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La petite bourgeoisie

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Message  Simba Lun 30 Déc - 19:54

Un texte très intéressant de R.Bibeau

La petite bourgeoisie comme classe sociale
Les petits bourgeois ne produisent aucune plus-value, mais ils parasitent la plus-value produite par les ouvriers qu’ils ont intérêt à maintenir en servage salariés, le gagne-pain du bobo en dépend. Les capitalistes les emploient à des tâches spécialisées afin d’entretenir la force de travail salarié, l’encadrer, la diriger (politiquement notamment), la réprimer et la pressurer afin qu’elle assure l’afflux maximum de plus-value vers les différents secteurs d’activité et vers les entreprises pour que le petit-bourgeois obtienne sa pitance en récompense de sa dépendance larmoyante. La petite bourgeoisie assume de multiples services tertiaires, internes aussi bien qu’externes aux entreprises, ce que les ouvriers d’Amérique appellent le «Red Tape», c’est-à-dire des coûts extra-production qui font enfler les soumissions et décourage les clients capitalistes des pays émergents. En effet, le sort de l’ouvrier est intimement lié au sort du petit-bourgeois salarié.

"Étant donné que, dans la quasi-totalité des pays à travers le monde, la classe ouvrière piétine, s’use et s’échine dans des luttes de résistance sur le front économique et ne parvient pas à développer une conscience de classe «pour soi», visant la conquête politique exclusive de tout le pouvoir d’État, alors la marée des petits bourgeois paupérisés frétille afin de s’emparer de la direction de ces luttes pour les diriger vers des revendications réformistes en faveur d’un changement électoral gouvernemental. D’autres voies et moyens sont préconisés tels la signature de milliers de pétitions de protestation, expressions pusillanimes de leurs rancœur juvénile; la tenue de protestations pour des réformes juridiques en faveur des démunis (les Indignés campant sagement devant les bourses de ce monde en perdition); l’adoption de lois comme cette loi québécoise interdisant la pauvreté [sic]; une autre loi présentant en débat des «valeurs» authentiquement bourgeoises et xénophobes; une loi pour taxer les transactions financières (ATTAC et taxe Tobin avec l’appui de la grande bourgeoisie); une loi pour interdire la spéculation boursière frauduleuse ou l’évasion fiscale illicite vers les paradis fiscaux créés et protégés par l’État policier; ainsi que moult autres gabegies du même acabit. Sans compter l’appétence de la petite-bourgeoise pour les commissions d’enquêtes publiques afin de réintroduire l’éthique dans l’administration gouvernementale et la politique nationale, provinciale, régionale et municipale, déviant ainsi l’aporie des classes antagonistes vers le marais de la social-démocratie réformiste et vers la déchéance électoraliste.

La petite bourgeoisie est individualiste et narcissique
Dans la vision de Marx, la petite bourgeoisie avait peu de possibilité pour transformer la société car elle ne pouvait guère s’organiser, la concurrence du marché positionnant ses membres «les uns contre les autres». La petite bourgeoisie est le chien de garde social de la grande bourgeoisie, elle est un segment de classe intermédiaire engageant son existence comme entremetteur entre la grande bourgeoisie et la classe ouvrière ou encore offrant ses services à l’une et à l’autre de ces classes sociales antagonistes. De par sa position de classe la petite bourgeoisie, isolée, individualiste, égocentrique et pédante est très vulnérable aux aléas de l’économie et aux transformations sociales qu’elle appelle de ses vœux et craint tout à la fois. C’est la raison pour laquelle nous qualifions ce segment de classe d’hésitant, de pleutre, de chancelant, d’indiscipliné, d’anarchisant et de fortement attiré par la politique terroriste alors que sa résilience révolutionnaire est plus qu’incertaine. Le compromis, la conciliation, la collaboration de classe sont ses penchants naturels, instinctifs, ce qui explique que ses héros ont pour nom Gandhi, Mère Teresa et Nelson Mandela.
Son mode de vie narcissique et dépendant pousse instinctivement le petit bourgeois vers la grande bourgeoisie qu’il sert docilement. Mais que survienne une crise économique comme il en arrive régulièrement en mode de production impérialiste et le train de vie de la petite bourgeoise est menacé, elle est chassée de son loft hypothéqué, elle doit troquer ses vêtements griffés et sa grosse cylindrée empruntée. La petite bourgeoisie s’enrage alors, maudit l’ouvrier qui refuse de travailler davantage pour gagner moins, afin de permettre aux capitalistes de maintenir ses profits, soi-disant soutenir l’emploi, et prétendre doper l’économie et les marchés de biens et de service sur lesquels parasite la petite bourgeoisie démunie.


La différence entre ces deux classes (ouvriers et petits bourgeois paupérisés) tient à ceci que l’ouvrier sait, ou devrait savoir, que seule la destruction totale et l’éradication complète du système d’économie politique capitaliste peut sauver la planète et l’espèce humaine, alors que le petit-bourgeois, indécrottable fumiste et éternel utopiste entêté est convaincu que quelques bonnes réformes au mode de production impérialiste décadent, qui n’affecteraient nullement son statut social, suffiront à le remettre sur pied pour une nouvelle farandole des pieds nickelés.
Le petit-bourgeois a un ego démesuré et sa scolarité (souvent universitaire) ainsi que sa position sociale autoritaire, en tant que courroie de transmission et transmetteur d’ordre pour ses patrons, lui confère une grande suffisance narcissique. Le petit-bourgeois sait tout, n’obéit qu’à celui qui le stipendie et, assis dans son salon devant sa télévision entre deux bourbons, en parole et sur papier, il transforme la société. En réalité, il ne sacrifiera jamais sa vie pour autrui, et loin de lui le fusil de la révolution socialiste. Nelson Mandela, le pacifiste, comparse de Frederik de Klerk, et penseur de la Nation Arc-en-ciel de collaboration de classes entre les négriers Afrikaners et les noirs surexploités et assassinés dans les mines et les townships de pauvreté est son héros ex-voto.
De par son activité dans le procès social de production et de reproduction du capital, des marchandises, des biens et des services à commercialiser, la petite bourgeoisie est en contact fréquent avec la classe ouvrière et avec la classe capitaliste qu’elle admire de tout son être, qu’elle vénère et qu’elle envie. Une âme de petit prédateur capitaliste sommeille dans le cœur flétrit et mesquin de tout larbin petit-bourgeois malandrin

Les deux classes (ouvriers et bobos) s’épient et se méprisent mutuellement. Pour le moment la petite bourgeoisie servante de la grande bourgeoisie a le haut du pavé dans la lutte de résistance sociale et c’est elle qui mène le bal. La petite bourgeoisie cherche à utiliser la force de résistance de la classe ouvrière et de ses alliés afin de la monnayer aux grands bourgeois contre de meilleures conditions d’esclavage salarié pour elle et les siens. La classe ouvrière doit impérativement modifier ce rapport de force et reprendre son autonomie organisationnelle et militante. C’est la classe ouvrière qui doit diriger le combat de résistance féroce (pas du tout pacifiste) et non pas se mettre sous le parapluie de la petite bourgeoisie aigrie, chancelante, irrésolue, pacifiste et conciliatrice.
Depuis l’approfondissement de la crise systémique de l’impérialisme moderne l’État réduit les charges fiscales imposées aux entreprises accroissant d’autant les impôts et les taxes reposant directement sur les épaules de tous les salariés, les ouvriers tout autant que les employés des entreprises privées, publiques et parapubliques, ce qui comprend évidemment les petits-bourgeois (la pseudo classe moyenne qui n’a jamais existée) qui ont tout à coup le sentiment de ne plus être importants pour leurs maîtres capitalistes qui les soumets petit à petit à l’indigence...."





Simba

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Message  verié2 Lun 30 Déc - 20:08

La petite bourgeoisie assume de multiples services tertiaires, internes aussi bien qu’externes aux entreprises, ce que les ouvriers d’Amérique appellent le «Red Tape», c’est-à-dire des coûts extra-production qui font enfler les soumissions et décourage les clients capitalistes des pays émergents. En effet, le sort de l’ouvrier est intimement lié au sort du petit-bourgeois salarié.
Nous avons déjà pas mal discuté de ce sujet avant que Simba ne s'inscrive. Ce qui fait débat, ce n'est pas le comportement de la petite bourgeoisie, décrit depuis longtemps par les marxistes, mais l'existence aujourd'hui d'une petite bourgeoisie salariée et ses contours, ses frontières avec le prolétariat. Pour ma part, comme je l'ai déjà écrit, il me semble qu'une petite bourgeoisie salariée a largement remplacé aujourd'hui la petite bourgeoisie "traditionnelle", propriétaire de ses moyens de production, à savoir paysans, artisans, commerçants.

verié2

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La petite bourgeoisie Empty Re: La petite bourgeoisie

Message  sylvestre Mar 31 Déc - 1:57

Robert Bibeau a écrit:La petite bourgeoisie assume de multiples services tertiaires, internes aussi bien qu’externes aux entreprises, ce que les ouvriers d’Amérique appellent le «Red Tape», c’est-à-dire des coûts extra-production qui font enfler les soumissions et décourage les clients capitalistes des pays émergents. En effet, le sort de l’ouvrier est intimement lié au sort du petit-bourgeois salarié.

Par rapport au passage cité, j'ai envie de demander si Robert Bibeau considère que les caissières de supermarché (secteur tertiaire, en dehors de la production, s'occupant de "red tape") font partie de la petite bourgeoisie ?
sylvestre
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Message  Simba Mar 31 Déc - 13:37

Il est vrai qu'aujourd'hui on a plus de petits bourgeois qui se prolétarisent ou qui rejoignent le lumpenprolétariat que de prolétaires qui s'embourgeoisent.


Ci-dessous un texte de Trotsky, vraiment lumineux.
"Est-il vrai que la petite-bourgeoisie craint la révolution ?
Les routiniers parlementaires, qui croient être des connaisseurs du peuple, aiment à répéter : « Il ne fait pas effrayer les classes moyennes avec la révolution, elles n’aiment pas les extrêmes ». Sous cette forme générale, cette affirmation est absolument fausse. Naturellement, le petit propriétaire tient à l’ordre, tant que ses affaires vont bien et aussi longtemps qu’il espère que demain elles iront encore mieux. Mais quand cet espoir est perdu, il entre facilement en rage et est prêt à se livrer aux mesures les plus extrêmes. Sinon, comment aurait-il pu renverser l’Etat démocratique et amener le fascisme au pouvoir en Italie et en Allemagne ? Les petites gens désespérées voient avant tout dans le fascisme une force combative contre le grand capital et croient qu’à la différence des partis ouvriers qui travaillent seulement de la langue, le fascisme se servira des poings pour établir plus de « justice ». Le paysan et l’artisan sont, à leur manière, des réalistes : ils comprennent qu’on ne pourra pas se passer des poings. Il est faux, trois fois faux, d’affirmer que la petite bourgeoisie actuelle ne va pas aux partis ouvriers parce qu’elle craint les « mesures extrêmes ». Bien au contraire. La couche inférieure de la petite bourgeoisie, ses grandes masses ne voient dans les partis ouvriers que des machines parlementaires, ne croient pas à la force des partis ouvriers, ne croient pas qu’ils soient capables de lutter, qu’ils soient prêts à mener cette fois la lutte jusqu’au bout. Et s’il en est ainsi, est-ce la peine de remplacer le radicalisme par ses confrères parlementaires de gauche ? Voilà comment raisonne ou sent le propriétaire à demi exproprié, ruiné et révolté. Sans la compréhension de cette psychologie des paysans, des artisans, des employés, des petits fonctionnaires, etc. – psychologie qui découle de la crise sociale – il est impossible d’élaborer une politique juste.
La petite bourgeoisie est économiquement dépendante et politiquement morcelée. C’est pourquoi elle ne peut avoir de politique propre. Elle a besoin d’un « chef » qui lui inspire confiance. Ce chef individuel ou collectif, c’est-à-dire un personnage ou un parti, peut lui être donné par l’une ou l’autre des classes fondamentales, soit par la grande bourgeoisie, soit par le prolétariat. Le fascisme unit et arme les masses disséminées ; d’une « poussière humaine » - selon notre expression – il fait des détachements de combat. Il donne ainsi à la petite bourgeoisie l’illusion d’être une force indépendante. Elle commence à s’imaginer qu’elle commandera réellement à l’Etat. Rien d’étonnant à ce que ces espoirs et ces illusions lui montent à la tête.
Mais la petite bourgeoisie peut trouver aussi un chef dans la personne du prolétariat. Elle l’a montré en Russie, partiellement en Espagne. Elle y tendit en Italie, en Allemagne et en Autriche. Mais les partis du prolétariat ne s’y montrèrent pas à la hauteur de leur tâche historique. Pour amener à lui la petite bourgeoisie, le prolétariat doit conquérir sa confiance. Et, pour cela, il doit avoir lui-même confiance en sa force. Il lui faut avoir un clair programme d’action et être prêt à lutter pour le pouvoir par tous les moyens possibles. Soudé par son parti révolutionnaire pour une lutte décisive et impitoyable, le prolétariat dit aux paysans et aux petites gens des villes : « Je lutte pour le pouvoir ; voici mon programme ; je suis prêt à m’entendre avec vous pour des changements dans ce programme ; je n’emploierai la force que contre le grand capital et ses laquais ; mais avec vous, travailleurs, je veux conclure une alliance sur la base d’un programme donné ». Un tel langage, le paysan le comprendra. Il faut seulement qu’il ait confiance dans la capacité du prolétariat de s’emparer du pouvoir. Or, pour cela, il faut épurer le front unique de toute équivoque, de toute indécision, des phrases creuses ; il faut comprendre la situation et se mettre sérieusement sur la voie de la lutte révolutionnaire".

Simba

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Message  verié2 Mar 31 Déc - 13:47

les caissières de supermarché (secteur tertiaire, en dehors de la production
Par leurs conditions de travail, les "hôtesses de caisse" se rattachent bien évidemment au prolétariat, tout comme de nombreux travailleurs des services qui ne produisent pas de bien matériels : nettoyeurs, aides à domicile, cheminots etc. Néanmoins, il existe aussi toute une partie des salariée, parfois pauvres, voire très pauvres et même précaires : employés de notaires, d'avocats, de publicité, journalistes, cadres, commerciaux, intermittents du spectacle, qui par leur situation sociale et la psychologie qui en découle s'apparentent davantage à la petite bourgeoisie qu'au prolétariat.

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Message  sylvestre Mar 31 Déc - 14:53

Marx distingue la "classe en soi" (ceux qui sont objectivement dans le prolétariat) de la "classe pour soi" (ceux qui ont une conscience de classe et agissent en conséquence).
C'est une distinction toujours utile - n'est-il pas vrai d'ailleurs qu'il y a aussi des ouvriers qui ont une conscience tout à fait petite-bourgeoise ?
sylvestre
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