DOM-TOM politique coloniale
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DOM-TOM politique coloniale
Lutte Ouvrière n°2200 du 1er octobre 2010
Sommaire du n°2200
Martinique : Ghislaine Joachim-Arnaud traduite devant le tribunal - un procès colonial
En Martinique, Ghislaine Joachim-Arnaud, secrétaire générale de la CGTM et représentante de Combat Ouvrier, a été assignée devant le tribunal correctionnel le 29 septembre par le procureur de la République. La convocation lui étant parvenue hors délais, ses avocats vont demander le renvoi de l'affaire.
Suite à une plainte d'un certain Jean-François Hayot, de l'association « Respect DOM », notre camarade avait été entendue le 16 septembre 2009 pour avoir utilisé dans ses propos à l'antenne de télévision ATV le refrain repris par des milliers de manifestants tout au long des mouvements de masse de février et mars 2009 : « Matinik se ta nou, Matinik se pa ta yo ! An ban bétché volé, Nou ké foute yo déco », ce qu'on peut traduire par : « La Martinique est à nous, la Martinique n'est pas à eux, une bande de profiteurs nous volent, que l'on va foutre dehors ».
En traduisant Ghislaine Joachim-Arnaud devant le tribunal, la justice choisit de s'en prendre en même temps à des milliers de travailleurs, jeunes, femmes, chômeurs, qui lors de la grève et des manifestations de 2009 ont crié leur exaspération, leur colère et leur volonté d'en finir avec les agissements des exploiteurs et oppresseurs de tous bords !
Ceux qui manifestaient ces jours-là sont ceux qui souffrent des bas salaires, du chômage, des emplois précaires, des prix exorbitants pratiqués sur les produits courants par les maîtres du grand commerce et ceux de l'import-export. Ce sont ceux-là qui, durant les mois de février et mars 2009, ont crié leur colère contre ces exploiteurs et voleurs qui les exploitent dans les plantations et qui les dépouillent ensuite au coin des grandes surfaces !
Que les gros exploiteurs dits « békés », qui sont les maîtres de l'économie de la Martinique (depuis des siècles !) se soient trouvés les cibles des chants, slogans et quolibets des foules de manifestants n'a rien d'étonnant pour qui connaît (ou a vécu) l'histoire de la Martinique. Tous les grands mouvements sociaux de ce pays ont toujours trouvé face à face des gros békés, propriétaires et exploiteurs, et des travailleurs salariés exploités qui luttaient pour améliorer leur condition.
Aucune justice ne peut changer l'histoire passée, ni la réalité des faits sociaux ! La caractéristique de « béké » est étroitement liée à la nature sociale des activités des susnommés. Il n'y a ni race, ni pays, ni peuple béké. Les békés sont et ont toujours été synonymes d'exploiteurs, de gros propriétaires et de descendants des planteurs esclavagistes des siècles passés !
Si Ghislaine Joachim-Arnaud passe en procès, ce sont des milliers de travailleurs, des dizaines de milliers de manifestants qui ont chanté les mêmes paroles qui lui sont reprochées qui seront ainsi poursuivis en justice. Et le jour du procès, ils devront être présents pour lancer ces mots-là, publiquement, à la face de tous ceux qui désirent une confirmation de ce qu'ils pensent et ressentent !
(Correspondance de Combat Ouvrier)
Vals- Messages : 2770
Date d'inscription : 10/07/2010
Il était une nouvelle fois dans les Colonies
U.G.T.G.
Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe
Pointe-à-Pitre, le 28 Septembre 2010.
Lettre Ouverte à
Madame la Ministre de la Justice
Garde des Sceaux
13, Place Vendôme
75042 PARIS Cédex 01
Objet : Il était une nouvelle fois dans les Colonies
Madame la Ministre,
Le Mardi 14 Septembre, une déléguée syndicale de l’UGTG (Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe) est convoquée devant la Cour d’Appel de Basse-Terre.
Dès le début de l‘audience, le Président du tribunal lance en direction de la salle «vous avez fait le nombre mais vous ne me faites pas peur». Il est vrai qu’habituellement les procès des membres de l’UGTG ne sont pas ouverts au public car les grilles du Tribunal sont systématiquement gardées par la police et les gendarmes qui interdisent l’accès au palais de justice.
Cet épisode annonçait donc la suite.
Quelques minutes plus tard, le Président de la cour interroge notre camarade et cette dernière répond en Créole, comme elle l’a fait en première instance au Tribunal de Pointe-à-Pitre, où elle a bénéficié de l’assistance d’un interprète.
C’est alors que le Président de la Cour d’Appel s’exprimant sur un ton particulièrement arrogant, voire méprisant à l’égard de cette jeune camarade, lui interdit de parler créole dans son tribunal en indiquant que les décisions de justice sont prises en français ; que dans son tribunal on parle français et que de toutes les manières, elle serait jugée et condamnée.
Cette interdiction de s’exprimer en créole est d’autant plus incohérente que notre camarade était poursuivie pour une prétendue diffamation qu’elle aurait prononcée en créole
Ce manque évident d’impartialité a provoqué une réaction indignée de l’assistance.
S’en suit alors quelques grognements dans la salle et il n’en faut pas plus au président du tribunal pour exiger l’évacuation de la salle qui se fera par la gendarmerie en arme, dans des conditions choquantes. A noter que la prévenue a elle aussi été reconduite hors de l’enceinte du palais de justice.
Quelques instants plus tard, nous apprenons que l’avocat de notre camarade a eu un malaise nécessitant l’intervention des pompiers et du SAMU.
Et pourtant, curieusement la décision a été mise en délibéré au 08 novembre 2010 sans que notre camarade ait pu se défendre ni son avocat plaider.
Plusieurs interrogations.
La Constitution Française n’assure-t-elle pas l’égalité devant la loi sans distinction d’origine ?
Tout justiciable n’a-t-il pas droit à un procès équitable ?
La Cour Européenne des Droits de l’Homme ne prévoit-elle pas que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal ?
Toute personne accusée d’une infraction, n’est-elle pas présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ?
Toute personne accusée d’une infraction ne peut-elle se défendre elle-même ou bénéficier de l’assistance d’un défenseur de son choix ?
Le créole n’est-elle pas une langue reconnue par la constitution française et la charte européenne des langues régionales ?
Car, dans un long discours en date du 26 juin 2009 à Petit-Bourg en Guadeloupe, Nicolas SARKOZY, Président de la République Française, disait : « Notre identité nationale s’est forgée par l’addition, la synthèse des identités. La Guadeloupe est unique et le sera toujours. Son caractère est trempé, son identité est forte. La France que je veux construire est une France qui respecte les identités et sait les mettre en valeur. Depuis juillet dernier, notre Constitution reconnaît que les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Et de se féliciter en poursuivant : «Voilà une preuve tangible, inscrite dans notre loi fondamentale, de l’état d’esprit nouveau qui nous anime !».
Il semble donc que le créole serait, tout comme le Bushinenge parlé par les Saramaca, les Aluka ou les langues amérindiennes parlées par les Wayana, les Palikur… en Guyane, reconnu comme une langue dite « régionale » et devrait donc bénéficier des mesures mises en œuvre pour sa sauvegarde et sa promotion.
Dans les faits, les engagements pris par le Gouvernement Français pour la sauvegarde et la promotion du créole, en matière d’enseignement, de justice, de vie économique et sociale, d’activités et équipements culturels notamment, ne sont pas tenus.
Le pourraient-ils simplement lorsque les évènements de la Cour d’Appel sur la langue viennent nous révéler la force de l’idéologie coloniale, qui véhicule encore la hiérarchie entre les langues et les cultures ?
Il en va ainsi dans les Colonies.
Pour finir, nous n’attendons pas de réponse mais tenons à vous informer que nous poursuivons notre lutte pour la reconnaissance et le respect de notre langue, de notre culture et de notre identité [1] et continuerons à nous exprimer en Créole dans vos tribunaux poursuivant ainsi notre combat contre l’injustice, le racisme, le mépris et la pwofitasyon.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos salutations distinguées.
Le Secrétaire Général
E. DOMOTA
Rue Paul Lacavé – Assainissement – 97110 POINTE A PITRE
Tél : 05.90.83.10.07 - Fax : 05.90.89.08.70
Email : ugtg@wanadoo.fr - ugtg@ugtg.org
Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe
Pointe-à-Pitre, le 28 Septembre 2010.
Lettre Ouverte à
Madame la Ministre de la Justice
Garde des Sceaux
13, Place Vendôme
75042 PARIS Cédex 01
Objet : Il était une nouvelle fois dans les Colonies
Madame la Ministre,
Le Mardi 14 Septembre, une déléguée syndicale de l’UGTG (Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe) est convoquée devant la Cour d’Appel de Basse-Terre.
Dès le début de l‘audience, le Président du tribunal lance en direction de la salle «vous avez fait le nombre mais vous ne me faites pas peur». Il est vrai qu’habituellement les procès des membres de l’UGTG ne sont pas ouverts au public car les grilles du Tribunal sont systématiquement gardées par la police et les gendarmes qui interdisent l’accès au palais de justice.
Cet épisode annonçait donc la suite.
Quelques minutes plus tard, le Président de la cour interroge notre camarade et cette dernière répond en Créole, comme elle l’a fait en première instance au Tribunal de Pointe-à-Pitre, où elle a bénéficié de l’assistance d’un interprète.
C’est alors que le Président de la Cour d’Appel s’exprimant sur un ton particulièrement arrogant, voire méprisant à l’égard de cette jeune camarade, lui interdit de parler créole dans son tribunal en indiquant que les décisions de justice sont prises en français ; que dans son tribunal on parle français et que de toutes les manières, elle serait jugée et condamnée.
Cette interdiction de s’exprimer en créole est d’autant plus incohérente que notre camarade était poursuivie pour une prétendue diffamation qu’elle aurait prononcée en créole
Ce manque évident d’impartialité a provoqué une réaction indignée de l’assistance.
S’en suit alors quelques grognements dans la salle et il n’en faut pas plus au président du tribunal pour exiger l’évacuation de la salle qui se fera par la gendarmerie en arme, dans des conditions choquantes. A noter que la prévenue a elle aussi été reconduite hors de l’enceinte du palais de justice.
Quelques instants plus tard, nous apprenons que l’avocat de notre camarade a eu un malaise nécessitant l’intervention des pompiers et du SAMU.
Et pourtant, curieusement la décision a été mise en délibéré au 08 novembre 2010 sans que notre camarade ait pu se défendre ni son avocat plaider.
Plusieurs interrogations.
La Constitution Française n’assure-t-elle pas l’égalité devant la loi sans distinction d’origine ?
Tout justiciable n’a-t-il pas droit à un procès équitable ?
La Cour Européenne des Droits de l’Homme ne prévoit-elle pas que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal ?
Toute personne accusée d’une infraction, n’est-elle pas présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ?
Toute personne accusée d’une infraction ne peut-elle se défendre elle-même ou bénéficier de l’assistance d’un défenseur de son choix ?
Le créole n’est-elle pas une langue reconnue par la constitution française et la charte européenne des langues régionales ?
Car, dans un long discours en date du 26 juin 2009 à Petit-Bourg en Guadeloupe, Nicolas SARKOZY, Président de la République Française, disait : « Notre identité nationale s’est forgée par l’addition, la synthèse des identités. La Guadeloupe est unique et le sera toujours. Son caractère est trempé, son identité est forte. La France que je veux construire est une France qui respecte les identités et sait les mettre en valeur. Depuis juillet dernier, notre Constitution reconnaît que les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ».
Et de se féliciter en poursuivant : «Voilà une preuve tangible, inscrite dans notre loi fondamentale, de l’état d’esprit nouveau qui nous anime !».
Il semble donc que le créole serait, tout comme le Bushinenge parlé par les Saramaca, les Aluka ou les langues amérindiennes parlées par les Wayana, les Palikur… en Guyane, reconnu comme une langue dite « régionale » et devrait donc bénéficier des mesures mises en œuvre pour sa sauvegarde et sa promotion.
Dans les faits, les engagements pris par le Gouvernement Français pour la sauvegarde et la promotion du créole, en matière d’enseignement, de justice, de vie économique et sociale, d’activités et équipements culturels notamment, ne sont pas tenus.
Le pourraient-ils simplement lorsque les évènements de la Cour d’Appel sur la langue viennent nous révéler la force de l’idéologie coloniale, qui véhicule encore la hiérarchie entre les langues et les cultures ?
Il en va ainsi dans les Colonies.
Pour finir, nous n’attendons pas de réponse mais tenons à vous informer que nous poursuivons notre lutte pour la reconnaissance et le respect de notre langue, de notre culture et de notre identité [1] et continuerons à nous exprimer en Créole dans vos tribunaux poursuivant ainsi notre combat contre l’injustice, le racisme, le mépris et la pwofitasyon.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos salutations distinguées.
Le Secrétaire Général
E. DOMOTA
Rue Paul Lacavé – Assainissement – 97110 POINTE A PITRE
Tél : 05.90.83.10.07 - Fax : 05.90.89.08.70
Email : ugtg@wanadoo.fr - ugtg@ugtg.org
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: DOM-TOM politique coloniale
Le 15 décembre, Ghislaine Joachim-Arnaud, secrétaire générale de la CGT Martinique et dirigeante de l’organisation trotskyste antillaise Combat Ouvrier, est assignée devant le tribunal correctionnel de Fort-de-France pour « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, à l’égard d’un groupe de personnes ». En l’occurrence, il s’agit des Békés, c’est-à-dire des descendants des propriétaires d’esclaves qui, aujourd’hui encore, dominent l’économie de l’île.
À l’origine de la plainte, on trouve Jean-François Hayot, membre d’une des plus puissantes familles de Békés qui ont la mainmise sur l’économie de l’île. Il reproche à Ghislaine Joachim-Arnaud d’avoir repris, dans une émission télévisée, le slogan de milliers de manifestants de la grève générale de février 2009, disant en créole : « La Martinique est à nous, la Martinique n’est pas à eux. Une bande de Békés, profiteurs, voleurs, on les foutra dehors ».
C’est le monde à l’envers. S’il y a bien une discrimination et une violence qui s’exercent aux Antilles, c’est celles du patronat dans son ensemble à l’égard de la population pauvre. C’est l’exploitation de toute une population, maintenue dans le chômage ou payée des salaires de misère par quelques familles qui effectivement contrôlent toute l’économie, depuis le commerce, la distribution, l’import-export jusqu’aux grandes exploitations agricoles.
Des milliers de manifestants ont crié leur colère contre les Békés, et par extension, contre l’ensemble des patrons. S’ils veulent les rejeter hors de l’économie, si la secrétaire de la CGT Martinique reprend ce slogan à son compte, quoi de plus normal ?
En fait, il s’agit d’un nouveau procès colonial intenté par le lobby possédant de la Martinique, doublé d’une vengeance à l’égard de la dirigeante du principal syndicat de la Martinique et de l’organisation Combat Ouvrier. C’est aussi un procès inique visant les milliers de grévistes du mouvement de 2009.
LUTTE OUVRIERE
Vals- Messages : 2770
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: DOM-TOM politique coloniale
Pour revenir sur les véritables raisons de ce procès, le Comité de soutien à Ghislaine Joachim-Arnaud organise une conférence de presse à Paris, lundi 6 décembre. Lutte Ouvrière s’associe à cet appel, et invite tous les représentants de syndicats ou d’associations luttant aux côtés des travailleurs à y participer.
Lundi 6 décembre à 15 h 30
Salle Jean-Jaurès, à la Bourse du travail
3, rue du Château-d’eau - Mo République
Lundi 6 décembre à 15 h 30
Salle Jean-Jaurès, à la Bourse du travail
3, rue du Château-d’eau - Mo République
Vals- Messages : 2770
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: DOM-TOM politique coloniale
Le bulletin de la CGT MARTINIQUE de décembre 2010
http://www.cgt-martinique.fr/iso_album/bulletin_12_2010-1-%5B1%5D.pdf
Vals- Messages : 2770
Date d'inscription : 10/07/2010
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