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Prostitution/Travail du sexe

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Message  Eugene Duhring Sam 7 Déc - 2:45

Rougevert a écrit:Hé oui, ma question est faussement ingénue.
Et je crains que les conséquences ne soient bien plus rapides que tu feins de le croire.
Je te rappelle que tu as écrit ceci, à quoi je te renvoie


Eugene Duhring a écrit:(...)
Sur la pénalisation des employeurs de travailleurs au noir, il ne viendrait à l'esprit de personne (sur ce forum aussi j'espère) de s'y opposer au motif que cela laisse les rapports d'exploitation capitaliste intacte, que cette main d'oeuvre va être marginalisée ou partir vers des cieux plus cléments au regard du code du travail et de son application, au regard aussi qu'il n'y a pas obtention d'un permis de séjour.
Sur ces deux exemples, on peut prendre le même parti que pour le refus de la pénalisation des clients, les arguments sont rigoureusement les mêmes : "nous sommes du côté des exploités, nous pensons que la loi ne règlera pas tous les problèmes, nous estimons que cette loi risque d'empirer les conditions de vie de ces exploités, en conséquence nous sommes opposés à la pénalisation des exploiteurs ... de tous les exploiteurs en généralisant".
Toutefois, sur ce forum s'exprime une opinion légèrement différente notamment chez Sylvestre et quelques autres forumeurs, qui est celle de la prostitution règlementée au même titre que n'importe quelle activité salariée ; la pénalisation des clients ayant donc une relation de frein à cette libre exploitation. Ce qui a pour conséquence de brouiller le débat et d'avoir des discussions disons ... pénibles.
Il ne s'agit pas seulement de pénaliser les clients, mais de prétendre ABOLIR la prostitution.
C'est de l'hypocrisie bourgeoise.

Nous sommes d'accord: la pénalisation de l'emploi de travailleurs clandestins n'a pas fait cesser le travail clandestin.
Mais jamais la loi n'a prétendu l'abolir: simplement le combattre.
Le principe moral nous plait, mais la pénalisation ne nous aide pas dans le combat pour l'égalité des droits et la légalisation des sans papiers.
Nous ne luttons pas en recherchant les patrons délinquants. Ce n'est jamais mis en avant.
Pour une bonne raison: leurs patrons arrêtés, les employés sont "interpelés" eux aussi par la police et expulsables.

Les inspecteurs du travail sont en nombre ridiculement insuffisants et tout est sous contrôle de la police.

Le cas de la prostitution est particulier: moins elle est publique, plus elle est dangereuse pour ses victimes.
Cetrte réformette d'opérette prétend ABOLIR la prostitution.
Il n'y a que les imbéciles pour croire à la fable gouvernementale de l'abolition de la prostitution. Néanmoins, je considère peut-être à tord nous verrons dans quelques années que la pénalisation des clients aura deux vertus : faire reculer la prostitution, provoquer le débat sur l'oppression de classe et particulièrement de GENRE par l'usage de la femme au service exclusif du plaisir des hommes. De classe du fait que la prostitution touche très majoritairement des femmes d'"en bas", mais interclassiste aussi du fait que son "usage" traverse toutes les couches sociales.
Concernant le travail clandestin, si je comprends ton argumentaire un peu brouillon, tu es contre la pénalisation des exploiteurs ? Je n'ai pas bien compris.

Eugene Duhring

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Message  verié2 Sam 7 Déc - 12:49

La discussion gagne en effet à être plus posée et débarrassée des outrances, insultes, falsifications et réductions de positions, hélas coutumières. Sinon, si c'est "Entre Boutin et DSK, il faut choisir son camp" comme entre "Khadafi et Sarkozy" ou entre "Bachar el Assad et Fabius", ça n'a vraiment aucun intérêt.
___
Quelques éléments de réflexion.

La comparaison avec la répression de la pédophilie. Ca ne fonctionne pas car, justement, ce n'est pas la répression qui peut faire reculer la pédophilie qui a un caractère pathologique. A l'inverse de la prostitution, socialement admise jusqu'ici voire valorisée, la pédophilie est un des comportements les plus réprouvés moralement qui soit.

La délinquance. Ce n'est pas non plus la multiplication des flics, l'allongement des peines qui va la faire reculer, contrairement à la surenchère sécuritaire, qui a pour but de plaire à une partie de l'électorat et non de régler le problème.

D'une manière générale, les révolutionnaires marxistes ne demandent pas à l'état bourgeois l'aggravation de la répression, l'augmentation du nombre de flics. Nous disons même que nous ne reconnaissons pas à la bourgeois et à son Etat, qui sont les pires prédateurs, le droit moral de condamner les petits délinquants, les artisans du crime. Ca vaut aussi d'une certaine façon pour les crimes moralement réprouvables. Nous ne demandons pas perpète voire la peine de mort pour le loubard qui a agressé une vieille dame pour lui voler sa chaîne en or. Même la répression du viol avait suscité un débat chez les féministes, souvenez vous. Fallait-il demander qu'un misérable violeur en prenne pour 20 ans ?

Pour en revenir à la prostitution, c'est une bonne chose que les clients soient moralement condamnés par la société et qu'il ne soit pas considéré comme "normal" d'"aller aux putes". Je n'irai certes pas manifester contre la pénalisation avec le STRASS ou d'autres associations, mais je ne soutiendrai pas non plus cette mesure hypocrite qui ne fera sans doute pas reculer la prostitution mais donne seulement bonne conscience aux politiciens bourgeois hypocrites qui défendent un système social engendrant la misère, donc la prostitution, la délinquance etc. Ces gens-là voudraient le capitalisme sans ce qui les dérange : la prostitution trop visible, la délinquance quand elle les touche eux, les pauvres qui deviennent violents au lieu de rester à genoux etc.

Ce sont ces principes que nous devons défendre et non cautionner l'hypocrisie bourgeoise et compter sur les flics de l'Etat bourgeois pour mettre fin à la prostitution comme aux autres maux.

verié2

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Message  Rougevert Sam 7 Déc - 16:35

Eugene Duhring a écrit: Il n'y a que les imbéciles pour croire à la fable gouvernementale de l'abolition de la prostitution. Néanmoins, je considère peut-être à tord nous verrons dans quelques années que la pénalisation des clients aura deux vertus : faire reculer la prostitution, provoquer le débat sur l'oppression de classe et particulièrement de GENRE par l'usage de la femme au service exclusif du plaisir des hommes. De classe du fait que la prostitution touche très majoritairement des femmes d'"en bas", mais interclassiste aussi du fait que son "usage" traverse toutes les couches sociales.
Concernant le travail clandestin, si je comprends ton argumentaire un peu brouillon, tu es contre la pénalisation des exploiteurs ? Je n'ai pas bien compris.
Sur les imbéciles, nous sommes d'accord.
Certains ont signé leur imbécilité, comme Martine Billard et Marie-George Buffet.
Sur l'aggravation de la violence, nous ne tarderons pas à voir qui avait raison.
Non, je ne suis pas contre (ni pour non plus) la pénalisation des exploiteurs: je suis pour la régularisation des sans papiers et l'égalité des droits.
Rougevert
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Message  Eugene Duhring Sam 7 Déc - 19:09

Rougevert a écrit:
Non, je ne suis pas contre (ni pour non plus) la pénalisation des exploiteurs: je suis pour la régularisation des sans papiers et l'égalité des droits.
Moi aussi je suis pour un monde heureux baignant dans un océan de sentiment fraternel où la faim et la soif dans le monde n'existent plus. Je suis pour le droit de chacun à porter des lunettes roses bien au contraire.
Hé bin avec ça on avance ...

Eugene Duhring

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Message  Achille Sam 7 Déc - 19:22

verié2 a écrit:La discussion gagne en effet à être plus posée et débarrassée des outrances, insultes, falsifications et réductions de positions...
Voyons voir

verié2 a écrit:...la pédophilie qui a un caractère pathologique.
...Pour en revenir à la prostitution, c'est une bonne chose que les clients soient moralement condamnés par la société et qu'il ne soit pas considéré comme "normal" d'"aller aux putes".
...bonne conscience aux politiciens bourgeois hypocrites qui défendent un système social engendrant la misère
...non cautionner l'hypocrisie bourgeoise et compter sur les flics de l'Etat bourgeois pour mettre fin à la prostitution comme aux autres maux.
sans commentaires. (bizarre il n'y a rien sur le NID, sur LO, ...etc... ça va venir.)


Dernière édition par Achille le Dim 8 Déc - 0:21, édité 1 fois

Achille

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Message  nestor Sam 7 Déc - 20:15

Bonjour,
 
merci a Toussaint d'avoir mis  en ligne le texte du  "Front des  Norvégiennes "(bizarre cette  détermination quand on s'affirme contre le déterminisme... ) le point 9 m'a fort éclairé
 
"En tant qu’homme (car, en général, ce sont les hommes de gauche qui utilisent cet argument !), ne voyez-vous vraiment pas de différence entre travailler dans une mine et masturber votre patron ? Ou entre une femme qui vient nettoyer votre bureau et une autre qui vient vous faire une pipe ? Vous, je ne sais pas, mais moi, si !

.......................

Peut-être devriez-vous essayer une nouvelle façon de voir la chose : ils ont nos corps, mais ils ne vont pas se mêler de notre désir !"
 
 
La derniére phrase  est significative d''un retour au dualisme ,  car sinon comment  nos corps seraient a eux  et pas notre "désir " ? Et   où serait le désir s'il était hors du corps ? , dans "l'esprit",;;;??...,  autrefois on disait l'âme ...
 
Ce dualisme  est la source de toutes les superstitions par la sacralisation d'une entité (âme, désir, esprit....) a la fois supérieure et  indéfinie  
 
Il permet  de relativiser l'exploitation du Travail  par le capitalisme (puisque cette exploitation  ne concernerait   que les corps et non le "désir" )  et les "norvégiennes" ne s'en privent pas ...
 
Cette  dichotomie est fausse ,   en neuroscience  on parle du "désir de récompense  " ,   ce désir est la clé de voute  du continuum évolutif de  la conscience et il est clairement objectivé  par des neurotransmetteurs  
 
Par conséquent  cette dichotomie  est fausse sur  le plan  économique  , le capitalisme  exploite toujours  le corps  ET le désir , le mineur ne désire pas travailler comme un forçat , l'ouvriere bengali du  textile ne désire pas brûler vive   dans son usine ...  
 
Enfin , si comme l'affirme  le "front des norvégiennes",  "chacun a le   droit  de vivre  la sexualité qu'il  souhaite" , je remarque que la sacralisation  d'un tel "désir" transcendant les    réalitées biologiques  aboutit toujours  au contraire  de cette liberté fondamentale , et c'est bien ce a quoi nous allons arriver avec de tels discours   .
 
Non seulement la prostitution perdurera sous des formes encore plus  dures  , ellle est inhérente au capitalisme,  mais la voie est ouverte   pour la normalisation du "désir " dont l'application sera aussi  obigatoire que la définition est  vague

nestor

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Message  Toussaint Sam 7 Déc - 20:34


Un entretien avec Christine Delphy – Politis


[Publié en octobre dernier et effectué par Ingrid Merckx, l'entretien suivant est extrait du n°1272 de la revue Politis. Je le reproduis avec l'aimable autorisation de Christine Delphy et d'Ingrid Merckx - merci à toutes deux.]

Le Lieu-dit, à Paris, était comble le 28 septembre pour la conférence organisée avec Christine Delphy à l’occasion de la réédition de son ouvrage phare. «L’Ennemi principal est un document de référence dans les études féministes. Ses deux tomes retracent l’évolution d’une pensée en mouvement», a souligné la sociologue Sylvie Tissot. Exemple : à propos du mariage pour tous, où Christine Delphy est passée du manque d’intérêt – «Ma génération était plutôt pour la suppression du mariage pour tout le monde» – au soutien. Une fracture s’est dessinée entre cette féministe « marxistematérialiste et radicale » et plusieurs jeunes auditrices à propos de la transsexualité. « Je ne vois pas en quoi soutenir une femme qui veut devenir un homme, et donc passer dans le camp de l’oppresseur, est un combat féministe », a-t-elle déclaré.

Environ trente ans se sont écoulés entre le premier article, éponyme, de l’Ennemi principal et le dernier article. Quelle différence d’impact entre alors et maintenant ?
Christine Delphy: Il n’y en a pas tant que ça. L’article le plus connu, « L’ennemi principal », porte sur les grandes structures du patriarcat et l’exploitation économique des femmes. Cela n’a, malheureusement, pas beaucoup changé. Le non-partage du travail dit  domestique est quasi le même. Le travail paraprofessionnel – que les femmes font pour leur mari sans recevoir de rétribution (comptabilité, accueil des clients, travaux en tous genres…) – a un peu diminué, notamment avec le déclin de l’agriculture. Mais de nouveaux métiers indépendants se sont créés. Et, dans ce domaine, on ne sait rien des inégalités.


Quels mouvements avez-vous opérés en trente ans ?
Je n’ai pas changé d’avis. « L’ennemi principal » est une sorte d’article programmatique que je n’ai cessé d’approfondir par chapitres. J’ai montré que les obligations des femmes persistaient dans le divorce, que la consommation présumée égale dans une famille est totalement inégale, que l’héritage n’est pas égalitaire. J’ai également développé la  démarche matérialiste en opposition à l’idéalisme et au naturalisme.

Vous avez toujours déploré le manque de reconnaissance par les marxistes de la spécificité de l’oppression féminine. Vos détracteurs sont-ils restés les mêmes ?
Mes détracteurs, de moins en moins nombreux, sont toujours ceux qui pensent que le capitalisme est la cause de tout. Le système patriarcal préexistait au capitalisme. Le système capitaliste n’a pas de raison de faire de différence entre les sexes. S’il en fait, c’est bien qu’il y a collusion entre capitalisme et patriarcat. Le capitalisme actuel appuie le système le plus spécifique de l’oppression patriarcale, soit l’extorsion de travail gratuit aux femmes. Car les femmes travaillent aussi sur le marché du travail et, là, elles sont sous-payées par rapport aux hommes. C’est encore plus évident dans les pays en développement. Maxence Van der Meersch, romancier du début du XXe, disait que les ouvrières étaient payées juste assez pour ne pas avoir de quoi vivre et être obligées de coucher avec le contremaître. Ce qui est quand même la base de la prostitution…

La pénalisation des clients n’a pas été abordée lors de votre conférence. Le sujet divise les féministes…
En effet, le sujet les divise, mais la majorité, dont moi, défend une pénalisation des clients pour lancer un message : ça n’est pas bien d’acheter les services sexuels de quelqu’un. Il faut changer les mentalités par rapport à cet acte. Il ne s’agit pas de mettre une fin brutale à la prostitution, ce qui reviendrait à pénaliser les prostituées, mais de commencer à faire comprendre aux gens que, finalement, la prostitution est un viol payé.
Je comprends les prostituées qui ont peur de perdre leurs clients. Malheureusement, il y aura toujours assez de clients. Dans la proposition « Abolition 2012 », il est question d’abolir le délit de racolage passif, supprimé par Mitterrand, rétabli par Sarkozy. C’est ce délit qui précarise les prostituées et non la pénalisation des clients. C’est vrai, avec la  pénalisation, la prostitution changera de forme, mais cela entraînera un changement de regard pour les générations suivantes. Un interdit n’a pas d’effets tout de suite.
La vérité, c’est que les gens qui, en France, défendent ce qu’ils appellent le «travail du sexe» voudraient que le proxénétisme cesse d’être un délit. Les pays qui ont « légalisé la prostitution » ont en fait légalisé le proxénétisme. Le débat semble être sur la prostitution, mais la prostitution n’est pas illégale en France, seul le proxénétisme l’est. Il existe un  débat masqué pour que les prostituées travaillent dans des centres ou dans des «cabinets», et éventuellement les unes pour les autres : que le proxénétisme ne soit plus  poursuivi.

Votre position sur  la transsexualité déclenche des réactions vives.  Cela vous surprend-il ?
La question de la transsexualité se pose beaucoup plus maintenant. Mais, dans cette démarche, on perd de vue la lutte féministe : pour la disparition du genre. Quand le mouvement a commencé, en 1970, c’était une réunion d’individus – on était féministe chacune dans son coin et on faisait ce qu’on pouvait –, qui est devenue une lutte  collective. Il semblerait qu’on abandonne l’idée de lutte collective pour une  transformation sociale. On parle d’actes de « subversion » individuelle ou de « résistance » individuelle. C’est le cas dans le mouvement queer. On a l’impression que tout ce qu’on  peut espérer, c’est mettre quelques grains de sable dans le système et non plus le défaire. Il reste bien des luttes collectives : contre la prostitution et les violences sexuelles, pour le respect du droit à l’avortement… Mais l’arrivée du queer me paraît rencontrer une  démarche individualiste pour que des personnes changent de catégorie, sans remettre en cause ces catégories.
Je m’intéresse aux subjectivités, et cette démarche doit être soutenue dans le cadre du droit à la dignité de chaque personne ; mais elle ne constitue pas un combat politique dans le sens où elle ne propose pas un changement des structures de la société.

Avez-vous le sentiment de ne pas retrouver aujourd’hui le combat de votre génération ?
Pour moi, envisager en priorité des changements individuels exprime une certaine  résignation. C’est ce que dit Judith Butler : on ne va pas changer le système, tout ce qu’on peut faire c’est jouer sur les marges. Je comprends, bien sûr, que des filles veuillent  devenir des garçons, et vice versa, mais je décèle une espèce de malentendu sur ce qu’est une structure sociale : peut-on généraliser le transsexualisme ? Est-ce une solution à l’existence de la hiérarchie des genres ?

Où en est la lutte féministe ?
Il y a régulièrement des périodes de stabilisation où l’on vous dit : aujourd’hui, c’est l’égalité. C’est le cas en ce moment où les hommes gagnent toujours 35 % de plus que les femmes tandis qu’ils n’effectuent que 20 % du travail domestique ; mais on laisse entendre aux femmes : « Mieux qu’aujourd’hui, vous n’y arriverez pas, ou alors vous allez perdre l’amour des hommes » – éternel grand levier ! Nous connaissons donc une période de reflux du féminisme. La grande majorité des femmes sont effrayées à l’idée de perdre  au change en poussant pour l’égalité. Mais ça va revenir. Je sens chez des jeunes  trentenaires une grande exaspération contre le système. La question, c’est : vont-elles être assez connectées entre elles ?

Propos recueillis par Ingrid Merckx
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Message  Toussaint Sam 7 Déc - 20:47


Prostitution and Male Supremacy

by Andrea Dworkin



Copyright © 1993, 1994 by Andrea Dworkin.
All rights reserved.




[Andrea Dworkin delivered this speech at a symposium entitled "Prostitution: From Academia to Activism," sponsored by the Michican Journal of Gender and Law at the University of Michigan Law School, October 31, 1992.]

I'm very honored to be here with my friends and my peers, my sisters in this movement.

I also feel an awful lot of conflict about being here, because it is very hard to think about talking about prostitution in an academic setting. It's really difficult.

The assumptions of academia can barely begin to imagine the reality of life for women in prostitution. Academic life is premised on the notion that there is a tomorrow and a next day and a next day; or that someone can come inside from the cold for time to study; or that there is some kind of discourse of ideas and a year of freedom in which you can have disagreements that will not cost you your life. These are premises that those who are students here or who teach here act on every day. They are antithetical to the lives of women who are in prostitution or who have been in prostitution.

If you have been in prostitution, you do not have tomorrow in your mind, because tomorrow is a very long time away. You cannot assume that you will live from minute to minute. You cannot and you do not. If you do, then you are stupid, and to be stupid in the world of prostitution is to be hurt, is to be dead. No woman who is prostituted can afford to be that stupid, such that she would actually believe that tomorrow will come.

I cannot reconcile these different premises. I can only say that the premises of the prostituted woman are my premises. They are the ones that I act from. They are the ones that my work has been based on all of these years. I cannot accept--because I cannot believe--the premises of the feminism that comes out of the academy: the feminism that says we will hear all these sides year after year, and then, someday, in the future, by some process that we have not yet found, we will decide what is right and what is true. That does not make sense to me. I understand that to many of you it does make sense. I am talking across the biggest cultural divide in my own life. I have been trying to talk across it for twenty years with what I would consider marginal success.

I want to bring us back to basics. Prostitution: what is it? It is the use of a woman's body for sex by a man, he pays money, he does what he wants. The minute you move away from what it really is, you move away from prostitution into the world of ideas. You will feel better; you will have a better time; it is more fun; there is plenty to discuss, but you will be discussing ideas, not prostitution. Prostitution is not an idea. It is the mouth, the vagina, the rectum, penetrated usually by a penis, sometimes hands, sometimes objects, by one man and then another and then another and then another and then another. That's what it is.

I ask you to think about your own bodies--if you can do so outside the world that the pornographers have created in your minds, the flat, dead, floating mouths and vaginas and anuses of women. I ask you to think concretely about your own bodies used that way. How sexy is it? Is it fun? The people who defend prostitution and pornography want you to feel a kinky little thrill every time you think of something being stuck in a woman. I want you to feel the delicate tissues in her body that are being misused. I want you to feel what it feels like when it happens over and over and over and over and over and over and over again: because that is what prostitution is.

Which is why--from the perspective of a woman in prostitution or a woman who has been in prostitution--the distinctions other people make between whether the event took place in the Plaza Hotel or somewhere more inelegant are not the distinctions that matter. These are irreconcilable perceptions, with irreconcilable premises. Of course the circumstances must matter, you say. No, they do not, because we are talking about the use of the mouth, the vagina, and the rectum. The circumstances don't mitigate or modify what prostitution is.

And so, many of us are saying that prostitution is intrinsically abusive. Let me be clear. I am talking to you about prostitution per se, without more violence, without extra violence, without a woman being hit, without a woman being pushed. Prostitution in and of itself is an abuse of a woman's body. Those of us who say this are accused of being simple-minded. But prostitution is very simple. And if you are not simple-minded, you will never understand it. The more complex you manage to be, the further away from the reality you will be--the safer you will be, the happier you will be, the more fun you will have discussing the issue of prostitution. In prostitution, no woman stays whole. It is impossible to use a human body in the way women's bodies are used in prostitution and to have a whole human being at the end of it, or in the middle of it, or close to the beginning of it. It's impossible. And no woman gets whole again later, after. Women who have been abused in prostitution have some choices to make. You have seen very brave women here make some very important choices: to use what they know; to try to communicate to you what they know. But nobody gets whole, because too much is taken away when the invasion is inside you, when the brutality is inside your skin. We try so hard to communicate, all of us to each other, the pain. We plead, we make analogies. The only analogy I can think of concerning prostitution is that it is more like gang rape than it is like anything else.

Oh, you say, gang rape is completely different. An innocent woman is walking down the street and she is taken by surprise. Every woman is that same innocent woman. Every woman is taken by surprise. In a prostitute's life, she is taken by surprise over and over and over and over and over again. The gang rape is punctuated by a money exchange. That's all. That's the only difference. But money has a magical quality, doesn't it? You give a woman money and whatever it is that you did to her she wanted, she deserved. Now, we understand about male labor. We understand that men do things they do not like to do in order to earn a wage. When men do alienating labor in a factory we do not say that the money transforms the experience for them such that they loved it, had a good time, and in fact, aspired to nothing else. We look at the boredom, the dead-endedness; we say, surely the quality of a man's life should be better than that.

The magical function of money is gendered; that is to say, women are not supposed to have money, because when women have money, presumably women can make choices, and one of the choices that women can make is not to be with men. And if women make the choice not to be with men, men will then be deprived of the sex that men feel they have a right to. And if it is required that a whole class of people be treated with cruelty and indignity and humiliation, put into a condition of servitude, so that men can have the sex that they think they have a right to, then that is what will happen. That is the essence and the meaning of male dominance. Male dominance is a political system.

It is always extraordinary, when looking at this money exchange, to understand that in most people's minds the money is worth more than the woman is. The ten dollars, the thirty dollars, the fifty dollars, is worth much more than her whole life. The money is real, more real than she is. With the money he can buy a human life and erase its importance from every aspect of civil and social consciousness and conscience and society, from the protections of law, from any right of citizenship, from any concept of human dignity and human sovereignty. For fifty fucking dollars any man can do that. If you were going to think of a way to punish women for being women, poverty would be enough. Poverty is hard. It hurts. The bitches would be sorry they're women. It's hard to be hungry. It's hard not to have a nice place to live in. You feel real desperate. Poverty is very punishing. But poverty isn't enough, because poverty alone does not provide a pool of women for men to fuck on demand. Poverty is insufficient to create that pool of women, no matter how hungry women get. So, in different cultures, societies are organized differently to get the same result: not only are women poor, but the only thing of value a woman has is her so-called sexuality, which, along with her body, has been turned into a sellable commodity. Her so-called sexuality becomes the only thing that matters; her body becomes the only thing that anyone wants to buy. An assumption then can be made: if she is poor and needs money, she will be selling sex. The assumption may be wrong. The assumption does not create the pool of women who are prostituted. It takes more than that. In our society, for instance, in the population of women who are prostituted now, we have women who are poor, who have come from poor families; they are also victims of child sexual abuse, especially incest; and they have become homeless.

Incest is boot camp. Incest is where you send the girl to learn how to do it. So you don't, obviously, have to send her anywhere, she's already there and she's got nowhere else to go. She's trained. And the training is specific and it is important: not to have any real boundaries to her own body; to know that she's valued only for sex; to learn about men what the offender, the sex offender, is teaching her. But even that is not enough, because then she runs away and she is out on the streets and homeless. For most women, some version of all these kinds of destitution needs to occur.

I have thought a lot in the last couple of years about the meaning of homelessness for women. I think that it is, in a literal sense, a precondition, along with incest and poverty in the United States, to create a population of women who can be prostituted. But it has a wider meaning, too. Think about where any woman really has a home. No child is safe in a society in which one out of three girls is going to be sexually abused before she is eighteen. 1 No wife is safe in a society in which recent figures appear to say that one out of two married women has been or is being beaten. 2 We are the homemakers; we make these homes but we have no right to them. I think that we have been wrong to say that prostitution is a metaphor for what happens to all women. I think that homelessness really is that metaphor. I think that women are dispossessed of a place to live that is safe, that belongs to the woman herself, a place in which she has not just sovereignty over her own body but sovereignty over her actual social life, whether it is life in a family or among friends. In prostitution, a woman remains homeless.

But there is something very specific about the condition of prostitution that I would like to try to talk about with you.

I want to emphasize that in these conversations, these discussions about prostitution, we are all looking for language. We are all trying to find ways to say what we know and also to find out what we don't know. There is a middle-class presumption that one knows everything worth knowing. It is the presumption of most prostituted women that one knows nothing worth knowing. In fact, neither thing is true. What matters here is to try to learn what the prostituted woman knows, because it is of immense value. It is true and it has been hidden. It has been hidden for a political reason: to know it is to come closer to knowing how to undo the system of male dominance that is sitting on top of all of us.

I think that prostitutes experience a specific inferiority. Women in general are considered to be dirty. Most of us experience this as a metaphor, and, yes, when things get very bad, when terrible things happen, when a woman is raped, when a woman is battered, yes, then you recognize that underneath your middle-class life there are assumptions that because you are a woman you are dirty. But a prostitute lives the literal reality of being the dirty woman. There is no metaphor. She is the woman covered in dirt, which is to say that every man who has ever been on top of her has left a piece of himself behind; and she is also the woman who has a purely sexual function under male dominance so that to the extent people believe that sex is dirty, people believe that prostituted women are dirt.

The prostituted woman is, however, not static in this dirtiness. She's contagious. She's contagious because man after man after man comes on her and then he goes away. For instance, in discussions of AIDS, the prostituted woman is seen as the source of the infection. That is a specific example. In general, the prostituted woman is seen as the generative source of everything that is bad and wrong and rotten with sex, with the man, with women. She is seen as someone who is deserving of punishment, not just because of what she "does"--and I put does in quotes, since mostly it is done to her--but because of what she is.

She is, of course, the ultimate anonymous woman. Men love it. While she is on her twenty-fourth false name--dolly, baby, cutie, cherry tart, whatever all the pornographers are cooking up this week as a marketing device--her namelessness says to the man, she's nobody real, I don't have to deal with her, she doesn't have a last name at all, I don't have to remember who she is, she's not somebody specific to me, she's a generic embodiment of woman. She is perceived as, treated as--and I want you to remember this, this is real--vaginal slime. She is dirty; a lot of men have been there. A lot of semen, a lot of vaginal lubricant. This is visceral, this is real, this is what happens. Her anus is often torn from the anal intercourse, it bleeds. Her mouth is a receptacle for semen, that is how she is perceived and treated. All women are considered dirty because of menstrual blood but she bleeds other times, other places. She bleeds because she's been hurt, she bleeds and she's got bruises on her.

When men use women in prostitution, they are expressing a pure hatred for the female body. It is as pure as anything on this earth ever is or ever has been. It is a contempt so deep, so deep, that a whole human life is reduced to a few sexual orifices, and he can do anything he wants. Other women at this conference have told you that. I want you to understand, believe them. It's true. He can do anything he wants. She has nowhere to go. There is no cop to complain to; the cop may well be the guy who is doing it. The lawyer that she goes to will want payment in kind. When she needs medical help, it turns out he's just another john. Do you understand? She is literally nothing. Now, many of us have experiences in which we feel like nothing, or we know that someone considers us to be nothing or less than nothing, worthless, but for a woman in prostitution, this is the experience of life every day, day in and day out.

He, meanwhile, the champion here, the hero, the man, he's busy bonding with other men through the use of her body. One of the reasons he is there is because some man has been there before him and some man will be there after him. This is not theory. When you live it, you see that it is true. Men use women's bodies in prostitution and in gang rape to communicate with each other, to express what they have in common. And what they have in common is that they are not her. So she becomes the vehicle of his masculinity and his homoeroticism, and he uses the words to tell her that. He shares the sexuality of the words, as well as the acts, directed at her, with other men. All of those dirty words are just the words that he uses to tell her what she is. (And from the point of view of any woman who has been prostituted--if she were to express that point of view, which it is likely she will not--the fight that male artists wage for the right to use dirty words is one of the sicker and meaner jokes on the face of this earth, because there is no law, no rule, no etiquette, no courtesy that stops any man from using every single one of those words on any prostituted woman; and the words have the sting that they are supposed to have because in fact they are describing her.) She's expendable. Funny, she has no name. She is a mouth, a vagina, and an anus, who needs her in particular when there are so many others? When she dies, who misses her? Who mourns her? She's missing, does anybody go look for her? I mean, who is she? She is no one. Not metaphorically no one. Literally, no one.

Now, in the history of genocide, for instance, the Nazis referred to the Jews as lice and they said, we are going to exterminate them. 3 In the history of the slaughter of the indigenous people of the Americas, those who made policy said, they're lice, kill them. 4 Catharine MacKinnon talked earlier about gender cleansing: murdering prostitutes. She is right. Prostituted women are women who are there, available for the gynocidal kill. And prostituted women are being killed every single day, and we don't think we're facing anything resembling an emergency. Why should we? They're no one. When a man kills a prostitute, he feels righteous. It is a righteous kill. He has just gotten rid of a piece of dirt, and the society tells him he is right.

There is also a specific kind of dehumanization experienced by women who are prostituted. Yes, all women experience being objects, being treated like objects. But prostituted women are treated like a certain kind of object, which is to say, a target. A target isn't any old object. You might take pretty good care of some objects that you have around the house. But a target you go after. You put the dart in the hole. That's what the prostitute is for. What that should tell you is how much aggression goes into what a man does when he seeks out, finds, and uses a prostituted woman.
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Message  verié2 Sam 7 Déc - 20:58

Christine Delphy
la majorité, dont moi, défend une pénalisation des clients pour lancer un message : ça n’est pas bien d’acheter les services sexuels de quelqu’un. Il faut changer les mentalités par rapport à cet acte. Il ne s’agit pas de mettre une fin brutale à la prostitution, ce qui reviendrait à pénaliser les prostituées, mais de commencer à faire comprendre aux gens que, finalement, la prostitution est un viol payé.
C'est en effet le principal argument valable en faveur de la pénalisation. Mais cette pénalisation changera-t-elle vraiment les mentalités dans le contexte actuel ? Dans une période de crise et de déliquescence de la société, les facteurs qui poussent au contraire à aggraver le sort des femmes et d'une manière général des catégories des plus faibles des classes populaires sont bien plus forts que les bonnes intentions et les lois. Il en est par exemple du sexisme comme du racisme - malgré la pénalisation (bien théorique) des propos et comportements racistes, on assiste tout de même à une montée du racisme sous ses diverses formes.

C'est pourquoi la pénalisation, non seulement sans la lutte contre les causes fondamentales de la prostitution mais accompagnée d'offensives anti-sociales dont les femmes sont parmi les principales victimes n'est qu'un gadget hypocrite. Les relations entre l'état de la société, son niveau de développement, les conditions sociales qu'elle offre à la population d'une part, et ses moeurs de l'autre, ne sont sans doute pas mécaniques, mais ils forment un ensemble indissociable.

Ce qui est gênant dans l'attitude des gens qui se revendiquent du marxisme et qui applaudissent de telles mesurettes, c'est qu'ils donnent l'impression de débattre avec les représentants de la classe adverse de la meilleure façon d'améliorer un peu leur système sur un point ou un autre et ainsi de cautionner leurs discours hypocrites et démagogiques,  sans commencer par mettre en avant ce qui est fondamental en affirmant haut et fort que ces comtesses, dames de charité et féministes de salon sont dans le camp des ennemis des femmes travailleuses et sont mal placées pour donner des leçons à qui que ce soit sur ce terrain.

verié2

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Message  Achille Dim 8 Déc - 0:30


verié2 a écrit:
Christine Delphy
la majorité, dont moi, défend une pénalisation des clients pour lancer un message : ça n’est pas bien d’acheter les services sexuels de quelqu’un. Il faut changer les mentalités par rapport à cet acte. Il ne s’agit pas de mettre une fin brutale à la prostitution, ce qui reviendrait à pénaliser les prostituées, mais de commencer à faire comprendre aux gens que, finalement, la prostitution est un viol payé.
verié2 a écrit:La discussion gagne en effet à être plus posée et débarrassée des outrances, insultes, falsifications et réductions de positions...
Voyons voir

verié2 a écrit:... ces comtesses, dames de charité et féministes de salon sont dans le camp des ennemis des femmes travailleuses et sont mal placées pour donner des leçons à qui que ce soit sur ce terrain.

Achille

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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 2:04

ces comtesses, dames de charité et féministes de salon sont dans le camp des ennemis des femmes travailleuses et sont mal placées pour donner des leçons à qui que ce soit sur ce terrain.
Very Happy Dès que les femmes emmerdent les hommes dans leur droit d'user de leurs corps, elles se prennent ce genre d'insultes.

Ce fut notamment le cas au début du mouvement féministe à la fin des années 60.

Vérié ne fait que reprendre, en défense du droit des clients à se payer des femmes, les mêmes méthodes des anciens gauchistes misogynes et méprisants à l'égard des théoriciennes féministes comme Delphy et d'autres. Il suffit de voir la liste de celles qu'il englobe de son mépris. Ci dessous la liste des comtesses, dames de charité et féministes de salon dont parle le compagnon de route du STRASS et du lobby proxénète. Concernant la CADAC et le CNDF, il serait savoureux de lister les assos, syndicats et partis qui les composent. Je souligne les comtesses et féministes de salon... Very Happy 

Amicale du Nid – Assemblée des Femmes - Association contre la prostitution des enfantsAssociation européenne contre les violences faites aux femmes au travail – Association femmes libres – Association française des femmes des carrières juridiques – Association Les Effronté-E-s – Centre de recherches internationales et de formation sur l’inceste et la pédocriminalité – Centre national d’information sur les droits des femmes et des familles – Chiennes de garde – Choisir la cause des femmes – Clara Magazine – Coalition against trafficking in women – Collectif Alouette – Collectif féministe contre le violCollectif fier-e-s et révolutionnaires du Parti communiste français – Collectif lesbiennes féministes ba-ham – Collectif national droits des femmes – Comité permanent de liaison des associations abolitionnistes du proxénétisme – Commission genre et mondialisation d’ATTAC – Conseil national des femmes françaises – Coordination des associations pour le droit à l’avortement et à la contraception – Coordination française pour le lobby européen des femmes – Coordination lesbienne en France – Elu/es contre les violences faites aux femmes – Encore féministes ! – Ensemble l’égalité c’est pas sorcier – Equipes d’action contre le proxénétisme – Espace Simone de Beauvoir – Fédération nationale GAMS – Fédération national solidarité femmes – Femmes en résistance – Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir – Femmes solidaires – FIT Une femme, un toît – Fondation Scelles – L’Escale – Ligue du droit international des femmes - Le lobby européen des femmes – Le monde à travers un regard – Les moutons noirs – Les trois quarts du monde – Maison des Femmes, Paris – Marche mondiale des femmes – Mémoire traumatique et victimologie – Mouvement jeunes femmes – Mouvement du Nid – France – Mouvement national Le Cri – Mue productions – Osez le féminisme ! – Planning familial 75 - Rajfire – Regards de femmes – Réseau féministe Ruptures – SOS les mamans – SOS sexisme – Zero impunity - Zéromacho – Zonta club de France www.abolition2012.fr
La première chose que l'on peut exiger d'un homme soutenant les luttes des femmes, c'est un minimum de respect pour les féministes, et en particulier celles de longue trajectoire comme Delphy ou Maya Surduts, et c'est aussi un minimum de décence lorsqu'il s'arroge le droit de distinguer dans le mouvement féministes les vraies féministes des féministes de salon. Ce n'est certes pas à des vérié de démêler le bon grain du mouvement féministe, ni à des Toussaint non plus. Mais toutes les féministes qui ont pris position contre la prostitution, contre la pornographie, cela va ensemble, sont habituées à la rage et aux insultes des hommes "de gauche" et "plus féministes qu'eux, tu meurs". Les débats sur ces thèmes sont d'ailleurs généralement les plus courus (des débats sur la question des femmes) par les hommes dans les grands rassemblements et universités politiques, et sans surprises, ils y défendent en général les bienfaits de la pornographie, au nom, como no, de la lutte contre le moralisme et pour la liberté sexuelle, et s'opposent à toute répression des délinquants violeurs de femmes qu'ils considèrent comme des clients... Rien de nouveau sous le soleil gauchiste masculin-iste.


Dernière édition par Toussaint le Dim 8 Déc - 5:24, édité 2 fois
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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 2:25


La pénalisation des "clients" : La nécessaire mort d'un droit de l'homme 1
oct/Nov/Déc 2002


En posant la responsabilité pénale des "clients" des personnes prostituées, l'État français mettrait fin au droit inique qu'il confère depuis des siècles aux hommes. Le droit-de-l'homme-aux-prostituées est en effet garanti par l'absence de législation formelle les condamnant : ceux-ci bénéficient donc du droit à disposer de l'accès aux sexes d’autres personnes - considérées par nos sociétés comme, justement, qualifiées à cet effet - dans des conditions qui, sauf rares récentes limitations législatives et jurisprudentielles, leur garantissent leur impunité.

Ce droit de l'homme était inscrit dans le Code civil de 1804. Celui-ci, tout en contraignant les femmes mariées, seules, au devoir sexuel conjugal, puisqu'elles seules devaient "obéissance [à leur] mari" (Art.213 C.civ), autorisait les maris à avoir des relations sexuelles avec toutes les femmes autres que leurs épouses.

Une seule restriction à ce droit était posée par l'article 230 C.civ qui disposait : "La femme pourra demander le divorce pour cause d'adultère de son mari lorsqu'il aura tenu sa concubine dans la maison commune". Ainsi, sans être considéré comme "adultère" - et donc sans avoir rompu le contrat de mariage - les maris étaient autorisés à avoir des relations sexuelles avec une femme salariée par lui - ou plusieurs -, avec une "concubine" dès lors qu'elle vivait hors de "la maison conjugale" - ou plusieurs -, ainsi qu'avec toutes les autres personnes, qualifiées ou non de "prostituées". Et, alors que l'épouse ne pouvait "ester en jugement sans [l'] autorisation" [de son mari] (Article 215 C.civ), pour obtenir le divorce, c'était à elle de déposer "plainte" à son encontre. (Article 339 du Code pénal de 1810).
L'adultère était pour la femme passible de prison ("deux ans au plus"), pour l'homme, d'une amende.

Quant à "la prostitution", assimilée à la "corruption [de la jeunesse] ", elle n'était condamnée que "si elle [avait] été "excitée, favorisée ou facilitée par les pères, mères ou tuteurs ou autres personnes chargées de leur surveillance".(article 334 C.pén).
La mise en prostitution des femmes et des enfants, était donc sous cette réserve, autorisée ; le proxénétisme n'était d'ailleurs même pas nommé.

Notre droit, malgré les nombreuses et importantes évolutions législatives en la matière, est resté fondé sur ce droit de l'homme : son fondement théorique n'a en effet jamais été remis en cause.
Et c'est ainsi que la légitimité historique d'un droit d'accès marchand des hommes aux sexes de personnes qualifiées de "prostituées" s'est perpétué. Depuis des siècles, les hommes sont donc en droit de dire à une catégorie de personnes démunies de tout recours contre eux : "Je pais et tu fais ce que je veux".
Ils sont en outre, pénalement, le temps de cet échange léonin, pénalement déresponsabilisés.
Combien de plaintes pour vols, coups et blessures, agressions sexuelles, viols, déposées par des personnes prostituées, ont-elles été reçues, instruites, jugées ? Combien de "clients" ont-ils été en prison pour violences à leur encontre ?

Le silence sur les délits et les crimes commis par les clients reflète l'insensibilité de nos sociétés à la vie, à la souffrance, à la mort des personnes prostituées : il doit cesser. Et ceci ne sera possible que si le scandale de l'impunité pénale des clients cesse.
Aucune politique abolitionniste, aucune politique féministe n'est plus pensable aujourd'hui sans cette position, tandis que la permanence de cette injustice patriarcale, à elle seule, suffit à invalider l'affirmation de l'universalité de notre droit.

Le renouveau politique de l'abolitionnisme2 nécessite donc l'inclusion, dans le droit, du principe de la responsabilité pénale des clients.
Sous quelle incrimination ?
Ils pourraient être considérés comme "complices" de proxénétisme (Art.225-5 C.pén), pour avoir "facilité [….] la préparation ou la consommation" (Art. 121-7 C.pén) des crimes commis par les proxénètes.
Ils pourraient aussi - dans la mesure où "la violence" a été reconnue à l'ONU par le gouvernement français (2) comme constitutive de la prostitution - être poursuivis pour viols. En effet: "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature que ce soit, commise sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol". (Article 222-23 du C.pénal )

Mais le recours à ces articles - dont le principe ne doit pas être pour autant exclu - n'est pas la solution adéquate. Pour poser de "nouvelles valeurs de notre société", (3) pour réparer ce déni de justice, il faut une incrimination pénale spécifique qui affirme clairement une nouvelle position de principe judiciaire, et donc politique, de rupture avec ce privilège sexuel, jamais aboli, des hommes.

Nous pourrions alors commencer à penser un futur où le désir serait libéré de la contrainte.

Comment y parvenir ?
Que les hommes qui se refusent pour des raisons politiques, éthiques et féministes à avoir des relations sexuelles avec les prostituées justifient politiquement leur position et s'engagent publiquement.
Qu'ils apportent ainsi leur solidarité aux luttes pour l'abolition du système prostitutionnel.
Ils se désolidariseraient ainsi, sans ambiguïté, du système patriarcal.


15 décembre 2002
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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 2:28

Abolitionnistes du système prostitueur : ce que nous sommes, ce que nous voulons !

par le Mouvement du Nid et plusieurs organisations féministes



À voir les réactions passionnelles – et souvent outrancières – qui pimentent le débat sur la prostitution et l’éventuelle pénalisation des clients prostitueurs (qui après tout sont une minorité), on est en droit de penser que la question touche un point douloureux du corps social : celui de la mise à disposition sexuelle des femmes pour le plaisir masculin. Nous, abolitionnistes, défendons une idée audacieuse et novatrice : celle d’en finir avec ce symbole de la domination des hommes sur les femmes.

Ce que nous sommes

Nous parlons en qualité de témoins : chaque jour, dans le huis clos de nos associations de terrain, loin des plateaux de télévision, nous entendons des personnes prostituées nous dire la vérité de ce qu’elles vivent : violences, mépris, humiliations, insultes qui, si elles sont évidemment parfois le fait des policiers ou des riverains, sont d’abord le fait des "clients". C’est leur parole qui nous permet d’affirmer que, pour la grande majorité de celles et ceux qui en vivent, la prostitution est une violence.

Mais nous parlons aussi en qualité de citoyens. L’axiome "je paye, tu t’exécutes" n’est pas précisément le projet de rapports hommes/femmes que nous ambitionnons. Nous ne voulons pas d’une société où certains hommes continuent de faire leur marché sexuel parmi des femmes – et des hommes – que la précarité, les violences ou la traite ont relégués dans la prostitution. Nous ne voulons pas d’une Europe où certains pays, dits réglementaristes, ont promu les proxénètes au rang d’hommes d’affaires ; où les "clients" consommateurs, sûrs de leur bon droit, continuent de faire comme si les femmes, de toute éternité, "étaient là pour ça"… Quel goût peut avoir la liberté dans ces pays où les bordels low cost proposent désormais des femmes en soldes ? Pour nous, toute prostitution est une défaite pour les femmes, pour les hommes et le vivre-ensemble. Et un triomphe pour la précarité et les violences. Notre souci est un souci de justice, d’égalité et de progrès.

Ce que nous voulons

Nos exigences sont simples. La première est l’abrogation du délit de racolage et de toutes les mesures de répression à l’encontre des personnes prostituées ; mais aussi des mesures de protection, d’accompagnement social et d’alternatives, pour toutes, y compris pour les étrangères.

La seconde vise l’interdiction d’acheter un acte sexuel et la pénalisation des clients prostitueurs. Cette interdiction, associée à l’abrogation du délit de racolage constitue ce que les abolitionnistes appellent, et réclament, depuis plusieurs années : l’inversion de la charge pénale. Elle n’est ni l’effet d’une lubie ni d’un goût pour la répression mais un choix politique qui fait déjà ses preuves dans plusieurs pays européens, notamment en Suède. Il est en effet urgent de contrer l’explosion de la traite des femmes, une entreprise criminelle dont les proportions atteignent aujourd’hui des dimensions sans précédent et qui n’a d’autre fin que servir le "plaisir" des prostitueurs.

Enfin nos associations demandent le renforcement de la lutte contre le proxénétisme, une politique pénale d’indemnisation effective des victimes de proxénétisme et la mise en place d’une politique ambitieuse d’éducation à la sexualité et de prévention de la prostitution.

Ce que nous ne voulons pas... et que beaucoup voudraient nous attribuer

Définir une bonne et une mauvaise sexualité. Nous menons un combat pour la libération sexuelle. Une sexualité libérée de l’ordre moral, mais aussi des rapports de domination et de l’emprise du marché. Refuser qu’un rapport sexuel puisse être imposé par l’argent n’est pas une entreprise de restriction des sexualités. C’est au contraire une exigence d’égalité qui permet l’expression d’une sexualité libre.

Nier l’existence du consentement de celles et ceux qui choisiraient de se prostituer. L’addition de consentements individuels ne suffit pas à faire un projet de société. Certains "consentent" à travailler pour moins que le smic (NDLR : aide sociale de base). Cela n’empêche pas la société de condamner légitimement tout employeur qui paierait un salarié moins que le smic. D’autres "consentent" à se séparer d’un organe et à la vendre pour vivre ou survivre. Cela n’empêche pas la société d’interdire l’achat d’un organe.

Porter un projet idéologique et utopiste. Abolir ne signifie pas éradiquer. L’abolition de l’esclavage n’a pas conduit à son éradication immédiate. Par contre, l’abolition a engagé l’État et toute la société aux côtés des esclaves et contre le système esclavagiste. L’abolition du système prostitueur, c’est un nouveau consensus social, un choix de société, une qualification de la violence prostitutionnelle qui permet ensuite et enfin d’adopter une série de mesures inscrites dans le cadre d’une politique globale et cohérente.

Pour nous, il est temps d’en finir avec le plus archaïque des "droits de l’homme", celui d’"aller aux putes". Si l’on peut certes disposer de son propre corps, on ne peut pas disposer, sur un claquement de doigts et un froissement de billet, du corps de l’autre. Aucun citoyen responsable ne devrait plus se sentir le droit d’imposer un acte sexuel par l’argent. Notre pays s’honorerait donc de mener cette bataille progressiste pour libérer la sexualité de l’emprise du marché et de la présenter pour ce qu’elle est : une avancée pour les droits humains.


Les signataires : Mouvement du nid, Collectif féministe contre le viol, Fédération nationale solidarité femmes, Centre national d’information sur les droits des femmes et des familles (CNIDFF), Osez le féminisme, Coalition Against Trafficking in Women (CATW), Femmes solidaires, Amicale du nid, Clara Magazine, Association française des femmes de carrières juridiques (AFFCJ), association Mémoire traumatique et victimologie, Regards de femmes, Femmes en résistance, Mouvement jeunes femmes, Les Trois Quarts du Monde, Collectif Alouette, L’égalité c’est pas sorcier, Espace Simone de Beauvoir, Coordination française pour le lobby européen des femmes.

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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 2:32

mercredi 10 avril 2013

La prostitution, le STRASS et la sénatrice - La pertinence de la transparence

par La Fondation Scelles



La sénatrice du Val-de-Marne (en France) Esther Benbassa (EÉLV) a publié sur son site le 6 février 2013 une liste d’associations auxquelles elle alloue des fonds cette année, au nom de la réserve parlementaire dédiée au financement de « projets locaux ». Dans la présentation qui en est faite, l’accent est clairement mis sur le concept de transparence, comme l’illustre notamment le choix du titre (« Réserve parlementaire 2013 : solidarité, culture et transparence »(1).

La liste des divers groupes voit se côtoyer 7 associations subventionnées pour produire des ateliers ou des événements à vocation culturelle ; 3 pour mettre en place des colloques ou lieux de réunion ; 2 afin de créer des ateliers pour des groupes de femmes ; 1 pour une aide alimentaire aux plus démunis ; et enfin 1 pour le STRASS, le syndicat du travail sexuel. Ce mouvement, créé en 2009 lors des Assises de la prostitution à Paris, regroupe un ensemble d’individus exerçant majoritairement une activité prostitutionnelle, et militant pour la reconnaissance de celle-ci.

Décider de financer le STRASS signifie que ce groupe est considéré au même titre que les autres associations subventionnées, telles que l’« Association des Femmes maliennes de Montreuil : Mise en place d’un atelier couture » ; « Les Restaurants du cœur du Val-de-Marne : Aide alimentaire aux famille du Val-de-Marne en difficulté » ; ou encore « Le Cinéma s’expose : Réalisation de dossiers pédagogiques sur l’histoire du cinéma et les métiers du cinéma pour les élèves et collégiens ».

Dans les parties suivantes, il s’agira de tenter de déterminer si tel est bien le cas, et d’essayer de comprendre le fonctionnement et les motivations du STRASS, hors du tableau qu’en dépeignent ses membres, à travers trois axes majeurs : une brève étude du STRASS lui-même, en mettant bout à bout les quelques informations publiques à son sujet ; les chiffres qu’il utilise et sa manière de les obtenir ; et enfin, la stratégie de communication de ce syndicat, avant de conclure sur sa nature même.

1. Le STRASS, un syndicat comme les autres ?

Le syndicat du travail sexuel est un groupe visant principalement à promouvoir la parole, à faire reconnaître et à mener des actions en faveur de ce que ses sympathisants nomment les « travailleur(se)s du sexe », ce qui regroupe aussi bien « des prostituéEs (de rue ou indoor), des acteurTRICEs porno, des masseurSEs érotiques, des dominatrices profesionnelles, des opérateurTRICEs de téléphone/webcam rose, des strip-teaseurSEs, des modèles érotiques, des accompagnantEs sexuelLEs, etc. » (2)

Ce type d’activités étant généralement connotées négativement au regard de la société, la parole est peu donnée aux individus les pratiquant, pour peu qu’ils la désirent. Il semble dès lors légitime qu’ils souhaitent la reconquérir.

Le STRASS a pour principale ambition de le faire en leur nom ; « Le STRASS représente touTEs les travailleurSEs du sexe, quels que soient leur genre ou le type de travail sexuel concerné » (3). Selon ses propres sources – non vérifiables, aucune donnée n’étant communiquée sur leur site à ce propos -, il compte aujourd’hui 500 adhérents (4), et ce au niveau national. Or, la prostitution en France est déjà estimée à environ 20 000 personnes (5). Comment représenter une activité si multiforme, peu visible et dont les ramifications et le nombre d’individus sont sans doute bien plus nombreux que ce que l’on imagine ?

Les positions de ce syndicat à ce propos sont quelque peu floues : il souhaite défendre la parole de « touTEs les travailleurSEs du sexe », mais nuance en condamnant la prostitution « forcée ». Le STRASS revendique des droits pour les personnes prostituées « volontaires » ; les autres, qui représentent 90% de la prostitution de rue (6), relèvent de la prise en charge des pouvoirs publics. Il y a la « bonne » et la « mauvaise » prostitution.

Mais comment le STRASS décide-t-il de qui se prostitue « volontairement » ou non ? Sur quels critères se base-t-il ? S’il s’agit de séparer les personnes prostituées exerçant sous la contrainte d’un proxénète des autres, alors cela revient à faire fi de tous les déterminismes auxquels chaque être humain est soumis, comme les sciences humaines l’ont montré depuis de longues années maintenant. Cela ne signifie pas non plus que personne ne peut faire de libre-choix ; simplement que ce genre de discours doit être relativisé, à l’instar de celui d’Ulla (7), par exemple, célèbre pour avoir milité activement pour les droits des personnes prostituées avant d’avouer, quelques années après avoir arrêté cette activité, qu’elle ne le faisait pas volontairement. Elle « se targuait d’être indépendante : elle a avoué bien plus tard avoir, comme beaucoup, été manipulée. « Comment avez-vous pu me croire ? », reprocha-t-elle aux féministes. » (Cool

Ainsi, il paraît difficile – voire impossible - de déterminer qui choisit librement ou non d’exercer cette activité. D’ailleurs, en ceci réside une des contradictions du STRASS ; ce syndicat défend les personnes qui veulent exercer librement la prostitution sans pour autant ni expliquer comment ils font cette différenciation, ni d’ailleurs renier que des déterminismes pèsent mêmes sur ceux et celles qui disent agir de leur plein gré. Et ce, alors qu’ailleurs sera affirmée la position volontariste de ces mêmes individus – parfois dans la même interview, à l’instar de celle-ci :

« - L’important, c’est que cela reste un choix.
- Les abolitionnistes affirment que la prostitution n’est jamais un choix. Qu’en pensez-vous ?
- C’est évidemment un choix "contraint" - on ne le fait sans doute pas uniquement par plaisir [...] »(9).

De la même manière, les principaux porte-parole insistent fréquemment sur le fait qu’ils n’ont subi aucun traumatisme durant leur enfance, traumatisme qui pourrait – en partie, tout du moins – expliquer leur choix de vie, et que tel est le cas d’un certain nombre de personnes prostituées « volontaires ». Or, si on se penche, par exemple, sur les chiffres communiqués dans l’étude de A. Roxburgh (10) consistant en des entretiens particuliers avec 72 personnes prostituées, on constate qu’un tiers des interviewées présentent « [...] des symptômes actuels de PTSD [c’est-à-dire de syndromes post-traumatiques, comme par exemple les soldats ayant vécu la guerre], soit un taux dix fois plus élevé que dans la population générale.

L’analyse descriptive des données a révélé que 87% des femmes présentaient des symptômes de dépression, et 42% d’entre elles avaient déjà entrepris une tentative de suicide. La presque totalité de l’échantillon (99%) a mentionné au moins un événement traumatisant dans le passé. » (11)

Cette étude n’est pas la seule à aller dans ce sens, et ce, quelle qu’en soit la géo-localisation. On peut à titre d’exemple citer également celle de M. Farley (12), au sein de laquelle elle constate que « [...] la nature même du travail du sexe possède une composante traumatisante et humiliante pour les femmes qui l’exercent, expliquant les taux de prévalence élevés de syndromes de stress post-traumatique (deux tiers de l’échantillon) parmi les femmes travailleuses du sexe, indépendamment du pays étudié (Afrique du Sud, Thaïlande, Turquie, USA et Zambie). » (13)

2. De la transparence des informations


Le STRASS remet en cause les chiffres produits par diverses institutions (14) quant au nombre de personnes prostituées. Certes, il n’existe à ce jour en France que des études estimant leur nombre (ou portant sur des échantillons relativement restreints) ainsi que des statistiques policières, et il est regrettable qu’une enquête plus exhaustive n’existe pas encore.

Cependant, le syndicat du travail sexuel n’avance lui-même aucun chiffre officiel. Il en donne un certain nombre lors d’interviews, ou propose des estimations. Le STRASS qualifie d’ailleurs ses chiffres de « scientifiques » à l’inverse de ceux de ses détracteurs, comme on le verra dans la suite de cet article. Or, il n’explicite jamais sa méthode de comptage ou ses sources.

« Le syndicat revendique 200 adhérents [interview en date de 2009, aujourd’hui, selon les dires de ses propres membres, ils seraient 500], soit 1% des 20 000 travailleurs du sexe à temps plein. Maîtresse Gilda explique : « Je n’inclus pas dans cette estimation la mère de famille qui se prostitue pour arrondir ses fins de mois, ou les femmes qui sont exploitées, juste les sexworkers assumés qui vivent de la prostitution. » (15)

Quand bien même on accepterait ces chiffres sans sources comme réalistes, représenter 1 ou même 3% des individus exerçant dans des conditions aussi diverses que peuvent le permettre des activités non contrôlées et peu visibles comme la prostitution serait-il représentatif ?

« La majorité des travailleurs du sexe ne sont pas victimes de la traite des êtres humains ». (16)

Ici, il ne s’agit pas de donner des chiffres. Les individus qui effectuent ce genre d’estimations exerçant cette activité eux-mêmes utilisent cette position comme légitimation de leurs propos. Ceci influence naturellement le lecteur, souvent peu informé sur le sujet et donc pas en mesure de relativiser ces estimations, de la même manière qu’il prendrait sans doute pour argent comptant les déclarations d’un chirurgien-dentiste au sujet de sa profession.

« Vallaud-Belkacem choisit d’ignorer les rapports de chercheurs indépendants s’appuyant sur des preuves scientifiques pour ne retenir que le rapport parlementaire écrit par des politiciens et qui n’a rien de scientifique. (17)

L’article cité qualifié de scientifique est une étude menée par deux féministes radicales suédoises militant pour l’officialisation de la prostitution depuis des années, sans qu’elles soient présentées dans le document en question, seuls leurs noms étant communiqués. Ce rapport de 38 pages est financé par l’Institut Nicis, ainsi que par les villes de Rotterdam, La Haye, Utrecht, Vienne, et L’Université de Leiden, soit en classant par nationalité : cinq groupes néerlandais et un autrichien. Il est intéressant de noter qu’ils proviennent tous uniquement de pays réglementaristes, pays dont la législation autorise la prostitution, et, dans certains cas, la tenue de lieux spécifiques de prostitution, considérés en France comme proxénétisme. (18)

Au vu de ces contingences, est-il toujours possible de qualifier cette étude d’« indépendante » ? L’est-elle plus que la recherche effectuée par l’Assemblée nationale (comprenant 383 p. avec pièces-jointes, ayant auditionné 200 acteurs/actrices etl du monde associatif, juridique, policier, scientifique, médical, etc. travaillant au contact de la prostitution, dont deux personnes du STRASS et plusieurs associations/individus proches de ce syndicat ainsi que 5 ex-personnes prostituées) ?

Sur le même mode, il n’est également pas possible de savoir d’où proviennent ou comment sont gérées les finances du STRASS ; sur son site, sont précisés les montants des droits d’adhésion (10€ pour les « travailleurSEs du sexe », 20€ pour les sympathisants), et également le fait que l’association accepte les dons. Ce sont les seules informations disponibles à ce sujet. Pourtant, le STRASS organise plusieurs événements, ainsi que des procès, se portant parfois partie civile pour aider des personnes prostituées, ou bien en poursuivant en justice les individus considérés comme ayant tenu des propos diffamants à leur égard (exemple : Mme Zoughebi) (19), au titre de l’euro symbolique, donc poursuite non menée par appât du gain).

De la même manière, en ce qui concerne les divers porte-parole du STRASS (dont Thierry Schaffauser et Morgane Merteuil sont les plus médiatisés actuellement), il est impossible de savoir qui ils ou elles sont. D’où ils ou elles viennent, quel est leur parcours, quelle est leur catégorie socio-professionnelle, quels sont leurs intérêts. La seule biographie de plus de trois lignes concernant M. Schaffauser est publiée sur Wikipedia (dont il est important de rappeler que les articles sont écrits par des individus anonymes), et débute à ses 18 ans. Auparavant, il n’existe pas.

3. De l’importance de la parole

S’il y a bien une critique qui revient fréquemment dans les argumentaires du STRASS, c’est celle de la parole dérobée. En effet, dans la grande majorité des articles de ce groupe, il est fait référence au fait que les « travailleurSEs du sexe » se voient kidnapper leur parole par « [...] d’autres intervenants présentés comme des spécialistes du sujet (médecins, catholiques et autres moralistes, abolitionnistes...) » (20).

« Nous demandons que notre parole soit prise en compte dans les décisions nous concernant », explique Morgane Merteuil21 » (21).

« Les "débats" sur le travail sexuel sont souvent prétextes à un déferlement de violence de la part de celles et ceux qui ont compris que pour faire disparaître une catégorie de la population, il faut commencer par trouver les moyens de la faire taire, de discréditer sa parole. » (22)

Trois constats majeurs apparaissent à la lecture de cet énoncé. D’une part, en se basant sur un échantillon de 388 articles de presse de l’année 2012 (23), il apparaît que les individus critiquant la volonté d’abolition/de pénalisation les plus représentés en termes de parole sont les membres du STRASS, et en particulier T. Schaffauser et M. Merteuil. En effet, sur les 88 articles critiquant la volonté d’abolition/de pénalisation de la prostitution, 29 sont écrits par ou consistent en des interviews de membres du STRASS, soit un tiers des articles concernés. Les autres articles sont majoritairement écrits par des individus (pas nécessairement spécialisés sur la question) intervenant une seule fois sur le sujet, et par diverses autres personnes publiant plusieurs fois sur ce thème, mais jamais à hauteur du nombre d’interventions du STRASS.

Les prostituées intervenant en leur nom propre (non affiliées à ce syndicat ou en tout cas ne se déclarant pas comme telles) au sein de ce même groupe de critiques sont représentées, elles, à hauteur de 17 articles sur 88, soit 19%. Qui dérobe finalement la parole de qui ?

« Le syndicat du travail sexuel veut être reçu à Matignon comme les autres », titre un article du "Midi Libre" en date du 1er juin 201224. Le 18 juillet suivant, soit un mois et 17 jours plus tard, le STRASS était effectivement reçu par Najat Vallaud-Belkacem. Ce syndicat qui, comme on l’a vu, se plaint de ne pouvoir s’exprimer, a pourtant lui-même mis fin à l’entretien, sous prétexte que celui-ci « prenait de plus en plus la forme d’une mascarade » (25). N’est-ce pas là une attitude pour le moins contradictoire ?

Surtout si on la met en perspective avec celle de Nathalie Bordes-Prevost, présidente de l’association pour les droits, la reconnaissance et la protection des prostituées, et prostituée elle-même. Elle ressortit de son entretien avec N. Vallaud-Belkacem (quand celui-ci prit naturellement fin) en annonçant : « Elle m’a écouté, c’est une femme qui a un grand cœur » (26), et ce, alors que les points de vue de ces deux individus divergent également.

D’autre part, en étudiant de plus près les articles rédigés par ou interviewant des membres du STRASS, on constate que la stratégie de communication est travaillée, employant un ton différent selon les circonstances. Par exemple, lorsque les membres du STRASS font publier une de leurs tribunes, le ton est extrêmement agressif (quelques exemples dans la masse : « Nous, travaileurSEs du sexe, refusons d’être les victimes sacrifiées de votre idéal moraliste ! » (27) ; « Vous n’êtes ni vraiment pour le respect de TOUTES les femmes, ni véritablement dans une démarche de lutte des classes. Votre féminisme est bourgeois : il consiste à permettre aux femmes d’accéder aux privilèges de classe. Notre féminisme est révolutionnaire : il consiste à abolir ces classes. Vous vous adressez à nous depuis un îlot privilégié (ou que vous estimez tel), en vous disant que nous nous réjouirions de vous y rejoindre : mais la vérité pourtant est que nous avons préféré devenir putes que devenir vous. » (28).

L’utilisation d’un vocabulaire dépréciatif, de majuscules ou de guillemets - entres autres figures de style – permet de sous-entendre que les individus dont il est question ne sont pas crédibles (quelques exemples : « Les psychologues et les "experts" (29) » ; « Lors d’un débat avec une ministre luxembourgeoise par exemple, un soi-disant expert (30) ; « Depuis des mois, vous, "féministes" abolitionnistes ») (31).

Or, lorsque les membres du STRASS sont interrogés par des individus en tête à tête, le ton est complètement différent. Ceci est d’autant plus visible lorsqu’il s’agit de M. Merteuil, fréquemment décrite comme souriante, décontractée (« lâche-t-elle dans un sourire », « Sourit », « Elle rit. », « Elle hésite un instant. Soupire. », « se désole », « À vouloir nous rabaisser comme ça, elles ont un discours de haine. C’est blessant. » « Soupir de dépit. », « Elle hésite » (32). Le ton est détendu, plein d’humour, tantôt enjoué tantôt désolé, suivant qu’il s’agisse de décrire son activité qu’elle adore ou les attaques blessantes des féministes pro-abolition.

La stratégie de communication est excellente. Lorsqu’il n’y a pas d’interlocuteur physique, il s’agit d’être provocant, très engagé, voire enragé. Les détracteurs ne sont pas directement en face à face, et utiliser un ton extrêmement virulent pour les critiquer permet de convaincre plus facilement l’opinion. D’autre part, personne n’est visé nominativement, donc personne ne peut répondre concrètement aux attaques ainsi réalisées.

De plus, le féminisme essaye depuis bien longtemps de se débarrasser des représentations communes qui le présentent péjorativement comme le produit de femmes aigries, frustrées, incapables de jouir et donc par là-même agressives (critique d’ailleurs reprise précisément par M. Merteuil, qui se dit elle-même féministe : « Ne savez-vous donc vous réjouir qu’en empêchant les autres de jouir ? » (33). Les attaquer de cette manière est dès lors une stratégie habile, puisqu’on peut supposer que répondre sur la même tonalité serait préjudiciable à l’image même du féminisme.

Enfin, pour terminer, il est intéressant de reproduire quelques-unes des insultes portées à l’encontre d’individus ayant critiqué le STRASS ; par exemple, en réaction à une phrase de Claudine Legardinier (34) citée par M. Merteuil sans sources (donc sans garantie de fiabilité quant à l’original) et reproduite ici à l’identique : « Legardinier : « quand bien même la police irait interpeller un client dans un endroit sombre, la pers. prostituée elle ne risquera plus rien », citation que M. Merteuil commente comme suit : « oui, parce qu’être obligées d’aller exercer dans des "coins sombres", ce n’est pas un risque. #criminelleassumée #connasse. » Ou encore, au sujet d’un internaute intéressé par les questions liées à la prostitution « ah oui et puis le spermufle qui est venu me dire bonjour. lol. il a vraiment la gueule du con qu’il est. » (35) Ces quelques illustrations mettent en lumière les tentatives de diffamation, voire d’intimidation dont ses membres font usage afin de faire taire et/ou de discréditer les critiques à leur encontre.

Les insultes ne sont d’ailleurs pas les seuls dommages causés aux individus ayant critiqué le STRASS, qui adopte une attitude provocatrice à l’égard de ceux qui ne vont pas dans leur sens, notamment en s’invitant à des événements privés auxquels ils ne sont pas conviés, et en parodiant allègrement (pas toujours avec très bon goût) des productions de ces mêmes groupes. À titre d’exemple, il est possible de citer ici la manifestation du 25 novembre 2012, lors de la journée contre les violences faites aux femmes, durant laquelle les membres du STRASS se sont subtilement mêlés au cortège des abolitionnistes avant de brandir des pancartes avec des slogans du type « putophobes » (36).

Ainsi, en mêlant (parfois maladroitement) contradictions, discours divergents, agressions et séductions, en substituant perpétuellement leur parole à celle de toutes les personnes prostituées (quand ce ne sont qu’elles), en martelant les mêmes informations non étayées mais présentées avec conviction, le STRASS parvient de manière habile à produire un discours parlant à un grand nombre de personnes non ou peu renseignées sur le sujet de la prostitution.

4. Lobby plus que syndicat

Ce syndicat relève donc en réalité plus du lobby que du groupe syndical, comme le notaient déjà de manière très pertinente les auteurEs de l’article intitulé « Anatomie d’un lobby pro-prostitution – Étude de cas : le STRASS, en France » (37). De toute manière, le STRASS n’a pas les statuts d’un syndicat : l’article L2131-2 du Code du Travail indique que « les syndicats ou associations professionnels de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des métiers connexes concourant à l’établissement de produits déterminés ou la même profession libérale peuvent se constituer librement. » La prostitution n’étant pas une profession, il n’est donc par définition pas possible de qualifier le STRASS de syndicat.

De plus, la loi du 28 août 2008 précise que la représentativité des organisations syndicales est déterminée d’après un certain nombre de critères cumulatifs comprenant notamment celui de la transparence financière, ce qui, comme on l’a vu, n’est pas non plus une condition que remplit le STRASS.

Ce groupe opte pour une stratégie de communication et d’action visant à faire perdurer le fantasme d’une prostitution choisie, désirée, flattant tantôt le client, tantôt les politiques ayant soif d’idéaux libéraux/libertaires, et ce afin de garantir son gagne-pain.

Et encore, ceci n’est sans doute que la partie émergée de l’iceberg. Il n’a par exemple pas été question ici de la terminologie usitée, des représentations mises en avant, du mélange des registres permettant de brouiller la réflexion et d’amener à une relativisation globalisante faisant perdre toute notion de valeurs, des formules et actions populistes, ni des liens avec des personnes de pouvoir.

Car parfois, les connexions entre le STRASS et les influents sont quasi-invisibles... Ainsi en va-t-il par exemple de cette tribune écrite par Stéphane Bribard, conseiller à la mairie du Xème arrondissement de Paris, signée par une centaine d’élus ou de personnes travaillant dans le monde politique (majoritairement PS et Verts), tenant un discours typiquement strassien, sans pour autant citer une seule fois ce groupe. Il faut se rendre sur le compte du réseau social du rédacteur de l’article pour constater qu’il est ami avec Morgane Merteuil.

Mme Benbassa – bien qu’elle ait ouvertement défendu le STRASS et ses positions, notamment dans un article du "Huffington Post" en date du 12 novembre 201238 - devrait donc peut-être se pencher un peu plus sur le profil des groupes qu’elle finance si elle souhaite pouvoir utiliser le terme très à la mode de « transparence » à juste escient...

D’une part, car selon les propres termes de la sénatrice, il s’agissait de financer des projets locaux – d’ailleurs, tous les autres financements sont attribués à des projets locaux. Or, le STRASS est subventionné au titre d’« Organisation d’une rencontre nationale des travailleurSEs du sexe ».

D’autre part car on ne dispose que d’une moyenne des sommes versées aux divers groupes financés (4.785 €), de sorte qu’il est impossible de savoir exactement à quelle hauteur sont subventionnées les dites associations. Enfin, parce que, comme cela a été évoqué dans cet article, le STRASS lui-même demeure un groupe dont la visibilité est fortement réduite, et ce à tous niveaux.

Ainsi, en termes de transparence justement - et malgré ce que laisse sous-entendre l’acronyme rutilant du fameux syndicat -, ici, on est plutôt dans l’opacité la plus complète.

C’était.

- Article reproduit avec l’autorisation de la Fondation Scelles, une ressource importante contre l’exploitation sexuelle.

Notes

1. estherbenbassa.eelv.fr
2. Site du STRASS, , onglet « A propos du STRASS ». 3. Ibid.
4. Interview de M. Merteuil (secrétaire générale du STRASS) « Elle travaille au corps », Libération, 06/12/2011.
5. Selon l’OCRTEH, l’office central pour la répression de la traite des êtres humains, dont la principale mission est de lutter contre le proxénétisme. Ce chiffre est d’ailleurs contesté par Thierry Schaffauser, un des fondateurs du STRASS, l’estimant sous-estimé (voir « Combien de travailleurs du sexe sommes-nous ? », Le Monde, 02/06/2010
6. Chiffres de l’OCRTEH
7. -Notamment célèbre pour avoir été le leader du mouvement d’occupation de l’église Saint-Nizier à Lyon en 1975 au nom des droits des personnes prostituées
8. Mondialisation de la prostitution, atteinte globale à la dignité humaine, ATTAC, Mille et une nuits, Barcelone, 2008
9. Interview de M. Merteuil, « Morgane Merteuil : "Je préfère être "escort" plutôt que travailler en usine" », danactu-résistance, 04/12/2011,
10. A. Roxburgh, L. Degenhardt et J. Copeland, « Posttraumatic stress disorder among female street-based sex workers in the greater Sydney area, Australia », 2006, BMC Psychiatry 6 : 24
11. G. Bugnon, M. Chimienti, L. Chiquet coll., « Marché du sexe en Suisse », Repromail, Genève, 2009, p.24
12. M. Farley, I. Kiremire et U. Sezgin, « Prostitution in five countries : violence and post-traumatic stress disorder », Feminism & Psychology 8(4) : 405-426, 1998
13. G. Bugnon, M. Chimienti, L. Chiquet coll., « Marché du sexe en Suisse », op. cit., p.23
14. Notamment l’OCRTEH.
15. Article « Avec le Strass, le travail du sexe a désormais son syndicat », Rue 89, 26/03/2009.
16. Article de T. Schaffauser, « La majorité des travailleurs du sexe ne sont pas victimes de la traite des êtres humains », Le Monde, 05/01/2012.
17. Article de T. Schaffauser, « Madame Vallaud-Belkacem, vous devez écouter les travailleurs du sexe », op. cit.
18. -Le régime juridique de la France est abolitionniste : proxénétisme condamné, prostitution non réglementée.
19. Communiqué de presse sur le site du STRASS, 02/03/2011.
20. -Site du STRASS, onglet « A propos du STRASS »
21. Interview de M. Merteuil, « Sexwork... is work ! », Seronet, 05/06/2012.
22. Tribune de M. Merteuil, le 26/08/2012 sur le site Minorités, « On est des putes, et vous êtes quoi ? »
23. Article à paraître dans le prochain rapport mondial sur la prostitution de la Fondation Scelles
24. www.midilibre.
25. Site du STRASS.
26. « Cahors. Najat Vallaud-Belkacem interpellée par une prostituée », La Dépêche, 22/09/2012.
27. Tribune de M. Merteuil, « Discours abolitionnistes : les premières victimes sont les putes », op. cit.
28. Tribune de M. Merteuil, « On est des putes, et vous êtes quoi ? », op. cit.
29. Interview de M. Merteuil, « « Oui, on peut être pute et heureuse », soutient-on au Strass », Rue89, 19/09/2011.
30. Ibid.
31. Tribune de M. Merteuil, « Discours abolitionnistes : les premières victimes sont les putes », A contrario, 04/02/2012.
32. Interview de M. Merteuil, « Elle travaille au corps », op. cit.
33. Ibid.
34. C. Legardinier est une journaliste indépendante. Elle travaille sur les droits des femmes, et particulièrement la question de la prostitution et de la traite, notamment au sein du Mouvement du Nid.
35. Commentaires issus du compte twitter de M. Merteuil, encore une fois très nombreux et d’une lecture édifiante, classés par l’auteur du site sousleparapluierouge, à l’adresse sousleparapluierouge.wordpress.com/
36. Voir la vidéo de cet événement sur Youtube
37. Article anonyme, très intéressant pour aller plus loin sur le STRASS, disponible à l’adresse sousleparapluierouge.wordpress.com/
38. Disponible ici.
Toussaint
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Message  Rougevert Dim 8 Déc - 2:34

COMMENT LA BOURGEOISIE LUTTE CONTRE LA PROSTITUTION
(Lénine).
Dernièrement, à Londres, s'est terminé le « cinquième congrès international de lutte contre la prostitution ».
Ce fut une rencontre de duchesses, de comtesses, d'évêques, de pasteurs, de rabbins, de fonctionnaires de la police et de philanthropes bourgeois de tout poil ! Et combien de dîners solennels, combien de fastueuses réceptions officielles eurent lieu à cette occasion ! Combien de discours emphatiques y furent prononcés sur la nocivité et l'infamie de la prostitution !
Quels étaient donc les moyens de lutte réclamés par les délégués bourgeois au congrès, ces gens délicats ? Deux moyens avant tout : la religion et la police. Il paraît que c'est là tout ce qu'il y a de bon et de sûr contre la prostitution. D'après le correspondant londonien de la Volkszeitung de Leipzig, un délégué anglais s'est vanté d'avoir proposé au Parlement d'appliquer un châtiment corporel aux entremetteurs. Voilà un héros « civilisé » de la lutte contre la prostitution telle qu'on la pratique de nos jours !
Une dame canadienne était ravie de la police et de la surveillance exercée par la police féminine sur les femmes « tombées », mais à propos d'une augmentation des salaires elle disait que les ouvrières ne méritaient pas un meilleur paiement.Un pasteur allemand fulmina contre le matérialisme contemporain qui se répand de plus en plus dans le peuple et contribue aux progrès de l'amour libre. Lorsque le délégué autrichien, Hertner, essaya d'aborder les causes sociales de la prostitution, la misère et la pauvreté des familles ouvrières, l'exploitation du travail des enfants, les conditions de logement insupportables, etc., le congrès, par des exclamations hostiles, obligea l'orateur à se taire ! En revanche, on racontait, dans les groupes de délégués, des choses édifiantes et solennelles sur de hautes personnalités. Par exemple, quand l'impératrice allemande rend visite à une maison d'accouchement à Berlin, on met des alliances aux doigts des mères des enfants « illégitimes », afin de ne pas choquer la haute personnalité par l'aspect de mères non mariées !
Cela permet de juger quelle dégoûtante hypocrisie bourgeoise règne à ces congrès aristocratiques et bourgeois. Les acrobates de la charité et les policiers pour qui la misère et la pauvreté sont des objets de dérision se rassemblent pour « lutter contre la prostitution », qui est soutenue précisément par l'aristocratie et la bourgeoisie...
Lénine : « Le cinquième congrès international de lutte contre la prostitution », Rabotchaïa Pravda,
13/26 Juillet 1913,
Œuvres, t. XVI, p. 516-517. (Edit russe.)
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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 3:16

Si le texte de Lénine peut s'analyser, c'est en tout cas certainement pas avec le moindre rapport avec le mouvement féministe actuel. Lénine n'était pas féministe et il ne parle pas des féministes non plus. Faire le parallèle entre ce dont parle Lénine et ce qui se passe aujourd'hui relève de l'escroquerie intellectuelle. Mais c'est bel et bien le genre de pastiche des propos de Lénine pour essayer de l'utiliser contre le féminisme de la fin des années 60 (exactement ce que décrit Delphy dans l'Ennemi Principal) que l'on voit revenir ici parce qu'elles osent s'attaquer au droit du client à acheter du sexe. Ce n'est pas un hasard, et ce n'est donc pas étonnant. Décevant tout au plus, mais bon, aucune militant-e qui a participé à des débats sur la pénalisation des clients ou la pornographie ne sera surpris. Typique, classique, habituel... c'est la solidarité de genre, les mâles se rebiffent...
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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 4:42

Un dernier point sur le fait que la pénalisation des clients va augmenter la violence. Rien, absolument rien ne le prouve et surtout pas le bilan de la Suède. D'autant que si on compte dans cette violence celle de la traite, que personne n'ose nier, même si le lobby proxi essaie de la faire sortir des radars, alors elle va diminuer radicalement, comme on le voit pour la Suède où la traite a pratiquement disparu. Dire qu'on va la retrouver intégralement aux frontières n'est ni prouvé ni sérieux d'ailleurs.

Et les prostituées qui sont dans la prostitution de luxe, elles vont aller dans des coins sombres? Very Happy  Je suis prêt à parier que non. Et pour elles, la loi est une farce, ou presque. Je ne vais pas détailler mais les trémolos des porte parole du lobby proxo qui se vantent de ne donner que dans les hôtels de standing, ne me semblent pas très crédibles. Pas seulement en regardant des exemples comme ce qu'on a découvert avec le cas DSK, décidément gommé des rétroviseurs des gauchistes pro-clients. Pas seulement en gardant la mémoire de Ulla et ses copines, cornaquées de très près par les proxos, de leur propre aveu, mais qui juraient leurs grands dieux qu'elles étaient libres comme le vent... avec les mêmes mots, les mêmes interpellations des élus... Mais parce que souvent ce ne sont même pas les "clients" qui payent ces femmes, mais des commanditaires qui les passent en frais commerciaux et qu'une ou deux amendes effraient d'autant peu que le délit ne sera jamais établi, puisque celui qui achète en ce cas n'est pas celui qui consomme. C'était souvent le cas pour DSK apparemment. On peut parler de DSK, ou cela gêne trop les pro-clients de se voir rappeler qu'ils protègent des gens comme DSK? Very Happy 

Quant à
Justement le NPA n'a pas tranché définitivement, ni sur la pénalisation des clients ni sur le fait qu'ils soient réglementariste de fait ou abolitionniste. Ce sera en février par le biais d'AG locales sur ces questions et conclue par une réunion nationale. Des camarades se battent contre le fait de militer avec le STRASS, ce que d'autres camarades (essentiellement de paris) veulent et essaient d'imposer.
Le dernier congrès a montré que beaucoup de camarades, lors des votes, n'ont pas pris en charge cette question en s'abstenant ou en votant NPPV. Mais qu'il y avait quand même une ligne abolitionniste qui se dégageait majoritairement. Dans cette situation, les votes de février permettront, espérons le, à tous les camarades de s'impliquer dans la définition de cette ligne.
Une ligne abolitionniste qui défendra les clients? Une ligne abolitionniste qui ne demandera pas de lutter contre la demande? C'était la ligne de la LCR pendant des années. On a vu ce qu'il en advint, et la polarisation dès que le gouvernement bourgeois a bougé. Le CNDF et la CADAC aujourd'hui ont repris la pénalisation des clients, et le NPA, avant de trancher, défile avec le STRASS. Le moins que l'on puisse en dire est que ce qui a été posé est un acte fort. Il participera à créer votre profil politique et il sera difficile de revenir dessus.

Ensuite, sur ce fil, c'est bon, la cause est entendue. La quasi-totalité des gens du NPA qui interviennent sont partisans de ne surtout pas toucher un poil des clients et de ne surtout mettre aucune entrave à la pratique de la prostitution, en reprenant telle quelle des pans entiers et souvent la totalité des arguments du lobby proxénète, en calomniant honteusement le Nid à partir des ragots colportés par AIDES et des présupposés bidons sur le christianisme du Nid (qui ne les gêne pas pour Gaillot), en tenant comme nestor, de vrais propos de "client" en raillant, como no, la notion de respect et de désir partagé comme une notion moraliste réac, en la soulignant comme telle avec indignation dans un texte du Nid. Les deux reculant ensuite, évidemment, les mains prises dans le pot de confiture, mais revenant promptement à la charge. Le même qui a des trémolos dans la voix sur les outrances et les insultes qu'il se plaint d'essuyer (et ne sont que le reflet de ses positions vues du point de vue de la lutte contre le système prostitutionnel, que des concepts et des termes utilisés depuis longtemps par le courant abolitionniste, comme on le voir dans les textes que j'ai postés) se lance dans des attaques de nouveau calomnieuses et méprisantes sur les féministes abolitionnistes. Tout en se disant aussi féministe, je suppose, como no... Very Happy J'oubliais, tout gauchiste est féministe, par définition et plus encore par autoproclamation, celle-ci lui donnant aussitôt le droit de juger de la qualité et la légitimité des discours des féministes. Pour les insulter si elles mordent sur les plates bandes de ses congénères.

Certes, les féministes abolitionnistes sont exagérées, simplistes, agressives, insultantes, et font des procès d'ntention... Il ne manquait que de rajouter leur nature politique grande et petite bourgeoise, pourquoi pas bigote au passage, en pastichant un texte de Lénine hors contexte. On y a eu droit aussi. En fait on a droit à l'injonction de laisser faire, laisser prostituer, puisque, n'est-ce pas, il faudra attendre la révolution et le socialisme qui transformeront avec leur baguette magique les mentalités masculines de droit au corps des femmes, d'autres hommes, et des enfants. Et donc ne toucher ni au racolage passif, ni au racolage actif, ni au droit des clients, ni au droit de vendre le sexe, ni au droit de l'acheter. En somme pour ne pas faire de tort aux prostituées, il convient de lever toute entrave à leur métier. Et on verra à la révolution... Car les lois n'empêchent rien, ne servent à rien, etc... En matière de prostitution, voici nos marxistes soudain ardents défenseurs du néolibéralisme et de la liberté du marché, celui-ci s'autorégulant... Connes de féministes qui ont obtenu la criminalisation du viol alors que cela n'a même pas aboli les viols... ni le patriarcat et même pas le capitalisme! Ttttt... Comment peut-on?

On se demande bien pourquoi on critique l'intervention en RCA. Vous avez pensé au nombre de gens qui mourront si la France n'y va pas? Cela vous fait rire, les menvussa, ou vous n'y avez pas pensé? Pourtant, en voyant les positions du NPA, on dirait qu'il vaut mieux laisser la Séléka massacrer que de soutenir une intervention française. C'est une analogie évidemment, mais elle fonctionne assez bien. Lorsqu'on oppose dans une situation comme celle de la RCA la thèse de la révolution à l'intervention impérialiste, on mise sur une logique alternative au processus qui a créé la violence et le chaos. On analyse que l'intevention française est celle du pompier pyromane. Et on appelle à un processus de libération, d'auto-organisation et de prise de conscience qui mettra du temps. Et aggravera sinistrement le sort des centrafricains dans l'immédiat. La solution de l'intervention en effet permettra de ne ren changer à la situation de domination de la RCA, et reproduira l'oppression qui a mené au désastre, mais arrêtera les massacres pour un certain temps. Mais il faut croire que le sort des centrafricains massacrés vous préoccupe moins que celui des prostituées qui refuseront de changer d'activité...

On n'est pas dans une situation de commentateurs de l'actualité spécialisés dans le pronostic à deux ou trois ans, pourquoi pas à faire des paris. On est dans une épreuve de force, dans une lutte. On est aussi dans un cadre de principes. Et de logiques fondamentales. Non, je ne soutiens pas la prostitution comme soupape et comme solution à la misère et la précarité des femmes, comme palliatif des reculs des droits sociaux, et du chômage, des faibles salaires. Je prétends même que le système prostitutionnel fait partie du rapport de force défavorable au genre féminin et à la classe ouvrière. Comme disait Voltaire, les femmes ont toujours soin d'elles mêmes, en somme elles peuvent toujours s'en sortir avec la vente de leurs charmes. Et nul besoin d'un bon salaire, elles trouveront bien l'appoint. Un des grands intérêts du capital se trouve dans cette vision des femmes qui peuvent toujours se vendre. C'est ce qu'on entend à présent et ce qu'on lit ici même. Eh bien, non. Encore une question de principes élémentaires de classe. Et de solidarité avec les femmes en lutte pour l'égalité des droits.

Surtout la prostitution, et a fortiori la prostitution légitimée renforce la hiérarchie des genres dans la conscience de la société dans son ensemble. Et participe grandement à la légitimation de la domination masculine et sa violence. Prétendre que la pénalisation rendra les clients encore plus dangereux qu'ils le sont aujourd'hui est quand même un raisonnement d'une grande perversité. D'abord parce que c'est la reconnaissance qu'ils sont violents et dangereux. Et dans le même temps l'affirmation que c'est une violence qu'il faut bien tolérer, admettre, et ne surtout pas réprimer. Autrement dit, on doit sévir contre les auteurs de violence conjugale, sexiste, sexuelle, sauf s'ils sont les clients d'une prostituée. On ne peut pas violenter une femme sans être puni, sauf si elle est une prostituée. On peut toujours compenser une violence sexuelle, un traumatisme sexuel par une compensation financière, modeste évidemment. Si une personne vous propose de lui faire du mal en la payant, vous en avez le droit... C'est cela, la lutte pour une société débarrassée de toute oppression de classe et de genre? C'est cela l'éducation donnée aux enfants? Parce que c'est aussi de cela qu'il s'agit.

Enfin, prétendre que l'on n'a pas manifesté pour protéger les clients de toute pénalisation ne me semble pas raisonnable. Cela me fait penser en effet au vote Chirac de 2002. Certes on a voté contre Le Pen... mais pour cela on a bel et bien appelé à voter Chirac, c'est un fait, le vote Chirac étant la seule façon de "battre Le Pen dans les urnes". Et c'est ce que tout le monde a vu. Aujourd'hui vous refusez la pénalisation et donc toute répression des clients. Certes, vous dites que c'est pour protéger les filles de ces salopards dont on sait tous ce qu'ils font et peuvent faire. Mais cela, c'est votre motivation exprimée, l'action, elle, c'est bel et bien de vous interposer entre les clients et la répression. Et cela a d'autres implications, comme ne pas définir explicitement la prostitution comme une violence faite aux femmes. Car sinon, vous ne pourriez refuser de punir les violenteurs. Et sur cet escamotage, vous pouvez ainsi vous allier au lobby proxénète. GM, tu peux me traiter de menteur, c'est ainsi que je vois les choses. Je dis cela non pour que tu cesses de dire que je mens, cela m'indiffère, mais pour montrer aux "copains", que je combats ce que je vois et comprends comme je le vois et le comprends, et que j'ai des raisons pour le voir et le comprendre ainsi.
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Message  sylvestre Dim 8 Déc - 10:52

Toussaint a écrit: Pas seulement en gardant la mémoire de Ulla et ses copines, cornaquées de très près par les proxos, de leur propre aveu, mais qui juraient leurs grands dieux qu'elles étaient libres comme le vent...
Au sujet d'Ulla : d'une part elle n'est pas la seule ex-prostituée de l'histoire du monde, beaucoup d'autres n'ont pas fait ce genre de déclarations. Mais surtout, tu passes sous silence d'autres choses pertinentes au débat qu'elle dit aujourd'hui...

Pourtant, elle espère toujours ce qu’elle réclamait hier : protection sociale et respect. "En 30 ans, rien n’a été fait, fulmine-t-elle. On revient à la case départ".

Faut-il, pour autant, légaliser ? Surtout pas, tranche-t-elle. Que faire, pénaliser le client ? "Cela va alimenter la clandestinité". Rouvrir les maisons closes ? "C’est le pire : de l’abattage en milieu fermé. Et ça entretient le proxénétisme". Le fléau, c’est le proxénète qui transforme la prostitution en esclavage : "qui nous maltraite comme du bétail", dit Ulla.
http://8mars.info/ulla
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Message  verié2 Dim 8 Déc - 11:18

Toussaint
en voyant les positions du NPA, on dirait qu'il vaut mieux laisser la Séléka massacrer que de soutenir une intervention française
C'est HS, mais on comprend en effet que Toussaint rejette Lénine... Toussaint prend pour argent comptant les discours impérialistes.  Au bon vieux temps des colonies, c'était plus simple évidemment : les colonialistes se vantaient d'agrandir leur empire et n'avançaient pas de prétextes humanitaires.
Si le texte de Lénine (sur la prostitution) peut s'analyser, c'est en tout cas certainement pas avec le moindre rapport avec le mouvement féministe actuel.
Lénine parle de "duchesses, de comtesses, d'évêques, de pasteurs, de rabbins, de fonctionnaires de la police et de philanthropes bourgeois de tout poil !"  Aujourd'hui les dames patronnesses sont un peu plus branchées, l'aristocratie est une espèce en voie de disparition, même si on trouve encore des duchesses parmi elles (genre Lady Di) et des curés et bonnes soeurs, comme ceux qui dirigent le Nid. Mais, bon, le "profil moyen" de ces bonnes âmes se rapproche plutôt de celui de ces féministes médiatiques et mondaines, genre Fourest et Belkacem, que tu exècres d'ordinaire quand elles prétendent dévoiler les femmes de force.

Mais une chose n'a pas changé : les moyens envisagés.
Lénine
Quels étaient donc les moyens de lutte réclamés par les délégués bourgeois au congrès, ces gens délicats ? Deux moyens avant tout : la religion et la police.
La morale laïco-républicaine bourgeoise s'est ajoutée à la religion, sans l'éliminer (voyez Le Nid - bis), mais c'est toujours sur la police qu'on compte pour faire le boulot sur le terrain.

Mais c'est sans doute un moindre mal aux yeux de Toussaint qui, tout comme il soutient l'armée impérialiste en Afrique, soutient maintenant la police dans l'hexagone...

Le monde a beaucoup changé depuis Lénine, certes. Mais, l'hypocrisie des classes dominantes n'a pas diminué d'un iota, même si son discours s'est adapté...

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Message  Achille Dim 8 Déc - 12:22

verié2 a écrit:La discussion gagne en effet à être plus posée et débarrassée des outrances, insultes, falsifications et réductions de positions...
Voyons voir

verié2 a écrit:
...mais on comprend en effet que Toussaint rejette Lénine... Toussaint prend pour argent comptant les discours impérialistes.  
... Aujourd'hui les dames patronnesses sont un peu plus branchées, l'aristocratie est une espèce en voie de disparition,  même si on trouve encore des duchesses parmi elles (genre Lady Di) et des curés et bonnes soeurs, comme ceux qui dirigent le Nid.
...La morale laïco-républicaine bourgeoise s'est ajoutée à la religion, sans l'éliminer (voyez Le Nid - bis), mais c'est toujours sur la police qu'on compte pour faire le boulot sur le terrain.
...Toussaint qui, tout comme il soutient l'armée impérialiste en Afrique, soutient maintenant la police dans l'hexagone...
Vérié2 après avoir posé une déclaration contre les outrances, insultes, falsifications... etc. se livre, comme à chaque fois qu'il intervient, à des outrances, insultes, falsifications.

Verié2 n'a sans doute pas fait grand chose pour lutter contre le lobby proxénète, pour aider les personnes prostituées, ... . Ce n'est pas un drame car on ne peut pas mener tous les combats à condition de ne pas considérer comme de la merde les combats dont on est absent : Il débinait et débine sur le NID (liens avec l'église, absence de prévention, aristocratisme..)alors qu'il en ignorait l'existence il y a quelques jours. Il  bavait sur la loi qu'il n'avait pas lu affirmant que le délit de raccolage passif était maintenu... Ses positions et méthodes sont répugnantes le rangent  aux côtés des militants prostitueurs ardents défenseur de lobby proxénète.

La lutte politique ne se mène pas uniquement devant un clavier à coups de citations de Lénine, mais principalement dans l'action. Dans notre cas elle se mène dans les bois, les rues des faubourgs, les camionnettes, les caves... pour aider les prostituées contre les réseaux et la traite.
Elle se mène au niveau juridique par l'abolition du délit de racolage et la pénalisation du client prostitueur.
Elle se mène dans le combat contre les organisations et militants prostitueurs (STRASS)...
Elle continuera pour obtenir une véritable protection des personnes prostituées (statut de réfugié et réunification familial pour les victimes de la traite, aide financière, logement, formation...etc.). Elle luttera contre la traite le proxénétisme (peine ouvrant droit à dédommagement, expropriation des biens...)... etc.
Des organisations mènent ce combat il faut les soutenir et convaincre, si il n'est pas trop tard, le npa de le rejoindre.

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Message  Rougevert Dim 8 Déc - 12:35

Toussaint a écrit:Si le texte de Lénine peut s'analyser, c'est en tout cas certainement pas avec le moindre rapport avec le mouvement féministe actuel. Lénine n'était pas féministe et il ne parle pas des féministes non plus. Faire le parallèle entre ce dont parle Lénine et ce qui se passe aujourd'hui relève de l'escroquerie intellectuelle. Mais c'est bel et bien le genre de pastiche des propos de Lénine pour essayer de l'utiliser contre le féminisme de la fin des années 60 (exactement ce que décrit Delphy dans l'Ennemi Principal) que l'on voit revenir ici parce qu'elles osent s'attaquer au droit du client à acheter du sexe. Ce n'est pas un hasard, et ce n'est donc pas étonnant. Décevant tout au plus, mais bon, aucune militant-e qui a participé à des débats sur la pénalisation des clients ou la pornographie ne sera surpris. Typique, classique, habituel... c'est la solidarité de genre, les mâles se rebiffent...
Ben non voyons.
Tout ce qu'a écrit Lénine concerne un passé, emporté avec lui, et qui ne perdure pas.
Je ne sais pas si Lénine était féministe, mais je sais qu'il était communiste et que la révolution d'octobre a donné aux femmes des droits nouveaux et importants.
Je n'ai pas trouvé de texte signés de Lénine, ni de Trotsky, qui permettraient de répondre à cette question.
Je voulais simplement faire remarquer que Vérié2 n'avait fait que reprendre les mots "outranciers" de l'article de Lénine
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Message  nestor Dim 8 Déc - 13:19

On se demande bien pourquoi on critique l'intervention en RCA. Vous avez pensé au nombre de gens qui mourront si la France n'y va pas? Cela vous fait rire, les menvussa, ou vous n'y avez pas pensé? Pourtant, en voyant les positions du NPA, on dirait qu'il vaut mieux laisser la Séléka massacrer que de soutenir une intervention française
Tu as tendance a  un       peu tout mélanger Toussaint  , non?

Par contre j'ai vu que tu t'attaquai  a la "pornographie" ,  c'est prévisible quand on enfourche un   dualisme a  la bouche  pleine  de  "valeurs morales"  et  qu'on veut les  imposer  aux autres  .

comme pour le "désir" ,   c'est le  flou total ( si on pose  cette notion objectivement c'est qu'on on est un "client ",   .......)

Alors Toussaint où commence la "pornographie" ?
(tiens  je me rappelle  d'avoir été puni  "pour introduction de revue pornographique " au collége,  .....C'était "harakiri" ! )


Morceaux  choisis de litterature vaticanesque  
http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/pccs/documents/rc_pc_pccs_doc_07051989_pornography_fr.html

Donc des   notions communes  avec les positions des dualistes    sur la prostitution  . La principale étant d'affirmer , comme  dans le texte du  FdesN  que tu  as mis en ligne,  que   l'on posséde   la Vérité en matiére de "valeurs morales" et par conséquent  le droit de punir autrui si elles ne sont  pas respectées..(c'est aussi  a partir de cette position de "Vérité  morale "  le droit que tu t'adjuges  de  stigmatiser  tes contradicteurs )  

C'est grave quand même  ........

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Message  verié2 Dim 8 Déc - 13:26

Une remarque. Valls, à l'unisson avec (une partie de ?) la police s'est dit plutôt hostile à la suppression du délit de racolage et à la pénalisation des clients. Les flics en général redoutent de perdre des moyens de trouver des indicateurs (trices) grâces aux chantages sur les femmes qui opèrent dans la rue et (une partie de ceux ?) des "moeurs" de perdre une source de profits grâce au racket - on sait qu'une partie de ces flics sont de mèche avec les souteneurs quand ils ne sont pas souteneurs eux-mêmes...

Comment vont-ils s'adapter à cette nouvelle situation ? Probablement en exerçant le chantage suivant sur les prostitué(e)s : "Si tu n'es pas gentille avec nous, on va embarquer tes clients. Si tu veux qu'on les laisse tranquilles, tu sais ce qu'il te reste à faire..."

Rien de nouveau donc sous le soleil : les clients seront "tolérés" à certaines conditions, comme les femmes qui racolaient l'étaient jusqu'alors... sous condition.
La

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Message  verié2 Dim 8 Déc - 13:46

Alors Toussaint où commence la "pornographie" ? a écrit:
Toussain met en effet un peu tout dans le même sac. Il n'en reste pas moins que la pornographie "industrielle" a des liens de cousinage avec la prostitution. Des personnes sont payées pour des actes sexuels non désirés. C'est un peu moins dégradant et moins dangereux que de tapiner dans la rue et d'avoir des relations sexuelles avec des inconnus, mais ça peut, dans une partie des cas, s'apparenter à la prostitution.

Ce qui est condamnable à mon avis, ce n'est pas d'éprouver du plaisir à visionner des images sexuelles, d'éprouver une excitation en "matant" des rapports sexuels etc, le voyeurisme consenti n'est pas un délit, mais ce sont les conditions dans lesquelles les films (peut-être pas systématiquement) ont été tournés, la façon dont sont traités les "acteurs/trices" de ces film. Sans compter celles et ceux qui doivent aussi se prostituer - j'imagine que ça existe.

Après, il y a en effet le problème des limites entre pornographie et érotisme - la pornographie étant souvent "l'érotisme des autres". Où commence donc la pornographie?
Dans les années soixante, Mme de Gaulle (surnommée Tante Yvonne), avait envoyé un courrier de protestation à l'ORTF parce qu'on voyait le dos nu de Thérèse Paquin dans un film passé à la TV...

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Message  Toussaint Dim 8 Déc - 13:51


Marie-Victoire Louis

À propos de la pornographie

"Cette violence dont nous ne voulons plus"


date de rédaction : 01/09/1986

Nous avons signalé dans notre bulletin précédant, deux ouvrages canadiens 1qui traitent tous les deux un sujet qui ne fait pas, en France, l'objet de grandes recherches : la pornographie. Pourquoi se risquer à parler ici de pornographie ? Ne nous détournerions-nous pas de notre sujet spécifique - les violences au travail - dont on finit tout de même par accepter de débattre sur la place publique ?

Il nous est apparu au contraire, qu'une association créée contre les violences au travail, et qui, en particulier, dénonce le "harcèlement sexuel", ne pouvait pas ne pas retrouver dans ces ouvrages ses préoccupations, ses interrogations, une grille de lecture d'une société dont il lui est si difficile de se faire entendre.

La pornographie, c'est un thème que nous n'abordons pas, en France, semble-il, sans mauvaise conscience ni sans crainte du ridicule.

Voilà ces femmes libérées qui protestent ! Elles censurent "l'érotisme", elles s'offensent pour des affiches et des publicités qui ne leur conviennent pas etc...

Au nom de cette liberté d'expression que nous revendiquons en même temps que le droit au plaisir, il convient d'abord que nous nous taisions. On n'en finit plus de savoir s'il faut interdire d'interdire ou interdire d'interdire d'interdire ; même si ce n'est pas sans malaise qu'on se laisse ainsi piéger, le résultat est qu'on se détourne d'une réalité qui impose un modèle social et sexuel auquel nous devrions nous conformer.

Cécile Coderre et Richard Poulain enseignent au Département de Sociologie de l'Université d'Ottawa, ils ont conduit une très importante recherche à laquelle ont participé des étudiant-es de l'Université et qu'ont soutenue de nombreuses féministes ainsi que des groupes divers parmi lesquels le "Comité masculin contre le Sexisme " (Outaowais)

Ce travail fournit un rigoureux état des lieux.
Il apporte une somme d'informations sur "cette facette de la réalité quotidienne... omniprésente, ramifiée et envahissante" et propose une étude des "significations" qui retient l'attention.

Le texte de Micheline Carrier est un témoignage, un cri du coeur qu'on ne peut plus cesser d'entendre : "Il m'a fallu quelque six mois pour me remettre des quatre ans consacrés à une recherche" sur le terrain" dans le domaine de la pornographie... Aujourd'hui qu'on me traite de moraliste, de puritaine, de mal baisée ou de je ne sais trop quoi quand je dénonce l'exploitation des femmes dans l'industrie pornographique, cela m'effleure à peine. J'ai compris à force de les entendre et de n'entendre que ces arguments, qu'ils servent de faux-fuyants à des gens en mal de justification. "

C'est un ouvrage violent, violence non seulement de ce qu'il dénonce et révèle, mais violence aussi de l'analyse qu'il en présente : angoissante mais cohérente dénonciation d'un "système" d'idées et de comportements, ce qui justifie le sous-titre : "La pornographie, base idéologique de l'oppression des femmes".

La pornographie c'est avant tout une industrie florissante et lucrative. "Il ressort qu'aux États-Unis en 1979-1980, les revenus de la pornographie se chiffraient à $ 4 milliards avec quelque $ 60 millions de profits nets soit 400 % de plus que l'année précédente" (Poulain/Coderre). "Commerce masculin, la pornographie vise essentiellement un marché masculin : les hommes représentent 80 % des consommateurs de femmes, 90 % des spectateurs de clubs de danseuses nues, 95 % des acheteurs de revues". (Poulain/Coderre).

Dans sa logique de marché, la pornographie ne peut pas se confiner à un espace réservé - comme on voudrait nous le faire croire - où personne ne serait après tout, obligé de s'aventurer. Elle franchit les murs grâce à l'infinie puissance de la technologie moderne : la distribution par câbles de programmes télévisés permet aussi de nouvelles emprises. Elle les franchit aussi sans notre consentement quand elle imprègne chaque jour plus sûrement les messages publicitaires, paroles et timbres de voix de la radio et de la télévision, images de la télévision et des publicités de journaux.
Il est difficile - impossible - de ne pas consommer la pornographie.

Quant à l'espace public - territoire, il est vrai que les femmes ont toujours eu à " revendiquer" -, il propose de façon toujours plus obsédante, à propos de tout et de n'importe quoi, cette image de "la femme" qui vient sans qu'on y prenne garde de la pornographie : corps et parties du corps, mais aussi, un certain type de rapports entre les hommes et les femmes ou des hommes avec des femmes, la femme et son mode d'emploi. (Cf., affiche RATP )

Ce qui s'organise ce n'est pas simplement une réponse plus sophistiquée et plus satisfaisante à une demande existante. Véritable et monstrueux lavage de cerveau, la production pornographique organise et " informe" la demande elle-même - effet d'une cause sans doute, mais cause à son tour d'effets que l'on peut repérer. "Elle est fantasme et industrie. Elle est pourrait-on dire, au carrefour du libidinal, du social, du politique et de l'économique. Elle procède de tous les champs, car elle est à la confluence du patriarcat et du capitalisme. La pornographie appartient à l'histoire contemporaine... ". (Poulain/Coderre)

Ceux - et celles - pour qui la pornographie, étant avant tout du libidinal, est uniquement affaire de liberté individuelle - ne veulent pas connaître et assurément ont intérêt à négliger cette face de la question : phénomène d'exploitation de femmes - et d'enfants - qui est d'ici et de maintenant, la pornographie, "... quelle que soit sa forme, constitue une marchandise et une marchandisation d'êtres humains réels ". (Poulain/Coderre)

Mais de quelle image des femmes la pornographie est-elle porteuse ? Êtres de chair, êtres "naturels", êtres inférieurs, si proches de l'animalité, les femmes n'existent que par le sexe et pour le sexe.

Ce sont des femmes qui ne s'appartiennent plus et qui doivent se donner toutes entières aux hommes. Elles donnent en parure leur intimité, leur pudeur; elles s'offrent, passives, toujours disponibles, disparaissant ainsi littéralement dans le besoin d'autrui. Corps réceptacle, cible a priori conquise, corps morcelé - alors que l'homme conserve son intégrité - corps battu, utilisé, manipulé, accessoire masculin. Corps sans vie, en attente exclusive du pénis, corps à dominer, à soumettre.
L'image des femmes est celle de jouisseuses, de débauchées et d'allumeuses.
L’un des thèmes dominants est le désir secret de la victime d'être subjuguée, forcée de se soumettre et pourquoi pas violée.
Femmes sans défense, intégrité, ni protection qui se livrent toutes entières à la puissance et à la domination masculine.
Femmes sans identité ni conscience propre, que pourraient-elles refuser ?
Ainsi, celles qui refusent ne veulent au fond qu'exciter un peu plus que les autres.

Le mépris, la domination, la faculté d'user d'un bien dont on dispose est donc au coeur de la "jouissance" pornographique. Alors pourra-t-on enfermer les femmes, toutes les femmes, dans un état permanent d'infériorité, de soumission, d'infantilisation.

Chosifiées, marchandisées, les femmes n'ont aucune sexualité propre : cette harmonisation fictive de leurs désirs et des désirs des hommes (présumés dans les deux cas) permet ainsi la perpétuation d'une domination masculine agressive et exclusive.

La pornographie est donc une exploitation d'une pseudo activité sexuelle de "la femme" qui procède - comme le singulier le révèle - de son appropriation privée et collective. À faible coût, tant monétaire que relationnel, mais non sans avantages !
Combien d'hommes prennent leur revanche sur la vie en se délectant de l'avilissement des femmes qu'ils ont souvent eux-mêmes contribué à provoquer !
Combien d'hommes, grâce à cette faculté qui leur est donnée ainsi de disposer symboliquement du corps des femmes croient pouvoir les posséder toutes ! Combien d'hommes ont besoin de cette image de "la femme" pour pouvoir se sentir supérieurs à toutes les femmes !

Mais cette appropriation bien sûr ne saurait être exclusivement symbolique et fantasmatique ; elle doit s'inscrire dans des rapports sociaux concrets. Là aussi nous sommes toutes atteintes et toutes concernées par l'image des femmes qui est donnée.
Entre le fantasme et la réalité le fossé, en outre, est tel qu'il ne peut souvent être comblé que par l'obscénité, le harcèlement sexuel et le viol.

Citons ainsi le film SNUFF (Poulain/Coderre, p. 70) où l'on assiste à une vraie mise à mort d'une femme après diverses mutilations, des écrans de flippers qui sanctionnent la victoire du joueur par le droit au viol.

Mais aussi les publicités qui affichent sur tous les murs des femmes enchaînées, offertes à la sodomisation, noires si possible.
Le Bureau de Vérification de la Publicité, si prompt à réagir - à juste titre - par rapport à la publicité Benetton suspecte d'antisémitisme, s'est-il insurgé contre la " femme, mode d'emploi" affichée sur tous les murs du métro.

Comment ensuite nous regarderont nos collègues hommes ?

La pornographie est avant tout l'expression d'un rapport de force, d'un abus de pouvoir et l'exaltation de la domination d'un être humain sur un autre. C'est pourquoi les "matériaux de base" sont surtout constitués de femmes et d'enfants. Et qu'il existe aussi une pornographie homosexuelle n'enlève rien à la validité du modèle.

La pornographie censure les effets douloureux de la violence; elle banalise le mépris des femmes et l'abus sexuel. En ne décrivant que des comportements dégradants et opprimants, on les légitime et donc on les encourage.

De plus, cette réification du corps des femmes s'accompagne d'une dévalorisation de son physique réel.La femme ne plaît que par son physique, mais celui-ci s'avère toujours défectueux (il suffit d'écouter certains commentaires masculins dans les bureaux des secrétaires les lundis matin sur les playmates de Cocoricocoboy du samedi soir).

Et c'est ainsi que tant de femmes ont honte de leur corps et se refusent le droit au plaisir. L'acte sexuel détaché de toute forme de tendresse n'est plus - au mieux ! - qu'une performance technique dont les femmes connaissent si bien le vide comme la fatuité - à moins de considérer l'amour comme un plaisir solitaire.

Ainsi la pornographie ne glorifie pas les femmes comme on veut nous le faire croire ; elle les marchandise et les méprise. Comme pour les marchés d'esclaves, chaque homme peut évaluer, choisir, acheter le corps pornographique qu'il veut. Celui-ci subit donc "une triple aliénation ; comme fantasme, il disparaît dans le besoin d'autrui ; comme corps, il fait office de statue articulée, à foutre ; comme personne enfin, il est totalement instrumentalisé". (Poulain/Coderre)

Que ce marché s'appuie sur une misère sexuelle et affective masculine réelle ne saurait occulter le prix que, nous, femmes, payons.

Il faut du courage pour révéler le fonctionnement de l'institution pornographique en dévoilant l'image de "la femme" qu'elle véhicule.
Car celle-ci conforte tous les modèles réactionnaires et tous les pouvoirs, et notamment le pouvoir masculin au travail.

On est ainsi conduit à s'interroger sur la nature de tant d'acquis des luttes féministes. Les femmes des sociétés industrielles démocratiques occidentales qui ne veulent pas passer pour des hystériques en continuant d'affirmer certaines revendications, et déclarant révolu le temps des luttes, s'accordent sans doute de grandes gratifications. Mais elles ne parlent ni au nom des femmes, pas plus qu'elles ne peuvent se prétendre féministes.

Il faut savoir aussi que bien des femmes d'autres cultures et certainement plus opprimées, qui aimeraient, elles aussi, " rompre leurs chaînes" ne trouvent pas forcément enthousiasmants les rapports hommes/femmes dans nos sociétés dites "libérées".
À voir plus sérieusement pourquoi nous n'offrons pas un modèle aussi convaincant que nous le pensions, nous gagnerions peut-être en efficacité comme en qualité d'être.

Si nous n'étions pas aussi persuadées de la perfection de nos acquis - qu'il ne s'agit pas ici de nier - nous crierions peut-être davantage avec les femmes d'Iran, d'Afrique du Sud ou d'ailleurs pour dire que le pouvoir que tant d'hommes s'arrogent encore sur tant de femmes est intolérable.

On voudrait que les enjeux politiques - qui de toute façon nous concernent toutes et tous - nous fassent taire ; il y a des catégories dont le sort est ainsi toujours remis " à demain".

Et c'est aussi au nom du respect dû aux autres cultures que nous devrions nous taire. Mais qui oserait émettre de telles exigences par rapport à Médecins sans frontières ou Amnesty International ? .

Il faudrait plutôt que les femmes d'ici se fassent aussi de la fragilité de leur statut une idée plus juste et qu'elles refusent plus avant de se laisser enfermer dans l'amalgame antisexisme = censure.
Toussaint
Toussaint

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