"En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
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Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Je pense en effet qu'une partie de ta critique du bouquin relève de ce travers : l'idée que ce récit soit une restitution assez véridique de la réalité vécue par Edouard Louis ne semble pas t'effleurer. Ou alors, si ce récit est vrai, l'auteur aurait dû mettre un mouchoir sur ce qu'il a vécu, l'édulcorer, pour ne pas heurter la sensibilité de ceux qui, inconsciemment ou pas, classent les oppressions les unes par rapport aux autres selon qu'elles seraient anecdotiques ou fondamentales.verié2 a écrit:Peux-tu préciser à quoi tu fais allusion exactement ?Byrrh
Ce qui transparaît dans bon nombre de critiques de ce bouquin, y compris sur ce fil, c'est qu'on reproche un peu à un jeune d'origine très populaire d'ouvrir sa gueule
Edouard Louis, c'est indéniable, n'oppose pas les oppressions entre elles. Il montre leur simultanéité, leur proximité, les liens de causalité qu'il peut y avoir entre elles. Comme le souligne Prado, il n'a pas passé sous silence les murs humides et effrités du logement, les ardoises chez l'épicier, la maladie professionnelle, la pénibilité d'un travail ingrat et sous-payé, etc.
Son propos n'est pas immédiatement abordable, comme une notice de meuble en kit ou un reader digest ? En effet. Et on peut regretter que les questions complexes qu'il aborde le soient d'une façon qui rend possibles la méprise et le malentendu. C'est peut-être un écueil qu'il n'a pas suffisamment calculé. Mais voir dans sa démarche du mépris de classe, c'est un procès d'intention.
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Un récit, c'est toujours subjectif. Ca comporte une sélection consciente ou inconsciente des faits. Ici, seuls les faits négatifs, les comportements odieux, méprisables ont été pour l'essentiel choisis par l'auteur. Pour le reste, je n'ai pas dit que ce n'était pas véridique. J'ai dit qu'on ne sait pas ce qu'il y a de vrai, d'exagéré et de faux. Non pas tant dans les brimades subies que dans le manque total d'affection de sa famille, de ses proches etc.Byrrh
Je pense en effet qu'une partie de ta critique du bouquin relève de ce travers : l'idée que ce récit soit une restitution assez véridique de la réalité vécue par Edouard Louis ne semble pas t'effleurer.
Il me semble que c'est toi qui me fait un procès d'intention.si ce récit est vrai, l'auteur aurait dû mettre un mouchoir sur ce qu'il a vécu, l'édulcorer, pour ne pas heurter la sensibilité
Ce n'est pas tout à fait la même chose que ce qui précède ! Je porte un jugement - certes subjectif - sur le livre, pas sur l'auteur ! S'il n'était pas d'origine populaire, à mon avis, on aurait tendance plutôt à lui reprocher de parler d'un milieu qu'il ne connait pas.on reproche un peu à un jeune d'origine très populaire d'ouvrir sa gueule
Ce qui serait absurde : un auteur a parfaitement le droit de parler d'un milieu auquel il n'appartient pas. Il peut d'ailleurs parfois en parler mieux que des gens qui en font partie ou en viennent. L'idée que seuls ceux qui ont vécu quelque chose ont le droit d'en parler et peuvent le décrire correctement est fausse.
L'origine de classe de Louis n'est prise en considération que parce qu'il présente son livre de façon ambigüe, à la fois comme un roman et comme un témoignage. C'est ce qui explique la démarche du journaliste du Nouvel Obs qui a été interroger ses proches, ce qui a suscité la colère de Louis. Son livre entre tout autant dans la catégorie des témoignages de victimes que dans la littérature (même si je le trouve talentueux), à la manière de Moi, Christine F, prostituée et droguée, les récits de taulards, d'infirmières, d'assistantes sociales, de tous les gens que leur métier, leur situation ont mis en contact avec le sordide etc. Ca marche parce que les lecteurs se disent que c'est du vécu. Il y a un mélange de fascination voyeuriste, de dégoût et de révolte.
C'est en effet le problème principal. Et on ne peut pas non plus exclure, vu son intelligence, qu'il ait fait le calcul de vendre du trash. Une telle maladresse surprend de la part d'un auteur aussi fin. Les premières pages suscitent immédiatement cette interrogation. Ca me fait penser au dernier roman de Christine Angot, qui débute par un viol pédophile sordide dans des toilettes. Elle aussi a vécu des horreurs de ce genre, ou du moins l'affirme, et prétend dénoncer la pédophilie.on peut regretter que les questions complexes qu'il aborde le soient d'une façon qui rend possibles la méprise et le malentendu. C'est peut-être un écueil qu'il n'a pas suffisamment calculé.
Non, c'est un ressenti à la lecture du livre. Quant à ses sentiments intimes par rapport à sa classe d'origine, on ne va pas le psychanalyser pour les connaître...voir dans sa démarche du mépris de classe, c'est un procès d'intention.
Dernière édition par verié2 le Sam 22 Mar - 19:10, édité 1 fois
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Lu dans un article intitulé "Délit de Bellegueule" et paru dans Libération du 19 mars 2014, à propos des échanges entre l'auteur et des lecteurs de son livre :Prado a écrit: le dénommé Tristan l'interpelle devant tout le monde ("Alors Eddy, toujours aussi pédé ?) et tout le monde rigole, y compris Eddy. Pourquoi fait-il cela ?
Une étudiante lève la main : "La plus grande violence du livre, celle qui le rend presque illisible, c'est que jusqu'à la dernière phrase, Eddy Bellegueule rit quand on l'insulte, se montre complice de la violence dont il est victime." Elle assène : "C'est trop facile de se cacher derrière le rire." Edouard Louis : "J'avais la croyance qu'en riant on pouvait transformer l'homophobie en blague, la désamorcer."
Ces paradoxes qui n'en sont en fait pas, ces comportements bizarres que l'oppression fait adopter aux opprimés, il faut en effet être très perspicace pour les comprendre, ou être soi-même concerné-e par une oppression dite "spécifique". La psychologie des opprimés, cela devrait faire partie de tout un chapitre dans la formation des révolutionnaires...
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'être très perspicace. Ces comportements sont tout de même très, très connus. On les constate depuis longtemps chez toutes les catégories d'opprimés, les esclaves par exemple (1). Seuls les mao-stals des années 70 voyaient le prolétariat comme un bloc sans faille.Byrrh
Ces paradoxes qui n'en sont en fait pas, ces comportements bizarres que l'oppression fait adopter aux opprimés, il faut en effet être très perspicace pour les comprendre, ou être soi-même concerné-e par une oppression dite "spécifique". La psychologie des opprimés, cela devrait faire partie de tout un chapitre dans la formation des révolutionnaires...
Quiconque est un peu sorti de chez lui, a travaillé dans une entreprise ou seulement fréquenté des gens qui sont sortis de chez eux a pu constater ces comportements. Pour ma part, j'ai vu des femmes rigoler à des blagues sexistes et des Arabes et Blacks rigoler à des blagues racistes. Et même me reprocher de protester. Pourquoi, de la même façon, des homos ne rigoleraient pas en entendant des blagues homophobes ? Le principe de nombreux spectacles de cabaret a d'ailleurs souvent été de faire rire aux dépens des homos et ceux qui interprétaient les rôles d'homos maniérés et ridicules étaient souvent homos eux-mêmes.
Sans l'aliénation des opprimés de toutes catégories, on aurait probablement fait la révolution depuis un bail !
___
1) Les films Mandingo et 12 years a slave, entre autres, le montrent bien.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Verié, sincèrement, tu forces l'admiration. Tu sembles tout connaître à tout, et je ne doute pas que cette disposition d'esprit t'ait apporté un succès continu auprès de tous les publics.
Pour ce qui me concerne, moi qui ne suis ni femme, ni non-blanc, je ne prétendrai jamais tout connaître de ce que ces opprimés-là ressentent en toute situation. Ce qui est un sacré manque, car là réside souvent la clé qui permet de se faire comprendre et de faire avancer ses idées, ou simplement de ne pas se faire - légitimement - botter le derrière par des gens à qui l'on veut parfois présomptueusement apprendre la vie... leur vie.
Raison de plus pour être émerveillé par tes aptitudes.
Pour ce qui me concerne, moi qui ne suis ni femme, ni non-blanc, je ne prétendrai jamais tout connaître de ce que ces opprimés-là ressentent en toute situation. Ce qui est un sacré manque, car là réside souvent la clé qui permet de se faire comprendre et de faire avancer ses idées, ou simplement de ne pas se faire - légitimement - botter le derrière par des gens à qui l'on veut parfois présomptueusement apprendre la vie... leur vie.
Raison de plus pour être émerveillé par tes aptitudes.
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Ton ironie est un peu dure.Byrrh
Verié, sincèrement, tu forces l'admiration. Tu sembles tout connaître à tout
Je n'ai nullement la prétention de tout connaître, loin de là ! Mais le fait que les opprimés ont tendance à singer leurs oppresseurs et à rire de leurs blagues est un phénomène, me semble-t-il, très connu. C'est tout.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Je ne suis pas d'accord. Ainsi le chapitre "Portrait de ma mère au matin" est en grande partie consacré à cette question : pourquoi les soi-disant "erreurs" successives de sa mère étaient déterminées à l'avance, pourquoi elle est tombée enceinte à 17 ans et a ensuite galéré, pourquoi elle ne faisait pas de shopping avec sa fille (la fatigue, le manque d'argent), pourquoi elle empêchait ses enfants de se laver correctement, pourquoi elle fumait tout le temps et se saoulait ( l'angoisse permanente de ne pas gérer correctement le budget familial).verié2 a écrit:Il l'écrit en effet textuellement, mais ce n'est pas ce qui ressort du bouquin, car il le dit au passage mais ne le montre pas. C'est noyé dans le reste.Je ne sais plus à quelle page, il dit explicitement, et même de manière assez didactique, que sa famille et le milieu dans lequel il a évolué sont prisonniers de déterminismes sociaux.
Oui, il a choisi "les faits négatifs". Je te donne mon interprétation. On ne comprend pas bien le livre si on ne prend pas très au sérieux les premières lignes :verié2 a écrit:Un récit, c'est toujours subjectif. Ca comporte une sélection consciente ou inconsciente des faits. Ici, seuls les faits négatifs, les comportements odieux, méprisables ont été pour l'essentiel choisis par l'auteur. Pour le reste, je n'ai pas dit que ce n'était pas véridique. J'ai dit qu'on ne sait pas ce qu'il y a de vrai, d'exagéré et de faux. Non pas tant dans les brimades subies que dans le manque total d'affection de sa famille, de ses proches etc.
"De mon enfance je n'ai aucun souvenir heureux. Je ne veux pas dire que jamais, durant ces années, je n'ai éprouvé de sentiment de bonheur ou de joie. Simplement la souffrance est totalitaire : tout ce qui n'entre pas dans son système, elle le fait disparaître".
Alors peut-être qu'il y a eu des gens sympa avec lui (à commencer par ses copines d'ailleurs), mais sa souffrance en a effacé le souvenir, ou du moins cela n'a pas compté pour lui. Cette "souffrance totalitaire", c'est le sujet du livre, c'est à partir de là qu'il parle. Et s'il a choisi de n'évoquer que des faits négatifs, de ne parler que de ses dégoûts, c'est qu'il a ressenti les choses ainsi.
Cette souffrance, c'est notamment la "douleur" que lui ont infligée ses deux bourreaux du collège. Mais elle remonte bien avant le collège. C'est ce dont il parle dans le chapitre "Les manières" (et dans la 4e de couverture): le sentiment que, dès qu'il a commencé à parler, il a inspiré de la honte et du dégoût à ses parents.
Et c'est d'ailleurs une grand différence avec la souffrance ressentie par les enfants victimes de racisme : pour eux, l'oppression ne commence pas dans le cercle familial.
Je crois que tu te trompes en parlant de "manque total d'affection de sa famille, de ses proches etc". Ce n'est pas ce qu'il écrit. Tous ses personnages ont des comportements contradictoires et ne sont pas faits d'un bloc. Y compris ses bourreaux. Y compris lui. Et surtout ses parents.
Byrrh, je crois que tu m'as mal compris. Je ne demandais pas : pourquoi Eddy rit-il ? Cela, je l'avais compris. Je demandais : pourquoi Tristan fait-il cela ? Et j'avançais ensuite l'hypothèse qu'il agissait comme l'avait fait Eddy lui-même un jour : pour faire croire qu'il (Tristan) n'était pas gay. OK, c'est peu probable, mais la similarité entre les deux scènes fait qu'il y a une ambiguité, et je trouve pas mal que le livre s'achève sur une ambiguité : l'avenir est ouvert.Byrrh a écrit:
Prado a écrit:
le dénommé Tristan l'interpelle devant tout le monde ("Alors Eddy, toujours aussi pédé ?) et tout le monde rigole, y compris Eddy. Pourquoi fait-il cela ?
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Lu dans un article intitulé "Délit de Bellegueule" et paru dans Libération du 19 mars 2014, à propos des échanges entre l'auteur et des lecteurs de son livre :
"Edouard Louis : "J'avais la croyance qu'en riant on pouvait transformer l'homophobie en blague, la désamorcer."
J'applaudis des deux mains !Byrrh a écrit:
La psychologie des opprimés, cela devrait faire partie de tout un chapitre dans la formation des révolutionnaires...
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Bon il est clair que nous n'avons pas ressenti ce livre de la même façon. C'est en effet davantage une question de ressenti que d'analyse logique. Après tout, c'est normal, il en est ainsi de beaucoup d'oeuvres - livres ou films - au sujet assez fort. Inutile de s'étriper. Les critiques sont contradictoires aussi, il n'y a que les livres et films gentiment consensuels, qui ne dérangent pas, qui font l'unanimité. Pour ma part, comme je l'ai dit, je reconnais le talent de l'auteur mais je suis perplexe sur l'impact de son "roman-témoignage".
Voici une critique qui correspond en partie à ce que j'ai ressenti :
Voici une critique qui correspond en partie à ce que j'ai ressenti :
Tupelo Hassman aux Etats-Unis, Edouard Louis en France : deux premiers romans très différents mais qui plongent tous deux dans un univers souvent négligé en littérature, les ploucs et les cas sociaux. Avec une réussite inégale. Le quart-monde n’est pas un sujet facile en littérature. Deux écueils guettent : le misérabilisme et le pamphlet social, sans compter les clichés où il est facile de tomber. (...) On ne change pas tellement d’ambiance avec le premier roman d’Edouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule, si ce n’est qu’on n’est plus au Nevada mais dans le Nord de la France, au tournant des années 2000. Le narrateur, Eddy, a eu la malchance de naître dans une famille de ploucs et, pire, de ne pas lui ressembler : délicat, efféminé, il n’aime pas le foot et refuse de bosser plus tard à l’usine. Sa jeunesse est dès lors un calvaire, complaisamment décrit sur 220 pages. Attention les yeux : le père est bête, alcoolique et violent, la mère est homophobe et raciste, les collégiens passent leur temps à le tabasser en le traitant de pédé et l’horizon collectif se limite au CAP, à l’usine et aux discothèques. On voudrait compatir à la souffrance du narrateur, mais l’auteur, en dépit d’un incontestable talent (style, construction, etc.), charge tellement la barque (aucune lueur, pas la moindre pitié pour les personnages, peints comme des animaux) et va si loin dans le sordide (Eddy se fait violer par son cousin, etc.) que le lecteur finit par en perdre son sérieux : à force, on a l’impression d’être devant une sorte de caricature à la Cletus, le péquenot dégénéré des Simpson, l’humour en moins. On devine bien que ce n’est du tout le propos, mais Edouard Louis donne du coup l’impression d’observer ce monde sinistre avec une condescendance consternée, qui finirait presque par ressembler à du mépris de classe. D’où la gêne. Qu’on se rassure pour lui, cependant : le narrateur à la fin du récit s’arrachera à son milieu d’origine, direction Amiens puis Paris, où l’ascenseur républicain le propulsera jusqu’à l’Ecole Normale supérieure. On comprend qu’après ce miraculeux rétablissement, il ait eu besoin d’en finir avec Eddy Bellegueule. C’est bien, il peut passer à autre chose. Ludovic Barbiéri
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
verié2 a écrit:
Voici une critique qui correspond en partie à ce que j'ai ressenti :
(...)
Ludovic Barbiéri
"En partie" seulement, en effet, car Ludovic Barbiéri n'a, lui, pas dû passer plus d'une demi-heure à parcourir ce bouquin. Sinon, il n'écrirait pas qu'Eddy a été violé par son cousin.
Prado- Messages : 1274
Date d'inscription : 02/09/2011
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
J'avais remarqué. Mais c'est une erreur marginale. Le cousin en question, s'il ne l'a pas violé, se conduit tout de même ensuite de façon odieuse. (Tu vois, je l'ai lu, et pas en diagonale...)
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Je sors un peu du sujet du fil - je crois que nous avons fait un peu le tour, et il est sans doute bon d'attendre les réactions d'autres éventuels lectrices ou lecteurs -, pour évoquer un souvenir raconté il y a quelques années sur ce forum par Yannalan. Cela recoupe ma remarque sur la psychologie des opprimés.Byrrh a écrit:Ces paradoxes qui n'en sont en fait pas, ces comportements bizarres que l'oppression fait adopter aux opprimés, il faut en effet être très perspicace pour les comprendre, ou être soi-même concerné-e par une oppression dite "spécifique". La psychologie des opprimés, cela devrait faire partie de tout un chapitre dans la formation des révolutionnaires...
C'était dans les années 70. La Ligue participait à une manifestation où il y avait du grabuge, et il s'agissait de constituer ou de renforcer un service d'ordre. Deux militants de la Ligue - homos - avaient refusé, se disant inaptes à faire partie d'un SO, au prétexte qu'ils étaient homos... A force de prendre cette caricature dans la figure de la part de toute la société, ils avaient fini par y croire eux-mêmes, quitte d'ailleurs à ce que cette caricature se renforce encore et encore. Cette anecdote répond à ce que disait Verié à propos de ses souvenirs de jeunesse, quand il disait en gros qu'un homo qui aurait foncé dans le tas se serait fait respecter. C'est hélas plus compliqué que cela. Généralement, ce n'est pas encore à dix ou quinze ans que l'on a la ressource pour se convaincre qu'on n'est pas la "mauviette" ou la "chochotte" que les autres disent de vous.
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: "En finir avec Eddy Bellegueule" d'Edouard Louis
Sur l'anecdote en question, ces camarades étaient membres du SO. Ce jour-là, ils ont eu la trouille, ce qui se conçoit très bien et arrive à tout le monde, mais ils l'ont justifié en nous disant "vous comprenez, on est homos". Ca montre effectivement une intégration de l'oppression.C'est un peu comme "je suis une femme, je n'aime pas la violence"
yannalan- Messages : 2073
Date d'inscription : 25/06/2010
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