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LO et la nature de l'Etat russe actuel

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LO et la nature de l'Etat russe actuel - Page 4 Empty Re: LO et la nature de l'Etat russe actuel

Message  Eugene Duhring Mer 21 Déc - 16:58

verié2 a écrit:

Duhring
Pour l'URSS stalinienne, la même morale imposait de décrire ce régime non pas comme un Etat ouvrier dégénéré arc-bouté sur les acquis de la révolution d'Octobre mais comme un capitalisme d'Etat qu'il aurait été vain de défendre contre toute agression impérialiste.
Qu'il y ait eu des militants qui aient rejeté l'URSS en raison de la barbarie du stalinisme, c'est probable. Mais le goulag, la main d'oeuvre esclave, les massacres et la surexploitation des travailleurs (car il s'agit bien d'exploitation et non de "détournements bureaucratiques"), ce ne sont tout de même pas des arguments négligeables, non ? Par exemple, aujourd'hui, LO a beaucoup de mal à faire passer parmi les militants trotskistes russes l'idée que l'Etat de Poutine serait encore ouvrier, ça marche mieux en France où les gens ne subissent pas directement l'oppression et l'exploitation... Ce n'est pas seulement une question de "moralisme".

Mais surtout, cette barbarie stalinienne n'est pas du tout à l'origine des analyses de militants "historiques" comme Cliff et Bordiga ! La meilleure preuve en est que c'est assez tardivement que Cliff a rompu avec l'analyse trotskiste de l'Etat ouvrier dégénéré, alors que cette barbarie était connue depuis longtemps.

Donc, c'est parfaitement faux de prétendre que, dans leur ensemble, les courants "capitalistes d'Etat, auraient été animés par des motivations moralistes auxquelles ils se seraient efforcés de donner des justification théoriques. Inversement, on peut remarquer que c'est, pour une part, par une sorte de bizarre conception de la "fidélité" à caractère moral que LO tient absolument à affirmer que la Russie serait toujours un Etat ouvrier dégénéré aujourd'hui...
Je ne sais pas pour LO mais à lire Vals j'ai franchement l'impression que le sujet est suffisamment polémique pour qu'il use de circonlocutions et ne parvient jamais à la conclusion. A lire Vals toujours, je ne connais pas encore avec certitude sa caractérisation de l'Etat russe actuel ... La langue d'un bois encore très vert.
Pour ma part, la russie de Poutine n'a plus rien d'Etat ouvrier dégénéré. Elle s'est construite sur les décombres de la propriété collective vendue par blocs entiers à une petite-bourgeoisie corrompue, maffieuse et qui cherche à se constituer en vain pour le moment en classe bourgeoise.

Eugene Duhring

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Message  Vals Mer 21 Déc - 18:48

Elle s'est construite sur les décombres de la propriété collective vendue par blocs entiers à une petite-bourgeoisie corrompue, maffieuse et qui cherche à se constituer en vain pour le moment en classe bourgeoise.
.

Le "en vain" ne me parait pas superflu et montre à quel point le processus de décomposition est lent et à quel point il est vain de chercher des caractérisations absolues ou définitives...
Il ne s"agit pas de ruptures qualitatives brutales, d'un changement complet de l'appareil d'état mais de la transformation chaotique de ce dernier qui garde certaines prérogatives sur les groupements capitalistes qu'il n'h'ésite pas parfois à mettre au pas..
Et si je parviens pas à la conclusion, comme tu dis, c'est peut-être que pour l'instant, décréter une conclusion n'est pas une priorité à l'ordre du jour.
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Message  verié2 Mer 21 Déc - 19:13

Vals
Le "en vain" ne me parait pas superflu et montre à quel point le processus de décomposition est lent et à quel point il est vain de chercher des caractérisations absolues ou définitives...
Il ne s"agit pas de ruptures qualitatives brutales
, d'un changement complet de l'appareil d'état mais de la transformation chaotique de ce dernier qui garde certaines prérogatives sur les groupements capitalistes qu'il n'h'ésite pas parfois à mettre au pas..
Et si je parviens pas à la conclusion, comme tu dis, c'est peut-être que pour l'instant, décréter une conclusion n'est pas une priorité à l'ordre du jour.
Faut-il donc conclure que la contre-révolution, le changement de nature de l'Etat, c'est à dire son passage d'Etat ouvrier à Etat bourgeois, ne serait qu'un long "processus", sans saut qualitatif significatif ? Ce serait une vision "réformiste à l'envers" que critiquait Trotsky et que LO utilisait comme épouvantail pour polémiquer avec ceux qui considéraient que l'Etat de l'URSS avait changé de nature beaucoup plus tôt...
Polémique qui pouvait se résumer par la question :"Donnez nous la date de la contre-révolution !"

Mais, maintenant, selon la vision que tu résumes, il n'y aurait plus de date, ni dans le passé ni dans l'avenir. Juste un processus lent et quasiment non violent, difficile à évaluer avec certitude...

Cette vision est franchement non marxiste. Si on examine l'histoire de l'URSS-Russie, on constate que les sauts qualitatifs les plus importants ont eu lieu dans le passé : l'effondrement des organes de pouvoir ouvrier, la constitution de la bureaucratie en "classe pour soi" (ou caste/couche sociale etc peu importe) avec l'adoption de la théorie nationaliste bourgeoise du "socialisme dans un seul pays" suivie de l'éviction des derniers internationalistes, l'extermination des bolcheviks et une répression de masse contre toutes les classes populaires avec baisse drastique de leur niveau de vie, aggravation de leurs conditions de travail etc.

Cette phase sanglante, même si elle n'a pas consisté à détruire d'un seul coup des organes de pouvoir ouvrier, me semble un saut qualitatif bien plus considérable que les quelques escarmouches devant la chambre des députés en 1991, et même que le rétablissement de la propriété privée et l'abolition du monopole du commerce extérieur qui va avec.

Ou alors, il faut considérer que nous aurions affaire à une sorte de "contre révolution par étapes" dont l'abolition de la propriété d'Etat constituerait le dernier épisode ? Mais, si l'on tient compte du fait que cette propriété d'Etat n'avait pas, contrairement à ce que pensait Trotsky, un caractère de classe, il semble plus judicieux de considérer que la véritable contre révolution, celle qui a arraché le pouvoir au prolétariat, s'est produite beaucoup plus tôt. D'autant que cette théorie de la contre révolution par étapes, qui transformerait par petites touches un Etat ouvrier en Etat bourgeois colle mal avec la conception marxiste-léniniste de l'Etat.
décréter une conclusion n'est pas une priorité à l'ordre du jour.
Pas une priorité, peut-être... Mais disposer d'une analyse solide des tentatives de notre classe pour s'emparer du pouvoir est tout de même indispensable. Même si les travailleurs qui s'intéressent aujourd'hui à l'extrême gauche ne s'intéressent généralement que peu à ce genre de question. Dans un pays comme la Russie, comme dans les pays de l'Est ou en Chine, ça doit certainement passionner davantage les militants et sympathisants qui découvrent le marxisme...

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Message  Vals Jeu 22 Déc - 11:55

Lutte Ouvrière n°2264 du 22 décembre 2011


Il y a 20 ans : décembre 1991, l'URSS mise à mort par sa propre bureaucratie


Le 8 décembre 1991, il y a vingt ans, les dirigeants de la Russie, de l'Ukraine et de la Biélorussie décidaient de dissoudre l'URSS, l'Union des républiques socialistes soviétiques. La bureaucratie, qui depuis Staline s'était imposée comme couche dirigeante de l'URSS, avait ainsi trouvé le moyen de se débarrasser du président de celle-ci, Gorbatchev. Car, si Gorbatchev gouvernait au nom de cette couche sociale privilégiée et parasitaire, il incarnait aussi un certain contrôle sur elle. Le 25 décembre, Gorbatchev démissionna : l'URSS n'existait plus.

Le processus de désintégration de l'État atteignait ainsi un point de non-retour, dans un pays qui depuis des décennies apparaissait comme la seconde grande puissance mondiale, derrière les États-Unis.

Comment en était-on arrivé là ?

Si dans les années soixante-dix, sous Brejnev, l'URSS avait semblé si assoupie qu'on put parler à son propos de stagnation, celle dont hérita Gorbatchev en 1985, en parvenant au sommet de la bureaucratie soviétique, se trouva emportée dans un tourbillon de luttes politiques.

Le pouvoir suprême dont Gorbatchev était censé disposer se trouva contesté par d'autres membres de la direction de la bureaucratie. Pour s'imposer, faisant assaut de démagogie, chacun des camps en présence chercha appui dans des couches de plus en plus larges de la bureaucratie, puis de la petite bourgeoisie, et plus généralement de l'opinion publique. Aux intellectuels, des dignitaires d'un régime qui avait brimé leurs aspirations, même à pouvoir lire ce qu'ils voulaient, promirent la liberté. Et comme de nombreux petits bourgeois rêvaient de s'enrichir « comme à l'Ouest », ces bureaucrates ou d'autres promirent la liberté d'entreprendre et la « démocratie ».

Tous ces gens-là accolèrent de plus en plus ce mot de démocratie à ceux de marché et de libre entreprise. Mais pendant que les chefs « démocrates », avec à leur tête un ex-membre du Bureau politique du parti unique, Eltsine, discouraient sur la liberté d'entreprendre, des millions de bureaucrates faisaient main basse sur la propriété publique. L'économie et le pouvoir central furent paralysés, bien avant les lois de privatisation qui allaient légaliser ce gigantesque hold-up sur la propriété d'État soviétique. Dépecée par les chefs de la bureaucratie, l'URSS plongeait dans le chaos politique et social.

Vingt ans après

Attendue depuis trois quarts de siècle par la bourgeoisie, la fin de l'URSS fut acclamée par tous ceux qui, malgré le rôle conservateur et contre-révolutionnaire du régime depuis Staline, n'avaient ni oublié ni pardonné son origine révolutionnaire. Certains affirmèrent qu'on assistait à « la fin de l'Histoire » : Octobre 1917 ayant voulu ouvrir la voie d'un avenir débarrassé du capitalisme, ils affirmèrent que la mort de l'URSS signifiait que celui-ci était donc le futur indépassable de l'humanité. Et selon tous les tenants du système capitaliste, le retour de celui-ci promettait prospérité, progrès et démocratie aux peuples de l'ex-URSS.

En fait, l'ouverture de l'ex-URSS au marché signifia l'effondrement de son économie. Le pillage sans limites de ses ressources permit aux bureaucrates-affairistes de s'enrichir à la vitesse de l'éclair. La population paya cela d'un brutal appauvrissement. Les prix flambaient, dévorant le pouvoir d'achat des salaires et des pensions. Les classes laborieuses découvrirent le chômage de masse. La plupart des services sociaux gratuits que l'URSS garantissait disparurent. Cas unique en temps de paix, l'espérance de vie des hommes fit un bond en arrière du fait de la pauvreté, du désespoir noyé dans l'alcool et les drogues, de la mise à mal du système de santé gratuite.

Autrefois grande puissance, la Russie fut ravalée au rang de « puissance émergente », appellation hypocrite qu'on accole maintenant à des pays sous-développés un peu moins mal lotis que les autres. L'économie est devenue dépendante de quelques matières premières dont les revenus enrichissent, outre les compagnies occidentales, les bureaucrates ayant mis la main sur ces ressources. Il est vrai que, s'ils les contrôlent, ils ne contrôlent pas leurs cours, dans un marché capitaliste mondial en crise.

Quant à la démocratie promise à la Russie, on y trouve le règne du parti officiel, la censure d'État sur les principaux médias, l'assassinat de journalistes qui dérangent, et des élections auxquelles, en plus d'une fraude massive, ne participent que les partis agréés par le Kremlin.

La police politique a placé ses hommes, tel Poutine, à tous les niveaux décisifs de l'administration et du monde des affaires. Et si elle ne chasse plus ceux qui lisent des livres interdits, sa répression ne faiblit pas contre les groupes qui déplaisent au pouvoir, ou contre les travailleurs qui, refusant des syndicats officiels inféodés aux employeurs, en organisent d'autres, plus indépendants.

Mais il y a aussi ces régions du Caucase et de l'Asie centrale, anciennement soviétiques, soumises à d'impitoyables dictatures. Ici couvertes du voile de l'intégrisme religieux, là attisant la xénophobie et poussant aux pogroms, ces dictatures sont dominées par des despotes issus de l'ex-nomenklatura, parfois par des fantoches soutenus par la Russie. Les mafias dirigeantes organisent le pillage clanique des richesses, s'enrichissent dans la corruption, les trafics de drogue, d'armes et d'êtres humains. Et n'oublions pas les millions de femmes qu'elles renvoient à une oppression moyenâgeuse... sans que cela trouble tant soit peu les pays riches dont les capitalistes, tels les français Bouygues, Total, etc., sont en affaires avec ces régimes infâmes.

Le bilan de ces vingt années depuis la fin de l'URSS est terrible pour les populations. Et il est accablant pour tous ceux qui, ici et là-bas, ont voulu faire croire qu'un mieux résulterait pour les peuples d'une politique voulant rétablir le capitalisme.

L'URSS de Staline et de ses successeurs était définitivement passée, et depuis longtemps, du côté de la contre-révolution. Elle ne pouvait plus servir d'exemple ou d'appui aux travailleurs du monde entier dans le combat contre le capitalisme. Mais son existence même témoignait de la possibilité d'une organisation de l'économie autre que dominée par la course au profit privé et l'anarchie du marché. Malgré la bureaucratie, l'URSS avait montré, à l'échelle du pays le plus vaste de la planète, quels progrès, quel développement économique fantastiques pouvaient permettre la propriété collective des moyens de production et la planification de l'économie, rendues possibles par une révolution socialiste victorieuse.

La révolution d'Octobre 1917 avait ébranlé le monde. Mais le monde capitaliste ne s'est pas effondré et l'URSS a fini par disparaître. Pour autant, les raisons de combattre le système capitaliste, ses méfaits et son mode de fonctionnement aberrant n'ont en rien disparu. Il est plus actuel que jamais de lutter pour le communisme, c'est-à-dire la réorganisation de la société par la socialisation et la planification des moyens de production à l'échelle mondiale, alors que le capitalisme entraîne le monde dans la catastrophe.

Pierre LAFFITTE

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Message  Vals Jeu 22 Déc - 12:00

Lutte Ouvrière n°2264 du 22 décembre 2011


L'URSS : 1917-1991


Le pouvoir des soviets, mot russe pour « conseils », des députés d'ouvriers, de paysans et de soldats, fut instauré par la révolution victorieuse d'Octobre 1917 en Russie.

Sorti vainqueur de la guerre civile que les possédants locaux et les puissances impérialistes lui avaient imposée, le pouvoir soviétique créa, fin 1922, l'Union des républiques socialistes soviétiques, maison commune des peuples ayant choisi d'associer leur sort au sein du nouvel État ouvrier.

Cependant les révolutions ouvrières qui avaient éclaté ailleurs en Europe n'ayant pas triomphé, le pays resta isolé avec sa pauvreté et son arriération. Épuisés par des années de combat, de privations, les travailleurs n'avaient plus la force d'exercer le pouvoir, et la couche des bureaucrates, des administrateurs de l'appareil d'État, put s'en emparer.

Lénine ayant disparu en 1924, Trotsky et de nombreux bolcheviks combattirent cette dégénérescence bureaucratique et la fraction de Staline qui en était l'expression. Mais, sur fond de recul général du mouvement ouvrier, celui-ci l'emporta et les staliniens éliminèrent, politiquement puis physiquement, les militants fidèles aux idéaux et au combat d'Octobre.

Le slogan réactionnaire du « socialisme dans un seul pays » lancé par Staline reflétait l'aspiration d'une foule de bureaucrates à profiter des privilèges afférents à leur poste. Mais le régime stalinien prit rapidement la forme d'une dictature s'exerçant sur toute la population, mais aussi contre les bureaucrates. Il s'agissait de les contraindre à une discipline de fer face à une classe ouvrière épuisée, mais aux fortes traditions de lutte révolutionnaire.

Les bureaucrates durent accepter un régime de terreur pour protéger leurs intérêts généraux, y compris contre eux-mêmes. Mais à la mort du tyran, n'ayant plus à craindre pour leur vie, leur parasitisme s'étendit de façon considérable sur la société soviétique. Cela finit par épuiser ce qu'il restait du dynamisme dû à la collectivisation des moyens de production, à la planification de l'économie, etc., qu'avait permis la révolution d'Octobre. Arrivé au pouvoir en 1985, Gorbatchev tenta de faire sortir l'URSS de cette stagnation. Mais il se heurta au refus résolu de la caste privilégiée d'accepter qu'une autorité centrale puisse chercher à modérer son irresponsabilité et sa soif d'enrichissement.

L'État soviétique avait survécu à la guerre civile et aux ravages de l'invasion hitlérienne. Mais il ne put résister à sa propre caste dirigeante, qui mit en pièces l'URSS pour mieux en piller les richesses.

P.L.

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Message  verié2 Jeu 22 Déc - 12:26

l'URSS avait montré, à l'échelle du pays le plus vaste de la planète, quels progrès, quel développement économique fantastiques pouvaient permettre la propriété collective des moyens de production et la planification de l'économie, rendues possibles par une révolution socialiste victorieuse.
Eh bien non, c'est un mythe. A l'échelle historique, dans la période comprise entre 1914 et 1991, la Russie/URSS s'est développée beaucoup moins vite que bien d'autres pays, tels le Japon, la Corée, la Chine ou même le Brésil.

D'ailleurs, ce passage du texte de LO trahit la profonde incompréhension de l'auteur de l'article, qui pourtant connait bien la Russie d'aujourd'hui :
à la mort du tyran, n'ayant plus à craindre pour leur vie, leur parasitisme s'étendit de façon considérable sur la société soviétique. Cela finit par épuiser ce qu'il restait du dynamisme dû à la collectivisation des moyens de production, à la planification de l'économie, etc., qu'avait permis la révolution d'Octobre. Arrivé au pouvoir en 1985, Gorbatchev tenta de faire sortir l'URSS de cette stagnation

Ce passage pourrait en effet laisser croire que le régime stalinien hard était plus efficace (donc supérieur ?) au régime des Kroutchev-Brejnev. Le régime stalinien a réussi, en concentrant le surproduit social entre les mains de l'Etat, à développer une industrie lourde et surtout militaire... comme la Corée du Nord aujourd'hui. Et encore cette puissance militaire fut surestimée par la CIA afin de servir les intérêts des trusts de l'armement américain. Le régime stalinien a réussi un développement extensif de l'économie, grâce à ses méthodes brutales, en mettant au travail d'usine des millions de paysans, en utilisant le travail forcé, la terreur. Mais il a été incapable de passer au développement intensif, incompatible avec ces méthodes, d'où la crise économique, aggravée par le coût de la guerre d'Afghanistan (pas seulement la stagnation) qui a abouti à la crise politique et la chute du régime...

Croire que l'étatisation de l'économie suffirait à obtenir "un développement économique fantastique", plus rapide que ceux des autres pays, à l'écart de l'économie mondiale et de ses progrès technologiques, c'est en fait croire plus ou moins à la fable du "socialisme dans un seul pays". L'effondrement de l'URSS a fait justice de ce mythe quand on a découvert le caractère complètement obsolète de son industrie... à part son industrie militaire.

Le bilan du stalinisme, c'est d'avoir fait s'épuiser et crever au travail, pour une partie d'entre eux, des dizaines de millions de prolétaires russes, gaspillé les richesses naturelles, détruit l'environnement, construit des centrales nucléaires hyper dangereuses, pour bâtir une industrie militaire, dont une partie des produits sont aujourd'hui mangés par la rouille, et assurer les privilèges de la bureaucratie.

Tel est le bilan réel, non pas de la révolution de 17, mais de la contre-révolution stalinienne. Cela n'a rien de "globalement positif" (Nathalie Arthaud), même sur le plan purement économique...

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Message  BouffonVert72 Jeu 22 Déc - 19:32

Et évidemment LO passe sous silence ce qui, à mon avis, fit s'effondrer l'Urss : Tchernobyl...
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Message  gérard menvussa Jeu 22 Déc - 19:40

A l'échelle historique, dans la période comprise entre 1914 et 1991
Sauf que cela n'a pas de sens ! Si on prend au sérieux le concept "d'état ouvrier bureaucratiquement dégénéré" on est forcé d'admettre que les "performances" (y compris économiques) sont en perpétuelle stagnation ! Le train ralenti de plus en plus, jusqu'a s'arrêter complétement (le "train de la révolution" est une image courante de la révolution russe)
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Message  Vals Jeu 22 Déc - 19:50

BouffonVert72 a écrit:Et évidemment LO passe sous silence ce qui, à mon avis, fit s'effondrer l'Urss : Tchernobyl...


mais on comptait sur toi pour revenir à des analyses sérieuses...... sunny sunny sunny


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Message  verié2 Ven 23 Déc - 10:18

gérard menvussa a écrit:
A l'échelle historique, dans la période comprise entre 1914 et 1991
Sauf que cela n'a pas de sens ! Si on prend au sérieux le concept "d'état ouvrier bureaucratiquement dégénéré" on est forcé d'admettre que les "performances" (y compris économiques) sont en perpétuelle stagnation ! Le train ralenti de plus en plus, jusqu'a s'arrêter complétement (le "train de la révolution" est une image courante de la révolution russe)
Et pourquoi donc ce bilan n'aurait-il pas de sens ? LO, à la suite de générations de militants trotskistes et staliniens (avec évidemment des différences importantes entre les deux), estime que le bilan de l'URSS serait "positif" en raison d'un développement économique estimé "fantastique". La différence essentielle avec les staliniens, c'est que ces derniers ont nié le coût humain de ce développement, le caractère monstrueux de la dictature, les privilèges de la bureaucratie, sa politique internationale nationaliste etc, et évidemment la nécessité d'une "révolution politique".

Pour évaluer ce bilan économique, nous sommes donc bien obligés de le comparer avec celui de pays dont le niveau était équivalent ou légèrement inférieur ou supérieur à celui de la Russie à la veille de la guerre de 1914. Et force est de constater que les pays capitalistes "traditionnels", dans le cadre du marché mondial, se sont développés plus rapidement que l'URSS en partie autarcique.

Il n'y a que dans la période 1930-1940 que l'URSS s'est développée beaucoup plus rapidement que le reste de l'économie mondiale frappée par la crise, ce qui a pu faire croire à Trotsky que "les forces productives avaient cessé de croître" et que le socialisme faisait ses preuves au travers de la production d'acier et de charbon. Encore ce développement se concentrait-il essentiellement sur la production militaire. La population, elle, a vu son niveau de vie baisser. Le niveau de vie de la population de l'URSS ne remontera que dans les années soixante. L'URSS bénéficiera dans certaines mesures du boom de l'économie mondiale, sans toutefois parvenir à sortir du sous-développement d'une partie de ses territoires, contrairement au Japon parti d'un niveau un peu plus bas.

A partir des années 70-80, l'URSS connaîtra une stagnation et même un recul économique qui sera la cause fondamentale de son effondrement à mon avis.

Je ne vois pas du tout ce que vient faire là-dedans ton histoire de "train de la révolution". Shocked

Certains affirment que ce serait "l'élan" donné par la révolution de 1917 qui aurait permis un développement économique, qui, en fait, n'a rien eu d'exceptionnel à l'échelle historique. Mais, s'il y a eu un élan, c'est celui de la révolution bourgeoise, car la révolution russe ne dépassa jamais le stade, sur le plan économique, d'une révolution bourgeoise dirigée par le prolétariat. En Chine maoïste aussi, de ce point de vue, il y a eu un "élan" de la révolution, mais ces "élans" n'ont pas de caractère prolétarien et n'ont pas permis de se développer plus vite que le capitalisme "traditionnel".

Toutefois, on peut dire que ces révolutions, en détruisant les barrières féodales, en permis un développement capitaliste ultérieur plus rapide, comme en Chine et demain peut-être en Russie. Mais ces développement n'ont pas en eux mêmes un caractère "positif" ou "progressiste" à une époque où les moyens matériels seraient suffisant pour se développer dans le cadre d'un système socialiste, bien plus respectueux des hommes et des ressources naturelles. Sauf à considérer que l'humanité n'aurait pas été mûre pour le socialisme et qu'un nouveau développement du capitalisme était indispensable avant de passer à une autre étape, socialiste, de l'histoire humaine.
Sinon, le développement stalinien à marches forcées, au mépris de la vie humaine et de la nature, n'a été qu'un monstrueux gâchis... Tout comme d'ailleurs le"fantastique" développement de l'économie chinoise aujourd'hui, qui réduit des millions de gens à un semi esclavage pour produire les gadgets qui inondent le marché occidental. Car c'est bien probablement le développement le plus rapide de l'histoire humaine !
__
Dernière remarque. Si un pays isolé pouvait se développer de façon "fantastique", plus vite que les autres, grâce à l'étatisation des moyens de production, le "socialisme dans un seul pays" serait possible...

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Message  Copas Ven 23 Déc - 12:16

Dernière remarque. Si un pays isolé pouvait se développer de façon "fantastique", plus vite que les autres, grâce à l'étatisation des moyens de production, le "socialisme dans un seul pays" serait possible...

L'étatisation des moyens de production n'a jamais fait le socialisme.


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Message  Vals Ven 23 Déc - 12:34

Dernière remarque. Si un pays isolé pouvait se développer de façon "fantastique", plus vite que les autres, grâce à l'étatisation des moyens de production, le "socialisme dans un seul pays" serait possible....
verié2






Le fait que la centralisation et la planification de l'économie puissent faciliter le développement de la production ne signifie nullement l'instauration du socialisme....Contrairement à toi, LO considère que cette centralisation issue d'octobre, malgré la gabegie bureaucratique et la terreur stalinienne, a favorisé un développement réel de l'économie de l'URSS pendant plusieurs décennies.....pas moins, pas plus..!
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Message  verié2 Ven 23 Déc - 12:36

Copas a écrit:
Dernière remarque. Si un pays isolé pouvait se développer de façon "fantastique", plus vite que les autres, grâce à l'étatisation des moyens de production, le "socialisme dans un seul pays" serait possible...

L'étatisation des moyens de production n'a jamais fait le socialisme.
Nous sommes, il me semble, tous d'accord sur ce point. Mais :
1) Même avec sous un pouvoir prolétarien, cette étatisation ne permettrait pas de se développer plus vite. Elle ne permettrait que de parer au plus pressé et de satisfaire, dans certaines limites, les besoins immédiats de la population.
2) Sans donner une vertu "socialiste" à l'étatisation des moyens de production, Trotsky pensait que cette étatisation complète était impossible sans révolution prolétarienne - l'histoire lui a donné tort sur ce point... (C'est pourquoi LO, puisque nous discutons des positions de LO, s'est souvent acharnée à tenter de démontrer que l'étatisation aurait été moins complète en Chine, à Cuba ou dans les pays de l'Est qu'en URSS...)

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Message  verié2 Ven 23 Déc - 12:53


Vals
Le fait que la centralisation et la planification de l'économie puissent faciliter le développement de la production ne signifie nullement l'instauration du socialisme....Contrairement à toi, LO considère que cette centralisation issue d'octobre, malgré la gabegie bureaucratique et la terreur stalinienne, a favorisé un développement réel de l'économie de l'URSS pendant plusieurs décennies.....pas moins, pas plus..!
Faciliter le développement de la production, dans certaines limites, sans doute... Mais pas au point de permettre un développement plus rapide que celui des Etats insérés dans le marché mondial, ni même de favoriser un développement plus avantageux pour les classes populaires. Car on ne peut pas dire que la situation des ouvriers et paysans russes ait été meilleure que celles des populations des pays "équivalents", contrairement à ce que prétendaient les staliniens.

De plus, tu remarqueras que, dans tous les pays où cette étatisation a été réalisée, elle a avant tout servi à réaliser une accumulation primitive du capital sur le dos des populations. Les moyens concentrés aux mains de l'Etat ont été utilisés avant tout pour construire une industrie lourde et militaire. Il y a eu des "retombées" positives, sur le plan de l'éducation et de la santé, en Chine comme en URSS, et surtout à Cuba (dont la situation est tout de même très différente), car le combat contre l'illettrisme, dans ces pays "arriérés", était indispensable pour le développement économique. Mais ces retombées n'ont pas dépassé celles d'une révolution bourgeoise radicale ou des mesures de Jules Ferry... (Epoque et proportions gardées évidemment.)

Mais tout cela a été très chèrement payé par une partie de la population, en URSS comme en Chine. On ne voit donc pas en quoi il faudrait s'émerveiller devant un "fantastique développement" purement fantasmatique, ni même accorder un caractère
"globalement positif" à ce développement très relatif, dans la mesure où nous considérons que les forces productives sont suffisamment développées pour permettre le socialisme. Car ces développements à marches forcées ne représentent historiquement que des tentatives de d'Etats bureaucratiques servant de substituts à des bourgeoisies nationales faibles de se hisser au niveau de la concurrence internationale... en cravachant leur prolétariat !

S'il s'agit seulement de démontrer qu'une économie peut fonctionner sans patrons privés, c'est fait depuis longtemps et ça ne peut convaincre aucun prolétaire de la planète de la supériorité de ces Etats, bien au contraire, dans la mesure où cela s'accompagne d'une sur-exploitation qui n'a rien à envier à celles qu'on subit dans les pays équivalents...

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Message  gérard menvussa Ven 23 Déc - 13:12

Je ne vois pas du tout ce que vient faire là-dedans ton histoire de "train de la révolution".

C'est le train de la révolution qui circule dans l'hivers russe de 1921, il et bloqué par une congére Lénine, Trotski boukarine, zinoviev descendent avec des pelles, Lénine monte sur un banc et dit "Camarades, rien n'arrêtera le train de la révolution, retroussons nos manches" Aussitôt tout le monde s'y met, et le train de la révolution repart de plus belle ! On est en 1933 en sibérie, et le train est de nouveau bloqué par une congère (c'est la plaie des chemins de fers russe) Staline sort, avec une poignée de sbires armés jusqu'aux dents "Camarades, nous avons été victime de sabotage, le conducteur du train a été fusillé pour trotskysme, et le lampiste (l'éternel lampise) devra gouter aux mines de sel pour déviationnisme boukarinien". Après quelques fusillade le train repart ! Mais il est de plus en plus fatigué, il perd ses boulons, sa vapeur est de plus en plus noire, et il fait peine à voir. Brejnev s'adresse a un aréopage de vieillards cacochymes "Maintenant, c'est la coexistence pacifique, Nous allons acheter des pièces pour notre vieille locomotive a nos nouveaux amis américiains" Et le train repart une nouvelle fois. Mais ça ne dure pas longtemps. Il s'arrete totalement épuisé, ses boogies partent en morceau, sa locomotive est totalement hors service. Gorbatchev se avec ses conseillers "Nous allons mettre des rideaux sombres sur les vagons, on va bouger les essieux et on va faire tchou tchou comme ça les passagers croirons que le train continue à avancer " (tiré de "le communisme est il soluble dans l'alcool, blagues droles dans l'univers soviétique" )

Mis a part ça, je vois que tu défend la vision "menchevique" de la révolution russe (qui ne pouvait pas dépasser le stade de la révolution "bourgeoise", contrairement aux théses trotskystes de la "révolution permanente"
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Message  Copas Ven 23 Déc - 13:41

De plus, tu remarqueras que, dans tous les pays où cette étatisation a été réalisée, elle a avant tout servi à réaliser une accumulation primitive du capital sur le dos des populations. Les moyens concentrés aux mains de l'Etat ont été utilisés avant tout pour construire une industrie lourde et militaire. Il y a eu des "retombées" positives, sur le plan de l'éducation et de la santé, en Chine comme en URSS, et surtout à Cuba (dont la situation est tout de même très différente), car le combat contre l'illettrisme, dans ces pays "arriérés", était indispensable pour le développement économique. Mais ces retombées n'ont pas dépassé celles d'une révolution bourgeoise radicale ou des mesures de Jules Ferry... (Époque et proportions gardées évidemment.)

Et des fois moins.

D'un point de vue global l'éducation et la santé ont connu un effort important dans un grand nombre de pays en développement ou industriels.

En France il y eut effectivement le même effort, comme dans la plupart des pays. Même en matière de sécurité sociale on s’aperçoit que l’exception est étasunienne et pas française.

Sur les questions de planification on s’aperçoit que plein de choses ne sont pas si évidentes et pas si totales que cela. On peut prendre par exemple la difference entre le spatial soviétique construit dans la concurrence acharnée où tous les coups sont permis, et la planification américaine au travers de la NASA qui garde commandement malgré la sous-traitance au privé, on peut également prendre exemple sur les énormes différences en Chine et ça depuis longtemps en matière de planification et de développement, etc.

Mais bon, sans pouvoir des travailleurs, point d'état ouvrier (sauf une courte période volontariste où une direction sous l'élan révolutionnaire se comporte quelques temps en pouvoir ouvrier), point de socialisme.
Il ne faut pas tremper le drapeau du prolétariat dans la boue d'un régime nomenclaturiste en la matière. C'est faut en plus que confusionniste.

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Message  gérard menvussa Ven 23 Déc - 14:05

Mais ces retombées n'ont pas dépassé celles d'une révolution bourgeoise radicale ou des mesures de Jules Ferry... (Epoque et proportions gardées évidemment.)
Donc si ça sert a rien de vouloir faire une "révolution ouvriére", a quoi bon ? Si la "voix indienne" vaut largement la "voix chinoise" (sauf évidemment des famines, qui touchent massivement encore le sous continent indien) Bref les mencheviques avaient totalement raison
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Message  verié2 Ven 23 Déc - 15:30


Gérard Menussa
Donc si ça sert a rien de vouloir faire une "révolution ouvriére", a quoi bon ? Si la "voix indienne" vaut largement la "voix chinoise" (sauf évidemment des famines, qui touchent massivement encore le sous continent indien) Bref les mencheviques avaient totalement raison
Encore ce très vieil argument, usé jusqu'à la corde. Je suis surpris que tu l'emploies. Non, les mencheviks n'avaient pas raison. La révolution russe devait servir de tremplin pour la révolution européenne, aucun socialiste russe censé n'espérait "construire le socialisme dans un seul pays". Ce fut, comme tu le sais, une invention des staliniens pour masquer sous un discours "socialiste" le développement d'une économie nationale sur le dos de la population.

Quant à la révolution chinoise, ce fut une révolution nationale-bourgeoise radicale. La soutenir ne nous oblige pas à raconter que le "Grand bond en avant" représenta un développement fantastique de l'économie.

Enfin, en ce qui concerne la comparaison entre les différentes "voies" du développement capitaliste, étatique comme en URSS stalinienne et en Chine, semi étatique comme en Inde et dans beaucoup d'autres pays sous-développés, elle n'a de sens que si on accorde un caractère "positif" ou "progressiste" au développement économique aujourd'hui, dans le cadre du système capitaliste. Je n'ai fait cette comparaison que pour montrer que le discours de LO sur le caractère exceptionnel du développement économique de l'URSS est faux. Mais, ce qui est à l'ordre du jour, c'est la révolution socialiste mondiale et non le développement à marches forcés d'Etats autarciques.

Quant à savoir quelles sont les populations qui ont connu le plus de souffrances, entre les Coréens du Nord, les Chinois, les Indiens, les Brésiliens... bien difficile de faire des comparaisons. Constater que la Corée du Sud s'est développée plus vite que la Corée du Nord, que le Japon, parti d'un niveau plus bas que la Russie du début du 20ème siècle, est loin devant aujourd'hui, ce n'est pas faire l'apologie du capitalisme, mais regarder la réalité en face. Et cela permet de comprendre que toutes ces tentatives de développement autarcique, en surexploitant la population, n'ont rien à voir avec le socialisme !

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Message  gérard menvussa Ven 23 Déc - 15:56

Encore ce très vieil argument, usé jusqu'à la corde. Je suis surpris que tu l'emploies.
Je suis moi même surpris de certains de tes arguments. Mais pas de panique ! Nous discutons depuis des années, avec nos désaccords attestés mais aussi une compréhension commune qui me semble plus importante...
Il fut en revenir au débat, tel qu'il a existé en russie au début du XX° siécle : tant les bolcheviques que les mencheviques "croient" a priori que la dynamique de la révolution en russie ne peut dépasser celle d'une révolution "démocratique"/bourgeoise". La "grosse" divergence entre les forces en présence, c'est de savoir "qui" va déterminer "en derniére instance" le processus : les menchéviques croient que le mouvement ouvrier doit s'effacer devant le mouvement "démocratique" et lui laisser "construire le processus", alors qu'au contraire le mouvement "bolchevique" pense que le prolétariat doit "mener" la récolution "bourgeoise/démocratique" Seul Trotsky (qui est trés fortement minoritaire sur la question) pense que la dynamique propre au mouvement doit faire apparaitre une "trans-croissance" des taches "bourgeoises" aux taches "prolétariennes" en reprenant les élaboration de Parvus sur la "révolution permanente"
Mais lénine a une particularité (qui le rend a la fois "intellectuellement impressionnant" et des fois difficile a interpréter) c'est que c'est un "stratége" hors pair, qui raisonne de façon assez géniale en terme de rapport de force, de "surprises" (un art hautement stratégique, celui de ne l'être jamais ou on nous attend) de "terrains", etc. Et c'est ce qui fait que trés rapidement lui seul décéle que la dynamique révolutionnaire ne prend pas celle qu'il avait "prévu" et qu'il adopte aussitot celle des "théses d'avril" qui semble donner raison a Trotski (qui republie derechef son brulot)

La révolution russe devait servir de tremplin pour la révolution européenne, aucun socialiste russe censé n'espérait "construire le socialisme dans un seul pays".
Le "socialisme dans un seul pays" n'existe pas. Nous sommes totalement d'accord. Mais cela ne veux pas dire qu'il n'y a pas une dynamique de construction dans chaque pays ou chaque ensemble régional ! Nous ne disons pas (ni toi, ni moi, ni personne en fait !) "le socialisme n'est pas constructible "en France" (voir même "en Europe") donc nous devons renoncer a la révolution "ici" Cela serait stupide, et je ne te fais pas l'affront de penser que c'est ce que tu défens...
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Message  verié2 Ven 23 Déc - 17:04

A Gérard Ménussa
J'ai le sentiment que nous ne discutons pas de la même chose. Ton résumé - classique - des positions des mencheviks, des bolcheviks, de Trotsky et Lénine avant la révolution me convient parfaitement et j'imagine que nous sommes tous d'accord sur ce point. La question n'est pas de savoir s'il fallait faire ou non la révolution, les révolutionnaires se placent toujours du côté de la classe ouvrière.

Les mencheviks n'avaient raison que sur un point, mais sur lequel tous les socialistes étaient d'accord, la Russie en était au stade de la révolution bourgeoise. L'originalité de la révolution bourgeoise russe est que le prolétariat et les bolcheviks en ont pris la tête. Encore une fois avec l'espoir que la révolution s'étendrait et non avec le rê've utopique de construire le socialisme en Russie.

Mais, une fois que le prolétariat a perdu le pouvoir, car il l'a perdu complètement, contrairement à ce que croyait Trotsky, que restait-il ? Une révolution bourgeoise d'un nouveau type où la bureaucratie servait de substitut à la bourgeoisie, mais a accompli les mêmes tâches : destructions de la féodalité, accumulation primitive du capital etc.

Sur la planification (Je m'adresse surtout à Vals)
Personne ne nie, je pense, que la planification de l'économie, inséparable de son étatisation, est un outil efficace, même à l'échelle nationale. Mais le problème est de savoir qui planifie, et au service de qui ? Les maladresses, parfois catastrophiques, de la planification stalinienne bureaucratique ne doivent pas faire oublier que cette planification était organisée... au service de la bureaucratie et non au service de la population. Car la bureaucratie ne se contentait pas de détourner les fonds de tiroir, comme le pensait Trotsky, elle disposait de la totalité de la plus-value et avait la possibilité de l'investir comme elle l'entendait, c'est à dire dans ses propres intérêts.

On peut noter d'ailleurs que, si l'efficacité de la planification bureaucratique est réelle en ce qui concerne la construction d'une industrie lourde et militaire, en concentrant les investissements dans ces secteurs (et ça marche aussi en Corée du Nord ou en Iran), elle est beaucoup moins efficace par exemple dans l'agriculture : dans presque tous les Etats "staliniens" les résultats de l'agriculture furent catastrophiques. (Rien ne dit d'ailleurs qu'un Etat ouvrier, même dans un pays développé, s'empresserait de tout étatiser et de tenter de tout planifier, en dehors évidemment des grands moyens de production, de transports etc, mais c'est un autre débat et je ne prétend pas avoir de réponse toute faite : cette question sera débattue démocratiquement.)

Il n'y a donc pas lieu de s'extasier davantage devant la planification stalinienne que devant la planification de la Corée du Nord, sous prétexte que, à son échelle, c'est tout de même un petit exploit d'avoir réussi à se doter d'une bombe nucléaire, même rudimentaire. La planification et l'étatisation n'ont pas par elles mêmes de nature de classe. Et la planification soviétique a été mise en place, non par la révolution, mais par le régime contre-révolutionnaire de Staline, ce ne fut rien d'autre qu'une planification de l'exploitation à outrance.

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Message  Babel Sam 24 Déc - 13:22

verié2 a écrit:

Babel
Bien plus intéressantes et autrement plus vitales sont les questions liées à la nature actuelle du régime poutinien.
Je ne crois pas qu'on puisse opposer cette préoccupation à celle qui concerne l'évolution et la chute de l'URSS. La révolution russe reste aujourd'hui la plus grande leçon d'histoire du mouvement ouvrier. Les problèmes qui se sont posés à l'époque se poseront sans doute dans l'avenir, bien que de façons sans doute différentes, même s'ils ne sont pas vraiment à l'ordre du jour immédiat.

J'en conviens. Mon affirmation initiale est sommaire et d'abrupte. C'est pourquoi je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas d'appliquer sur ce point d'histoire (dont tu as raison de souligner l'importance) une forme d'amnésie, qui équivaudrait à faire table rase de tout ce qui a constitué la spécificité du courant communiste oppositionnel, mais de tenter d'ôter le caractère statique que son traitement a le plus souvent revêtu.

verié2 a écrit:En revanche, il est permis de constater que les bolcheviks et Trotsky n'ont pas clairement compris ce qui leur tombait dessus, en raison des formes inattendues de la contre-révolution stalinienne. Cette incompréhension, qui a conduit Trotsky et ceux qui se revendiquaient de lui plus tard à qualifier l'URSS d'Etat ouvrier dégénéré, a tout de même gravement handicapé les positions politiques du courant trotskyste et facilité l'escroquerie planétaire des staliniens...


C'est là où on diverge. Autant la caractérisation persistante des démocraties populaires comme Etats ouvriers bureaucratiquement déformés me semble une erreur lourde de conséquences, autant les prémisses qui fondent ta propre analyse, telle que tu les exposes ici, me semble également erronés.

Pour aborder cette question, je crois qu’il est nécessaire de se fixer comme cadre général de compréhension l’état global du rapport des forces entre le capital et le travail, afin d’apprécier la manière dont la dynamique de la révolution mondiale s’exerce sur la division internationale du travail.

En tant qu’éléments d’une formation sociale spécifique, ces Etats n’ont jamais eu une existence propre, leur apparition résultant d’une bifurcation prise par le cours de l’histoire dans le premier tiers du 20e siècle. C’est donc l’estimation des rapports de force globaux qui devrait orienter leur analyse.

Pour le dire autrement, je crois que la question de la nature de l’URSS en soi est insoluble, précisément parce qu’en soi cette "nature" n’existe pas. L’agglomérat des économies étatisées qui a constitué le bloc des pays de l’est n’a représenté qu’une part spécifique du marché mondial, fonctionnant certes pendant un temps selon ses lois propres, mais dont l’orientation générale et la destinée étaient surdéterminées par l’évolution de ce même marché.

Ces économies ont constitué pendant 5 décennies environ des secteurs spécifiques du marché capitaliste mondial. A ce titre, elles ont pratiqué, selon des modalités particulières, une surexploitation du travail dont la brutalité n'avait rien à envier à celle qui s'exerçait sur le prolétariat des nations colonisées. Que l'élite dirigeante, du fait de sa fragilité constitutive (liée à son utilisation indirecte du surproduit social), ait été une caste et non une classe ne change rien au fait qu'elle exerç_ait son action dans le cadre des échanges internes de l'économie impérialiste. Affirmer l'inverse revient à soutenir, quoiqu'on prétende, une position campiste, qui tourne le dos, tôt ou tard, aux objectifs d'émancipation sociale.

De là l’importance que prend l’analyse des facteurs stratégiques dans son appréciation.

Afin de préciser ce paradoxe, je vais me risquer à une périodisation, qui n’aura, je le crains, d’original que sa maladresse.

Au cours de la 1ère phase de recul historique du mouvement ouvrier (entre, disons, 1927 et 1942), la question de la défense de l’URSS a revêtu une importance cruciale. Et ce à juste titre : c’est au nom de celle-ci que des milliers de militants de la Troisième Internationale ont pris les armes et constitué les premiers réseaux de résistance –ignorant les consignes de leurs états-majors, pour la plupart favorables au pacte avec l’hitlérisme. C’est en son nom que les peuples composant les différentes républiques soviétiques se sont battus. Si pour Trotsky et ses partisans cette question était à ce point importante, et je le répète à juste titre, c’est qu’ils considéraient que la défense de ce qui subsistait des acquis d’Octobre, --coûte que coûte, et contre l’ensemble des forces coalisées à leur liquidation, à l’intérieur comme à l’extérieur--, constituait un point d’appui essentiel pour la contre-offensive révolutionnaire qui devait nécessairement succéder à cette accumulation de défaites majeures. Le pronostic s'est, dans ce cadre, avéré entièrement fondé.

Dans la phase suivante (1943-1973), cette question de la défense de l'URSS ne pouvait que passer au second plan, car il s'agissait alors de mettre en avant tous les phénomènes de rupture avec l'ordre mondial capitaliste qui se manifestaient dans les secteurs clés de la révolution que sont les Etats coloniaux et semi-coloniaux, les Etats bureaucratiques et les métropoles impérialistes.

La 2e phase de recul historique du mouvement ouvrier (1973-1995), qui correspond à l'entrée du système mondial dans une phase de turbulences dont il n'est toujours pas sorti, s'est achevée par la liquidation pure et simple de ce qui a constitué l'anomalie conjoncturelle du système impérialiste mondial : ces fameuses économies bureaucratisées.

C'est à partir de cette date-là qu'il faut marquer l'intégration définitive de l'ex-Union soviétique et de ses économies satellisées dans le grand concert des nations marchandes.

Le cycle actuel de remontée des luttes, si paradoxal et discontinu qu'il nous paraisse, n'est pas clos : ce qui s'ouvre devant nous, avec le renouveau de la contestation de masse à l'intéreiur même de la Russie et de la Chine, c'est la réappropriation par les prolétariats de ces sociétés de la totalité des questions liées à l'émancipation ouvrière. A savoir, pas seulement des revendications d'ordre strictement politique (formulées en termes de restauration d'une démocratie ouvrière qui aurait été jadis liquidée) mais aussi économique et sociale. Bref, d'opérer une révolution de fond en comble.

Babel

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Message  verié2 Mar 27 Déc - 9:42

A Babel
Je suis d'accord avec toi sur le fait que les Etats staliniens doivent être analysés dans un contexte international et historique. Le cas des Etats d'Europe de l'Est est particulier, puisque leur "forme" a été imposée par l'URSS et ne correspondait donc pas à une nécessité économique et politique locale. En revanche, tu sembles laisser de côté le fait que la Chine, la Yougoslavie, Cuba, le Vietnam ont connu des révolutions nationales bourgeoises d'un type nouveau. Dans l'histoire, toutes les révolutions bourgeoises n'ont pas pris la forme de la révolution française de 1789. Cette forme "stalinienne" s'explique en effet par le rapport de forces à l'échelle mondiale. Seul l'Etat pouvait servir de substitut à des bourgeoisies privées trop faibles pour s'imposer sur la scène mondiale face à l'impérialisme.


Babel
Ces économies ont constitué pendant 5 décennies environ des secteurs spécifiques du marché capitaliste mondial. A ce titre, elles ont pratiqué, selon des modalités particulières, une surexploitation du travail dont la brutalité n'avait rien à envier à celle qui s'exerçait sur le prolétariat des nations colonisées. Que l'élite dirigeante, du fait de sa fragilité constitutive (liée à son utilisation indirecte du surproduit social), ait été une caste et non une classe ne change rien au fait qu'elle exerçait son action dans le cadre des échanges internes de l'économie impérialiste

Sur ce plan - fondamental - nous sommes d'accord, évidemment. Nous avions affaire à des systèmes d'exploitation et non à des systèmes "socialistes déformés", "bureaucratiques" etc.

En revanche, je ne comprends pas ta "périodisation". Pourquoi, par exemple, ce choix de 1943 ? Qu'est-ce qui s'est donc passé de significatif à cette date ? A mon avis, la grande défaite du prolétariat en URSS se situe entre 1924 et 1928, quand la bureaucratie s'impose comme "classe (ou caste etc) pour soi" avec sa doctrine politique.) D'ailleurs Trotsky, a posteriori, a daté le "Thermidor" vers 1923-24. Mais il pensait qu'il ne s'agissait que d'un "Thermidor politique", comme celui de la révolution française, et non économique en raison du maintien de l'étatisation de l'économie. C'est en cela qu'il se trompait : le prolétariat ne peut pas avoir le moindre pouvoir économique sans disposer du pouvoir politique. Ce pouvoir politique est un préalable à la transformation de la société.

Ensuite, à partir de ce Thermidor, le prolétariat va être défait partout : Chine, Italie, Allemagne, Espagne. Or Trotsky croyait qu'il y avait une situation d'équilibre entre prolétariat et bourgeoisie et par conséquent qu'il suffisait d'une bonne direction politique etc.

L'apparition de tous ces régimes d'exploitation se revendiquant du "socialisme" ne peut être comprise sans tenir compte de cette défaite générale du prolétariat, laquelle, avec les destructions de la seconde guerre mondiale, a d'ailleurs permis à l'économie capitaliste, de connaître un nouveau développement historique, y compris en URSS sous ses formes particulières, mais de façon moins dynamique que dans les pays insérés dans le marché mondial.

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Message  Babel Mar 27 Déc - 13:56

verié2 a écrit:En revanche, je ne comprends pas ta "périodisation". Pourquoi, par exemple, ce choix de 1943 ? Qu'est-ce qui s'est donc passé de significatif à cette date ?
Un mot sur les dates.
Je reconnais qu'une périodisation recoupant des périodes aussi vastes a quelque chose d’arbitraire et d’approximatif. Mais elle me semble nécessaire, ne serait-ce que pour souligner à quel point l’existence de cycles liés à la lutte des classes au niveau mondial a une incidence directe sur les réalités socio-économiques soumises à l’examen. C’est en effet en grande partie sur eux qu’il nous faut fonder notre compréhension du phénomène bureaucratique, si on veut éviter l’écueil d’une approche strictement sociologisante de la question de la nature sociale de ces états.

1927 : on peut considérer que l’écrasement de la révolution chinoise ouvre une nouvelle période historique, marquée par la défaite de l’opposition de gauche en Union soviétique, suivie d’un premier cycle de répression de masse qui va s’étaler sur plus d’une décennie, par l'effondrement politique du prolétariat allemand et la prise de pouvoir d'Hitler, par l’échec des grèves insurrectionnelles en Espagne et en France (trahies par les gouvernements de Font Populaire), -- inutile de détailler la suite.

L’année 1943, quant à elle, correspond à un retournement de la situation mondiale marqué par l'inversion majeure de la tendance générale. Au lieu d'être à la démoralisation et au défaitisme, celle-ci s’inverse, et on assiste à un regain des mobilisations prolétariennes.

C’est en effet à partir de cette date que
- l’offensive nazie marque le pas en subissant une défaite majeure à Stalingrad ; dès lors, les armées allemandes ne vont cesser de reculer ;
- se crée la république de Salo, suite à l'arrestation de Mussolini , qui prend acte du partage effectif du territoire italien en une zone contrôlée par les forces organisées de la résistance et une autre maintenue sous contrôle fasciste. Ce qui correspond à la première phase de la révolution italienne : à partir de 1944-45, l’armement des partisans italiens va prendre une ampleur de masse ;
- se crée en Yougoslavie un gouvernement provisoire coalition s’appuyant sur de réels comités populaires de masse nés de la résistance, et qui aboutira en novembre à la constitution de la Fédération démocratique de Yougoslavie.
Ayant aiguisé les contradictions de la domination capitaliste, la guerre impérialiste a renouvelé du même coup le potentiel d’énergie révolutionnaire du prolétariat international.

L’examen de la courbe des luttes grévistes dans tous les pays d’Europe montre à cette époque une brusque montée, pour atteindre après 1945 un niveau supérieur à celle de 1936 : plusieurs grèves générales paralysent la Grèce, l’Italie, la Belgique, la Hollande, le Danemark.

En Tchécoslovaquie, la crise révolutionnaire de mai 1945 voit l’émergence d’organes de double pouvoir : conseils ouvriers, milices et comités de libération.

En Pologne, l’approche de l’Armée Rouge déclenche un mouvement d’insurrection ouvrière et paysanne.

Dans la zone russe d’Allemagne, l’effondrement du 3e Reich s’est accompagné de l’émergence de comités d’entreprise qui avaient la mainmise sur l’embauche et la dénazification.

En France, enfin, l’insurrection parisienne de l’été 1944 déclenche un mouvement de masse à l’échelle du pays et la formation de comités d’usine dans des villes comme Lyon, Limoges, Toulouse ou Périgueux.

Dans certains pays (Belgique, Grèce, Italie) les situations de double pouvoir prennent un caractère durable. En Grèce cela débouche sur une guerre civile particulièrement longue et meurtrière qui représente une date clé de l’histoire sociale de ce pays.

C’est enfin à partir de ce moment que se crée une quantité de mouvements de masse qui vont amener progressivement à la constitution de mobilisations prenant un caractère insurrectionnel dans les états coloniaux et semi-coloniaux : Inde, Chine, Indochine, Algérie, Côte d’Ivoire, Philippines, Birmanie, Ceylan…

verié2 a écrit: A mon avis, la grande défaite du prolétariat en URSS se situe entre 1924 et 1928, quand la bureaucratie s'impose comme "classe (ou caste etc) pour soi" avec sa doctrine politique.) D'ailleurs Trotsky, a posteriori, a daté le "Thermidor" vers 1923-24. Mais il pensait qu'il ne s'agissait que d'un "Thermidor politique", comme celui de la révolution française, et non économique en raison du maintien de l'étatisation de l'économie. C'est en cela qu'il se trompait : le prolétariat ne peut pas avoir le moindre pouvoir économique sans disposer du pouvoir politique. Ce pouvoir politique est un préalable à la transformation de la société.

Non, il mettait surtout l'accent sur le caractère profondément instable donc forcément provisoire de cette domination, en indiquant tout de suite après les deux directions que pouvait prendre la situation : soit un renforcement de la contre-révolution thermidorienne, aboutissant à une restauration du capitalisme, soit une révolution anti-bureaucratique balayant l'oligarchie stalinienne.

verié2 a écrit:Ensuite, à partir de ce Thermidor, le prolétariat va être défait partout : Chine, Italie, Allemagne, Espagne. Or Trotsky croyait qu'il y avait une situation d'équilibre entre prolétariat et bourgeoisie et par conséquent qu'il suffisait d'une bonne direction politique etc.
Franchement, je ne le crois pas. Et je n'ai d'ailleurs lu ça nulle part sous sa plume : l'équilibre en question ne pouvait de toute façon qu'être par nature instable et provisoire et sa résolution positive ou négative, dépendre de la force sociale qui saura prendre l'initiative (cf. supra).

Constater que la bureaucratie a eu le dernier mot ne doit ni nous conduire à sous-estimer les phénomènes de résistance prolétarienne aux exactions qu'elle commettait (et à ses impérities incessantes), ni invalider le pronostic général tel qu'il a été formulé à l'époque : oui, en dernière instance, l'évolution du rapport de forces entre les classes fondamentales de la société dépendait de la nature politique que prendra la direction du mouvement ouvrier --mais en dernière instance, seulement.

Ce constat de Trotsky est directement lié à sa théorie de la révolution permanente, et à son analyse du rôle central dévolu au prolétariat mondial dans les trois secteurs clés de la révolution.

verié2 a écrit:L'apparition de tous ces régimes d'exploitation se revendiquant du "socialisme" ne peut être comprise sans tenir compte de cette défaite générale du prolétariat, laquelle, avec les destructions de la seconde guerre mondiale, a d'ailleurs permis à l'économie capitaliste, de connaître un nouveau développement historique, y compris en URSS sous ses formes particulières, mais de façon moins dynamique que dans les pays insérés dans le marché mondial.
Là-dessus, nous sommes d'accord.

Babel

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Message  Babel Mar 27 Déc - 15:27

Un mot encore.
Au cours de son histoire, la bureaucratie stalinienne n’aura fait qu’exprimer sa nature sociale petite-bourgeoise en reproduisant, sur une échelle élargie à la dimension de plusieurs nations, les oscillations caractéristiques du groupe social qui est à son origine, et dont elle n'est que la manifestation phénoménalement monstrueuse.
C’est en effet ce mouvement d’oscillation entre les classes fondamentales de la société qui est son trait constitutif. Du fait de sa nature non-prolétarienne et de son incapacité à s’accaparer directement les richesses sociales par le biais de la possession privée des moyens de production, elle n’a eu de cesse de connaître des fluctuations similaires à celles de son substrat sociologique.
N'étant pas une classe fondamentale, mais un bloc intermédiaire, un ramassis de velléités hétérogènes, elle n’est parvenue, à force de fluctuations prenant des directions opposées, à fonder sa cohésion et à assurer la stabilité de son règne que sur cette capacité constante à épouser simultanément les intérêts des forces sociales antagoniques, évoluant par à-coups, au gré rapports de forces. Et cela, dans l’unique but de maintenir sa position dirigeante, au sommet d’un Etat modelé à sa mesure, qui s'est avéré le seul capable de lui assurer la préservation de ses intérêts.

Ce simple constat suffit à invalider toute approche statique de la réalité qu'elle incarne. Il implique au contraire la nécessité de traiter le phénomène bureaucratique concrètement, dans ses développements historiques successifs et contradictoires, et non comme une entité intangible, comme le voudrait une optique essentialiste.

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Message  verié2 Lun 2 Jan - 16:28


Babel
1927 : on peut considérer que l’écrasement de la révolution chinoise ouvre une nouvelle période historique, marquée par la défaite de l’opposition de gauche en Union soviétique, suivie d’un premier cycle de répression de masse qui va s’étaler sur plus d’une décennie, par l'effondrement politique du prolétariat allemand et la prise de pouvoir d'Hitler, par l’échec des grèves insurrectionnelles en Espagne et en France (trahies par les gouvernements de Font Populaire), -- inutile de détailler la suite.

L’année 1943, quant à elle, correspond à un retournement de la situation mondiale marqué par l'inversion majeure de la tendance générale. Au lieu d'être à la démoralisation et au défaitisme, celle-ci s’inverse, et on assiste à un regain des mobilisations prolétariennes.

Nous sommes donc en gros d'accord sur le fait que 1927 (ou la période qui commence plus tôt avec les défaites en Allemagne, Europe de l'Est, Italie) marque un saut qualitatif. En revanche, je ne peux pas te suivre sur 1943. Les mouvements de résistance qui se développent dans différents pays sont bien encadrés par les staliniens, avec l'appui de l'impérialisme anglo-saxon, et ne peuvent être assimilés, à mon avis, à une remontée de la lutte prolétarienne, même si de nombreux prolétaires y participent.

Babel
la nécessité de traiter le phénomène bureaucratique concrètement, dans ses développements historiques successifs et contradictoires, et non comme une entité intangible, comme le voudrait une optique essentialiste.
Analyser la nature de l'Etat de l'URSS/Russie dans son contexte historique, bien entendu.
Mais il ne s'agit pas seulement d'un "phénomène bureaucratique" propre à la dégénérescence d'une révolution ouvrière, mais de la forme historique de révolutions nationales bourgeoises. A un stade de l'impérialisme où les bourgeoisies nationales ne pouvaient plus accomplir ces tâches, la bureaucratie leur a servi de substitut.

Parvenus à un autre stade de développement, ces Etats sont contraints de s'ouvrir au marché mondial et de liquider au moins en partie leur forme "socialiste/étatiste" - bien que leur rôle de l'Etat dans l'économie reste prédominant, comme on le voit en Russie et en Chine.
Vérié
Trotsky croyait qu'il y avait une situation d'équilibre entre prolétariat et bourgeoisie et par conséquent qu'il suffisait d'une bonne direction politique etc.

Babel
Franchement, je ne le crois pas. Et je n'ai d'ailleurs lu ça nulle part sous sa plume : l'équilibre en question ne pouvait de toute façon qu'être par nature instable et provisoire et sa résolution positive ou négative, dépendre de la force sociale qui saura prendre l'initiative

Ca me semble pourtant difficile de contester le fait que Trotsky considérait que la bureaucratie ne se maintenait au pouvoir que grâce à l'équilibre - très instable - de forces entre prolétariat et bourgeoisie, à l'échelle de l'URSS comme à l'échelle mondiale.
Si tel avait été le cas, la bureaucratie n'aurait pas tenu 70 ans et résisté aux coups de butoir de la 2ème guerre mondiale.

Le développement économique quasiment sans précédent qui a suivi la seconde guerre mondiale montre qu'on est alors entré dans une nouvelle période, rendu possible par la défaite du prolétariat et les destructions gigantesques, ce qui cadre mal avec cette instabilité inouie de la bureaucratie.

En revanche, je suis tout à fait d'accord pour considérer que la bureaucratie n'a été qu'une phase éphémère, du moins sur le plan historique, même si elle a duré 70 ans, liée à cette tentative de développement national face à l'impérialisme. Et par conséquent qu'il ne s'agit en aucune façon d'une "nouvelle classe historique" nous montrant l'avenir orwellien de l'humanité. Mais cette formation "éphémère" a occupé, face au prolétariat, une place identique à celle de la bourgeoisie privée, disposant totalement de la plus value à sa guise. En ce sens, c'est une classe ou fraction de classe exploiteuse, bourgeoise par essence, en dépit de ses traits spécifiques, et non une "excroissance bureaucratique" du socialisme.

verié2

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