Indigènes de la République
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Re: Indigènes de la République
J'ai écris "politique" et pas "directement politique".Gérard :
Alexis ne sais pas ce dont il parle. Car si "l'islam politique" est présent dans les quartiers, c'est le plus souvent sous formes d'associations socio culturelles, etc. Et pas directement "politique", dans la plupart des cas. Il y a bien des "points de fixations", liées a des mosquées connues pour leurs ouailles "extrémiste", et un imam pas vraiment "progressiste", mais il ne faut pas oublier que les islamistes recrutent en tissant du lien social. Ca devrait bien nous inspirer un peu du point de vue politique (il est permis d'apprendre, même de nos ennemis) mais visiblement les clowns préférent se battre a coup de clavier définitif et révolutionnaire.
D'ailleurs tu le soulignes toi-même juste après :
"mais il ne faut pas oublier que les islamistes recrutent en tissant du lien social. Ca devrait bien nous inspirer un peu du point de vue politique".
OUi, leurs activités sociales ont un but politique.
alexi- Messages : 1815
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: Indigènes de la République
leurs activités sociales ont un but politique
Oh my god, scoooop de la patrouille raciste islamophobe qui vient de découvrir que le social est politique, j'en suis pantelant...
Toute activité sociale est politique, qu'il s'agisse d'aide au devoir ou d'un atelier de pom pom girls.
Et tout investissement de militants dans une activité sociale a le sens d'un militantisme pour leur cause. Il en va ainsi des islamistes comme de staliniens ou autres partis politiques, FN compris.
En revanche le poids réel des militants de l'extrême droite musulmane est largement fantasmé par les racistes, ceux du FMR comme les autres, qui agitent la caricature de "derrière chaque fille voilée il y a un barbu et toute asso musulmane ou à laquelle participent des musulmans est une asso dirigée par des intégristes. C'est un peu comme si je disais que tout syndicat dans lequel il y a des adhérents pcF ou LO est un syndicat LO ou pcF. Heureusement ce n'est pas vrai... Et je dirais même que les islamistes ont moins de poids dans les assos des quartiers populaires que les loïstes dans le mouvement syndical. Dans de nombreux endroits, la précarité a donné naissance à toute une série de trafics dont les animateurs ou les chefs ont certainement plus de poids que les fameux islamistes. Pour la fameuse figure télévisée du "dealer intégriste", voir le sketch de D Debouze... Les assos des mosquées ne sont généralement pas proches du tout des islamistes et des salafistes, et la quasi-totalité des filles voilées leur sont opposées pour des raisons évidentes, elles veulent aller à l'école... Voir à ce sujet 'excellent documentaire "Un racisme à peine voilé".
Ce qui passe, c'est que les islamistes sont présents dans les quartiers populaires dans lesquels ils militent pour une séparation entre les musulmans et le reste de la société, en expliquant que les musulmans ne peuvent pratiquer leur foi dans un pays qui les rejette. Et les propos racistes islamophobes des pouvoirs publics, des différents partis, les politiques de harcèlement, de stigmatisation, de discrimination, les insultes et les menaces, les assimilations humiliantes qui se généralisent, de LO aux Identitaires et aux Charlie Martel, chacun dans sa partition, mais tous se combinant, sont pour les islamistes du pain bénit. Ils illustrent leurs thèses et favorisent leur recrutement, évidemment.
Entre les pseudo-antiracistes mais vrais islamophobes comme LO, les identitaires et les Charles Martel, d'un côté et les intégristes musulmans véritables, il y a un véritable continuum.
L'antiracisme blanc a toujours oscillé entre le paternalisme et la colère lorsque les "potes" ne restent pas à leur place. Les intégristes recueillent les morceaux.
Ce que voulait dire menvussa, c'est que l'EG ferait bien de se tourner vers les quartiers populaires au lieu de les laisser, notamment leur jeunesse révoltée au PS, au FN, et à toutes sortes d'appareils contre-révolutionnaires, parmi lesquels l'extrême droite religieuse ou aux dealers.C'est ce que fait le PIR, avec ses moyens.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
Ton texte est juste à mon avis, tout comme cleui que tu as mis sur l'autre fil, Toussaint.
Pourquoi faut-il que tu sortes toujours des trucs de ce genre ?
Pourquoi faut-il que tu sortes toujours des trucs de ce genre ?
Un Blanc ou un groupe de Blancs ne pourraient-ils pas défendre un véritable anti-racisme de classe, solidaire des plus opprimés ? C'est une caractéristique de la "race blanche" ?L'antiracisme blanc a toujours oscillé entre le paternalisme et la colère lorsque les "potes" ne restent pas à leur place. Les intégristes recueillent les morceaux.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
verié2 a écrit:
Un Blanc ou un groupe de Blancs ne pourraient-ils pas défendre un véritable anti-racisme de classe, solidaire des plus opprimés ? C'est une caractéristique de la "race blanche" ?
Que veux-tu, c'est là que réside un des nombreux essentialismes pir-istes ...
Carlo Rubeo- Messages : 249
Date d'inscription : 03/06/2012
Re: Indigènes de la République
Toussaint :
Pour répondre au sectateur stalinien, le curseur s'est fortement déplacé à droite.
En l'occurence je ne découvre rien, c'est Gérard qui semblait l'ignorer.Oh my god, scoooop de la patrouille raciste islamophobe qui vient de découvrir que le social est politique, j'en suis pantelant...
En revanche le poids réel des militants de l'extrême droite musulmane est largement fantasmé par les racistes, ceux du FMR comme les autres,
Pour répondre au sectateur stalinien, le curseur s'est fortement déplacé à droite.
Le PIRE qui combattrait l'extrême-droite religieuse tout en l'encensant ?Ce que voulait dire menvussa, c'est que l'EG ferait bien de se tourner vers les quartiers populaires au lieu de les laisser, notamment leur jeunesse révoltée au PS, au FN, et à toutes sortes d'appareils contre-révolutionnaires, parmi lesquels l'extrême droite religieuse ou aux dealers.C'est ce que fait le PIR, avec ses moyens.
Dernière édition par alexi le Ven 23 Jan - 20:23, édité 1 fois
alexi- Messages : 1815
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: Indigènes de la République
Sur un autre post également, Toussaint, l'agent des partisans du piolet, réfute et considére comme raciste et anti-marxiste l'expression "d'origine juive", toujours fréquente de nos jours parmi les personnes concernées.Toussaint :
Au passage nous revoici avec "les français d'origine juive", ce qui montre que dans l'esprit de la secte raciste, les juifs ne sont pas français, ou au minimum que le judaïsme est étranger à la France puisque l'origine juive est mise sur le même plan que l'origine "maghrébine ou africaine", qui évoque en effet un lieu géographique étranger à la France. Le judaïsme est donc par essence un lieu dont sortent les juifs français. Pauvres saLOpards, décidément le racisme ne se divise pas... et lorsqu'ils se disent fièrement judéophobes il convient de les prendre au mot.
Une expression que l'on retrouve aussi chez Trosky le social-fasciste (et bien d'autres):
Le drame sur Brest-Litovsk
9 décembre 1930
Un seul exemple: je me souviens par hasard que, dans mon livre sur la littérature, j'avais écrit, à propos d'un esthète d'origine juive russe nommé Andreï Levinson, que la moindre puce d'un paysan russe valait mieux que le ramassis esthético-éthique qu'il appelle "culture".
Elle est en tout cas inconséquente avec le but marxiste.
Ensuite, petit tour de passe-passe, toute idée religieuse est une idée de droite. Pauvres ignorants,
Dieu est l'asile de l'ignorance.
Non, tout bien pesé il y a deux "NOUS" ou alors cet Appel n'est pas très claire.Bien essayé mais raté. Il y a un seul "nous" qui agglomère et ajoute les différentes composantes concernées par l'Appel. Sinon, évidemment on ne pourrait être blanc depuis les croisades et faire partie des Indigènes, et le texte a été pesé ligne à ligne, mot à mot, je le sais, j'étais dans le MAI de Lille au moment de la création des Indigènes, au CEPT...
Dernière édition par alexi le Jeu 22 Jan - 21:10, édité 1 fois
alexi- Messages : 1815
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: Indigènes de la République
Pour les posts du raciste alexi, je n'ai pas à répondre, la sottise est une des composantes de son sectarisme et de son racisme, une vraie illustration de tout ce que je peux dire de pire sur sa secte, une leçon de choses. Que cela ne le décourage pas de citer d'autres élaborations théoriques de sa secte, en plus d'être amusant, ce sont toujours d'excellentes illustrations de mon analyse de la nature de LO...
Si, évidemment, parce que ce n'est pas une question de race biologique et tu le sais très bien, comme un homme comme Martin Dufresne développe à mon avis des positions et des analyses féministes.
Je vais te prendre un exemple avec le dernier livre de Plenel sur les musulmans, bien écrit, très émouvant par moments, mais qui ne pourrait en aucun cas être écrit par des noirs ou des arabes ou des musulmans ou autres catégories discriminées, racialisées. Par exemple, à plusieurs moments il dit "nous... à l'égard des noirs, des arabes, des musulmans, etc..." Si les mots ont un sens le "nous" ne renvoie pas à des noirs ou des arabes, qui n'ont pas manqué d'empathie à l'égard d'eux-mêmes. Et je ne reproche rien à Plenel, il écrit de son point de vue, et il est à la fois honnête et convaincant, mais il développe son antiracisme blanc, c'est évident. Je n'ai rien contre les blancs ni contre les hommes, je suis un homme blanc, mais j'ai l'avantage d'en savoir les implications lorsque de racisme ou de sexisme ou de revendications des catégories de la société racialisées il s'agit. Et je ne comprends pas pourquoi on dit que la classe ouvrièe n'est pas monolithiquement homogène pour ensuite dans la pratique récuser toutes les différenciations en son sein, y compris celles qui se mesurent matériellement sur le terrain de l'exploitation. Je ne vois pas pourquoi on refuse de prendre en compte les diversités de cultures, de nation et de religion, et encore moins comment au nom de l'unité de la classe on peut ne pas être vent debout contre les discriminations et les harcèlements qui frappent spécifiquement certains groupes de notre classe en fonction du racisme ou des préjugés religieux, culturels ou nationaux.
Je persiste à ne pas comprendre la fureur qui saisit certains au nom de l'unité de la classe lorqu'on déclare qu'à oppression spécifique doit correspondre une organisation spécifique, nullement opposée aux structures d'auto-organisation de la classe mais qui permet justement d'imposer la prise en compte de la lutte contre les discriminations. Il y a eu des choix des partis de gauche et d'EG, et le slogan "travailleurs français-immigrés, même patron, même combat" qui se voulait antiraciste, ne répondait pas à la situation de racisme existant y compris dans la classe ouvrière, et dans ses principales organisations, PCF et CGT compris, pour des tas de raisons et des tas de pratiques, de prises de position depuis très longtemps. Lorsque le PIR dit que l'antiracisme blanc est essentiellement moral; ils ont raison, et lorsqu'ils disent qu'ils croient en l'auto-organisation des immigrés et des victimes de la racialisation du champ politique, du racisme structurel de la république française, ils ont raison. Ce n'est pas par hasard que la très grande majorité des salariés blancs, même très à gauche, se retrouvent presque aussitôt gênés dès qu'ils se trouvent face à des revendications nationales en Guyane. La classe ouvrière et ses organisations ne devraient rien avoir à craindre de l'expression de la revendication des discriminés racialement.
Il n'est que de voir la modification des rapports entre le PIR et le NPA qui se retrouvent de plus en plus souvent sur des combats et désignés à la haine des racistes et des républicains de tout poil. Je me souviens d'Aguirre disant qu'il lui semblait incroyable de voir la LCR s'associer à une campagne de stigmatisation des musulmanes pratiquantes alors qu'elle n'avait presque pas de militants de culture arabo-musulmane... Aguirre ne disait pas autre chose que ce que constatait à la même époque Sadri dans la Ligue. Cela a débouche sur l'analyse du champ politique blanc, qui me paraît la seule à même d'expliquer certains phénomènes. Et cela explique aussi, je suis très désolé de te le dire, toi qui es si prudent dans tes jugements, ton attaque contre le PIR carrément scandaleuse l'autre jour, avec tous les clichés ou presque de la patrouille islamophobe sur le PIR, à coup de glissements sémantiques. Cela explique surtout la façon dont tu prends l'adjectif blanc pour une insulte raciste, alors que parler de noirs est assez courant et ne correspond strictement à rien de précis d'un point de vue physique. Il y a des racistes blancs anti-noirs qui sont nettement plus foncés de peau que bien des "noirs".
Le PIR voit que la caractérisation de groupes entiers correspond de fait à des essentialisaions racialisantes héritées de l'époque coloniale et revouvelées constamment, en particulier par le caractère inachevé de la décolonisation, par les guerres impériales et la recolonisation en cours, par la propagande raciste cherchant des boucs émissaires et la constitution de véritables castes au sein même de la classe ouvrière sur des bases culturelles, physiques, nationales ou religieuses. Le PIR constate que l'EG et le mouvement ouvrier se sont bornés à des positions humanistes et morales, alors qu'il faut mettre en mouvement les discriminés contre les discriminations qu'ils subissent. Ce n'est pas un hasard si le PIR est né des luttes des sans papiers et des luttes de l'immigration, mais aussi que sa création a suivi la bataille du voile, un an après la loi. Mais aussi après le reflux de la solidarité avec la Palestine et la quasi disparition du mouvement anti-guerre (largement consécutives de la campagne islamophobe du voile). Le bilan de SOS, les saletés autour de NPNS, tout cela s'est cumulé pour déboucher sur la nécessité de construire un mouvement antiraciste différent.
Franchement lorsqu'on a vécu le défilé du 6 mars 2004 avec les pressions physiques des NPNS, les insultes racistes, xénophobes et sexistes tout au long du cortège visant nos camarades voilées, parfois les menaces physiques (je sais de quoi je parle, j'étais dans le SO improvisé du CEPT), lorsqu'on a vu Arlette au bras de la ministre des prisons de Chirac et de la future ministre de Sarkozy contre les filles voilées, lorsque l'on voit OB demander aux élèves voilées, dans un débat l'opposant à Marine Le Pen, d'enlever leur foulard "au nom du vivre ensemble" (sic...), et j'en passe, lorsqu'on a vu des dirigeants d'EG sonner la charge en excluant leurs propres élèves parce que voilées en les désignant comme des menaces pour l'ensemble des lycéennnes, lorsqu'on a des tracts d'orgas d'EG invitant à "arracher leur voile" aux musulmanes dans la rue, juste avant le 6 Mars 2004, on n'oublie pas facilement, on n'oublie pas facilement. Lorsqu'on se fait réduire au silence, voire exclure de la LCR parce qu'on a intégré une femme voilée, lorsqu'on entend un dirigeant dire dans une AG régionle de la Ligue que "lorsqu'une musulmane met le voile, c'est qu'elle entame la guerre de conquête" sans que cela scandalise personne parmi les anti-voile présents, définitivement, vérié, on sait qu'il y a peu à attendre de l'EG pour la défense des droits réels, pas abstraits, des musulmans et des autres racialisés. Et on en tire les conséquences, évidemment, en se disant qu'il faut être indépendant de ces gens-là.
Quand la réaction à la création des Indigènes est un torrent d'injures (parfois dans le même journal qu'un article encensant le dirigeant musulman noir américain Malcolm X, comble de la tartufferie), on se dit qu'il était vraiment temps qu'arrive un tel mouvement, et j'en suis toujours convaincu. En tout cas contrairement à ce qui se disait, ils ne sont pas partis derrière Dieudonné (ce qui faisait partie des accusations en 2005 alors qu'il avait été viré du cortège du 8 mai 2005) ou je ne sais quelle extrême droite religieuse (comme dit l'autre crétin), et ils ne rechignent pas à s'allier avec le NPA ou d'autres du moment que les bases sont claires.
Un Blanc ou un groupe de Blancs ne pourraient-ils pas défendre un véritable anti-racisme de classe, solidaire des plus opprimés ? C'est une caractéristique de la "race blanche" ?
Si, évidemment, parce que ce n'est pas une question de race biologique et tu le sais très bien, comme un homme comme Martin Dufresne développe à mon avis des positions et des analyses féministes.
Je vais te prendre un exemple avec le dernier livre de Plenel sur les musulmans, bien écrit, très émouvant par moments, mais qui ne pourrait en aucun cas être écrit par des noirs ou des arabes ou des musulmans ou autres catégories discriminées, racialisées. Par exemple, à plusieurs moments il dit "nous... à l'égard des noirs, des arabes, des musulmans, etc..." Si les mots ont un sens le "nous" ne renvoie pas à des noirs ou des arabes, qui n'ont pas manqué d'empathie à l'égard d'eux-mêmes. Et je ne reproche rien à Plenel, il écrit de son point de vue, et il est à la fois honnête et convaincant, mais il développe son antiracisme blanc, c'est évident. Je n'ai rien contre les blancs ni contre les hommes, je suis un homme blanc, mais j'ai l'avantage d'en savoir les implications lorsque de racisme ou de sexisme ou de revendications des catégories de la société racialisées il s'agit. Et je ne comprends pas pourquoi on dit que la classe ouvrièe n'est pas monolithiquement homogène pour ensuite dans la pratique récuser toutes les différenciations en son sein, y compris celles qui se mesurent matériellement sur le terrain de l'exploitation. Je ne vois pas pourquoi on refuse de prendre en compte les diversités de cultures, de nation et de religion, et encore moins comment au nom de l'unité de la classe on peut ne pas être vent debout contre les discriminations et les harcèlements qui frappent spécifiquement certains groupes de notre classe en fonction du racisme ou des préjugés religieux, culturels ou nationaux.
Je persiste à ne pas comprendre la fureur qui saisit certains au nom de l'unité de la classe lorqu'on déclare qu'à oppression spécifique doit correspondre une organisation spécifique, nullement opposée aux structures d'auto-organisation de la classe mais qui permet justement d'imposer la prise en compte de la lutte contre les discriminations. Il y a eu des choix des partis de gauche et d'EG, et le slogan "travailleurs français-immigrés, même patron, même combat" qui se voulait antiraciste, ne répondait pas à la situation de racisme existant y compris dans la classe ouvrière, et dans ses principales organisations, PCF et CGT compris, pour des tas de raisons et des tas de pratiques, de prises de position depuis très longtemps. Lorsque le PIR dit que l'antiracisme blanc est essentiellement moral; ils ont raison, et lorsqu'ils disent qu'ils croient en l'auto-organisation des immigrés et des victimes de la racialisation du champ politique, du racisme structurel de la république française, ils ont raison. Ce n'est pas par hasard que la très grande majorité des salariés blancs, même très à gauche, se retrouvent presque aussitôt gênés dès qu'ils se trouvent face à des revendications nationales en Guyane. La classe ouvrière et ses organisations ne devraient rien avoir à craindre de l'expression de la revendication des discriminés racialement.
Il n'est que de voir la modification des rapports entre le PIR et le NPA qui se retrouvent de plus en plus souvent sur des combats et désignés à la haine des racistes et des républicains de tout poil. Je me souviens d'Aguirre disant qu'il lui semblait incroyable de voir la LCR s'associer à une campagne de stigmatisation des musulmanes pratiquantes alors qu'elle n'avait presque pas de militants de culture arabo-musulmane... Aguirre ne disait pas autre chose que ce que constatait à la même époque Sadri dans la Ligue. Cela a débouche sur l'analyse du champ politique blanc, qui me paraît la seule à même d'expliquer certains phénomènes. Et cela explique aussi, je suis très désolé de te le dire, toi qui es si prudent dans tes jugements, ton attaque contre le PIR carrément scandaleuse l'autre jour, avec tous les clichés ou presque de la patrouille islamophobe sur le PIR, à coup de glissements sémantiques. Cela explique surtout la façon dont tu prends l'adjectif blanc pour une insulte raciste, alors que parler de noirs est assez courant et ne correspond strictement à rien de précis d'un point de vue physique. Il y a des racistes blancs anti-noirs qui sont nettement plus foncés de peau que bien des "noirs".
Le PIR voit que la caractérisation de groupes entiers correspond de fait à des essentialisaions racialisantes héritées de l'époque coloniale et revouvelées constamment, en particulier par le caractère inachevé de la décolonisation, par les guerres impériales et la recolonisation en cours, par la propagande raciste cherchant des boucs émissaires et la constitution de véritables castes au sein même de la classe ouvrière sur des bases culturelles, physiques, nationales ou religieuses. Le PIR constate que l'EG et le mouvement ouvrier se sont bornés à des positions humanistes et morales, alors qu'il faut mettre en mouvement les discriminés contre les discriminations qu'ils subissent. Ce n'est pas un hasard si le PIR est né des luttes des sans papiers et des luttes de l'immigration, mais aussi que sa création a suivi la bataille du voile, un an après la loi. Mais aussi après le reflux de la solidarité avec la Palestine et la quasi disparition du mouvement anti-guerre (largement consécutives de la campagne islamophobe du voile). Le bilan de SOS, les saletés autour de NPNS, tout cela s'est cumulé pour déboucher sur la nécessité de construire un mouvement antiraciste différent.
Franchement lorsqu'on a vécu le défilé du 6 mars 2004 avec les pressions physiques des NPNS, les insultes racistes, xénophobes et sexistes tout au long du cortège visant nos camarades voilées, parfois les menaces physiques (je sais de quoi je parle, j'étais dans le SO improvisé du CEPT), lorsqu'on a vu Arlette au bras de la ministre des prisons de Chirac et de la future ministre de Sarkozy contre les filles voilées, lorsque l'on voit OB demander aux élèves voilées, dans un débat l'opposant à Marine Le Pen, d'enlever leur foulard "au nom du vivre ensemble" (sic...), et j'en passe, lorsqu'on a vu des dirigeants d'EG sonner la charge en excluant leurs propres élèves parce que voilées en les désignant comme des menaces pour l'ensemble des lycéennnes, lorsqu'on a des tracts d'orgas d'EG invitant à "arracher leur voile" aux musulmanes dans la rue, juste avant le 6 Mars 2004, on n'oublie pas facilement, on n'oublie pas facilement. Lorsqu'on se fait réduire au silence, voire exclure de la LCR parce qu'on a intégré une femme voilée, lorsqu'on entend un dirigeant dire dans une AG régionle de la Ligue que "lorsqu'une musulmane met le voile, c'est qu'elle entame la guerre de conquête" sans que cela scandalise personne parmi les anti-voile présents, définitivement, vérié, on sait qu'il y a peu à attendre de l'EG pour la défense des droits réels, pas abstraits, des musulmans et des autres racialisés. Et on en tire les conséquences, évidemment, en se disant qu'il faut être indépendant de ces gens-là.
Quand la réaction à la création des Indigènes est un torrent d'injures (parfois dans le même journal qu'un article encensant le dirigeant musulman noir américain Malcolm X, comble de la tartufferie), on se dit qu'il était vraiment temps qu'arrive un tel mouvement, et j'en suis toujours convaincu. En tout cas contrairement à ce qui se disait, ils ne sont pas partis derrière Dieudonné (ce qui faisait partie des accusations en 2005 alors qu'il avait été viré du cortège du 8 mai 2005) ou je ne sais quelle extrême droite religieuse (comme dit l'autre crétin), et ils ne rechignent pas à s'allier avec le NPA ou d'autres du moment que les bases sont claires.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
Tiens, la secte stalinienne ethno-communautariste bouge encore ?!Toussaint :
Pour les posts du raciste alexi, je n'ai pas à répondre, la sottise est une des composantes de son sectarisme et de son racisme, une vraie illustration de tout ce que je peux dire de pire sur sa secte, une leçon de choses. Que cela ne le décourage pas de citer d'autres élaborations théoriques de sa secte, en plus d'être amusant, ce sont toujours d'excellentes illustrations de mon analyse de la nature de LO... Very Happy
alexi- Messages : 1815
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: Indigènes de la République
Cela a toujours ou presque était le cas des salariés blancs des pays coloniaux et des "expatriés". Ils tirent de toute évidence des avantages directs de la situation coloniale et en sont conscients. Un copain expatrié me racontait qu'il avait été mis au banc de la communauté française parce qu'il refusait de prendre un "boy"...Toussaint
Ce n'est pas par hasard que la très grande majorité des salariés blancs, même très à gauche, se retrouvent presque aussitôt gênés dès qu'ils se trouvent face à des revendications nationales en Guyane.
La situation des travailleurs français de métropole, quelle que soit leur couleur, est différente...
Aucune fureur ne me saisit, en ce qui me concerne. C'est un problème tactique qui se discute. Trotsky, comme cela a été dit maintes fois sur ce forum, n'était pas opposé à la création d'organisations noires. Le PC, avant guerre avait créé des organisations spécifiques pour les travailleurs immigrés, dont est par exemple sorti la MOI pendant la guerre.Je persiste à ne pas comprendre la fureur qui saisit certains au nom de l'unité de la classe lorqu'on déclare qu'à oppression spécifique doit correspondre une organisation spécifique, nullement opposée aux structures d'auto-organisation de la classe
Ce n'est donc pas une question de principe. Mais tout dépend dans quelles circonstance et qui crée et dirige ces organisations, sur quelles positions, si leur but final est d'unir les travailleurs ou seulement de se constituer une base sociale qui leur serve de tremplin - ce qui arrive souvent aux Etats unis par exemple.
En ce qui concerne, le PIR, un certain nombre de ses positions sont critiquables, ce qui n'interdit pas de se retrouver à ses côtés, par exemple lors des manifs contre les bombardements de Gaza. Le renvoyer dos à dos avec le FN est bien évidemment calomniateur et ridicule.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
si leur but final est d'unir les travailleurs
Ben, c'est assez clair dans les textes du PIR... Sauf que le reproche qu'on leur fait est d'exister et de se constituer en force indépendante des autres forces qui interviennent dans la jeunesse et la classe ouvrière. Comme dit Houria, pour s'allier, il faut exister, ou alors ce n'est plus une alliance mais une soumission.
Ensuite et surtout, je suis désolé, beaucoup de travailleurs blancs en Europe sont très conscients de leur avantage d'être blancs. Et le patronat (je me souviens de Calvet par exemple), joue dessus, comme par exemple la fonction publique interdite aux étrangers, les débats sur la CMU, les allocs, et tout ce qu'on entend au quotidien même dans la classe, même dans les milieux militants syndicaux et pas forcément d'ailleurs chez les moins combattifs. Perso, cela fait quelque temps que je ne l'entends plus directement, mais j'ai de nombreux souvenirs...
Autre chose, sur les blancs, vérié, ce n'est pas une question de race biologique, mais par exemple les arabes sont blancs, et les nord-africains sont souvent blonds ou roux. Cela ne les empêce nullemet d'être des "gris", pas noirs mais pas blancs non plus. Le blanc est une caractérisation politique, comme les noirs ou les arabes, etc...
Et on s'y trouve placé à son corps défendant, on jouit d'avantages au quotidien à son corps défendant. Moi, dans le métro ou dans la rue, je n'ai jamais été demander à être contrôlé par la police. Et il y a infiniment plus d'exemples, comme la discrimination à l'embauche, que personne ne peut ignorer, ou sur le logement: il y a des gens qui bénéficient de cela, notamment celles et ceux qui, eux, sont embauchés ou arrivent à louer en dehors des ghettos en prenant la place d'un racialisé. Ce sont là des processus objectifs qui divisent effectivement la classe ouvrière et qui engendrent en effet des conséquences sur la conscience des uns et des autres, le nier est une affaire de mauvaise foi. Quant à la réponse, encore une fois, celle donnée depuis 40 ans par le mouvement ouvrier et même l'EG n'a pas répondu au problème voire a contribué à l'aggraver comme on l'a vu dans les affaires du voile à plusieurs reprises, comme on le voit aujourd'hui avec le droit à l'insulte et au mépris sur la classe que s'octroient des groupes gangrenés par les préjugés religieux, de caste, le racisme. Des groupes dirigés souvent par des enseignants et des fonctionnaires ou assimilés qui soutiennent la répression sur des groupes stigmatisés pour leur religion, leurs traditions, leur culture, leur origine géographique, etc...
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
En ce qui concerne, le PIR, un certain nombre de ses positions sont critiquables
On peut en dire autant de tous les partis, mais la haine et les accusations totalement gratuites de communautarisme, de vouloir profiter de la base naïve, etc... cela ne devrait pas faire partie des débats. Un type comme Saïd serait bien plus à son aise s'il avait accepté de mettre de l'eau dans son vin et en particulier dans une région comme Lille et Roubaix où le pouvoir cherche à capter les "élites indigènes" par des tas de propositions alléchantes comme Saïd le dénonce fréquemment. Insinuer comme je l'ai vu ici que des gens comme lui et pas seulement lui cherchent à faire leur beurre sur le dos des indigènes est abject, le PIR, ce n'est pas la CGT ou la CFDT ou FO... Ou alors il faut le prouver. Sinon, c'est du racisme blanc.
Le PCF a depuis longtemps les mains sanglantes et le Mélenchon est un pro-impérialiste patenté, son parti aussi. Le soutien aux interventions militaires françaises se base sur la défense des intérêtes de "la France", ce qui montre assez son rapport aux anciennes colonies et aux peuples d'Afrique, entre autres. Sans parler de tout le reste, évidemment, mais cela ne le frappe pas d'infamie et ne lui vaut pas d'insultes, on a même vu les racistes défendre le PC et le FDG des attaques de Roseau, en passant par pertes et profits son soutien au colonialisme français. Mais les Indigènes, que d'insultes, que de haine et de calomnies. Evidemment, les explications à cette différence de traitement sautent aux yeux.
Encore une fois, le PIR est né des errances de l'EG et du mouvement ouvrier sur les questions du racisme et du post-colonialisme, de leur complicité réitérée avec des campagnes, des thèmes et des théses racistes, et cela n'a pas concerné que LO: si sur le voile, le PCF a été moins pourri que la secte (il a quand même une autre présence dans certains quartiers populaires encore), sur d'autres questions il a été pire. Mais personne ici ne reconnaît que la réaction de l'EG à l'Appel et aux marches des Indigènes a été lamentable. C'est le syndrome des saLOs et des stals, ils ont toujours eu raison, ce sont les autres, et notamment le peuple rétif qui a tort. L'Appel était ouvert et tout le monde était bienvenu... quelle haine en retour! Evidemment que cela laisse des traces et que cela ne vient pas du hasard, encenser Malcolm X et faire la chasse aux filles voilées et insulter les Indigènes ici ne relève pas du hasard, mais personne ne semble pressé de me donner une autre analyse que celle de Sadri, au contraire, on voit les mêmes insultes et calomnies continuer, pas seulement de la patrouille islamophobe, mais même de gens qui devraient savoir mieux pourtant.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
L'avantage de ta rhétorique entre blancs nécessairement racistes et colorés c'est de pouvoir exprimer des conneries ; toute réponse sera immédiatement retoquée pour racisme conscient ou inconscient.Toussaint a écrit:Ce n'est pas par hasard que la très grande majorité des salariés blancs, même très à gauche, se retrouvent presque aussitôt gênés dès qu'ils se trouvent face à des revendications nationales en Guyane. La classe ouvrière et ses organisations ne devraient rien avoir à craindre de l'expression de la revendication des discriminés racialement.
Ainsi de cette réflexion qui vaut son pesant de cacahuètes : se retrouvés gênés face à des revendications nationales, exprimant ainsi un racisme. Il en va tout autant des revendications nationalistes corses, bretonnes, alsaciennes ou bien savoyardes : une même gêne. Doit-on y voir une expression raciste ?
Tes interventions sont d'une imbécillité rare dès lors que tu t'aventures sur ce terrain foireux de la division des travailleurs selon leur couleur car il s'agit bien de cela. Dommage car à l'instar du PIR, le message se brouille très vite et le fond se transforme en forme et inversement. Pas un contradicteur qui ne soit taxé de racisme, de soutien à son propre impérialisme ou d'islamophobie. Tu me donnes la nausée !!
Eugene Duhring- Messages : 1705
Date d'inscription : 22/09/2011
Re: Indigènes de la République
colorés
gênés face à des revendications nationales, exprimant ainsi un racisme
Un chauvinisme grand-français, dirait Lénine, et je dirais un sentiment de supériorité de grande puissance coloniale, ce qui est la matrice du racisme, celui-ci ne vient pas de la rencontre de "l'autre" comme le disent les bourgeois, mais du besoin de justifier la domination, l'appropriation et l'exploitation.
Je ne te retiens pas de vomir, militant du pcF mais il est amusant de voir que tu ne vomis pas devant les positions de ton parti complice actif de l'impérialisme et du colonialisme français, et plus souvent qu'à son tour du racisme bien classique.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
On reconnaît là l'esprit didactique de l'instituteur ou du professeur. Je suppose que le F de pcF renvoit à Français. Belle leçon didactique, au cas où cela aurait échappé à quelqu'un que PCF veut dire Parti communiste Français.Toussaint a écrit:colorésgênés face à des revendications nationales, exprimant ainsi un racisme
Un chauvinisme grand-français, dirait Lénine, et je dirais un sentiment de supériorité de grande puissance coloniale, ce qui est la matrice du racisme, celui-ci ne vient pas de la rencontre de "l'autre" comme le disent les bourgeois, mais du besoin de justifier la domination, l'appropriation et l'exploitation.
Je ne te retiens pas de vomir, militant du pcF mais il est amusant de voir que tu ne vomis pas devant les positions de ton parti complice actif de l'impérialisme et du colonialisme français, et plus souvent qu'à son tour du racisme bien classique.
Merci Maître.
Sinon je reprends naturellement l'usage du mot coloré pour être dans le ton des discussion sur le PIR et avec toi. Quel mot pourrais-je emprunter pour dénoncer la racialisation de vos réflexions ? Je suis prêt à l'entendre.
Eugene Duhring- Messages : 1705
Date d'inscription : 22/09/2011
Re: Indigènes de la République
l'usage du mot coloré pour être dans le ton des discussion sur le PIR et avec toi.
Nice try... Non, tu ne trouveras pas des catégories de ce genre chez les Indigènes parce que notamment ils ne pensent pas que le blanc n'est pas une couleur, contrairement à toi, à l'évidence Ils parlent de racialisés, ce qui correspond très exactement à ce que tu fais. Donc, en fait, je pense que nous n'avons rien à discuter, nous sommes des ennemis.
l'esprit didactique de l'instituteur ou du professeur. Je suppose que le F de pcF renvoit à Français.
En effet, en effet, merci de l'avoir explicité, et oui, prof et pas si honteux de mon travail même dans une des institutions les plus discriminantes de cette république colonialiste raciste de merde. Il y a longtemps que le pcF est devenu un parti chauvin patriote d'une grande puissance impérialiste et colonialiste, vendu au capital.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
Le colonialisme expliqué à Fourest
Publié le 29 janvier 2015 par Sadri Khiari, membre du PIR
Caroline Fourest ignore à peu près tout du colonialisme. Cela n’a rien de répréhensible en soi mais représente un foutu problème quand on se mêle de dénoncer sur le ton de l’évidence les avis contraires au sien. Ce qui met Fourest dans tous ses états, c’est deux choses : lorsqu’on souligne la persistance des rapports coloniaux à l’époque actuelle et lorsqu’on dénonce la dimension coloniale de l’« influence » culturelle européenne.
Pour elle, la colonisation, c’est l’occupation d’un territoire, occupation de peuplement, militaire ou administrative. Ce qui lui permet d’affirmer, par exemple, que « la République est loin d’avoir inventé le principe de l’expansion coloniale. L’un des plus grands impérialistes de l’époque récente reste l’Empire ottoman ». Cette définition de la colonisation se distingue à peine des acceptions vulgaires qui confondent, un peu comme la nuit où tous les chats sont gris, les multiples formes historiques d’expansion territoriale armée, voire les simples mouvements de populations. La notion de colonisation recouvrirait ainsi un sens générique, naturaliste, qui permet à la fois de parler de colonies d’oiseaux sur une île de l’archipel de Mingan dans le golfe du Saint-Laurent, de la colonisation des continents asiatiques et européens par l’Homo sapiens au détriment de l’homme du Néandertal, des empires coloniaux de l’Antiquité, des empires chinois, musulman ou russe, des colonialismes espagnol, hollandais, britannique ou français et même de colonisation de l’Europe par les hordes immigrées du Tiers monde. En s’appuyant sur une telle définition, on ne peut évidemment saisir les mouvements historiques de l’humanité. On en arrive également à déduire qu’une fois le territoire colonisé parfaitement pacifié, la colonisation réellement ou en apparence irréversible, ou alors l’occupant renvoyé sur ses territoires d’origine, il deviendrait anachronique de parler encore de colonisation.
Occupation de territoires et rapports sociaux coloniaux
Utilisée dans une acception aussi générale, la notion de colonisation interdit d’appréhender, autrement que de manière strictement descriptive, les rapports de pouvoirs spécifiques qui constituent la réalité de chaque phénomène colonial, c’est-à-dire la forme particulière d’organisation de la société humaine, la totalité sociale, qui procède ou s’accomplit à travers lui. Il est, bien sûr, d’autres notions qui sont employées dans un sens général a-historique qui gomme les différences entre les sociétés et les époques. Ainsi de l’État qui, au moins dans le sens commun, recouvre toute forme d’autorité plus ou moins centralisée, ou des catégories comme « capital », « échange », « marchandise », « économie », « travail », « prolétariat », etc., que l’on pense trop souvent encore comme anhistoriques et universelles. Il en va de même de la notion d’esclavage. Un esclave est réputé être un être humain qui aurait perdu sa « liberté naturelle » pour devenir « propriété » d’autrui. À partir de cette définition, on peut à loisir universaliser l’esclavage et, par exemple, assimiler l’esclavage grec, l’esclavage musulman, l’esclavage dans les sociétés africaines précoloniales et l’esclavage de type américain, alors que les rapports de pouvoirs que recouvraient ces phénomènes et qui pouvaient éventuellement se dire dans les termes de « liberté », de « propriété », d’« esclaves », n’étaient pas identiques dans les trois moments historiques que j’ai évoqués. Tout cela peut sembler très banal. Dans les études grecques, pour citer cet exemple, on a pris soin depuis longtemps de ne pas penser les relations esclavagistes à partir de concepts généraux vaguement descriptifs. Et ça ne gêne personne. Par contre, dès qu’il est question de la colonisation et de l’esclavage européens, à partir du XVe siècle, il deviendrait proprement scandaleux de souligner les disparités historiques majeures qui sous-tendent les différentes formes de colonisation ou d’esclavage. Il faudrait absolument dissoudre sinon la réalité du moins la particularité de la colonisation et de l’esclavage européens dans une inclination universelle de l’Homme (non-Moderne !) à s’emparer de nouveaux territoires et à soumettre son voisin. Il s’agit surtout d’ailleurs d’incriminer ceux qui ont été les victimes de la colonisation et de l’esclavage européens, sur le thème classique : « Commencez par balayer devant votre porte ! » C’est évidemment l’un des arguments de Caroline Fourest. Ainsi, reproche-t-elle à la plateforme d’action adoptée par les États à la conférence de Durban en 2001 de s’appesantir « sur la traite transatlantique, dans l’espoir d’obtenir des réparations financières, au risque d’esquiver la responsabilité de certains négriers noirs ou arabes.» Sainte Caroline aime bien les Noirs. Du moins, quand il s’agit de les opposer aux Arabes. Elle est d’ailleurs d’une extrême prudence lorsqu’elle en parle. Parfois, cependant, elle laisse échapper une remarque qui révèle ses sentiments véritables. Ainsi, regrettant que la « nouvelle Afrique du Sud » ait refusé de recevoir le dalaï-lama, elle y voit la « preuve d’un cynisme auquel nous ont hélas habitués certains pays se revendiquant du tiers-mondisme.» Diantre ! Une fois les nègres au pouvoir, le naturel indigène revient au galop ! Les États européens, eux, n’ont bien sûr jamais été cyniques.
Reprenons. Dans son pamphlet contre Ramadan, elle déplore également que « la colonisation musulmane ou la participation active des pays arabes à l’esclavage ne (soient) jamais abordées au profit d’une culpabilisation intense des Occidentaux ». La question n’est pourtant pas dans le degré de « culpabilité » des uns et des autres. Il n’y a en effet aucune pertinence à construire une hiérarchie des « culpabilités » entre l’« Orient » et l’« Occident », surtout en comparant des phénomènes peu comparables. S’il est justifié aujourd’hui de prendre une position politique et éthique à l’encontre de la traite transatlantique, dans le cadre d’un combat anticolonial ou décolonial, c’est que celui-ci, soixante ans après la conquête des « indépendances politiques », demeure d’actualité en raison des drames qu’engendre à l’époque contemporaine la permanence des rapports coloniaux-raciaux instaurés par le développement historique de l’Occident, dont la déportation des Noirs aux Amériques et leur réduction en esclavage constituent un moment fondamental.
Il n’est pas possible, ici, de m’étendre sur ces sujets sinon pour souligner rapidement ce qui fait l’immense différence entre la colonisation et l’esclavage européen et la dite « colonisation musulmane » ainsi que la traite transsaharienne ou l’implication d’Africains noirs dans le commerce esclavagiste. Cette différence ne tient pas au nombre d’hectolitres de sang et de larmes qui ont coulé, même si, pour ceux qui en ont été les victimes, c’est nécessairement cela qui importait le plus. Ce qui fait la spécificité du phénomène combiné de l’esclavage européen et de la colonisation depuis le XVe siècle, c’est qu’ils ont instauré, dans le même mouvement où se constituaient le Capital et l’État-nation bureaucratique moderne, des relations sociales mondiales basées sur la hiérarchisation pyramidale de l’humanité en groupes statutaires racialisés qu’on peut appeler les races sociales. Au sommet de cet échafaudage conflictuel, le groupe dont les frontières statutaires sont marquées par trois attributs indissociables : être blanc, être chrétien (ou descendant de chrétiens), être européen (ou descendant d’Européens, et de préférence d’Européens du Nord-Ouest de l’Europe). Le rapport social racial dit, au présent comme au passé, le rapport colonial occidental ; il en est l’invariant depuis son émergence jusqu’à nos jours, malgré les métamorphoses profondes dont il a été l’objet depuis le temps de la traite négrière transatlantique jusqu’à notre époque de mondialisation libérale et de transfert brutal et massif de populations statutairement inférieures au cœur des métropoles blanches.
L’esclavage, le travail forcé, l’extermination de populations, l’occupation de territoires, la colonisation de peuplement, la colonisation de « comptoirs », l’instauration d’administrations coloniales militaires et bureaucratiques, etc., ou, aujourd’hui, la combinaison de certaines de ces modalités avec de nouvelles formes de dépendance économiques et d’extorsion des richesses, d’empiétement de la souveraineté, de subordination culturelle, ou de la maîtrise militaire au moyen du chantage à la destruction totale, etc., reconfigurent, certes, les modalités de reproduction du rapport colonial ; ces nouvelles modalités expriment également des évolutions dans les rapports de forces politiques au sein de la pyramide racial ; elles reflètent évidemment des transformations opérées sur d’autres plans de la société mondiales ou des espaces plus locaux, mais l’invariant du rapport colonial-racial, constitutif de la modernité, demeure. Entamé, il est vrai, mais encore inébranlable. Cet invariant, c’est : la suprématie blanche. En quelques mots, l’occupation armée de territoires s’est confondue un temps avec la colonisation occidentale, elle ne la définit pas. Au-delà de sa genèse, marquée par l’accaparement de territoires et la subordination violente des peuples, la colonialité des rapports de pouvoir persiste à travers de nouveaux dispositifs politiques, économiques, culturels et symboliques.
La permanence des rapports coloniaux au cœur de la Métropole
Pour s’en féliciter ou, au contraire, le regretter, personne ne niera aujourd’hui l’existence persistante du capitalisme bien qu’il ait considérablement changé de visage, ni ne considérera qu’employer une telle notion à propos du monde contemporain revient à « banaliser » le capitalisme. C’est pourtant bien ce que fait Fourest, à propos des notions de colonialisme et d’esclavage, écrivant, comme tant d’autres démagogues, que l’Appel des Indigènes de la République les « banalise de façon indécente », « insoutenable ». Personne n’ira non plus reprocher à un ouvrier travaillant aujourd’hui chez Renault de se dire ouvrier et de parler de sa condition ouvrière sous prétexte que, par comparaison avec les manufactures ou les mines du XIXe siècle, les usines Renault – en France – ressemblent à Disneyland. C’est pourtant ce que fait encore Caroline Fourest à propos de la notion d’« indigènes de la République » qui « tend à faire croire que le statut des Français d’origine arabe est comparable à celui des indigènes sous la colonisation, voire à celui des esclaves sous l’esclavage ».
Identifiant colonisation et occupation militaire, Fourest est évidemment incapable de comprendre le caractère colonial des rapports qui se tissent, en France notamment, entre les populations blanches et les populations issues des immigrations coloniales. Sans l’avouer évidemment et comme de nombreux intellectuels et personnalités politiques qui s’étaient opposés aux thèses formulées dans l’Appel des indigènes, Fourest a bien été contrainte de les reprendre partiellement, après que la révolte de novembre 2005 eut démontré qu’elles n’étaient pas complètement absurdes. Elle s’en inspire à sa manière, en tentant de les insérer dans sa propre problématique, c’est-à-dire de manière contradictoire, en les amputant de certaines de leurs dimensions et en les vidant de leur portée politique. Mais elle s’y réfère tout de même. Elle convient ainsi qu’« il y a des problèmes de persistance du racisme qui sont liés à un passé colonial difficile et douloureux à digérer » et évoque, à ce propos, le « racisme post-colonial ». Alors que, contrairement à aujourd’hui, cette thèse restait marginale jusqu’à la publication de l’Appel des indigènes, elle n’hésite pas désormais à parler d’un « continuum – évident (sic !) – entre le racisme anti-Maghrébins et l’imaginaire datant de l’époque coloniale » De même, écrit-elle que « la colonisation n’est pas le seul épisode à nourrir nos fantasmes : la propagande ayant permis de déshumaniser les Noirs pour justifier l’esclavage a aussi laissé des traces ». Elle admet également que « même si la démonstration a ses limites, il est difficile de ne pas faire le lien entre les modèles d’intégration choisis par la France et la Grande-Bretagne et leurs histoires coloniales respectives ». Même si elle entend ainsi défendre la politique française d’« intégration », cela revient à reconnaître le caractère présent de ce passé colonial. On pourrait citer de nombreuses autres formules employées par Fourest qui reprennent l’idée d’une continuité coloniale. Reste, qu’à l’instar de nombreux auteurs, cette continuité n’est envisagée que sous l’angle des représentations, en termes de reflets tardifs dans les consciences d’une situation révolue, et non en termes de permanence des rapports sociaux coloniaux au-delà de l’occupation de territoires et, bien sûr, sans mettre en cause le rôle actif de l’État dans leur persistance.
Sadri Khiari, membre du PIR
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Excellent texte.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
100% d'accordToussaint a écrit:Excellent texte.
En voici un autre plus que jamais d'actualité :
http://indigenes-republique.fr/59559/L’islamophobe, axe fondamental de la contre révolution coloniale
Publié le 2 février 2015 par Sadri Khiari, membre du PIR
Tout est là. Être français et musulman, du point de vue de l’ « identité nationale » républicaine, est un oxymoron. Il n’est pas possible d’être l’un et l’autre à la fois. Tant, du moins, que la conception même de la nation, telle qu’elle s’est construite dans la République, n’est pas radicalement recomposée, tant que l’« identité nationale » articule privilège « gaulois » et privilège blanc-européen-chrétien. L’offensive contre les musulmans – et contre l’Islam, de manière générale constitue ainsi l’un des volets de la défense de ce double privilège face au spectre indigène. C’est un axe autour duquel s’est construit le consensus blanc.
Pour Thomas Deltombe qui étudie l’islamophobie médiatique, « ce sont les grandes grèves de l’industrie automobile, entre 1982 et 1984, qui marquent un tournant décisif dans les relations entre le gouvernement et les immigrés: la référence à l’islam va être utilisée par le gouvernement pour discréditer une grève qui n’a pas grand-chose de religieux. Alors que la grève des OS débute au printemps 1982 dans les usines Citroën et Talbot d’Aulnay-sous-Bois et de Poissy, les médias s’intéressent rapidement à l’aspect « islamique » de cette mobilisation que les leaders syndicaux habituels ont du mal à canaliser. Les mosquées d’entreprise fleurissent tout à coup sur les écrans de télévision. Les photos des OS en prière s’étalent dans la presse écrite. Les caricaturistes transforment les cheminées d’usine en minarets. La rumeur gonfle d’une manipulation « intégriste ». La presse d’extrême droite, bien sûr, se défoule contre les ouvriers « khomeynistes ». Gaston Deferre, le ministre socialiste de l’Intérieur, évoque «les grèves saintes d’intégristes, de musulmans, de chiites». Le lendemain, le Premier ministre, Pierre Mauroy, déclare: «Les principales difficultés qui demeurent sont posées par des travailleurs immigrés dont je ne méconnais pas les problèmes mais qui, il faut bien le constater, sont agités par des groupes religieux et politiques, qui se déterminent en fonction de critères ayant peu à voir avec les réalités sociales françaises[1] ».
Le front de l’islam est donc ouvert; il prendra d’autant plus d’importance dans la stratégie du Pouvoir blanc que les nouvelles générations issues de l’immigration sont de plus en plus nombreuses à se revendiquer de la religion de leurs parents. En 1989, la fatwa iranienne contre Salman Rushdie, puis la première « affaire » du voile ont scellé ainsi une nouvelle étape dans la construction du consensus blanc, un consensus encore plus large désormais puisqu’il s’étend désormais jusqu’à une frange de l’extrême gauche. Le premier bénéficiaire en est le Front national. Le 26 novembre 1989, il obtient des scores exceptionnels aux élections législatives partielles à Dreux et à Marseille. À peine les résultats du scrutin sont-ils connus que le Premier ministre socialiste, Michel Rocard, déclare que la France ne peut pas « héberger toute la misère du monde »[2], relayé par Mitterrand qui estime que « le seuil de tolérance a été atteint dans les années 1970 » [3]. Jacques Chirac, pour sa part, affirme que la France a « un problème de saturation »[4]; il réclame la fermeture des frontières, davantage de répression à l’encontre de l’immigration irrégulière, la réforme du droit d’asile et du Code de la nationalité. Parler de l’islam en France, c’est bien parler de l’immigration!
Désormais l’offensive contre l’islam n’allait plus cesser de s’amplifier, scandée par les convulsions de la politique internationale et leurs incidences parfois meurtrières en France[5]. De 1993 à 1995, c’est la deuxième cohabitation. Jacques Chirac est de nouveau Premier ministre; Charles Pasqua retrouve son portefeuille place Beauvau. Il ne ménagera aucun effort pour alimenter la peur de l’islam et justifier l’appui apporté par son gouvernement à la junte militaire algérienne qui, depuis l’« arrêt du processus électoral» en janvier 1992, mène une véritable guerre contre les organisations politiques islamistes. La gauche partage cette même orientation au nom de la défense de la laïcité et de l’émancipation des femmes. Bonne occasion également de réactiver la vieille division coloniale entre Kabyles et Arabes. Les premiers seraient des démocrates, laïcs, respectueux du droit des femmes. Vraiment civilisés. Les seconds, tout le contraire. À la rentrée 1994, le ministre de l’Éducation nationale, François Bayrou, annonce l’interdiction du voile dans les établissements publics. Le Conseil d’État annule la décision, mais la polémique est relancée. Une autre future candidate à l’élection présidentielle, Ségolène Royal, déclare alors sur France 2: « Je voudrais quand même rappeler que, pour le port du voile, on tue en Algérie. Je crois qu’on ne doit pas faire un amalgame entre tous les signes extérieurs de religion. Ce que je crois aussi, c’est qu’il faut s’interroger sur le degré de liberté de ces jeunes filles car, derrière le voile, je pense qu’il y a un mouvement politique d’adultes, l’islamisme, qui cherche quand même à subvertir l’école laïque et qui cherche surtout à subvertir l’égalité des droits pour les filles »[6]. Dans Les Damnés de la terre, Fanon mentionnait déjà ce type de discours coloniaux. « Là, écrivait-il, on entend à longueur de journée des réflexions odieuses sur le voile des femmes, sur la polygamie, sur le mépris supposés des Arabes pour le sexe féminin »[7].
Dans le débat public, islam, immigration, banlieues, sécurité sont systématiquement associés. Thomas Deltombe souligne ainsi que les médias « insistent sur l’attraction « naturelle » des jeunes de banlieue pour les thèses islamistes »[8]. En 1995, soupçonné d’être impliqué dans des attentats terroristes, Khaled Kelkal est tué de sang-froid par des policiers. Aux yeux du plus grand nombre, il est la preuve flagrante que les jeunes musulmans des cités ont une propension quasi naturelle à la violence. « La grande interrogation des médias, remarque encore Deltombe, va consister à se demander si le jeune homme a agi parce qu’il est « islamiste » ou parce qu’il est « de banlieue ». Pendant un mois, l’islam devient un phénomène de banlieue et la banlieue un quasi-phénomène islamique, dont Kelkal serait le symbole »[9].
Je pourrais poursuivre, faire le récit détaillé de tous les prétextes qui ont été impudemment utilisés par les forces politiques blanches, leurs intellectuels et leurs médias afin de réactiver les plus abjectes représentations coloniales – du barbare qu’il faut supplicier au sauvage à civiliser. Dans la République laïque, on n’ose guère en appeler publiquement au souvenir des croisades, mais, incidemment, par petites touches, entre les mots, le message subliminal est le même que celui qu’énonce clairement George Bush: la civilisation chrétienne est menacée par les hordes musulmanes. La fureur islamophobe, attisée par les attentats du Il septembre 2001 et le nouveau colonialisme américain, atteint son comble en 2003 avec l’affaire des sœurs Alma et Lila Levy[10], la loi contre le voile[11] et la sordide campagne contre Tariq Ramadan. De l’extrême droite à l’extrême gauche, le front blanc se resserre. Rares seront ceux, principalement au sein de la gauche radicale, qui prendront alors le risque de s’écarter du consensus blanc.
L’offensive islamophobe a pris diverses formes: répressive, idéologique, mais aussi intégrationniste. L’intégrationnisme, comme tactique politique coloniale, a deux facettes. Elle consiste, rappelons-le : à semer le trouble dans la conscience des colonisés, à dissoudre leurs identités, à camoufler les inégalités statutaires. Elle consiste aussi à diviser les colonisés, à promouvoir en leur sein des élites et des flics qui auront la charge de les encadrer et de les contrôler, notamment au travers d’instances particulières de représentation, enchâssées dans les dispositifs institutionnels du Pouvoir blanc. Si la première facette de cette tactique prend la forme de la valorisation de l’« islam modéré», de la promotion des musulmans « modernistes », des musulmanes « émancipées », sa seconde facette, à la fois complémentaire et antagonique, à peine ébauchée à l’époque giscardienne, a commencé à être sérieusement mise en œuvre par le ministre socialiste de l’Intérieur Pierre Joxe, qui instaure en 1989 l’éphémère Conseil de réflexion sur l’islam en France (Corif). Les velléités d’organisation du culte musulman, sous l’égide de l’État, seront poursuivies par tous les ministres de l’Intérieur qui lui ont succédé. Charles Pasqua, Jean-Louis Debré, Jean-Pierre Chevènement et, enfin, Nicolas Sarkozy, le plus malin de tous, auquel nous devons le Conseil français du culte musulman (CFCM) qui est parvenu à rassembler les principales organisations musulmanes sous le patronage du ministère de l’Intérieur. En échange de leur « loyalisme », des efforts qu’elles mènent pour vider l’islam de tout esprit de rébellion, de leur collaboration à la politique de surveillance des populations musulmanes notamment dans les cités, ces organisations se voient accorder une légitimité institutionnelle, quelques concessions destinées à faciliter les pratiques cultuelles, et, bien sûr, le partage entre elles – et non sans tensions- du « marché » de l’islam français.
Aziz Zemmouri et Vincent Geisser ont mis en évidence l’inspiration que cette politique a puisée dans la gestion de l’islam colonial, la similarité de leurs substrats idéologiques et des finalités qui les animent. « Dès les premiers temps de la conquête, écrivent-ils, l’administration coloniale tenta d’imposer un « clergé musulman »-, la formule était employée par certains administrateurs coloniaux -, censé servir loyalement les intérêts de la France »[12]. À travers la « fonctionnarisation » des « clercs musulmans », expliquent-ils, il s’agissait de garantir leur soutien aux autorités coloniales « et surtout de prévenir toute tentative de résistance religieuse ». Hier comme aujourd’hui, l’officialisation de la représentation de l’islam sous la tutelle de l’administration « avait pour contrepartie logique une politique de surveillance et de répression des religieux dits « indépendants », dont les activités étaient jugées subversives ». L’organisation d’une représentation institutionnalisée de l’islam s’est accompagnée de la volonté de développer des structures officielles de formation d’« imams sur mesure » et d’étouffer les associations soucieuses de favoriser l’épanouissement d’un islam indépendant. La politique du gouvernement à cet égard est relayée par les instances intermédiaires de l’État, collectivités locales et municipalités, principales médiations de la résistance populaire blanche dans les quartiers qui, souvent en s’appuyant sur les rapports fournis par les Renseignements généraux, « pratiquent une forme de favoritisme à l’égard de certaines associations musulmanes réputées « modérées » et « présentables », au détriment d’autres « peu fréquentables », auxquelles on accole assez facilement les étiques d' »intégristes » et/ou de « fondamentalistes ». Les cas de villes comme Montpellier, Marseille ou Vénissieux sont exemplaires de cette gestion autoritaire, où les maires tentent de promouvoir un « islam municipal », loyal et fidèle, ostracisant dans le même temps toutes les autres organisations musulmanes »[13].
On aurait tort, cependant, de ne voir dans l’islamophobie contemporaine que les flatulences tardives d’une vieille peur chrétienne de l’« islam conquérant ». Ses puanteurs sont les mêmes, mais ce qui fermente dans les boyaux de l’islamophobe, ce n’est pas la haine de l’islam en tant que croyance. Celle-ci est bien plus le produit de la politique islamophobe que sa motivation initiale. Il ne s’agit pas tant de défendre ou d’étendre la chrétienté pour elle-même que d’en consacrer la mémoire comme l’une des composantes de la blanchitude. Les islamophobes qui nous disent n’avoir pour ennemi que l’« islam radical » ne sont donc hypocrites qu’à moitié. Ils ne défendent pas la chrétienté contre l’islam; ils défendent la suprématie blanche dans la forme relativement sécularisée qui est la sienne aujourd’hui. L’« islam radical », du point de vue de ces républicains, c’est tout bonnement l’islam indocile, rétif à l’occidentalisation, l’islam creuset d’une dissidence indigène. Le musulman qui veut pouvoir exprimer son islamité dans l’espace public est pour eux un islamiste radical non pas parce qu’il remettrait en cause la laïcité, mais parce qu’il incite les indigènes à s’affirmer dans l’espace public. Il est un terroriste non pas parce qu’il assassine des « victimes innocentes », mais dès lors qu’il s’introduit par effraction dans l’espace public. Peu leur importe que Tariq Ramadan soit favorable ou non à la lapidation; à leurs yeux, il est un « intégriste », il entretient des liens avec le « terrorisme », parce qu’il dit aux musulmans: ne restez pas en dehors de l’espace public, faites de la politique. Quand les islamophobes dénoncent le « prosélytisme musulman », ils ne parlent pas tant de prosélytisme religieux que d’incitation à l’occupation indigène de l’espace public. Quand ils interdisent le voile à l’école, ils interdisent l’accès de l’espace public aux indigènes qui rechignent à être « beurisés ». Quand ils assurent défendre l’émancipation des femmes musulmanes tout en respectant leur foi, c’est encore un leurre: ils veulent, en fait, interdire aux femmes leur émancipation en tant qu’indigènes. Les musulmans (et plus largement les indigènes) ne sont les bienvenus dans l’espace public qu’à la stricte condition qu’ils s’en prennent à d’autres musulmans, c’est-à-dire qu’ils se battent contre eux-mêmes. La République est une religion islamophobe. L’islamophobie ne combat pas le musulman en tant que musulman mais le musulman en tant que rebelle potentiel à l’ordre blanc, et c’est pourquoi tout musulman est un intégriste ou un terroriste en puissance. Elle ne se développe pas principalement dans le champ de l’intolérance religieuse mais dans celui de la lutte raciale. Elle ne constitue donc qu’un volet de cette contre-offensive coloniale qui est menée contre l’ensemble des indigènes et, plus particulièrement, contre l’espace privilégié de leurs résistances, les cités populaires où se nouent les différentes facettes de la politique sécuritaire.
Sadri Khiari, membre du PIR
Extrait de son livre : « La contre révolution coloniale, de De Gaulle à Sarkozy« , La Fabrique, 2009
Notes
[1] Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.50. La référence au chiisme est évidemment inspirée de la révolution iranienne. Les évènements au Moyen-Orient ont en effet des répercussions directes en France où ils alimentent l’islamophobie. Ainsi, l’engagement des troupes française depuis septembre 1982 dans le cadre d’une « force multinationale » stationnée au Liban a des implications immédiates: enlèvement de ressortissants français, successions d’attentats à Paris et Marseille. Les Palestiniens et les musulmans libanais sont présentés comme de terribles barbares face auxquels les chrétiens du Liban et l’Etat d’Israël se défendent comme ils peuvent.
[2] « Sept sur Sept », TF1, 3 décembre 1989, cité dans Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.118
[3] Allocution présidentielle, TF1, Antenne 2, 10 décembre 1989, cité dans Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.118
[4] JT de 20 heures, TF1, 8 décembre 1989, cité dans Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.118
[5] Vagues d’attentats au milieu des années 1990.
[6] Le 25 octobre 1994, Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.230
[7] F.Fanon, Les Damnés de la Terre, Paris, La découverte, 2004, p.156
[8] Th. Deltombe, L’Islam Imaginaire, p.205
[9]Ibid, p.244
[10]A la rentrée 2003, les deux élèves sont exclues par le conseil de discipline du lycée d’Aubervilliers parce qu’elles refusent de retirer leurs voiles. De puis les mois de mai-juin, la polémique sur le voile avait été relancée par le gouvernement de droite dans le contexte d’un puissant mouvement de grève contre la réforme des retraites. Le PS n’est pas en reste: Jack Lang dépose une proposition de loi visant à interdire le port du « foulard » à l’école. Pour sa part, Laurent Fabius défend l’interdiction des « signes religieux ostentatoires » à l’école et dans l’espace public.
[11] La loi sur la laïcité, votée en mars 2004, interdit le port de tout signe religieux « ostensible » à l’école.
[12] A.Zemouri, V.Geisser, Marianne et Allah. Les politiques français face à la « question musulmane », Paris, La Découverte, 2007, p.82
[13] Ibid, p.26
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Excellent encore, l'extrait d'une somme, cette fois, merci Sadri.
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
Charlie Hebdo : le piège de l’unité nationale
Publié le 9 février 2015 par Malik Tahar-Chaouch, Houria Bouteldja, membres du PIR
Suite à l’attaque armée contre la rédaction du journal Charlie Hebdo, l’exploitation politico-médiatique des événements sur un mode émotionnel a lancé le mot d’ordre de l’unité nationale, en occultant les causes géopolitiques et sociales de l’attaque et en amorçant une véritable chasse aux sorcières contre les résistances à ses impositions. Le dispositif de la « guerre contre le terrorisme », construit autour de la défense supposée de la « liberté » contre l’« obscurantisme » et la « barbarie » sert ainsi à consolider l’ordre social et politique qui a contribué au développement de cette violence, en censurant les luttes structurelles contre lui et, parmi elles, la lutte contre l’islamophobie. Les musulmans et, plus généralement, les descendants de l’immigration postcoloniale sont la cible principale d’une offensive idéologique et répressive qui s’immisce jusque dans les écoles. Malgré la faiblesse de leurs moyens et leur marginalisation systématique, les luttes sociales et le combat politique contre le racisme structurel avaient, ces dernières années, connu des avancées certaines, en France. Cette attaque est l’occasion saisie d’une tentative de restauration, aux enjeux nationaux mais également globaux, puisqu’elle participe de la contre-révolution coloniale dans les pays du Tiers-monde, en particulier dans le monde arabe, suite aux soubresauts politiques et tentatives révolutionnaires de 2011. La « marche » du 11 janvier 2015, convoquée par l’Etat français et investie par les principaux représentants de l’ordre mondial et dirigeants du Tiers-monde, inféodés à lui, a scellé le pacte de cette union sacrée. Néanmoins, parce que la dangerosité des circonstances l’impose, ces événements ont aussi fait « bouger » les positions et ouvert la perspective de possibles contre-mouvements.
Le contexte social et politique
L‘onde de choc émotionnelle provoquée par les attaques et sa mise en scène politico-médiatique ont créé, en France, un climat politique de violence institutionnelle. En effet, au lendemain des attentats, une minute de silence a été imposée par le gouvernement. Ceux qui ont refusé de la respecter ont été la cible de représailles, au travers de licenciements et de dénonciations à la police. Quelques jours après, de nombreuses personnes ont été accusées d’« apologie du terrorisme » et déféré devant les tribunaux, avec l’application de peines de prison ferme, pour avoir posté des statuts douteux ou simplement critiques sur les réseaux sociaux. Cette répression s’est étendue dans les écoles, à mille lieux de toute éthique pédagogique, puisqu’elle consacre la délation. Les enfants et adolescents principalement issus de l’immigration qui avaient manifesté leur « défiance » ont été reportés à la police et au parquet. En plus d’être contre-productives, en alimentant le climat social d’injustice, de discrimination et de déni politique des problèmes de fond à l’origine des trajectoires funestes et tragiques des « tueurs » de Charlie Hebdo, ces mesures visent à aligner sur l’unité nationale, en faisant taire toute contestation de ses objectifs politiques de renforcement de l‘ordre social qui a engendré l’engrenage de la violence.
Parallèlement, une campagne médiatique s’est déchaînée contre ceux qui avaient dénoncé l’islamophobie de Charlie Hebdo. Elle a mobilisé certaines des principales voix françaises de l’islamophobie qui y ont vu une opportunité pour se déresponsabiliser du climat social qui a conduit à cette tragédie, en déniant toute légitimité au combat anti-islamophobe. Au nom d’une liberté d’expression inféodée à leurs privilèges, ils prétendent censurer les luttes contre ces privilèges. Ainsi, la « liberté d’expression » devient un prétexte pour réduire au silence ceux qui y ont le moins accès, comme on l’a encore vu, durant l’été 2014, avec la répression des manifestations pro-palestiniennes et, auparavant, avec l’interdiction des spectacles de Dieudonné, un humoriste noir dont les tendances « antisémites » ne reçoivent pas le même traitement que l’islamophobie de Charlie Hebdo. Dès lors qu’on la situe dans le contexte de ces rapports sociaux de pouvoir et de lutte, la défense de la « liberté d’expression » prend incontestablement un sens idéologique et paradoxal qui fait régner l’intimidation et la peur.
Bref, le traitement médiatico-politique des événements cherche systématiquement à occulter les causes sociales et géopolitiques des attaques, afin de mieux reproduire les conditions structurelles qui en ont été le terreau, au bénéfice du statu quo et même du renforcement des inégalités et des privilèges qui y sont liés. Or, les trajectoires de Mohammed Merah, des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly prennent racine dans un contexte de déclassement social et de racisme structurel, où ils incarnent la violence-boomerang des « colonisés », telle que l’envisageaient Fanon et Sartre[1]. Par ailleurs, elle est indissociable des guerres du Moyen-Orient qui relient le racisme structurel du contexte français et l’impérialisme, l’ordre « colonial » global et les conflits sociopolitiques des sociétés arabes. De ce point de vue, la violence extrême des contextes « périphériques », médiatisée par les propres divisions structurelles et violence interne des Etats hégémoniques dans le système mondial, revient là où elle a été générée. La compassion asymétrique pour les victimes innombrables de ce processus global, tant à l’intérieur – notamment avec la violence policière contre les descendants de l’immigration – qu’à l’extérieur, ne fait donc que rendre compte des rapports de force objectifs qu’il engage. De la sorte, l’une des principales causes des attaques, c’est précisément la faiblesse des luttes collectives et le vide d’alternatives politiques, sur quoi nous reviendrons dans la suite du texte, qui alimentent le désespoir et produisent cette violence réactive, au bénéfice de l’ordre existant qui l’exploite politiquement à son profit.
Le contexte social, postérieur aux attaques, ne fait d’ailleurs que rendre compte des conflits réels qui traversent la société française, obscurcis par l’imposition de la grille de lecture du « choc de civilisations », mais aussi par la gauche blanche qui refuse de les considérer en tant que tels, en leur opposant systématiquement la « lutte des classes » ou, pire encore, de vagues principes humanistes. Tandis que la « marche » national-républicaine du 11 janvier a fortement mobilisé la population blanche du pays, elle a reçu peu de soutiens et même engendré de l’hostilité et de l’ironie parmi les cibles du racisme structurel et de sa violence sociale, en particulier chez les noirs et les arabes des quartiers populaires qui, depuis longtemps, ne croient plus aux sacro-saints principes de la République qui les discrimine, tout en prétendant les « intégrer »[2].
Elle a certes convoqué quelques secteurs musulmans et de l’immigration postcoloniale, mais presque exclusivement au sein de ceux qui sont « clients » de l’ordre en place, notamment des leaders religieux assujettis à l’Etat et promus par lui, des fidèles qu’ils peuvent canaliser, des plus « assimilés » socialement et, à l’inverse, des immigrés récents qui « découvrent » le contexte français et sont plus facilement séduits par les mirages intégrationnistes. Si ces soutiens minoritaires ont pu vouloir manifester leur humanité commune – ce qu’on peut comprendre – ou sous le coup des sommations multiples, refuser de donner des armes au racisme et à la suspicion, ils ont aussi cherché à exprimer leur appartenance à la communauté nationale et leurs convictions intégrationnistes. Or, l’unité nationale sert à les exclure et à les soumettre, étant d’une façon ou d’une autre dirigée contre eux. Sa première conséquence sera le renforcement de l’infériorisation statutaire et de la gestion coloniale de l’Islam, en France. Dans le système raciste, l’appartenance nationale et la simple idée d’être « ensemble », les assignations identitaires et la « diversité », l’humanisme et la citoyenneté sont aussi illusoires que piégés. Ce sont des leurres qui ne peuvent être dépassés que par la transformation concrète des rapports sociaux et la construction d’une autre majorité, où il faut mettre en perspective les identités collectives.
Stratégie du choc et luttes structurelles
La restauration nationale en cours s’inscrit dans la trajectoire de l’ordre « colonial » global, de la domination raciale, de la stratégie du « choc de civilisations » et de leurs enjeux sociaux, économiques et idéologiques. Ces dernières années, l’ordre raciste français, ainsi que l’impérialisme, ont été bousculés. En France, malgré sa marginalisation et relative faiblesse, l’antiracisme politique était parvenu à engendrer un grand mouvement de soutien à la Palestine, à mettre l’islamophobie au cœur du débat public et à développer des mobilisations diverses parmi les descendants de l’immigration postcoloniale, en rupture avec les partis dominants et notamment la gauche blanche. Malgré les résistances de l’extrême-gauche française à la grille de lecture raciale, il commençait même à y recevoir des soutiens ponctuels. En même temps, le contexte global s’est caractérisé par les tentatives révolutionnaires dans le monde arabe, les mutations géopolitiques qui voient la Chine devenir la première puissance économique mondiale, les embourbements militaires des puissances occidentales en Irak, en Afghanistan et en Afrique, et l’affaiblissement général de l’impérialisme.
Ces événements et les mauvais et bons sentiments suscités par eux ont été exploités, afin de reprendre le terrain perdu. L’ordre répond par l’équation qui lui convient le mieux, sa « guerre contre le terrorisme » : un « terrorisme » dont les Musulmans sont la première cible et que l’impérialisme a lui-même engendré, notamment par ses interventions militaires qui y trouvent un nouvel alibi. En ce sens, des organisations, telles qu’Al Qaeda et Daesh sont un produit funeste de l’impérialisme et des régimes postcoloniaux arabes qui ont favorisé leur développement. Ils font tous ensemble système, au détriment des luttes structurelles et de populations prises dans l’étau. Par ailleurs, la « guerre contre le terrorisme » manie des concepts suffisamment vagues pour autoriser les confusions et étendre les champs de bataille à volonté. Enfin, n’oublions pas que la guerre est un laboratoire de rapports sociaux. En ce sens, si l’unité nationale sert à quelque chose, c’est surtout à consolider le consensus blanc et à faire reculer les luttes structurelles, en ouvrant ainsi un nouveau pan de l’oppression que subit le tiers-peuple en France[3], ainsi que le tiers-monde.
De ce point de vue, la stratégie du choc doit être située dans la trajectoire de l’ordre « colonial » et de la domination raciale, c’est-à-dire dans les rapports sociaux de lutte occultés sous les langages universalistes et les mirages de l’unité. C’est dans ces rapports sociaux qu’elle prend sens et non comme une « diversion » face à des enjeux qui seraient plus fondamentaux et qui sont, en réalité, contenus dans le renversement décolonial des lectures politiques orthodoxes de la gauche blanche. En même temps qu’elle intensifie et reflète la polarisation raciale, cette stratégie en brouille les enjeux sociaux et politiques de lutte, en imposant des lectures idéologiques telles que le combat de la « liberté » contre l’« obscurantisme », reproduites à l’envers par l’« ennemi » ainsi engendré. En prétendant se réfléchir dans le miroir de cette « barbarie » supposée et provoquée, elle perpétue les mythes propices à la reproduction de l’ordre en vigueur, comme celui de la liberté. Or, cet ordre en est la plus complète négation, en premier lieu pour ceux qui le subissent. On voudrait faire de l’Islam le cœur du problème, quand les attaques qui viennent de se produire sont l’expression mimétique d’une violence structurelle en voie de radicalisation, ce qui constituera le terreau d’autres trajectoires similaires.
Quand la gauche française s’oppose à cette stratégie, en refusant de considérer la domination raciale, elle ne fait que servir les conditions sociales et politiques, où elle a prospéré. Elle ne peut justement être combattue que par le développement des luttes décoloniales. Dans cette perspective, notre lutte indigène de libération est aussi la condition de l’émancipation des blancs, notamment de ceux qui ont le moins à gagner dans l’ordre que cet engrenage perpétue et les effets qu’il produit. Contre les duperies de l’unité nationale, il est possible de construire une majorité décoloniale de rupture avec le système raciste, impérialiste et capitaliste, avec ses mythes citoyens et avec ses assignations identitaires imposées, en générant un projet qui permette l’émancipation de tous. Un tel renversement de perspective implique une approche différente de la longue durée historique et des conflits politiques et sociaux actuels.
Or, l’un des principaux facteurs du « nihilisme » des très rares « jeunes », pour le moment, issus de l’immigration et des quartiers populaires qui s’engagent dans une violence aveugle et sans issue réside précisément dans la faiblesse et la marginalisation des luttes décoloniales, en France. Outre les propres difficultés qu’engage un tel projet dans des conditions asymétriques, leur faiblesse est due à leur sabotage systématique par les pouvoirs en place, au travers de la répression, de la délégitimation symbolique et de la cooptation clientélaire par les partis politiques et les divers agents de l’Etat français. Les instances religieuses et communautaires imposées par l’Etat y jouent un rôle primordial. Pourtant, des décennies d’intégrationnisme forcé et de soumission n’ont aucunement freiné le racisme et la polarisation raciale. Elles ont seulement contribué à la reproduction de la domination, à l’inégalité du rapport de force et au brouillage des enjeux véritables de cette polarisation. Elle est aussi indirectement le produit des propres démissions de la gauche et de son incapacité à envisager les conflits sociaux en termes de races sociales. Ceci n’a servi à mobiliser ni les classes populaires blanches, de plus en plus absorbées par le vote d’extrême-droite, ni les populations visées par le racisme structurel, en contribuant paradoxalement aux divisions que la gauche déplore. Le problème doit être radicalement inversé : la lutte décoloniale est la condition d’un contre-mouvement de plus en plus urgent, afin de sortir de l’engrenage infernal où les mots d’ordre de l’unité nationale prétendent nous enfermer.
En guise de conclusion: la perspective d’un contre-mouvement
Bref, la construction d’un contre-mouvement est plus que jamais nécessaire. Elle découle d’abord de la lutte décoloniale. Nous, indigènes de la République française, devons-nous organiser politiquement, parce que nous sommes les premiers visés par la violence structurelle. En l’absence d’une voie politique décoloniale qui unifie les « colonisés » de l’intérieur, nous demeureront livrés aux impasses et exposés à tous les abus. Sans espoir, alternatives et lien politique, notre jeunesse sera constamment menacée par les pires tentations et donc plus que jamais la cible de la violence symbolique et de la répression. Mais la voie décoloniale est aussi une occasion à saisir pour tous ceux qui ont intérêt à rompre avec l’ordre raciste et impérialiste qui, en même temps qu’il leur accorde des privilèges, contribue à leur propre domination. C’est une occasion à saisir pour la gauche anticapitaliste, si elle veut sortir de ses propres impasses. C’est, enfin, la seule issue possible à un engrenage politique et social qui, en même temps qu’il impose la stratégie du choc, ne peut être dépassé par des vagues humanismes, des universalismes paradoxaux et les vieux mots d’ordre des « gardiens du temple marxiste » qui refusent d’historiciser et de politiser les rapports de races sociales, en tant que tels.
De ce point de vue, l’onde de choc des attaques à Charlie Hebdo a contribué, dans un premier temps, à l’unification du pouvoir blanc et a fait peser sur nos luttes, en plus de la menace de la répression, celle de leur recul, de leur isolement et du renforcement de leur éparpillement. Néanmoins, elle a aussi eu l’effet inverse : parce que les circonstances l’imposent et aussi parce que des voies nouvelles doivent être explorées, afin de sortir de l’engrenage en cours, elle a permis aux résistances indigènes de se reconnaître, elle a fait « bouger » des positions avant cabrées, face à la lutte décoloniale, et elle a ouvert la perspective d’éventuelles alliances futures. La bataille n’est pas perdue : loin de là, elle ne fait que commencer.
Malik Tahar-Chaouch, Houria Bouteldja, membres du PIR
Article d’abord publié dans sa version anglaise sur le site Jacobin Mag
Notes
[1]http://classiques.uqac.ca/classiques/fanon_franz/damnes_de_la_terre/damnes_de_la_terre.html
[2] A ce propos, cet excellent article: http://indigenes-republique.fr/charlie-vu-par-les-arabes-et-les-noirs-des-quartiers/#_ftnref3
[3] Voir à ce propos: http://indigenes-republique.fr/le-peuple-et-le-tiers-peup
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Au delà de ces grands discours, j'aimerais savoir ce que les "camarades" du PIR proposeraient de particulier dans les entreprises à deux catégories de prolétaires qu'ils classent sans doute dans les "Indigènes" :
-Les jeunes Beurs, Antillais etc qui travaillent à la SNCF, la Poste, les Hôpitaux etc. L'avancement se fait dans ces secteurs à l'ancienneté et à la qualification, il y a peu de discrimination "au faciès". Ces jeunes prolétaires ont des conditions de travail rigoureusement semblables à celles de leurs collègues des deux sexes d'autres origines.
Faudrait-il créer un syndicat particulier pour les organiser ? Quelles seraient ses revendications spécifiques ? Dans les syndicats où une partie d'entre eux sont déjà présents, il n'y a pas de relations de type "bwana", certains ont des responsabilités, il suffit de consulter les listes d'élus.
-On peut noter que, dans une grande usine de 2000 personnes comme Bombardier (fournisseur SNCF), le camarade responsable du CHSCT et victime d'une tentative de licenciement... pour "apologie du terrorisme" - en clair par islamophobie - se nomme Karim Khatabi. Cette responsabilité importante n'a donc pas été confié à un "bwana"...
-Les travailleurs des très nombreuses sociétés de nettoyage et d'entretien qui travaillent notamment dans les gares. Ils entrent quasiment tous dans la catégorie que le PIR qualifierait aussi d'"Indigènes", à la différence qu'aux Africains et Maghrébins se mêlent des Serbes, Croates, Albanais (pas spécialement Musulmans) et de diverses autres origines. Ce sont généralement des "immigrés" plus récents, parfois des sans papier. Leurs luttes ont souvent reçu le soutien de militants "blancs" (des bwanas ?) plus combattifs et plus honnêtes que leurs propres délégués bien souvent vendus à leurs patrons-négriers - lesquels négriers sont souvent eux aussi de diverses origines "indigènes".
On le voit, la situation se complique ! Le PIR organiserait-il tous ces "indigènes" ensemble, patrons, salariés et syndicalistes ripoux, contre l'aristocratie ouvrière "blanche" (quoi que pas toujours et même de moins en moins) de la SNCF qui bénéficie d'un statut et de nombreux avantages par rapport à eux et ne se soucie bien souvent pas de ces laissés pour compte, à l'exception de quelques syndicalistes (sans doute encore des bwanas)...
Mais peut-être le PIR est-il au dessus de toutes ces considérations très terre à terre ?
-Les jeunes Beurs, Antillais etc qui travaillent à la SNCF, la Poste, les Hôpitaux etc. L'avancement se fait dans ces secteurs à l'ancienneté et à la qualification, il y a peu de discrimination "au faciès". Ces jeunes prolétaires ont des conditions de travail rigoureusement semblables à celles de leurs collègues des deux sexes d'autres origines.
Faudrait-il créer un syndicat particulier pour les organiser ? Quelles seraient ses revendications spécifiques ? Dans les syndicats où une partie d'entre eux sont déjà présents, il n'y a pas de relations de type "bwana", certains ont des responsabilités, il suffit de consulter les listes d'élus.
-On peut noter que, dans une grande usine de 2000 personnes comme Bombardier (fournisseur SNCF), le camarade responsable du CHSCT et victime d'une tentative de licenciement... pour "apologie du terrorisme" - en clair par islamophobie - se nomme Karim Khatabi. Cette responsabilité importante n'a donc pas été confié à un "bwana"...
-Les travailleurs des très nombreuses sociétés de nettoyage et d'entretien qui travaillent notamment dans les gares. Ils entrent quasiment tous dans la catégorie que le PIR qualifierait aussi d'"Indigènes", à la différence qu'aux Africains et Maghrébins se mêlent des Serbes, Croates, Albanais (pas spécialement Musulmans) et de diverses autres origines. Ce sont généralement des "immigrés" plus récents, parfois des sans papier. Leurs luttes ont souvent reçu le soutien de militants "blancs" (des bwanas ?) plus combattifs et plus honnêtes que leurs propres délégués bien souvent vendus à leurs patrons-négriers - lesquels négriers sont souvent eux aussi de diverses origines "indigènes".
On le voit, la situation se complique ! Le PIR organiserait-il tous ces "indigènes" ensemble, patrons, salariés et syndicalistes ripoux, contre l'aristocratie ouvrière "blanche" (quoi que pas toujours et même de moins en moins) de la SNCF qui bénéficie d'un statut et de nombreux avantages par rapport à eux et ne se soucie bien souvent pas de ces laissés pour compte, à l'exception de quelques syndicalistes (sans doute encore des bwanas)...
Mais peut-être le PIR est-il au dessus de toutes ces considérations très terre à terre ?
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
Non ce sont des considérations de militant de la gauche radicale qui s'inscrivent dans le champs politique blanc et qui n'imagine pas une seconde l'auto organisation de intéressés sur la base de revendications qu'ils auraient eux même élaboré. Notre action est claiement définie par l'appel des indigène et l'ensemble des textes de référence que tu pourras trouver et lire sur notre site.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Pas du tout ! Ce sont tes préjugés et ton ignorance des faits qui te font écrire cela !MO2014
ce sont des considérations de militant de la gauche radicale qui s'inscrivent dans le champs politique blanc et qui n'imagine pas une seconde l'auto organisation de intéressés sur la base de revendications qu'ils auraient eux même élaboré.
Chaque fois que nos camarades ont l'occasion d'intervenir dans ce milieu, par exemple récemment parmi les femmes qui gèrent les toilettes des gares et ont mené une grève entièrement victorieuse, ils ont tout fait pour mettre en avant l'auto-organisation des travailleurs en comité de grève, pour qu'ils élaborent leurs propres revendications, et non pour se faire mousser eux-mêmes comme le font parfois certains syndicats. Le comité de grève et les AG étaient d'ailleurs les seuls moyens de contrer les manoeuvres de syndicats vendus ou prêts à signer une reprise pour des miettes.
Quant aux jeunes prolétaires des services publics cités, leurs revendications ne sont pas différentes de celles de leurs collègues dont ils partagent les conditions de travail pour des salaires équivalents. Mais là encore, notre principe est d'essayer d'impulser des AG souveraines et des comités de grève où ils ont toute possibilité de s'exprimer, y compris de formuler des revendications spécifiques le cas échéant. (C'est arrivé contre des chefs et cadres racistes.)
On voit que tu ne connais pas ces sujets, de sorte que tu ne réponds que par des généralités abstraites qui n'ont aucune prise sur la réalité dans ces circonstances.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
En gros, si des frères indigènes ne se conduisent pas bien dans une entreprise (patrons, syndicalistes ripoux...), on en discute ensemble entre indigènes victimes de la même oppression (post-)coloniale, mais on ne déballe pas cela devant les blancs, même de la gauche radicale blanche.MO2014 a écrit:Non ce sont des considérations de militant de la gauche radicale qui s'inscrivent dans le champs politique blanc et qui n'imagine pas une seconde l'auto organisation de intéressés sur la base de revendications qu'ils auraient eux même élaboré. Notre action est claiement définie par l'appel des indigène et l'ensemble des textes de référence que tu pourras trouver et lire sur notre site.
C'est cela ?
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: Indigènes de la République
verié2 a écrit:Chaque fois que nos camarades ont l'occasion d'intervenir dans ce milieu, par exemple récemment parmi les femmes qui gèrent les toilettes des gares et ont mené une grève entièrement victorieuse, ils ont tout fait pour mettre en avant l'auto-organisation des travailleurs en comité de grève, pour qu'ils élaborent leurs propres revendications,MO2014
ce sont des considérations de militant de la gauche radicale qui s'inscrivent dans le champs politique blanc et qui n'imagine pas une seconde l'auto organisation de intéressés sur la base de revendications qu'ils auraient eux même élaboré.
Et ??? C'est héroïque. On doit remercier qui ? Mon coco cela devrait être le service minimum que tu decris et il faudrait s'extasier devant l'universalisme révolutionnaire de ton intervention ou plutôt de tes exemples.
Et a te lire on peut être tellement sur qu'il n'y a aucune discrimination raciste dans les syndicats de la classe ouvrière que tu essentialises par exemple le licenciement tout récent avec les voix "ouvrières" d'un de nos frères. Ou les remarques racistes quotidiennes que l'on peut entendre dans tous le ateliers. Mais dans quel monde vis tu : une bibliothèque avec les ouvres complètes de Lénine?. Ouvre les yeux et les oreilles le racisme, les discriminations sont bien vivants dans les classe ouvrieres, dans ses organisations y compris celle de la gauche radicale dont lo est le fleuron.
Enfin Prado il suffit de relire les questions de verie2 pour constater qu'il donne déjà les réponses, il l'a écrit en long en large plusieurs fois :racisme'anti-blanc; communautarisme, petit bourgeois. Que répondre a la mauvaise foi ? Il a ses réponses dans une convergence avec dhuring,jesuifred .Alexi et dinky qui forment vraiment une belle bande de "camarades" .on préfère largement discuter et azgir avec le npa avec nous retrouvons sur plusieurs terrains de la lutte decoloniale.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
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