les idéologies molles de la défense des droits de l’homme et du progrès « sociétal ». La droite, par contre, progresse. Elle remporte plusieurs élections municipales partielles et repart à l’offensive comme en témoignent les gigantesques manifestations pour « l’école libre ». Le Front national connaît, quant à lui, ses premières grandes victoires (élections européennes). La « bête immonde » resurgit, craignent de nombreux secteurs de la gauche, assimilant la nouvelle situation à la montée du fascisme dans les années 30. Pour beaucoup, la lutte antifasciste devient la priorité de l’heure et l’antiracisme devient l’arme de cette lutte, d’autant plus efficace leur semble-t-il qu’un antiracisme moral et englobant peut permettre un large rassemblement de forces et remobiliser la jeunesse sur des « valeurs de gauche ».

Dans ce contexte, le mouvement « beur » pose incontestablement problème. L’irruption des enfants de l’immigration sur la scène publique inquiète. Il alimenterait le discours du Front national. Il embarrasse le pouvoir socialiste déterminé à restreindre l’immigration, mais il peut constituer aussi une nouvelle ressource électorale pour la gauche. D’une part, parce que de nombreux jeunes issus de l’immigration ont le droit de vote mais également parce que la problématique antiraciste qui est la sienne suscite la sympathie de larges franges de la jeunesse. Il s’agit dès lors de l’encadrer, de neutraliser ses tendances les plus contestataires et d’aseptiser son discours. « Convergence 84 révéla, écrivent Ahmed Boubeker et Nicolas Beau, une réelle capacité de mobilisation des cités. Personne pourtant pour canaliser cette révolte. Une place était à prendre ; message vite compris par Harlem Désir et ses potes : le jour même de l’arrivée de Convergence, 5000 badges « Touche pas à mon pote » de SOS-Racisme étaient vendus. L’idée du mélange, débarrassée de ses relents égalitaires, était reprise par Harlem Désir : « Vivons avec nos ressemblances, quelles que soient nos différences » : ce slogan de Convergence permettait à chacun, français ou immigré, de s’exprimer, sans complexes, sur la société multiraciale. Les beurs avaient perdu ce monopole. Avec SOS-Racisme, la société française reprenait la parole. Le relais était passé. » [3] C’est, en effet, à l’occasion de la seconde Marche, organisée par « Convergence 84 » que le petit groupe constitué autour de Julien Dray, transfuge de la LCR au Parti socialiste, apparaît sur la scène publique en diffusant massivement la fameuse petite main jaune. Mogniss Abdallah y voit un «talisman, hybride de la main de Fatma et de l’étoile jaune des Juifs sous le nazisme » [4]. Alors que les jeunes issus de l’immigration avaient manifesté contre le racisme particulier dont ils sont l’objet, SOS met en avant une vision exclusivement moralisante et non politique du racisme, détachée de l’histoire sociale et politique concrète. La référence implicite à l’étoile jaune n’est pas non plus innocente. Elle n’est pas sans lien avec le « choix exclusif de l’UEJF comme co-fondatrice de l’association » [5] suppose Mogniss Abdallah. En décembre 1983, de nombreux marcheurs étaient fiers de porter le Keffieh, symbole du peuple palestinien. Le « talisman » de SOS suggère, quant à lui, que la question palestinienne ne serait qu’un conflit entre juifs et arabes soluble dans l’antiracisme. M.Abdallah décrypte également le slogan « Touche pas à mon pote ». Celui-ci met « en scène un Français (anti-raciste) s’adressant à un autre Français (raciste, donc souvent suspect d’accointance avec le FN) pour protéger son « pote » issu de l’immigration. Le « pote » devient par un spectaculaire retournement de situation le spectateur passif d’un enjeu politique franco-français où il est question de cordon sanitaire anti-FN ou d’un « front républicain » pour des échéances électorales et les « combinazzione » à venir » [6]. Le racisme apparaît ainsi comme un rapport inter-individuel, une forme d’hétérophobie portée par l’extrême-droite. L’antiracisme devient une posture éthique, un combat qui se déroule entre Blancs.

Si le discours de SOS évoluera progressivement au fur et à mesure de l’enracinement du mouvement et des nouveaux enjeux politiques qui se poseront à lui, à sa fondation, la nouvelle association s’attache à se présenter comme a-politique, ni trop de gauche ni de droite. « Alors que quelques années auparavant un mouvement se proclamant « apolitique » aurait rencontré l’opposition de toutes les organisations politiques et antiracistes « de gauche », note P. Juhem (…), au contraire en 1985, l’affichage de « l’apolitisme » du mouvement est la condition de sa réussite, à la fois à l’égard de journalistes qui se réjouissent de la « fin des idéologies » et vis-à-vis de jeunes qui sont proportionnellement plus nombreux qu’auparavant à être indifférents à l’égard de « la politique ».» [7] SOS apparaît ainsi comme le cadre idéal pour mobiliser la jeunesse et canaliser la révolte des banlieues.

La finalité de l’association antiraciste est double. Il s’agit d’inclure les « beurs » dans des logiques politiques qui ne sont pas les leurs et d’exclure du champ politique ceux qui développent une orientation en rupture avec le consensus antiraciste basé sur l’intégration individuelle. Cette exclusion se réalise par diverses procédures. La première est évidemment de donner à SOS une légitimité qu’elle n’a pas en la présentant comme l’héritière de la Marche de 1983[8]. La seconde consiste à marginaliser les mouvements autonomes qui n’ont guère d’alliés dans le champ politique blanc ni, évidemment, de subventions. Le soutien gigantesque dont bénéficie SOS lui permet alors d’occuper tout l’espace antiraciste. Les mouvements autonomes sont soumis, quant à eux, à une terrible injonction qui contribuera à aggraver les dissensions en leur sein : se résoudre à une alliance avec SOS, c’est-à-dire accepter son hégémonie et les enjeux (blancs) qui sont les siens, ou prendre le risque de l’isolement avec – déjà – l’accusation de diviser le mouvement antiraciste. Ainsi, si SOS ne parvient pas à s’implanter réellement dans les cités, elle réussira néanmoins à gagner des militants comme Kaïssa Titous et Malik Lounès qui se résignent à y voir le seul cadre de regroupement possible et espèrent avoir suffisamment d’influence pour en changer l’orientation. « Lors du premier congrès de SOS-Racisme à Epinay-sur-Seine en 1986, rapporte P. Juhem, le principal débat aura lieu entre, d’une part, Julien Dray et la direction historique de l’association et, d’autre part, Kaïssa Titous qui, soutenue par les militants de la LCR, tentera de constituer au sein de SOS une tendance « beur », attachée à défendre la spécificité des « jeunes issus de l’immigration maghrébine ». D’autres batailles seront menées, notamment pour que l’association antiraciste prenne partie en faveur du peuple palestinien ou s’oppose à l’engagement des troupes françaises lors de la première guerre du Golfe. Mais ces batailles, si elles n’ont pas toujours été sans résultats, ne pouvaient pas rendre la parole à ceux qui en avaient été exclus.

Au principe de SOS, il y a en effet l’exclusion des « Beurs » du champ politique ou leur implication dans des enjeux qui leur sont extérieurs. SOS n’existe que comme cadre de mobilisation et de pression au sein du jeu des forces politiques blanches en instrumentalisant les problématiques de l’immigration et du racisme. Les « beurs » sont appelés à y trouver leur place à la condition de s’insérer dans les enjeux du champ politique blanc et de ne pas en bousculer les règles. SOS n’a pas « récupéré » le mouvement pour l’égalité au sens où elle s’est contentée d’en prendre la direction ; en exploitant ses ambivalences, elle l’a projeté dans le plan politique blanc. Ce faisant, elle a retourné le mouvement contre lui-même.

Sadri Khiari

Source : ce texte est extrait du livre de Sadri Khiari, Pour une politique de la racaille.Immigré-e-s, indigènes, jeunes de banlieue, que nous recommandons vivement.

[1] Juhem, P., Thèse de science politique : « SOS-Racisme, histoire d’une mobilisation  »apolitique ». Contribution à une analyse des transformations des représentations politiques après 1981 ».

[2] Bouamama, S., Dix ans de marche des Beurs. Histoire d’un mouvement avorté, Desclée de Brouwer, 1994, p.4

[3] Ibidem, p.91

[4] Ibid., p.69

[5] Ibid.

[6] Ibid.

[7] « SOS-Racisme est le premier mouvement de masse de l’après-guerre fondé sur des résolutions d’ordre exclusivement éthique. Il ne propose aucun projet de société, ne nourrit aucune ambition politique. Ses adhérents, pour la plupart des jeunes, ne se font guère d’illusions sur l’état du monde, [...].Ils ne croient pas davantage aux promesses d’un monde lointain », Marek Halter, La main ouverte, Le Monde, 16 juin 1985 (cité par P. Juhem).

[8] « À la fin de 1984, il n’y a pas d’organisation nationale ou de porte-parole qui puisse revendiquer représenter l’ensemble des « jeunes issus de l’immigration ». Lorsque SOS-Racisme apparaît les journalistes peuvent, sans risque d’être démentis, faire de l’association l’héritière des « marches » et la représentante naturelle des « beurs ». » Ibidem.
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Message  Toussaint Sam 30 Nov - 13:16

Samedi 30 Novembre à 14h, 5 Rue Basse des Carmes, 75005 Paris, métro Maubert Mutualité,

Programme des formations politiques du PIR et de la BAN
Publié le 22 novembre 2013 par PIR


Depuis quelques mois, le PIR et la Ban cheminent ensemble et croisent leurs expériences de luttes. Nous savons qu’il existe une grande effervescence politique dans les milieux de l’immigration mais que celle-ci reste très dispersée. Nous savons également que le système français nous a collectivement exclu des espaces d’éducation politique et nous a cantonné dans l’activité associative. La marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983 est là pour nous rappeler un fort déficit en matière de transmission des luttes et de formation politique des militants. Nous savons aussi que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes. C’est pourquoi, nos deux organisations mettent en place un programme de formation ouvert à tous, gratuit et dont on espère qu’il participera à l’élaboration d’une pensée critique décoloniale qui puisera son inspiration dans les luttes anticoloniales, antiracistes et dans l’expérience des résistances populaires. Nous souhaitons surtout qu’elle sera au service des luttes des immigrations et des quartiers.

Les formations auront lieu à l’Iremmo (salle louée par les deux organisateurs) – 5 Rue Basse des Carmes – 75005 Paris, métro Maubert Mutualité, 14h. Le programme est en cours de réalisation mais le calendrier sera mis en ligne prochainement et actualisé régulièrement. Ci-après, le premier rendez-vous organisé par le PIR seul, la BAN ayant prévu de longue date une conférence sur la négrophobie le même jour :

Samedi 30 novembre 2013
« La cartographie du pouvoir colonial », avec le professeur Ramon Grosfoguel
, du département d’études ethniques de l’Université de Berkeley. Il proposera une analyse globale de la matrice du pouvoir colonial / impérial ou comment aborder les questions économiques, l’écologie, la race, le genre avec une lecture décoloniale ?
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Message  Toussaint Sam 30 Nov - 13:18

samedi 30 novembre de 13h30 à 20h au 24 rue du Faubourg Saint Jacques 75014 Paris (à 2 mn du RER B : Port-Royal)
Conférence « autopsie de la négrophobie »

Publié le 22 novembre 2013 par BAN


Conférence « autopsie de la négrophobie » qui se déroulera le samedi 30 novembre de 13h30 à 20h au 24 rue du Faubourg Saint Jacques 75014 Paris (à 2 mn du RER B : Port-Royal)

L’entrée y sera GRATUITE et les places limitées.

Au programme :

« De l’asservissement des noirs à la Négrophobie » par Rosa Amelia Plumelle-Uribe/Auteure de la « Férocité Blanche »

« Autopsie de la Négrophobie » Par Franco Lollia/Porte-parole du COLLECTIF/BRIGADE ANTI NEGROPHOBIE

« Négrophobie : Enjeux et perspectives des réparations » par Klah Popo/Auteur de « Histoire des traites négrières, critique afrocentrée d’une Négrophobie académique »

… Avec la présence du rappeur Youssoupha

Ce jour, une large place sera laissée pour favoriser l’échange entre le public et les intervenants. Venez avec toutes les questions que vous vous posez sur le sujet de la négrophobie – encore tabou dans la société française – pour nourrir le débat… surtout si vous pensez ne pas épouser notre point de vue, bien qu’ignorant le socle idéologique sur lequel repose nos convictions.

La négrophobie est une arme néocoloniale d’aliénation et de destruction massive qui n’avoue pas son nom.

Inscription en ligne :

https://docs.google.com/forms/d/1buhhToRYkfVBKxVZH-dOtsIv3GKynxuxnj6SJCXhgnY/viewform

Renseignements : 0641982132
https://www.facebook.com/BRIGADEANTINEGROPHOBIE

COLLECTIF/BRIGADE ANTI NEGROPHOBIE (www.brigadeantinegrophobie.wordpress.com)
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Message  Toussaint Dim 1 Déc - 18:52

« Nous ne voulons plus être les tirailleurs sénégalais d’aucune cause ! »

Publié le 1 décembre 2013 par Sadri Khiari


Nous mettons en ligne ci-dessous un entretien donné par Sadri Khiari, co-fondateur du PIR, à Thierry Leclère et publié dans « De quelle couleur sont les Blancs », un ouvrage collectif paru aux éditions La Découverte en automne dernier.



Qu’est-ce qu’être blanc ?

Je n’ai pas envie de définir l’individu blanc (ni le « non-Blanc », sans lequel la notion de « Blanc » perd toute signification politique) : être blanc est un rapport social, et c’est lui qu’il faut définir. La notion de « Blanc » n’est pas statique, ses frontières sont mouvantes. Il y a quelques siècles encore, les populations d’origine slave, par exemple, étaient considérées comme barbares. Les populations juives, comme sauvages… et, aujourd’hui encore, dans certains pays des Antilles ou d’Afrique noire, un Syrien ou un Libanais, qui n’a pas nécessairement la peau blanche, sera considéré comme blanc parce que, dans les rapports de pouvoir raciaux, il fait partie du monde privilégié. En France, si on est arabe et qu’on a la peau blanche, c’est mieux que d’être arabe avec la peau brune. Et il vaut mieux être arabe chrétien qu’arabe musulman. Être blanc est une catégorie sociale et politique, et rien d’autre. Moi qui ai la peau blanche, je ne suis pas blanc pour autant.

Comment vous définissez-vous, alors ?

Comme un « Indigène ». Un non-Blanc. Je pourrais dire aussi comme un colonisé. Il existe en France une catégorie sociale – même si elle ne se reconnaît pas nécessairement en tant que telle – qui est composée de toutes ces populations issues des anciennes colonies et du tiers monde, subissant de multiples formes de discriminations et de racisme. Leur statut se définit par leur couleur de la peau, leur culture supposée, leur religion (en l’occurrence, l’islam le plus souvent). Face à ces populations, il y a les « Français de souche », expression par laquelle sont bien souvent définis les Blancs, malgré la multiplicité de leur origine et la diversité de leur enracinement en France. On reconnaît quasiment comme Français de souche les anciens descendants d’immigrés d’Italie, d’Espagne ou de Pologne, même si la situation n’est pas toujours aussi simple. Plus que l’enracinement dans la Gaule millénaire, le Blanc devient alors synonyme de chrétien (ou d’origine chrétienne), européen (ou d’origine européenne).

Le Blanc n’est pas forcément un dominant. Pourtant, dans votre définition, tous les Blancs sont des privilégiés…

Les Blancs savent bien qu’ils sont Blancs même quand ils sont pauvres. Et les non-Blancs sont conscients aussi de leur statut, même quand ils sont riches ou puissants. Et ce savoir des uns et des autres fait partie des modalités de reproduction du système racial.

Sous l’Ancien régime, tous les nobles, même les couches les plus basses de la noblesse, savaient parfaitement qu’ils détenaient un statut que les roturiers, y compris les plus puissants, enviaient. Tous les Blancs ont au moins en commun des privilèges symboliques. Ils sont partie prenante d’une histoire reconnue officiellement et institutionnellement. Ils partagent une même culture hégémonique. Tout cela constitue des privilèges, quelle que soit la fragilité avec laquelle on peut les considérer.

Parfois, j’entends dire : « Comment pouvez-vous prétendre que le clochard blanc qui passe la nuit dans le métro est privilégié par rapport au Qatari qui descend au Georges V ? » Il y a là un procédé rhétorique classique consistant à prendre des exemples extrêmes pour ridiculiser une argumentation. Cela montre surtout qu’il peut être vain de partir des individus pour définir un groupe et des rapports sociaux.

Pourtant, depuis quelques années, le terme de « petit Blanc » revient dans le débat public. « Petit »… ce qui suppose un moindre pouvoir ?

Je n’aime pas cette expression. Elle exprime implicitement le fait que les « grands Blancs » seraient qualitativement supérieurs à ces « petits Blancs ». J’y vois un mépris de classe, un dédain des couches populaires françaises : ouvriers, fonctionnaires, personnes travaillant dans des zones rurales, qui sont considérés comme archaïques, conservatrices, réactionnaires, et qui seraient naturellement amenés à voter pour la droite ou l’extrême droite. L’expression les « beaufs » en est tout à fait symptomatique. Oui, ces populations ont un moindre pouvoir et si la dégradation de leurs conditions sociales se poursuit, ils n’auront plus, pour construire leur dignité, que la fierté d’être blancs. Une fierté menacée, non par les « bougnoules » et les « négros », comme ils tendent souvent à le penser, mais par les Blancs qui se croient plus « civilisés » qu’eux. J’ai maintes fois été choqué de constater une telle morgue, même chez des militants de la gauche de gauche. Au-delà des « petits Blancs » d’aujourd’hui, il faudrait que cette gauche réfléchisse à l’échec historique du mouvement ouvrier et progressiste français à s’allier, par exemple, avec les petits paysans.

Quand l’écrivain et éditeur chez Gallimard Richard Millet se plaint sur les plateaux télé d’être « le seul Blanc, à six heures du soir à la station Châtelet-les Halles… un cauchemar absolu », que lui répondez-vous ?

Déjà, il peut-être rassuré, car si j’ai bien compris, le projet de rénovation du quartier Châtelet-les Halles va avoir tendance à faire refluer les populations qui s’y aggloméraient régulièrement vers leurs quartiers ! Sans doute y aura-t-il plus de Blancs et s’y sentira-t-il plus à l’aise. Je comprends parfaitement qu’un Français blanc, socialisé dans un milieu blanc, dans une certaine histoire, ne se sente pas bien dans un environnement socialement et culturellement différent du sien.

Je pourrais par ailleurs lui répondre : pourquoi les populations des quartiers populaires en France n’ont-elles quasiment que la place du Châtelet où se déployer un samedi après-midi ? Pourquoi perçoivent-elles une grande partie de Paris comme un espace qui leur est étranger ?

Face à Richard Millet et à tant d’autres personnes qui pensent comme lui, on pourrait dire : « Ces gens-là sont des salopards, ils n’aiment pas la différence. On va leur faire peur. » Je pense qu’il faut plutôt affronter ce constat et y faire face, sans a priori moraux. Comprendre que des Blancs peuvent être complètement perturbés par la présence de Noirs et d’Arabes en France pour pouvoir construire une stratégie de lutte contre le système racial.

Pourquoi alors les Indigènes de la République ont-ils employé le mot provocateur et ambigu de « souchiens », plutôt que celui de « Français de souche » ?

L’expression « souchiens » est née par hasard. Elle a surgi sur un plateau télévisé auquel participait la porte-parole des Indigènes Houria Bouteldja (1) et aucun des participants à cette émission n’y avait d’ailleurs vu la moindre ambiguïté. Celle-ci a été fabriquée lorsque Alain Finkielkraut a prétendu avoir entendu un trait d’union entre « sou » et « chiens ». Au vu des réactions que l’expression a déclenchées, il nous est arrivé de l’utiliser ensuite de manière un peu provocatrice. Mais c’est plutôt l’idée de « Blancs » qui nous intéresse.

Les Indigènes de la République font souvent référence à « l’universalisme blanc ». Qu’entendez-vous par là ?

C’est l’idée que le monde blanc serait porteur d’un projet de civilisation et de valeurs qui seraient universels, qui s’inscriraient nécessairement dans une ligne historique linéaire débouchant sur le progrès et le bien-être pour tous. Cela justifierait d’imposer ces normes à l’ensemble des autres peuples. Que ces normes soient bonnes ou mauvaises n’est pas la question, le problème est qu’elles sont présentées comme des universaux portés par l’Europe, en fonction desquels sont classés et hiérarchisés les autres peuples. Il ne faut pas nécessairement rejeter ces normes mais en faire la critique. Y compris la critique des valeurs de modernité, de progrès et d’émancipation.

Un mois avant l’adoption de la loi de février 2005 évoquant le « rôle positif » de la colonisation, vous co-écrivez « L’appel des Indigènes de la République » qui aura un fort impact dans le débat public. Quel message vouliez-vous faire passer ?

Pour la première fois était posée de manière politique la question du rapport entre le racisme en France et l’histoire coloniale. L’Appel a également mis en lumière la permanence du rapport de type colonial dans la société française. Dix ans plus tôt, ce texte n’aurait été sans doute qu’un appel de plus. Il a eu un impact parce que la situation était marquée par des conflits très durs notamment autour de la place de l’islam et des musulmans en France : affaires de voile, fausse agression antisémite dans le RER D, polémiques autour de Tariq Ramadan… et surtout, quelques mois à peine après la publication de notre Appel, révolte des banlieues de novembre 2005.

L’Appel est bâti autour d’une idée simple : l’Etat français est encore et toujours embourbé dans des rapports sociaux issus de la colonisation. Ces rapports transparaissent dans les politiques publiques vis-à-vis des populations issues de l’immigration et des quartiers populaires, des territoires français dits d’« outre-mer » et aussi dans les rapports de la France avec ses anciennes colonies.

Quel a été, à vos yeux, l’impact de l’Appel ?

Il a fait bouger les lignes du débat intellectuel et surtout militant en amenant à penser différemment le racisme et les discriminations raciales en France. En rompant avec l’approche exclusivement moraliste, qui était prédominante jusqu’à maintenant. L’Appel a forcé à réfléchir aux bases historiques et institutionnelles qui ont produit et produisent encore ce racisme. Autre idée-force constitutive de l’Appel : le fait que les populations non blanches prennent conscience qu’il ne suffit plus de lutter contre telle ou telle discrimination, telle expression du racisme, mais qu’il s’agit d’insérer toutes ces questions dans une démarche pleinement politique. Le texte invite les populations non blanches à s’organiser dans le champ politique comme groupe social dominé, avec sa propre lecture de la société et ses propres revendications.

Cette démarche est souvent qualifiée de « communautariste » par vos détracteurs…

Cet argument qu’on nous oppose est assez stupide. Nous faisons simplement le constat d’une racialisation déjà existante, dont nous sommes victimes, et qui nous impose de nous regrouper. Le modèle républicain français, par exemple, a en horreur les particularités culturelles. Il les combat par crainte que celles-ci ne battent en brèche le modèle national. Regardez comme la République a reconnu tardivement des droits culturels collectifs pour les Corses ou les Kanaks. Admettre des droits culturels collectifs, c’est-à-dire communautaires, aux populations issues des anciennes colonies est encore aujourd’hui un tabou. Nous ne sommes donc pas hostiles au principe communautaire, mais évidemment, le modèle dit « anglo-saxon », qui le reconnaît sans remettre en cause les hiérarchisations raciales, ne saurait convenir.

Au-delà des revendications culturelles, le nœud de l’inégalité se trouve dans le pouvoir d’État, dont l’accès ne nous est ouvert qu’avec une grande parcimonie, et seulement si nous faisons allégeance à la domination blanche. Il nous faut donc investir pleinement la politique pour transformer profondément le rapport qu’ont les forces blanches avec nous. C’est ce que nous avons voulu dire en fondant notre propre parti, le Parti des Indigènes de la République. Et c’est pour cela que cette décision est antipathique, y compris aux Blancs qui sont plutôt portés vers nous. Nous voulons investir de manière autonome le champ politique, organiser les populations issues des anciennes colonies en France autour d’un projet politique destiné à être porté au pouvoir. Notre ambition est de faire émerger en France une majorité populaire – blanche et non blanche, bien sûr – susceptible d’appuyer un gouvernement décolonial, c’est-à-dire dont l’un des axes majeurs serait l’action contre les logiques et les mécanismes racialisants.

On vous a beaucoup reproché l’usage du mot « indigènes ». Frantz Fanon disait : « Je ne veux pas être esclave de l’esclavage. » En reprenant ainsi le vocabulaire colonial, n’en êtes-vous pas prisonniers ?

Quand on est dans une situation de domination, on est nécessairement ambivalents. On n’échappe pas au vocabulaire de l’adversaire, aux catégories construites par lui. Le tout est de les utiliser comme des armes pour perturber le système de domination. Quand nous employons l’expression « indigène », nous mettons la République face à ses responsabilités : contrairement à ce que prétend le système français, il y a toujours des discriminations raciales en France qui s’enracinent dans les rapports sociaux coloniaux, sous des formes largement renouvelées. La notion d’« indigène » est donc une notion politique. C’est un outil libératoire mais qui porte effectivement en lui-même des contradictions et des possibilités de dérives. Mais c’est le propre du combat politique.

Vous voulez rassembler autour d’un projet décolonial, mais les Indigènes de la République comptent, par exemple, très peu de Noirs, dans leurs rangs.

C’est exact, et c’est un échec notable dont nous sommes en partie responsables. Au départ, il y avait parmi nous essentiellement des Maghrébins, ce qui s’explique par diverses raisons : les différentes conditions d’arrivée en France des populations immigrées sur le territoire national, les histoires particulières des uns et des autres et les enjeux qui ne sont pas forcément les mêmes. Nous n’avons pas saisi assez tôt, par exemple, l’importance de la question des réparations liées à l’esclavage. J’espère que viendra bientôt le jour où il sera possible, aussi, d’intégrer les Roms à la dynamique décoloniale qui s’ébauche.

La notion de « racisme anti-Blancs » ressurgit aujourd’hui. N’a-t-elle pas piégé le débat racial que vous avez contribué à relancer ?

Nous savions que cela nous pendait au nez. Nous avions en effet bénéficié de l’expérience antérieure des mouvements noirs américains qui se sont souvent fait eux-mêmes accuser de « racisme anti-Blancs ». La question du « racisme anti-Blancs » a commencé à ré-émerger en 2005, lorsqu’un certain nombre de manifestants lycéens ont été agressés par des jeunes de banlieue (2).

Si l’on considère le racisme uniquement sous l’angle des préjugés vis-à-vis de l’Autre, qu’un Noir dise « Sale bougnoule ! » ou qu’un Arabe dise « Sale Blanc ! » revient effectivement au même. Mais si on envisage le racisme comme un rapport de pouvoir, on ne peut pas mettre sur le même plan ceux qui bénéficient de toute la puissance du système racial et ceux qui n’ont souvent que leurs mots pour y résister. Aujourd’hui, la notion de « racisme anti-Blancs » est mobilisée pour délégitimer le mouvement antiraciste et stigmatiser, encore plus, les habitants des quartiers populaires.

On vous a reproché d’exclure les Blancs, les « non-Indigènes » de votre projet ? Votre volonté d’autonomie implique-t-elle une forme d’entre-soi ?

On nous a fait ce reproche alors même que l’Appel venait d’être rendu public avec la liste des initiateurs du projet dont un bon nombre était blancs ! Ce reproche qui nous est fait est très intéressant. Il ne s’agit pas de mettre en doute la bonne foi antiraciste des Blancs qui veulent s’engager avec nous ; il n’en demeure pas moins que la puissance du système racial s’exerce sur nos organisations comme elle s’exerce sur les Blancs antiracistes et comme elle s’exerce sur nous-mêmes. Combien de fois ai-je vu, lors de réunions, tous les regards se tourner vers le militant blanc et négliger les militants non blancs ? Et quels sont les militants que nous avons bien souvent du mal, par honte ou peur, de contrer ? Les Blancs !

Ce n’est pas leur faute. « Vous n’avez qu’à avoir confiance en vous-mêmes », me répondrez-vous. Eh bien justement, pour conquérir cette confiance en nous-mêmes – parce qu’il s’agit bien de conquête –, il nous faut nous prendre en charge et nous diriger nous-mêmes. C’est-à-dire éviter que la direction de nos luttes nous échappe petit à petit. Nous avons d’ailleurs débattu de l’éventualité de n’accepter que les indigènes dans nos rangs – car la mixité de notre organisation n’est pas un principe absolu –, mais les particularités de la situation en France, par opposition à celle qui prédominait aux États-Unis dans les années 1960, nous a paru plaider pour le choix inverse. En revanche, nous ne sommes pas idiots au point de croire qu’il est possible de démanteler le système racial sans que des luttes et de multiples espaces de convergence Blancs-indigènes, ponctuels ou plus durables, se mettent en place.

Comment articulez-vous la « question raciale », si présente dans le discours des Indigènes de la République, à la « question sociale », qui a été au cœur de votre parcours militant trotskiste ?

Mon parcours de militant trotskiste s’est déroulé en Tunisie. Pour toute la gauche tunisienne, la question économico-sociale était effectivement très importante mais elle s’articulait à la lutte contre la dictature policière – laquelle m’a permis plus tard, en France, de comprendre une dimension importante de la situation dans les quartiers populaires – et à la question nationale, c’est-à-dire la poursuite du combat anticolonialiste en Tunisie et à l’échelle nationale arabe.

Quand je me suis réfugié en France, en 2003, et que j’ai poursuivi mon militantisme trotskiste, ma rupture avec la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) s’est faite sur l’affaire du voile : celle-ci a provoqué une énorme controverse au sein de la LCR. Face aux partisans de la prohibition du voile, je pensais, avec d’autres, qu’il fallait tout simplement dénoncer la loi et participer aux mobilisations contre ce projet. La Ligue manifestait une incompréhension totale de l’islam politique, imprégné d’européocentrisme voire, chez certains, d’islamophobie ou d’un paternalisme qui me donnaient de l’urticaire.

Dans les quartiers populaires où on trouve la plus grande partie des populations issues des anciennes colonies, il suffit d’observer les luttes indigènes, de connaître un peu les milieux militants, pour constater que la question socio-économique est subordonnée à la question politique. Même si l’impact des politiques néolibérales est massif.

Dans ces quartiers, les enjeux ne sont pas les mêmes que dans l’espace des relations économiques. Les outils de lutte non plus. Une grande majorité de la population est constituée de chômeurs et de travailleurs précaires qui n’ont de l’usine qu’une expérience très limitée, voire pas d’expérience du tout. Leur conscience politique immédiate ne se construit pas dans l’opposition au patron mais à l’État, à la police, aux institutions municipales, au quartier, et non à l’usine ou à l’entreprise. La gestion de l’héritage culturel des enfants issus de l’immigration ou la question de la religion ne se posent pas non plus dans les mêmes termes que pour les Blancs. Les populations originaires des colonies posent des questions terriblement politiques, comme la fin des inégalités raciales, le respect et la reconnaissance des histoires, des cultures et des spiritualités, la question palestinienne, etc. La gauche veut les cantonner au stade du combat social et économique.

Êtes-vous prêt à faire un bout de chemin avec la gauche traditionnelle et les organisations antiracistes, ou bien vos analyses en sont-elles trop éloignées ?

C’est à la gauche, aux forces qui voudraient se battre contre le racisme et une forme de domination raciale d’aller vers les « populations indigénisées » et leurs organisations. Et d’aller vers elles, non pas avec des ultimatums, non pas pour les éduquer ou les rééduquer, pour leur montrer le chemin historique et unique du progressisme et de l’émancipation, mais pour les appuyer, accepter leurs spécificités, reconnaître le caractère fondamental de leurs revendications. C’est donc à la gauche blanche de montrer qu’elle est capable de construire un grand mouvement populaire, qui n’aura de sens aujourd’hui qu’avec les populations issues de l’immigration, en respectant leur autonomie politique et en intégrant leurs revendications. Quant à nous, sans une grande organisation politique, nous ne pourrons jamais négocier des alliances égalitaires. Nous ne voulons plus être les tirailleurs sénégalais d’aucune cause !

Pour tenter d’échapper à l’enfermement et à l’autisme du Blanc, Pierre Tevanian fait l’« l’éloge de la traîtrise » : « Il ne s’agit pas de se détester mais de détester son privilège et le système social qui le fonde. » Un Blanc qui rejoint le combat des Indigènes de la République doit-il être un traître ?

Jean Genet, qui avait le sens des formules qui frappent, s’était déjà défini comme un traître aux Blancs. On lui doit de s’être rangé aux côtés des peuples opprimés, comme les Afro-américains et les Palestiniens. Mais Jean Genet n’était pas un stratège. Il nous faut élaborer une stratégie, être en mesure de distinguer les contradictions et les failles, trouver des points d’appui ou accentuer certaines tensions internes au monde blanc. La société blanche n’est pas une somme d’individualités blanches à convaincre, une à une, de « trahir » leur « camp », mais un ensemble de groupes sociaux. Il nous faut construire un discours qui s’adresse collectivement à des secteurs du monde blanc, pour qu’ils trouvent un intérêt à soutenir notre combat, même si, individuellement, ils ne « détestent » pas leurs privilèges. Pensez-vous que tous les appelés qui ont, sous une forme ou une autre, résisté à la sale guerre menée par la république en Algérie, par exemple, étaient de fervents anticolonialistes ?

Il ne s’agit pas d’exiger des Blancs qu’ils soient des « traîtres », ni de chercher à leur enlever leurs « préjugés », ni d’appréhender les Blancs comme un bloc homogène qui nous serait hostile, par essence, et dont il serait juste possible de détacher quelques uns. Si, aujourd’hui, je me permets des paroles aussi fermes, qui me rendront antipathiques aux yeux de bien des Blancs et des indigènes qui ont peur des Blancs, c’est parce que notre priorité est de nous affirmer. D’être clairs avec nous-mêmes, et de nous organiser.

Propos recueillis par Thierry Leclère.

Extrait du livre de quelle couleur sont les Blancs ?, édition la Découverte



(1) Dans l’émission de télévision Ce soir (ou jamais !) Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des Indigènes de la République (PIR), déclarait le 2 juin 2007 : « […] c’est le reste de la société occidentale, enfin de ce qu’on appelle, nous, les “souchiens” – parce qu’il faut bien leur donner un nom –, les Blancs, à qui il faut inculquer l’histoire de l’esclavage, de la colonisation… » L’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (Agrif), proche de l’extrême droite, lui a intenté un procès pour injure raciale.En première instance, l’Agrif a perdu le procès, et Houria Bouteldja a été relaxée. La partie civile et le parquet ont fait appel. La Cour d’appel de Toulouse a également relaxé Houria Bouteldja.

(2) Le 25 mars 2005, suite à des violences lors de manifestations lycéennes, le mouvement sioniste de gauche Hachomer Hatzaïr et la radio communautaire juive Radio Shalom, ont lancé un « Appel contre les “ratonnades anti-Blancs” », appel soutenu par un certain nombre de personnalités, comme Alain Finkielkraut, Bernard Kouchner ou Jacques Julliard.
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Message  MO2014 Mar 2 Sep - 18:17

Le sionisme expliqué à nos frères et à nos soeurs, par Youssef Boussoumah 1 ère partie :



Le sionisme expliqué à nos frères et à nos soeurs 2 ème partie :


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Message  MO2014 Mer 3 Sep - 21:43

Soutenir les familles palestiniennes, c'est soutenir la résistance pour la libération de la Palestine !
One Family For Gaza. Soutenez une famille palestinienne à Gaza !
Indigènes de la République - Page 10 Logo-PIR-4onefamily1-400x278

“One Family” est une campagne palestinienne à l’attention des Palestiniens, des Arabes et de tous les défenseurs de la cause palestinienne. Cette campagne consiste à mettre en contact directement les solidaires de la Palestine avec les familles de Gaza touchées par la récente agression de l’ennemi sioniste.

Les initiatives d’aide traditionnelles mettant des mois à atteindre les familles de Gaza, la campagne a pour but de leur permettre de recevoir une aide de façon urgente et directe. Vous serez en lien téléphonique et/ ou épistolaire avec une famille et vous pourrez de fait, prendre de ses nouvelles régulièrement.
...
indigenes-republique.fr/one-family-for-gaza-soutenez-une-famille-palestinienne-a-gaza/

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Message  Carlo Rubeo Jeu 4 Sep - 19:05

Les Indigènes de la République c'est pas ceux qui soutiennent les salopards fascistes du Hamas et les pro-mollah du Hezbollah ?
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Message  MO2014 Jeu 4 Sep - 19:09

Rassemblement samedi 6 septembre à 17h, Fontaine des Innocents, Paris

SOLIDARITE FERGUSON – JUSTICE FOR MICHAEL BROWN


Indigènes de la République - Page 10 Ferg-400x228

Afin de manifester notre solidarité suite au meutre de Michael Brown à Ferguson, nous vous invitons à un rassemblement ce Samedi. Ce meurtre n’est pas un cas isolé, il faut savoir que la police tue un noir toutes les 28h aux Etats-Unis. En France les bavures policières sont nombreuses et impunies. Face à ces bavures policières qui n’ont pas frontières, la réisitance doit être internationale. Nous ferons une photo « HANDS UP » pour rendre hommage à notre frère sauvagement assassiné.

Rassemblement samedi 6 septembre à 17h

Fontaine des Innocents, Paris

TOUCH ONE TOUCH ALL

SOLIDARITE FERGUSON

JUSTICE FOR MICHAEL BROWN

NO JUSTICE NO PEACE

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Message  Dinky Jeu 4 Sep - 20:30

Carlo Rubeo a écrit:Les Indigènes de la République c'est pas ceux qui soutiennent les salopards fascistes du Hamas et les pro-mollah du Hezbollah ?

Si. Entre autres joyeusetés progressistes.

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Message  MO2014 Jeu 4 Sep - 21:36

Je ne crois pas que ce communiqué, qui date d'un mois, soit connu ici :

Soutien à Alain Pojolat et à tous les inculpés de la cause palestinienne!
Publié le 30 juillet 2014

Nous apprenons avec indignation l’inculpation d’un frère de lutte, Alain Pojolat (NPA), pour « appel à manifestation interdite ». C’est lui, en effet, qui avait déposé au nom d’un l’ensemble d’organisations, la déclaration en préfecture de deux manifestations qui ont ensuite été interdites, celles des 19 et 26 juillet. 2014.

C’est dans le contexte du soutien réaffirmé de l’État impérialiste français à l’État colonial d’Israël à un niveau rarement atteint sous les IV et Ve républiques que s’inscrit cette nouvelle forfaiture du couple Hollande/Valls. C’est également dans la tentative de criminaliser le mouvement de solidarité avec la Palestine que se situent ces poursuites indécentes contre notre ami.

Non seulement le pouvoir français se compromet dans le massacre en cours à Gaza en apportant un secours politique sans faille à Nétanyahou, non seulement il collabore directement avec l’armée israélienne (notamment dans l’industrie des drones armés), non seulement il permet à près de 8000 réservistes franco israéliens vivant en France ou en Israël de rejoindre l’armée israélienne mais en plus il pousse l’abjection jusqu’à pourchasser, ici, ceux qui réagissent avec dignité et courage à la tentative d’écrasement du peuple palestinien en lutte pour sa liberté, aux images de ces 300 enfants de Gaza broyés par la machine de guerre sioniste .

En France des centaines de manifestations ont eu lieu dans la plus grande sérénité. Seules, celles qui à Paris étaient interdites ont donné lieu à des problèmes.
Car à Paris, lieu du pouvoir, le gouvernement pro sioniste ne peut accepter le merveilleux affront de toutes ces dizaines de milliers de jeunes déferlant des quartiers populaires qui tout en s’affirmant politiquement et en toute indépendance, entendent exprimer aux côtés d’autres citoyens leur solidarité avec nos frères de Palestine. Défiant ainsi les assurances données par Hollande à Netanyahou.

C’est ainsi qu’à l’occasion de ces manifestations injustement interdites ont été arrêtés, souvent violemment, parfois très loin des lieux de manifestations, des dizaines de nos frères et sœurs. Souvent après avoir été traités comme des criminels, insultés, traînés et gardés 24 ou 48 h dans des commissariats, des jeunes femmes et hommes, des mamans, ont été inculpés sans autre preuve que leur faciès.

Comme aux plus beaux jours de la guerre d’Algérie et de Guy Mollet, dans un parfum de 17 octobre, le quartier de Barbès a été le théâtre d’une gigantesque chasse à l’Arabe. Des femmes voilées se sont vues arracher leur voile pour la photo d’identité judiciaire, des familles laissées 48 h sans nouvelles de leurs parents partis manifester. Des jeunes ont subi des tirs de flash ball, le plus souvent dans le dos.

Alain Pojolat, en se joignant courageusement aux nouveaux damnés de la terre n’a fait que son devoir de militant et d’homme. Nous lui apportons notre considération et notre soutien total de même qu’à tous les amis de la Palestine, militants ou sympathisants poursuivis.

Si le régime impérialiste français tente de faire de lui un bouc émissaire pour terroriser  notre mouvement, il doit savoir que c’est en vain. Car en tout état de cause, fidèles à notre engagement, jamais rien ne nous fera abandonner la Palestine martyre et résistante.

Le PIR,
Paris, le 30 juillet 2014

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Message  Duzgun Ven 5 Sep - 0:27

Carlo Rubeo a écrit:les salopards fascistes du Hamas et les pro-mollah du Hezbollah ?
En terme d'analyse politique on a connu plus précis... Laughing
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Message  MO2014 Ven 5 Sep - 19:26

Un communiqué du PIR datant de janvier 2009 et toujours d'actualité.

Nous soutenons Hamas, le Jihad islamique, les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, les Brigades al-Naser Salah ad-Din et les autres forces de la résistance armée, parce que...

1) En massacrant et en blessant des centaines de civils, l'ennemi sioniste tente de terroriser l’ensemble du peuple palestinien, de lui montrer le « coût » de la résistance et de le pousser à la rébellion contre les forces qui refusent de capituler.

2) L’offensive militaire israélienne a pour but de désarmer la résistance et de diviser sa direction pour l’obliger à se soumettre à la stratégie américano-israélienne dans la région.

3) En voulant briser Hamas, le Jihad islamique, les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa et les Brigades al-Naser Salah ad-Din qui sont aujourd’hui l’épine dorsale de la résistance, c’est l’ensemble de la résistance du peuple palestinien que l’ennemi sioniste veut anéantir.

Nous soutenons les forces de la résistance armée palestinienne, parce que...

4) Leur résistance rappelle obstinément à l'ennemi sioniste que jamais le hold-up de 1948 ne sera légitime et que sans résistance il n’y a plus de peuple palestinien.

5-) Ne pas les soutenir explicitement c’est accepter l’idée qu'elles seraient « infréquentables » et illégitimes.

6) Ne pas les soutenir, c’est faire le choix implicite d’une stratégie basée sur la seule négociation, telle qu’elle est portée par Mahmoud Abbas.

7) Ne pas les soutenir, c’est capituler devant les forces qui mettent sur le même plan la violence anticolonialiste des Palestiniens et la violence coloniale de l’Etat d’Israël ; c’est contester la légitimité des Palestiniens à défendre leurs droits par la force des armes.

8-) Ne pas les soutenir, c’est faire profil bas devant les courants islamophobes qui veulent bien soutenir la résistance à condition qu’elle ne soit pas musulmane.

Nous soutenons les forces de la résistance armée palestinienne, parce que...

9) Nous espérons que le mouvement palestinien de libération s’unisse sur la base de la résistance effective à l’ennemi sioniste.

10) Comme d’autres avant nous avaient soutenu les résistances vietnamienne, algérienne et autres, sans s’interroger sur leurs idéologies ou leurs croyances, seule nous importe aujourd’hui la lutte anticoloniale que mènent Hamas, le Jihad islamique et les autres forces de la résistance armée.

11) Dans une guerre coloniale, nous n’hésitons pas : nous sommes toujours aux côtés du peuple colonisé et des forces qui mènent effectivement la résistance.

12) Pour nous l’Etat d’Israël n’est pas sacré. Nous n’avons pas à porter la culpabilité d’un Occident qui a tenté d’exterminer les juifs. Nous nous opposons à Israël en tant qu’état colonial.

Nous soutenons les forces de la résistance armée palestinienne parce que notre anticolonialisme est total !

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Message  Carlo Rubeo Ven 5 Sep - 20:48

Duzgun a écrit:
Carlo Rubeo a écrit:les salopards fascistes du Hamas et les pro-mollah du Hezbollah ?
En terme d'analyse politique on a connu plus précis... Laughing

Bon on allait pas me demander de faire dans la dentelle sur ce coup là non plus Laughing

PIR a écrit:Nous soutenons Hamas, le Jihad islamique, les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, les Brigades al-Naser Salah ad-Din et les autres forces de la résistance armée, parce que...

Bah voilà. Laughing

"et les autres forces de la résistance armée" on appréciera la hiérarchisation ...
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Message  MO2014 Ven 5 Sep - 21:36

Il faut évidemment lire le communiqué cité en entier et ne pas ce contenter de la première phrase.

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Message  Dinky Sam 6 Sep - 0:14

Un communiqué du PIR datant de janvier 2009 et toujours d'actualité.

Nous soutenons Hamas, le Jihad islamique, les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa, les Brigades al-Naser Salah ad-Din et les autres forces de la résistance armée

Apparemment, ce genre d'insanité n'a pas l'air de gêner ici.

Dinky

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