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Débat stratégique dans le NPA

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Message  iztok Lun 13 Mai - 3:01

ouais en gros ils vont faire ce qu'ils veulent en se foutant complètement de poser justement les conditions de rassemblement à l'intérieur du parti. Une politique suicidaire et sectaire, en interne et en externe.
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Message  iztok Lun 13 Mai - 3:08

Plateforme X : Faire résonner pleinement la perspective anticapitaliste
Dimanche 12 mai 2013
http://npa2009.org/node/37138
Publié dans : Revue Tout est à nous ! 41 (mars 2013)

Nous avons voulu faire de ce deuxième congrès du NPA un moment de débat et de rassemblement pour tourner la page d’une période difficile et créer les conditions pour reprendre l’offensive. Pour nous, il s’agit de surmonter la crise de notre parti, dont le départ des camarades de la Gauche anticapitaliste, même si les causes de cette crise ne se résument pas à ce seul aspect.

Dans le cadre du large débat de congrès, nous avons voulu donner le signal du rassemblement de l’ensemble du parti autour du projet fondateur qui garde toute son actualité. Il s’agissait aussi de formuler une orientation en continuité avec les acquis de l’élection présidentielle, en s’appuyant sur les réalités politiques et les grandes coordonnées de la période : une crise que les classes dirigeantes font payer aux populations au prix d’une régression sociale sans précédent ; les reniements et soumissions de la gauche au pouvoir ; l’importance prise, malgré ses ambiguïtés, par le Front de gauche qui exprime le rejet du social-libéralisme ; les difficultés rencontrées par les résistances sociales pour battre en brèche les nouveaux reculs, voire pour engranger des victoires même partielles. Bref, redonner au NPA toute son utilité dans le combat politique.

Cohérent : du projet fondateur à l’orientation

Comme l’ont montré les votes dans les AG électives et au sein même du congrès, l’aspiration au rassemblement, pour un parti ouvert et unitaire, s’est largement exprimée. Elle s’est heurtée à des attitudes fractionnelles, ainsi qu’à des incompréhensions et/ou des désaccords politiques dont l’enjeu de ces prochains mois sera de les surmonter.

Au lieu d’axer le congrès sur l’élaboration d’une analyse commune de la période et des tâches qui en découlent, une grande partie des camarades des autres plateformes a en premier lieu voulu mettre en débat le bilan global du NPA depuis 2009. Une petite minorité exprimant à juste titre l’échec partiel de celui-ci, mais n’apportant aucune autre réponse qu’organisationnelle. Un plus grand nombre défendant l’idée, exprimée de façon plus ou moins explicite, que le projet était caduc et qu’il fallait y mettre fin.

Ce débat n’a de sens qu’au regard du contenu réel du projet tel que nous l’avions toutes et tous fait nôtre lors de la fondation du NPA en 2009 : apporter un début de réponse à la crise historique du mouvement ouvrier. Dans la difficulté, le pari était important… mais nous avons eu raison d’oser le NPA, et ce projet de regroupement des anticapitalistes, un parti pour la transformation révolutionnaire de la société, reste la base d’un très large accord confirmé par ce congrès.

Un parti au cœur de l’affrontement politique

A l’opposé de la remise en question ou du procès du projet fondateur, nous avons choisi, pour notre part, de définir son contenu à partir d’une orientation tournant notre parti vers l’extérieur : utile à la lutte des classes et à la construction d’un rapport de forces global ; politiquement offensif pour aider à l’émergence d’une alternative politique en rupture avec le capitalisme.

L’orientation majoritaire que nous avons proposée a recueilli 55, 9 % des voix au congrès national. Elle repose sur la façon dont nous articulons notre intervention dans le monde du travail, les quartiers populaires, la jeunesse, les luttes et les résistances, la construction d’une opposition de gauche à ce gouvernement qui donne aux mobilisations une perspective d’ensemble, capable d’unifier toutes celles et ceux qui résistent au gouvernement, au Medef, à la droite et à l’extrême-droite. Cette opposition devra poser la question de la nécessaire alternative, un gouvernement anti-austérité s’appuyant sur la mobilisation des travailleurs, des classes populaires, et de leurs organisations.

C’est l’ampleur même de la crise actuelle du capitalisme - donnant une dimension politique à toute exigence sociale, démocratique, écologique - qui pose la question du pouvoir, donc la question du gouvernement. Dans ces conditions, la question sociale devient la question politique essentielle, et nécessite une réponse politique, comme le montre par exemple le problème de la dette ou de la lutte contre les licenciements. Il y a donc urgence à donner à cette question une expression concrète et populaire : aujourd’hui la nécessité de construire une opposition de gauche au gouvernement actuel, pour demain un gouvernement anti-austérité.

C’est la condition même pour que nous existions comme parti politique, pas simplement comme un parti des luttes. Car nous ne pouvons nous contenter d’une simple proclamation révolutionnaire de rupture avec le capitalisme ni invoquer les rapports de forces actuels avec les autres forces pour nous dérober.

Luttes sociales, opposition politique et pouvoir

Notre réponse s’appuie sur les mobilisations, vise à les favoriser, car nous savons bien que tout progrès social pour la majorité, tout nouveau droit, ne peuvent être qu’imposés aux classes dirigeantes et à leur État. Mais, dans la situation actuelle, pour se mettre en mouvement, ceux d’en bas ont aussi besoin d’une perspective politique unifiante. C’est pourquoi nous proposons de construire une opposition unitaire à la gauche de ce gouvernement. Nous sommes convaincus que toute avancée dans cette unité permettrait un changement d’état d’esprit pour les mobilisations. Nous le voyons bien quand les salariéEs d’ArcelorMittal exigent du gouvernement la nationalisation de leur entreprise, gouvernement déjà effrayé par les déclarations timides et sans lendemain d’un Montebourg. Nous le touchons du doigt quand le collectif des boites en lutte autour des Licenci’elles défend la nécessité d’une loi d’interdiction des licenciements.

Pour cela, nous allons donc nous adresser, sans aucune exclusive, à toutes les organisations politiques qui ne participent pas au gouvernement, aux syndicats, aux associations militantes. Des forces avec lesquelles pour la plupart nous sommes déjà engagées dans les mobilisations, contre « l’Accord national interprofessionnel » - cet ANI ennemi des travailleurs –, contre l’Ayraultport de Notre-Dame-des-Landes, ou pour la régularisation des sans-papiers.

Nous défendons dans le même temps la perspective d’un gouvernement anti-austérité qui, en s’appuyant sur les mobilisations, remette en cause la règle d’or du pacte budgétaire, suspende le paiement de la dette en mettant en œuvre un audit citoyen et populaire en vue de son annulation, garantisse les droits du monde du travail et l’égalité des droits, interdise les licenciements, répartisse le travail entre toutes et tous, exproprie sans indemnité ni rachat les banques pour créer un service public bancaire, socialise les grands groupes industriels et substitue les besoins sociaux au tout-profit et au productivisme.

Notre problème n’est pas de nous protéger du péché réformiste en mettant la tentation loin de nous. Bien au contraire, ces prochains mois, il s’agit de discuter avec les antilibéraux, avec les millions de personnes qu’ils influencent pour peser sur les contradictions, aider aux évolutions, transformer le rapport de forces, préparer un mouvement d’ensemble et tracer la voie d’une véritable résistance politique, une opposition de gauche.

L’essentiel reste devant nous

A partir de la compréhension de notre projet global et de la façon d’aborder la question de l’orientation, se sont dessinées ces derniers mois deux conceptions.

Pour certainEs, discuter avec les autres courants du mouvement ouvrier, porter le débat politique au sein de ses différentes organisations, deviendrait un risque de capitulation, voire déjà à cette étape une capitulation qu’il serait urgent de dénoncer et de combattre. Nous avons une autre conception de la démocratie pour l’action. Une autre conception aussi du fonctionnement et de la démocratie interne, au cœur de l’idée du regroupement des anticapitalistes et du parti processus, et opposée au parlementarisme de tendance.

Dans une déclaration en fin de congrès, les déléguéEs de la plateforme X, sortie majoritaire de ce congrès, ont appelé l’ensemble des militantEs à s’emparer de leur parti, à se réapproprier notre projet. En continuant les débats engagés, tant sur notre orientation que sur la démocratie et notre fonctionnement, nous pouvons ensemble aller plus loin que le congrès n’a su et pu le faire. Même si les clivages demeurent, nous considérons qu’il est possible et nécessaire de créer partout un climat de travail collectif, de solidarité, d’associer dans le respect des divergences toutes celles et ceux qui font le pari du rebond du NPA et de son utilité certaine ces prochains mois. o

Équipe d’animation de la plateforme X
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Message  Roseau Lun 13 Mai - 3:13

iztok a écrit:ouais en gros ils vont faire ce qu'ils veulent en se foutant complètement de poser justement les conditions de rassemblement à l'intérieur du parti. Une politique suicidaire et sectaire, en interne et en externe.
Au moins c'est clair.
On ne peut difficilement faire mieux comme refus de discuter et propos sectaire... Laughing
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Message  iztok Lun 13 Mai - 3:16

si ces camarades se préoccupaient un peu plus du rassemblement du NPA, et un peu moins de se constituer en courant combattant l'orientation majoritaire "à tous les niveaux", on pourrait vraiment discuter sereinement. Ce n'est pas le choix qu'ils font, leur texte le confirme. C'est à déplorer.
Donc oui c'est une politique suicidaire et sectaire, et ça n'a rien de drôle, c'est plutôt consternant et triste.
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Message  Copas Lun 13 Mai - 7:57

Le présent (et l'avenir) ayant un long passé la décision de camarades de se maintenir en plate-forme est compréhensible. Ceux-ci contrairement aux accusations de certaines ont plus qu'à leur tour continuer de faire fonctionner le NPA malgré les zig-zags des autres.

Mais il y a un autre problème évident, c'est que le NPA n'a toujours pas de stratégie de changement de la société. Même la réaffirmation des principes de fondation du NPA pose problème et donne lieu à une direction qui dit souvent l'inverse de ceux-ci .

La séparation entre une stratégie révolutionnaire construite sur la résistance sociale et une stratégie réformiste accompagnant le mouvement social pour le plier systématiquement à des objectifs institutionnels n'est pas faite.

La crise des organisations de masse des travailleurs n'est absolument pas traitée. Seule la question du FdG, petit front réformiste, version dégradée et plus à droite des partis du programme commun d'il y a 40 ans, est traitée, et mal (par en haut, c'est à dire en tête à tête avec les caïmans buros).

La reconstruction/construction des organisations de résistance de masse du mouvement ouvrier n'est pas faite. Cette question n'est pas du tout traitée par le FdG, le NPA ne la traite donc pas.

La question liée du développement du parti nécessaire pour construire ce camp organisé de la classe ouvrière n'est donc pas traitée, les questions de front unique transformées en questions d'alliance de boutiques bureaucratiques sans possibilité d'irruption de la classe populaire avec ses organisations propres de masse.

Une orientation de l'impuissance ne traitant pas les questions qui ont été posées par le flop des batailles sur les licenciements et la façon de les mener.

Et pourtant.

On ne peut pas traiter des questions de tendances dans le NPA sans traiter de ce point mort de l'absence de stratégie qui nourrit sans cesse des dérives de tendances dominantes majoritaires existant de fait (et ne se sentant pas tenus par une orientation particulière) et les contre-réactions de courants oppositionnels.

Pas de stratégie = pas de réel développement du NPA

On doit apprécier les questions de courants maintenus par le fait de problèmes stratégiques toujours non tranchés. Nous avons tendance à revenir à nouveau à la crise qui a joué auparavant et dont la responsabilité principale n'a jamais été dans l'apparition de tendances dans le NPA (puisque la crise est venue de la période unanimiste) , mais bien dans toute une phase où la direction du NPA en menant une politique inverse aux principes de fondation s'est obnubilée en permanence sur la question du FdG.

Cette majorité a explosé devant le désastre de sa politique "unitaire" qui a chassé du NPA l'essentiel de ses militants. Une partie de cette majorité dirigeante est passée maintenant au FdG mais la question revient sans cesse hélas. Et le courant dominant du NPA demeure incapable d'avoir sa politique autrement qu'en la situant dans la périphérie du FdG, ce qui est un paradoxe pour un front de petits partis qui n'existent pas de façon organisée dans les entreprises, et n'a pas une implantation exceptionnelle (prouvé d'ailleurs par le fait que les composantes du FdG n'ont jamais été dans le débat contradictoire sur ce qu'il fallait faire en termes d'orientation concrète dans les luttes de l'automobile).

Tout cela nourrit inlassablement des courants dominants et minoritaires dans le NPA. Impossible d'y échapper.



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Message  Roseau Lun 13 Mai - 14:02

iztok a écrit:si ces camarades se préoccupaient un peu plus du rassemblement du NPA, et un peu moins de se constituer en courant combattant l'orientation majoritaire "à tous les niveaux", on pourrait vraiment discuter sereinement. Ce n'est pas le choix qu'ils font, leur texte le confirme. C'est à déplorer.
Donc oui c'est une politique suicidaire et sectaire, et ça n'a rien de drôle, c'est plutôt consternant et triste.
La seule chose triste, c'est la conception conservatrice et bureaucratique : parler de "rassembler" l'organisation, sans parler de pour quoi faire. Ca me rappelle le PC et ça fait rire, heureusement, car il y aura toujours des MR pour mettre les taches en avant (voir texte de Copas au dessus), pas raisonner en boutique Laughing
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Message  iztok Lun 13 Mai - 14:21

ha ben on en arrive aux fait, la direction majoritaire actuelle est bureaucratique et conservatrice. Oui rassembler après une scission et une crise interne est le minimum.
Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre comme idiotie ... Mais bon c'est le délire, la majorité de la PFY (sans parler des deux groupes de la Z qui sont arrivés à se diviser entre eux) se considère comme une opposition de gauche à l'intérieur de l'orga avec toutes les dérives en terme de pratiques et d'orientation que ça entraîne.
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Message  tomaz Lun 13 Mai - 15:06


mers chers camarades, ce n'est pas en commençant a se jeter des anathèmes entres positions, comme au bon vieux temps, que nous allons construire ce bon dieu de parti. merci d'avance.

un ex position w.
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Message  iztok Lun 13 Mai - 15:15

effectivement tu as raison tomaz, je laisse tomber et construisons notre parti à tous et toutes dans la vie réelle. Les discussions seront de toute façon toujours plus constructives que sur un forum. On a une ligne majoritaire, des perspectives politiques, des commissions et une direction qui se remettent en route. C'est tout ce qui compte pour relancer le projet du NPA, le reste on verra bien ça reste un pari.
J'en ai juste marre de voir que certain-e-s camarades en ont rien à carrer, et privilégie leur esprit de tendance dans la construction collective d'un outil déjà bien abîmé.
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Message  Jonhy Lun 13 Mai - 16:24

Mais en l’absence de grandes luttes et de phénomènes significatifs d’auto-organisation, une telle perspective garde un caractère abstrait.

En tout cas elle n'est pas abstraite pour ceux qui construisent l'opposition de gauche...à l'intérieur du parti. Les camarades de la Z par exemple font eux front unique contre la direction avec les ex-corrompus de la P2 qui ont co-dirigé le parti avec les réformistes qui sont passés au FDG. Mais pour contrecarrer le virage droitier de la direction , toutes les alliances sont permis!

A suivre, le prochaine épisode de: Mon parti sort d'une scission mais la priorité c'est de construire une opposition à la direction Laughing

Mieux vaut en rire , car dans la réalité, heuresement que tous les camarades de tous les courants reconstruisent le NPA, et sont fatigués des batailles fractionnelles.


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Message  tomaz Lun 13 Mai - 17:25


que Marx vous entendent mes camarades.... Rolling Eyes
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Message  Roseau Lun 13 Mai - 19:42

iztok a écrit:ha ben on en arrive aux fait, la direction majoritaire actuelle est bureaucratique et conservatrice. Oui rassembler après une scission et une crise interne est le minimum.
Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre comme idiotie ... Mais bon c'est le délire, la majorité de la PFY (sans parler des deux groupes de la Z qui sont arrivés à se diviser entre eux) se considère comme une opposition de gauche à l'intérieur de l'orga avec toutes les dérives en terme de pratiques et d'orientation que ça entraîne.

Toujours RIEN sur le fond, mais un régal !
Je parlais du post de Iztok, jamais de la direction. Le voilà qui se prend pour la direction à lui tout seul !
lol!
Mais se prendre tout seul pour la direction puis
appeler l'"opposition de gauche" une dérive, sans RIEN sur le fond,
c'est une cascade de rire pour qui connait l'origine des MR...
J'ai pas dit lapsus, ce serait une insulte.
(Iztok ne parle pas d'orientation, mais traite la mienne d'"idiotie".
L'insulte dans ces conditions est un compliment)
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Message  Roseau Lun 13 Mai - 19:59

Jonhy a écrit: A suivre, le prochaine épisode de: Mon parti sort d'une scission mais la priorité c'est de construire une opposition à la direction Laughing
fatigués des batailles fractionnelles.
Curieuse conception de la politique.
Ce sont les orientations erronées qui ont affaibli le NPA ou c'est le Saint Esprit ?
La définition d'orientations, leur application, les erreurs, leur critique et/ou autocritique,
c'est la vie des révolutionnaires.
Appeler ça "bataille fractionnelle", c'est de la gestion de caserne.
Pas besoin du NPA pour ça. Il y a beaucoup d'orgas comme cela, tranquilles,
qui ne servent que leurs chefs et finalement le système...
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Message  Toussaint Lun 13 Mai - 22:44

Quelle différence y a-t-il entre l'ancienne orientation du NPA et la nouvelle?

Je n'ai pas suivi, vous êtes de nouveau en préparation de congrès?
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Message  Copas Mar 14 Mai - 0:39

iztok a écrit:ha ben on en arrive aux fait, la direction majoritaire actuelle est bureaucratique et conservatrice. Oui rassembler après une scission et une crise interne est le minimum.
Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre comme idiotie ... Mais bon c'est le délire, la majorité de la PFY (sans parler des deux groupes de la Z qui sont arrivés à se diviser entre eux) se considère comme une opposition de gauche à l'intérieur de l'orga avec toutes les dérives en terme de pratiques et d'orientation que ça entraîne.

Pas de stratégie = pas de développement important = crise d'orientation = regroupements pour essayer d'élaborer des orientations (que ce soient celle de la tendance dirigeante ou que ce soit des oppositions).

C'est comme ça et ça dure...

Alors je trouve dommage que tu ne comprennes pas le moteur permanent des divisions dans le NPA.

Oui, il y a des gauches et des droites, mais au fond, c'est bien la panne stratégique qui produit les tensions allant au delà de la légitime existence de courants.

Les dérives en termes de pratiques et d'orientation n'ont jamais été le fait de la gauche du NPA qui a été de ce point de vue remarquablement disciplinée.
Il est assez surprenant de voir ce genre d’éructations accusant des camarades qui font plus qu'à leur tour le boulot se faire traiter presque de fractionnistes.

Cela permet surtout d'éviter le débat sur la stratégie demandé depuis des années et refusé parce que ça risquerait de diviser. Résultat, des difficultés à chaque moment.

L'histoire n'attend pas, et elle n'attendra pas un nouveau congrès du NPA, c'est maintenant qu'une stratégie novatrice doit être déployée, la situation politique globale a commencé à pourrir.

C'est cela dont on essaye de parler ici.

Je porte également critique de la PY mais reconnait qu'ils se placent dans le cadre d'une stratégie révolutionnaire, insuffisamment novatrice certes, inadaptée, mais existante (j'ai le même regard sur LO ou AL.

Pour la majorité dirigeante c'est bien plus compliqué à mon sens. Rassemblant des positions de bric et de broc, elle aboutit à des non-choix stratégiques qui pèsent sur une organisation entière.

Et forcement, logiquement des secousses internes persistantes, modérées par une situation où, de fait, il existe toujours en France des travailleurs radicalisés, des jeunes, qui créent un environnement toujours propice à du recrutement.

Les questions que nous traitons sur un forum sont des questions interessant le camp de l'émancipation. Il faut comprendre certains moteurs des divisions qui nous affectent .

Le principal a trait à l'inexistence d'une stratégie révolutionnaire fonctionnelle en France, quelque soient les courants qui se disent révolutionnaires.
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Message  Toussaint Mar 14 Mai - 0:45


Le principal a trait à l'inexistence d'une stratégie révolutionnaire fonctionnelle en France, quelque soient les courants qui se disent révolutionnaires. .

L'explication est convaincante.

Mais à quoi attribues-tu cela? puisque tu dis que cela affecte toutes les organisations révolutionnaires.


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Message  Estirio Dogante Mar 14 Mai - 7:56

Pas de stratégie = pas de développement important = crise d'orientation = regroupements pour essayer d'élaborer des orientations (que ce soient celle de la tendance dirigeante ou que ce soit des oppositions).

C'est comme ça et ça dure...

Alors je trouve dommage que tu ne comprennes pas le moteur permanent des divisions dans le NPA.

Oui, il y a des gauches et des droites, mais au fond, c'est bien la panne stratégique qui produit les tensions allant au delà de la légitime existence de courants.
Il y a toujours une stratégie, dite ou implicite.
Ce n'est pas "la panne stratégique" qui freine le npa.
C'est le manque de stratégie claire, c'est à dire, communiste.
Les divisions "de droite et de gauche" ne font que signaler une crise idéologique mais surtout l'abandon de la forme naturel d'organisation des grèves ouvrières et des partis ouvriers; le centralisme démocratique.
C'est à dire la libre discussion et l'unité d'action.
Y a t-il libre discussion?
Elle est impossible tant que des tendances trop diverses se trouvent "unies" dans une même organisation.

Y a t-il "unité dans l'action"? Non plus, et pour les mêmes raisons.

La "légitime existence des courants" est légitime si elle se justifie.
Mais si elle est un frein, ou devienne une auberge espagnole, il faut l'éliminer.
La discussion politique est essentiellement politique, c'est à dire une question d'idées au sein d'une organisation dont le but est l'action pour changer la société capitaliste.
Si ce droit se transforme en une porte ouverte pour que des tendances avec des orientations idéologiques très différentes viennent "à la pèche" (et ils ne pèchent pas d'ailleurs) c'est la recette certifiée pour la paralyse.

Peut-être que la médecine passe par un temps d'interdiction des tendances organisées observant à la fois la plus large démocratie politique interne. Démocratie politique que l'on confonds souvent avec la "démocratie" organisationnelle.
Bien sur je propose l'impossible, mais ...

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Message  Estirio Dogante Mar 14 Mai - 8:36

Le principal a trait à l'inexistence d'une stratégie révolutionnaire fonctionnelle en France, quelque soient les courants qui se disent révolutionnaires.
"Fonctionnelle" oui, mais si elle est "inexistante" c'est parce que le relativisme, le nationalisme, le révisionnisme, le dogmatisme la font impossible.

L'unité politique, essentielle aujourd'hui, elle se "transforme" pour les dogmatiques en "unité dans les luttes" ou "on se retrouve toujours dans les luttes" ce qui n'est qu'une démission (ou un sabotage ouvert) d'une perspective politique.

Les "courants qui se disent" se caractérisent plutôt par leurs défense de leurs chapelles(plus leurs "dirigeants" que la base) que par l'envie de bâtir une perspective politique pour les travailleurs.

Vu les urgences du moment, vu l'évidente paralysie voulue des directions syndicales, vu l'éparpillement des "luttes" (menées par là à l'échec) la nécessité d'une Plateforme Politique large qui puisse permettre d'unir tous ceux qui sont susceptibles d'être unis de le faire, marque l'EG comme un ramassis d'inutiles impuissants bons pour bavarder et rien d'autre.

Marque l'échec, qui est déjà un échec historique, du courant trotskyste incapable, comme toujours, non seulement de faire une unité indispensable, mais même de s'en rendre compte.
La direction politique de la classe ouvrière exige deux conditions indispensables:
L'unité du parti (et de sa direction) avec les masses. (Pour l'instant on en est loin)
La capacité d'unir les idées générales, les thèses scientifiques du marxisme, aux particularités de la vie politique nationale ou locale ou internationale, mais surtout nationale, qui est le terrain politique où ils agissent.
S'ils n'arrivent même pas à s'unir pour surmonter et appliquer ces principes de base, que est ce donc que l'on peut attendre d'eux?

La perspective est donc une nouvelle avancée de la bourgeoisie et une défaite lente, progressive, de toute une génération des travailleurs militants.

La faillite c'est aujourd'hui qu'elle se joue, et ce seront d'autres générations de prolétaires, appauvris, frappés par la défaite qui surgiront pour initier, encore une fois, le combat de classes.

Hélas, je ne suis pas sur qu'ils auront la conscience nette de l'échec des "révolutionnaires" d'aujourd'hui. La vie c'est comme cela, la logique des travailleurs elle reste toujours la même:
"Lutter, échouer,
lutter encore, échouer encore
ainsi jusqu'à la victoire"

La perspective qui cherche Copas, la voila. La désunion, l'échec et la perte d'une génération des militants trompés par le dogmatisme d'abord, le révisionnisme et le relativisme.

Sauf si, dieu le veut et le diable fait la sourde oreille, les révolutionnaires communistes (de n'importe quelle coterie et/ou sans coterie), passant par dessus leurs directions, finissent par s'unir, donner une perspective politique commune à la génération présente et foutent tous leurs "dirigeants" à la poubelle.

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Message  Copas Mar 14 Mai - 21:29

Toussaint a écrit:
Le principal a trait à l'inexistence d'une stratégie révolutionnaire fonctionnelle en France, quelque soient les courants qui se disent révolutionnaires. .

L'explication est convaincante.
Mais à quoi attribues-tu cela? puisque tu dis que cela affecte toutes les organisations révolutionnaires.


J'avais commencé à traiter la question dans ce fil en partant de la compréhension et l'analyse de la société actuelle, ses évolutions, une analyse des classes en présence, leurs dynamiques, leurs formes d'organisation, etc, dans le monde, et en Europe.
J'ai estimé que le débat stratégique repassait par là, une compréhension des évolutions, de la poussée des forces productives dans le monde et en France, bref une analyse un peu plus sérieuse que les foutaises racontées en rond dans la gauche révolutionnaire française.
Je n'ai pas les moyens en formation pour mener plus loin la question de l'analyse mais les conneries les plus grosses les incompréhensions ne me semblent pas faire de doute.
Ce départ de la discussion fut salopé une série de fois par les braillements laissés libres court d'un débile du POI.

Pas de stratégie sans analyse profonde de la société, de ses évolutions, des formes d'organisation empruntées par les classes et leurs couches particulières (ce qui marche et ne marche pas, etc).

Je demeure persuadé que, pour ce qui est du NPA, ce n'est pas la question d'apparaitre en Mr Plus qui permet d'avancer mais la réaffirmation d'une stratégie claire et lisible du processus par lequel les travailleurs résistent affrontent la bourgeoisie et peuvent prendre le pouvoir.
Cela doit être opposé à l’irréalisme actuel des petits partis du FdG qui veulent accompagner le mvt social pour le courber vers des objectifs dans les institutions de l'appareil d'état. Cet irréalisme est particulièrement cruel en période de crise car il ne donne strictement aucune perspective aux problèmes brulants et immédiats des masses.
Le réformisme actuel n'est pas dans le débat des moyens nécessaires de la résistance des masses pour qu'elle bloque et repousse les offensives de la bourgeoisie puis passe à la contre-offensive.

Mais précisément cette question n'est pas vraiment tranchée dans le NPA, sauf de façon abstraire et superficielle.

Par ailleurs, la crise des organisations de résistance de masse en France et en Italie n'est pas traitée. Pendant qu'on se masturbe en rond copieusement sur les restes de bataillons de partis réformistes racornis, excentrés en grande partie de la classe ouvrière, on néglige complétement la crise des grandes orgas syndicales, leur fragmentation, leur division, on néglige les possibilités et opportunités d'en développer de nouvelles pouvant emprunter des chemins peu orthodoxes, ou de recomposer, reconstruire les anciennes.

Si des indignés espagnols et portugais ont réussis à faire bouger des morceaux de masse du prolétariat que les organisations réformistes traditionnelles de masse étaient devenues incapables d'organiser et mobiliser , c'est que ces franges de masse sont mobilisables mais qu'on pose mal le problème pour les façons de les organiser et les mobiliser.
Ils ne l'ont pas fait par un front unique version racornie mais ils l'ont fait. Et c'est là le véritable front unique qui nous importe.

Ce n'est qu'un exemple de disponibilités qui se sont recomposées autrement que prévu, et il faut être très attentif à cela. Et ce n'est pas sauter sur tout ce qui bouge.
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Message  gérard menvussa Mar 14 Mai - 22:27

Si des indignés espagnols et portugais ont réussis à faire bouger des morceaux de masse du prolétariat que les organisations réformistes traditionnelles de masse étaient devenues incapables d'organiser et mobiliser , c'est que ces franges de masse sont mobilisables mais qu'on pose mal le problème pour les façons de les organiser et les mobiliser.
Il faut peut être revenir au point de départ, c'est a dire à nos analyses politique (celles qui justement induisent la possibilité d'une stratégie) Personnellement (mais je n'ai pas de certitudes absolues) il me semble que le gros déficit est là, et que le mépris de tout débat "théorique" au npa a conduit a des ravages. Car la question n'est pas sur l'urgence d'une révolution (c'est a dire d'un "changement de référentiel") mais sur les moyens qu'elle se donne. Aujourd'hui, il n'y a pas de réponse toute faite disponible. Si certains ont des réponses, qu'ils se hatent de nous les proposer. Mais par exemple, le "gouvernement des travailleurs" avancée par la "gauche révolutionnariste" est tout aussi inconsitante (et défend tout autant des intérets de boutique, n'en déplaise à Roseau) que la "république constituante" chére à Mélenchon.
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Message  Copas Ven 17 Mai - 7:18

Sur le fond et pour caricaturer :

Nous, développer le mvt d'une classe afin qu'il soit lui-même, par son développement, l'issue politique (les travailleurs eux-mêmes, etc), les projets d'unité de groupes politiques, etc, ne doivent pas avoir d'autres finalités que le cheminement vers cette démocratie de type nouveau qui permette réellement d'unifier les travailleurs dans le mvt. Le futur état. Auto-organisation, soviets, coordinations, syndicats de base, etc, tous mvts n'ayant pas pour ambition de délimiter politiquement mais d'organiser démocratiquement une partie très majoritaire de la classe (au sens large) dans la bataille de classe, même pour des avancées d'un millimètre.
Le rôle des partis est intense là dedans et doit obliger à certains moments à prendre des initiatives quand la situation est favorable de les prendre (voir extraits de Esther Viva là dessus à verser au débat), même si l'unité de partis ne se fait pas, même si, plus grave, l'unité syndicale n'y est pas. Donc parti puissant, de masse et délimité.

Eux, le FdG, etc, développent le mvt social pour le courber à des objectifs institutionnels dans l'état. Les positions conquises dans l'état étant censé permettre après de redescendre, prendre des mesures favorables à une classe et passer graduellement au pouvoir des travailleurs.
Dans la période de crise intense que nous vivons, il y a très peu de marges pour cette stratégie qui a tendance historiquement à finir en défense de la bourgeoisie.
Mais concretement, nous pouvons participer avec des tas de militants syndicaux à une grande partie de la bataille sociale, ainsi qu'avec les bases des petits partis réformistes sur une partie du chemin. Mais dés que le mvt social atteint une taille qui risque de poser d'autres questions le réformisme, style FdG, retire l'échelle, manœuvre pour retirer l’échelle et arrêter l'élan de la mobilisation .


Donc ci-dessous, à verser au débat cet nterview d'Esther Vivas qui démontre que des fractions importantes du prolétariat moderne, jeune, instruit, précaire, sont mobilisables, et c'est ce que nous a prouvé le M15 par des chemins hétérodoxes aux conceptions racornies de front de petites alliances entre petits partis réformistes.

Les chemins pour débloquer une situation politique et sociale sont divers et les révolutionnaires ne doivent rien rater qui fasse progresser la mobilisation populaire, même d'un millimètre.

Cela fait partie du champ stratégique et il s'agit d'avancer sur ce qui est possible, dés lors que la situation le permet.

Pour de larges couches du prolétariat précaire et instruit, hors du champ des vieilles orgas ouvrières de masse, la remontée de leur disponibilité à la bataille peut prendre divers traits.

Autres éléments stratégiques de la question de l'organisation ré-organisation d'une classe, toutes les questions portant sur la régénération d'un syndicalisme de type nouveau, unitaire à la base vers le sommet (articulé pour le parti par l'impulsion d'une politique de mobilisation autour d'un pôle lutte de classe syndical, inter-syndical et extra-syndical, qui ne se confonde pas avec la construction du parti dans la classe).
Qui prendra soin de ne pas racornir la résistance sociale à des revendications n’intéressant qu'une petite partie du mvt de résistance face à des attaques au fond de même nature.

Construire reconstruire le mvt social dans les entreprises et favoriser dans les franges de masse précaires désertiques des mvts de masse de mobilisations dont les mvts sociaux ibériques nous donnent quelques pistes sont les deux mâchoires d'une contre-offensive pouvant avoir quelques possibilités de débloquer la situation.

D'aucune façon là dedans, des alliances en soi avec des petits partis réformistes peuvent débloquer la situation dans les masses, car elles sont systématiquement manipulées vers des objectifs institutionnels et excentrés de la classe ouvrière, excentrées (encore plus grave) du mvt réel de la classe ouvrière.


Interview d'Esther Vivas (extraits)
Etat espagnol : Deux ans après- « Le Mouvement du 15-M nous a redonné confiance dans le ‘nous’ pour pouvoir changer les choses » Esther VIVAS

Esther Vivas est une combattante infatigable de la résistance civique, membre du Conseil Scientifique d’ATTAC, activiste et chercheuse en mouvement sociaux et en politiques agricoles et alimentaires. Elle est en outre diplômée en journalisme et fait partie du Centre d’Etudes sur les Mouvements Sociaux de l’Université Pompeu Fabra de Barcelone. Elle est auteure de plusieurs livres, dont le plus récent est « Planeta Indignado. Ocupando el futuro » (Sequitur, 2012).

Avec Josep Maria Antentas, elle y explique les caractéristiques du Mouvement du 15-M, ou mouvement des Indignés qui, au cours du printemps 2011, a occupé les places de plusieurs villes espagnoles. Un mouvement citoyen pacifique qui promeut une démocratie réelle et plus participative.

En tant que chercheuse en mouvements sociaux et comme activiste, comment définirais-tu ces mouvements ?

Un mouvement social est un groupe de personnes qui partagent une certaine identité collective et qui se mobilisent par des canaux non institutionnels pour changer une situation déterminée. Il y a des mouvements sociaux très divers qui cherchent à transformer la société dans des aspects déterminés en considérant que les pratiques menées à bien par le gouvernement dans ces domaines ne sont pas correctes.

Aujourd’hui, on remet en question le système actuel, dans le cadre de la crise aiguë que nous sommes en train de vivre. Et ce contexte favorise l’émergence d’organisations sociales et de mouvements qui posent la question d’autres politiques. Ils défendent et exigent, par exemple, un logement digne, un enseignement et une santé publics et de qualité, etc.

Nous sommes au deuxième anniversaire du mouvement du 15-M ; quel bilan en tires-tu ?

Je pense que l’impact le plus important du 15-M et des Indignés s’est produit dans l’imaginaire collectif, autrement dit dans la manière de percevoir le monde et dans la capacité de mettre en question ce qui nous à conduit à la situation présente de crise. En outre, il nous a redonné confiance dans le « nous » pour pouvoir changer les choses.

Depuis le début de la crise, les différents gouvernements qui se sont succédé dans l’État espagnol nous ont répété à satiété que nous « avions vécu au dessus de nos moyens » et ils nous ont fait nous sentir complices, voire coupables, de la situation. Mais le 15-M a rompu avec ce discours hégémonique et a construit un discours contre-hégémonique. Nous ne sommes ni coupables ni complices de cette situation car nous en sommes les victimes. Le mouvement a été capable de créer un discours alternatif, en générant un changement de mentalité dans l’imaginaire des gens.
Qui sont les responsables directs de cette situation ?

Les coupables sont les élites économiques et financières qui, avec le soutien de la caste politique actuelle, nous ont conduits à cette situation de banqueroute. Ce sont eux qui ont « vécu au dessus de leurs moyens » et ont spéculé dans l’immobilier, ont construit des milliers de logements qui sont restés vides.

Quelles sont les « idées-forces » de ce mouvement alternatif et sa nouvelle manière de faire de la politique à la base ?

Les médias disaient que c’était un mouvement apolitique, mais cela était faux parce que le mouvement revendiquait une autre politique, en comprenant la politique comme la lutte quotidienne pour nos droits, une politique à partir d’en bas, de la base.

Après l’émergence du 15-M, le mouvement a défini quelques principes qui le situent dans un axe idéologique de gauche : changer le monde et les politiques en faveur des gens. Et nous l’avons constaté dans les revendications qu’il défend : nationalisation des banques, démocratie réelle, politique au service des personnes, etc. Lors des campements du 15-M, il y avait de la politique. Elle ne se respirait pas seulement dans les déclarations et les discours mais aussi dans la pratique. L’occupation des places et les multiples activités qui s’y organisaient signifiaient la volonté de commencer à changer le monde ici et maintenant.

Dans le livre « Planeta indignado. Ocupando el futuro », vous affirmez que changer le monde n’est pas une tâche facile ni immédiate. Qu’il s’agit au contraire d’une course de fond où il y a plus que jamais besoin d’intelligence et d’imagination stratégique. En quoi se concrétise cette imagination indignée ?

Nous parlons de cette imagination parce bien souvent le système nous a inculqué qu’il n’est pas possible de changer les choses. Il nous dit que le système ne fonctionne pas mais qu’il n’y a pas d’autres alternatives. Et cela constitue une grande victoire du capitalisme : l’apathie, la résignation, la peur… Le triomphe du capitalisme, c’est que nous restions chez nous. Et l’émergence du 15-M a justement signifié tout le contraire. Les gens sont sortis massivement dans les rues et ont occupé l’espace public, les places.

Et nous avons vu que si nous nous indignions, nous organisions, luttions et désobéissions, nous pouvions alors changer les choses parce que nous sommes nombreux. Qu’il existe des alternatives au système économique actuel et que, si elles ne sont pas appliquées, c’est parce que ceux qui dirigent ne sont pas intéressés à les appliquer car ils ont des liens étroits avec les élites économiques et financières et qu’ils bénéficient tous de cette situation. De fait, la crise est l’excuse parfaite pour appliquer une série de mesure d’austérité largement planifiées.

Que signifie aujourd’hui être « anticapitaliste » ?

Il y a de plus en plus de gens qui peuvent se sentir anticapitalistes, qu’ils se définissent comme tels ou non. Parce que, actuellement, ce qui est clair aux yeux d’un nombre sans cesse croissant de personnes, c’est que ce système ne fonctionne pas. La crise a démasqué le capitalisme et a mis en évidence l’usure, l’avarice et la concurrence qu’il stimule et comment ce système place les intérêts particuliers d’une minorité au dessus des besoins élémentaires de majorité. Le capitalisme transforme des droits fondamentaux en marchandises.

Par exemple ?

On le voit avec l’accès au logement, le droit à l’enseignement et à une santé publique et de qualité, le droit à nous alimenter de manière saine. Un exemple : chaque jour dans l’État espagnol, on procède à 532 expulsions de logement alors qu’il y a 3 millions de logements vides. La loi hypothécaire est au service des banques et les politiques répondent aux intérêts d’une minorité financière. Être anticapitaliste, c’est être contre ce système et défendre un autre qui soit au service des gens et de la planète. Il semble sans cesse plus logique d’être anticapitaliste et anti-système que d’être pro-capitaliste ou pro-système.
Que penses-tu de la lutte menée par la Plateforme des Victimes des Hypothèques (PAH) ?

Il est important d’obtenir des victoires concrètes, de lutter et de ne pas faiblir, et ici le travail de la PAH est exemplaire. Elle a obtenu des victoires qui ont donné de l’oxygène au mouvement ; on a stoppé des expulsions, le PP a du accepter l’Initiative Législative Populaire – même s’il l’a ensuite enterrée - et la « bataille » de la PAH n’est pas encore terminée. La PAH représente l’espoir pour ceux qui vivent le drame des expulsions et une source d’inspiration pour tous ceux qui luttent.
Comment voyez-vous le probable « saut dans la politique » de certains mouvements sociaux ou de plateformes civiques ?

Je crois que les mouvements sociaux doivent toujours être indépendants par rapport aux organisations politiques. Mais il faut également souligner les limites de la mobilisation en soi. De mon point de vue, je pense que, pour changer les choses, au-delà de la lutte dans la rue et de la désobéissance qui sont indispensables, il est également fondamental de construire des alternatives politiques, antagonistes à celles d’aujourd’hui, qui défendent une autre pratique politique, loyales aux gens qui luttent et avec un programme de rupture avec le système. Sinon, en restant cantonnés aux mouvements sociaux, on risque de se limiter à être un lobby vis-à-vis de ceux qui dirigent.

Quelques exemples ?

C’est déjà arrivé en Argentine, en 2001, quand les gens sont sortis dans la rue en criant « Qu’ils s’en aillent tous ». Et tel fut le cas. Ils sont tous partis mais les mêmes de toujours sont revenus avec la famille Kirchner au grand complet.

On le voit aussi aujourd’hui en Islande : il y a une grande mobilisation sociale, les élections arrivent et sont remportées par une alliance entre le Parti Social-Démocrate et le Mouvement de la Gauche-Verte, on élabore une nouvelle constitution à partir d’en bas et ces partis finissent pas liquider l’initiative. Aux élections suivantes, la droite qui a mené le pays à la faillite remporte le scrutin. Je crois que tous ces cas doivent nous faire réfléchir sur la nécessité de construire une alternative politique à partir d’en bas.

De quelle manière les nouveaux mouvements sociaux utilisent-ils Internet pour diffuser leurs idéaux et mobiliser les citoyens ?

On ne peut comprendre aujourd’hui la protestation sociale sans analyser le rôle des réseaux sociaux. Ce sont des canaux d’information alternatifs aux médias traditionnels. Des instruments qui ont permis aux activistes d’expliquer à la première personne ce qui se passe, en se transformant en ce qu’on appelle des « journalistes citoyens ».

Ces instruments représentent un pas en avant dans la démocratisation de la communication, pour la rendre accessible à tous. Mais, ce qui est indispensable, c’est de lier l’utilisation de ces instruments et réseaux aux mouvements qui luttent dans la rue. Ils doivent servir, en conséquence, pour amplifier ces luttes.

Les revendications et les stratégies du mouvement contre la dette du Sud peuvent-ils s’appliquer en Europe ?

S’il y a plus de 10 ans on se solidarisait avec la lutte contre la dette extérieure des pays du Sud (en 2000 on a organisé ici un référendum populaire qui avait recueilli plus d’un million de votes et qui revendiquait que les pays du Sud n’aient pas à rembourser une dette illégale et illégitime), aujourd’hui, une décennie plus tard, nous voyons comment la problématique de la dette est arrivée en Europe.

Et nous mobilisons pour refuser de payer une dette injuste et illégale que nous réclament et nous imposent les banques et les marchés. En conséquence, nous avons beaucoup de choses à apprendre des luttes en Amérique latine (mais aussi en Asie et en Afrique) contre l’endettement. En Équateur, le gouvernement de Correa, avec le soutien des mouvements sociaux, a réalité un audit pour savoir quelle partie de la dette réclamée par les institutions internationales était légitime ou non. Et on a prouvé qu’une partie de cette dette était illégitime, qu’elle n’avait bénéficié qu’à des élites politiques et économiques et le gouvernement a décidé de ne pas la payer. Il faut démonter le mythe que la dette ne peut qu’être payée. Ce n’est pas le cas. Pourquoi devrions-nous payer une dette qui n’est pas la nôtre ?
Esther Vivas

Je ne partage pas tout mais il est clair que la compréhension de ce type de mvt de masse c'est la compréhension de la disponibilité au combat d’une partie des masses pourvu que la formule chimique organisationnelle adéquate soit trouvée.
Il y a 2 ans l'état des agressions en Espagne et au Portugal étaient du niveau de ce qu'on voit aujourd'hui en France .

Les colères sont grandes, elles ne trouvent pas les expressions adéquates et progressistes pour s'organiser et avancer. Pour cela il faut des ruptures avec une conception politicienne du combat qui raccourcit la bataille dans la recherche exclusive d'un front unique de factions racornies et petites du réformisme institutionnel et bureaucratique.
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Message  Copas Sam 18 Mai - 20:09

Les secousses en Italie sur les recompositions politiques qui s'y déroulent après la catastrophe survenue aux dernières élections :

Da Bologna verso Ross@
Il documento finale dell’assemblea dell’11 Maggio

Per un movimento politico anticapitalista e libertario
Dichiarazione comune per un movimento politico anticapitalista e libertario

En Italie, il y a plusieurs initiatives qui existent cherchant à rassembler une gauche anticapitaliste. Cela se déroule dans une situation d'affrontements sociaux persistants et une situation sociale imprévisible comme cela a été démontré récemment à Brescia où une population révoltée et en masse a accueilli Berlusconi comme il faut, rien que sur un appel par mails et sms, sans grillisme mais avec la présence accompagnante de ce qui reste d'orgas de résistance sociale .

Ribellione a Brescia

La recomposition se fait dans des secousses sociales, le potentiel de révolte est grand, mais la capacité à s'organiser insuffisante et peu adaptée, politiquement, syndicalement, etc.

La contradiction de cette situation donne des indications de pistes stratégiques à explorer.

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Message  Babel Dim 19 Mai - 11:12

Voici un texte de Sabado de mars 2006 sur la question stratégique, publié dans la revue de feue la LCR, Critique Communiste.
Son contenu correspond à la "mise en forme d’un rapport fait à un stage de responsables nationaux de la LCR [s'efforçant d'opérer] une actualisation de certains éléments clés d’une stratégie révolutionnaire dans un pays capitaliste avancé."

L'occasion m'en est donnée par la lecture sur essf d'un texte d'Albert Guillot qui s'y réfère : "Politique de front uni chez Trotski, la « formule algébrique » et son mode d’emploi aujourd’hui"
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article28700

En dépit de sa longueur, il m'a paru utile de le reproduire ici intégralement, dans la mesure où il tente de faire le point sur un certain nombre de questions récurrentes à nos discussions en cours.

Quelques éléments clés sur la stratégie révolutionnaire dans les pays capitalistes avancés
SABADO François - mars 2006

Même si les rapports de forces à l’échelle mondiale restent largement défavorables au monde du travail, une série de facteurs remettent à l’ordre du jour une nouvelle discussion sur des questions stratégiques : telles que la crise du néo-libéralisme, la guerre en Irak et les menaces guerrières dans d’autres régions du monde, le remodelage social-libéral du mouvement ouvrier et ses contradictions, la discussion au sein de la gauche sur les questions gouvernementales, la profondeur de la crise sociale et politique en Amérique latine, les processus révolutionnaires au Venezuela et en Bolivie, la discussion impulsée par Chavez sur le socialisme du XXIe siècle. Il y a un retour des questions stratégiques.

1) Remarques sur l’histoire de nos débats sur les questions stratégiques.
L’histoire des discussions sur les questions stratégiques dans la LCR est marquée par deux étapes, la première, dans l’après Mai et jusqu’à la fin des années 70, à la faveur des situations pré-révolutionnaires de l’Europe du Sud, la deuxième se caractérisant plutôt par une absence de discussion. Dans cette première phase, les débats des années vingt dans l’Internationale communiste mais aussi une série de discussions autour d’expériences révolutionnaires furent revisitées. Mai 68 avait été analysé comme une répétition générale, à l’instar des rapports entre les révolutions de 1905 et 1917 mais notre analyse ne s’est jamais réduite aux problèmes russes. Nous avons, dès les années 70, distingué les spécificités de la révolution russe de celles des révolutions en Europe et en Amérique latine. Les stages de cadres de la Ligue, notamment sous l’impulsion d’Ernest Mandel, étaient centrés sur l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, le Chili.

Ces discussions stratégiques étaient en rapport direct avec une analyse de la période marquée, selon nous à l’époque, par une nouvelle actualité conjoncturelle de la révolution. Des situations pré-révolutionnaires étaient annoncées dans les quatre-cinq ans à venir en Europe. La stratégie de lutte armée était décidée en Amérique latine dans une perspective de conquête du pouvoir à court terme, dans des pays comme la Bolivie ou l’Argentine. Pour certains mêmes, « l’histoire nous mordait la nuque ».

Le retournement de période de la fin des années 70-début des années 80, avec un éloignement des perspectives révolutionnaires, ont stoppé ces discussions sauf quelques incursions dans les stages de cadres des années 86-87.

Le Manifeste [de la LCR] de l’année 1992 fait, par exemple, l’impasse sur ces questions. « Chute du Mur oblige », il fallait revisiter notre histoire - celle de la révolution russe et de la dégénérescence stalinienne - et actualiser nos fondamentaux. Question de priorité. Mais nous perdions le fil de la discussion stratégique. La différence est nette entre le Manifeste de 1992 et le Manifeste de 2005 reprise, même de manière modeste, quelques pistes stratégiques. Cela pose une première question. Les problèmes stratégiques ne peuvent évidemment pas être traités à l’identique selon les périodes, de montée révolutionnaire ou de reflux. Les discussions stratégiques des années vingt - montées révolutionnaires après la révolution russe - et celle des années trente - réactions révolutionnaires face à la montée du fascisme - sont différentes. L’approche des problèmes stratégiques lors du court siècle - 1914-/1991 - n’est pas la même que dans la période actuelle Les marxistes révolutionnaires, au-delà des caractérisations et des concepts recouvrant le phénomène stalinien, ont modifié bien de leurs approches stratégiques après la contre-révolution bureaucratique. Les rapports de forces entre les classes, les changements du capitalisme et les modifications internes de la classe ouvrière, l’effondrement du stalinisme, l’évolution social-libérale de la social-démocratie, l’émergence de nouveaux mouvements sociaux comme le mouvement altermondialiste, tout cela modifie le cadre et l’approche des questions stratégiques.

Cette discussion doit-elle être réservée aux seules périodes de montée des luttes de classes ou aux situations pré-révolutionnaire ou révolutionnaire, comme on l’a un peu pensé, implicitement, dans la Ligue ? Nous ne le croyons pas. Au-delà des difficultés ou des interrogations, la question de la révolution et les problèmes qui y sont liés doivent demeurer au centre de nos préoccupations. N’oublions pas que Léon Trotsky, même s’il pensait que la Seconde Guerre mondiale se transformerait en révolution, a écrit le Programme de transition en septembre 1938, après la défaite du prolétariat allemand en 1933, la défaite du prolétariat catalan en 1937 - date clé de la guerre d’Espagne - et en plein reflux du mouvement ouvrier français après les trahisons du Front populaire avant la défaite de la grève générale de novembre 1938.

2) Discussion sur la notion d’ « actualité de la révolution »
La notion d’« actualité de la révolution » a une double fonctionnalité : conjoncturelle mais aussi historique. Elle a été fonctionnelle dans la période post-révolution russe et dans toutes les périodes révolutionnaires de 1918-1923 en Allemagne, de 1934 à 1936 en France, en 1936-1937 en Espagne, les situations révolutionnaires de l’après guerre et celle des années 60 et 70 et les révolutions coloniales. Elle est utile pour caractériser des périodes historiques de montée de luttes de classes plus longues qui ont encadré des situations pré-révolutionnaires ou révolutionnaires.

Mais lors qu’on se replonge dans certains textes de Marx ou certains documents de Trotsky, après la période révolutionnaire des années 20, la question des perspectives révolutionnaires est présentée de manière plus ample. Rappelons ce passage de Marx dans les Grundrisse : « À un certain stade de leur développement, les forces productives matérielles de la société entrent en contradiction avec les rapports de production existants, ou ce qui n’en est que l’expression juridique, avec les rapports de propriété au sein desquels elles s’étaient mues jusqu’alors. Des formes de développement des forces productives qu’ils étaient, ces rapports deviennent des entraves. Alors s’ouvre une période de révolution sociale ».

Ernest Mandel donne, à son tour, l’explication suivante de ce passage dans ses notes sur Le Troisième Age du capitalisme. « Lorsqu’on évoque l’époque des révolutions, cela ne signifie pas du tout qu’aucun développement ultérieur des forces productives ne serait plus possible sans la chute de ce mode de production. Cela signifie seulement que, de ce point de vue, les forces productives qui continuent à se développer entrent en rébellion de plus en plus ouverte avec le mode de production existant et concourent à sa perte ».

L’horizon ou les perspectives révolutionnaires sont liées au caractère réactionnaire du capitalisme, à ses contradictions internes, au coût social du système de propriété capitaliste, à l’écart entre les possibilités de développement technologique, culturel, social de la société et les obstacles dressés par la course au profit capitaliste.

C’est aussi pour cette raison que l’époque de l’actualité des révolutions ou du socialisme est mise en relation avec la phase impérialiste du capitalisme.

Mandel rejette toute interprétation mécanique et catastrophiste des formules de Marx. Ce que Trotsky, reprenant Lénine, allait développer dans l’IC en 1926 : « La bourgeoisie peut-elle s’assurer une nouvelle époque de croissance capitaliste ? Nier une telle possibilité, compter sur une « situation sans issu » du capitalisme serait simplement du verbalisme révolutionnaire ». Et, il précise qu’il faut mettre en rapport les développements de l’économie capitaliste et les cycles de la lutte de classes : « Les reculs ou les défaites permettent aussi de nouvelles phases de stabilisation ou de relance du capitalisme », écrit-il dans L’Internationale communiste après Lénine.

Il nous semble utile d’avoir une telle approche, qui tient compte de l’analyse spécifique de chaque période tout en les intégrant dans une histoire qui reste celle du capitalisme, de ses contradictions, et de ses possibles révolutions. Banalité, peut-être mais rappel nécessaire dans une situation caractérisée par l’absence de révolutions en Europe capitaliste sur une longue période : 23 ans séparent la montée révolutionnaire en 1944-45 de celle de Mai 68 ; et il y a déjà presque 38 ans entre Mai 68 et 2006. De tels espace-temps expliquent que se perde le fil d’une discussion stratégique sur la révolution. Aussi est-il utile de revenir sur ces problèmes de périodisation.

Les « périodes de révolution sociale » résultent, donc avant tout, « d’un temps marqué par les contradictions fondamentales du capital ». Nos perspectives de transformation révolutionnaire renvoient à ces contradictions fondamentales. Elles tiennent compte de l’analyse spécifique de chaque période historique. Elles s’accélèrent et s’aiguisent lors de situations où la question du pouvoir est vraiment posée. Mais ce cap doit être conservé, quels que soient les cycles, longs ou courts, de la lutte de classes.

3) Qu’est-ce une stratégie révolutionnaire ?
La question centrale de toute stratégie révolutionnaire reste la conquête du pouvoir politique. Si nous avons abordé les questions stratégiques au travers de l’étude des crises révolutionnaires - ce qui était correct -, la Ligue a eu tendance à réduire la stratégie au seul moment de la crise révolutionnaire, voire même aux modalités politico-militaires de conquête de pouvoir, en particulier par l’étude des divers modèles - grève générale insurrectionnelle, guerre prolongée, guerres de guérilla, débats sur les modèles chinois, vietnamien, cubain - etc. S’il était correct de travailler ces questions, notre tendance a toutefois souvent consisté à réduire les problèmes stratégiques à un débat de modèles, alors que la stratégie englobe bien des dimensions dans la construction du sujet révolutionnaire. Cette tendance à la modélisation nous a d’ailleurs conduits à commettre des erreurs, en particulier en Amérique latine, en nous adaptant aux généralisations du modèle cubain, par les courants castristes.

Trotsky donne une définition plus générale des problèmes stratégiques dans la critique du projet de programme du VIe congrès de l’IC : « Avant la guerre, nous ne parlions que de la tactique du parti prolétarien, et cette conception correspondait exactement aux méthodes parlementaires et syndicales qui prédominaient alors et qui ne dépassaient pas le cadre des revendications et des tâches courantes. La tactique se limite à un problème particulier. La stratégie révolutionnaire couvre tout un système combiné d’actions qui, dans leur liaison et leur succession, comme dans le développement, doivent amener le prolétariat à la conquête du pouvoir. »

Un « système combiné d’actions » et la « conquête du pouvoir », c’est cette tension qui fait la stratégie révolutionnaire. Nous ne travaillons pas assez ce « système combiné d’actions » et son rapport aux questions gouvernementales.

Nous devons tenir les deux bouts de la chaîne : les modalités concrètes de formation d’une conscience anticapitaliste, d’une conscience socialiste à partir des expériences clé de la lutte de classe, et, de l’autre, une tension permanente vers le but final, le programme et la stratégie pour l’atteindre, en partant des spécificités de la révolution socialiste. Nous ne connaissons pas les formes des révolutions du XXIe siècle, mais nous sommes toujours confrontés à cette particularité de la révolution prolétarienne : Comment, de « rien », devenir « tout » ?

Les classes populaires peuvent conquérir des positions, obtenir des réformes partielles, « des germes de démocratie ouvrière dans la démocratie bourgeoise », mais ces conquêtes ne peuvent être pérennisées sans remplacer le pouvoir de la bourgeoisie par le pouvoir des travailleurs et de la majorité de la société. D’où la place stratégique centrale des crises révolutionnaires, où se nouent les ruptures qui modifient durablement les rapports de forces et le processus de formation d’une conscience socialiste. À la différence des révolutions bourgeoises, où la bourgeoisie était devenue classe dominante avant la révolution, le prolétariat ne peut devenir classe dominante qu’après la conquête du pouvoir politique.

Lénine avait à l’époque apporté de premières indications : les fameuses conditions d’une crise révolutionnaire développées dans La Maladie infantile du communisme, le gauchisme : « Ceux d’en haut ne peuvent plus, ceux d’en bas ne veulent plus, les couches ou classes du milieu basculent du côté de ceux d’en bas, et il y a une direction révolutionnaire - au sens direction, parti, et conscience de la classe, ajouterions-nous - pour conduire le processus ». Et il ajoutait avec Trotsky et les dirigeants de l’IC dans les pays capitalistes d’Europe : « Il sera beaucoup plus difficile de conquérir le pouvoir [par rapport à la Russie] et plus facile de le garder. » Il parlait du niveau socio-économique plus développé de ces pays par rapport à la Russie tsariste.

C’est dans ce sens, sans construire de modèles, qu’Ernest Mandel essaiera d’esquisser une typologie des révolutions futures, dans les notes de son livre Le Troisième Age du capitalisme : « La typologie future des révolutions socialistes dans les États fortement industrialisés se rapprochera vraisemblablement plus de celle des crises révolutionnaires d’Espagne des années 1930, de France de 1936 et 1968, d’Italie en 1948 et 1966-70, de Belgique en 1960-61 que des crises d’effondrement après la Première Guerre mondiale. »
Ces révolutions futures auront des connexions beaucoup plus fortes sur le plan continental et international. Les rapports entre un processus révolutionnaire qui commence sur le terrain national et sa projection sur l’arène mondiale sont aujourd’hui beaucoup plus forts que par le passé. Le contenu international - du moins dans les pays capitalistes avancés - des révolutions est plus marqué. En Europe, cela pose la question d’une stratégie ou au moins d’un programme européen.

Enfin, il nous incombe d’incorporer dans les grandes lignes d’une stratégie révolutionnaire moderne les leçons des révolutions du siècle dernier. Nous expliquons souvent que nous œuvrons à des révolutions « majoritaires » et « conscientes ». Majoritaires : ce qui implique des processus « révolutionnaires démocratiques »... donc avec de fortes tensions entre le chaos révolutionnaire et « les mécanismes de décisions démocratiques ». Conscientes : ce qui exige la préparation de la rupture révolutionnaire par une série de confrontations où les masses font l’expérience de la supériorité - même partielle - des solutions socialistes par rapport au capitalisme. Nous ne sommes jamais tombés dans une vision de la révolution comme l’œuvre « du grand soir », mais tant la complexification des sociétés que les leçons des expériences révolutionnaires doivent nous conduire à nous débarrasser de toute trace ou reste de ce type de conception.

Ces révolutions majoritaires et conscientes résultent aussi d’une réorganisation de l’ensemble du mouvement ouvrier. Nous pouvons sur ce point nous appuyer sur certaines des intuitions de Trotsky, avancées dans une discussion sur le programme de transition avec les dirigeants du SWP américain en 1938. Celui-ci expliquait qu’il y a trois conditions pour une nouvelle société :
a) « que les forces productives soient suffisamment développées et qu’elles entrent en contradiction avec les rapports de production » ;
b) « une classe progressive suffisamment forte socialement » [le salariat]
c) « la troisième condition, c’est la conscience politique ».

Nous sommes confrontés à une double difficulté, objective et subjective.
Objective, car il y a en même temps, extension du prolétariat à l’échelle mondiale, mais aussi augmentation des différenciations internes au salariat - techniques, statutaires, de genre, de nationalités... celle de la conscience de classe, percutée par ces nouvelles différenciations du salariat mais aussi par le bilan du siècle, des révolutions, les effets du stalinisme.

Il faut reconstruire de plus loin...

La question à la quelle nous sommes confrontés n’est pas seulement « la crise de direction », comme le présentait Trotsky dans le Programme de transition, mais une crise d’ensemble de direction, d’organisation, de conscience, d’où la nécessité de réorganiser, de reconstruire le mouvement ouvrier.

Il ne s’agit pas, comme dans les années 20 et 30, de substituer à la direction réformiste, centriste ou stalinienne, une direction révolutionnaire. Toutes ces substitutions étaient possibles parce que cela se faisait dans le cadre d’une même culture, dans un climat marqué par la dynamique révolutionnaire.

Le facteur subjectif ne se réduit pas, aujourd’hui, à la construction d’une direction révolutionnaire, voire à la construction du seul parti révolutionnaire. Il y a des problèmes d’expériences, d’organisation, de conscience du mouvement de masses. Il y a la nécessité de discuter des médiations, des tactiques pour avancer vers de larges partis anticapitalistes tout en se situant dans chaque pays sur le terrain de l’unité et de l’indépendance de classe pour construire dans les meilleures conditions la future direction révolutionnaire.

Aujourd’hui, sans repartir de zéro, en partant de la réalité actuelle du mouvement ouvrier, il faut donc reconstruire les pratiques, les organisations, les projets de transformation révolutionnaire de la société, mais sur la base d’une série de repères stratégiques décrits plus hauts.

4) La démarche transitoire
C’est un point faible dans l’histoire du mouvement ouvrier français dominé par le jacobinisme - la pression étatiste - et le stalinisme - la négation de l’autoémancipation. Mais c’est aussi un point faible dans l’histoire de la LCR depuis Mai 68. Faiblesse que nous reprochait souvent Ernest Mandel, et qui était peut-être, aussi liée, à une approche trop centrée sur le moment même de la crise révolutionnaire, au détriment des préparatifs.
C’est au travers d’une démarche transitoire que doit se redéployer notre problématique stratégique.

Elle intègre les revendications immédiates - compatibles avec la logique capitaliste - et les revendications intermédiaires, contradictoires avec cette logique. Elle combine les formes de lutte quotidienne, qui respectent la légalité bourgeoise, et les actions de masses anti-capitalistes, qui transgressent la légalité. Elle rejette la séparation entre programme minimum et programme maximum. Une stratégie révolutionnaire est simultanément stratégie d’usure et d’affrontement. Elle comporte des périodes offensives et défensives, des phases de repli et d’assaut, en fonction de la lutte de classes.

Voici comment Trotsky définissait la problématique transitoire : « Il faut aider les masses dans le processus de leur lutte quotidienne à trouver le pont entre leurs revendications actuelles et le programme de révolution socialiste. Ce pont doit consister en un système de revendications transitoires partant des conditions actuelles et de la conscience actuelle de larges couches de la classe ouvrière et conduisant invariablement à une seule et même conclusion : la conquête du pouvoir par le prolétariat. »

Tous les mots ont leur importance :
« quotidienne » « revendications actuelles », « conscience actuelle ». Le point de départ, ce sont les revendications immédiates des classes populaires.
« Système de revendications transitoires » : Trotsky souligne le caractère combiné des revendications.
« Conquête du pouvoir politique ». La conclusion du processus, c’est la rupture révolutionnaire.

Les actions de masse ont en général pour objectif la satisfaction immédiate des besoins. Il est donc important que la stratégie révolutionnaire lie à ces besoins des revendications qui ne puissent être intégrées à l’ordre socio-économique capitaliste mais au contraire, déclenchent une dynamique anti-capitaliste, qui conduise à l’épreuve de force entre les deux classes déterminantes de la société. La conscience des masses ne peut se développer dans un sens révolutionnaire que ci celles-ci accumulent des expériences de lutte qui ne se limitent pas aux revendications partielles réalisables dans le cadre du système capitaliste . Elle résulte aussi des revendications qui partent de besoins immédiats et posent la question du pouvoir ou de la propriété.

Les exemples suivants peuvent illustrer comment avancer des revendications qui répondent aux besoins immédiats des masses et posent la question du pouvoir ou de la propriété.
La question de l’eau et du gaz dans certains pays d’Amérique latine, tels que la Bolivie, ou celle du pétrole au Venezuela, posent tous les problèmes de la souveraineté nationale, du contrôle et de la gestion populaire.
La question des occupations de terre dans les pays où la réforme agraire est un enjeu central : C’est aujourd’hui, par exemple, le cas du Brésil. Ces occupations de terre ne sont pas, en général, incompatibles avec le système, mais, dans le cadre de l’économie capitaliste mondialisée, elles sont incontestablement des points de déséquilibre, des points de rupture.

La remise en marche par les travailleurs de certaines entreprises condamnées à la faillite par leurs patrons. Ces expériences sont partielles et indiquent qu’un autre fonctionnement de l’économie est possible avec une gestion ouvrière ou sociale. Ces expériences, sont liées à des expériences exceptionnelles de montée du mouvement des masses : c’est le cas des usines abandonnées ou fermées au Venezuela avec une co-gestion mixte entre les salariés et l’administration publique. Ces expériences d’occupation, de contrôle de cogestion et, dans certaines conditions, de coopératives ont été l’une des expressions de la situation pré-révolutionnaire en Argentine en 2001-2002. Le problème s’est posé, de manière limitée au travers de certaines expériences de contrôle ou de gestion dans les années 70 en Italie et en France. Il effleure dans les mobilisations de Nestlé ou dans la chaussure à Romans.

La démarche transitoire que nous devons construire se cristallise aussi au travers d’une série de revendications avancées dans un plan de mesures d’urgence social et démocratique : des mesures réelles, sérieuses, immédiates mais aussi visant une redistribution des richesses et des propositions de réorganisation de l’économie en fonction des besoins sociaux et non de l’économie capitaliste.

La question de l’interdiction des licenciements, sous la forme d’un ensemble de propositions ou de lois qui remettent en cause le pouvoir, l’arbitraire patronal, est une des principales revendications transitoires. Elle part du refus élémentaire du licenciement et débouche sur l’idée de la nécessaire incursion dans la propriété capitaliste pour réaliser la revendication.

Le refus des privatisations implique non seulement le retour dans le giron du secteur public de tout ce qui a été privatisé par la droite et la gauche, mais aussi une réorganisation de l’appropriation publique de secteurs clé de l’économie.
Cette démarche doit avoir un prolongement européen...

Le point de départ de ces revendications se situe dans le refus de la contre-réforme libérale et de ses mesures. Leur débouché et leur efficacité impliquent l’affrontement avec les classes dominantes et le système capitaliste. Il y a un lien organique entre anti-libéralisme et anticapitalisme. Et quand on sépare l’anti-libéralisme de l’anticapitalisme, on limite la portée même de la revendication anti-libérale : c’est ce qui se produit avec les programmes qui ne s’attaque qu’aux excès de la « financiarisation » ou de la « marchandisation » sans prendre en compte la logique d’ensemble des rapports sociaux capitalistes. Pour être anti-libéral conséquent, il faut s’attaquer à la propriété capitaliste et poser les problèmes d’appropriation publique et sociale. Cette démarche d’ensemble n’est pas ultimatiste. Elle peut se concrétiser sur quelques revendications qui peuvent servir de points clés, par exemple, pour une campagne électorale.

Derrière le système des revendications transitoires, se cache l’enjeu suivant : l’accumulation d’expériences sociales qui déstabilisent le système, indiquent une autre organisation économique et sociale, et montrent les capacités du salariat dans cette perspective. Gramsci aborde cette question avec son « concept d’hégémonie politico-éthique ». La classe opprimée doit conquérir des positions au sein de la société avant de conquérir le pouvoir politique. Bien entendu, dans une situation normale, cela reste de la propagande et des expériences à portée limitée. Mais dans une situation d’accélération sociale, cela s’intègre dans tout une période préparatoire à la conquête du pouvoir politique.

5) Le front unique
La politique de front unique a une double dimension : stratégique et tactique.
Stratégique, car si la révolution est un processus majoritaire et « l’émancipation des travailleurs, l’œuvre des travailleurs, eux-mêmes », les classes populaires doivent surmonter leurs différenciations et divisions internes. Différenciations sociales liées à la place spécifique dans le processus de production et plus généralement dans la vie sociale, mais aussi divisions politiques liées à l’histoire du mouvement ouvrier, à la cristallisation de courants et d’organisations. Leur unification sociale et politique est une des conditions d’une transformation révolutionnaire.

Trotsky, indique d’ailleurs les racines de la politique de front unique dans ce passage sur l’Allemagne (La Révolution allemande et la bureaucratie stalinienne, 1932) : « Le prolétariat accède à la prise de conscience révolutionnaire non par une démarche scolaire mais à travers la lutte de classes qui ne souffre pas d’interruptions. Pour lutter, le prolétariat a besoin de l’unité de ses rangs. Cela est vrai aussi bien pour les conflits économiques partiels, dans les murs d’une entreprise que pour des combats politiques « nationaux » tels que la lutte contre le fascisme. Par conséquent, la tactique de front unique n’est pas quelque chose d’occasionnel et d’artificiel, ni une manœuvre habile, non elle découle complètement et entièrement des conditions objectives du développement du prolétariat ».

Ainsi le front unique répond à l’objectif stratégique suivant : unifier le prolétariat - la classe ouvrière au sens large, ceux qui sont contraints de vendre leur force de travail - au cours d’un processus révolutionnaire, pour le transformer de classe dominée en classe dominante de la société. Pour stimuler ce développement, ce mouvement doit créer les conditions de « l’indépendance de classe » des travailleurs vis-à-vis de la bourgeoisie, et viser l’auto-émancipation et l’auto-organisation des classes populaires, condition fondamentale pour la transformation révolutionnaire de la société. Ainsi, tout en précisant à chaque étape de la lutte de classes son contenu et ses formes, la recherche de l’unité des travailleurs et de leurs organisations est une donnée permanente de la politique des révolutionnaires.

Mais la politique de front unique est aussi une tactique politique, qui dépend des objectifs généraux d’une politique révolutionnaire. Rappelons qu’une politique révolutionnaire ne se réduit pas à la tactique de front unique. Bien d’autres aspects liés à la lutte politique, la définition des objectifs, la délimitation entre courants et organisations, la construction d’organisations sont des maillons indispensables de l’activité des révolutionnaires.
Ensuite, la tactique reste subordonnée à la stratégie : « Le problème historique n’est pas d’unir mécaniquement toutes les organisations qui subsistent des différentes étapes de la lutte de classes mais de rassembler le prolétariat dans la lutte et pour la lutte. Ce sont des problèmes absolument différents, parfois même contradictoires » (Trotsky, Comment vaincre le fascisme ?).

Les formes et le contenu d’une tactique de front unique peuvent brusquement changer, notamment en situation de crise. La question du front unique a un contenu, explique Trotsky : « La campagne du front unique doit s’appuyer sur un programme de transition bien élaboré, c’est-à-dire un système de revendications transitoires - avec un gouvernement ouvrier et paysan - qui doit assurer la transitions au socialisme. »
Pour autant, tout notre programme ne doit pas être un préalable à l’unité. Mais cela doit nous mettre en garde sur l’unité en soi, l’unité sans contenu.

Dans la politique de rassemblement des travailleurs pour la lutte, les conflits avec les réformistes peuvent atteindre des points de rupture : « Si les réformistes sabotent la lutte, contrecarrent les dispositions de masse, nous nous réservons le droit de soutenir l’action jusqu’à la fin, sans nos demi-alliés temporaires, à titre d’organisation indépendante... Ce sont les masses qui décident. À partir du moment où les masses se séparent de la direction réformiste, les accords perdent tout leur sens. Perpétuer le front unique signifierait ne pas comprendre la dialectique de la lutte révolutionnaire et transformer le front unique de tremplin en barrière. Pour les marxistes, le front unique est seulement une des méthodes de la lutte de classes. Dans ces conditions données, la méthode est complètement inutilisable : il serait insensé de vouloir construire un accord avec les réformistes pour l’accomplissement de la révolution socialiste. » (Comment vaincre le fascisme ? Trotsky).

En effet, comme l’explique, Daniel Bensaid, « Le front unique a toujours un aspect tactique. Les organisations réformistes ne le sont pas par confusion, inconséquence ou manque de volonté. Elles expriment des cristallisations sociales et matérielles... Les directions réformistes peuvent donc être des alliés politiques tactiques pour contribuer à unifier la classe. Mais elles demeurent stratégiquement des ennemis en puissance. Le front unique vise donc à créer les conditions permettant de rompre dans le meilleur rapport de forces possible avec ces directions, au moment de choix décisifs, et d’en détacher les plus larges masses possibles. » (Crise et stratégie, 1986).

Ses conditions d’application dépendent aussi des rapports de forces sociaux et politiques globaux, et en particulier des rapports de forces au sein du mouvement ouvrier. C’est un problème que Trotsky pose, d’ailleurs, dans la discussion avec les communistes français en 1922 : « Si le Parti communiste ne représente qu’une minorité insignifiante... son attitude à l’égard du front de classe n’a pas une importance décisive. Le problème du front unique ne se pose pas lorsque le PC, comme en Bulgarie, représente la seule force politique. Mais là où le PC constitue une force politique sans avoir encore une valeur décisive, là où il embrasse soit le quart, soit le tiers de l’avant-garde prolétarienne, la question du front unique se pose dans toute son acuité. »

La question du front unique est une question centrale dans un pays comme la France de 2006, mais elle ne se pose pas dans les mêmes termes avant 68, après 68 ou aujourd’hui avec l’évolution sociale libérale du mouvement ouvrier, la crise des PC et les nouveaux espaces pour une politique anti-capitaliste.

6) La grève générale
Une des questions clé pour notre orientation stratégique et tactique consiste à créer les conditions de l’intervention directe des salariés, des classes populaires sur la scène politique et sociale. Pour réaliser cet objectif la grève générale représente une figure centrale dans notre stratégie.

La grève générale apparaît comme l’hypothèse de renversement du capitalisme, dès la fin du XIXe siècle. D’abord comme jaillissement de l’énergie ouvrière opposée par les anarchistes à la vieille tactique éprouvée de la social-démocratie, tactique liée à la conquête graduelle de positions parlementaires. Il s’agit pour les anarchistes d’opposer le mouvement de masse extra-parlementaire à la tactique parlementaire de la social-démocratie.

Rosa Luxembourg reprendra la perspective de grève générale, en dépassant le débat anarchistes-socialistes, et en essayant de lier dynamique du mouvement de masse et perspective politique. « La grève de masse, telle que nous la montre la révolution russe, n’est pas un moyen ingénieux inventé pour donner plus de force à la lutte prolétarienne. Elle est le mode du mouvement de la masse prolétarienne, la forme de la lutte prolétarienne dans la révolution. » Depuis, l’hypothèse stratégique de la grève générale active - « grève générale révolutionnaire » disaient nos camarades espagnols dans les années 70 - reste, sous de nouvelles formes, la variante la plus probable du déchaînement des masses contre l’ordre établi..
Aujourd’hui, les rapports de forces entre les classes en Europe ne mettent pas à l’ordre du jour l’éclatement de telles grèves générales. Mais cette conjoncture historique spécifique remet-elle en cause l’hypothèse stratégique ? Aucune des thèses qui relativisent le rôle stratégique des grèves générales et des manifestations centrales n’ont été vérifiées lorsque le mouvement des masses se met en branle, et les chemins empruntés par celui-ci lors de certaines situations pré-révolutionnaires en Amérique latine ont plutôt tendance à redonner force et vitalité à certaines figures stratégiques classiques.

La grève générale a plusieurs dimensions : ce n’est pas une « grosse journée d’action », elle est le cadre d’un mouvement politique de la classe ouvrière, elle permet son expression indépendante, elle a ses organisations - les comités de grève ou le comité central de grève -, elle a une fonctionnalité dans l’affrontement avec l’État : la paralysie de l’économie, des axes de circulation stratégique. Elle crée le cadre d’une remise en marche de la production... Dans les métropoles capitalistes à forte composition de salariat, c’est la forme par excellence de l’intervention directe de la classe ouvrière. Mais la préparation de ces grèves générales passe aussi dans l’intervention quotidienne, par les propositions pratiques de coordination, centralisation des luttes, par une propagande et agitation flexible pour créer les conditions de mouvements d’ensemble de la classe ouvrière.

On peut lui ajouter ou la combiner à la succession de grandes manifestations de masse qui paralysent un pays, le problème étant à chaque fois de trouver les formes qui expriment la force du mouvement de masse, sa radicalité et son efficacité pour paralyser l’État bourgeois.. Les dernières explosions sociales ou expériences de situations pré-révolutionnaires, en Amérique latine à nouveau, rappellent l’importance lors des moments forts d’affrontements de classes des grèves générales et des manifestations de masses, y compris insurrectionnelles.

Enfin, la « grève générale » seule ne résout pas en soi la question de la stratégie de conquête du pouvoir. « Elle pose la question du pouvoir, elle ne le résout pas », dira Lénine. Pour cela, il faut l’accompagner de formes d’organisation et d’une perspective de pouvoir gouvernemental.

7) L’auto-organisation
Dans la reconstruction d’une pratique auto-émancipatrice, l’auto-organisation a aussi un caractère stratégique.

Ces structures peuvent apparaître lors d’une lutte ou d’une grève sous la forme de comités de lutte ou de comités de grèves élus par les assemblées générales.
Dans toutes les périodes de type pré-révolutionnaires ou révolutionnaires apparaissent ce type de structures. Elles émergent en général, de problèmes concrets ou dans des situations où le peuple tente de se doter de nouveaux instruments pour prendre en charge l’organisation de la vie dans l’entreprise ou dans la cité. Leur appellation varie au gré du temps et des lieux où elles se mettent en place : « soviets », « comités d’usine » en Russie..., « commissions internes » en Italie, élections de délégués d’entreprise en Allemagne, Comités et milices en Espagne, commissions de travailleurs, shops stewards en Angleterre, Jap (juntes d’approvisionnement) commandos communaux, cordons industriels (union locale des syndicats de la CUT) au Chili, commissions de travailleurs, de moradores au Portugal... Elles peuvent aussi démarrer à partir de formes ou d’institutions bourgeoises légales prévues par les institutions en place : élections de délégués, mise en place, de structures d’approvisionnement.

Bref, les formes d’auto-organisation peuvent être diverses et les révolutionnaires ne fétichisent pas telle ou telle forme. L’essentiel, c’est l’expression unitaire démocratique de la dynamique du mouvement des masses avec un objectif : mettre en place des mécanismes de représentation les plus directs du mouvement de masses.

Au début des conflits, ce la peut prendre une forme de front unique des organisations ouvrières ou alors des formes combinées, mais dans le feu de la lutte, il faut des structures qui représentent le plus fidèlement possible la réalité du mouvement de masse. De ce point de vue, si A. Nin, dirigeant du POUM en Espagne, a eu raison de mettre en avant l’ « alliance ouvrière » dans les années 1934-36 comme forme du front unique des organisations ouvrières, il a eu tort de vouloir remplacer les milices ou comités, produits de l’insurrection de juillet 1936, par l’unité formelle des organisations. Derrière cette substitution, il y eut un déplacement du rapport de forces : l’aile marchante - CNT, POUM, Gauche socialiste - de la révolution reprenait sa position subordonnée vis-à-vis des directions du PCE, du PSOE et de la bourgeoisie républicaine. Il s’agissait là d’un retour en arrière.

Pas de formalisme, d’autant que éclatement et division des formes d’auto-organisation sont des problèmes auxquels on peut être confronté dans situations de montée du mouvement de masses. Cela a été un problème majeur en Argentine entre « les association ou comités de vecinos » et le mouvement « piquetero », entre les syndicats et les « piqueteros » : plus de 2336 barrages au point le plus fort en 2002, plusieurs centaines de milliers de personnes engagées. La division des partis fragmente aussi l’auto-organisation. Chaque parti a son mouvement de masse... C’est aujourd’hui un problème clé en Bolivie, entre la COB, les assemblées de Lo Alto, les mouvements indigènes, mais aussi à une échelle moindre, dans certaines mobilisations sociales en Europe (les exemples de coordinations, organisées autour de telle ou telle organisation politique).
Lié au problème de l’unité, il y a les problèmes de centralisation : lorsqu’il y a division, fragmentation corporatifs ou sociaux il ne peut y avoir de centralisation.

Ces expériences ont en commun leur explosivité sociale mais aussi leur déficit de conscience pour une transformation radicale de la société, qui a aussi des conséquences sur l’organisation la direction.

Ces structures sont-elles incapables de prendre le pouvoir et de réorganiser la société ? Nous ne le croyons pas.
Déjà les austro-marxistes voulaient les reléguer à des structures « socio-économiques » tout en laissant le pouvoir à une assemblée nationale parlementaire.
D’autres reprennent aujourd’hui cette thèse à leur manière, en expliquant que « les formes d’auto-organisation devront trouver leur place, sans être institutionnalisées. Mais, surtout sans prendre le pouvoir ».

Les limites d’une situation révolutionnaire et les faiblesses d’organisation et de direction n’ont pas permis - sauf en Russie, avec les limites que l’on connaît - des phases durables de pouvoir d’auto-organisation. Mais, dans tous les mouvements de masses d’une certaine ampleur et, à fortiori, toutes les crises révolutionnaires, il y a l’aspiration des mouvements sociaux à se doter de premières formes d’auto-émancipation. Cela crée les conditions d’émergence de nouvelles structures de représentation du mouvement populaire. Sans tomber dans une quelconque vision linéaire du développement du mouvement de masse, cela peut prendre la forme d’assemblées générales, de comités d’action, de comités de grèves, demain de conseils communaux ou de travailleurs. Notre rôle consiste à chaque fois à tester les possibilités de nouvelles structures d’auto-organisation, à les créer, les centraliser comme forme de la représentation populairetout en donnant la priorité à l’organisation des citoyens et des salariés dans leurs communes et leurs entreprises. Il y a là un souci de cohérence entre notre projet pour une autogestion socialiste et l’importance donnée au « socialisme par en bas ».

8. La dualité de pouvoirs
Là aussi, les dernières expériences de situations de crise sociale et politique pré-révolutionnaire posent les questions de dualités de pouvoir, toujours sous des formes « spécifiques ». Elles résultent de nouvelles formes de représentation populaire, combinant l’organisation du mouvement de masses et une crise des institutions existantes, pouvant mettre à l’ordre du jour des processus constituants. Cela a été le cas au Venezuela où des élections à une assemblée constituante sont prévues en août prochain, sous une énorme pression du mouvement de masse. Là encore, lorsqu’un processus révolutionnaire s’approfondit, de nouvelles structures de représentation populaires apparaissent, de nouvelles légitimités contre le vieil appareil d’État central se créent : comités mais aussi structures communales ou locales du type « municipalités rouges » ou « zones libérées ». Un processus de confrontation et de dualité de pouvoirs se développe qui passe aussi par des crises, des fractures des vieilles structures institutionnelles existantes. Les vieilles coquilles peuvent même devenir l’enveloppe de nouveaux pouvoirs.

C’est l’exemple de la « Commune de Paris », où la vieille commune sera régénérée avec la sève de l’explosion populaire qui la constituera en organe du pouvoir populaire. Le Chili, des années 1970-73 avec les JAP - juntes d’approvisionnement des quartiers populaires - et les cordons industriels - coordination zonale des syndicats - verra naître un début de dualité de pouvoir, à partir de structures mises en places par les pouvoirs publics ou la centrale syndicale. Un enjeu capital se pose alors : les nouvelles structures les plus efficaces dans l’organisation de la lutte doivent également montrer leur efficacité dans la résolution de problèmes quotidiens, se montrer plus démocratiques, plus représentatives : démontrer leur supériorité.

C’est là que se pose le problème de la confrontation avec l’État. En se généralisant, ce processus se heurte au droit de propriété, aux institutions et à l’État capitaliste. « Le droit à l’existence prend le pas sur le droit à la propriété » (convention de 1793), la démocratie des nouvelles structures représentant le peuple-assemblées d’usines ou de communes » prend le pas sur les anciennes structures. Il y a à ce moment contradiction et lutte entre l’ancien et le nouveau. Le « nouveau » pèse aussi sur la fragmentation des vieilles institutions bourgeoises. Les exigences démocratiques doivent être portées au sein des vielles institutions parlementaires ou municipales mais l’axe, la priorité pour dénouer la « dualité de pouvoir », c’est l’organisation propre, l’organisation indépendante du mouvement de masses.

L’expérience de la Commune de Paris a fait évoluer Marx sur la question de l’État pour lequel il ne s’agit plus de transformer l’État mais de le briser.

Les leçons de toutes les expériences révolutionnaires socialistes ou nationalistes révolutionnaires confirment la nécessité de détruire l’appareil de répression des classes dominantes. Et nous entendons dans ce sens, le noyau dur de l’État - armée, police, justice, appareil administratif central -, même si ces institutions peuvent sous la pression des événements révolutionnaires, se fragmenter et se diviser (ex des comités ou conseils de soldats, syndicats dans la magistrature etc.)

L’histoire montre que ce processus déclenche l’opposition et la répression des classes dominantes. Les forces fondamentales en lutte s’entrechoquent, s’affrontent, se déchirent au cours de moments stratégiques. Ce sont les moments de crise révolutionnaire, où se joue l’affrontement de classes, où les choses basculent... Il faut préparer ce ou ces moments-là... afin de concentrer les forces du mouvement d’en bas contre l’appareil d’État. La question du pouvoir se pose, et la dualité de pouvoirs doit alors se dénouer, d’un côté ou de l’autre. Les préparatifs révolutionnaires peuvent durer « plusieurs mois, plusieurs années », précise Ernest Mandel, mais les moments d’affrontements centraux sont toujours les plus décisifs.

L’objectif est alors de défendre le processus révolutionnaire. Nous ne sommes pas putschistes - « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes - mais nous ne sommes pas naïfs. Cette défense suppose d’agir « militairement » Sans pour autant apparaître comme l’agresseur. Léon Trotsky explique, dans des pages extraordinaires sur l’histoire de la révolution russe, que le CMR (Comité militaire révolutionnaire du soviet de Pétrograd) prend l’initiative de la prise du pouvoir tout en veillant à toujours conserver une position défensive : il fallait défendre Pétrograd contre les troupes de Kornilov qui allaient dégarnir la ville.

De l’histoire de ce siècle et des quelques révolutions, on retiendra donc l’importance du processus préparatoire. Mais le caractère décisif de la crise révolutionnaire, c’est le « moment » ou les « moments » où tout se joue, où certaines heures détermineront le cours d’une histoire pendant plusieurs décennies...

La question clé reste la conquête du pouvoir politique. Première spécificité de la révolution prolétarienne, les travailleurs ne peuvent instaurer de nouvelles relations sociales, ni conquérir durablement de nouvelles positions sans changement de toute la structure sociale et politique. Les contre-pouvoirs sont utiles, la lutte pour les réformes indispensable. Les expériences partielles de contrôle, d’autogestion dans les entre prises ou dans les communes sont décisives mais pas assez fortes pour entamer un processus de transformation des rapports sociaux. Il faut conquérir le pouvoir.

D’où les débats avec Holloway, et tous les courants de l’altermondialisation qui défendent la possibilité de changer le monde sans prendre le pouvoir. Il s’agit bien d’Holloway car il semble que les zapatistes évoluent sur cette question et ne font plus de nécessité vertu, en expliquant que leur lutte ne doit pas avoir de débouché politique. Ils ont d’ailleurs pris le pouvoir dans leurs zones du Chiapas. Les expériences révolutionnaires en Amérique latine montrent d’une part, la nécessité de stimuler le mouvement d’en bas, et d’autre part, l’importance décisive de l’impulsion d’en haut. Le rôle positif et les limites d’un Chavez montrent l’importance de la construction d’une alternative politique d’ensemble. La politique social-libérale d’un Lula exige une alternative politique, y compris électorale, s’orientant vers une rupture avec l’impérialisme et les marchés financiers. Les contre-pouvoirs ou l’addition de mouvements sociaux ne suffisent pas pour opposer une alternative au capitalisme libéral.

Bien entendu, dans toute l’histoire des luttes sociales, nombre de réformes, de nouveaux droits, de conquêtes sociales ont été obtenues sous la pression de rapports de forces et de mobilisations sociales... sans prendre le pouvoir !

Les révolutionnaires sont partisans de toutes les réformes qui améliorent les conditions de vie et de travail de la population. Ils sont attentifs ou partie prenante de toutes les expériences qui desserrent l’étau de la domination capitaliste. Ces mouvements sont décisifs mais ne suffisent pas à consolider les gains acquis sur le long terme - les classes dominantes reprennent souvent d’une main ce qu’elles ont concédé de l’autre - ni à changer de logique fondamentale et substituer une logique des besoins sociaux à celle du profit.

Dans la construction d’une alternative, ces expériences peuvent s’avérer des points d’appui indispensables mais, leur accumulation ne peut suffire à bouleverser les données fondamentales de la société. Elles se heurtent au pouvoir central.
Pour empêcher des modifications structurelles de la société, les classes dominantes opèrent un double verrouillage : sur l’État et sur la propriété capitaliste. La guerre en Irak, les tentatives ici et là de mettre sur pied des dispositifs étatiques ou para-étatiques en Europe ou en Amérique montrent d’ailleurs le rôle clé des États. L’État se redéploie mais il est là. La force de l’impérialisme américain, comme le pouvoir des multinationales, démontre l’importance de la propriété des capitaux et des grands moyens de production dans l’économie mondiale. Le pouvoir économique, militaire paraît plus disséminé que jamais mais il est aussi plus concentré que jamais.

Pour ouvrir la voie au changement, il faut défaire ce double verrouillage : l’État et la propriété. Sans une mobilisation sociale révolutionnaire qui brise la colonne vertébrale de la domination capitaliste - l’État - et qui substitue à la propriété capitaliste l’appropriation publique et sociale, les mécanismes de production et de reproduction du capital continuent à dominer.

9) Auto-organisation, démocratie.
Les rapports entre les institutions parlementaires, assemblées constituantes, et structures d’auto-organisation constituent un des problèmes clés d’une stratégie révolutionnaire, notamment dans les métropoles impérialistes.

L’axe, c’est l’auto-organisation, l’émergence, et la centralisation des structures de démocratie directe, au sens large : pas uniquement les « conseils d’usine » au sens « opéraiste », mais l’autogestion sociale et politique constituée en pouvoir politique..
Dans la perspective d’un nouveau pouvoir pour les travailleurs et les citoyens, il y a aussi place pour une logique de démocratie radicale appuyée sur des propositions de transformation des assemblées parlementaires : assemblée constituante unique, champ de compétences, proportionnelle, contrôle des élus, création de structure de démocratie directe, subsidiarité du local à l’échelle européenne dans le cadre de processus constituant.
Bref, le but poursuivi est la généralisation d’une démocratie radicale qui, à partir d’une transformation radicale de l’assemblée, ouvre la perspective de structures pour un nouveau pouvoir. C’est la problématique qu’avance Trotsky, en 1934, dans son projet de programme d’action pour la Ligue communiste de l’époque.

Ce processus constituant doit être utilisé pour stimuler un nouveau pouvoir de démocratie directe. Mais dans une situation révolutionnaire, l’efficacité démocratique de l’auto-organisation se heurte à l’appareil d’État.

Divers cas de figures se sont déjà présentés : soit l’assemblée constituante est emportée dans le tourbillon révolutionnaire et transmet ses pouvoirs aux nouvelles structures révolutionnaires, soit se met en veilleuse, soit elle s’oppose aux nouvelles formes de pouvoir auto-organisée provoquant ainsi un conflit. N’oublions que dans certaines crises révolutionnaires, Allemagne en 1918-19 ou au Portugal en 1974-75, l’Assemblée constituante a servi d’instrument contre-révolutionnaire. Il faut alors mettre l’accent sur les structures d’auto-organisation et leur centralisation. Tout ce processus n’est pas extérieur aux institutions de la démocratie bourgeoise, surtout dans les pays à vieilles traditions parlementaires - le processus révolutionnaire pèse sur ces dernières - mais l’objectif est la constitution d’un nouveau pouvoir. Nous ne pensons toujours pas - à la différence de certaines thèses austro-marxistes, « eurocommunistes » ou « réformistes de gauche » - que l’on peut conquérir le pouvoir en combinant « pouvoir populaire » et « conquête graduelle d’une majorité révolutionnaire dans le vieux parlement ». La prise du pouvoir politique nécessite de se débarrasser des vieilles institutions et à en construire de nouvelles.

Après la conquête du pouvoir, les problèmes se posent autrement, notamment au début d’une société de transition au socialisme : plusieurs assemblées élues au suffrage universel, peuvent coexister avec des assemblées territoriales et des assemblées issues d’élections dans les entreprises, même des assemblées représentant des minorités nationales. Assemblées qui auront le pouvoir, assemblées élues au suffrage universel.. Cette combinaison a été tentée de manière éphémère sous la Commune de Paris.
C’est la position de Rosa Luxembourg sur la dissolution de la Constituante en Russie. Elle se prononce pour la dissolution d’une assemblée qui ne correspond plus à l’État réel du pays et demande une nouvelle Constituante, c’est-à-dire, à côté du pouvoir des soviets, une assemblée élue au suffrage universel : « Sans élections générales, sans une liberté de presse et de réunion illimitée, sans une lutte d’opinion libre, la vie s’étiole dans toutes les institutions publiques, végète et la bureaucratie demeure le seul élément actif. »
Lorsqu’il y a conflit, c’est au peuple que le dernier mot revient.

10) Gouvernement ouvrier ou des travailleurs
La revendication du « gouvernement ouvrier » (« gouvernement des travailleurs » ou des « classes populaires ») est un mot d’ordre transitoire brandi dans une situation révolutionnaire, les années 20, ou à la veille de la Deuxième Guerre mondiale que Trotsky envisageait comme la répétition de la Première. Ce sont les formules développées dans le Programme de transition. Ces questions prennent en général une grande importance dans des situations de crise sociale et politique aiguë. Les débats que nous avons sur la ou les formules de gouvernements sont souvent éloignées de ce contexte.
Le gouvernement ouvrier est une formule transitoire de gouvernement, dans une situation de crise où les institutions du vieil appareil d’État ne sont pas encore détruites. Ce n’est pas encore le pouvoir des organismes populaires ou de la « dictature du prolétariat », mais ce n’est plus le fonctionnement normal des institutions bourgeoises. Ce n’est donc pas le synonyme de la dictature du prolétariat. C’est une possibilité de gouvernement intermédiaire vers la conquête du pouvoir par les travailleurs.

Aussi, toutes les formules de gouvernement ouvrier ou des travailleurs comportent en général des revendications immédiates mais aussi des objectifs liés au contrôle ouvrier, à l’expropriation des capitalistes, voire à l’armement du prolétariat. Dans des situations révolutionnaires, il y a une cohérence entre une politique de front unique et la proposition d’un gouvernement de rupture avec la bourgeoisie. Là, le « gouvernement ouvrier peut être le couronnement de la politique de front unique ». La base de l’unité d’action et du gouvernement est commune : ce sont des coalitions de forces révolutionnaires, réformistes de gauche, centristes ou nationalistes révolutionnaires, appuyées sur des organisations ou comité populaires. C’est, en faisant référence à la Russie de février à octobre 17, et l’Allemagne en 18 et 23, que Trotsky utilise ses formulations « exigeant des partis ouvriers la rupture avec la bourgeoisie ». Mais ces formules sont aujourd’hui frappées de relativité historique.

Deux remarques sur cette approche :
• a) Elle est étroitement liée à des situations révolutionnaires. Dans de nombreux documents, notamment sur l’Allemagne ou la France en 1922, Trotsky parle de « début parlementaire de la révolution prolétarienne ». Mais toutes ces expériences, même si elles peuvent avoir comme point de départ une majorité parlementaire doivent très vite trouver comme centre de gravité les organismes de dualité de pouvoir sinon ces gouvernements s’enlisent ou deviennent les otages des institutions bourgeoises. C’est ce que Trotsky a dénoncé comme « l’interprétation parlementaire » du gouvernement ouvrier. C’est malheureusement le travers où sont tombés certains militants révolutionnaires : en Saxe Thuringe, où les dirigeants du KPD firent dépendre les décisions d’insurrection du gouvernement légal du Land à dominante social-démocrate de gauche et pas d’un conseil des comités. C’est aussi l’expérience catalane en juillet et septembre 1936, où le POUM accepta la dissolution du « comité central des milices » pour entrer et reconnaître le gouvernement de la « Généralitat Catalana », comme gouvernement légal de la Catalogne.

Ces formulations s’inscrivaient dans un certain cadre historique marqué par la force propulsive de la révolution russe, où les partis réformistes et staliniens malgré leur dégénérescence avait encore des références à la révolution, à la « dictature du prolétariat » (la SFIO et Léon Blum dans les années 30), à la rupture avec le capitalisme, où une avant garde de plusieurs millions de militants ouvriers même réformistes étaient éduqués dans ce « bain idéologique ». Ces exigences de rupture avec la bourgeoise n’ont plus grand sens pour s’adresser aux formations social-démocrates, qui sont emportés par le social-libéralisme. Elles peuvent avoir dans certaines conjonctures politiques une certaine fonctionnalité vis à vis de la base militante de certains PC, sous la forme suivante « choisissez entre l’alliance social-libérale ou une alternative anti-capitaliste » en comprenant bien, que la dynamique du réformisme et celle de l’intégration - sur une longue durée - dans les institutions bourgeoises conduisent les appareils bureaucratiques des PC à s’adapter à l’ordre existant.

Ces modifications historiques du mouvement ouvrier ont des conséquences sur les problèmes de « politique actuelle » : il y a une certaine désynchronisation entre la politique d’unité d’action et la construction d’une alternative politique : nous sommes pour l’unité d’action de toute la gauche sociale et politique contre l’extrême droite, la droite et le patronat. Nous ne pensons pas possible de construire une alternative au capitalisme libéral avec le social-libéralisme. Il n’y a pas de logique autre qu’une logique parlementaire à rechercher « une majorité antilibérale contre la droite rassemblant toute la gauche-donc le PS et la gauche social-libérale ». Cette option « parlementariste » ne peut se faire qu ‘ détriment d’une accumulation de forces contre le capitalisme libéral.
Il peut y avoir, enfin, des cas spécifiques, dans les pays en voie de développement, où des gouvernements nationalistes révolutionnaires rompent avec l’impérialisme, même si c’est une rupture partielle. C’est le cas de Chavez au Venezuela. Trotsky avait donné quelques indications sur le gouvernement Lazaro Cardénas au Mexique dans les années 30 ou l’APRA au Pérou. Ces gouvernements qui s’opposent à l’impérialisme doivent être soutenus contre l’impérialisme, tout en gardant notre indépendance. Indépendance, car il y a bataille politique, lutte dans le camp « anti-impérialiste » entre révolutionnaires, réformistes, nationalistes, etc. Lutte politique mais soutien à un processus. Nous jugeons les mesures prises pour les classes populaires et les initiatives d’action et de mobilisation. D’où, par exemple, un soutien à ce qu’on appelle le processus de révolution bolivarienne.

Sur les questions gouvernementales, nos positions doivent, donc, combiner :
• a) l’indépendance vis à vis des gouvernements qui gèrent les institutions et l’économie capitaliste.
• b) le refus de participer à tout gouvernement qui gère les institutions ou l’économie capitaliste. Notre tactique étant déterminée par la politique et les décisions de chaque gouvernement, soutenant les mesures positives, nous opposant aux autres.
• c) une position déterminée par le cours du gouvernement en question- de l’opposition frontale -face au gouvernement Lula, aujourd’hui, gouvernement social libéral- au soutien - l’expérience de Chavez.
• d) et porter toujours l’effort sur le développement du mouvement de masses indépendant.

* Paru sous une forme un peu réduite dans « Critique communiste » n° 179 de mars 2006.
* François Sabado est membre du Bureau politique de la LCR (France).


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Message  gérard menvussa Mer 22 Mai - 18:48

Je suis trés emmerdé : parce que la question est difficile : théorie et pratique se rejoignent "quand on a gagné"... Avant....
"La téorie"' permet d'agir alors même qu'on a pas "tous les "éléments". Si la pratique était suffisante, personne ne se lancerait dans "la théorie", et des résultats trés aléatoires.....
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Message  Estirio Dogante Mer 22 Mai - 18:51

Mais...il n'y a aucune contradiction entre les deux énoncés...

Tant l'un comme l'autre son corrects.

Ce n'est parce que "Notre époque est caractérisée par la transformation rapide de la plupart des forces productrices du capitalisme en forces destructrices" qu'il ne peut pas avoir du développement des forces productives. Quant on parle lors d'une période de guerre cela est le cas; comme en 1940-1945, mais après les usines produisent des machines-outils au lieu des chars. Ou fait faillite, voir la courbe du chômage après les guerres.

D'ailleurs les forces destructives deviennent, ou aident les forces productives à terme (permettent une impulsion importante de l'économie capitaliste en faisant disparaitre les effets des crises par la guerre ou par la course à l'armement).

Comment explique t-on les 200 millions d'ouvriers en Chine, de la Russie, le développement industriel important de l'Amérique Latine par rapport aux années 1920, de l'Asie, de l'Afrique même?

Une tendance n'est que cela, une tendance. Soyez logiques.

Et cette phrase de Trotski "La guerre impérialiste a été l’insurrection des forces productrices, c’est-à-dire de la technique humaine contre l’homme qui, ayant su maîtriser la nature, n’a pas su maîtriser la société, n’a pas su créer une organisation du travail basée sur la raison et la solidarité ». n'est qu'une phrase jolie mais creuse. Comme il en a fait d'autres.

La guerre impérialiste a été une guerre des classes capitalistes concurrentes pour les marchés et les sources de matières premières et "l'homme" (c'est quoi ça?) depuis ces temps jusqu'à maintenant n'existe pas. Il existent des hommes (et femmes) divisés en classes sociales. Et ce n'est pas "la technique humaine" qui est égale à "l'insurrection des forces productives" ni ce n'est pas elle la cause des guerres mondiales.

La tendance à faire de la littérature de Trotski lui a joué de très mauvais tours, bref, il offrait des verges pour se faire contrer.




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