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Royaume-Uni - Page 6 Empty Excellent article dans Counterfire

Message  Roseau Jeu 18 Aoû - 8:21

http://www.npa2009.org/content/retour-sur-les-%C3%A9meutes-la-voix-des-sans-pouvoir
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Message  nico37 Jeu 18 Aoû - 9:48

Angleterre : Quand David Cameron cassait les vitrines - Marco D’Eramo Edition de vendredi 12 août 2011 de Il Manifesto

Dans une ville anglaise une bande de jeunes défonce une vitrine, s’enfuit dans la nuit, et se dirige en courant vers le jardin botanique. La police les suit, en charge quelques uns sur ses téléphones portables et les met au trou.

Le problème c’est que nous ne parlons pas d’un épisode survenu ces jours-ci. Et que les jeunes arrêtés ne sont pas des casseurs sous-prolétaires. Non, l’épisode a lieu il y a 24 ans à Oxford et les 10 jeunes gens étaient tous membres du Bullingdon Club, une association étudiante oxfordienne de 150 ans d’âge, fameuse pour ses frasques estudiantines, ses cuites et pour considérer la vandalisation de boutiques et restaurants comme le fin du fin de la distraction. Restaurateurs, commerçants et dénonciations à la police, tout est remis en ordre avec quelques généreuses indemnisations qu’on va puiser dans les grassouillets portefeuilles paternels. Quelques heures plus tôt, les dix jeunes gaillards s’étaient fait tirer le portrait sur les marches d’un grand escalier, tous en uniforme du club, habit de soirée à 1.000 livres sterling (1.150 euros) pièce. Emergent du groupe un jeune David Cameron et un, tout aussi imberbe, Boris Johnson.

Il se trouve qu’aujourd’hui Cameron est premier ministre conservateur (britannique NdT) et Johnson maire conservateur du Grand Londres. Et que l’un comme l’autre tonnent contre les vandales qui détruisent les propriétés privées. Que l’un et l’autre invoquent la ligne dure, la main de fer. Cameron veut avoir recours à l’armée et censurer les réseaux sociaux ; Johnson veut augmenter les effectifs de police. Sans même la moindre compréhension pour qui ne fait rien d’autre, dans le fond, qu’émuler leur geste d’autrefois.

Mais évidemment, c’est justement le propre de la mentalité d’un fils à papa de considérer que les autres ne peuvent pas -et ne doivent pas- se permettre ce qu’on lui a permis, à lui, par droit de naissance et d’extraction sociale.

Royaume-Uni - Page 6 CameronEton2_468x420-c13a9
(1) Sebastian Grigg, (2) David Cameron, (3) Ralph Perry-Robinson, (4) Ewen Fergusson, (5) Matthew Benson, (6) Sebastian James, (7) Jonathan Ford, (Cool Boris Johnson, (9) Harry Eastwood

David Cameron est né en 1966 d’un père agent en bourse et d’une mère fille d’un baronet : l’actuel premier ministre tient à faire savoir qu’il est le descendant illégitime du roi Guillaume IV et de sa maîtresse Dorothée, et qu’il est donc un lointain parent de la reine Elisabeth II. Snob typique, Cameron fut envoyé à sept ans à Heatherdown, école élémentaire fréquentée aussi par les princes Andrew et Edward, école dont l’attitude de classe était sans équivoque : les jours d’excursion, les toilettes portables étaient désignées par « Ladies », « Gentlemen » et « Chauffeurs ». Et quand Margaret Thatcher fut élue premier ministre, l’école célébra ça par une partie de cricket improvisée entre élèves contre enseignants. Au lycée, Cameron fut envoyé dans la plus prestigieuse école privée d’Angleterre, Eton (frais annuels de scolarité : 27.000 livres sterling, environ 31.000 euros), le creuset de la classe dominante (Boris Johnson fut aussi son camarade de classe à Eton) : c’est drôle comme en Grande-Bretagne les écoles privées s’appellent public schools. Là le vilain garçon Cameron fut surpris en train de se rouler un joint et, en punition, dut recopier 500 lignes de latin. Après Eton, ce fut naturellement l’université à Oxford, et son club, le Bullington. En snob parfait, Cameron a ensuite épousé Samantha Gwendoline Sheffield, dont le père est un baronnet propriétaire terrien, et dont le parrain est vicomte. Samantha Gwendoline travaille dans la célèbre maison de produits de luxe Smyrne de Bond Street et a reçu le prix de Meilleure désigner d’accessoires par le British Glamour Magazine.

Quand ils se sont rangés de leurs bombes estudiantines, les fils à papa font d’habitude une belle carrière : Boris Johnson devient directeur du Spectator (même si sa carrière trébuche dans ses aventures d’homme à femmes invétéré, bien que marié). Cameron devient directeur des Corporate Affairs chez Carlton Communication, une société de media ensuite absorbée par Granada plc pour former ITV plc.

Quand, en 2006, Cameron emporte le congrès Tory et devient leader du parti conservateur, il n’a que 38 ans. Et c’est tout naturellement que, dans le gouvernement ombre qu’il forme (le premier ministre à l’époque était Tony Blair), trois des membres sont d’anciens élèves de Eton (Old Etonians). Mais dans le groupe de ses collaborateurs les plus proches, 15 au moins sont des Old Etonians. Et il en va de même quand, en mai 2010, Cameron gagne (à moitié) les élections et devient premier ministre à la tête d’une coalition avec les néo-libéraux conduits par Nick Clegg : ici aussi le noyau dur du gouvernement est constitué d’aristocrates, d’etonians ou oxfordians, comme l’actuel Chancelier de l’Echiquier (c’est-à-dire ministre de l’économie) George Gideon Osborne, lui aussi noble, héritier de la baronnie Osborne, lui aussi diplômé d’Oxford, et lui aussi, ça alors, ancien membre du Club Bullingdon.

Comme on disait avant : bon sang ne saurait mentir. La classe (sociale, NdT) non plus.

nico37

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Message  gérard menvussa Ven 19 Aoû - 15:56

Planète de bidonvilles, temps des révoltes

De Tottenham à Oakland

Tottenham, Chili, Tunis, Oakland, Brixton, Taybat al-Imam … il y en a tellement qu'on a du mal à se souvenir des noms … Clichy-sous-Bois, Caracas, Los Angeles …

Les termes d'"émeute à Londres" résonnaient bizarrement à mon oreille, ne suscitant qu'un intérêt mitigé. J'ai assisté à quelques émeutes à Londres et, non loin de là, à Cambridge, aux défilés contre la guerre et aux traditionnelles échauffourées du 1er mai entre les anarchistes et la police londonienne.
Depuis ces événements et les récentes manifestations contre les réductions budgétaires qui se sont terminées par des affrontements sporadiques avec la police, mon intérêt avait peu à peu faibli, et quand j'ai entendu "émeute à Londres", je m'attendais à ce que ces mots soient suivis d'une nouvelle description de manifestations rituelles, avec des manifestants qui avaient été parqués par la police et des anarchistes qui affrontaient les forces de l'ordre. Ce n'est pas simplement une critique, je n'étais pas "pas enthousiaste" mais c'est sûr que ne n'étais pas enthousiaste non plus.
Mais, au lieu de cela, on apprenait que les incidents avaient été déclenchés à la suite de l'annonce de la mort d'un Noir, Mark Duggan, qui avait été abattu par la police, et du tabassage d'une adolescente de 16 ans qui exigeait de la police des explications concernant la mort de Duggan.
Le combustible pour alimenter l'incendie s'accumulait depuis longtemps, cependant: le racisme institutionnalisé qui se traduisait par la pauvreté, le harcèlement de la police, qui procède à des arrestations et des fouilles systématiques, et plus récemment, les coupes budgétaires décidées par le parti conservateur au nom de l'"austérité", le mot de l'année si "révolution" ne l'éclipse pas totalement.
Les similarités avec d'autres grandes vagues de révolte sociale devenaient de plus en plus évidentes. Si ces incidents étaient liés à la mort de Mark Duggan, c'était également, plus que cela, tout comme pour Oscar Grant et les révoltes d'Oakland en 2009, pour Alexandros Grigoropoulos et les événements d'Athènes en 2008, pour Rodney King en 1992 à L.A., pour Marquette Frye et la révolte du ghetto de Watts en 1965, etc.
Et comme les événements précédents, les révoltes à Londres se propagent avec une certaine spontanéité et une flexibilité dans des formes d'organisations qui ont complètement mystifié la police. Ils ont (à ce jour, NDT) procédé à plus de 1.000 arrestations, et les médias hystériques faisant de la surenchère en parlant de guérilla, la police est partie pour en arrêter bien plus.

Hystérie de la populace

Quand la violence économique atteint un certain seuil, s'ensuivent des représailles violentes, et, pourtant, ce sont rarement les banquiers ou les élus, ceux qui sont à l'origine des mesures d'austérité mondiales, qui en subissent les conséquences.
Cela commence par l'emploi de termes injurieux, et aucun mot n'est plus chargé de sens politique et historique que celui de "populace", l'insulte la plus classique.
De Philadelphie à Londres, nous dit-on, plane le spectre de la populace, et à l'image de "populace aux abois", le Sun, clef de voûte de l'honnêteté journalistique, a ajouté l'image de "masses d'agitateurs”.
emeutes_Londres_2011_3.jpg
Irrationnels, incontrôlables, imperméables à toute logique et imprévisibles dans leurs mouvements, ces indésirables ont une fois de plus gâché la fête, comme ils l'ont fait de Paris, en 1789, à Caracas, en 1989.
Comme l'a dit Fanon (Damnés de la terre - Frantz Fanon, NDT) dans son style inimitable: “les masses, sans attendre que les chaises soient disposées autour du tapis vert, n'écoutent que leur propre voix et se mettent à tout incendier".
L'utilisation du terme "populace" est un geste fondamentalement politique. C'est la volonté des classes dirigeantes et des forces conservatrices de délégitimer et de dénigrer la résistance populaire, de la vider de tout contenu politique. Revendiquer, c'est raisonnable, mais dans la mesure où la "populace" est l'incarnation de la déraison, elle ne peut décemment pas revendiquer.
Peu importe les motivations clairement politiques qui ont déclenché les rebellions à Londres, ainsi que les inquiétudes croissantes, également politiques, concernant les inégalités économiques et le comportement raciste de la police : tout cela a été bien décrit, même si beaucoup de Britanniques ne veulent guère en entendre parler.
Mais je veux aborder directement l'idée selon laquelle les émeutes seraient fondamentalement irrationnelles, comme l'exprime symboliquement le fait de dénigrer la "populace".
Ecoutons attentivement, occultons le flot de critiques des médias et prêtons l'oreille à ce que nous disent les rebelles :

Argument 1: rien d'autre n'a marché alors pourquoi ne pas essayer cette méthode?

Quand ITV a demandé à un jeune rebelle s'il pensait que se rebeller devait mener à quelque chose, sa réaction a été à la fois pragmatique et profonde:

"Vous ne seriez pas en train de me parler actuellement si nous ne vous étions pas révoltés, hein? Il y a deux mois, nous avons défilé jusqu'à Scotland Yard, nous étions plus de 2,000, tous noirs, et c'était une manifestation pacifique et vous savez? Il n'y a pas eu un mot dans la presse. La nuit dernière, il y a eu quelques émeutes et quelques pillages et voilà le résultat”.

Comme l'a dit un autre: "On ne peut rien faire de normal si on veut se faire entendre".
En d'autres termes, notre mécontentement légitime n'a pas été pris en compte par la voie officielle, et donc, ceux qui souffrent ont recours aux voies non officielles. Si quelqu'un a autre chose à proposer, j'écoute. Non pas que je veuille dire que les rebellions ont une logique unique partagée par tous les participants, mais on y trouve une logique, quand même.
Ce n'est pas la première fois non plus que des révoltes donnent des résultats: en 2009, à Oakland, ce sont les révoltes, et uniquement les révoltes, qui ont conduit à l'arrestation et à la condamnation de l'officier de police de Bart, Johannes Mehserle, pour la mort d'Oscar Grant.
Et cette efficacité s'étend au tactique. Alors que la gauche manifeste, cernée par un cordon de police, ces rebelles des rues se sont avérés bien moins vulnérables à la tactique de la "*mise en enclos": des groupes de jeunes qui circulent de façon imprévisible ne peuvent pas être pris au piège efficacement. Et contrairement aux militants, ils retournent souvent sur le lieu des incidents, cherchant la confrontation directe avec la police.
Les pillards semblent avoir été plus habiles. Des groupes importants de personnes partis à l'assaut des magasins disparaissaient en quelques secondes dans un lotissement à proximité dès qu'ils entendaient les sirènes des voitures de police.

Argument 2: les riches ont le droit, pourquoi pas nous?

Les pauvres ne sont pas stupides au point de ne pas avoir remarqué ce qui se passe dans le monde autour d'eux.
La crise capitaliste a mis en place une redistribution massive des richesses, les banques et les investisseurs ayant été renfloués aux dépens de la population, les récompensant de fait pour leur attitude prédatrice et augmentant la dette nationale au profit de la croissance économique. Les riches considèrent leurs bénéfices comme des services essentiels, les aides sociales sont réduites drastiquement et, devant un "pillage" aussi évident, nous, nous sommes, en quelque sorte, censés ne nous apercevoir de rien.
(…)
Comme l'a dit une jeune femme qui venait de voler dans un magasin; "nous récupérons nos impôts", et un autre a déclaré au Guardian, "les responsables politiques disent que nous pillons et que nous volons, mais ce sont eux les gangsters à l'origine".

Argument 3: situer les émeutes.

Il est primordial pour l'image de la populace irrationnelle d'insister sur le fait que l'essentiel des destructions ont touché les quartiers populaires, et là, il s'agit d'une logique fondamentalement coloniale. On ne peut pas faire confiance aux pauvres et aux Noirs: regardez ce qu'ils font aux leurs. Incapables de se gérer, il faut leur apprendre la civilisation, par la violence, s'il le faut.
Et là encore, c'est Oakland qui revient à l'esprit: après les révoltes là-bas, un salon de coiffure africaine isolé, figurant parmi les nombreuses boutiques dont les vitrines ont été fracassées, est devenu le symbole pour les médias de l'"irrationalité" des émeutiers, dont le seul objectif était de détruire.
Il faut savoir que les pauvres ont rarement des biens qui leur appartiennent, même dans leurs "propres" quartiers.
Pour couper court à ce discours, il faut s'informer sur ce que font les rebelles tout autant que les écouter. Si les quartiers populaires ont certes subi des dégâts (ce sont les quartiers populaires qui pâtissent toujours le plus des insurrections) on a moins entendu parler du ciblage plus explicitement politique: des commissariats détruits pas les flammes, des vitres des tribunaux qui ont été fracassées par ceux qui avaient eu affaire à eux, et le caractère implicitement politique du déferlement des jeunes dans les quartiers voisins pour s'attaquer aux magasins de luxe et aux franchises.
Ne serait-ce que la première nuit, les rebelles à Tottenham s'en sont pris à "Boots, JD Sports, O2, Currys, Argos, Orange, PC World et Comet,” (Le Guardian) alors que certains dans le quartier voisin de Wood Green mettaient à sac les imposants HMV et H&M pour revendre ensuite tranquillement leurs biens nouvellement acquis.
Cette tendance a, semble-t-il, été ignorée par les analystes du Guardian, qui se perdaient en conjectures quand le lieu des révoltes ne correspondait pas directement aux endroits où le taux de pauvreté était le plus élevé.
Et il n'y a pas que la presse gauchiste qui ait laissé filtrer ces détails : Danny Kruger, ex-conseiller de David Cameron a déclaré:

"les quartiers qui ont été les plus touchés par les émeutes lundi n'abritent pas les cités les plus défavorisées. Enfield, Ealing, Croydon, Clapham ... ces endroits ont des députés conservateurs, bon sang. Une bande s'en est pris au Ledbury, le meilleur restaurant de Notting Hill".

Tout en refusant de condamner les rébellions, l'intellectuel marxiste Alex Callinicos indique toutefois que ce pillage est "une forme de consumérisme système D … qui reflète la marchandisation intense des aspirations à l'ère de la pensée néolibérale".
Cette vision occulte le rôle bien plus complexe des biens de consommation lors d'une émeute, qui était évident à Oakland ou au Venezuela: non seulement le pillage d'articles de luxe est bien plus complexe que ne le laisse entendre Callinicos, mais l'argument du pillage en tant que consumérisme expliquerait difficilement qu'il y ait eu à la fois la destruction de produits de luxe et l'appropriation de produits de première nécessité qui en découle souvent.
Malgré l'exploitation idéologique du spectre de l'hystérie de la foule, selon les termes d'un observateur: "il n'y a rien d'irréfléchi" dans les révoltes de Londres.

"Une insurrection des masses populaires"

Les médias britanniques ont désormais largement fait front contre la rébellion, utilisant un volant de critiques qui oscillent entre des propos violemment réactionnaires et une hystérie cocasse.
Mais cela ne s'est pas passé sans qu'il y ait une première erreur, une erreur de jugement qui a élargi la fêlure, pourtant minuscule, où s'était faufilé un homme devenu, depuis, le symbole de la résistance à la propagande médiatique.
Darcus Howe, neveu du marxiste originaire de la Trinidad, C.L.R. James, a semble-t-il, hérité de la capacité de son oncle à ne pas être dupe de la propagande raciste à l'égard des "bandes" et de discerner le fond politique qui existe dans les actes de résistance quotidiens apparemment apolitiques, de reconnaître ce qui est nouveau, même sous la coquille craquelée de l'ancien.
Lors d'une interview en direct à la BBC , où on lui demandait de qualifier les émeutes récentes, Howe a répondu:

"Je n'appelle pas ça une émeute, j'appelle ça une insurrection des masses populaires. Ca se passe en Syrie, ça se passe à Clapham, à Liverpool, à Port d'Espagne, à Trinidad, et c'est un événement à caractère historique
(…).

Quand Howe a refusé de suivre le scenario habituel qui s'écrit de façon spontanée, un scenario si connu qu'il n'y a pas besoin, en général, de donner l'ordre de le lire, la correspondante de la BBC, énervée, a commencé alors par tenir des propos incohérents, pour finir par des attaques ad hominem.
Si Howe tentait d'expliquer le contexte des rébellions, n'était-ce pas, alors, qu'il en excusait les conséquences, et lui même n'avait-il pas, d'ailleurs, participé à des émeutes quand il était jeune?
C'était faux, mais ce qui est sûr, c'est qu'il avait été accusé d'avoir participé à des émeutes: Howe avait été jugé à Londres pour avoir participé à des bagarres et à des émeutes en 1971, mais avait été acquitté.
Après une seconde relaxe de Howe, accusé d'avoir agressé un agent de police, Linton Kwesi Johnson avait écrit un poème en hommage à celui-ci, appelé "Man Free" (…)

(Edit: Une vidéo de l'interview enregistrée par un téléspectateur circule sur le web, et a été vue par des millions d'internautes, et depuis, la BBC a été obligée de présenter ses excuses mettant cet incident sur le compte d'obscurs "problèmes techniques").

Un événement à caractère historique

Darcus Howe a raison: il y a quelque chose de spécial à cet "événement à caractère historique". Peut-être cela a-t-il commencé en 1989, dans l'hémisphère sud, quand les Vénézuéliens se sont insurgés contre le néolibéralisme lors des révoltes, appelées le Caracazo , et qui avaient été réprimées dans le sang et les flammes, faisant près de 3000 morts.
Qui était au cœur de cette quasi-insurrection, ce détonateur au retentissement historique mondial, qui avait transformé le Venezuela pour toujours et été à l'origine de tout ce qui a suivi depuis? Les pauvres habitants des barrios qui entourent Caracas et d'autres villes du Venezuela, résultat de décennies de sous-développement systématique dont le néolibéralisme naissant avait accéléré les effets. C'étaient les habitants des bidonvilles dont notre planète a été vite constituée (voir note: Mike Davis, NDT), qui, privés de pouvoir politique et de lieu de travail où pouvoir faire grève, avaient découvert le lieu où mettre en pratique leurs actions politiques : la rue.
Mais les emplois ayant été délocalisés dans le sud, la crise est arrivée au Nord. Ou plutôt, elle avait toujours existé, dans le sud du Nord et le nord du Sud, mais les mesures d'austérité ont commencé à étendre les effets de la crise actuelle contemporaine à de plus larges pans de la population. Dans ce contexte, critiquer les effets des émeutes dans ce moment historique est à peu près aussi efficace que de se lamenter contre l'existence de la gravité. Ceux qui descendent dans les rues de Londres et d'ailleurs sont les produits de la société créés par les restructurations capitalistes à long terme et les mesures d'austérité à court terme. Mais un sujet historique n'obtient pas son statut simplement en étant un produit: d'abord, il doit agir.
L'oncle de Darcus Howe, C.L.R. James, aujourd'hui décédé, affirmait clairement que c'est dans un mouvement de ce genre que le monde nouveau émerge de la coquille de l'ancien et, dans ce cas-ci, j'espère seulement avoir vu quelques signes encourageants.
Tout d'abord, il y a l'esprit d'unité sans précédent qui est apparu dans les rues de Londres et d'ailleurs. Selon Jay Kast, éducateur, dont les propos ont été recueillis par le Guardian: "(…) les révoltes ont unifié transversalement des jeunes gens défavorisés qui s'identifient les uns aux autres".
Kast explique que les marqueurs de territoires qui délimitent normalement les quartiers où habitent ces jeunes gens semblent avoir été effacés.
"En temps ordinaire, ce serait interdit de se rendre sur le territoire de quelqu'un d'autre … maintenant, ils peuvent se déplacer où ils veulent. Ils se reconnaissent comme étant ceux qu'ils ont vus à la télévision (dans les émeutes). Cela les unit.
Ce sentiment d'unité n'existe pas seulement au sein de différents groupes de divers endroits, mais s'étend également aux divers groupes ethniques qui ont, et c'est nouveau, participé: les Blancs pauvres, les Noirs britanniques, les immigrés d'origine africaine et antillaise, ceux originaires d'Asie du Sud-est, les musulmans et les juifs.
Alors que certains Juifs se sont plaints d'avoir été montrés du doigt à cause de la participation de juifs hassidiques aux révoltes de la première nuit à Tottenham, cela devrait plutôt être compris comme étant la preuve que, contrairement à ce qui était dit, il n'y avait pas que des Noirs ou que des musulmans.
Des gens de tous âges ont également participé, avec des familles entières qu'on voyait en train de piller ou de faire le guet.
Ce sont, toutefois les jeunes, essentiellement de sexe masculin, qui ont constitué le fer de lance des rebellions, comme le souligne un observateur: "c'est un mouvement de la jeunesse, d'une jeunesse qui dit :'tu sais quoi, monsieur, je n'ai pas voix au chapitre, pas d'avenir, pas de chef de file".
Mais si C.L.R. James voyait le potentiel d'unité dans ces rebellions - les fêlures dans la coquille de l'ancien monde ont souvent des éclats dangereux – il était également parfaitement conscient que le clan opposé avait un potentiel équivalent: le retour de bâton raciste même chez les Blancs pauvres.
Et c'est ainsi qu'alors que la branche la plus libérale de la suprématie blanche est apparue sous la forme d'"armée de balayeurs" qui nettoyaient les rues à la suite des rebellions (avec des t-shirts sur lesquels étaient inscrits des slogans réconfortants comme "les émeutiers sont de la racaille"), des bandes de Blancs racistes comme l'"Enfield Army" sont également apparues, proposant leurs services à la police contre les émeutiers (cela, en plus du groupe plus organisé qui milite pour la doctrine de la suprématie blanche, appelé English Defence League ).

La gauche doit réagir

Dans un court billet (paru dans CounterPunch, NDT), Daniel Harvey exprimait le sentiment de beaucoup sur la gauche radicale qui oscille entre approuver les rebellions sans restriction et adhérer à la stratégie de condamnation des médias:

"Il nous faut rester loyaux vis-à-vis de cette crise. Il nous faut soutenir l'insurrection de ceux que ne sont pas entendus et qui ne peuvent pas s'exprimer dans notre société indécente (…) le problème, ce n'est pas les excès de tel ou tel acte, c'est que les rebelles ne sont tout simplement pas assez radicaux. Il nous faut les radicaliser davantage (…) nous devons soutenir cette colère, mais aussi politiser cette colère, et la transformer ainsi en un événement véritablement fort et dangereux – un moment révolutionnaire plutôt qu'une émeute.

C'est certainement vrai, d'une certaine manière, mais ce discours omet le fait que la "gauche" est très loin derrière les rebelles de la rue.
Dans de nombreux cas, ces révoltes sont bien plus radicales et plus efficaces que la gauche s'est avérée l'être et les rebelles ont certainement dépassé la gauche en savoir-faire tactique autant qu'en audace pure. Qui est véritablement plus radical?
Il n'y a pas de doute, "la gauche doit réagir", comme l'écrit un chroniqueur, ne serait-ce que pour contrer le discours de la droite, mais seulement si nous reconnaissons que nous avons beaucoup à apprendre de ceux qui couraient partout dans les rues de Londres.
Comme l'a dit un témoin, "ces jeunes n'ont rien à perdre", à quoi, nous serions tentés d'ajouter: "sauf leurs chaînes" …

George Ciccariello-Maher est maître de conférences en Science politique à l'université de Drexel (Philadelphie, Pennsylvanie). Il termine actuellement une histoire populaire de la Révolution Bolivarienne au Venezuela et commence une histoire de "la populace, des gangs et de la racaille".

Source: From Tottenham to Oakland /Planet of Slums, Age of Riots; August 12 - 14, 2011

Mike Davis Planète de bidonvilles
Croissance des bidonvilles: une étude approfondie de la question.

Compléments d'informations:

(En anglais) True News: The Real Source of the British Riots (la véritable origine des émeutes en Angleterre) : chiffres et explications.

Tactique du "kettle" ("mise en enclos, parcage").
Police 'kettle' tactic feels the heat
Lors de manifestations, la police piège les manifestants en les enfermant dans un périmètre d'où ils ne peuvent plus sortir (cela peut durer des heures), toutes les issues étant bloquées par des cordons de police.
gérard menvussa
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Message  nico37 Sam 20 Aoû - 0:02

Les émeutes ne sont pas qu’une "violence insensée"
Tract distribué par la Solfed à Londres en Août 2011 / Traduit par le SIA32 / CNT-AIT

La fureur de nos cités est ce qu’elle est, laide et incontrôlée. Mais nous savions tous que ces émeutes allaient survenir. La grande-Bretagne a dissimulé ses problèmes sociaux pendant des décennies, les encerclant d’un brutal cordon de policiers. Les aides sociales sont supprimées, les centres d’assistance sociale fermés, et les loyers augmentent ainsi que le chômage. Les gens qui eurent toujours très peu n’ont plus rien à présent, plus rien à perdre.

Et même quand les grands de ce monde et les bons sont avertis, avec l’intox flagrante que constitue le cas Mark Duggan [1], les médias et les politiciens seraient restés aussi silencieux que s’il n’y avait eu qu’une manifestation silencieuse devant un poste de police. Il semble que c’est uniquement quand les gens se rebellent dans les rues que les médias se sentent obligés de leur donner une couverture médiatique à tout prix - et ils parlent alors seulement des éléments anti-sociaux, des gens qui blesseront n’importe qui, et jamais des gens qui se saisissent un peu de la richesse qu’ils peuvent parce qu’il n’y a aucune chance de le faire autrement.

On ne nous explique pas pourquoi les incendiaires, les agresseurs et les gangs sont ce qu’ils sont ou pourquoi les cités sont ce qu’elles sont, ni ce qui pourrait être fait pour eux pas seulement aujourd’hui, mais aussi demain et dans les années à venir. Ces problèmes existent depuis aussi longtemps qu’on s’en souvienne. Ils ont conduit aux émeutes des années quatre-vingt et quatre vingt-dix - et les choses empirent.
Le point de vue anarchiste

Il ne devrait donc pas y avoir de surprise à ce que des gens vivant une existence de pauvreté et de violence soient enfin partis en guerre, à ce que des gens pillent les écrans de télé à plasma qui paieront deux mois de loyer. Pour beaucoup, c’est la seule occasion de bénéficier d’une miette de redistribution économique quand les emplois disparaissent et que les riches accaparent tout.

Toute notre société est basée sur l’adoration de la richesse et l’exploitation des pauvres ; si les gens choisissent de riposter et de prendre des biens chez Argos ou Lidl, nous ne condamnerons pas cela. Mais brûler des boutiques avec des logements à l’étage, commettre des agressions... constituent une attaque contre les nôtres et l’on doit s’y opposer car le résultat final est le même que lorsque nous laissons n’importe qui nous exploiter et nous diviser - nous sommes tous perdants. Nous disons : ciblez les riches, les patrons et les politiciens. Ils ne se sont pas souciés de Hackney ni de Lewisham hier, ils ne s’en soucieront pas demain. Les politiciens parlent déjà de la crise économique - ils veulent juste une fois de plus tirer le rideau sur les problèmes et qualifier ceci de "faits criminels insensés". Les riches réclament davantage de fusils dans les cités - ils déclencheraient avec joie une guerre civile avec nous au milieu. Ne les laissez pas s’en tirer avec cela !

Nous devons nous unir et commencer à nous organiser pour faire reculer ces gens, pour construire un monde où nous autogérerons notre société sans patron, ni propriétaires, ni charge policière à la matraque. Le coup d’envoi n’est qu’un début. Nous devons aller plus loin. Nous devons nous organiser et récupérer le monde qui nous a été volé.


[1] Ndt : Mark Duggan était un jeune homme de 29 ans, père de famille. Il a été tué par la Police à Tottenham le 4 août 2011, ce qui a déclenché les émeutes. Dans leur grand respect dû aux défunts, les médias réactionnaires ont rappelé son casier judiciaire, montrant leur nostalgie de la peine capitale, et leur peu d’estime du Droit qui ne la prévoit pas, quand ils se montrent tâtillons pour punir le pillard voleur d’électroménager au nom du Droit de la Propriété

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Message  gérard menvussa Sam 20 Aoû - 0:04

Tract distribué par la Solfed
C'est quoi la solfed ?
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Message  nico37 Sam 20 Aoû - 8:44

gérard menvussa a écrit:
Tract distribué par la Solfed
C'est quoi la solfed ?

Solidarity Federation : http://www.solfed.org.uk

Pour terminer une pub dont la diffusion a été retardée (le visionnage vous rappellera une info postée plus haut) en Angleterre et son détournement :

L'original :
Le détournement :

nico37

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Message  gérard menvussa Sam 20 Aoû - 18:36

Analyse trés intéressante du "vagabond intempestif
Émeutiers fantômes



Grâce aux hélicoptères, les images étaient parfaites. Dignes d’Hollywood. Scènes de pillages et pyromanes en action en pleine nuit. Des flammes hautes de plusieurs étages éclairant les façades d’immeubles de brique attaqués par des émeutiers protégés par leurs simples hoodies. Quelques sirènes ici ou là. De rares lances à incendie. Et puis, au petit matin, des pâtés de maison entiers réduits en cendres. Comme après un bombardement. De véritables scènes de guerre. The Guardian titre en une le mardi 9 août « La bataille de Londres » (« The battle for London »). Très vite la carte des émeutes londoniennes s'emballe. On constate des altercations en plein centre de Londres. À Oxford Circus. Pas loin des touristes. Merci Twitter.




Médias traditionnels à la peine






Car les médias traditionnels sont bien à la peine. En France, les chaînes d’info en continu sont en vacances (comme les autres médias). I-télé fait intervenir son « correspondant » de son studio londonien, avec, façon carte postale, image traditionnelle du Parlement anglais et de Big Ben dans son dos. Il n’a pas grand chose à dire, le pauvre. À part que les flics sont désorganisés à cause de récentes restrictions budgétaires et des dernières démissions liées à l’affaire Murdoch. On n’ira pas jusqu’à se demander si le système de corruption dévoilé le mois dernier impacte la paie des policiers. Aux Etats-Unis, une série à elle seule ose répondre à la question pour la ville de Baltimore, The Wire, dans laquelle méchants et gentils se confondent.




Chaos et toute puissance






Alors pour combler l’absence de sens, on doit se contenter d’images d’hélicoptères. Se contenter, ah oui ? De là haut, policiers et émeutiers ressemblent à de si petites fourmis. Confortablement installés, nous autres téléspectateurs omniscients « profitant » de ce monde globalisé avons une impression fugace de toute puissance. On attend la suite. On a soif de spectacle. On en veut encore plus. Comme dans les films en 3D qui multiplient les scènes de destruction urbaine à grande échelle, dans notre ère post-11 septembre. Dernier blockbuster de ce genre : Transformer 3 avec un déluge de combats à Chicago. Tels des enfants prenant un malin plaisir à détruire leurs jouets. Ou du moins, comme de grands enfants jouant à Sim City sur leur ordinateur.


Mais l’effroi nous prend également devant tant de désordres dans une ville si proche de nous. Une capitale européenne à 2 h 30 heures de Paris en TGV. D’ailleurs, n’est-ce pas les pubs Eurostar qui nous incitent à faire notre shopping là-bas ? Cette fois-ci les émeutiers s’en sont chargés pour nous. On l’a oublié ces dernières années, depuis l’acmée du règne de Tony Blair lors des célébrations du Millenium, mais Londres n’est pas qu’une grande roue, Londres n’est pas qu’un grand stade pour futurs touristes mondialisés friands de grands jeux (avec les JO en 2012).




Mixité et inégalités sociales






C’est également une ville en proie à la spéculation immobilière, à l’accroissement flagrant des inégalités, à la gentrification d’anciens quartiers ouvriers, à la mode Harlem. Et bien sûr, la ville des traders rois. On trouve désormais de grands lofts, clubs et magasins hyper-branchés du côté de Brick Lane et Shoreditch, anciens quartiers ouvriers, à deux pas du centre des affaires de la City (les nouveaux quartiers à la mode, façon Williamsburg à New York, pour hipsters ultra connectés). Il y a une vingtaine d’années, le mouvement avait déjà commencé du côté d’Islington (jouxtant au Nord la City).


Aujourd’hui, au centre d’Islington justement, les supermarchés regorgent de légumes bios et de produits bien-être, fleuristes et antiquaires se sont installés, et même des sièges sociaux d’entreprises derrière de belles façades en verre. Pourtant, quelques centaines de mètres plus haut, on trouve des HLM très paupérisés, et des taxiphones, snacks kebabs, et autres petits dealers parsèment les rues. Pas loin le club de football Arsenal a décidé d’installer son nouveau stade de 60 000 places payé par la compagnie aérienne dubaïote Emirates. Islington qui fut le théâtre de violences lors des dernières émeutes… The Guardian a d’ailleurs réalisé sur son site internet une très intéressante carte rapportant la localisation des émeutes au taux de pauvreté des quartiers concernés.




L’urbanisme parisien, sécuritaire avant tout…






En comparaison, la configuration de la métropole parisienne n’a rien à voir : plus de 11 millions d’habitants (alors que le Grand Londres n’en compte que 7,6), mais également des banlieues bien plus morcelées et ségrégées, parcourues à la fois par de grands ensembles et des lotissements pavillons Phoenix à perte de vue. À Paris, de l’autre côté du Périph, en dehors des grandes surfaces, bien peu de magasins, bien peu de bars. La nuit, on trouve ainsi 1000 établissements ayant une autorisation d’ouverture (après 2h du mat) à Paris intra-muros, et à peine 60 en proche couronne !


Contrairement à Londres, le système de transports publics est également divisé en deux : d’un côté le métro centenaire de Paris, et de l’autre, le vieux système des RER mis en place au cours des années 1970. Et au niveau des portes d’échange de ces deux matrices qui ne se rencontrent que très rarement socialement, un maximum de forces de police, avec des compagnies de CRS et de gendarmes mobiles quasi-immobilisés : pensons aux Halles, à la gare du Nord, à la Défense. Décidément, les autorités parisienne (d’État) gardent en mémoire les soubressauts de la Commune… En tout cas, l’exemple londonien montre une chose : pour résoudre les tensions en cours dans la métropole parisienne, en appeler à la « mixité sociale » ou prévoir la construction de grandes lignes de métro (pourtant nécessaires), ne suffira pas.






… et des voitures brûlées à quelques kms de l’Élysée






En dehors des fameux événements de novembre 2005 qui éclatèrent à Clichy-sous-Bois sous les yeux médusés du monde entier, des émeutes ponctuelles, il y en a régulièrement. On se rappelle de celle opposant des bandes du 92 et du 93 à la Défense, mais également des affrontements à la gare du Nord suite à une interpellation musclée contre deux contrevenants qui dénonçaient le prix des billets. Mais c’est également en juin dernier une manifestation à Belleville de Chinois dénonçant « l’insécurité » qui se termine tellement mal qu’une camionnette de flics est retournée sur la voie publique, loin des caméras… plus occupées à filmer au même moment Roland Garros. Même silence médiatique lorsque des voitures brûlent par dizaine dans les arrondissements parisiens, notamment dans le 20e ou le 19e, et ce, à quelques kilomètres du Palais de l’Élysée… On préfère faire peur avec les « banlieues ».


Mais à Londres comme à Paris, même topo : qui sont ces émeutiers derrière leurs capuches ? En 2005, les médias anglo-saxons, et notamment américains, parlaient des muslims, leurs confrères français de droite comme de gauche n’ont pas hésité dans un premier temps à faire des amalgames approchants sur fond de guerre civile. Il a fallu attendre une note des Renseignements Généraux (sic) qui évoquait une situation de « révolte sociale » pour ramener tout le monde à une juste mesure. Depuis, les sociologues, comme Gérard Mauger, ont parlé de révoltes protopolitiques, pour tenter d’expliquer la forme violente de ces émeutes et l’absence d’organisations et de revendications précises derrière celles-ci. Pour comprendre, il a fallu aussi attendre que de rares journalistes parisiens réalisent un travail de fond dans ces quartiers populaires pour aller à la rencontre de ces émeutiers comme Ariane Chemin pour Le Monde.




Captures de vidéos surveillance et dénonciations à tout va





En France, ces jeunes, on les aperçut également en comparution immédiate au tribunal de Bobigny dans les semaines qui suivirent les émeutes. Une véritable justice de masse où des émeutiers sans casier judiciaire prirent facilement six mois de prison fermes pour avoir été interpellés au mauvais endroit au mauvais moment. Les avocats pouvaient bien crier au non respect de l’individualisation des peines, le pouvoir avait décidé : il fallait frapper vite, et fort.


Même scénario en Angleterre, avec David Cameron, le Premier ministre conservateur. Le pauvre dût interrompre ses vacances familiales en Toscane pour dénoncer ce qu’il appella les « criminels ». Devant l’exaspération populaire et les énormes dégâts (on parle aujourd’hui de plus de 200 millions d’euros de destructions…), le bâton allait s’abattre d’une manière implacable. Ainsi, depuis la fin de semaine dernière, des centaines de prévenus passent en comparution immédiate écopant de peines de prisons parfois très lourdes pour les faits reprochés. Cameron a prévenu : chaque émeutier va payer pour tous. Parmi les premiers à passer devant la justice, on compte un chef cuisinier, une athlète représentant les futurs JO de 2012, une fille de millionnaire, un instituteur…


Peu importe si ces profils cadrent mal avec l’histoire officielle à propos des « criminels ». Mais désormais, ces derniers ont un visage. Bien qu’ils restent sans paroles. Absents, et de toute manière inaudibles, dans le débat politique. Les autorités n’ont pas hésité à diffuser les captures d’écran de leurs visages enregistrés par les très nombreuses caméras de surveillance installées dans la capitale britannique. La Metropolitan Police a même lancé un appel - "Operation Withern" - sur son site internet. Les tabloïds en ont publié des dizaines, appelant leurs voisins à les dénoncer. De son côté, le New Labour, le parti travailliste, accompagna le pouvoir conservateur en évitant soigneusement d’évoquer la situation sociale. Ce parti tient en effet une grande part de responsabilité dans celle-ci, Tony Blair ayant poussé durant son règne la logique carcérale à son extrême pour « tenir » les classes populaires. De l’État Providence à… l’État Pénitence, comme l’a souligné depuis longtemps le sociologue Loïc Wacquant. De son côté, le quotidien libéral The Independent parle sans se poser trop de questions « d’émeutes shopping ». Les conservateurs de tous bords dénoncent une « culture de la violence », et bien sûr, réflexe facile, le « multiculturalisme »…






La responsabilité des « élites » selon The Daily Telegraph







Nouvelle preuve de l’effondrement idéologique des gauches européennes, c’est le quotidien conservateur, The Daily Telegraph qui a peut-être le mieux décrit la situation actuelle. À peine quatre jours après les émeutes, The Telegraph parle en effet d’une « rébellion du sous-prolétariat », et explique que « ce n'est pas une coïncidence si ces troubles éclatent alors que l'économie globale est au bord de la chute libre». Deux jours après, un de ses éditorialistes les plus influents, Peter Oborne, en remet une grosse couche en estimant que « la criminalité dans nos rues ne peut pas être dissociée de la désintégration morale des plus hauts rangs de la société moderne britannique. Les deux dernières décénnies ont vu un déclin terrifiant des standards au sein de l'élite gouvernante britannique. Il est devenu acceptable pour nos politiciens de mentir et de tricher. (..) Il n'y a pas que la jeunesse sauvage de Tottenham qui a oublié qu'elle a des devoirs aussi bien que des droits, mais aussi les riches sauvages de Chelsea et Kensington ».

Peter Oborne dénonce ainsi l’élite londonnienne qui profite de la mondialisation « aussi déracinée et coupée du reste de la Grande-Bretagne que ces jeunes hommes et femmes sans emploi qui ont causé de si terribles dommages ces derniers jours. (..) Peu d'entre eux s'embêtent à payer leurs impôts britanniques s'ils peuvent les éviter et encore moins sentent un sens d'obligation envers la société, un sentiment pourtant naturel il y a encore quelques décades pour les riches et les mieux lotis ». Peter Oborne s’en prend également à l’élite politique en évoquant le scandale des dépenses des parlementaires révélé par The Daily Telegraph en 2009. Ainsi, parmi les plus virulents contre les jeunes jeudi au Parlement, le journaliste rappelle que le député Gerald Kaufman avait demandé le remboursement d'une télévision pour 8.865£ (près de 10.000 euros).

Oborne conlut alors son édito de cette manière : « le Premier Ministre excusait son erreur de jugement en embauchant l'ancien directeur de la rédaction Andrew Coulson en clamant que "tout le monde mérite une seconde chance", il était très parlant qu'il n'a pas parlé de seconde chance lorsqu'il a requis une punition exemplaire pour les émeutiers et les casseurs. Ces doubles standards de Downing Street sont symptomatiques des doubles standards répandus au sommet de notre société. (..) Bien évidemment, ces derniers sont intelligents et assez riches pour être certains qu'ils obéissent à la loi. Cela ne peut être dit des malheureux jeunes femmes et hommes, qui sans espoir et aspiration, ont causé tellement de désordre et de chaos ces derniers jours. Mais les émeutiers ont cette défense : ils suivent tout simplement l'exemple montré par les figures plus âgées et respectées de la société ».






De son côté, le tabloïd The Daily Mirror rappelle que Cameron eut également une jeunesse tumultueuse.






Et rappelons, en guise de conclusion provisoire, qu’actuellement en Grande-Bretagne, 1 million de jeunes de 16 à 24 ans sont officiellement au chômage, un chiffre jamais atteint depuis la crise des années 1980. Comme le rappelle The International Herald Tribune dans son édition de mercredi dernier : le nombre de chômeurs parmi les jeunes a quasiment doublé depuis la crise financière de 2008, avec aujourd’hui un taux de chômage moyen pour cette tranche d’âge de 20 %.






Bien sûr, en France, les responsables politiques se sont bien gardés de commenter ces derniers chiffres, préférant les visages d’émeutiers fantomatiques...
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Message  nico37 Lun 22 Aoû - 19:27

About the social and economical background of the riots in Britain
À propos du contexte économique et social des émeutes en Grande-Bretagne Traduction du SIA32 / CNT-AIT

Comme vous avez pu le voir grâce à la couverture médiatique, il y a eu des émeutes en Grande-Bretagne. Le fait que des émeutes se produisent n’est pas surprenant dans la mesure où une large part de la classe prolétaire britannique vit dans la misère et les privations. De nombreuses communautés de la classe ouvrière britannique ne se sont jamais remises de la fermeture des industries telles que les mines de charbon ou les aciéries...

Ceci remonte aux années soixante-dix et quatre-vingt quand les structures industrielles britanniques furent décimées. Au début des années quatre-vingt, le phénomène émeutier s’installa en Grande-Bretagne avec le chômage de masse. Les émeutes étaient largement concentrées dans les quartiers défavorisés et les cités HLM - ces endroits sont de vastes zones de lotissement construites par les autorités locales et font partie des communautés les plus pauvres en Grande-Bretagne. Les cités HLM ont tendance à être habitées majoritairement par la classe des travailleurs blancs alors que les zones de quartiers défavorisés voient un taux élevé de population émigrée. Dans les années quatre-vingt, les médias ont essayé tout d’abord de caricaturer les émeutes en émeutes raciales, mais le fait que tant d’émeutiers proviennent des cités HLM de la classe prolétaire blanche a obligé les médias à abandonner leur tentative de rejeter la faute des émeutes sur les immigrés.

Bien que la Grande-Bretagne se soit dans une certaine mesure remise de la perte des industries, l’effondrement de la classe ouvrière organisée a signifié que la richesse en Grande-Bretagne s’est concentrée de manière croissante en haut de la société. La société britannique est maintenant aussi inégalitaire qu’au dix-huitième siècle. La situation dans les lotissements et les cités a empiré de bien des manières depuis les années quatre-vingt - la richesse est aux mains des dix pour cent de la population la plus riche et la pauvreté s’est accrue pour les vingt pour cent les moins riches. Le chômage est en général élevé, et le chômage des jeunes est massif dans les lotissements et les cités. La criminalité y est élevée et l’usage de la drogue et la criminalité afférente sont également répandus. Les taux de mortalité y sont plus élevés que dans des zones plus riches du pays. Les carences sociales sont importantes et la vie est en général assez triste pour une majorité luttant constamment pour juste survivre. Il n’est donc pas surprenant que les émeutes se soient concentrées dans les lotissements et les cités, comme dans les années quatre-vingt.

Le secteur des services publics combla dans une certaine mesure le vide laissé par la perte des emplois industriels mais ces emplois sont souvent à temps partiel et mal payés. Les salaires dans le secteur public sont si faibles qu’ils doivent souvent être complétés par des allocations. Même ceux qui travaillent sont donc allocataires sociaux. Dans le cadre des coupes sombres à l’œuvre en ce moment en Grande-Bretagne, ce sont les travailleurs du secteur public qui sont durement touchés avec la perte de centaines de milliers d’emplois dans le secteur public. Ce sont donc les zones les plus pauvres qui souffrent le plus de ces suppressions d’emplois, puisqu’elles dépendaient des emplois publics depuis la perte des emplois industriels.

Dans les quartiers défavorisés et les cités HLM, la vie est particulièrement difficile pour les jeunes. Comme dans toute récession, la première chose que font les employeurs est d’arrêter d’embaucher des travailleurs, ce qui signifie qu’il n’y a tout simplement plus aucun emploi pour les jeunes sortant de l’école. Il n’y a officiellement qu’un million de jeunes au chômage en Grande-Bretagne mais la réalité est bien pire. Les médias et le Gouvernement ont de plus attaqué les sans-emplois ces dernières années, les qualifiant de parasites refusant de travailler et heureux de vivre d’assistance. Ils n’ont pas fait que réduire les allocations, ils ont de plus rendu la vie plus difficile pour ceux qui en réclamaient, en harassant les gens, surveillés et forcés de prouver qu’ils cherchent du travail.

Inutile de dire que la colère s’est accumulée chez les gens dans les quartiers défavorisés et les cités HLM, en particulier parmi les jeunes qui sont constamment harcelés par l’État et la Police. Les jeunes gens de classe prolétaire se voient aussi caricaturés par les médias et les politiciens comme étant stupides et violents. Un nouveau terme dépréciatif ("charv"), utilisé pour décrire les jeunes de classe modeste, est maintenant d’un usage courant en Grande-Bretagne. La profondeur de la haine parmi les jeunes peut être évaluée par la vitesse à laquelle les émeutes se répandent.Il y a eu explosion de haine de la part des licenciés et des abandonnés. Le problème à l’œuvre, c’est que la colère des jeunes n’a pas de direction. Bien que l’essentiel des émeutes aient été concentrés vers les grands magasins, des boutiques et des domiciles ont été attaquées aussi dans les zones populaires, créant la peur dans des communautés de travailleurs. La colère n’est pas organisée bien que cela puisse heureusement changer si les choses se développent.

Les syndicats réformistes n’ont jamais réussi à s’organiser dans les classes laborieuses et parmi les chômeurs, et le syndicalisme ne signifie rien pour la plupart des jeunes travailleurs au chômage. Comme une partie de la Solidarity Federation commence à devenir un syndicat "fonctionnel", nous avons été dans un processus de développement d’une stratégie communautaire destinée à s’assurer du fait qu’ en tant que syndicat anarchosyndicaliste, nous nous organisons sur le lieu de travail et dans la communauté.

Durant la semaine dernière, la Solidarity Federation a émis des communiqués destinés à refléter la véritable nature des émeutes. Certains de nos commentaires ont été repris par les médias nationaux, avec pour résultat un site web surchargé comme les gens cherchaient plus d’informations. Nous distribuerons aussi des tracts dans les zones ouvrières.La dernière version du texte est en pièce-jointe. Cependant, le but de la Solidarity Federation est de construire une présence permanente dans les zones ouvrières. Notre but est de devenir une partie de la lutte quotidienne des travailleurs contre le capitalisme.

Secrétaire International de SF-AIT

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Message  nico37 Mer 24 Aoû - 13:15

Deptford residents demonstrate against the social causes of the riots Fri, 12/08/2011 - 12:26

A Deptford assembly organiser and SLSF member hurriedly writes:

On Wednesday 10th August, around 200 Deptford and Lewisham residents were joined by a smattering of political activists for a demonstration in the name of DEPTFORD UNITY, against the social inequalities behind this week riots and disturbances across the country. The demonstration had been agreed by an impromptu neighbourhood assembly on Deptford High Street the night before, which had progressed from discussing fire safety to political and social problems within a matter of hours.

With a lot of tension and fear in the air, and with the EDL mobilising nearby in Eltham, it was an uphill battle for the assembly to convince their neighbours to join the demonstration. In the end, the weariness of Londoners was illustrated both by the legions of folk who sheepishly made their apologies, and by the march’s overtly ‘peaceful’ nature, confusedly talking about “discipline” while going through areas where there was abundant evidence of violent clashes between locals and cops.

The police presence on the demonstration was typically exaggerated, with police horses at the front and back and a large number of –all-white – cops pushing and barracking demonstrators. They also told Muslim youth who had gathered outside a mosque that it was a far-right march, despite the banners and chants of “BLAME THE GOVERNMENT, NOT OUR KIDS” and the number of non-white folk.

Even so, the march was joined by a number of passers-by, including a rollerblading crew, who were being gossiped about on Twitter as “a group of black youth on Smartphones”. South London Solidarity Federation made efforts to overcome the ethnic tensions and ignore the bigotry of some of the local Twitterati, distributing leaflets in which they talked about their sympathy with rioting youth, but calling on them to organise and focus their rage constructively in order to change their situation.

When the march arrived at Lewisham Town Hall, lipservice was paid to trade unions by the usual suspects, while a young black man and an Asian girl spoke about their experiences and the problems they encounter with the police and living in inner city London. Simultaneously, Channel 4 News and the Iranian Press TV hovered around, interviewing demonstrators.

In the end, the demonstration was a mitigated success. Not as many locals attended as was hoped, while the local left’s attempts to blame the riots on “the cuts” was shallow and ill-conceived. Clearly the motivations behind this week’s disturbances are more fundamental than the recent budget cuts, appearing to hint at whole lives of atomisation, disengagement and anger on our estates. The efforts of Deptford residents to talk to each other and collectivise their problems can only be positive. Together we can fight to improve our lives and our neighbourhoods.

More worryingly, racial tensions are once again rearing their ugly head, and SLSF stands in solidarity with the spontaneous demonstration of black men from Lewisham, who gathered a few hours later against the EDL, solely chanting “PEACEFUL PROTEST, WE’RE HERE TO PROTECT OUR COMMUNITIES”, only to be surrounded by more cops. Any attempts by the far-right – and the police, who tried to block supporters from joining them – to divide us along racial lines must be resisted by Lewisham residents of all colours.

Finally, with the state’s reaction now in full force, we must act to defend those accused of rioting and looting in the last week. This means mobilising in defence of politically-motivated council house evictions or benefit cuts, as well as distributing legal advice and offering solidarity to those facing charges.

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Message  nico37 Lun 29 Aoû - 11:53

Angleterre : "A time to buy, and a time to sell" lundi 29 août 2011, par John Saint-Croix

Dix août, lendemain d’émeute. La bonne société anglaise se réveille avec la gueule de bois. Après Londres et ses banlieues, Manchester et Birmingham se sont jointes aux affrontements, embrasement généralisé. Parmi les commentateurs, rares ceux qui dévient de la ligne « ce sont des sauvageons à abattre ». Il y a pourtant beaucoup à dire sur cet été anglais. De Manchester, analyse.

L’association des assureurs britanniques vient d’évaluer les dégâts des récentes émeutes à 200 millions de livres sterling. C’est bien la seule abstraction à laquelle il soit conseillé de s’élever. Aux journalistes, aux politiciens, aux sociologues, et à tous ceux qui sont invités à discourir, ces émeutes posent un certain nombre de contradictions qu’ils ne tiennent pas à résoudre. Les médias anglais font mine de beaucoup s’interroger, sans parvenir à fournir un semblant de réponse aux centaines de questions accumulées, toutes accessoires. Une émission a même recensé les dix causes probables des émeutes, partant du principe qu’il vaut mieux dix hypothèses fallacieuses qu’une bonne raison. Ne pouvant invoquer une question purement raciale, ou religieuse ou même générationnelle [1], les analystes s’en remettent à une condamnation morale qui présente les acteurs de ces journées de la même manière que les émeutiers français des années précédentes : des casseurs, des délinquants, des incendiaires, des brutes et des lâches.
Cet « angle », répété de nombreuses fois, dès le début de la « couverture médiatique » déployée sur ces événements, est résumé en un mot, martelé dans un reportage de Mark Stone sur Sky News : « mindless », sans cerveau. Le géographe américain David Harvey a également souligné, dans un article paru immédiatement après les émeutes, la déshumanisation qui se cache derrière ces choix de langage mettant en avant l’animalité des protagonistes : « "Des adolescents sauvages et nihilistes", comme les a décrits le Daily Mail. Le mot "sauvage" m’a arrêté. Il m’a rappelé que les Communards, à Paris en 1871, étaient dépeints comme des bêtes sauvages, des hyènes, qui ne méritaient qu’une exécution sommaire (et parfois la recevaient) au nom du caractère sacré de la propriété privée, de la morale, de la religion et de la famille » [2]. Quelques jours après les « incidents », sur la façade du centre commercial Debenhams, à Londres, on appelait les honnêtes gens à dénoncer les « rats à capuche » [3].

Dans le même temps, les émeutiers sont dépeints non plus comme des brutes assoiffées de sang ou de dangereux agitateurs, mais comme d’opportunistes pillards dont la seule ambition est de dérober les biens que l’emploi de leurs talents n’a pu leur procurer. Ce qui est étonnant, c’est qu’il y a dix manières de voler bien plus efficaces (elles sont en tout cas pratiquées chaque jour à haut niveau) et beaucoup moins risquées que de se jeter sous les caméras de surveillance qui quadrillent les villes anglaises et dont la concentration n’est jamais plus forte qu’aux abords des magasins... Que les deux thèses, celle du fou sanguinaire et celle du rusé malfaiteur, paraissent contradictoires, n’est pas un problème. Pas plus qu’il n’est difficile de concilier que les émeutiers aient pu vouloir, dans le même temps, piller les marchandises et les détruire par le feu : on prêtera aux incendiaires l’avidité du voleur, et aux pillards l’inconscience homicide du pyromane. Ainsi, en alternant rapidement les « analyses », et sans jamais les confronter, l’une chassant l’autre indéfiniment, il est possible aux responsables du télécran de faire leur métier, c’est-à-dire raconter n’importe quoi et son contraire, simultanément.
Ils sont plus rares à avoir souligné l’euphorie fébrile et provocatrice qui se dégageait presque malgré eux des émeutiers, tout comme de ceux descendus dans les rues pour « défendre leur quartier » ou leur « communauté » et qui, pour beaucoup, étaient aussi excités que les premiers à l’idée de se réapproprier brièvement le contrôle du pavé.

On signale tout de même des morts ; cinq au total. Qu’on arrête les assassins. La police britannique voudra tenir sa réputation. Elle a même reçu des renforts inespérés de la population, encouragée à se constituer en milice. Les associations de commerçants, lourdement équipées en vidéosurveillance, ne se le sont pas fait dire deux fois. Comme en témoigne l’article d’Elise Vincent dans Le Monde, le système de délation s’est révélé « très efficace », selon Phil Burke, « responsable de la sécurité dans un hôtel du centre-ville » et porte-parole de Pub and Club, l’association de Manchester qui veille à ce que la ville « ait une vie nocturne sûre et vibrante ». Son acolyte, Andrew Stokes, président de l’association des commerçants du Village, le quartier gay historique de Manchester, n’est pas en reste :
« "Nous ne les laisserons pas gagner !", assure M.Stokes qui, comme une grande partie de l’opinion publique anglaise, voit dans les violences des jeunes moins l’expression d’un malaise social que l’assouvissement d’une forme "d’avidité". » « Ce qu’on veut ici, c’est ‘business as usual’ », ajoute le petit commerçant, sans sourire [4]. C’est très sérieux en effet : l’enjeu est de taille. « Nous devons montrer au monde, qui nous a observés avec horreur, que les auteurs des violences que nous avons vues dans nos rues ne sont en aucun cas représentatifs de notre pays ni de notre jeunesse », a insisté (Dave Cameron). « L’immobilier londonien, l’un des plus chers du globe, doit rester un havre pour tous les nantis de la terre. Et les touristes continueront à apporter à l’économie locale ses 102 milliards d’euros de revenus annuels. » [5] On retrouve dans le jargon des promoteurs immobiliers le même plaidoyer pour « un centre-ville vibrant ». En parcourant le catalogue du promoteur Urban Splash, qui propose des « lofts » à 200 000 livres sterling (à peu près 230 000 euros), à Albert Mills, une charmante ancienne fabrique de coton du XIXe reconvertie, on ne croise rien qui ne soit pas « an area of exciting new developpement at the edge of Manchester’s vibrant city »

De la cité industrielle en déclin à la dynamique métropole globale, la métamorphose ne s’est pas réalisée d’elle-même. Pour accueillir les plus aisés, il a fallu nettoyer le centre de la ville de tous les pauvres qui y demeuraient. Les promoteurs immobiliers se sont chargés de la besogne à partir du début des années 1980, souvent aidés financièrement par les pouvoirs publics ou l’Union européenne. La transformation subie par la ville aux mains des urbanistes, architectes et autres décorateurs a été radicale. Du patrimoine industriel, on a conservé les façades : les plus vieux entrepôts des docks, Merchant’s Warehouse, sont devenus des bureaux ; le Royal Exchange, la bourse du coton, est devenu le Royal Exchange Theater ; les immenses entrepôts de briques rouges de la Nothern Railway Company ont été transformés en un ensemble de cafés, de restaurants, de magasins et de vastes aires de stationnement ; Central Station, l’imposante gare construite en 1880 pour desservir Liverpool et fermée en 1969, se fait aujourd’hui appeler Manchester Central Convention Center. Ceux qui peuvent se le permettre quittent leur bureau pour consommer, à quelques pas de là, dans un quartier où plus personne ne vit, les marchandises qu’ils viennent de contribuer modestement à produire. Ce n’est pas sans intérêt que les autres assistent au spectacle, de plus ou moins loin. Les derniers rangs se sont remplis ces derniers temps, en Angleterre comme partout ailleurs.

Quelques-uns avaient tenté de réinvestir la ville abandonnée, lorsqu’elle était au plus mal. En 1976, les Sex Pistols étaient venus jouer au Free Trade Hall, un édifice qui accueillit les rassemblements politiques et corporatistes de la nouvelle bourgeoisie, puis des événements culturels de toute sorte. Ce soir-là, il n’y avait pas plus de quarante personnes dans la salle, mais plusieurs d’entre eux furent à l’origine de l’aventure du label Factory Records, qui édita notamment Joy Division, New Order ou les Happy Mondays, et qui ouvrit un club, l’Haçienda, en 1982, prenant au mot le Formulaire pour un urbanisme nouveau de Gilles Icvain, écrit 30 ans plus tôt : « Et toi oubliée, tes souvenirs ravagés par toutes les consternations de la mappemonde, échouée au Caves Rouges de Pali-Kao, sans musique et sans géographie, ne partant plus pour l’hacienda où les racines pensent à l’enfant et où le vin s’achève en fables de calendrier. Maintenant c’est joué. L’hacienda, tu ne la verras pas. Elle n’existe pas. Il faut construire l’hacienda. »
Comme dans tout bon épisode du Rock’n’roll, il y eut des soucis avec la drogue et l’argent. L’Haçienda ferma définitivement ses portes en 1997. Aujourd’hui, à son emplacement, des logements de standing, sous l’appellation Hacienda Appartements. La citation de Gilles Ivain est imprimée, en anglais, sur des T-Shirts que le centre d’information des touristes écoule à 25 livres sterling la pièce. Et au sommet du Free Trade Hall flotte désormais le drapeau de l’hôtel Radisson Edwardian Manchester, cinq étoiles.

« Ceux qui voudraient revivre les raves d’antan peuvent se rendre au Fac251, le club de Peter Hook, ancien bassiste de Joy Division et New Order, et Ben Kelly, le designer de l’Haçienda. Fac 251 a ouvert en février 2011 dans les anciens locaux de Factory Records. [...] Conçu pour mettre en valeur la fonctionnalité froide que le nom suggère, Fac251 consiste en trois étages de parpaings de béton, de lumières saccadées et de machines à fumée. Un portrait de Tony Wilson, l’un des fondateurs de Factory Records et de l’Haçienda, se trouve au-dessus de l’entrée. Avec des sets rétro par les DJs locaux Mr.Hook et Mr. Haslam, le club fait recette sur le nom et le son des grandes heures de Madchester, mais il tente aussi d’en rendre l’intégralité de l’expérience sensorielle. Bien sur, on ne note pas sans ironie qu’un club né de l’insatisfaction de la classe ouvrière et de son opposition fondatrice au disco de masse, fasse aujourd’hui l’objet d’un repackaging commercial. » [6] Là, comme dans les nombreux clubs qui refusent la nostalgie et où l’on peut goûter raggaclash, ghetto house, wonky-hop, post-dubstep, fidget house, chillwave ou encore electro-boogie, la scène est « vibrante ».
« Ailleurs se retrouvent d’autres beautés fragmentaires, et de plus en plus lointaine la terre des synthèses promises. Chacun hésite entre le passé vivant dans l’affectif et l’avenir mort dès à présent. Nous ne prolongerons pas les civilisations mécaniques et l’architecture froide qui mènent à fin de course aux loisirs ennuyés. » [7]

Le long des berges réaménagées, les immeubles ont jailli. Les murs de la ville entière sont couverts du programme des travaux à venir, de l’offre de bureaux et d’appartements de choix, sous le contrôle étroit de la fameuse CCTV, closed circuit television, qui s’affiche fièrement au front de chaque immeuble qui en vaut la peine. Les caméras ont colonisé jusqu’aux saules pleureurs qui bordent les canaux de l’ancien port industriel, où l’on peut désormais s’arrêter pour prendre un verre coûtant le prix d’un dîner.
Un peu plus loin, à Salford - où les troubles furent violents -, les signes de ce changement sont également visibles. Cette banlieue attenante à Manchester comprend les anciens docks de la ville, fermés en 1982 et devenus quelques années plus tard l’objet d’un des plus vastes plans de réaménagement du Royaume-Uni. Élégamment rebaptisé Salford Quays, l’endroit abrite maintenant son centre commercial géant, un port de plaisance, et des monuments d’artiste à la mémoire de l’activité industrielle. Architecturalement, par un jour de soleil, ça ressemble à Doha. Sous la pluie, ça ressemble à Doha si jamais il y pleuvait.
Où sont donc passés les gens de Manchester ? Peut-être à Old Trafford, le stade de football tout proche, qui héberge Manchester United. Vendredi 5 août, on y célèbre Paul Scholes, un enfant de Salford, qui aura porté dix-sept années durant le maillot écarlate des Red Devils, avec un succès qui sera difficile à égaler. Peut-être y en a-t-il quelques-uns dans les virages, là où le prix des places descend sous les 30 livres. Les clubs anglais ont depuis longtemps résolu le problème du hooliganisme en augmentant les tarifs. Manchester United, l’un des clubs les plus titrés - et les plus riches - de l’histoire de la discipline, n’a pas de problème pour garnir ses tribunes. Mais combien sont-ils - de ces gens de Manchester - parmi la file d’attente qui s’étend au pied de la statue de Matt Busby [8], à l’entrée de la boutique officielle, le ‘Old Trafford Megastore’ ?
Mercredi 11 août, alors que la fumée se dissipait au-dessus de Londres, Manchester, Birmingham et de quelques autres villes du Royaume-Uni, on fêtait aussi le 46e anniversaire des émeutes de Watts, qui ne sont pas sans porter quelques similitudes avec les événements récents [9]. Le fait que les rangs des émeutiers britanniques de 2011 aient été composés avec beaucoup plus de « diversité » que ceux des Américains de 1965 montre seulement que la colère et l’amertume se sont étendues et ne sont plus le privilège de l’origine.

Vient à l’esprit le texte que Guy Debord avait écrit à ce sujet :
« La révolte de Los Angeles est une révolte contre la marchandise, contre le monde de la marchandise et du travailleur-consommateur hiérarchiquement soumis aux mesures de la marchandise. Les Noirs de LA, comme les bandes de jeunes délinquants de tous les pays avancés, mais plus radicalement parce qu’à l’échelle d’une classe globalement sans avenir, d’une partie du prolétariat qui ne peut pas croire à des chances notables de promotion et d’intégration, prennent au mot la propagande du capitalisme moderne, sa publicité de l’abondance. Ils veulent tout de suite les objets montrés et abstraitement disponibles, parce qu’ils veulent en faire usage. De ce fait, ils en récusent la valeur d’échange, la réalité marchande qui en est le moule, la motivation et la fin dernière, et qui a tout sélectionné. Par le vol et le cadeau, ils retrouvent un usage qui, aussitôt, dément la rationalité oppressive de la marchandise, qui fait apparaître ses relations et sa fabrication mêmes comme arbitraires et non-nécessaires.
(...)
La société de l’abondance trouve sa réponse naturelle dans le pillage, mais elle n’était aucunement abondance naturelle et humaine, elle était abondance de marchandises. Et le pillage, qui fait instantanément s’effondrer la marchandise en tant que telle, montre aussi l’ultima ratio de la marchandise : la force, la police et les autres détachements spécialisés qui possèdent dans l’État le monopole de la violence armée. Qu’est-ce qu’un policier ? C’est le serviteur actif de la marchandise, c’est l’homme totalement soumis à la marchandise, par l’action duquel tel produit du travail humain reste une marchandise dont la volonté magique est d’être payée, et non vulgairement un frigidaire ou un fusil, chose aveugle, passive, insensible, qui est soumise au premier venu qui en fera usage. Derrière l’indignité qu’il y a à dépendre du policier, les Noirs rejettent l’indignité qu’il y a à dépendre des marchandises. La jeunesse sans avenir marchand de Watts a choisi une autre qualité du présent, et la vérité de ce présent fut irrécusable au point d’entraîner toute la population, les femmes, les enfants et jusqu’aux sociologues présents sur ce terrain. Une jeune sociologue noire de ce quartier, Bobbi Hollon déclarait en octobre au Herald Tribune : "Les gens avaient honte, avant, de dire qu’ils venaient de Watts. Ils le marmonnaient. Maintenant ils le disent avec orgueil. Des garçons qui portaient toujours leurs chemises ouvertes jusqu’à la taille et qui vous auraient découpé en rondelles en une demi-seconde ont rappliqué ici chaque matin à sept heures. Ils organisaient la distribution de la nourriture. Bien sûr, il ne faut pas se faire d’illusion, ils l’avaient pillée... Tout ce bla-bla chrétien a été utilisé contre les Noirs pendant trop longtemps. Ces gens-là pourraient piller pendant dix ans et ne pas récupérer la moitié de l’argent qu’on leur a volé dans ces magasins pendant toutes ces années..." »

Citer Debord est toujours une faute de goût. Cela ne fait pas très sérieux, d’autant que l’intéressé n’a pas le moindre diplôme universitaire. On peut donc, depuis qu’il est mort et que l’on ne craint plus une riposte, s’en donner à cœur joie. La récupération, dans ce cas précis, consiste à le faire passer pour un aimable bouffon ou un joyeux déconneur. Il ne faut pas prendre tout ça au pied de la lettre, Debord a beaucoup exagéré... Parce qu’on a pas pu l’attaquer sur le plan de la logique, on a décidé que ses positions ne pouvaient être soutenues sur un ton sérieux.
L’État français est bien prêt à préempter ses archives pour éviter qu’une grande université américaine ne mette la main sur ce ‘patrimoine’, mais de là à lui reconnaître un quelconque caractère de vérité, il y a un pas. Ceux-là même qui ont consacré ses papiers ‘trésor national’ ne le franchiront pas, trop préoccupés de récupérer l’œuvre pour s’en servir, s’il se trouvait qu’ils en eussent jamais eu les moyens [10]. Ce n’est pas par dévotion que je cite ce texte désormais vieux d’un demi-siècle. En d’autres circonstances, on pourrait laisser à d’autres le soin de regarder la suite. Mais, dans le moment où nous sommes, il m’a semblé que personne ne le ferait.

C’est pourtant la marchandise que l’on trouve au cœur des actions apparemment désorganisées des émeutiers de Manchester et d’ailleurs. Les dépossédés ont décidé de se faire voir brutalement, au centre même de la ville, dans les quartiers qui leur sont interdits, non par décret - nous sommes en démocratie ! - mais de fait : si vous n’avez rien à acheter, circulez. Derrière la rage des incendiaires et des casseurs, derrière l’ « avidité » des pillards, le dénominateur commun, c’est la cible : la marchandise, le « bien de consommation », dont le nom suggère déjà les qualités éthiques dont il est paré. En lançant une brique dans la devanture d’un magasin désert, c’est l’idole que l’on attaque.
Il aura fallu 140 ans pour établir le magasin de meubles House Of Reeves, mais seulement quelques minutes pour le détruire. Le 9 août, au matin, après que les incendiaires ont laissé ce symbole de Croydon en ruines, son propriétaire présentait un visage digne aux journalistes : « Le magasin était là depuis 1867, il avait survécu à deux guerres, une dépression. Et pourtant, il semble que la communauté l’a détruit par les flammes » [11].
Alors que tout le monde pleurait, avec moins de dignité que son propriétaire, la perte de ce monument historique de la distribution, personne ne s’est demandé si ce n’était pas la raison même pour laquelle certains des émeutiers les plus résolus en avaient fait leur cible, spontanément.


On s’accorde pour l’instant à dire qu’il est tout à fait impossible à de si faibles esprits, qui se traduisent dans une langue de plus en plus inaccessible, de concevoir un projet si profond. Leur incapacité à fournir les motifs de leur colère ou le détail de leurs requêtes constitue du reste la meilleure preuve de leurs sombres motivations. Si ces malheureux avaient pu articuler trois mots sur leur malaise social et leur mal à l’Angleterre, alors peut-être aurait-on pu repérer un leader, et discuter avec lui. S’ils s’avançaient groupés, comme un seul manifestant derrière sa banderole, on pourrait appliquer la même vielle méthode : « Confinement dans un espace restreint, déploiement d’experts de la surveillance sur les toits, infiltration par des policiers en civil et contrôle des stations de métro et des gares », comme le rappelle Le Monde (12 août), qui ajoute que « la collecte de renseignements sur les leaders et leurs actions joue un rôle-clé dans ce processus : hélas !, les pires émeutes depuis des années n’étaient pas organisées » [12].

En dédaignant la manifestation organisée pacifique, les émeutiers proclament sa défaite, de la même manière qu’ils n’ont pas adopté de slogan. S’il y avait eu un slogan, il aurait été récupéré par l’extrême-gauche, qui les a tous brevetés. C’est le rôle de l’extrême-gauche que d’empêcher les débordements. Quiconque déborde la manifestation syndicale unitaire par la gauche commet une lourde faute technique, immédiatement sanctionnée. Il est toujours préférable de rester dans le rang et de goûter la parole des révolutionnaires professionnels, forts d’une expérience du combat si longue qu’on en vient à se demander s’ils ont jamais souhaité une victoire. La seule chose que quelques-uns avouent désirer encore, c’est un retour au bon vieux temps de l’État-providence, du keynesianisme glorieux, au cours duquel les aspirations du peuple profitèrent de leur brève coïncidence avec les intérêts de l’État. Incapable de voir que ce n’est pas la répartition de la valeur qui pose problème mais bien le principe qui a présidé à sa création et qui régit son développement, la vieille extrême-gauche gauche, après avoir promis longtemps que les lendemains chanteraient, réclame aujourd’hui le retour des jours meilleurs, sur des airs d’antan. Elle n’a pas encore compris qu’ « on ne s’évadait pas du temps », et qu’elle était condamnée à revoir, à chaque manifestation, à chaque inutile cortège rigoureusement encadré et chaque fois un peu plus mince, « l’instant de sa propre mort », c’est-à-dire celui où elle a commencé à marchander [13].

Avec l’assentiment des contestataires identifiés, on peut en conclure que cette horde immorale de lumpenprolétaires analphabètes n’a pas la classe des bandits de grand chemin d’autrefois. Il est plus simple de mettre tout cela sur le compte d’un coup de chaud passager, d’un climat économique temporairement dégradé, d’un égarement momentané de la conscience. On trouvera des excuses à quelques-uns de ceux qui s’excuseront bien bas et on condamnera lourdement le reste [14]. Il faudra s’employer à ce que rien de fondamental ne soit changé, mais il y a heureusement beaucoup de gens formés à cela.
On pourrait aussi s’étonner de ce que ces jeunes enragés détruisent et brûlent ce qui pourrait leur permettre de « s’en sortir ». À Arndale cette fois, l’immense centre commercial du centre-ville de Manchester, on pouvait contempler à la veille des émeutes, derrière la vitrine d’un magasin Shakeway, un individu dont l’emploi consistait à se dandiner joyeusement d’un pied sur l’autre, intégralement recouvert d’un costume de milkshake à taille humaine. C’est l’emploi qu’on avait trouvé aux qualités de cet homme (cette femme ?). Il est douteux que le salaire dont on le récompensait lui permît d’habiter le cœur vibrant de la ville ; seulement d’y venir aux heures ouvrables se transformer, au sens propre comme au sens figuré, en marchandise. Deux jours plus tard, quelques mètres plus loin, quelqu’un incendiait un magasin de vêtements.


Fondée au XVe siècle, la cathédrale de Manchester fut rattrapée au milieu du XIXe siècle par la croissance exubérante de l’agglomération et se trouve aujourd’hui dans le centre-ville. Dans une de ses ailes, pour instruire le visiteur, quelques panneaux évoquent le long processus qui aboutit à la traduction en anglais des Écritures, la King James Bible ; les luttes qui amenèrent les autorités religieuses à se saisir de ce projet a priori hérétique plutôt que de courir le risque d’en laisser d’autres, plus audacieux, commettre un péché d’interprétation. Le texte note que si le Roi se contenta en 1610 d’agréer le résultat sans le commenter, l’influence de l’ouvrage se diffusa largement dans la littérature et la culture anglo-saxonnes. Et rappelle, en conclusion, les mots de l’Ecclésiaste : To every thing there is a season :

« Il y a un moment pour tout et un temps pour toute chose sous le ciel.
Un temps pour enfanter, et un temps pour mourir ;
un temps pour planter, et un temps pour arracher le plant ;
un temps pour tuer, et un temps pour guérir ;
un temps pour détruire, et un temps pour bâtir... » [15]

Un peu plus loin, sur Exchange Street, le magasin French Connection placarde sur sa façade de grandes photos de ses produits : une jupe, un manteau, un costume. En légende, ce sont les vêtements qui parlent, et pas ceux qui les portent, dont on distingue assez mal le visage : « I am the skirt », minaude la jupe. « I am the suit », assène le costume ; « I am the coat » ; « I am the blouse »... Est-ce l’homme ou la marchandise qui parle ? S’est-elle incarnée en lui ou bien s’est-il confondu avec elle ? Et comment nommer ce phénomène consistant à faire entendre la voix d’une autre entité, a fortiori inhumaine ? On pourrait parler sans doute de réification, mais dans le cas présent, c’est le langage religieux qui semble le plus approprié : on dirait que l’individu est possédé.
La marchandise et le capital écrivent chaque jour leur évangile sur les murs des centre-villes, de New York à Sao Paulo, de Paris à Manchester, et il n’a qu’une seule ligne : Il y a un temps pour acheter et il y a un temps pour vendre.

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Message  nico37 Mar 30 Aoû - 0:22

La colère des nouveaux prolétaires 9 août 2011 THE DAILY TELEGRAPH LONDRES Mary Riddell

Un bus à deux étages brûle alors que la police tente de réprimer la foule en colère à Tottenham, au nord de Londres, le 6 août.

Les émeutiers de Londres sont le produit d'une société en voie de délitement et d'une classe politique indifférente à leur sort, affirme une chroniqueuse du Daily Telegraph.

Personne n'a eu l'air étonné. Ni les adolescents à capuches s'enfuyant de chez eux à l'aube, ni Ken et Tony, qui vivaient autrefois à Tottenham et sont venus voir cette zone de guerre urbaine parsemée de projectiles et de voitures calcinées. Tony affirme qu'il avait pressenti l'événement. "Il fallait s'y attendre", assure-t-il.

La police a abattu un Noir dans des circonstances suspectes. De jeunes chômeurs sont devenus fous furieux. Pour Tony, cette émeute n'attendait qu'un prétexte pour éclater. A l'heure des premiers bilans, cette flambée de violence qui a embrasé Londres paraissait à la fois inévitable et impensable. En quelques jours, les émeutes ont gagné toute la capitale d'un pays avancé, la plongeant dans le chaos et la violence.

On a affaire au plus mystérieux et au plus moderne des soulèvements. Ses participants, rameutés sur Twitter, semblent avoir rejoué le printemps arabe dans une version sinistre. L'été de Tottenham, où se sont également illustrés des enfants de sept ans, est dirigé non pas contre un régime tyrannique, mais contre l'ordre établi d'une démocratie. Une question plane désormais au-dessus des artères commerçantes dévastées de Londres : comment en est-on arrivé là ?

Parmi les quelques réponses évidentes, l'incurie des forces de l'ordre figure en bonne place. Si l'on en croit les dernières informations, la Police métropolitaine (MET) aurait franchi un nouveau cap dans l'ignominie. En effet, des doutes commencent à apparaître quand au fait que Mark Duggan, dont la mort a déclenché les premières émeutes, ait tiré sur la police. L'indignation de la famille de M. Duggan a précipité la crise, et la non-intervention des policiers face aux pillages a donné lieu à des situations dignes des territoires livrés à l'anarchie dans un Etat défaillant.

La débâcle financière, responsable des émeutes

Le deuxième coupable, nous dit-on, serait l'appartenance ethnique. Mais comme l'a affirmé David Lammy, député de Tottenham, ces émeutes n'ont pas un caractère racial. Celles de Broadwater Farmer, comme celles de Toxteth et de Brixton, survenues dans les années 1980, avaient pour origine, du moins en partie, un racisme féroce qu'on ne retrouve pas aujourd'hui à Tottenham, où une épicerie chinoise voisine avec un magasin turc et un coiffeur africain.

Alors, on pense inévitablement au chômage et aux réductions budgétaires. Il est vrai que Tottenham fait partie des quartiers les plus pauvres de Londres : 10 000 personnes y perçoivent une allocation-chômage et sur chaque offre d'emploi, il se présente en moyenne 54 candidats. Dans d'autres quartiers touchés [par les émeutes], comme Hackney, les maisons de jeunes ferment. Si de telles coupes sont peu avisées, il serait trop facile d'attribuer les ravages de la crise économique au manque de tournois de ping-pong et de parcs de skateboard.

Les vraies causes sont plus insidieuses. Ce n'est pas un hasard si les pires violences que Londres ait connu depuis de nombreuses décennies ont lieu sur fond de débâcle financière mondiale. Les causes de la récession, telles que les définit J. K. Galbraith dans The Great Crash [La crise économique de 1929], sont les suivantes : mauvaise répartition des revenus, entrepreneurs filous, faiblesse du système bancaire et déséquilibre du commerce extérieur.

L'échec d'un Etat inégalitaire

Tous ces facteurs sont de nouveau à l'œuvre. Dans la bulle des années 1920, les 5% les plus riches de la société accaparaient un tiers des revenus. Aujourd'hui, la Grande-Bretagne est moins égalitaire qu'elle ne l'a jamais été depuis lors, que ce soit du point de vue des salaires, de la richesse et des perspectives d'avenir. L'année dernière, les fortunes cumulées des 1 000 Britanniques les plus riches ont augmenté de 30%, atteignant 335,5 milliards de livres [environ 405 milliards d'euros].

Tandis que Londres brûlait, les leaders européens, notamment notre Premier ministre et son ministre des Finances, se prélassaient dans des chaises longues. Même si l'épicentre de l'actuelle crise économique est la zone euro, les gouvernements britanniques successifs ont fait le lit de la pauvreté, des inégalités et de l'inhumanité aujourd'hui exacerbées par la tourmente financière.

Le manque de croissance de la Grande-Bretagne n'est pas seulement un point de débat économique ou une arme contre le ministre des Finances George Osborne. Pas plus que notre main-d'œuvre sous-qualifiée, démotivée et peu instruite n'est simplement une tache dans le bilan national. Ces bandes de jeunes déchaînés dans les rues de nos villes n'augurent rien de bon pour l'avenir. La "génération perdue" se prépare pour la guerre.

Rien à voir avec les manifestations de Grèce ou d'Espagne

Les émeutes de Londres ne sont pas les aimables rassemblements de Grèce ou d'Espagne, où les classes moyennes tentent de conjurer leur déclin annoncé. Elles sont la preuve qu'une frange de la jeunesse britannique – les cogneurs, les tireurs, les pillards, les profiteurs et leurs acolytes effrayés – est tombée du bord de la falaise dans ce pays en plein délitement.

L'échec des marchés va de pair avec le malaise social. Entre-temps, on voudrait nous faire croire que la démocratie sociale, avec ses filets de sécurité, son éducation coûteuse et son système de santé pour tout, n'est pas viable dans les temps difficiles qui s'annoncent. Or, la réalité, c'est qu'il n'y a pas d'autre solution. Après le Grand Krach [la crise de 29], la Grande-Bretagne a rectifié le tir. Les écarts de revenus se sont réduits, l'Etat-providence est né, les compétences se sont accrues et la croissance a augmenté.

Ce modèle n'est pas transposable à l'identique. Mais, comme s'interrogeait Adam Smith, une société bien ordonnée peut-elle se développer quand un nombre important de ses membres sont dans la misère, et par conséquent dangereux ? Il ne s'agit pas de prêcher le déterminisme, car la pauvreté n'entraîne pas forcément l'anarchie. Cela étant, il ne suffit pas de fustiger les émeutiers comme s'ils étaient des parias.

Les krachs financiers et les catastrophes humaines sont cycliques. Chaque nouvel épisode menace d'être plus grave que le précédent. Comme l'a écrit Galbraith, "la mémoire vaut bien mieux que la loi" pour se protéger contre les illusions et la folie financières. En ces temps d'austérité, il y a des luxes que la Grande-Bretagne ne peut plus s'offrir. L'amnésie figure en tête de cette longue liste.

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Message  topaze Mer 31 Aoû - 21:50

prise de position du CCI sur 'Les émeutes en Grande-Bretagne et la perspective sans avenir du capitalisme'

http://fr.internationalism.org/node/4773

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Message  sylvestre Ven 2 Sep - 18:17

Les travaileurs du métro londonien refusent de transporter les fascistes. Bel exemple d'action antifasciste ouvrière !

http://socialistworker.co.uk/art.php?id=25909

Rail workers: 'If EDL racists turn up at our stations, we’ll shut them down'

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by Patrick Ward

London Underground workers in the RMT union today informed management that if the racist English Defence League (EDL) appear at any stations or on any trains tomorrow, they will refuse to work.

This means that stations would close on safety grounds if the racists turn up. Management have now said that the EDL will not be allowed on London Underground tomorrow.

The EDL had boasted earlier in the week that a ban on their march in Tower Hamlets, east London, would not affect them as they are still allowed to come for a static protest. But campaigning by anti-fascists and trade unionists is causing them real problems.

Steve Hedley, the RMT’s London regional organiser, spoke to Socialist Worker. “We’ve made clear that the EDL are racist and fascist thugs,” he said.

“Last time they came to Kings Cross they assaulted workers and members of the public.

“Our drivers will refuse to move trains if they are on them, and will close stations on safety grounds if they turn up.”

The EDL are panicking. They wanted to assemble in the car park of Sainsbury’s supermarket in Whitechapel. But Sainsbury’s have refused to host them.

Then they wanted to assemble at two pubs in Euston. But both have now also refused to host them. These refusals came after huge public pressure.

The RMT action has further thwarted their plans for a violent rampage through multicultural Tower Hamlets.

Reports on the EDL’s Facebook page claim that four of their divisions have cancelled their transport for tomorrow.

Martin Smith, from the Love Music Hate Racism steering committee, told Socialist Worker, “We’ve got people power and workers’ power on our side. It’s pushing the racist EDL thugs further and further away from Tower Hamlets.

“This shows the level of disgust people have against the EDL. Their racist hatred is not welcome in Tower Hamlets or anywhere else in London.”

It’s of vital importance that every anti-fascist and anti-racist turns out in force tomorrow. We need to make a massive, united stand against everything the EDL thugs stand for.

Assemble at the corner of Whitechapel Road and Vallance Road near the East London Mosque at 11am (Nearest tube Whitechapel).

Several London Underground lines will be closed for maintenance tomorrow. Check the Transport for London website for the latest transport details. www.tfl.gov.uk

Sign the Unite Against Fascism petition demanding our right to march on Saturday. www.uaf.org.uk
sylvestre
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Message  nico37 Dim 4 Sep - 9:41

Naomi Klein,traduit par Viktor Dedaj a écrit: http://www.tlaxcala-int.org/article.asp?reference=5615
On nous rabâche que les émeutes en Grande-Bretagne n’avaient rien de politique – mais les émeutiers savent que leurs élites, elles, pratiquent le vol à grande échelle et en plein jour..

Je n’arrête pas d’entendre des comparaisons entre les émeutes à Londres et celles d’autres villes européennes – bris de vitrines à Athènes, feux de joie de bagnoles à Paris. Il est certain qu’il y a des similitudes : une étincelle provoquée par la violence policière, une génération qui se sent abandonnée.

Mais les évènements à Londres ont été marqués par des destructions massives, le pillage était un phénomène marginal. Il y a eu cependant d’autres pillages massifs ces dernières années, et peut-être devrions-nous en parler aussi. Il y a eu Bagdad au lendemain de l’invasion par les USA – une vague d’incendies et de pillages qui ont vidé les bibliothèques et les musées. Les usines aussi ont été touchées. En 2004 j’ai visité une usine qui fabriquait des réfrigérateurs. Les employés avaient pris tout ce qui avait de la valeur, puis ils y ont méthodiquement mis le feu jusqu’à ce qu’il n’en reste plus qu’une structure métallique tordue.

A l’époque les gens à la télé trouvaient que le pillage était un geste hautement politique. Ils disaient "voici ce qui arrive lorsqu’un régime n’a plus de légitimité populaire". Après avoir vu pendant des années à Saddam Hussein et ses fils se servir de n’importe quoi et n’importe qui, de nombreux Irakiens ordinaires ont pensé qu’ils avaient eux-aussi le droit de se servir à leur tour. Mais Londres n’est pas Bagdad, et le Premier ministre britannique, David Cameron, n’a rien d’un Saddam, il n’y donc aucune leçon à en tirer.

Bon, alors que diriez-vous d’un exemple pris dans une démocratie ? L’Argentine, vers 2001. L’économie était en chute libre et des milliers d’habitants des quartiers défavorisés (qui étaient jadis des zones industrielles prospères, avant l’arrivée du néolibéralisme) ont pris d’assaut les supermarchés détenus pas des sociétés étrangères. Ils sont ressortis avec des chariots remplis de produits qu’ils n’avaient plus les moyens d’acheter – vêtements, matériel électronique, viande. Le gouvernement a instauré « un état de siège » pour rétablir l’ordre. Les gens n’ont pas apprécié et ils ont renversé le gouvernement.

Le pillage massif en Argentine fût baptisé el saqueo - la mise à sac, le pillage. Ce qui est politiquement significatif parce que c’est exactement ce terme qui fut employé pour décrire ce que les élites du pays avaient fait en bradant les biens de la nation lors d’opérations de privatisation à l’évidence entachées de corruption, en planquant leur argent dans des paradis fiscaux pour ensuite faire payer le peuple par des mesures brutales d’austérité. Les Argentins avaient bien compris que le saqueo des centres commerciaux n’aurait pas eu lieu sans le saqueo plus vaste du pays, et que les véritables gangsters se trouvaient au pouvoir.

Mais l’Angleterre n’est pas l’Amérique latine, et ses émeutes ne sont pas politiques, du moins c’est ce que l’on nous rabâche. En Angleterre, ce sont juste des gamins paumés qui profitent d’une situation pour s’emparer de ce qui ne leur appartient pas. Et la société britannique, nous dit Cameron, a horreur de ce genre de comportement.

Tout cela est dit avec le plus grand sérieux. Comme si les sauvetages massifs des banques n’avaient jamais eu lieu, suivis par des distributions de primes aux dirigeants battant tous les records, une véritable provocation. Suivis par des réunions d’urgence du G8 et du G20, où les dirigeants ont décidé, collectivement, de ne pas punir les banquiers ni de prendre des mesures pour éviter que cela ne se reproduise. Au lieu de cela, ils sont retournés chez eux pour imposer des sacrifices aux plus vulnérables. En licenciant des fonctionnaires, en réduisant le nombre d’enseignants, en fermant des bibliothèques, en augmentant les frais de scolarité, en dénonçant les accords sociaux, en se précipitant pour privatiser les biens publics et diminuer les retraites – choisissez parmi ce qui précède pour l’adapter à votre situation locale. Et qui voit-on à la télévision nous faire la leçon sur la nécessité de renoncer à ces « avantages acquis » ? Les banquiers et les gestionnaires de hedge-funds, évidemment.

C’est le saqueo global, le temps du Grand Hold-up. Alimenté par un sentiment maladif de droit sacré, le pillage se déroule en plein jour, comme s’il n’y avait rien à cacher. Cela dit, ils ont quand même quelques craintes. Début juillet, dans le Wall Street Journal, un sondage indiquait que 94% des millionnaires craignaient « des violences dans les rues ». Il s’avère que cette crainte n’est pas complètement injustifiée.

Bien sûr, les émeutes à Londres n’avaient rien de politique. Mais ceux qui volaient de nuit savaient parfaitement bien que leurs élites commettent leurs vols en plein jour. Les saqueos, c'est contagieux ! Les Conservateurs ont raison lorsqu’ils disent que les émeutes n’ont rien à voir avec les coupes budgétaires. Mais elles ont beaucoup à voir avec ce que ces coupes représentent : être coupé du monde. Se retrouver coincé dans une sous-classe sociale qui ne cesse de s’élargir et voir les rares portes de sortie – un vrai travail, une éducation à portée de bourse – se refermer rapidement les unes après les autres. Les coupes budgétaires sont un message. Un message envoyé à des pans entiers de la société pour leur dire : vous êtes coincés là où vous êtes, comme ces immigrés et ces réfugiés repoussés à nos frontières qui deviennent de plus en plus infranchissables.

La réponse de Cameron aux émeutes est de matérialiser cette exclusion par des mesures concrètes : expulsion des habitations à loyers modérés, coupures des outils de communication et des peines de prison scandaleuses (cinq mois pour une femme qui a accepté un short volé). Une manière d’enfoncer le clou : disparaissez, et en silence.

Au « sommet de l’austérité » du G20 l’année dernière à Toronto, les protestations ont dégénéré et de nombreuses voitures de police ont brûlé. Rien à voir avec Londres 2011, mais pour nous les Canadiens, ce fut un choc. Mais la grande controverse qui a suivi concerna le montant des dépenses effectuées par le gouvernement pour la « sécurité » du sommet, 675 millions de dollars (et avec tout ça ils ont eu du mal à éteindre les feux). A l’époque, nombre d’entre nous ont fait remarquer que tout ce nouvel arsenal coûteux que la police venait d’acquérir – canons à eau, canons soniques, gaz lacrymogènes et balles de caoutchouc – n’était pas uniquement destiné aux manifestants dans les rues. A long terme, il était destiné à contrôler les pauvres qui, dans la nouvelle ère d’austérité, n’auront plus grand chose à perdre.

C’est là où Cameron s’est trompé : on ne peut pas réduire le budget de la police en même temps que tout le reste. Parce que lorsqu’on vole aux gens le peu qui leur reste pour protéger les intérêts de ceux qui ont largement plus qu’il ne leur en faut, il faut s’attendre à une résistance – que ce soit sous la forme de protestations organisées ou des pillages spontanés.

Et ça, ce n’est pas de la politique, c’est de la physique.

nico37

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Message  sylvestre Dim 4 Sep - 11:32

Joli diaporama de la manifestation contre les fascistes de l'EDL hier : http://www.flickr.com/photos/geoffdexter/sets/72157627586074602/show/
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Message  gérard menvussa Dim 4 Sep - 12:57

Nos camarades anarchistes ont rappelé les "riches heures" de la révolte juvénile britanique, les révoltes de 1911

La grève des écoliers - un épisode de la guerre sociale en Angleterre (1911)

samedi 3 septembre 2011

« La grève a commencé à l’école catholique de Sainte Marie quand 13 des garçons plus âgés ont abandonné les plus jeunes dans la cour de récréation. Une fois qu’on sut qu’ils étaient en grève, la nouvelle se répandit et avant le début des classes de l’après-midi, elle avait atteint plusieurs écoles de l’Est de Hull. Aussitôt, il y eut des attroupements d’enfants devant les écoles hur­lant : "dehors" ou bien "jaunes" aux élèves qui retournaient en classe » (Hull Daily News, 13 sep­tembre 1911).

Quelques jours après la rentrée de septembre 1911, les élèves des écoles municipales britanniques se mettaient en grève. De Dundee à Southampton en passant par Liverpool et Dublin, plus de 62 villes étaient touchées, particu­lièrement dans les secteurs industriels, les régions déshéri­tées et opprimées. Mouvement national qui dura quinze jours et prit une ampleur considérable ; selon les comptes-rendus de presse, ce sont « des centaines d’enfants qui défilèrent dans les rues » ; ailleurs, comme à Dundee ou Hull, « des milliers d’enfants défiant les autorités scolaires ». Dans son ensemble et malgré quelques articles à la une, la presse a tendance à minimiser les faits, en les présentant comme une parodie des grèves d’adulte et de l’agitation sociale de l’été 1911 [1]. « L’épidémie de grève qui sévit actuellement a touché la jeune génération et, afin d’être à la mode, les écoliers ont décidé de poser l’outil. La chose commença à l’école Bigyn, lorsque les écoliers par solidarité pour leurs condisciples qui avaient été punis, décidèrent d’abandonner la classe et de défiler dans les rues en criant et en chantant » (Llanelly Mercury, 9 septembre).

« Autrefois les enfants s’inspiraient des récits d’aventures et des épisodes les plus romanesques de l’histoire rapportée dans leurs manuels. La presse illustrée et le cinéma les ont davantage mis en contact avec les événements quotidiens. La conduite de la grève révèle une grande familiarité avec les méthodes employées par les cheminots et les dockers durant la grève » (Birmingham Daily Mail, 14 septembre).

Le scénario de la grève était partout plus ou moins semblable. À Dundee : « De véritables scènes de charivari eurent lieu hier à l’occasion d’une grève d’écoliers. Il n’y avait pas moins de huit écoles concernées et on a calculé que vers l’après-midi plusieurs milliers de garçons se sont mutinés. L’agitation commença à l’école de Cowgate où il y eut un débrayage dans la matinée, et où l’on vit les chefs du mouvement brutaliser ceux qui refu­saient de les suivre... Vers 11 heures, l’agitation semblait avoir pris fin. Mais la nouvelle de la grève s’était largement répandue dans la ville et à l’heure du déjeuner, il y eut des défections dans les écoles de Wallacetown, Victoria road, Blackness, Balfour Street et Ann Street ; les garçons défilèrent à travers la ville, adoptant différentes tactiques pour protéger ceux qui voulaient rejoindre leurs rangs. Une bande se rendit à la High School et, armée de bâtons et de projectiles, fit une manifestation. Elle ne réussit pas à faire la moindre recrue dans cette institution... » (Paisley Daily Express, 15 septembre).

Souvent, dès qu’ils étaient sortis de l’école, les gosses s’organisaient en élisant des comités de grève et des piquets volants chargés d’entraîner à la grève d’autres écoles :

« Au moment où les écoliers rentraient en classe, 10 grévistes environ apparurent armés de bâtons et de barres de fer et autres armes du même type, ils lancèrent des pierres sur les fenêtres de l’école et le policier de garde eut le plus grand mal à maî­triser le désordre ». (The Herald, 13 septembre).

Dans une école d’Aberdeen, l’arrivée d’un piquet volant eut un effet électrique : « Les garçons ayant appris qu’il y avait à l’extérieur un grand nombre de grévistes se révoltèrent. Ils claquèrent leurs pupitres et se ruèrent sauvagement dehors rejoindre les autres grévistes... Il s’ensuivit un grand désordre, et l’équipe des enseignants fut incapable de ramener le calme ». (The Greenock Telegraph, le 16 septembre).

Il y eut pas mal de bagarres entre grévistes et non-­grévistes au point que des parents durent s’interposer et qu’il fallut même faire appel à la police « pour protéger les personnes et les biens ». Les grévistes attaquèrent un peu partout les bâtiments scolaires et s’en prirent souvent aux enseignants.

À Liverpool : « Quand les écoliers du quartier de Edgehill furent lâchés à l’heure de la récréation, ils se mirent en grève et manifestèrent à travers les rues... il y eut des vitres brisées et des réverbères en miettes, quant aux "bons écoliers" ils reçurent des coups de bâton » (School Government Chro­nicle, 16 septembre). À Salmon Pastures School, à l’Est de Sheffield, « on jeta des pierres sur une enseignante alors qu’elle montait dans le tram ».

Dans les Potteries, « des écoliers armés de bâtons et de pierres attaquèrent deux écoles et une demi-­douzaine de carreaux fut brisée tandis que des fenêtres d’autres écoles furent démolies » (The Lancashire Daily Post, 15 septembre).

À Liverpool également : « Hier matin des troubles ont de nouveau éclaté à l’école de Sainte-Anne et les maîtres ont connu des difficultés en passant dans les rues près de l’école, les plus révoltés les ont hués, injuriés et comme l’un des maîtres avait saisi un assaillant, il reçut une volée de pierres... On a demandé la protection de la police pour les maîtres et des mesures pour venir à bout de l’agi­tation ont été prises à la fois par la police et par les autorités scolaires » (Liverpool Daily Post and Mer­cury, 14 septembre).

À West Hartlepool, 100 garçons environ d’une école municipale sortirent : « Un entrepôt qui se trouvait derrière un hôtel fut pillé et quelques bouteilles de bière et de whisky furent embarquées par les grévistes ainsi que des boîtes de cigares, il y eut quelques garçons arrêtés et inculpés » (The Times, 15 septembre).
la canne et la médaille

Partout, soit sous la forme de déclarations présen­tées par les comités de grève aux enseignants, soit sur des banderoles, soit encore en les écrivant à la craie sur le pavé et les murs, soit simplement en les scandant dans les manifestations et les meetings, les grévistes exprimaient leurs revendications.

À Liverpool ils dressèrent la liste suivante : « Âge limite fixé à 14 ans,
Des cours moins longs,
Des vacances pour le ramassage des pommes de terre,
Pas de travail à la maison,
L’abolition de la ceinture,

Des crayons et des gommes gratuites ».
(The Greenock Telegraph, 19 septembre).

À Darlington, « des écoliers demandèrent une heure d’instruction gratuite et un shilling par semaine pour suivre les cours » (Northern Daily News, 15 septembre). « Les élèves des écoles municipales de Low Felling demandent à com­mencer l’école à 9h30 pour terminer à 12 heures et reprendre l’après-midi à 14h jusqu’à 16h, et si ces conditions ne sont pas acceptées, ils disent que le conseiller municipal Costelloe n’a aucune chance d’être maire de Gateshead l’an prochain » (The Illustrated Chronicle, le 15 septembre).

Les grévistes de Hull demandent « une demi-journée de congé par semaine, que les moniteurs soient payés un penny et que tous les élèves quittent l’école à 13 ans ».

À Bradford : « 50 garçons de l’école municipale de Bolton Woods sortirent, demandant la suppression du surveillant chargé de contrôler l’assiduité et un jour de congé supplémentaire en dehors du samedi » (The Star London, 12 septembre).

À Coventry, il y eut un meeting où l’un des ora­teurs déclara : « Il est entendu que les modestes revendications des écoliers sont : pas de travail scolaire à la maison, l’abolition de la canne, une demi-journée de congé le mercredi, la suppression du surveillant chargé du contrôle des assiduités et un penny par semaine pour les moniteurs » (Bir­mingham Daily Mail, le 13 septembre).

À Newcastle, « un nombre important de garçons se regroupèrent pour demander l’abolition de la canne, une demi-journée de congé par semaine et réclamer qu’un penny soit donné tous les vendredi à chaque enfant. Apparemment les socialistes avaient effectué un certain travail parmi ces jeunes plaisantins » (Northern Daily Mail, 15 septembre).

Ces revendications sont fonction, les unes des conditions propres aux écoliers britanniques sou­mis au régime du châtiment corporel, les autres aux parti­cularités du système éducatif : principe du monitorat qui est comme un écho de l’école mutuellis­te ; mais la plupart témoignent de l’appartenance de classe des jeunes révoltés. C’est ainsi que la demande d’abolition du contrôle d’as­siduité s’explique non seulement à partir d’une pratique qui consistait à donner aux élèves une médaille d’assiduité [2], mais aussi parce que l’école délivrait un « certificat de caractère » sur lequel l’absentéisme et les manquements à la discipline fai­saient l’objet d’une mention spéciale, que les enfants devaient ensuite présenter à leur éventuel employeur. De même la revendication d’un salaire, aussi modique soit-il, non seulement pour les moniteurs qui fournissaient un travail méritant salaire, mais aussi pour tous les écoliers suivant régulièrement les cours, est directement liée au désir d’abolir le statut d’assisté qui était celui de nombreux enfants de familles pauvres. La réduction de la journée de travail ou de la durée de la scolarité se comprend en partie par l’obligation dans laquelle se trouvaient beaucoup d’enfants de travailler pour subvenir à leurs besoins et venir en aide à leur famille [3]. Il ne faudrait pas pourtant minimiser comme motif de révolte l’ennui qui régnait dans les écoles municipales où la princi­pale activité consistait à « réciter la table de multi­plication et les versets de la Bible » et la colère des enfants pauvres face à la manière dont les maîtres les traitaient. Ils étaient considérés comme des élèves inférieurs et soumis à des contrôles et des brimades auxquels les écoliers des High schools échappaient. C’est ainsi que tous les matins, les écoliers des bas quartiers étaient inspectés « comme du vulgaire bétail ou du mobilier à vendre » pour savoir s’ils étaient convenablement lavés ; à la moindre trace de saleté, les maîtres les faisaient sortir du rang en les injuriant et les ren­voyaient chez eux se laver, chez eux, c’est-à-dire dans les taudis et les logements exigus qu’ils occu­paient avec leur famille. Les enfants pouvaient bien venir à l’école pieds nus sans contrevenir au règlement, mais l’attitude des maîtres était fonc­tion de la manière dont ils étaient habillés. Les photos prises lors de manifestations sont sur ce point significatives, on y voit des gamins plus ou moins tondus ou coiffés au bol, la mine creusée, portant cravate mais les pieds nus. Dans les activités sportives aussi, les enfants pauvres étaient traités en inférieurs, comme ils n’avaient pas d’équipement et que l’école ne pouvait leur fournir ni chaussures de foot ni maillots de bain, quand ils allaient se bai­gner ils y allaient tout nus. Et quand arrivaient le jour de la fête de l’école ou des compétitions spor­tives, les garçons qui n’avaient pas l’habillement réglementaire ne pouvaient y participer. Sur l’une des photos prises pendant la grève à Hull au bord de la rivière, on voit presque tous les garçons nus éclater de rire, comme s’ils prenaient une revanche et compensaient soudain leurs sentiments de pauvres honteux.

Les rapports des grévistes avec les enseignants furent particulièrement violents et témoignent souvent d’une haine profonde, mais du côté des enseignants il n’y eut aucune sympathie à l’égard des jeunes grévistes et là où la répression put s’exercer elle fut sévère et humiliante.

À Bigyn Boys School, Llanelly, le directeur, donna de la canne à tous les grévistes : « Tandis que les enfants étaient en récréation mardi dernier, on s’aperçut qu’il en manquait 30 sur 827. Après enquête, il m’apparaît qu’il n’est pas juste d’appeler cela une grève, il s’agissait simplement d’insubordi­nation de la part de certains garçons... Quand je revins à l’école l’après-midi, je donnai des coups de canne à tous les enfants qui s’étaient absentés » (South Wales Daily Post, 7 septembre).

Le directeur de Huntingdon School entendit par­ler de grève, après les prières, il fit savoir qu’il pouvait aussi frapper et frapper fort s’il le fallait (jeu de mot intraduisible sur le mot strike qui en anglais veut dire à la fois frapper et faire la grève). Parfois l’autorité des maîtres restait entière : « À l’école de Carlton Road Kentish Town, environ 300 garçons et filles sortirent à l’heure du déjeuner et à 12 h quand la cloche de l’école sonna, ils se ras­semblèrent sur la chaussée et déclarèrent au monde et à eux-mêmes avec des cris d’enthousiasme : "nous sommes en grève !", mais soudain il y eut un grand silence jusqu’à ce qu’on entendit prononcer sur un ton terrifié : "Ciel, un flic !" La directrice s’occupa des filles, son apparition à la porte troubla aussi les jeunes enfants, et quand elle eut tapé dans ses mains, ils obéirent au signal avec la mine basse » (Northern Daily Telegraph, 13 septembre).

« À l’école de Bradford, quelques 50 garçons de 10 à 14 ans refusèrent de retourner à leurs pupitres, après le repas, et discutèrent avec beaucoup d’excitation de leurs droits ; toutefois, à l’apparition du directeur, ils retournèrent en classe et cessèrent toute agita­tion » (The Lancashire Daily Post, 13 septembre).

Là où ils le purent, les enseignants dressèrent les élèves les uns contre les autres : « À Maryport, les maîtres furent capables de mobiliser les élèves loyaux pour se battre contre les grévistes. Quand un piquet de l’école de Grasslot arriva pour entraîner les garçons dans la grève, les élèves des grandes classes furent envoyés dehors pour capturer ceux qui dirigeaient le piquet, il y eut une bataille sur la place du marché, on se servit de pierres et des poings ; quelques-uns des élèves de Grasslot furent attrapés mais ils se battirent avec vigueur et comme ils étaient grands et forts ils purent s’échapper » (Northern Daily News, 16 septembre).

Dans les endroits où les enseignants ne jouissaient plus d’aucune autorité et où régnait une certaine unanimité parmi les élèves, ils firent appel aux parents pour rétablir l’ordre, en utilisant des argu­ments d’ordre économique. Mr Joseph Roberts, ancien président du comité de l’éducation, décla­rait dans une interview : « L’absence des enfants à l’école diminuerait grandement la subvention du gouvernement. L’absence d’un enfant signifiait une perte d’environ un penny à un penny et demi par demi-journée, il invitait donc les parents à veiller à ce que leurs enfants suivent régulièrement les cours. Plus la subvention serait grande, plus la par­ticipation des familles serait faible, la diminution des subventions toucherait indirectement les tra­vailleurs, qui auraient à payer davantage » (Llanelly Mercury, 7 septembre).
je t’en ficherai, moi, des grèves !

En fait, la reprise en mains a été beaucoup plus l’affaire des parents et en particulier des mères qui, dans les familles ouvrières, avaient la responsabilité de l’éducation.

Les articles font rarement état du soutien des parents aux grévistes ; ils ne semblent avoir été favorables que dans une seule ville, Dundee ; ailleurs, « les gar­çons pouvaient bénéficier de la sympathie de leurs pères qui comprenaient leurs sentiments, mais ceux-­ci n’intervenaient pas dans les questions d’école ». « Les plus actifs briseurs de grève dans beaucoup d’endroits semblent avoir été les mères. Non seule­ment elles exerçaient des pressions sur les enfants quand ils rentraient à la maison à la fin du premier jour de grève, mais dans bien des cas elles interve­naient plus activement, entraînant les enfants de force les jours suivants, et dans quelques cas elles montèrent un contre-piquet devant les portes de l’école. Par exemple, une tentative de grève à East Wall National School, Dublin, fut très rapidement interrompue par les mères qui s’étaient rassem­blées en force munies de toutes sortes d’armes. Quand les élèves se dispersèrent hier après-midi à trois heures, quelques policiers et de nombreuses mères étaient là pour protéger les garçons qui avaient résisté à toutes les tentations de s’écarter du droit chemin ; sous escorte féminine, ils rega­gnèrent leur domicile en sécurité » (The Irish Times, 1er septembre).

« Ce furent également les mères qui intervinrent à Londres. De tous côtés, on pouvait voir des cor­tèges de femmes qui conduisaient leurs jeunes espoirs récalcitrants vers l’école, et il devint évi­dent que la grève battait de l’aile » (The Illustrated Chronicle, 15 septembre).

Des comptes-rendus de presse dans tout le pays racontent comment les mères affrontaient les piquets d’enfants et constituaient en bien des endroits la seule autorité à laquelle les enfants acceptaient de se rendre. À Londres, à l’école de Bath Street, une armée de mères pénétra dans l’école, tirant « leurs progénitures récalcitrantes devant le directeur » (The Indépendant, 15 sep­tembre), et à l’école de Radnor Street, dans un autre coin de ce quartier, on vit dans la cage d’escalier une mère en colère ame­nant avec elle son fils qui résistait : « Je t’en ficherais, moi, des grèves ! » (Northern Daily Telegraph, 13 septembre).

Il est certain que les enfants redoutaient beaucoup plus leur mère que les policiers qui étaient de garde devant les portes des écoles, et sans elles, ils ne seraient sans doute jamais retournés en classe. « Quel changement ce matin, les parents ont amené leurs enfants à l’école, d’autres ont menacé du doigt pour faire comprendre à leur progéniture ce qui les attendait s’ils persistaient à manquer l’école » (Hull Daily News, 13 septembre).

À Southampton aussi, les enfants furent reconduits à l’école par leurs mères : « Vendredi matin, prati­quement tous les écoliers avaient repris l’école comme à l’ordinaire. Beaucoup de ceux qui avaient participé aux manifestations des jours précédents étaient accompagnés de leur mère, toutefois le meneur, un garçon d’apparence robuste, fut conduit par son père et gagna l’école escorté par un groupe de sympathisants » (The Hampshire Advertiser, 16 septembre). Simplement l’exception confirme la règle.

Les filles ne jouèrent qu’un rôle minime dans la grève, sans doute parce qu’elles étaient plus étroi­tement surveillées et contrôlées par leurs mères. Deux comptes-rendus seulement les mentionnent. À Portsmouth : « 150 garçons et filles de deux écoles municipales défilèrent à travers les rues et se rendirent dans les autres écoles alentour pour recruter » (The Times, 15 septembre). En Écosse, les filles de Kirkaldy et Cambuslang se montrèrent plus militantes que les écolières d’Angleterre ou du Pays de Galles. Sans doute parce que le système édu­catif écossais était beaucoup plus égalitaire, en ce sens qu’il encourageait les filles aussi bien que les garçons à obtenir une éducation de bon niveau. C’est pourquoi les filles prenaient part à toutes les activités scolaires y compris les grèves.

Les femmes avaient joué un rôle de premier plan pendant les grèves de l’« été chaud » 1911 : non seulement elles avaient poussé leurs maris à faire grève, mais elles les avaient soutenus activement en manifestant et en se battant avec eux. Mais aussi bien l’école n’était-elle pas perçue par les mères de famille comme l’école des flics et des patrons ; leur comportement exprime au contraire tout ce que les classes populaires avaient fini par investir dans le maigre savoir distribué par l’école.
écoles, ouvriers et voyous

« À Shirebrock, Notts, on raconte que les garçons furent influencés par de jeunes voyous qui les incitaient à lire les journaux qui étaient affichés » (The Weekly Express, 15 septembre).

Naturellement, les autorités académiques et la presse bien-pensante développèrent la thèse de la manipulation et des provocateurs extérieurs à l’école : « À l’école d’Altercliffe, Sheffield, on disait que les garçons avaient été travaillés par quelques femmes excitées, chaque fois que les maîtres arrivaient, elles détalaient ». Le Times du 13 septembre focalisait la grève dans les quartiers les plus pauvres de Hull, où « des femmes incitaient les enfants à suivre l’exemple des grévistes ». On a même écrit que de jeunes grévistes avaient été encouragés par des parents « qui traînaient devant la porte de leur école ». Les enfants en grève eurent certainement le soutien de jeunes travailleurs : « À Leeds, un apprenti mécanicien fut capturé par des maîtres pendant la manifestation ». À Dublin, « l’un des maîtres rejeta la responsabilité de la grève sur quelques garçons qui avaient récemment quitté l’école. Se réjouissant d’être libérés de la pesante discipline de l’école, ces jeunes tra­vailleurs espéraient alléger le sort de leurs anciens camarades encore astreints à de tristes corvées sur les bancs de l’école » (The Irish Times, 15 sep­tembre). Comme les grèves se développèrent surtout dans les quar­tiers populaires à l’Est des villes où grouillait une population margi­nale, « un peu zonarde », la frontière entre les jeunes scolarisés et les bandes plus ou moins organisées de voyous étaient mal définie, et ceux-ci vinrent prêter main-forte à ceux-là ; la presse incrimina souvent la « truant class », la classe des élèves faisant l’école buissonnière que l’on trouva au premier rang dans les meetings, les manifestations mais aussi dans les bagarres et les attaques de bâtiments scolaires. Mais « l’absentéisme » que les écoliers pauvres prati­quaient plus souvent par obligation que par révolte n’était-il pas déjà une protestation face à l’ennui et aux brimades qu’ils devaient subir à l’école ?

Ils n’eurent probablement pas le soutien des ouvriers adultes, à l’exception de la ville de Dundee où se trouvaient « les plus gros employeurs d’en­fants de 10 à 14 ans ». D’après Bob Stewart, qui le raconte dans son autobiographie En brisant les chaînes, on pratiquait dans cette ville le travail à mi-temps ; les enfants passaient une partie de la semaine à travailler à la fabrication des toiles de jute et une autre partie à suivre les cours dans la salle de classe que la loi obligeait les patrons à construire dans l’enceinte même des fabriques. Aux heures des repas, ils étaient étroitement mélangés aux ouvriers adultes ; certains parta­geaient leurs repas avec eux, pour payer leur écot les enfants leur lisaient les journaux. C’est en les parcourant qu’ils apprirent que d’autres enfants à travers le pays s’étaient mis en grève pour faire connaître leur condition. Ailleurs, les enfants pauvres prenaient leur repas dans les « coffee shops » aux frais de l’école, ils côtoyaient donc les adultes non seulement dans leurs familles mais aussi au travail, puisque beaucoup avaient un emploi dans ces coffee shops, mais cela ne semble guère avoir eu d’effets.

Malgré tout ce qui a pu s’écrire sur les aspects parodiques de cette grève, les enfants se l’étaient appropriés et en firent une forme de lutte origina­le et spécifique.
la fête de la liberté

La grève fut pour les enfants un moyen d’exprimer leurs sentiments, elle fut surtout une sorte de fête. Les photos montrent des visages heureux et sou­riants, et les journaux ont beau faire preuve de prévention, les compte rendus des faits donnent une description des grévistes qui laisse percevoir cet aspect de « fête de la liberté ».

« À Sunderland, les enfants, tous nus pieds, portaient une énorme branche d’arbre », dont l’Illustrated Chronicle semble penser qu’elle avait une signifi­cation mystique. Les écoliers de Pollock, Glasgow, défilèrent aussi dans les rues avec des branches d’arbre « en frappant sur des bidons de fer-blanc » (Greenock Telegraph, 15 septembre). De même à Airdrie, les enfants avaient apporté dans les rues par centaines des sifflets et des boîtes de conserve sur lesquelles ils frappaient et, à Southampton, ils formèrent des orchestres avec des harmonicas et une énorme baignoire en métal qui leur servait d’instrument à percussion. À Manchester : « un grand nombre d’enfants se rassemblèrent au voisi­nage de la gare d’Oldham Road, et ils battirent la retraite sur les palissades de bois et les panneaux publicitaires » (The Herald, 16 septembre). Dans les quartiers industriels, les enfants écrivaient leurs revendications à la craie sur la chaussée ou bien distribuaient des tracts, surtout ils parcou­raient les rues en chantant au son des sifflets et des harmonicas « une, deux, les garçons sont en marche » et « viens-t’en et suis-moi », le chant de grève le plus populaire dans tout le pays. Les grèves ne furent pas toutes violentes. À Hartle­pool, les garçons marchèrent le long de la plage et pique-niquèrent. Ailleurs, ils allèrent à la rivière nager, parfois ils s’asseyaient simplement en rond pour discuter, ils jouaient aux petits soldats et défilaient en chantant des chants patriotiques, à Northampton les grévistes allèrent cueillir des mûres, partout ils s’amusèrent à composer des chansons, paroles et musiques. Ils montrèrent de l’imagination et de l’originalité, témoignant que « malgré l’étouffoir scolaire, leurs esprits n’avaient pas été détruits par la grise monotonie des salles de classe et contenaient encore des idées comme la boîte de peinture des couleurs ».
la mémoire perdue

De cette fête, toute trace devait bientôt disparaître non seulement dans la mémoire du pouvoir mais dans celle du peuple. Si elle nous est aujourd’hui restituée, c’est parce qu’un docker, Dave Marson, l’a rencontrée par hasard. Il cherchait autre chose : des renseignements sur l’histoire du mouvement ouvrier. Et quand il l’eut trouvée, il ne put d’abord y croire : « J’avais toujours cru, dit-il, que les grèves étaient quelque chose qui demandait une organisation ».

En poursuivant ses recherches, il trouva que beau­coup de journaux locaux présentaient un manque pour l’année 1911 : destructions, lui dit-on, dues aux bombardements. L’année 1911, commente-t-il sans insister, est la seule à avoir tant souffert de la guerre. Dans cette révolte oubliée des enfants, on serait tenté de voir comme le refoulé fondamental de l’histoire sociale, le symbole même de la répres­sion exercée d’en haut sur la mémoire populaire : répression du pouvoir sur la mémoire des luttes du peuple ; du mouvement ouvrier sur les grèves pour rire ; des adultes sur les luttes mêmes des enfants qu’ils furent.

À en rester là pourtant, on oublierait de s’interro­ger sur cette mémoire populaire censée conserver la trace de ce dont le pouvoir ne veut plus entendre parler. Dave Marsons dit avoir rêvé devant une photographie de grévistes assemblés devant les portes de l’école où il fit lui-même ses études. Certains avaient pu être les parents de ses condisciples. Rien n’était resté de leur lutte. Et ce ne sont pas seulement des souvenirs qui s’étaient perdus, mais des attitudes. Il fut ainsi frappé par l’anecdote d’un policier qui dut foncer à bicyclette pour disperser un piquet d’écoliers grévistes. « La simple vue d’un uniforme, dit-il, suffisait à nous effrayer, moi et mes camarades d’école ».

Nous touchons là quelque chose de plus profond que la « répression » de la mémoire populaire : son autocensure. Celle-ci ne fonctionne pas en rejetant une histoire qui serait devenue insupportable, y compris pour ses acteurs, mais plutôt en perdant la trace de ce qui est devenu sans importance. Coincée entre l’image de famille du quotidien et la mémoire de l’événement qui fait date, entre l’histoire domes­tique et l’histoire sociale, la grève des écoliers ne peut acquérir une signification, une histoire auto­nomes. Elle reste l’appendice d’une grève prise dans la chaîne historique du mouvement ouvrier.

Sans doute peut-on dire de cette révolte d’écoliers, comme on l’a fait de mouvements étudiants récents, qu’un groupe social transitoire est inca­pable de capitaliser ses expériences et ses luttes. Mais on pourrait aussi rapprocher leur destin de celui de toutes ces formes de résistance au travail salarié et à l’ordre manufacturier qui n’ont jamais pu faire une tradition : gestes mille fois renouvelés mais en même temps vidés de leur passé et por­teurs de leur propre oubli, décalés par rapport aux généalogies reconnues de la révolte et à la comp­tabilité des échecs et des succès du mouvement ouvrier. Toute une série de pratiques de résistance tombent ainsi hors de l’histoire. Pour qu’elles y reprennent place, il faut moins la transgression d’une censure que la formation d’un regard nou­veau sur la hiérarchie des événements. « Je pouvais m’identifier à eux », dit Dave Marsons en retrou­vant la photographie des grévistes de son école. Pour que cette identification soit possible, il fallait sans doute cette sensibilité nouvelle, produite par mai 68 et les révoltes anti-autoritaires, qui per­mette au regard de se fixer sur la brève fête des écoliers, d’y voir le moment d’une histoire frag­mentaire mais autonome d’une forme spécifique de résistance à l’ordre établi.

Notes :

[1] L’ "été chaud" de 1911 reste une date mar­quante de l’histoire sociale britannique. De juin à août, dans les ports et les princi­pales villes industrielles, un formidable mouvement de grèves témoigna de la volonté des travailleurs d’obtenir des salaires plus élevés et de meilleures conditions. Il fallut pour en venir à bout faire intervenir l’armée. Une panique s’empara du pouvoir devant la menace d’une grève générale. Un conseiller municipal de Hull jadis témoin de la Commune de Paris aurait déclaré n’y avoir rien vu de semblable à ces défilés de « femmes aux cheveux défaits et à moitié nues » se ruant dans la rue pour se livrer à la destruc­tion et au saccage.

[2] Il fallait 4 années sans aucune absence pour obte­nir une médaille de bronze. 6 pour une d’argent et 10 pour une d’or. Les parents ouvriers y attachaient une telle importance qu’ils obli­geaient leurs enfants à aller en classe malades.

[3] Un ancien ouvrier, raconte Dave Marson, se souvient avoir travaillé pour un boucher. Il com­mençait à 6 heures du matin avant d’aller à l’école, et terminait le soir aux environs de 10 heures. Beaucoup d’enfants étaient garçons de courses ou bien aidaient un adulte de la famille qui tenait un étalage au coin d’une rue.

Ce texte a été écrit pour figurer dans le numéro 3 de la revue Les Révoltes Logiques, consacré au thème des « Enfants du Capital », à l’automne 1976. Nos amis anglais de History Workshop nous avaient adressé la brochure de Dave Marson sur les grèves d’écoliers à Hull en 1911. Enseignant depuis 1971 au Lycée Montaigne, qui se trouvait à la pointe de la contestation lycéenne dans les années 1970 et y ayant connu plusieurs mouvements de grève, je m’étais sentie suffisamment inspirée par ce texte pour en faire non pas une traduction ou un résumé mais une libre adaptation.
Danièle Rancière


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Message  gérard menvussa Dim 4 Sep - 13:06

Plusieurs arrestations après une manifestation de l'extrême-droite à Londres

La police a arrêté 60 personnes à Londres samedi après des incidents provoqués par un groupe d'extrême-droite, organisateur d'un rassemblement malgré l'interdiction de manifester imposée après les émeutes meurtrières qui ont secoué le pays en août.

La police a d'abord annoncé dans un communiqué avoir arrêté 16 personnes "pour plusieurs délits, dont bagarres, alcoolisme, trouble à l'ordre public et agression d'un agent de police", dans une foule d'un millier de militants de la Ligue de défense anglaise (EDL).

Quarante-quatre autres personnes ont également été interpellées dans le quartier d'East London, quand des membres de l'EDL sont descendus d'un bus et se sont battus avec des jeunes du quartier, a indiqué la police dans la soirée. Stephen Lennon, le leader de l'EDL, s'est adressé à la foule à Aldgate, dans East London, indiquant au passage qu'il n'avait pas respecté une obligation de se présenter à la police le samedi, une décision de justice liée à une condamnation pour hooliganisme lors de matches de football.

"Le résultat probable est que je vais être mis en prison", a-t-il ajouté, avant d'assurer qu'il était prêt à enfreindre toute restriction à "(ses) droits démocratiques à (s)'opposer à l'Islam militant".

Près de 1 500 contre-manifestants "antifascistes" s'étaient rassemblés à proximité, dans le quartier de Whitechapel, alors que 3 000 policiers surveillaient les deux manifestations dans cette zone qui abrite de nombreuses minorités ethniques. L'EDL est familière de ces violences qui ponctuent les manifestations qu'elle organise dans le pays depuis deux ans.
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Message  sylvestre Jeu 8 Sep - 8:29

Emission "La-bas si j'y suis" : http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2241

Le Royaume Uni contre la racaille
Le mercredi 7 septembre 2011




— -
Retour sur les émeutes en Grande-Bretagne.

Le "CHAV", c’est la racaille.

C’est, selon le dictionnaire Collins, une "jeune personne d’extraction populaire qui s’habille en survêtement".

C’est l’acteur des émeutes urbaines qui ont enflammé la Grande Bretagne.

C’est la cible de toute la répression, de toute la diabolisation y compris de la part du milieu populaire lui-même. Une division bien utile pour le pouvoir conservateur.

Avec Owen Jones, auteur de "The demonization of the working class", paru aux éditions Verso à Londres en 2011.
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Message  Roseau Jeu 15 Sep - 0:17

http://www.huffingtonpost.co.uk/2011/09/14/unions-set-to-ballot-memb_n_961567.html
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Message  Roseau Jeu 22 Sep - 14:52


Selon des statistiques officielles publiées mercredi, le déficit britannique s’est creusé de 13,8 milliards de livres (15,9 milliards d’euros) pour le seul mois d’août. Soit plus de 2 milliards supplémentaires qu’un an plus tôt, avant la mise en œuvre de coupes budgétaires drastiques.

Les bibliothèques municipales ferment par centaines, les allocations sociales diminuent et 110.000 emplois ont été supprimés durant l’été dans le secteur public. Mais les dépenses de l’État semblent à peine s’en ressentir, malgré une légère baisse sur les cinq derniers mois cumulés.

Résultat: le gouvernement doit continuer d’emprunter à tour de bras pour boucher les trous et la dette publique s’envole, tandis que la croissance rétrécit comme peau de chagrin, comme partout ailleurs en
Europe.
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Message  lieva Sam 24 Sep - 16:09

pour information :

http://www.europeagainstausterity.org/http://www.europeagainstausterity.org/

première rencontre internationale alternative à la ces.

Avec beaucoup de limite mais à suivre


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Message  sylvestre Dim 2 Oct - 19:43

http://www.liberation.fr/depeches/01012363306-gb-manifestation-de-35-000-personnes-au-premier-jour-du-congres-des-tories

GB: manifestation de 35.000 personnes au premier jour du congrès des Tories
MANCHESTER (Royaume-Uni) (AFP) - Environ 35.000 personnes ont défilé à Manchester dimanche, au premier jour du congrès du Parti conservateur britannique au pouvoir, organisé dans cette ville du nord-ouest de l'Angleterre, pour dénoncer les restrictions budgétaires, selon la police.

"Conservateurs pourris, dehors", ont crié les manifestants en passant devant le centre qui accueille la conférence nationale des Tories.

De nombreux fonctionnaires, dont des enseignants et des sapeurs-pompiers, mais aussi des employés du privé ont répondu à l'appel de la confédération des syndicats britanniques, le Trades Union Congress (TUC), qui a intitulé le défilé "L'alternative - emplois, croissance, justice".

"Je suis contre la politique du gouvernement de réduction du montant des retraites. Il y des milliers de personnes ici, mais connaissant les conservateurs, je doute qu'ils écoutent, a estimé Gerry Collier, 64 ans, employé dans une entreprise de vérification des alarmes incendie.

Les pancartes dans la foule affirmaient "Les coupes ne sont pas le remède", "Manchester, une ville unie contre les coupes" ou encore "Il doit partir", un message adressé au Premier ministre conservateur David Cameron.

Le gouvernement britannique, auquel participent les conservateurs et les libéraux-démocrates, a lancé l'an dernier un plan d'austérité drastique, considéré comme l'un des plus sévères des grands pays développés, afin de venir à bout d'ici 2015 d'un déficit colossal.

Ce plan se traduit notamment par une réforme des retraites du secteur public et la suppression de plus de 300.000 postes d'ici quatre ans dans le public.

En réponse aux manifestants, le ministre des Affaires étrangères William Hague a affirmé dimanche que "l'argent promis par le précédent gouvernement travailliste n'a jamais existé".

"On nous a laissé la tâche de vous dire la vérité", a-t-il lancé lors du congrès des Tories, qui se tient jusqu'à mercredi et devrait se concenter sur l'économie et l'Europe.

"Un gouvernement trahit son pays quand au lieu de servir sa population, il l'autorise à vivre dans l'illusion. Et par-dessus tout, c'est injuste et irresponsable de laisser une énorme dette aux générations futures au lieu d'y faire face maintenant", a-t-il ajouté.

Les syndicats comptent organiser le 30 novembre une deuxième grève contre la réforme des retraites, après celle de juin, qui avait été le plus grand conflit social depuis l'arrivée au pouvoir de M. Cameron en mai 2010.

"On est sur le point d'avoir la plus grande grève depuis 80 ans en Grande-Bretagne", a assuré dimanche Mark Serwotka, à la tête du Public and Commercial Services Union (PCS), premier syndicat de la fonction publique d'Etat). "Si après le 30 novembre, ils ne font pas marche arrière, s'ils continuent avec les coupes, continuent à nous voler nos retraites, et bien on fera encore grève jusqu'à ce qu'on gagne", a-t-il affirmé.

© 2011 AFP
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Message  Copas Lun 10 Oct - 21:17

lieva a écrit:pour information :

http://www.europeagainstausterity.org/http://www.europeagainstausterity.org/
première rencontre internationale alternative à la ces.
Avec beaucoup de limite mais à suivre



Vous le reconnaissez avec la barbe ?


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http://www.coalitionofresistance.org.uk/
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Message  Roseau Mer 12 Oct - 21:28

http://www.20minutes.fr/ledirect/804596/gb-chomage-plus-haut-depuis-17-ans-austerite-question
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Message  lieva Mer 12 Oct - 21:52

au sujet de la rencontre de londres...

l'objectif était double pour les britannique de la coalition résistance préparer leur journée du 30 novembre (qui devrait être précédée d'une tentaive de mouv étudiant mais je sais pas où ils en sont) et rassembler des froces syndicales en europe. Donc point de vue british le secrétaire d'unité avait fait le déplacement mais pas le secrétaire du rmt annoncé au départ. Le swp joue à part as usual et y a donc un mouvement avec des collectifs de base divisés entre syndicalisme combatif, syndicalisme mou et swp. Rien qui fasse fantasmer donc.

Côté international, y avait deux "pôles". les pc et GUE NGL qui suit sérieusement - à sa façon- les initiatives syndicales alternatives. Bilan deux intervenant PCF dans les meetings centraux pour une pays où ils ont très peu de force plus die linke (catastrophique). Les interv sans surprise sur le thème plan de relance khénésien "de gauche". un pôle syndicalisme "rouge" avec sud, les cobas, le syndicat catalan des enseignants, le cadtm (grèce) et l'XG genre olivier besancenot. Rien de nouveau dans les intervs (mais j'ai pas assisté à la fin) à part le gars des cobas qui a quand même commencé son interv sur l'évolution des rapports de forces entre impérialisme mais qui a pas posé les conséquences concrètes. Pour le reste la grecque, vraisemblablement membre de la section de la IV était très bien sur le constat et sur le fait de dire que ça allait s'étendre en europe et qu'il n'y aurais pas d'épargnés. Mais peu de perspectives. la décla finale n'a pas finalement pas intégré de demande de grève européenne, se limitant à une journée d'action. Faut dire que les forces en présence étaient aps en mesure d'impressionner grand monde.

Tout ça pour dire que ça bouger et qu'il faut persévérer malgré la situation actuelle


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