Indigènes de la République
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Re: Indigènes de la République
http://www.mondialisme.org/spip.php?article2322
L’UJFP pratique la politique de l’autruche face aux tenants de l’antisémitisme de gauche. A propos d’une polémique loufoque (ou peut-être pas ?)
« Benjamin Netanyahu, maître à penser de Monsieur Yves Coleman... » tel est le titre d’un article paru aujourd’hui sur le site Bellaciao et celui de l’UJFP, qu’un internaute m’a « gentiment » fait suivre.
http://bellaciao.org/fr/spip.php?article146886
L’auteur fait flèche de tout bois et m’accuse tour à tour d’être complice de Netanyahou, d’Ulcan (le persécuteur de Pierre Stamboul et de bien d’autres), du RAID, du Mossad, de l’extrême droite israélienne, et évidemment (le tableau n’aurait pas été complet sans cela) d’être... antisémite.
Pour appuyer sa démonstration loufoque, Jean-Marc Capellero-Rabinovitz nous balance un florilège de citations de Juifs et d’Israéliens réactionnaires et racistes. Florilège qui aurait un intérêt si l’auteur avait affaire à un « sioniste », ce que je ne suis pas, ou à quelqu’un ayant des illusions sur l’Etat d’Israël et Tsahal, ce qui n’est pas du tout mon cas. Car critiquer « les limites de l’antisionisme » ne signifie pas être « sioniste ». Mais ces subtilités élémentaires échappent à notre polémiste primaire à la pensée binaire.
Le plus curieux, dans cet article, est qu’il ne répond pas vraiment à un texte que j’aurais consacré à l’UJFP mais qu’il défend, par la bande, les Indigènes de la République (1) .
« Par la bande », parce qu’il s’agit d’une défense masquée, indirecte, du PIR, et aussi « par la bande » parce qu’il s’agit d’un article de copinage, d’un pote qui défend ses amis de la bande alliée, celle du PIR, au nom de l’UJFP.
Cette démarche est plutôt tortueuse mais elle illustre bien les moeurs de l’extrême-gauche : les « gauchistes » ne défendent pas des principes politiques, seulement des amis temporaires ou des alliés de circonstance, quelles que soient leurs positions par ailleurs...
Le PIR cherche à radicaliser de plus en plus son antisémitisme et à lui donner une apparence respectable pour un public de gauche et d’extrême gauche. Ce groupuscule a besoin, pour cela, de la caution de « Juifs non juifs », expression qu’utilisait Isaac Deutscher pour se désigner et désigner certains juifs de gauche ou d’extrême gauche « antisionistes ». Mais à l’époque ceux-ci misaient sur l’unité entre les travailleurs juifs et arabes pour abattre tous les Etats du Moyen-Orient, pas simplement Israël. Ils étaient favorables à une révolution socialiste. Et ces « Juifs non juifs » ne soutenaient pas inconditionnellement des mouvements nationalistes laïques arabes, ou encore moins islamistes, antisémites comme le font le PIR aujourd’hui et une bonne partie de l’extrême gauche.
Plus les frontières d’Israël s’accroissent par la force militaire et les agressions régulières de Tsahal, plus les gouvernements israéliens se montrent sans pitié avec les civils palestiniens et avec les Arabes d’Israël, plus la haine contre les Juifs s’accroît et est manipulée par toutes sortes de forces réactionnaires dans le monde.
En France cette haine est meurtrière (d’Ilan Halimi (2) au massacre de l’hypermarché casher, les exemples ne manquent pas), mais elle ne se réduit pas du tout au conflit dit « israélo-palestinien », conflit totalement asymétrique entre une armée professionnelle, suréquipée, disposant de l’arme atomique, soutenue par les Etats-Unis, et des mouvements de guérilla à la puissance militaire bien inférieure même si leurs intentions criminelles et antisémites sont indéniables.
Cette haine antijuive a acquis une audience mondiale, notamment en France, grâce à une vieille tradition antisémite-anticapitaliste (3) , qui se régénère et se transforme avec la crise économique mondiale depuis les années 70 et la montée des nationalismes en Europe depuis une vingtaine d’années. La haine antijuive est un fond de commerce très rentable, du moins si l’on en croit les centaines de milliers de gens qui regardent les vidéos de Dieudonné sur le Net ou qui payent pour écouter ses discours politiques antisémites, en « live » ou sous forme de DVD.
La haine antisémite croît en France et le Parti des Indigènes de la République a décidé de ne pas laisser à Dieudonné, Soral et au Front national le monopole de l’exploitation de l’antisémitisme franchouillard. Il veut apporter sa propre petite pierre et en recueillir les fruits. Et l’antisionisme uniquement orienté vers la Palestine ne lui suffit évidemment pas. Il lui faut élargir sa cible, d’autant plus que ce même groupuscule a des sympathies religieuses-identitaires de plus en plus affirmées du moins si l’on en croit les déclarations de Mme Bouteldja. Or, comme l’on sait, alimenter un conflit ou des problèmes sociaux graves avec des considérations religieuses est la meilleure façon d’opposer les exploités les uns aux autres.
En 2012, au moment des meurtres antisémites de Toulouse, dans un article intitulé « Mohammed Merah et moi » (http://indigenes-republique.fr/mohamed-merah-et-moi/) Mme Bouteldja avait réservé toute sa compassion à la mère du tueur (4), ignorant la douleur des parents des trois enfants (Gabriel, Arieh et Myriam) que Merah avait assassinés froidement au nom d’une prétendue solidarité avec la Palestine que certains gauchistes prirent et prennent encore au sérieux.
La même année, le PIR mobilisa l’intellectuel trotskisant Enzo Traverso pour effectuer une « lecture décoloniale de la Shoah » ( ?!) (https://www.dailymotion.com/video/xp4jth_pour-lecture-decoloniale-de-la-shoah-enzo-traverso_news). Dans cette conférence, Traverso expliqua que Hitler et les nazis détestaient les Arabes : on se demande bien pourquoi le médecin personnel du Führer passa six heures à examiner Al Husseini pour lui délivrer un certificat d’aryanité ; pourquoi le dirigeant palestinien bénéficia d’une tribune radiophonique et de moyens financiers importants pendant toute la seconde guerre mondiale ; pourquoi Himmler organisa 10 000 musulmans bosniaques au sein de la SS ; pourquoi al Husseini fut si proche après-guerre de l’avocat néonazi François Genoud ; pourquoi plusieurs centaines d’anciens responsables nazis (anti-Arabes, donc, selon Traverso) se réfugièrent en Egypte ou ailleurs et occupèrent des postes importants dans l’appareil d’Etat et l’économie après-guerre au Moyen-Orient...
En 2014, Mme Bouteldja falsifia (5) les écrits du trotskiste CLR James et du Workers Party prétendant que celui-ci aurait cautionné l’antisémitisme des Noirs américains, antisémitisme jugé « progressiste » par la porte-parole du PIR.
Puis, en mars 2015, Mme Bouteldja en rajouta une couche pour expliquer que les Juifs français étaient les chouchous de la République depuis le décret Crémieux (6) , rejoignant ainsi les propos du « socialiste » Roland Dumas et d’une pléthore de politiciens français antisémites depuis Drumont....
On utilise souvent l’expression d’ « idiots utiles » pour désigner ceux qui apportent de l’eau au moulin de leurs adversaires. Pour ce qui concerne l’aide que l’UJFP apporte aux antisémites du PIR et à leurs falsifications historiques grossières, on ne peut parler d’idiotie. Il s’agit plutôt d’une ligne politique consciente d’aide à un groupuscule qui falsifie l’histoire pour mieux attiser la haine contre les « Blancs », à commencer par les prolétaires « blancs », juifs compris.
Car pour le PIR les Juifs, fussent-ils de l’UJFP, font partie des « Blancs » groupe social (selon lui) qui opprimerait les « non-Blancs ». Le PIR ne va pas encore, comme Dieudonné, jusqu’à expliquer que « les Juifs » auraient été les principaux organisateurs et bénéficiaires de la traite transatlantique. Il se contente (pour le moment) de soutenir le Hamas dont la Charte repose sur le Protocole des Sages de Sion et les passages les plus antijudaïques du Coran.
L’UJFP est composée de ce que le PIR appelle des « Blancs », qu’ils soient juifs ou non juifs. Or, pour mériter la sympathie (ou du moins l’indulgence) du PIR quand on est « Blanc » (donc automatiquement complice de l’esclavage, du colonialisme et du néocolonialisme) et « juif » (donc automatiquement complice du « sionisme » et de tous les crimes de guerre de l’armée israélienne), les militants de l’UJFP comme bien d’autres individus d’extrême gauche ont décidé, en bons pénitents du gauchisme, de porter la lourde croix de leur « blanchitude » et de leur « judéité » intrinsèquement criminelles et racistes aux yeux du PIR.
L’avenir nous dira quelle sera la prochaine « pénitence » que devront effectuer les militants de l’UJFP pour mériter l’indulgence de leurs alliés antisémites du PIR...
Cette attitude ne les protégera pas (si tel est leur calcul) contre l’antisémitisme que veut entretenir le PIR à gauche et à l’extrême gauche. Pendant les années 20 et 30, de nombreux Juifs modérés ou réactionnaires ont fait le dos rond, pensant ainsi éloigner la menace ou ne pas attirer l’attention des racistes. Certains d’entre eux d’ailleurs partageaient les préjugés sociaux, xénophobes voire racistes de la droite et de l’extrême droite allemande ou française. Tous n’étaient pas des « progressistes », encore moins des révolutionnaires, loin de là, mais beaucoup étaient politiquement aveugles.
Aujourd’hui, ce sont certains juifs d’extrême gauche, en France comme aux Etats-Unis, qui font le dos rond à leur tour et ignorent la montée de l’antisémitisme. Ils n’y voient qu’un fantasme, une manifestation de paranoïa juive ou plus trivialement un complot du Mossad. L’histoire se répète, hélas, et certains militants n’ont absolument rien appris.
C’est très dommage pour eux comme pour nous tous car l’extrême droite (« blanche » ou « non blanche », qu’elle tienne un langage « sioniste » ou « antisioniste ») ne nous fera pas de cadeaux. Ramper devant elle en faisant passer ses lubies réactionnaires pour des théories radicales ne nous vaudra que leur mépris et leurs coups.
Y.C., Ni patrie ni frontières, 23/7/2015
1. Le titre de l’article paraphrase celui de mon texte sur... le PIR : « Edouard Drumont, maître à penser de Mme Houria Bouteldja : les Indigènes de la République réussissent leur examen d’entrée dans l’extrême droite gauloise » http://www.mondialisme.org/spip.php?article2263
2. Cf. « Le meurtre d’Ilan Halimi et le malaise de la gauche multiculturaliste » (http://mondialisme.org/spip.php?article632). Déjà le 25 février 2006 l’UJFP s’était « distinguée », comme l’extrême gauche, par sa négation du caractère antisémite du meurtre d’Ilan Halimi (« le caractère antisémite de ce meurtre n’est pas avéré » ; l’UJFP « déplore que certains accréditent d’office la thèse du crime antisémite ». Cf. son communiqué incroyable sur oumma.com : http://oumma.com/Ilan-Halimi-contre-tous-les). Trois ans plus tard (http://www.ujfp.org/spip.php?article1289), l’enquête terminée, l’UJFP admit enfin qu’il s’agissait d’un acte antisémite, mais pas pour tous les participants à cette séquestration et à ces tortures, manifestant ainsi une curieuse indulgence pour des salopards qui torturèrent un Juif pendant trois semaines, le laissant pour mort, afin de lui extorquer de l’argent sous prétexte que sa « communauté » était riche. L’UJFP en profita pour attaquer le manque d’indépendance de la justice et les pressions du CRIF... renforçant ainsi, sans même s’en rendre compte, la vision complotiste selon laquelle l’Etat (justice comprise) serait sous le contrôle des « Juifs ».
3. Cf. « Multiplicité des formes de l’antisémitisme et « antisémitisme mondialisé » actuel » (http://www.mondialisme.org/spip.php?article2128)
4. Mohamed Merah, Houria Bouteldja et la compassion à deux vitesses http://mondialisme.org/spip.php?article1822
5. http://mondialisme.org/spip.php?article2089. Mme Bouteldja falsifie CLR James au service d’un « antisémitisme progressif »... imaginaire !
6. http://indigenes-republique.fr/racisme-s-et-philosemitisme-detat-ou-comment-politiser-lantiracisme-en-france-3/
Post scriptum du 24 juillet. :
Finalement, la nuit portant conseil, la diatribe de l’UJFP n’est pas si loufoque que cela.
Entre identitaires de gauche (et parfois de droite), on se serre les coudes.
L’UJFP, tout comme les Indigènes de la République, le CRAN, le CRIF et quelques autres occupe un créneau identitaire.
Or, c’est bien connu, entre identitaires on se déteste férocement, mais on peut aussi conclure des alliances tactiques.
Ainsi la Nation de l’Islam de Louis Farrakhan fit-elle alliance (temporairement) avec le Ku Klux Klan.
Ou les protestants antisémites mais évangélistes américains peuvent-ils faire alliance avec les sionistes d’extrême droite.
Ou encore les Naturei Karta antisionistes avec Dieudonné.
Tous ces gens-là ont au moins UN point commun : ils mettent en avant leur identité religieuse, ethno-religieuse, raciale, ethno-politique, comme la SEULE solution aux problèmes de leur communauté d’appartenance, imaginaire, fantasmée, et se méfient comme de la peste de toute démarche soulignant l’importance de l’union entre tous les exploités, quelles que soient leur couleur de peau, leur religion, leur absence de religion, leur nationalité, etc.
Dans ce cadre, effectivement la polémique "loufoque" de l’UJFP a un sens : adeptes des politiques identitaires ou identitaristes (ce qu’on appelle « identity" politics en anglais et qui n’est vraiment ni de droite ni de gauche d’ailleurs), les militants de l’UJFP tirent à vue sur celles et ceux qui défendent un point de vue non identitaire… même s’ils sont « descendants d’esclaves », métis (des « traîtres » pour leurs potes du PIR qui ne savent pas qu’une de leurs idoles, Malcolm X, était métis) et portent un nom… juif et… non juif, comme c’est mon cas.
Trois raisons pour des identitaires de gauche ou de droite d’utiliser l’arme de la calomnie car les identitaires haïssent le métissage (qui ruinent tous leurs espoirs d’incarner une identité pure ou en tout vendable sur le marché politique) et « pensent » dans une logique binaire, mais jamais en termes d’opposition de classe.
Dernière édition par hadrien le Ven 24 Juil - 18:02, édité 1 fois
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Re: Indigènes de la République
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Re: Indigènes de la République
La logique coloniale française : Des Basques aux Algériens, de la colonisation « intérieure » à la « colonisation extérieure
Publié le 24 juillet 2015 par bouamamas https://bouamamas.wordpress.com/
Le discours sur la République et les « valeurs de la république » ont connu un retour fulgurant sur le devant de la scène politique et médiatique à l’occasion des attentats de janvier 2015 et de leur instrumentalisation idéologique par Manuel Valls. Le roman national construit par la classe dominante, comme idéologie de justification et de légitimation de son pouvoir, s’est de nouveau déployé avec ses concepts lourds et ses oppositions binaires (universalisme contre particularisme, modernité contre réaction, lumières contre obscurantisme, assimilation contre communautarisme, etc.). Nous nous sommes expliqués à maintes reprises sur les enjeux de cette séquence historique qu’a été « je suis Charlie[i]». Nous voulons aujourd’hui faire le point sur ce qui rend possible une telle instrumentalisation : l’intériorisation massive dans une partie importante de la gauche du mythe de la « mission civilisatrice » comme outil d’émancipation des peuples de France à l’interne de l’hexagone, puis des peuples et nations d’Asie, d’Afrique et d’Amérique à l’externe. Les logiques, buts et processus qui ont présidé à la colonisation externe sont ainsi de même nature que ceux qui se sont déployés dans ce qu’il faut bien appeler une « colonisation interne ».
La colonisation comme processus de généralisation du rapport social capitaliste
Dans son historique « discours sur le colonialisme », Aimé Césaire analyse le capitalisme comme une « forme de civilisation qui, à un moment de son histoire, se constate obligée, de façon interne, d’étendre à l’échelle mondiale la concurrence de ses économies antagonistes[ii]». Cette concurrence et cette logique extensives sont consubstantielles au capitalisme. Elles se sont d’abord déployées dans les périphéries proches des centres d’émergence du nouveau mode de production capitaliste avant que de s’étendre à des périphéries plus lointaines.
Rosa Luxemburg souligne à juste titre que cette logique extensive suppose et nécessite la destruction des « économies naturelles », des « économies paysannes » et des cultures populaires dans lesquelles elles se sont historiquement élaborées[iii]. Marx a décrit précisément l’enjeu pour le nouveau mode de production capitaliste de cette lutte : « On avait eu une production dont seul le surplus était valeur d’échange, et qui était présupposée à la circulation ; on passe maintenant à une production qui ne fonctionne qu’en liaison avec la circulation et dont le contenu exclusif est la valeur d’échange[iv]». Ce n’est donc pas par « méchanceté » ou par « vice » que se déploient la logique extensive et la guerre contre les « économies » périphériques (d’abord de proximité puis plus éloignées). Elles sont tout simplement la conséquence logique du nouveau mode de production. Réduire l’extension coloniale du mode de production capitaliste à une lutte contre le féodalisme en occultant qu’elle est aussi une lutte contre des « économies naturelles » et des « économies paysannes » pour reprendre les expressions de Rosa Luxemburg, conduit à la cécité face à la résistance hier comme aujourd’hui, dans l’hexagone comme à l’échelle internationale, à l’arasement et à l’uniformisation capitaliste. L’Etat français centralisateur n’a pas été qu’un outil de guerre contre le féodalisme mais aussi une machine de destruction des économies antérieures et des cultures qui les portaient.
Parlant des périphéries extra-hexagonales colonisées, Aimé Césaire résume comme suit les caractéristiques qui en font des obstacles à détruire pour le capitalisme :
« C’étaient des sociétés communautaires, jamais de tous pour quelques-uns. C’étaient des sociétés pas seulement antécapitalistes, comme on l’a dit, mais aussi anticapitalistes. C’étaient des sociétés démocratiques, toujours. C’étaient des sociétés coopératives, des sociétés fraternelles[v]. »
Il y a bien sûr, idéalisation assumée de ces sociétés par Aimé Césaire car son écrit est une œuvre de lutte et de dénonciation, mais cela n’enlève rien aux principales caractéristiques de ces « économies naturelles et paysannes ». Rappeler ces faits ne veut pas dire que l’avenir est à construire par un retour vers ces formes du passé. L’histoire ne se réécrit pas en gommant certaines de ces phases mais en les dépassant vers un horizon d’émancipation.
La prise en compte de cette base matérielle de la colonisation est essentielle pour ne pas dériver vers une opposition idéaliste (et donc impuissante) à la colonisation. Cette dernière est dotée d’un mouvement historique l’amenant à prendre différents visages en fonction du rapport des forces. Les discours sur la nation, sur l’assimilation, sur l’intégration, sur l’universalisme abstrait, etc., ne sont que des accompagnements idéologiques d’un processus d’assujettissement total d’une périphérie à un centre au profit de ce dernier.
Ces discours ont d’abord été tenus dans le cadre de la construction nationale française avant que s’étendre à des nations ultramarines. Ils ont été des instruments de la mise en dépendance économique et de l’assimilation culturelle et linguistique des cultures de l’hexagone, avant que de servir les mêmes buts (avec des moyens plus brutaux encore) pour les autres continents. La colonisation intérieure a précédé et a rendu possible la colonisation extérieure.
L’assimilation comme outil idéologique de la construction nationale française
Frantz Fanon souligne pertinemment que le processus colonial est indissociable du racisme. Il suppose pour se déployer l’émergence et l’intériorisation de deux complexes : le complexe de supériorité pour les uns et le complexe d’infériorité pour les autres[vi]. Le rôle de l’appareil d’Etat en France a justement été de produire, de favoriser et d’étendre ces deux complexes par tous les moyens disponibles de l’inculcation idéologique à la violence ouverte.
Dans ce processus d’assujettissement la question de la culture en général et de la langue en particulier, revêt une importance particulière. Il s’agit pour justifier l’assujettissement économique d’une périphérie à un centre de hiérarchiser les cultures et les langues. Le penseur des Lumières Denis Diderot pose ainsi comme une évidence indiscutable : « Il est légitime dans un Etat unifié politiquement, de ne trouver qu’une seule langue, et de devoir considérer les autres formes linguistiques comme étant des patois qu’on abandonne à la populace des provinces[vii].» La confusion entre langue commune partagée et langue unique imposée révèle le processus d’assujettissement et de colonisation des périphéries. La langue étant indissociable de la culture qui lui a donné naissance, l’infériorisation linguistique est pour le mieux une infériorisation culturelle et pour le pire une destruction culturelle. Nous parlons de « mieux » et de « pire » en nous situant du point de vue des périphéries car pour le centre le « mieux » est la disparition totale de l’altérité c’est-à-dire l’assimilation.
Suzanne Citron a mis en évidence la logique de raisonnement conduisant à ce messianisme de destruction des altérités. Elle se base sur la réduction des protagonistes de la révolution française à une lutte binaire : bourgeoisie contre féodalité. Or une telle binarité est une simplification de la réalité sociale des habitants de l’hexagone. Elle élimine le troisième protagoniste : le monde paysan, ses peuples et ses langues :
« En amont culture aristocratique franque, monarchique, catholique, en aval culture bourgeoise et urbaine, culture de la Raison, culture des lumières ; le système de représentation qui la sous-tendait n’intégrait pas le monde rural, ses patois, ses solidarités villageoises[viii]. »
Qu’une telle attitude suppose un complexe de supériorité du centre est évident. Il s’agit ni plus ni moins que de poser le caractère universel de la langue française en l’argumentant d’une supériorité d’essence. Voici comment en parle Bertrand Barrère de Vieuzac, député aux Etats généraux puis à la convention nationale, pour en appeler à une guerre pour éradiquer les autres langues de l’hexagone :
« Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton ; l’émigration et la haine de la République parlent allemand, la contre-révolution parle italien et le fanatisme parle basque. Cassons ces instruments de dommages et d’erreurs […]. Il n’appartient qu’à la langue française qui depuis quatre ans se fait lire par tous les peuples […], il n’appartient qu’à elle de devenir la langue universelle. Mais cette ambition est celle du génie de la liberté[ix]. »
Cette logique de pensée déjà hégémonique au moment de la révolution bourgeoise (qui rappelons-le se déploie à la fois contre le féodalisme et contre les économies et cultures populaires), l’est encore plus ensuite, avec comme summum la troisième république qui est tout à la fois celle de la guerre à la diversité interne et celle de la colonisation externe. La construction nationale française se bâtit en conséquence par une négation des peuples de l’hexagone (occitan, basque, breton, etc.) par une confusion entre l’unité politique et l’unicité culturelle et par une guerre à l’altérité. Mais cette négation n’est pas sans fondements matériels : elle s’enracine dans le besoin d’imposer les rapports sociaux capitalistes à des contrées fonctionnant jusque-là selon une autre logique économique. C’est pourquoi libération nationale et lutte des classes sont indissociables.
Libération nationale et lutte des classes
Parler de lutte de libération nationale à propos des peuples de l’hexagone fait courir en France un danger : celui d’être accusé de réactionnaire, de partisan d’un retour à la féodalité. Nous considérons au contraire que ne pas le faire revient à laisser le champ libre à l’extrême-droite qui sait à merveille canaliser des révoltes légitimes pour les détourner de leurs cibles réelles. Il convient donc de préciser de quoi il s’agit, non pas dans l’abstraction pure, mais dans les conditions concrètes du capitalisme français d’aujourd’hui.
Aborder la lutte de libération nationale sans la relier à la lutte des classes est selon nous un non-sens. Elle est de fait un combat contre une classe sociale qui hiérarchise le territoire en centres et périphéries, qui ne peut que le faire, qui a besoin de le faire pour maintenir ses profits. C’est pourquoi limiter le combat à la question linguistique ne peut que produire de l’impuissance politique. A l’inverse se contenter de parler de lutte anticapitaliste sans l’ancrer dans les conséquences concrètes d’assujettissement économique et d’oppression culturelle, conduit à la même impasse. Une telle approche, encore majoritaire à gauche en France, aboutit, consciemment ou non, à un regard méprisant sur les formes de révolte qui émergent spontanément face à la domination.
Ne soyons pas naïfs pour autant. Nos luttes contemporaines se déploient dans un cadre précis, celui de la mondialisation capitaliste et d’une Europe qui en est un des principaux pôles. Cette Europe est parcourue de contradictions, les Etats les plus puissants voulant y occuper une place hégémonique (la France et l’Allemagne en particulier). C’est pour cette raison que nous assistons pour l’Europe du Sud à un retour de mécanismes coloniaux c’est-à-dire à une logique d’assujettissement de ces économies aux centres que sont la France et l’Allemagne. L’épisode grec que nous venons de vivre en est une expression significative. Dans ce contexte nouveau des aspirations justes peuvent être instrumentalisées, des luttes légitimes peuvent être canalisées vers des objectifs réactionnaires, des réactions à l’oppression peuvent être manipulées pour asseoir d’autres oppressions. C’est ainsi au nom de la défense des droits des « minorités » que sont légitimées plusieurs des guerres impérialistes contemporaines au Moyen-Orient et en Afrique.
En définitive la question qui est posée est celle du combat pour la fin de l’assujettissement colonial (et donc aussi du capitalisme qu’il sert) et de la conception de l’Etat qui l’accompagne. La solution n’est pas, selon nous, dans un retour au passé mais dans l’invention d’un avenir. Pour ce faire regarder ailleurs peut aider à développer un imaginaire de la libération. La Bolivie par exemple et son « Etat plurinational » peut nous aider à penser l’avenir.
[i] Voir nos articles : 1) Le discours des « valeurs de la république » : Un nouveau masque de l’idéologie dominante, 2) Les fondements historiques et idéologiques du racisme « respectable » de la « gauche » française, 3) La prise en otage des enseignants ou l’instrumentalisation de l’école publique, 4) Les premiers fruits amers de l’unité nationale : Guerres, peurs, humiliation, mises sous surveillance, 5) L’attentat contre Charlie Hebdo : l’occultation politique et idéologique des causes, des conséquences et des enjeux, etc., https://bouamamas.wordpress.com/
[ii]Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, Présence africaine, Paris, 2004 [rééd.], p. 9.
[iii]Rosa Luxemburg, l’accumulation du capital, tome 2, Maspero, Paris, 1976, pp. 43-91.
[iv]Karl Marx, Fondement de la critique de l’économie politique, Anthropos, Paris, 1968, tome 1, pp. 203-204.
[v]Aimé Césaire, op.cit.
[vi]Frantz Fanon, Racisme et Culture, in Pour la révolution africaine, La Découverte, Paris, 2001 [rééd.], pp. 37-53. Voir aussi Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Seuil
Publié le 24 juillet 2015 par bouamamas https://bouamamas.wordpress.com/
Le discours sur la République et les « valeurs de la république » ont connu un retour fulgurant sur le devant de la scène politique et médiatique à l’occasion des attentats de janvier 2015 et de leur instrumentalisation idéologique par Manuel Valls. Le roman national construit par la classe dominante, comme idéologie de justification et de légitimation de son pouvoir, s’est de nouveau déployé avec ses concepts lourds et ses oppositions binaires (universalisme contre particularisme, modernité contre réaction, lumières contre obscurantisme, assimilation contre communautarisme, etc.). Nous nous sommes expliqués à maintes reprises sur les enjeux de cette séquence historique qu’a été « je suis Charlie[i]». Nous voulons aujourd’hui faire le point sur ce qui rend possible une telle instrumentalisation : l’intériorisation massive dans une partie importante de la gauche du mythe de la « mission civilisatrice » comme outil d’émancipation des peuples de France à l’interne de l’hexagone, puis des peuples et nations d’Asie, d’Afrique et d’Amérique à l’externe. Les logiques, buts et processus qui ont présidé à la colonisation externe sont ainsi de même nature que ceux qui se sont déployés dans ce qu’il faut bien appeler une « colonisation interne ».
La colonisation comme processus de généralisation du rapport social capitaliste
Dans son historique « discours sur le colonialisme », Aimé Césaire analyse le capitalisme comme une « forme de civilisation qui, à un moment de son histoire, se constate obligée, de façon interne, d’étendre à l’échelle mondiale la concurrence de ses économies antagonistes[ii]». Cette concurrence et cette logique extensives sont consubstantielles au capitalisme. Elles se sont d’abord déployées dans les périphéries proches des centres d’émergence du nouveau mode de production capitaliste avant que de s’étendre à des périphéries plus lointaines.
Rosa Luxemburg souligne à juste titre que cette logique extensive suppose et nécessite la destruction des « économies naturelles », des « économies paysannes » et des cultures populaires dans lesquelles elles se sont historiquement élaborées[iii]. Marx a décrit précisément l’enjeu pour le nouveau mode de production capitaliste de cette lutte : « On avait eu une production dont seul le surplus était valeur d’échange, et qui était présupposée à la circulation ; on passe maintenant à une production qui ne fonctionne qu’en liaison avec la circulation et dont le contenu exclusif est la valeur d’échange[iv]». Ce n’est donc pas par « méchanceté » ou par « vice » que se déploient la logique extensive et la guerre contre les « économies » périphériques (d’abord de proximité puis plus éloignées). Elles sont tout simplement la conséquence logique du nouveau mode de production. Réduire l’extension coloniale du mode de production capitaliste à une lutte contre le féodalisme en occultant qu’elle est aussi une lutte contre des « économies naturelles » et des « économies paysannes » pour reprendre les expressions de Rosa Luxemburg, conduit à la cécité face à la résistance hier comme aujourd’hui, dans l’hexagone comme à l’échelle internationale, à l’arasement et à l’uniformisation capitaliste. L’Etat français centralisateur n’a pas été qu’un outil de guerre contre le féodalisme mais aussi une machine de destruction des économies antérieures et des cultures qui les portaient.
Parlant des périphéries extra-hexagonales colonisées, Aimé Césaire résume comme suit les caractéristiques qui en font des obstacles à détruire pour le capitalisme :
« C’étaient des sociétés communautaires, jamais de tous pour quelques-uns. C’étaient des sociétés pas seulement antécapitalistes, comme on l’a dit, mais aussi anticapitalistes. C’étaient des sociétés démocratiques, toujours. C’étaient des sociétés coopératives, des sociétés fraternelles[v]. »
Il y a bien sûr, idéalisation assumée de ces sociétés par Aimé Césaire car son écrit est une œuvre de lutte et de dénonciation, mais cela n’enlève rien aux principales caractéristiques de ces « économies naturelles et paysannes ». Rappeler ces faits ne veut pas dire que l’avenir est à construire par un retour vers ces formes du passé. L’histoire ne se réécrit pas en gommant certaines de ces phases mais en les dépassant vers un horizon d’émancipation.
La prise en compte de cette base matérielle de la colonisation est essentielle pour ne pas dériver vers une opposition idéaliste (et donc impuissante) à la colonisation. Cette dernière est dotée d’un mouvement historique l’amenant à prendre différents visages en fonction du rapport des forces. Les discours sur la nation, sur l’assimilation, sur l’intégration, sur l’universalisme abstrait, etc., ne sont que des accompagnements idéologiques d’un processus d’assujettissement total d’une périphérie à un centre au profit de ce dernier.
Ces discours ont d’abord été tenus dans le cadre de la construction nationale française avant que s’étendre à des nations ultramarines. Ils ont été des instruments de la mise en dépendance économique et de l’assimilation culturelle et linguistique des cultures de l’hexagone, avant que de servir les mêmes buts (avec des moyens plus brutaux encore) pour les autres continents. La colonisation intérieure a précédé et a rendu possible la colonisation extérieure.
L’assimilation comme outil idéologique de la construction nationale française
Frantz Fanon souligne pertinemment que le processus colonial est indissociable du racisme. Il suppose pour se déployer l’émergence et l’intériorisation de deux complexes : le complexe de supériorité pour les uns et le complexe d’infériorité pour les autres[vi]. Le rôle de l’appareil d’Etat en France a justement été de produire, de favoriser et d’étendre ces deux complexes par tous les moyens disponibles de l’inculcation idéologique à la violence ouverte.
Dans ce processus d’assujettissement la question de la culture en général et de la langue en particulier, revêt une importance particulière. Il s’agit pour justifier l’assujettissement économique d’une périphérie à un centre de hiérarchiser les cultures et les langues. Le penseur des Lumières Denis Diderot pose ainsi comme une évidence indiscutable : « Il est légitime dans un Etat unifié politiquement, de ne trouver qu’une seule langue, et de devoir considérer les autres formes linguistiques comme étant des patois qu’on abandonne à la populace des provinces[vii].» La confusion entre langue commune partagée et langue unique imposée révèle le processus d’assujettissement et de colonisation des périphéries. La langue étant indissociable de la culture qui lui a donné naissance, l’infériorisation linguistique est pour le mieux une infériorisation culturelle et pour le pire une destruction culturelle. Nous parlons de « mieux » et de « pire » en nous situant du point de vue des périphéries car pour le centre le « mieux » est la disparition totale de l’altérité c’est-à-dire l’assimilation.
Suzanne Citron a mis en évidence la logique de raisonnement conduisant à ce messianisme de destruction des altérités. Elle se base sur la réduction des protagonistes de la révolution française à une lutte binaire : bourgeoisie contre féodalité. Or une telle binarité est une simplification de la réalité sociale des habitants de l’hexagone. Elle élimine le troisième protagoniste : le monde paysan, ses peuples et ses langues :
« En amont culture aristocratique franque, monarchique, catholique, en aval culture bourgeoise et urbaine, culture de la Raison, culture des lumières ; le système de représentation qui la sous-tendait n’intégrait pas le monde rural, ses patois, ses solidarités villageoises[viii]. »
Qu’une telle attitude suppose un complexe de supériorité du centre est évident. Il s’agit ni plus ni moins que de poser le caractère universel de la langue française en l’argumentant d’une supériorité d’essence. Voici comment en parle Bertrand Barrère de Vieuzac, député aux Etats généraux puis à la convention nationale, pour en appeler à une guerre pour éradiquer les autres langues de l’hexagone :
« Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton ; l’émigration et la haine de la République parlent allemand, la contre-révolution parle italien et le fanatisme parle basque. Cassons ces instruments de dommages et d’erreurs […]. Il n’appartient qu’à la langue française qui depuis quatre ans se fait lire par tous les peuples […], il n’appartient qu’à elle de devenir la langue universelle. Mais cette ambition est celle du génie de la liberté[ix]. »
Cette logique de pensée déjà hégémonique au moment de la révolution bourgeoise (qui rappelons-le se déploie à la fois contre le féodalisme et contre les économies et cultures populaires), l’est encore plus ensuite, avec comme summum la troisième république qui est tout à la fois celle de la guerre à la diversité interne et celle de la colonisation externe. La construction nationale française se bâtit en conséquence par une négation des peuples de l’hexagone (occitan, basque, breton, etc.) par une confusion entre l’unité politique et l’unicité culturelle et par une guerre à l’altérité. Mais cette négation n’est pas sans fondements matériels : elle s’enracine dans le besoin d’imposer les rapports sociaux capitalistes à des contrées fonctionnant jusque-là selon une autre logique économique. C’est pourquoi libération nationale et lutte des classes sont indissociables.
Libération nationale et lutte des classes
Parler de lutte de libération nationale à propos des peuples de l’hexagone fait courir en France un danger : celui d’être accusé de réactionnaire, de partisan d’un retour à la féodalité. Nous considérons au contraire que ne pas le faire revient à laisser le champ libre à l’extrême-droite qui sait à merveille canaliser des révoltes légitimes pour les détourner de leurs cibles réelles. Il convient donc de préciser de quoi il s’agit, non pas dans l’abstraction pure, mais dans les conditions concrètes du capitalisme français d’aujourd’hui.
Aborder la lutte de libération nationale sans la relier à la lutte des classes est selon nous un non-sens. Elle est de fait un combat contre une classe sociale qui hiérarchise le territoire en centres et périphéries, qui ne peut que le faire, qui a besoin de le faire pour maintenir ses profits. C’est pourquoi limiter le combat à la question linguistique ne peut que produire de l’impuissance politique. A l’inverse se contenter de parler de lutte anticapitaliste sans l’ancrer dans les conséquences concrètes d’assujettissement économique et d’oppression culturelle, conduit à la même impasse. Une telle approche, encore majoritaire à gauche en France, aboutit, consciemment ou non, à un regard méprisant sur les formes de révolte qui émergent spontanément face à la domination.
Ne soyons pas naïfs pour autant. Nos luttes contemporaines se déploient dans un cadre précis, celui de la mondialisation capitaliste et d’une Europe qui en est un des principaux pôles. Cette Europe est parcourue de contradictions, les Etats les plus puissants voulant y occuper une place hégémonique (la France et l’Allemagne en particulier). C’est pour cette raison que nous assistons pour l’Europe du Sud à un retour de mécanismes coloniaux c’est-à-dire à une logique d’assujettissement de ces économies aux centres que sont la France et l’Allemagne. L’épisode grec que nous venons de vivre en est une expression significative. Dans ce contexte nouveau des aspirations justes peuvent être instrumentalisées, des luttes légitimes peuvent être canalisées vers des objectifs réactionnaires, des réactions à l’oppression peuvent être manipulées pour asseoir d’autres oppressions. C’est ainsi au nom de la défense des droits des « minorités » que sont légitimées plusieurs des guerres impérialistes contemporaines au Moyen-Orient et en Afrique.
En définitive la question qui est posée est celle du combat pour la fin de l’assujettissement colonial (et donc aussi du capitalisme qu’il sert) et de la conception de l’Etat qui l’accompagne. La solution n’est pas, selon nous, dans un retour au passé mais dans l’invention d’un avenir. Pour ce faire regarder ailleurs peut aider à développer un imaginaire de la libération. La Bolivie par exemple et son « Etat plurinational » peut nous aider à penser l’avenir.
[i] Voir nos articles : 1) Le discours des « valeurs de la république » : Un nouveau masque de l’idéologie dominante, 2) Les fondements historiques et idéologiques du racisme « respectable » de la « gauche » française, 3) La prise en otage des enseignants ou l’instrumentalisation de l’école publique, 4) Les premiers fruits amers de l’unité nationale : Guerres, peurs, humiliation, mises sous surveillance, 5) L’attentat contre Charlie Hebdo : l’occultation politique et idéologique des causes, des conséquences et des enjeux, etc., https://bouamamas.wordpress.com/
[ii]Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, Présence africaine, Paris, 2004 [rééd.], p. 9.
[iii]Rosa Luxemburg, l’accumulation du capital, tome 2, Maspero, Paris, 1976, pp. 43-91.
[iv]Karl Marx, Fondement de la critique de l’économie politique, Anthropos, Paris, 1968, tome 1, pp. 203-204.
[v]Aimé Césaire, op.cit.
[vi]Frantz Fanon, Racisme et Culture, in Pour la révolution africaine, La Découverte, Paris, 2001 [rééd.], pp. 37-53. Voir aussi Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Seuil
Toussaint- Messages : 2238
Date d'inscription : 09/07/2010
Re: Indigènes de la République
La construction étatique d’une hiérarchisation « des racismes »
Publié le 25 avril 2015 par bouamamas
Said Bouamama
L’annonce par le gouvernement d’un nouveau plan de « lutte contre le racisme » accompagné d’un budget de 100 millions d’euros sur trois ans a fait sourire bien des militantes et militants des luttes de l’immigration et des quartiers populaires. Le même premier ministre et le même gouvernement qui autorise la Rromophobie par sa thèse culturaliste sur « l’inintégrabilité des Rroms », prétend être antiraciste. Le même gouvernement qui dans son instrumentalisation du « Je suis Charlie » a autorisé allègrement l’islamophobie, voudrait nous faire croire qu’il est déterminé à lutter contre le racisme. Pourtant l’heure n’est pas au sourire.
Derrière ce nouveau plan se cache, selon nous, une offensive idéologique dangereuse visant à imposer par en haut une hiérarchisation « des racismes », à réduire le racisme à une dimension individuelle et apolitique, à imposer une criminalisation de l’antisionisme en l’amalgamant à l’antisémitisme.
Provocation
La nomination d’un nouveau « délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme » en charge de la mise en œuvre du nouveau plan, se réalise d’emblée sur le ton de la provocation. La première déclaration du nouveau DILCRA, Gilles Clavreul pose d’emblée une négation de l’islamophobie qui est amalgamée au « racisme anti-arabe » d’une part et une mise en exceptionnalité de « l’antisémitisme » d’autre part : « Tous les racismes sont condamnables, mais le racisme anti-Arabe et anti-Noir n’a pas les mêmes ressorts que l’antisémitisme dans sa violence. Il faut être capable de dire la particularité de l’antisémitisme. » (1)
La négation et/ou la sous-estimation et/ou l’euphémisation de l’islamophobie et la construction d’une « exceptionnalité » de l’antisémitisme constituent les deux segments articulés d’une offensive poursuivie de longue date mais qui est dotée aujourd’hui de nouveaux moyens. On retrouve cette logique dans l’expression consacrée de « lutte contre le racisme et l’antisémitisme » qui s’est banalisée à force d’être assénée par les appareils idéologiques d’Etat. Comme le souligne justement la brigade antinégrophobie : « l’appellation même de lutte contre le racisme et l’antisémitisme crée une hiérarchie symbolique. D’un côté l’antisémitisme, de l’autre un ensemble où tout est mélangé… C’est une profonde négation de la spécificité des racismes. Soit on gomme les différences pour tous, soit on les reconnaît pour tout un chacun. » (2)
La même logique est présente dans les propos de Valls lors de son discours du 13 janvier à l’Assemblée nationale : « les Français juifs ne devaient plus avoir peur d’être juifs » et « les Français musulmans ne devaient plus avoir honte d’être musulmans ». Aux uns la « peur » et aux autres « la honte ». Que ce soit de manière consciente ou non (le résultat est exactement le même), ces propos nient ou relativisent la « peur » des musulmans devant la montée sans précédents des actes et agressions islamophobes. Ils posent également une réalité inexistante, la soi-disant « honte d’être musulman ». Que le premier ministre se rassure, nous n’avons rencontré aucun musulman ayant honte de l’être. Il n’y a que ceux qui pratiquent des islamalgames qui peuvent penser à l’existence d’un sentiment de « honte ».
Si la thèse n’est pas nouvelle, l’arrogance dans son affirmation par l’Etat l’est. Elle révèle une volonté d’imposer par tous les moyens, de l’idéologique au répressif, une hiérarchisation « des racismes ».
Négation
Les propos du nouveau délégué interministériel portent également une négation de certains termes : islamophobie et négrophobie. Le choix des termes « racisme anti-Arabe » et « anti-Noir » n’est bien entendu pas neutre. Il constitue en premier lieu le refus d’utiliser les termes que les premiers concernés ont choisis pour désigner la réalité des discours et actes qu’ils subissent. Il suffit de lister le nom de quelques organisations militantes agissant sur cette question pour s’en convaincre : « Coordination contre le Racisme et l’Islamophobie (CRI), Brigade Anti-Négrophobie (BAN), Collectif contre l’Islamophobie en France (CCIF), etc. Nous aurions tort de ne considérer cette question que comme une question sémantique. En délégitimant le mot usité par ces militants c’est cette forme spécifique du racisme que l’on refuse de prendre en compte. Comme le souligne l’historien Nicolas Lebourg « la récusation de l’usage du terme […] revient à nier l’existence de cette nouvelle incrimination d’une « race de l’esprit », à ne pas admettre la nouvelle mutation de « l’altérophobie « . (3)
Les tentatives d’invalider le mot pour nier la réalité qu’il représente ne sont pas nouvelles. Alors que le terme remonte au début du vingtième siècle , une Caroline Fourest affirme faussement qu’il est issu des « mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de “mauvaises musulmanes” en les accusant d’être “islamophobes ” ». (4) Peu importe l’erreur et/ou le mensonge cette explication est diffusée largement dans les médias dominants et dans le discours politique. Cette diffusion contribue à la construction de la réalité sociale et politique dans le sens d’une opposition à la reconnaissance et donc à la prise en compte de l’islamophobie : « Cette erreur factuelle a pourtant été reprise abondamment, comme s’il s’agissait d’une vérité historique. Ainsi, un grand nombre d’acteurs présents dans les médias réfutent l’utilisation du terme, l’accusant d’être en réalité une injonction à interdire le blasphème. » (5)
Dans la même veine l’irremplaçable Pascal Brückner, qui considère également que le terme est forgé en Iran « à la fin de la décennie 70 », accuse le mot de « légitimer la réalité d’une offensive intégriste en Europe, d’attaquer la laïcité en l’assimilant à un nouveau fondamentalisme, et de faire taire les musulmans qui osent remettre le Coran en cause, qui en appellent à l’égalité entre les sexes, au droit à l’apostasie et aspirent à pratiquer paisiblement leur foi sans subir le diktat de doctrinaires ou de barbus ». (6) Une nouvelle fois les médias se font largement l’écho de cette affirmation sans fondement avec en conséquence le réflexe pavlovien consistant à déclencher la question « et le droit au blasphème ? » (Ou « et la laïcité ? » ou encore « et le droit des femmes ? »), dès qu’une personne ose prononcer le terme d’islamophobie. C’est cela la construction idéologique de la réalité et celle-ci est partie intégrante des luttes sociales.
La question n’est donc plus sémantique ou scientifique compte tenu de cette offensive visant à nier le réel en niant un terme qui le désigne. Elle est devenue politique par un double processus : de diabolisation du mot par les discours politiques et médiatiques dominant, de réappropriation du terme par les premiers concernés. Que des militants se réclamant du progressisme et de l’antiracisme continuent à récuser le terme souligne simplement qu’ils sont désormais irrigués par l’idéologie dominante. Marine le Pen a une nouvelle fois un boulevard devant elle : « Il n’y a pas d’islamophobie en France. Il n’y a pas d’actes antimusulmans – ou pas plus que les actes contre les femmes… ou les personnes de petite taille. Mais il y a une augmentation de l’antisémitisme. » (7)
Outre la banalisation scandaleuse des violences systémiques faites aux femmes, Marine le Pen dit ici explicitement, ce que d’autres avance de manière masquée c’est-à-dire la négation de l’islamophobie et la mise en exceptionnalité de l’antisémitisme
Réduction
La réalité étant têtue, il n’est pas possible de nier entièrement les violences faites aux musulmans. Il convient dès lors pour nier le réel de le nommer autrement c’est-à-dire de le réduire à un « racisme anti-Arabe » pour reprendre l’expression du délégué interministériel. Ce réductionnisme est une négation de l’historicité des différentes formes de racisme et en particulier le passage récent d’un marqueur ethnique à un marqueur religieux. Ce n’est pas la première fois que nous assistons à un transfert de marqueurs. Frantz Fanon a ainsi été un des premiers à alerter sur la mutation du racisme biologique en racisme culturaliste. (9)
Le réductionnisme au vieil antiracisme anti-Arabe conduit à l’invisibilisation des causes de la montée contemporaine de l’islamophobie :
1.la justification de guerres pour le pétrole et les matières premières par des arguments culturalistes : droit des femmes, lutte contre l’obscurantisme et/ou le terrorisme ;
2.les explications tout aussi culturalistes des problèmes politiques et sociaux de la société française en général et de ceux des populations issues de l’immigration en particulier : intégration insuffisante pour les uns et inintégrabilité pour les autres, « incompatibilité de l’Islam et de la république », etc. ;
3.l’autorisation étatique à l’islamophobie depuis la loi sur le foulard de 2004 et ensuite par les discours sur « la laïcité menacée », « le droit des femmes menacé », « la république menacée », « l’identité nationale menacée », etc.
4.Il mène également à masquer le processus de construction d’un « ennemi de l’intérieur ». Le vieux racisme anti-Arabe était, en effet, référé à la notion d’étrangers et/ou d’immigrés. Le nouveau racisme englobe désormais la réalité nouvelle que constitue l’existence de français depuis plusieurs générations ayant un marqueur réel ou supposé musulman. Le rêve intégrationniste (c’est-à-dire en fait assimilationniste) posant la disparition de l’altérité ayant échoué, la stigmatisation a besoin d’un nouveau marqueur. Ce marqueur recouvre en effet une partie importante de la population française susceptible de se révolter socialement en raison de leurs conditions d’existences marquées par l’inégalité et les discriminations. Il recouvre également une population caractérisée par une sensibilité exacerbée à la question palestinienne comme l’ont mise en évidence les manifestations massives de l’été 2014 dans lesquelles les jeunes issus de l’immigration étaient de loin majoritaires. Il recouvre enfin une population susceptible par son histoire et sa mémoire d’une prise de conscience plus rapide que d’autres du rôle impérialiste de la France dans le monde.
Le processus de construction d’un « ennemi de l’intérieur » n’est pas nouveau mais l’affirmation de son existence avérée s’est déployée depuis 2012 et a été consacrée par l’instrumentalisation de l’émotion suscitée par les attentats de janvier. Valls affirme ainsi l’existence de cette « cinquième colonne » devant le syndicat « Alliance Police Nationale » dès octobre 2012 :
« La menace terroriste est bien là, présente sur notre sol (…), en particulier dans nos quartiers populaires. Des dizaines d’individus sont, par leurs profils, susceptibles de passer à l’acte. Cet ennemi intérieur, nous devons le combattre. [ …] La menace terroriste est désormais le fait de Français nés sur notre sol (…) qui ont versé dans l’islamisme radical et qui ont suivi un processus qui mêle délinquance, criminalité, antisémitisme virulent et soif de violence » (10)
La mise en place de lois liberticides et la pression policière sur les quartiers populaires et leurs habitants sont les premières conséquences de cette production d’un « ennemi de l’intérieur ».
Injonction
Une offensive idéologique par la classe dominante se traduit toujours par tentative de restriction du champ des comportements et des opinions légitimes. L’offensive nationaliste avant la première guerre mondiale par exemple s’est traduite par une tentative d’interdire les opinions et comportements internationalistes refusant la guerre en préparation. L’offensive colonialiste de la conquête à la guerre d’Algérie s’est traduite pour sa part par une tentative de restriction des opinions et comportements anticoloniaux. Le degré de traduction de la tentative dans les faits est fonction du rapport de forces. Selon celui-ci, elle peut aller de la diabolisation par les appareils d’Etat à la répression et à la criminalisation. Elle commence donc toujours par l’imposition d’injonctions pour se transformer ensuite en délit d’opinion puis en répression ouverte. Il est donc essentiel de repérer les injonctions qui se font jour dans le discours politique et médiatique dominant.
La première injonction est celle de la dénonciation de l’antisémitisme à la moindre prise de parole sur le racisme. Alors qu’il est légitimement fréquent dans les médias ou le champ politique, de discourir sur l’antisémitisme, de débattre sur ses causes, de le dénoncer, de mener des campagnes de sensibilisations, etc., sans faire aucune référence aux autres formes du racisme en général et à l’islamophobie en particulier, l’inverse n’est pas vrai. Toutes les prises de parole concernant l’islamophobie sont mises en demeure d’ajouter l’expression « et l’antisémitisme ». Le refus d’ajouter ce bout de phrase est immédiatement suspecté d’antisémitisme caché. C’est ainsi que des manifestations contre l’islamophobie ou la Rromophobie se sont transformées en manifestation contre « l’islamophobie et l’antisémitisme », « la Rromophobie et l’antisémitisme », etc.
La seconde injonction est celle de se démarquer des fractions de la résistance palestinienne se définissant comme « musulmane » en général, du Hamas et du Djihad islamique en particulier. Ces organisations résistantes sont réduites à leur dimension religieuse afin de les exclure du soutien « légitime » et « acceptable ». La dimension centrale de lutte de libération nationale que portent avec d’autres ces organisations est entièrement niée par cette injonction. Le résultat est ici aussi une mise en suspicion. Le refus de condamner ces organisations suffit à être accusé « d’islamiste ». C’est de cette manière que le soutien massif à la résistance palestinienne des jeunes issus des quartiers populaires est réduit à une affirmation religieuse porteuse de dangerosité. La mise sous surveillance des « classes dangereuses » qui habitent les quartiers populaires apparaît dès lors comme nécessaire, incontournable et indiscutable.
Ces injonctions convergent pour produire progressivement un amalgame entre antisionisme et antisémitisme ayant comme débouché la criminalisation du soutien au peuple palestinien. « L’antisionisme est la forme contemporaine de l’antisémitisme » entend-on ainsi de plus en plus fréquemment dans des écrits à prétention savante, des propos de journalistes ou des déclarations d’hommes politiques. Les tentatives de déconstruire ces processus idéologiques sont immédiatement catalogués d’antisémites ou de révéler une croyance en une quelconque théorie du complot. Il n’y a pourtant pas besoin de croire en un « complot juif mondial » ou en un « attachement absolue » à l’Etat d’Israël pour comprendre ce « philosémitisme d’Etat » pour reprendre l’expression d’Houria Bouteldja (11). Il suffit pour cela de prendre en cause la base matérielle de ce soutien : les intérêts de l’impérialisme français dans la région et plus globalement de toutes les puissances impérialistes. Comme le colonialisme portugais ou comme l’Afrique du Sud hier, Israël est un outil de gestion des intérêts impérialistes dans la région.
S’opposer à l’offensive idéologique actuelle et à ses injonctions est en conséquence une nécessité essentielle.
Notes
1. Gillez Clavreul, la valse antiraciste, http://www.liberation.fr/societe/20…, consulté le 21 avril à 11 h 30.
2.http://rue89.nouvelobs.com/2012/10/…, consulté le 21 avril à 12 h 00.
3.Nicolas Lebourg, Taubira « guenon », montée du FN et islamophobie : qu’est-ce que le racisme exactement ?, http://leplus.nouvelobs.com/contrib…, consulté le 21 avril à 15h15.
4.Hajjat A. & Mohammed M., Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le problème musulman, Paris, La Découverte, 2013.
5.Fourest C. & Venner F., « Islamophobie ? », Pro Choix, n° 26 27, dossier « Islamophobes ? Ou laïques ! », Automne hiver 2003.
6.Houda Asal, Islamophobie : la fabrique d’un nouveau concept. État des lieux de la recherche, Sociologie, n° 2014/1, pp. 13-29.
7.Pascal Brückner, L’invention de l’islamophobie, Libération du 23 novembre 2010.
8.Marine le Pen, Financial Times, 5 mars 2015.
9.Frantz Fanon, Racisme et Culture, Pour la révolution africaine, La Découverte poche, 2001.
10.Terrorisme : Valls met en garde contre « l’ennemi intérieur », http://tempsreel.nouvelobs.com/soci…, consulté le 21 avril 2015 à 17 heures.
11.Houria Bouteldja, Racisme (s) et philosémitisme d’Etat ou comment politiser l’antiracisme en France ?,http://indigenes-republique.fr/raci…, consulté le 21 avril à 18 h.
Toussaint- Messages : 2238
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Re: Indigènes de la République
Qu'est-ce qu'un peuple ?
Le peuple et le tiers-peuple
Sadri Khiari
Vous n’avez rien à faire ce samedi ? Allez donc faire un tour à Saint-Denis – ligne 13 ou RER C – et interrogez les passants. Repérez un Français noir ou arabe et demandez-lui : « A quel peuple appartenez-vous ? » S’il vous répond « j’appartiens au peuple français », vous saurez que c’est un lèche-bottes. S’il vous répond sincèrement, il vous dira « J’appartiens au peuple noir – ou arabe ou berbère, malien, marocain, musulman, sénégalais, algérien, africain… » Repérez par la suite un Français dit de souche et posez-lui la même question. Il ne vous dira pas : « J’appartiens au peuple blanc ou européen ou chrétien » ; il vous répondra : « Je fais partie du peuple français. » Ces distinctions pourraient être sans grandes incidences s’il s’agissait simplement pour les uns et les autres de définir l’une des identifications qui leur sont chères, comme par exemple deux Français dont l’un serait fier d’être originaire de Dunkerque et l’autre de Marseille. Mais se revendiquer d’un peuple, c’est bien plus que cela. C’est établir le groupe auquel on appartient dans la société et affirmer son rapport privilégié à l’État ou, pour être plus précis, à l’État-nation. Que deux fractions importantes de la même population française, l’une largement majoritaire – reconnue par l’État et se reconnaissant en lui – et l’autre minoritaire – non reconnue par l’État et ne se reconnaissant pas en lui -, aient des réponses opposées, cela pose un problème stratégique majeur à l’une comme à l’autre.
Contre qui se constitue le peuple ?
À la question « qu’est-ce que le peuple ? », il faut naturellement répondre par une autre question : contre qui se constitue le peuple ? Le plus souvent on se demande quelles sont les caractéristiques immanentes au peuple, les éléments « matériels », les récits ou les mythes qui fondent chez les individus la conscience d’appartenir à un même peuple. On procède comme on le fait également – et à tort – pour la nation. Or, ces éléments réputés constituer le peuple ne se rassemblent, ne se coagulent et ne se pensent comme un tout articulé, cohérent, insécable, tous ces éléments ne se métamorphosent en puissance potentielle de mobilisation collective, ne font sens politiquement qu’à partir du moment où se dessine un extérieur au peuple, potentiellement hostile au peuple. Autrement dit, si les éléments qui constituent en quelque sorte l’infrastructure du peuple ne sont ni contingents ni arbitraires, ils ne suffisent pas en eux-mêmes à constituer le peuple. Ces éléments constituent seulement la condition de possibilité de l’émergence de l’entité peuple. Pour que celle-ci se cristallise effectivement, il faut qu’existe cet extérieur hostile, qu’il s’agisse de l’aristocratie féodale, du peuple d’à-côté, du peuple qui opprime ou d’une fraction du peuple considérée comme nocive. Le peuple, ce sont des rapports de forces, c’est une histoire, c’est une histoire de rapports de forces. C’est l’histoire à travers laquelle la notion de peuple s’est imposée à l’échelle universelle. C’est l’histoire de la modernité coloniale et capitaliste. Dire cela, c’est affirmer deux choses : d’une part, que la notion de peuple permet d’exprimer une forme politique qui a colonisé l’ensemble des relations sociales à l’échelle planétaire ; d’autre part, qu’elle a une multitude de significations qui reflètent les contextes particuliers dans lesquels elle est mobilisée.
L’univers de sens dans lequel la notion de peuple se déploie et prend des significations particulières est généralement construit sur l’articulation, jamais identique, entre trois autres notions : la nation, la citoyenneté/souveraineté (Il me semble que l’on peut affirmer que dans la démocratie américaine, la citoyenneté est surtout individualisée alors que dans la république française, elle est plus collective, identifiée à la souveraineté populaire.)], les classes que nous dirons subalternes. Ce que l’on peut retenir de la pluralité des formes d’articulation entre ces notions, c’est leur plasticité, leur perméabilité les unes par rapport aux autres, leur capacité à se métamorphoser l’une en l’autre voire à se confondre. Chaque terme de ce triptyque peut être absorbé par un autre ou disparaître complètement. Je donnerai comme illustration extrême la situation de mouvements de libération nationale ou des guerres dites nationales, au cours desquels la citoyenneté se confond complètement avec la souveraineté populaire, laquelle se noie à son tour dans la souveraineté nationale. Dans ce cas, l’« union nationale » interclassiste assimile, au moins dans la représentation qu’elle se fait d’elle-même, toutes les composantes de la population dans un peuple-nation indissociable. A contrario, l’aiguisement de la lutte des classes ou une situation révolutionnaire tendent à assimiler le peuple aux couches subalternes. Dans cette situation, la souveraineté nationale se dissout tendanciellement dans la souveraineté populaire. On peut citer également l’exemple des mouvements de libération qui recouvrent peu ou prou des formes de luttes de classes. Le peuple-nation s’identifie alors avec les catégories subalternes de la population, tandis que les classes dominantes sont assimilées à l’étranger, extériorisées par rapport au peuple-nation. Pour compléter cette description, on peut évoquer les cas où le peuple, tout en se donnant les mêmes fondements que la nation, s’auto-définit comme « moins » que la nation, généralement en ce que, tout en étant attaché à certains pouvoirs autonomes, notamment sur le plan culturel, il n’aspire pas (ou renonce) à se doter d’un État qui lui soit propre (on peut évoquer, à ce propos, les nombreux « peuples minoritaires » dans les États européens).
La notion de peuple peut donc être liée à des positions particulières dans l’ordre socio-économique. Mais celles-ci ne suffisent guère à donner sens à la notion de peuple, au coeur de laquelle il y a la répartition des pouvoirs politiques et des honneurs, c’est-à-dire des distinctions statutaires dans l’ordre moderne de l’État. Il apparaît ainsi que la notion de peuple est d’abord une notion politique. Elle a donc nécessairement une dimension stratégique. Le pouvoir est toujours à conquérir ou à conserver contre un ennemi ou un concurrent, réel ou supposé, du peuple.
Le peuple avec et contre la race
Cette manière d’approcher le peuple reste cependant bien incomplète si l’on omet d’ajouter au triptyque déjà évoqué un quatrième terme sans lequel la compréhension des rapports de pouvoir en France serait boiteuse. Je veux parler de la race. J’affirme en effet que la notion de peuple, dans son acception moderne, s’est construite en lien étroit avec la production sociale des races par la colonisation. Dans l’histoire de la modernité, certains peuples se sont d’ailleurs affirmés explicitement comme raciaux, et ce jusqu’à très récemment (dans l’Amérique ségrégationniste, dans l’Allemagne hitlérienne, en Afrique du sud, etc.). La dimension raciale de la notion de peuple a cependant été généralement masquée par l’universalisme et l’égalitarisme bourgeois dominant. Dans la notion humaniste, abstraite, du peuple, il n’est en effet pas question de races : l’humanité est Une, distribuée en peuples-nations et non en races.
Pour éviter les accusations irréfléchies, je préfère cependant préciser ce que j’entends par « race » ou plus exactement par « races sociales », puisque la race n’est autre que la relation de domination et de résistance à l’oppression qui existe entre groupes humains racialisés. Parfois, pour mieux comprendre les choses, il suffit de changer les mots. Je propose ainsi de substituer systématiquement au mot « discriminations » son contraire, « privilèges ». Depuis quelques années, il est généralement admis qu’en France, il existe des discriminations liées à la couleur de peau, à l’origine ou à la culture. La loi parle de les combattre, de multiples institutions publiques et privées tentent de les évaluer, d’en comprendre les logiques directes et indirectes, de concevoir des mécanismes antidotes. On reconnaît également qu’elles concernent à peu près tous les domaines de la vie sociale : les relations économiques, aussi bien dans le secteur privé que dans la sphère publique, les configurations urbaines, la justice, l’enseignement, l’accès au logement, à la culture, aux loisirs, la représentation dans les différents moyens de communication, la participation politique, la présence dans les institutions, etc. On convient de même qu’en sont particulièrement victimes les populations issues de l’immigration des dernières décennies, originaires du Maghreb et de l’Afrique noire, et celles qui sont originaires des « Territoires d’Outre-mer ». On consent enfin à dire qu’elles sont massives et qu’elles se prolongent de génération en génération. Prenons maintenant un tableau ou un quelconque diagramme conçu pour établir ces discriminations et renversons-le sur lui-même. Nous avions par exemple les données suivantes : « Entre 25 et 50 ans, pour l’ensemble des Français, le chômage est de 20 %. Il est de 30 % pour les citoyens français, nés de parents maghrébins, africains et ultramarins » (les chiffres utilisés ici sont totalement arbitraires et la situation décrite est très simplifiée. Mais c’est juste pour illustrer mon propos). Renversons donc le tableau. Nous avons désormais ceci : « Entre 25 et 50 ans, pour l’ensemble des Français, le chômage est de 20 %. Il est de 10 % pour les citoyens français, nés de parents français dits de souche, blancs, européens, chrétiens. » Ce tableau ne serait plus un tableau concernant les discriminations mais un tableau sur les privilèges. Si l’on procède de la même manière dans les autres domaines de la vie sociale, nous aurons une image claire de ce qu’est une société raciale : une société caractérisée par des privilèges accordés à une catégorie de la population définie par un statut reconnu officiellement ou non : être blanc, chrétien, européen. Et j’ajouterais que, ce privilège concernant également l’accès au pouvoir d’État, celui-ci joue le rôle de verrou qui permet la perpétuation du système racial. Par races sociales, il faut donc entendre l’existence d’une hiérarchie conflictuelle des pouvoirs entre groupes sociaux que distingue un statut, dit ou non dit, qui ordonne les êtres humains selon des critères de couleurs ou de cultures, construits dans le mouvement de colonisation européenne du monde et qui se perpétue aujourd’hui dans les formes impériales contemporaines.
En France, sans doute parce que l’idéologie nationale y est construite autour de la mission universaliste – et civilisatrice – du peuple français, l’occultation des hiérarchies raciales est particulièrement manifeste. A l’époque de l’Empire, les lois de la République établissaient une distinction statutaire entre les « vrais » français, dotés de la citoyenneté, et les sujets « indigènes » des colonies mais l’État colonial, lui-même, préférait dissimuler la densité raciale de la notion de peuple français. En dehors de groupuscules d’extrême-droite, le même déni demeure, aussi bien à droite qu’au sein l’écrasante majorité de la gauche. Si j’écris « le peuple français est le peuple français blanc », je me verrai, en effet, accusé d’utiliser le même langage que les identitaires suprématistes blancs. Je ne peux pourtant pas faire autre chose que de l’écrire : le peuple français est le peuple français blanc ! Et j’ajouterai, pour être plus précis : européen et chrétien d’origine. Les autres, ceux qui n’ont pas eu la chance de naître blancs, européens et chrétiens, font et ne font pas partie du peuple : ils sont le tiers-peuple. Ce n’est pas dire ce que dirait un militant néo-nazi, mais dire ce que pensent plus ou moins clairement tous les Français. C’est dire, surtout, la réalité des rapports de pouvoir et des rapports aux institutions de pouvoir de la majorité blanche, européenne et chrétienne face à la minorité issue de l’immigration non-européenne.
Encore un mot. Le « pacte républicain » qui concentre l’idéologie et les institutions constitutives du peuple français, charpenté autour de la citoyenneté démocratique, d’un certain compromis social redistributif et de la prééminence nationale, s’est érigé au croisement de nombreux enjeux : les conflits sociaux et politiques internes à la France, la compétition avec les autres États impériaux et l’expansion coloniale. Le peuple français, l’État français, la nation française en sont les produits, c’est-à-dire qu’ils sont modelés par les rapports de pouvoir nés de la colonisation. Or, aujourd’hui, différents facteurs mettent à mal cet échafaudage : la mondialisation libérale et financière, l’institutionnalisation de l’Union européenne, la perte d’influence de l’impérialisme français et la présence croissante d’une population non-blanche, originaire des colonies. Depuis quelques années, l’une des raisons, et non des moindres, des politiques racialistes de l’État, qu’il soit dirigé par la droite ou par le PS, est de raffermir la dimension raciale du pacte républicain pour compenser les effets délétères de ces facteurs qui le minent et sur lesquels il n’a que très peu de prise. Au nom de l’incompatibilité des « valeurs » de la République et/ou de l’« identité nationale », avec les « cultures » et les croyances des Français issus de l’immigration coloniale, au nom de la « nécessité » de contrôler ou d’interrompre les flux migratoires, de préserver l’emploi « français », de lutter contre le terrorisme ou l’insécurité, la notion de peuple s’est resserrée autour des prétendus « Français de souche », blancs, européens, chrétiens. Autrement dit, cette politique ambitionne de reconstruire la notion bien mal en point de peuple français là où c’est le plus facile : contre les non-blancs. Si certains courants plus nationalistes mettent particulièrement l’accent sur la « souche », d’autres, plus libéraux ou plus mondialistes, privilégient, toujours contre les non-blancs, la référence à une « identité » blanche européenne, fondement de ce qui serait un peuple européen([J’ai tenté d’étayer cette hypothèse dans « La Contre révolution coloniale en France. De de Gaulle à Sarkozy », éd. La fabrique, Paris, 2009.)]. Face à la crise du pacte républicain, mais aussi face à l’offensive racialiste des forces politiquement majoritaires, la gauche radicale peine, quant à elle, à trouver son chemin.
L’inflexion nationale de la gauche radicale
À l’exception peut-être des écologistes et de certaines sensibilités de l’extrême gauche, un certain discours « souverainiste » s’exprime désormais dans tous les partis. Au sein des principales forces présentes sur l’échiquier électoral (UMP et alliés, PS et alliés, FN), cette rhétorique s’accorde paradoxalement avec la défense des principaux mécanismes de la mondialisation libérale. Elle ne se résume cependant pas à son caractère démagogique électoraliste ; elle a également une fonction plus profonde, en l’occurrence raciale, dépourvue d’ambiguïté dans son approche des banlieues et de l’immigration.
La majorité des forces organisées de la gauche radicale n’échappe pas, elle-même, au renouveau du paradigme nationaliste, articulé autour des notions de peuple et de souveraineté populaire. L’expression la plus manifeste de cette inclination est sans aucun doute le regroupement de la « gauche de la gauche » autour du Front de gauche et de Jean-Luc Mélenchon, dissident du Parti socialiste et allié au Parti communiste français, qui développe un discours antilibéral et nationaliste autour du thème de la « souveraineté populaire ». Aux dernières élections présidentielles, Jean-Luc Mélenchon, a obtenu 11 % des voix grâce à une campagne qu’on pourrait résumer en deux formules : « Vive le peuple français » et « Le peuple veut le pouvoir ». Lors de sa campagne électorale, il a mis ainsi l’accent sur la souveraineté dont le peuple français était dépossédé par les logiques libérales de la mondialisation, les institutions financières internationales et la Banque centrale européenne. S’il a évité soigneusement de substituer à la notion de souveraineté populaire celle de souveraineté nationale, il s’est attaché cependant à mettre en avant les principaux symboles du nationalisme français (drapeau tricolore, Marseillaise, mythe de la France comme nation des droits de l’homme et de l’universel…), se référant en outre constamment à la notion de « patrie ». Plus encore, il a marqué sa volonté de réaffirmer l’indépendance nationale de la France qui, pour lui, se confond largement avec la restauration de son rôle de puissance à l’échelle internationale, avec la force expansionniste de son économie, l’exploitation de l’immensité de son espace maritime et de sa présence (coloniale !) aux quatre coins du monde, les outils de son influence culturelle comme les institutions de la francophonie, sa puissance militaire, et son réseau d’alliances dont le renouvellement en direction des « puissances émergentes » devrait permettre de battre en brèche sa subordination actuelle aux États-Unis(Voir notamment J.-L. Mélenchon, « Une défense souveraine et altermondialiste », Revue Défense Nationale, no 749, avril 2012.). Jean-Luc Mélenchon a certes repris à son compte certaines revendications sociales qui soulignent son engagement à gauche ; il s’est opposé à l’anarchie libérale et à une mondialisation financière incontrôlable aux effets désastreux sur les classes populaires ; il a dénoncé également l’expansionnisme et l’arrogance des États-Unis. Son projet s’inscrit cependant dans la perspective nationale-impérialiste de constituer un nouveau pôle international au sein duquel la France jouerait le premier rôle. Elle pourrait alors retrouver sa splendeur perdue.
C’est dire le caractère équivoque de la notion de peuple telle qu’elle figure dans le discours de la gauche mélenchoniste. La citoyenneté et la souveraineté populaire s’y articulent fortement avec la souveraineté nationale, elle-même condition et finalité d’une politique de puissance. Le peuple n’apparaît donc pas comme synonyme de classes subalternes mais comme la forme à travers laquelle les classes subalternes sont solidarisées de la République impériale, à travers la réhabilitation du vieux pacte républicain – tel qu’il est idéalisé en tout cas, c’est-à-dire associant élargissement des droits démocratiques, mécanismes de redistribution sociale et nationalisme. La politique de Mélenchon envers les populations issues de l’immigration et des quartiers populaires trouve là sa cohérence. Alors que les formations politiques acquises au néolibéralisme, incapables de préserver les dispositifs sociaux, tentent de renforcer la dimension raciale de l’ancien pacte républicain, la stratégie de Mélenchon s’inscrit dans la logique inverse consistant à privilégier ses dimensions citoyennes, redistributrices et nationales plutôt que ses logiques raciales. Ainsi, même s’il ne se départit pas d’une certaine prudence, pour ménager sans doute son électorat blanc, il se permet de défendre les droits démocratiques et sociaux de l’immigration et des habitants des quartiers populaires, et en cela il se distingue de la droite et du Parti socialiste. Dans le même temps, il n’est pas question pour lui de tolérer la moindre remise en cause de la « République Une et indivisible » et de ses « principes », fondements incontournables, selon lui, de la souveraineté du peuple et de la matrice nationale française.
Aux Français noirs, arabes et musulmans, Mélenchon ne peut donc proposer que l’assimilation au sein du « peuple Un et indivisible », des institutions qui le constituent, de sa culture dominante, de son histoire « nationale » et de ses normes. Ainsi, pour ne citer que cet exemple, il n’hésite pas nier toute pertinence à la notion d’islamophobie et à relayer la campagne en défense de la laïcité, c’est-à-dire un instrument de relégation des populations musulmanes et de stigmatisation d’une religion, jugée envahissante et menaçante vis-à-vis de la norme française, blanche, chrétienne et européenne. Or, une telle démarche assimilationniste, qu’elle s’exerce à l’encontre des musulmans ou des autres groupes issus de l’immigration coloniale, signifie concrètement leur exclusion hors du peuple. Autrement dit, bien qu’elle ait pour ambition de représenter l’ensemble des populations défavorisées en France, la notion de peuple dans l’acception dominante au sein du Front de gauche contribue de fait à préserver le statut de non-citoyen des Noirs, des Arabes et des musulmans, c’est-à-dire la relégation hors du champ politique d’une large frange des classes sociales les plus défavorisées. Un exemple éloquent : les commentaires acerbes du leader du Front de gauche à propos d’une récente révolte dans la banlieue d’Amiens où sont particulièrement présentes les populations issues de l’immigration. Le motif de la révolte, déclenchée par un banal contrôle routier, était le harcèlement policier dont sont en permanence victimes les habitants des quartiers populaires, plus particulièrement s’ils ne sont pas blancs. Comme souvent dans ce genre de circonstances, une école et des voitures ont été incendiées tandis que seize policiers ont été blessés à l’issu de violents affrontements. Sans trouver la moindre justification à la colère des émeutiers, Jean-Luc Mélenchon les a tout bonnement qualifiés de « crétins », de « bouffons » et de « larbins du capitalisme ». Lors d’un débat qui a eu lieu aux « Estivales citoyennes 2012 du Front de gauche », Félix Boggio Éwanjé-Épée et Stella Magliani-Belkacem ont mis le doigt sur le problème : « Qu’est-ce qu’il y a derrière les termes extrêmement violents et disqualifiants de Jean- Luc Mélenchon ? Ce qu’il y a derrière ces insultes, c’est l’idée que ces jeunes ne sont pas du “peuple” que son projet rassemble, que cette révolte n’est pas légitime. C’est déjà s’inscrire en faux par rapport aux exigences portées par ces révoltes (Félix Boggio Éwanjé-Épée et Stella Magliani-Belkacem, « Les luttes de l’immigration postcoloniale dans la ‘révolution citoyenne’ ». Les déclarations de Jean-Luc Mélenchon ont également suscité l’excellente réaction de quelques militants du Front de gauche, membre d’un des courants issus du Nouveau parti anticapitaliste : Cédric Durand, Razmig Keucheyan, Julien Rivoire, Flavia Verri, « Jean-Luc Mélenchon, vous avez tort sur les émeutes d’Amiens-Nord ».
Du point de vue d’une politique de gauche attachée à rassembler « ceux-d’en-bas », la référence à un peuple homogène ou potentiellement homogène est de toute évidence une impasse. Alors que pour les populations issues de l’immigration, l’assimilation nationale au sein d’un même « peuple français » n’est pas à l’ordre du jour, la prégnance de l’idée nationale, racialement connotée, demeure extrêmement forte au sein des classes subalternes « de souche ». Refuser d’en tenir compte, comme le font les militants de gauche qui considèrent que tout se résout dans la question socio-économique et que les méchantes idéologies – « communautaristes » et nationales-racistes – s’évaporeront dans la dynamique des luttes sociales, n’est guère sérieux. Cette démarche butte sur les raisons qui incitent tant de travailleurs et de chômeurs à voter contre leurs « intérêts objectifs », ces raisons qui ont tant à voir avec les notions de respect, d’honneur, de dignité, de reconnaissance sociale.
Comment être français sans l’être ?
Du point de vue des « colonisés de l’intérieur », la difficulté stratégique n’est pas moins aiguë. Elle se posait déjà dans l’Amérique ségrégationniste. Aux leaders noirs intégrationnistes, Malcolm X rétorquait : « Mais mon vieux, comment pouvez-vous vous prendre pour un Américain, alors que jamais vous n’avez été traité en Américain dans ce pays ? (…) Supposons que dix hommes soient à table, en train de dîner, et que j’entre et aille m’asseoir à leur table. Ils mangent ; mais devant moi il y a une assiette vide. Le fait que nous soyons tous assis à la même table suffit-il à faire de nous tous des dîneurs ? Je ne dîne pas tant qu’on ne me laisse pas prendre ma part du repas. Il ne suffit pas d’être assis à la même table que les dîneurs pour dîner ([Malcolm X, Le Pouvoir noir, éd. La Découverte, p. 208)]. » C’est exactement ce qu’exprimaient à leur manière, les révoltés de novembre 2005 en déchirant ostensiblement devant les caméras de télévision leurs cartes d’identité françaises. Cette métaphore, Malcolm a eu de nombreuses occasions de la répéter. On la retrouve dans les discours qu’il prononçait comme porte-parole de la Nation of Islam, quand il défendait une perspective séparatiste, mais il continuera à l’employer par la suite bien qu’il ait renoncé au séparatisme. Dès lors, non sans ambiguïtés, il utilisera la notion d’Afro-américains pour désigner les Noirs états-uniens, non pour signifier que désormais Noirs et Blancs feraient partie d’un même peuple, d’une même nation, mais au contraire pour marquer la différence et affirmer la nécessité que les Noirs disposent pour eux-mêmes de formes d’autorités autonomes tout en participant, avec les Blancs, d’une même souveraineté populaire. Malcolm est mort sans avoir résolu les questions que soulevait une telle démarche ([Ces questions sont abordées dans mon dernier essai:S. Khiari, Malcolm X, stratège de la dignité noire, Amsterdam, Paris, fév.2013.)] .
Les mêmes interrogations se posent en France. Quand on est une minorité raciale, comment concevoir une politique pour soi dans un espace institutionnel commun à toute la population (Voir S. Khiari, « Nous avons besoin d’une stratégie décoloniale », in Races et capitalisme, coordonné par Félix Boggio Éwanjé-Épée et Stella Magliani-Belkacem, éd. Syllepse, Paris, 2012.) ? Cette question stratégique est d’autant plus compliquée qu’elle se pose différemment si l’on se place du point de vue des Blancs majoritaires ou du point de vue des néo-indigènes. Elle ne pourra trouver une réponse commune à toute la population française que comme aboutissement d’un processus décolonial qui impliquera, pour une longue période transitoire, un compromis dynamique et conflictuel entre le peuple et les peuples de France, fondé sur une recomposition de la communauté politique prenant en compte et institutionnalisant les multiples références nationales, culturelles ou identitaires. Une politique alternative de gauche ne saurait se contenter d’une politique de l’immigration non répressive ni de prendre des mesures contre les discriminations raciales. Tout cela est bien sûr impératif comme est nécessaire la rupture avec l’engagement de l’État français dans les politiques impériales. Mais, si elle veut être efficace, la gauche devra également admettre qu’elle ne fera pas l’économie d’une autre politique de « l’identité nationale ». J’utilise à dessein ce terme qui a été instrumentalisé par la droite sarkozyste pour justifier sa politique raciste. Car en vérité, la réponse qu’il lui a été faite était bien insuffisante. Il ne suffisait pas, en effet, d’en dévoiler les finalités ni d’en dénoncer les mystifications. Il fallait au contraire s’en saisir pour réinterroger d’un point de vue décolonial la question nationale([J’ai entamé une réflexion sur la question dans Pour une politique de la racaille, éd. Textuel, Paris, 2006.)], introduire le pluriel de la notion de peuple, associer, au sein d’une définition renouvelée de la souveraineté populaire, la redistribution des pouvoirs économiques et sociaux à la redistribution des pouvoirs culturels et symboliques. Affirmer qu’en France toutes les cultures ont aujourd’hui le droit de s’épanouir ne fait guère de sens si, à l’instar de la « culture française » dominante, ces autres cultures ne « pénètrent » pas l’État, si n’émergent pas également des formes légales d’« autodétermination » assurant aux minorités l’autorité nécessaire pour développer leurs cultures et leurs visions du monde. Le principe de droits culturels collectifs, partiellement reconnu aujourd’hui pour les minorités régionales, pourrait l’être aussi pour les minorités sans territoire. Prétendre, par ailleurs, qu’en France toutes les confessions ont les mêmes droits est une supercherie qu’il est urgent pour la gauche de dénoncer ; non pas pour « radicaliser » la laïcité mais pour considérer enfin les croyances religieuses comme des besoins sociaux légitimes.
Une autre grande question est assurément celle de « l’histoire de France » et de sa fonction nationalisante et racialisante. Il ne s’agit pas de laisser à l’histoire des minorités une petite place dans les manuels scolaires, ni de « réconcilier les mémoires » (comment réconcilier la mémoire des colons et celle des colonisés ?), ni, non plus, d’abandonner l’histoire aux historiens, c’est-à-dire de l’extraire de la politique. Mais de rendre aux histoires multiples des populations françaises toute leur place dans l’État et dans la société.
Ce ne sont là que quelques pistes qui demandent à être creusées, élargies, précisées, de manière à concevoir, dans le domaine de l’« identité », ce qui pourrait être dit en termes de compromis dynamique, susceptible d’ouvrir l’horizon de la décolonisation. Pour la gauche, la question n’est pas de se rénover ni d’être plus radicale dans une matrice finalement inchangée, mais d’engager en son propre sein une véritable révolution culturelle. Je ne doute pas de la générosité de certaines de ses composantes, mais en politique la générosité n’est jamais très loin du paternalisme et ce dernier de la domination. Il lui faudra donc rompre avec l’illusion de sa propre universalité comme il lui faudra apprendre qu’elle n’est pas l’expression d’un même peuple des opprimés mais une expression, parmi d’autres, d’un privilège blanc qu’elle doit apprendre à combattre si elle aspire à rendre concevable une alliance politique entre les classes populaires blanches et les classes populaires issues de l’immigration, autour d’un projet susceptible d’asseoir la souveraineté effective d’un peuple à la fois un et multiple.
Sadri Khiari
Ce texte, reproduit ici avec l’aimable autorisation des Éditions La Fabrique est extrait du livre, Qu’est-ce qu’un peuple, Alain Badiou & Judith Butler & Georges Didi-Huberman & Sadri Khiari & Pierre Bourdieu & Jacques Rancière, Paris, 2013.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Peine perdue de vouloir argumenter contre les réactionnaires du PIR, ramassis d'intellos petit-bourgeois qui n'ont jamais foutu les pieds dans une usine. Le problème est plutôt que des travailleurs (ou peut être bien des bureaucrates) d'extrême gauche soient complices avec eux (et pire encore avec les pro-frères de l'UOIF - à l'occasion je traduirai l'email d'un camarade égyptien que j'avais informé de la situation)
Et le grand jeu de l'été :
#QuiADitQuoi : Indigènes ou Soraliens?
Les classes, ça existe !
Houria Bouteldja est la porte-parole du Parti des Indigènes de la République.
Chère, très chère Houria,
Je vous écoute de temps à autres, comme ce 9 février dernier sur Beur FM. Vous ne me connaissez pas mais moi un peu, puisque je vous lis ici et là. Du moins, je commence à connaître vos positions sur un certain nombre de sujets. Quand vous expliquez la difficulté pour certains d’entre nous à vivre dans ce pays, bien sûr que je partage votre constat. Quand vous parlez d’un racisme propagé par la République dénaturée que vous et moi nous connaissons, j’appuie. Quand vous parlez de la nécessité du combat pour des droits égaux, je dis oui, oui et encore oui. Mais parfois, j’ai l’impression que vous et vos amis vous trompez d’analyse. Et sur des choses importantes.
On a substitué à la notion de classe celle de la race (et on en est fiers)
Lorsque vous prenez la parole ce 9 février sur Beur FM, c’est pour le claironner haut et fort :
«[nous avons créé les Indigènes de la République car] il fallait rompre avec les idéologies politiques, par exemple de la gauche et de l’extrême gauche, qui ne sont pas efficaces quand il s’agit de traiter la question des populations issues de l’immigration postcoloniale ».
Soit, même si je sais où vous voulez en venir, j’écoute. On a le droit, après tout, de revenir sur ce que la gauche et l’extrême gauche croyaient acquis, c’est même plutôt sain de se remettre en question régulièrement pour ne pas raisonner qu’en termes passéistes. De plus, il faudrait être complètement borné ou complètement aveugle pour ne pas voir les échecs répétés des organisations de gauche à œuvrer pour les classes populaires, et ce depuis trois décennies. Ceci dit, vous et votre parti célébrez cette année vos dix ans d’existence : et jusqu’à preuve du contraire, je ne vois pas non plus de succès probant de votre côté.
Là où je commence toutefois à me questionner, c’est quand vous vous sentez obligée de préciser l’origine des personnes que vous pensez défendre. Comme dit ci-dessus, les échecs de la gauche et de l’extrême gauche sont nombreux, oui, mais pas simplement à l’égard des personnes «issues de l’immigration postcoloniale». Je pense ici aux millions d’ouvriers, chômeurs et précaires que vous qualifieriez aisément de « blancs », qui, eux aussi, ont été abandonnées par cette gauche et cette extrême gauche là depuis belle lurette. On ne parle jamais d’eux à vrai dire. En fait, on parle très peu des pauvres, qu’ils soient blancs, jaunes ou noirs. Pourtant ce sont eux, blancs y compris, qui souffrent de mépris social, ont du mal à se loger et à se nourrir, n’accèdent pas aux études supérieures, passent souvent par la case prison et se voient relégués aux marges de la République des hypocrites. Mais vous ne semblez pas voir cette réalité. Pire, vous enfoncez le clou :
«C’est-à-dire qu’en fait on a rompu avec la question de classe pour imposer un autre angle d’attaque qui est celui de la race vue comme un système d’oppressions spécifiques qui est aussi un rapport social de domination.»
On a rompu avec la question de classe pour imposer celle de la race. C’est beau, dit comme ça. Ça rime presqu’un peu, c’est joli et percutant. C’est fort sur le plan du symbole, ça je ne dis pas. Mais sur le fond, nom de nom. Sur le fond, c’est de la merde.
Oui Houria, les classes existent bel et bien
Reprenons votre exemple de la prison, du chômage ou du mal-logement. Vous dites que les «indigènes» sont surreprésentés en taule, dans les quartiers, à Pôle emploi. C’est certainement vrai, même si pour le moment on n’en sait rien (faute de statistiques). Ils/elles sont surreprésenté.e.s. Ils ne sont donc pas seuls dans les prisons, les HLM et à Pôle emploi. Alors pourquoi vouloir racialiser à tout prix ces problématiques alors qu’elles sont, de fait, sociales ? Si l’on regarde la question des quartiers, des prisons et du chômage à travers une lecture de classe, on se rend compte que : 100% des logements sociaux sont habités par des ouvriers, chômeurs ou précaires, que ce sont presque exclusivement les pauvres qui sont frappés par le chômage (pour les cadres, le plein emploi est bel et bien là), et que dans les prisons, une écrasante majorité de détenus sont issus de la classe ouvrière, des sans-emplois, des petits employés etc.
L’avantage de la notion de classe, c’est qu’elle est mesurable scientifiquement. En revanche, on ne peut pas appliquer votre rhétorique à ces mêmes exemples. On ne peut pas dire ainsi que 100% des HLM sont occupés par des «indigènes». Ce serait faux.
Oui, le racisme d’Etat existe bel et bien et est un problème à part entière qu’il faut combattre. Mais ce n’est pas parce que la République créée de la discrimination et du «tous contre tous» que nous devons abdiquer et adopter le même genre de rhétorique. Nous n’allons pas, je vous le dis, tomber dans ce piège comptable ou nous nous séparerions les uns des autres par le seul prisme de la couleur de peau, du pays d’origine, ou de la religion. Les «indigènes» dont vous vous réclamez savent que la République ne respecte pas le tiers du quart du contrat d’origine : «Liberté, égalité, fraternité». Tout le monde le sait. La liberté et l’égalité n’ont jamais été acquises en France, et nous nous battons collectivement pour elles depuis 225 ans. Et des revers, oui nous en subissons beaucoup, c’est vrai. Mais le combat continue.
En réalité, le défi est justement de parvenir à extirper le «en commun» qui nous manque tant ces derniers temps, chose que vous ne faites pas quand vous racialisez le débat. Il faut se poser tout simplement la question suivante : «qu’est-ce qui réunit les individus dans un combat collectif ? Comment peut-on s’émanciper collectivement (si telle est votre volonté) ?» . Et à cela, vous êtes incapable de répondre.
Il n’y a pas de particularisme identitaire
Moi je pense savoir un peu ce qui ne va pas. Ce qui tue les «indigènes», comme les «souchiens» ou les «blancs indigénisés» bien plus que toute forme de racisme. Ce qui nous tue collectivement se passe dans le portefeuille. Ce qui nous bouffe, les uns les autres, ce qui nous divise et nous rend con, c’est la pauvreté. Ce qui nous accule, nous fait peur, c’est de ne pas avoir accès à un logement décent, à un travail décent, à une paye décente. Et ça, c’est tout simplement la domination de classe qui en est la cause. Il se trouve qu’aujourd’hui, les «indigènes» sont surreprésentés parmi les pauvres et les mal-logés. Il y a cinquante, soixante, cent ans, ils étaient Portugais, Espagnols, Italiens, Polonais, Arméniens et étaient eux aussi victimes d’un véritable racisme structurel. Avant eux encore, c’étaient les pauvres issus de différentes régions (Basques, Bretons, Auvergnats) qui affolaient la bourgeoisie pécuniaire française. Eux aussi ont souffert à leur manière de racisme structurel, il faut bien l’entendre.
C’est donc la soif de domination qui a toujours guidé et justifié le racisme. Un Etat et une société ne sont pas racistes naturellement, mais parce qu’ils justifient par ce biais la domination de populations pour servir les intérêts d’un petit nombre. Ce ne sont pas «les Européens» qui ont réduit des peuples en esclavage. Ce sont des Etats, des puissants, des capitalistes qui ont développé un imaginaire raciste pour justifier de telles entreprises. Ce sont eux aussi qui ont colonisé l’Afrique, l’Asie et l’Amérique. Ces gens-là ont asservi les populations, de tous temps, partout où ils sont passés. Ils ont asservis le monde pour étancher leur soif d’or. Voyez-vous, Houria, ils ont même asservi des bons français bien de chez nous, dans leurs mines, dans leurs champs, leurs usines et leurs entreprises.
Le racisme n’est donc que le corollaire d’un mal premier, celui de l’exploitation des uns par les autres. Frantz Fanon, que vous aimez tant citer, l’explique mieux que quiconque en 1961 :
«Pendant des siècles les capitalistes se sont comportés dans le monde sous-développé comme de véritables criminels de guerre. Les déportations, les massacres, le travail forcé, l’esclavagisme ont été les principaux moyens utilisés par le capitalisme pour augmenter ses réserves d’or et de diamants, ses richesses et pour établir sa puissance». Les Damnés de la Terre (1961).
Le cœur du problème ne réside donc pas tant dans le racisme structurel que dans ses causes, Houria. Et en ça, lorsque vous menacez un jour que «les blancs ne pourront plus entrer dans un quartier», vous jouez le jeu de la division et proposez de traiter le symptôme plutôt que de vous attaquer à la maladie.
Puisque Frantz Fanon n’est pas Dieu, et qu’il est toujours important de se remettre en question, je finirai simplement en complétant une citation que vous utilisez et dans laquelle il dit :
«Le bien-être et le progrès de l’Europe ont été bâtis avec la sueur et les cadavres des Nègres, des Arabes, des Indiens et des Jaunes. Cela nous décidons de ne plus l’oublier».
J’ajoute que le bien-être et le progrès des capitalistes ont aussi été bâtis avec la sueur et les cadavres des travailleurs de tous horizons, et que cela non plus, nous ne l’oublierons pas.
L’as de Madrid.
Les déclarations d’Houria Bouteldja sont à retrouver dans la vidéo (https://www.youtube.com/watch?v=InQGuKb6esI), lors de son intervention sur Beur FM.
Et le grand jeu de l'été :
#QuiADitQuoi : Indigènes ou Soraliens?
A ma gauche, les Indigènes de la République (dont nous parlions ici) et à ma droite, les Soraliens (dont nous parlions ici), souvent renvoyés dos à dos pour leurs discours virulents et quelque peu essentialistes. Au milieu, vous, les poissonnautes, qui devez déterminer à qui appartiennent les citations. L’occasion de vérifier si oui ou non, Soraliens et Indigènes usent des mêmes arguments. Un conseil : tout est dans le détail. A vous de jouer!
NB : ce ne sont que des citations, qui ne peuvent refléter l’intégralité de la pensée de leurs auteurs.
Carlo Rubeo- Messages : 249
Date d'inscription : 03/06/2012
Re: Indigènes de la République
bouteldja a écrit: on a rompu avec la question de classe pour imposer un autre angle d’attaque qui est celui de la race vue comme un système d’oppressions spécifiques qui est aussi un rapport social de domination.
Bel aveu
Bouteldja assume pleinement ce que certains ici nient farouchement !
marxmarx- Messages : 161
Date d'inscription : 13/01/2015
Re: Indigènes de la République
Tiens les islamophobes sont de retour de vacances. Ils vont donc reprendre le clavier pour nous nier nos droits à définir notre programme et nos formes d'organisation...
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
MO2014 a écrit:Tiens les islamophobes sont de retour de vacances. Ils vont donc reprendre le clavier pour nous nier nos droits à définir notre programme et nos formes d'organisation...
"nos droits" d'islamophiles ?
tu en fais ce que tu veux...
marxmarx- Messages : 161
Date d'inscription : 13/01/2015
Re: Indigènes de la République
Critiquer le PIR quand sa porte-parole rejette explicitement des conceptions de classe pour leur préférer des conceptions de race, ce serait de l'islamophobie ?MO2014 a écrit:Tiens les islamophobes sont de retour de vacances. (...)
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
Vous n’avez rien à faire ce samedi ? Allez donc faire un tour à Saint-Denis – ligne 13 ou RER C – et interrogez les passants. Repérez un Français noir ou arabe et demandez-lui : « A quel peuple appartenez-vous ? » S’il vous répond « j’appartiens au peuple français », vous saurez que c’est un lèche-bottes. S’il vous répond sincèrement, il vous dira « J’appartiens au peuple noir – ou arabe ou berbère, malien, marocain, musulman, sénégalais, algérien, africain… » Repérez par la suite un Français dit de souche et posez-lui la même question. Il ne vous dira pas : « J’appartiens au peuple blanc ou européen ou chrétien » ; il vous répondra : « Je fais partie du peuple français. » Ces distinctions pourraient être sans grandes incidences s’il s’agissait simplement pour les uns et les autres de définir l’une des identifications qui leur sont chères, comme par exemple deux Français dont l’un serait fier d’être originaire de Dunkerque et l’autre de Marseille. Mais se revendiquer d’un peuple, c’est bien plus que cela.
J'ai fait l'opération souhaitée par l'auteur Et j'en ai déduit que ce qu'il dit est une "expérience de pensée" Car les gens qu'on peut croiser au terminal de la ligne 3 ne répondent jamais comme prévu par l'article (sauf ceux qui traversent la rue pour aller a leur séminaire de recherche "luttes subalternes et néo colonialisme queer") ont des appartenances multiples : ils sont arabes, algériens, musulmans, ouvriers, femmes, ou n'importe quelle "identitées" qui les constituent. Quand a se revendiquer d'un peuple, cela n'est pas le cas ! Car si ils se réclamaient d'un peuple, en bonne conséquence ils devraient réclamer un état à eux Ou ça ? A Marseille, dans le neuf trois, à lille ?
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Indigènes de la République
D'autant qu'on risque de trouver à saint Malo davantage de Bretons qui revendiquent leur appartenance à la Bretagne que de passagers du RER venus du 93 se revendiquer du "peuple arabe, noir ou musulman" - peut-être certains se revendiquent-ils plus volontiers de la Cité des 4000 ou d'une autre.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
Après s'être tus pendant des semaines ils sont de retour de vacances nos pourfendeurs de racisés. Ils ont du passer de bons séjours à Marsa Alam, à Djerba, à Marrakech où il ont pu de ressourcer à la recherche de colonialisme perdu
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Je me demandais qui était le quidam qui traversait la gare du terminus de la ligne 13 pour aller respirer sa came à la fac de saint denis. Mon ami, tu sais, la fac est fermée au mois d'aout ! Sinon, c'est de l'autocritique ? Parce que jusqu'a preuve du contraire, le seul "pourfendeur de racisé", c'est toi !nos pourfendeurs de racisés.
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Indigènes de la République
MO2014 a écrit:Après s'être tus pendant des semaines ils sont de retour de vacances nos pourfendeurs de racisés. Ils ont du passer de bons séjours à Marsa Alam, à Djerba, à Marrakech où il ont pu de ressourcer à la recherche de colonialisme perdu
lol,
j'aime pas trop le cirque mais quand on a de si bons clowns on n'hésite pas à entrer sous le chapiteau...
marxmarx- Messages : 161
Date d'inscription : 13/01/2015
Re: Indigènes de la République
Tu es un grand malade...MO2014 a écrit:Après s'être tus pendant des semaines ils sont de retour de vacances nos pourfendeurs de racisés. Ils ont du passer de bons séjours à Marsa Alam, à Djerba, à Marrakech où il ont pu de ressourcer à la recherche de colonialisme perdu
Vérosa_2- Messages : 683
Date d'inscription : 01/09/2010
Re: Indigènes de la République
Vérosa_2 a écrit:Tu es un grand malade...MO2014 a écrit:Après s'être tus pendant des semaines ils sont de retour de vacances nos pourfendeurs de racisés. Ils ont du passer de bons séjours à Marsa Alam, à Djerba, à Marrakech où il ont pu de ressourcer à la recherche de colonialisme perdu
Ha oui c'est vrai dans de nombreux régimes que tu admires les opposants, les contradicteurs ...etc. étaient considérés comme des malades par les commissaires politiques
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Ha oui c'est vrai dans de nombreux régimes que tu admires
Qu'est-ce qui permet d'affirmer ce genre de débilité ?
Une révélation du Tout Puissant ?
hadrien- Messages : 285
Date d'inscription : 09/02/2015
Re: Indigènes de la République
La LICRA porte plainte contre le PIR
Houria Bouteldja convoquée à la police aujourd'hui.
La LICRA vous savez c’est cette organisation pseudo anti raciste qui est beaucoup plus spécialisée dans la défense d'Israël que dans celle des musulmans, c'est cette organisation payée par des deniers publics qui considère que l'islamophobie et la négrophobie c'est moins grave que l'antisémitisme et qui parle en langage "petit nègre" aux musulmans dans ses tweets !
Et bien voilà cette fois c'est elle qui porte plainte contre le PIR, un coup c''est l'extrême droite, l'AGRIF pour l'affaire des souchiens, l'autre coup, ce sont les fachos sionistes de la LICRA pour un tweet soi disant anti sémite, ça reste des fachos !
Antisémites et sionistes sont les deux faces d'une même médaille que le PIR continuera à combattre de toutes ses forces !
Pourquoi la LICRA poursuit-elle le PIR.
La Licra qui prétend être l'organisation de référence pour la lutte contre l'antisémitisme porte plainte contre une organisation décoloniale, le PIR, pour un post où précisément le PIR dénonce l'antisémitisme d'Etat déguisé en philosémitisme. Fallait le faire.
Pour comprendre cela, il faut savoir que la LICRA uniquement préoccupée par la lutte contre l'antisémitisme en veut au PIR à cause de ses positions de soutien à la lutte palestinienne.
Très préoccupée par la défense d’Israël en faveur de la création duquel la LICRA a beaucoup œuvré en 1945/49. Elle qui se targue d'être présente dans de nombreux autres pays et de se préoccuper d'autres causes, aussi bien de négrophobie que de soutien à la lutte des Kurdes, se fiche comme d'une guigne de la lutte contre l'islamophobie dont elle ne se sert juste que comme d'un faire valoir.
Mais surtout se plaçant résolument dans le camp d’Israël, elle a toujours vu les Palestiniens comme des ennemis, n'a jamais levé le petit doigt pour dénoncer la situation des réfugiés interdits de rentrer dans leur patrie et encore moins pour dénoncer le colonialisme sioniste et ses violences, ni l'apartheid subi tant par les Palestiniens des territoires occupés que par ceux des territoires de 48.
Avec la LICRA nous avons à faire à une organisation sioniste partisane dure, qui se veut gardienne d'Israël et qui en tant que telle veut poursuivre tout anticolonialiste radical opposé à Israël.
YB
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
On peut noter que la LICRA n'est pas seule à dénoncer l'antisémitisme de Bouteldja et du PIR et qu'à l'extrême-gauche ou dans les associations antiracistes, de nombreuses voix s'expriment pour démasquer ce qui émerge derrière l'écran de fumée de l'anticolonialisme.
Même le MRAP a commencé à ouvrier les yeux:
http://www.mrap-landes.org/spip.php?article653
Même le MRAP a commencé à ouvrier les yeux:
http://www.mrap-landes.org/spip.php?article653
Indigènes de la République : la dérive "racialiste"
Leur dérive raciale n’a plus rien à voir avec la lutte contre le racisme, ils ne feront illusion qu’auprès des naïfs ou faux naïfs complices.
=> On les savait déjà partisans de la lutte des races : non-blancs contre blancs,
=> On savait qu’ils essentialisent les blancs dans un statut de néo-colonialistes privilégiés et oppresseurs. toutes classes sociales confondues, Le travailleur pauvre qui dort dans sa voiture comme l’actionnaire du CAC40 sont en effet globalisés dans la "race" blanche des privilégiés.
=> On les savaient hostiles aux droits des homosexuels (mariage pour tous). Voir l’article de ce site"« racialisation » des couples mixtes, du genre sexuel, et homophobie.
=> On savait que leur dénonciation formelle de l’antisémitisme n’était qu’un paravent derrière lequel Houria Boutedlja, la leader des "indigènes" vantait l’esprit de "résistance" de Dieudonné, humoriste antisémite.
Dieudonné le "résistant" ?.
j’ai des sentiments ambivalents. D’abord, je commencerais par dire que j’aime Dieudonné ; je l’aime comme l’aiment les indigènes ; je comprends pourquoi les indigènes l’aiment. Je l’aime parce qu’il a fait une chose importante en termes de dignité, de fierté indigène, de fierté noire : il a refusé d’être un nègre domestique. Même s’il n’a pas le bon logiciel politique dans la tête, il a une attitude de résistance
(la "fierté" du "résistant" antisémite ! il fallait oser, le PIR a osé !
Comment peut-on parler d’attitude de résistance d’un individu qui fait danser sur "shoah ananas" et l’histoire tragique des juifs dont nous entendons rappeler la mémoire chaque année, dans les Landes : association mémoire de la résistance et du génocide des enfants juifs dans les Landes
La chaîne odieuse d’Houria Bouteldja :
"juifs" = "goumiers", "goumiers" = "massacres" = "sauvages" = "viols" !
Lors d’une allocution prononcée à la Maison de la Littérature à Oslo, le 3 Mars 2015 , Houria Bouteldja à développé une argumentation pouvant être validée sans problème par Dieudonné et Faurisson. Pour elle les juifs sont les " les porte-paroles de l’Occident ou plus exactement ses goumiers notamment par le biais d’un autre État-Nation colonial : Israël,".
Les goumiers ayant été les forces supplétives de l’armée coloniale française, on comprend vite le message : les "juifs" petits soldats d’Israêl feraient de la sous-traitance pour l"occident néo-colonialiste.
Bouteldja pourrait s’arrêter là,.. mais toute heureuse d"avoir débusqué le juif "goumier" et supposant que son auditeur n’a pas bien compris le but de sa démonstration, elle donne des précisions. Les goumiers sont alors présentés comme des barbares violeurs. Une barbarie qu’elle hiérarchise en ciblant plus précisément les "sénégalais". (ce ciblage racial n’est pas neutre !).
"Je ne résiste pas à l’envie de vous raconter l’histoire de ces tirailleurs d’Afrique qui se sont rendus coupables d’atrocités au Maroc pendant la colonisation française. Bien évidemment, ils ont été enrôlés de force par la France et c’est en son nom qu’ils ont commis ces atrocités. Les femmes qui ont été violées et les villages massacrés ont retenu que les plus sauvages étaient les Sénégalais.".
La boucle est bouclée par Bouteldja elle-même : "juifs" = "goumiers" = "atrocités" = "viols" = "massacres" = "sauvages".
Elle peut écrire les prochains sketchs du "résistant" Dieudonné ! son succès sera garanti au théâtre de la main d’or.
hadrien- Messages : 285
Date d'inscription : 09/02/2015
Re: Indigènes de la République
Je ne l'avais pas signalé, mais puisqu'on parle d'eux : après l'attentat commis par un intégriste juif lors de la gay pride de Jerusalem - qui s'était soldé par la mort d'une jeune femme de 16 ans, poignardée par cet illuminé -, H. Bouteldja avait trouvé de bon goût d'écrire sur sa page Facebook "Un partout, la balle au centre", exprimant par là l'idée que l'assassin comme sa victime étaient des colons. Une façon de dire que les "indigènes" n'ont pas à se positionner en ce qui concerne les réactionnaires homophobes : du moment qu'il est question de Juifs, qu'ils s'entretuent donc, il n'y a pas de distinctions à faire. Bouteldja devait sans doute être bien renseignée sur les positions politiques de la jeune victime.
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: Indigènes de la République
On voit dans quel camp se situe nos deux compères de LO, en soutenant la LICRA, organisation sioniste.
précisons, ces mots sont prononcés dans les mêmes circonstances qu'aujourd'hui lorsque Houria Bouteldja est devant la justice de l'état colonial à propos du mot "souchiens", (ce procès avait d'ailleurs été gagné par Houria Bouteldja
:
précisons, ces mots sont prononcés dans les mêmes circonstances qu'aujourd'hui lorsque Houria Bouteldja est devant la justice de l'état colonial à propos du mot "souchiens", (ce procès avait d'ailleurs été gagné par Houria Bouteldja
:
Houria Bouteldja dénonce une volonté de « criminaliser le mouvement antiraciste »
Demain mercredi 14 décembre s’ouvre à Toulouse le procès d’Houria Bouteldja, accusée de "racisme antiblancs" par une association d’extrême droite. Dans un entretien accordé à regards.fr, la porte-parole du Parti des indigènes de la République décrypte le sous-texte de ce concept et dit ce qui, selon elle, caractérise aujourd’hui les mouvements antiracistes en France.
Regards.fr : Pouvez-vous nous retracer en quelques mots la généalogie de ce procès ?
Houria Bouteldja : J’ai prononcé le mot « souchien » en juin 2007 dans une émission de télévision (Ce soir ou jamais, ndlr) pour me moquer de l’expression « Français de souche », plus précisément du mot « souche » qui renvoie à la « racine », à la « race ». Il s’agissait de pointer et de moquer cette distinction entre deux catégories de citoyens : les Français dits de souche, c’est-à-dire les blancs, et ceux qui ne le sont pas et ne le seront jamais. Je faisais la critique d’une citoyenneté à deux vitesses fondée sur la race. J’ai prononcé ce terme sans aucune ambiguïté et dans un contexte très précis. À la suite de cela, une campagne médiatique a été lancée par Alain Finkielkraut et l’hebdomadaire Marianne, m’accusant de racisme antiblancs, au motif qu’ils avaient entendu un tiret (sous-chien ndlr). Ce qui était un néologisme sur le mot « souche », eux ont souhaité le voir comme un jeu de mot. Cette histoire a fait un petit buzz médiatique. Un an plus tard, Brice Hortefeux a pris le relais en menaçant de porter plainte contre moi. Nouveau buzz. A cette époque, l’UMP aussi a publié un communiqué contre moi. Puis, l’affaire s’est tassée, à mon avis pour des raisons très objectives. Je pense que leurs avocats leur ont dit qu’ils allaient perdre en justice. De fait, nulle part je n’ai écrit « souchien » avec un tiret et surtout le jour où j’ai prononcé ce mot sur le plateau de France 3, personne n’a mal réagi, tout le monde a compris ce que je voulais dire. Puis en 2010, l’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (Agrif), une association d’extrême droite basée à Toulouse, a fini par porter plainte. Le procès aura lieu demain, mercredi 14 décembre. Selon mes avocats, je ne risque pas grand chose, mais l’enjeu pour l’Agrif est de faire de la propagande politique autour de ce concept de « racisme antiblancs ».
Regards.fr : Quel intérêt l’Agrif, et ses soutiens, ont-ils à populariser ce concept ?
Houria Bouteldja : Tout d’abord, il faut rappeler que cette expression ne vient pas de l’extrême droite, mais des néo-conservateurs comme Finkielkraut. À la suite des révoltes de 2005, puis des mobilisations contre le CPE, des manifestants ont été agressés par des banlieusards. Finkielkraut a alors dénoncé un racisme antiblancs et fait circuler une pétition. Ce concept sert à criminaliser le mouvement antiraciste, à l’intimider, à voiler une vraie fracture sociale. Les victimes de racisme deviennent elles-mêmes racistes : un partout, balle au centre. Parler de racisme antiblancs permet de culpabiliser les vraies victimes du racisme, de mettre un voile sur toutes les violences perpétrées par l’État, sur toutes les violences institutionnelles, policières, sociales… Cela sert à cacher que le racisme est avant tout un rapport social de domination. Du coup, il déculpabilise les bénéficiaires du système : les blancs.
Nous avons subi 30 ans d’antiracisme moral. Or, à partir du moment où l’on pense que le racisme est une haine de l’autre, nous sommes tous potentiellement racistes. Un arabe, un noir peut effectivement avoir la haine du blanc. En France, on a toujours eu du mal à définir précisément le racisme. Pour les grands médias et les associations médiatiques comme SOS racisme ou la Licra, c’est une question morale ; Sauf que cela masque le fait que le racisme est un système hiérarchique. Celui qui est en bas de l’échelle peut réagir violemment, éprouver de la haine, mais il n’a pas le pouvoir d’être raciste. Toutes les haines ne se valent pas. Les unes sont la conséquence des autres. Il y a la violence originelle, celle du racisme, et les conséquences de cette violence.
Regards.fr : On observe une réorganisation des mouvements antiracistes depuis quelques années…
Houria Bouteldja : Depuis le 11 Septembre 2001, et plus précisément en France depuis l’affaire du voile, on assiste à des mutations dans le champ de l’antiracisme. Aujourd’hui, on est réellement antiraciste quand on dénonce les principaux racismes, à savoir l’islamophobie, le racisme antinoirs et anti Roms. Le Collectif des féministes pour l’égalité (CFPE), Une École pour tous, Les Indigènes de la République, le collectif Mamans toutes égales (MTE), les indivisibles, l’Alliance Noire Citoyenne ainsi que ceux qu’on appelle les "islamogauchistes" (militants de gauche et minoritaires dans leurs organisations) se sont réorganisés autour de cette question. Dans cette nouvelle cartographie, le MRAP joue un rôle singulier. Il reste fondamentalement une association blanche structurée autour d’une définition morale du racisme. Le racisme n’y est pas clairement défini comme structurel. C’est ce qui le fragilise. Il reste cependant du côté des plus opprimés, donc spontanément, il est du côté des musulmans. C’est ce qui tendanciellement classe le MRAP dans cette mouvance réellement antiraciste (mais jusqu’à quand ?). Par ailleurs, ce qui caractérise cette réorganisation du champ de l’antiracisme c’est qu’elle se fonde également sur la solidarité avec la Palestine et sur la dénonciation du colonialisme israélien. Autre grande ligne de fracture en France...
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Cette façon de polémiquer, en assimilant ses contradicteurs à la LICRA, est non seulement malhonnête mais ridicule, car elle ne peut tromper personne sur ce forum. C'est à peu près comme si on t'accusait de soutenir Le Pen, les Identitaires, Pétain etc en soutenant Bouteldja.On voit dans quel camp se situe nos deux compères de LO, en soutenant la LICRA, organisation sioniste.
Le problème qui se pose maintenant, c'est : jusqu'où ira le PIR et ses laudateurs se revendiquant toujours plus ou moins du marxisme le suivront-ils ?
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Indigènes de la République
verié2 a écrit:... malhonnête mais ridicule, car elle ne peut tromper personne sur ce forum. C'est à peu près comme si on t'accusait de soutenir Le Pen, les Identitaires, Pétain etc en soutenant Bouteldja.On voit dans quel camp se situe nos deux compères de LO, en soutenant la LICRA, organisation sioniste.
Le problème avec toi vérié2 c'est que tu te solidarises TOUJOURS avec les opposants au PIR en particulier avec les portes voix de l'organisation communautariste blanche et islamophobe LO. Tu n'as pas un seul mot de critique pour les caractérisations d'hadrien contre le PIR : homophobe, anti-sémite, d'extrème droite... Oui comme tu l'écris : "C'est à peu près comme si on t'accusait de soutenir Le Pen, les Identitaires, Pétain etc en soutenant Bouteldja", c'est précisément et en permanence ce que font les portes voix de LO sur ce forum sans que JAMAIS tu leur ais formulé la moindre critique.
Donc c'est toi qui ne trompe plus personne sur ce forum, on se rappelle tous comme tu nous expliquais qu'il fallait dialoguer avec les femmes portant le foulard religieux pour leur expliquer combien elles étaient aliénées par leur religion et que c'était tellement dommage de cacher de si jolis minois Cela fait longtemps que tu développes des positions identiques à celles des islamophobes de LO. Alors "malhonnête" et "ridicule" c'est vrai tu en connais un rayon !
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Indigènes de la République
Ces deux lignes et demi résument bien ta façon de polémiquer. Elle contient à la fois des mensonges flagrants et des insultes.MO2014
Le problème avec toi vérié2 c'est que tu te solidarises TOUJOURS avec les opposants au PIR en particulier avec les portes voix de l'organisation communautariste blanche et islamophobe LO
1) Non, j'ai a différentes reprises au contraire critiqué ceux qui entendaient tracer un trait d'égalité entre le PIR et le FN. J'ai donc défendu le PIR tout en le critiquant. Mais les dernières sorties de sa porte-parole incitent à prendre encore davantage ses distances avec le PIR, sans en faire pour le moment l'équivalent de Soral-Dieudonné. Mais cette évolution - ou outing ? - n'est pas encourageante...
2) Mes critiques de LO sur la question de l'islamophobie m'ont valu d'être exclu de son forum. Mais critiquer certains aspects de la politique de LO est une chose, insulter LO en traitant cette organisation de "secte communautariste blanche", ses militants de "saLO" etc en est une autre qui ne devrait pas être admise sur ce forum.
Conclusion. MO2014, soit tu es franchement malhonnête, soit tu n'as aucun sens des nuances. Ne te connaissant qu'au travers de tes interventions, il m'est difficile de trancher...
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
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