Antilles "françaises"
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Antilles "françaises"
Aux Antilles, le scandale sanitaire du chlordécone
BENKIMOUN Paul
22 juin 2010
Augmenter police Diminuer police version imprimable n°17863
La France n’en a pas fini avec les scandales de sécurité sanitaire. Pendant vingt ans, de 1973 à 1993, un insecticide, le chlordécone, a été utilisé en Martinique et en Guadeloupe pour lutter contre le charançon de la banane, entraînant durablement une pollution des sols et une exposition d’une partie de la population. Une étude, publiée lundi 21 juin en Guadeloupe et dans le Journal of Clinical Oncology, confirme que le chlordécone, un perturbateur endocrinien, est responsable d’un accroissement significatif du risque de cancer de la prostate, lequel représente 50% de l’ensemble des cancers dépistés en Guadeloupe et à la Martinique. L’étude valide donc les signaux d’alerte que les autorités ont longtemps ignorés.
TRÈS LONGUE DURÉE DE VIE
« D’énormes erreurs ont été commises, qui rappellent furieusement les grands enjeux de sécurité sanitaires des années 1980 et 1990 : hormone de croissance, vache folle, etc. », estime le professeur William Dab, président du Conseil scientifique du Plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe. Interdit en métropole en 1990, le pesticide a été utilisé par dérogation en Guadeloupe et en Martinique jusqu’en 1993, alors que les Etats-Unis l’avaient proscrit depuis 1976. « Des rapports parlementaires l’on déjà pointé : le ministère de l’agriculture n’a pas correctement traité les signaux scientifiques sur les dangers de la pollution et de l’exposition au chlordécone. Il y a eu un retard dans la prise de conscience et l’action », poursuit le professeur Dab. Les premiers plans locaux datent de 1999, et en 2004, le chlordécone a été enfin pris en compte dans le Plan national santé environnement. Finalisé en octobre 2009, le rapport du Conseil scientifique du Plan chlordécone n’a été rendu public par le gouvernement que le 17 juin avec sa mise en ligne sur le site de l’Institut de veille sanitaire (INVS).
La Martinique et la Guadeloupe se trouvent confrontées à une contamination massive des sols, des eaux de rivière et des sédiments par un produit toxique possédant une durée de vie très longue. « Quelque 80000 personnes habitent dans des zones où le sol est contaminé et 13000 individus absorbent chaque jour, en mangeant des légumes qu’ils cultivent, une quantité de chlordécone dépassant la valeur toxicologique de référence : 0,5µg/kg/j. Il faut aider la population à se préparer à vivre avec un problème qui n’est pas près de disparaître : la demi-vie du chlordécone dans le sol est de six siècles ! » insiste M.Dab.
Dans ce contexte, l’étude Karuprostate a été lancée. Conduite par Luc Multigner et l’équipe de l’Inserm U625 et du service d’urologie du CHU de Pointe-à-Pitre, elle vise à « identifier et à caractériser les facteurs de risque environnementaux, génétiques et hormonaux de survenue du cancer de la prostate aux Antilles ». Au cours de la période 2004-2007, l’exposition au chlordécone a été évaluée chez plus de 600 hommes atteints d’un cancer de la prostate et chez plus de 600 hommes non malades.
Selon les résultats, le risque de survenue du cancer de la prostate augmente avec les niveaux croissants de chlordécone dans le sang. L’exposition au pesticide est associée à un risque augmenté de la maladie (la probabilité de cancer de la prostate est multipliée par 1, chez les sujets ayant des concentrations sanguines supérieures à 1µg/l. Le risque devient supérieur parmi ceux ayant déclaré des antécédents familiaux de cancer de la prostate, ainsi que parmi ceux ayant résidé dans un pays occidental.
Un diagnostic qui, dans le premier cas, pourrait résulter de facteurs de susceptibilité génétiques communs à la maladie et à la sensibilité à l’exposition au chlordécone. La résidence dans un pays occidental pourrait, elle, jouer par le biais d’expositions environnementales à d’autres facteurs cancérogènes lors du séjour, ou de modifications de comportements alimentaires.
La combinaison antécédents familiaux et résidence dans un pays occidental est associée à une augmentation du risque : la probabilité de développer la maladie est ainsi multipliée par 4,2. Un chiffre qui monte à 5,2 chez les sujets ayant pour des raisons génétiques une faible activité de l’enzyme hépatique intervenant dans l’élimination du chlordécone.
L’étude du docteur Multigner et de ses collègues montre donc de manière nette une augmentation du risque de cancer de la prostate chez les hommes exposés au chlordécone. Ce résultat tient beaucoup plus à la consommation de produits alimentaires contaminés qu’à la manipulation de la molécule par les ouvriers agricoles. « De la présomption d’innocence, on est passé à la présomption de culpabilité », affirme le professeur Pascal Blanchet, chef du service d’urologie au CHU de Pointe-à-Pitre et coauteur de l’étude.
Paul Benkimoum avec Eddy Nedelkovsi (à Pointe-à-Pitre)
BENKIMOUN Paul
* Article paru dans le Monde, édition du 23.06.10. LE MONDE | 22.06.10 | 11h56 • Mis à jour le 22.06.10 | 11h57.
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article17863
Quelque chose m'étonne dans cet article, c'est ça :
Cette phrase a l'air de dire qu'il y a, entre le cancer de la prostate et le taux de chlordécone dans le sang, un lien de corrélation mais pas de causalité : une même cause A (une prédisposition génétique) serait à la fois à l'origine d'une conséquence B (taux de chlordécone dans le sang) et d'une conséquence C (cancer de la prostate), mais B ne serait pas la cause de C. Pourtant, le reste de l'article semble dire le contraire...
Un diagnostic qui, dans le premier cas, pourrait résulter de facteurs de susceptibilité génétiques communs à la maladie et à la sensibilité à l’exposition au chlordécone.
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