Décés de Jean-Michel Krivine
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Décés de Jean-Michel Krivine
http://npa2009.org/node/37170
NOTRE CAMARADE JEAN-MICHEL KRIVINE (5/08/1932 - 14/05/2013) VIENT DE DÉCÉDER.
Mardi 14 mai 2013
Chirurgien, militant depuis l’âge de 16 ans, engagé dans la IVe Internationale depuis 1956, Jean-Michel a été membre de la LCR puis du NPA. Bien des militants se souviennent de ses séances de formation sur l’histoire de notre mouvement. Jean-Michel fut un des animateurs du Tribunal Russel sur la guerre du Vietnam. A ce titre il avait enquêté en 1967 sur les crimes de guerre au Vietnam du Nord et, clandestinement, au Sud Vietnam. En 1978 il a également effectué une mission d’aide médicale et de contacts politiques au sein du maquis communiste en Thaïlande. Il militait également au sein du Groupe trotskiste vietnamien en France, dont il était le seuil non-Vietnamien.
Musicien, il avait animé la chorale de la LCR. Jusqu’à sa mort il participait à la rédaction de la revue Inprecor, dont il venait de corriger le n° 592/593. Outre de très nombreux articles, il a publié récemment “Carnets de missions dans le maquis thaïlandais (1978)” (Les Indes Savantes, Paris 2011) et “Carnets de missions au Vietnam (1967-1987)” (Les Indes Savantes, Paris 2005).
Dans la IV-ème Internationale, on l’appelait aussi “Arnold“, “Nikita“, “Bui Ten-Chi“ et “Louis Couturier“.
Nous reviendrons très rapidement sur le parcours militant de notre camarade dans le journal et sur le site.
NOTRE CAMARADE JEAN-MICHEL KRIVINE (5/08/1932 - 14/05/2013) VIENT DE DÉCÉDER.
Mardi 14 mai 2013
Chirurgien, militant depuis l’âge de 16 ans, engagé dans la IVe Internationale depuis 1956, Jean-Michel a été membre de la LCR puis du NPA. Bien des militants se souviennent de ses séances de formation sur l’histoire de notre mouvement. Jean-Michel fut un des animateurs du Tribunal Russel sur la guerre du Vietnam. A ce titre il avait enquêté en 1967 sur les crimes de guerre au Vietnam du Nord et, clandestinement, au Sud Vietnam. En 1978 il a également effectué une mission d’aide médicale et de contacts politiques au sein du maquis communiste en Thaïlande. Il militait également au sein du Groupe trotskiste vietnamien en France, dont il était le seuil non-Vietnamien.
Musicien, il avait animé la chorale de la LCR. Jusqu’à sa mort il participait à la rédaction de la revue Inprecor, dont il venait de corriger le n° 592/593. Outre de très nombreux articles, il a publié récemment “Carnets de missions dans le maquis thaïlandais (1978)” (Les Indes Savantes, Paris 2011) et “Carnets de missions au Vietnam (1967-1987)” (Les Indes Savantes, Paris 2005).
Dans la IV-ème Internationale, on l’appelait aussi “Arnold“, “Nikita“, “Bui Ten-Chi“ et “Louis Couturier“.
Nous reviendrons très rapidement sur le parcours militant de notre camarade dans le journal et sur le site.
fée clochette- Messages : 1274
Date d'inscription : 23/06/2010
Age : 59
Localisation : vachement loin de la capitale
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Très triste. C'était un type bien. Dans le cadre militant, je ne l'ai connu... qu'à la fête de LO où il animait une chorale révolutionnaire. Mais dans son cadre professionnel, j'ai eu l'occasion de le rencontrer à l'hôpital de Pontoise où il était chef de service. C'était un homme intègre qui ne jouait pas double jeu selon qu'il changeait de milieu : il diffusait ouvertement Rouge autour de lui et était particulièrement apprécié par ses collaborateurs, à l'inverse des pontes médicaux arrogants. Il refusait aussi systématiquement de recevoir les visiteurs médicaux venus vendre la camelote des labos.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
J'ai également eu l'occasion de le croiser plusieurs fois, comme spectateur de sa chorale.
C'est une bien triste nouvelle. C'était un militant de la LCR non sectaire vis-à-vis des autres courants trotskystes, en tout cas vis-à-vis de Lutte ouvrière, et qui était très attaché à l'histoire et à la mémoire du mouvement ouvrier.
C'est une bien triste nouvelle. C'était un militant de la LCR non sectaire vis-à-vis des autres courants trotskystes, en tout cas vis-à-vis de Lutte ouvrière, et qui était très attaché à l'histoire et à la mémoire du mouvement ouvrier.
Byrrh- Messages : 1009
Date d'inscription : 12/09/2012
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Ceux qui comme moi ont la conscience d'avoir accéléré la fin de l'agression impérialiste
en Indochine, épargnant ainsi un nombre considérable de vies et de souffrances indescriptibles,
savent ce que nous devons à des camarades de la trempe de Jean-Michel !
en Indochine, épargnant ainsi un nombre considérable de vies et de souffrances indescriptibles,
savent ce que nous devons à des camarades de la trempe de Jean-Michel !
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Roseau a écrit:Ceux qui comme moi ont la conscience d'avoir accéléré la fin de l'agression impérialiste
en Indochine, épargnant ainsi un nombre considérable de vies et de souffrances indescriptibles,
savent ce que nous devons à des camarades de la trempe de Jean-Michel !
Mai tu te rends compte de ce que tu racontes ? J'ai dû faire je sais pas combien de manifs au moment de cette guerre, mais jamais j'oserais sortir ça !
yannalan- Messages : 2073
Date d'inscription : 25/06/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
yannalan a écrit: jamais j'oserais sortir ça !
Il y a des gens qui osent tout, ça te surprend Yannalan ?
le petit scarabée- Messages : 194
Date d'inscription : 18/09/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
De certains,non, effectivement...
yannalan- Messages : 2073
Date d'inscription : 25/06/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
On s'en fout !
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Roseau a écrit:Ceux qui comme moi ont la conscience d'avoir accéléré la fin de l'agression impérialiste
en Indochine, épargnant ainsi un nombre considérable de vies et de souffrances indescriptibles,
savent ce que nous devons à des camarades de la trempe de Jean-Michel !
Trollseau qui nous avait déjà expliqué en long en large comment lui quelques uns de ses camarades avaient déclenché mai 68 nous affirme maintenant qu'il a mis fin à l'agression impérialiste au Vietnam.
Il devrait consulter un spécialiste.
Achille- Messages : 2738
Date d'inscription : 24/12/2011
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Bref, la "morale politique" de nos camarades de lutte ouvriére consiste a s'essuyer les pieds sur le cadavre d'un camarade qui a placé toute sa vie dans un combat pour le communisme, qui a risqué sa peau pour ce combat, pour se "faire" un de leur adversaire roseau en un front commun glauque avec le parti de gauche (ça et la destestation des arabes) . Comme le disait un de leurs défunts dirigeants "question de morale politique" Mais la morale politiques, ceux qui prétenduement "représentent" lutte ouvriére s'en tapent.
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Je me souviens de quelqu'un d'humain et de drôle, qui ne la ramenait jamais.
Comme l'a écrit Vérié : un type bien.
Comme l'a écrit Vérié : un type bien.
Babel- Messages : 1081
Date d'inscription : 30/06/2011
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Et puis c'est vrai que sa chorale c'était un délice
le petit scarabée- Messages : 194
Date d'inscription : 18/09/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Un entretien avec Jean Michel
Mai 1968 et la guerre du Viêt-nam
Mercredi 15 mai 2013
Jean-Michel Krivine *
Quand on considère le tableau qu’offre le Viêt-nam en 1998 (règne de la bureaucratie, corruption effrénée et culte du dollar) on a du mal à imaginer que 30 ans plus tôt, tous les regards de la jeune génération et des révolutionnaires étaient tournés vers ce petit pays qui menait une lutte exemplaire contre le colosse américain. Comment l’intrépidité, l’esprit d’initiative et les proclamations de foi socialistes qui caractérisaient les combattants viêtnamiens ont-ils pu aboutir à un aussi pitoyable résultat ?
Certes, le Viêt-nam a gagné la guerre et son combat, incroyablement difficile, a joué un rôle essentiel dans la floraison d’explosions contestataires qui se sont produites dans le monde à la fin des années 1960. Contrairement aux prévisions marxistes (même trotskistes), le capitalisme ne se porte pas trop mal dans les années d’après-guerre et grâce, en particulier, à la course aux armements provoquée par la guerre froide, il parvient à bouleverser la technologie, à augmenter la productivité du travail, à améliorer nettement le niveau de vie moyen dans les pays développés alors que le chômage demeure très limité. Cependant le système de formation des jeunes ne suit pas et les valeurs régnantes demeurent celles de la société bourgeoise d’avant-guerre. La jeunesse étudiante devient contestataire. En l’absence de grandes luttes de classe dans les pays impérialistes, ce sont les vagues de la révolution coloniale qui vont la stimuler, la convaincre que la pensée marxiste n’est pas à mettre au rebut et que l’URSS n’a plus grand chose à voir avec le socialisme.
Après la victoire de la révolution cubaine à leur porte, les USA mirent tout en oeuvre pour enrayer la contagion et endiguer la poussée révolutionnaire partout dans le monde et en particulier autour de la Chine. Il y eut toute une série de coups d’État, plus ou moins fomentés par la CIA, au cours des années soixante (Indonésie, Congo, Brésil, Saint-Domingue), et après la défaite de la France en Indochine, les Américains s’empressèrent de prendre sa place laissée vacante au Sud Viêt-nam et de financer (donc de contrôler) le régime de Ngo Dinh Diem. Par ses méthodes terroristes et dictatoriales celui-ci provoqua la levée d’une résistance populaire que les communistes locaux encadrèrent au moyen d’un Front de Libération Nationale (FLN) créé en 1960. Malgré les milliards de dollars US qui lui furent généreusement octroyés, Diem fut tellement impuissant et discrédité que ses protecteurs américains organisèrent son assassinat le 1 novembre 1963. Ses remplaçants ne furent pas plus heureux dans leur guerre contre le FLN, maintenant largement soutenu par le Nord. Devant le risque d’un effondrement complet de leur allié et de la prise de contrôle du Sud par les communistes, le président Jonhson décida d’intervenir militairement.
A la suite d’une provocation en mer (“l’incident” du golfe du Tonkin), en août 1964, la 7e flotte US se mit à canonner et à bombarder la côte nord-viêtnamienne puis des nuées de B-52 ( les plus gros bombardiers de l’époque) quittèrent leurs bases au Sud Viêt-nam pour pilonner le Nord en se rapprochant de plus en plus de Hanoi. En même temps des fantassins US débarquaient par dizaines de milliers dans le Sud. Ils devaient atteindre le chiffre d’un demi million.
La guerre américaine fut véritablement criminelle et prouve encore une fois qu’on peut disposer d’un régime relativement démocratique sur le plan intérieur et se comporter de façon inhumaine et terroriste vis-à-vis de peuples considérés comme “inférieurs” : massacres, napalm, bombes à billes antipersonnel, défoliants, furent très largement utilisés cependant que la plupart des bâtiments du Nord étaient rasés (à l’exception de ceux de Hanoi).
A l’opposé, la façon dont le peuple vietnamien, étroitement encadré par le PC (appelé PTV, parti des travailleurs du Viêt-nam), sut résister à l’escalade et finalement la rendre inopérante, donna un exemple inouï qui inspira non seulement d’autres mouvements de libération nationale mais également des secteurs de la jeunesse et du mouvement ouvrier dans les pays développés.
Ici je souhaite livrer quelques souvenirs personnels. En novembre 1966 se tint la première réunion du « Tribunal international contre les crimes de guerre commis au Viêt-nam », encore appelé Tribunal Russell, du nom du célèbre philosophe anglais qui accepta de le parrainer. Son but était « d’établir sans crainte de quiconque ni à la faveur de qui que ce soit toute la vérité sur cette guerre ». Vingt six témoins de différents pays furent envoyés au Viêt-nam. En tant que chirurgien, j’ai eu la possibilité de séjourner du 17 février au 23 mars 1967 dans le Nord Viêt-nam, puis, avec mon collègue médecin Marcel-Francis Kahn et le cinéaste Roger Pic, du 16 au 30 septembre 1967 dans les zones libérées du Sud, non loin de Tay Ninh.
Comme j’étais encore membre du PCF (bien que déjà trotskiste....) et comme le PCF était jugé très sévèrement par les communistes vietnamiens à cause de sa mollesse pour appuyer leur combat (et de son soutien du bout des lèvres au tribunal Russell), les responsables vietnamiens me donnèrent une chance inespérée : me faire descendre jusqu’au 17e parallèle (la ligne de démarcation entre le Nord et le Sud). De cette équipée passionnante je retirais deux impressions prédominantes.
En premier lieu, la sauvagerie des bombardements US n’avait aucune limite. Après avoir quitté la capitale, j’ai dû constater que jusqu’au 17e parallèle, pas un bâtiment en dur n’avait été épargné par l’aviation américaine. Je devais enquêter notamment sur l’usage des bombes à billes et du napalm ainsi que sur les bombardements d’établissements hospitaliers. On m’a conduit dans tous les hôpitaux de province et dans plusieurs hôpitaux de district. Ils étaient tous marqués de larges croix-rouges et situés le plus souvent hors de la ville. Tous avaient été bombardés à plusieurs reprises, rasés et j’ai rapporté du carrelage de bloc opératoire recouvert de flaques de napalm. Il en allait de même des écoles et des habitations. Au Sud nous avons interrogé beaucoup de témoins qui nous ont détaillé les ratissages, bombardements, défoliations, opérés par les Américains et leurs protégés.
Mais en même temps nous avons été les témoins du formidable élan de la population pour résister et chasser l’envahisseur. J’ai pu observer admirativement comment la vie s’organisait sous terre dans les zones les plus bombardées du Nord : les écoliers étudiaient dans des tranchées, la tête recouverte d’un chapeau de paille tressée pour les protéger des billes, les hôpitaux décentralisés fonctionnaient en sous-sol et les salles d’opération souterraines étaient éclairées avec des phares de vélo, les magasins et les salles de réunion étaient creusés dans le sol. Nous circulions de nuit en command car et, de même que tous les camions empruntant la “piste Hô Chi Minh” pour rejoindre le Sud, nous ne disposions comme éclairage que d’une petite ampoule fixée sous le moteur. De chaque côté de la route des bâtons blancs étaient échelonnés tous les dix mètres, et la lampe permettait de constater que nous demeurions entre les bâtons, donc sur la route. Des équipes veillaient à ce que celle-ci demeure praticable. Une mobilisation populaire était indispensable pour aboutir à un tel résultat. D’autant qu’il fallait surveiller à intervalle régulier des lanternes, placées elles aussi le long de la route. Lorsque la feuille de bananier qui la recouvrait était remplacée par une feuille rouge, cela signifiait qu’il y avait un passage d’avions (non entendu avec le bruit du moteur de la voiture) et qu’il fallait s’arrêter et éteindre la petite ampoule sous le moteur. C’étaient souvent des jeunes filles des villages qui s’occupaient de ces lanternes. Dans tous les domaines l’ensemble de la population était ainsi mobilisée et, malgré leur écrasante supériorité technique, les Américains s’y cassèrent les dents.
Un journaliste du Monde qui avait d’abord été sur un porte-avions américain me dit un jour à l’époque : « Quand on m’a envoyé ensuite au Nord Viêt-nam, j’y suis allé avec l’idée qu’ils étaient foutus. Vous ne pouvez imaginer la débauche de moyens et d’appareils sophistiqués à la disposition de l’armée américaine. Mais après quelque temps de séjour ici, j’ai changé d’avis. C’est toute la population qui se bat, qui est encadrée et motivée. Contre cela, les Américains seront impuissants ».
Le Mai 68 français a été provoqué par la guerre du Viêt-nam. Le 18 mars 1968, une centaine de militants avaient attaqué le siège parisien de l’American Express dans le quartier de l’Opéra (vitres brisées, drapeau américain brûlé). Les flics arrêtent Xavier Langlade, le responsable du service d’ordre de la JCR, qui est étudiant à la faculté de Nanterre. Des arrestations de lycéens ont lieu les jours suivants. Nanterre s’embrase et les étudiants exigent leur libération et occupent la Tour qui domine le campus. Les étudiants seront relâchés mais l’agitation ne cessera plus et de Nanterre gagnera le Quartier latin. Signalons qu’auparavant s’étaient déjà produites de nombreuses manifestations anti-guerre en Belgique, en Allemagne, au Japon et surtout aux USA où les pertes de l’armée américaine ne donnaient aucune envie de se battre aux futurs appelés. En France plusieurs mouvements animés par ce qu’on appelait alors les “groupuscules” développeront des actions parfois spectaculaires avec le slogan « FLN vaincra ! » qui contrastait avec le timide « Paix au Viêt-nam ! » du PCF, égaré dans les méandres de la coexistence pacifique. Les trotskistes participent activement au Comité Viêt-nam national (CVN), au mouvement du Milliard pour le Viêt-nam, à l’Association médicale franco-viêtnamienne, les maoïstes animent les Comités Viêt-nam de base (CVB), tous contribuent à faire prendre conscience que la lutte généralisée et organisée de tout un peuple peut faire reculer un adversaire cent fois mieux armé. En 1975, ce sera la prise de Saïgon par l’armée populaire puis la réunification du Viêt-nam. La suite devait se révéler nettement moins enthousiasmante.
Dans les années de lutte contre la guerre, le slogan scandé : « Hô, Hô, Hô Chi Minh ! Che, Che, Che Guevara ! » était repris au cours de toutes les manifestations, au grand dam des trotskistes vietnamiens qui étaient, certes, de tous les comités de lutte mais, sachant comment le PCV avait systématiquement exterminé les trotskistes en 1945, souhaitaient un soutien plus critique. Et, de fait, on dut constater qu’après avoir terminé victorieusement sa lutte exemplaire, le PCV se mit à très rapidement édifier une société en tous points comparable à celles de ses homologues du “socialisme réel”, avec son parti unique, ses bureaucrates à tous les niveaux, ses magasins et hôpitaux “spéciaux”, ses centaines de milliers de prisonniers politiques “à rééduquer”, sa police politique omniprésente. Le FLN et l’Alliance des forces démocratiques, qui avaient clamé pendant des années leur volonté d’ouverture à la “troisième force”, leur désir d’établir un régime démocratique multi-partis, se virent mis sur la touche cependant que pratiquement tous les postes clés étaient occupés par des “nordistes” ou des gens qui ne devaient leur pouvoir qu’à la confiance qu’ils inspiraient aux “décideurs” du Nord et non pas à la population locale.
La déception se traduisit par l’exode des “boat people” mais elle atteignit également nombre d’“amis du Viêt-nam” qui avaient nourri bien des illusions pendant la guerre. Pour saisir toute leur amertume il suffit de se reporter aux Mémoires de Laurent Schwartz (1) qui fut un des principaux animateurs du CVN, du Tribunal Russell et qui eut l’occasion en 1968 de rencontrer Hô Chi Minh, Pham Van Dong et de donner une conférence aux cadres syndicaux et politiques de Hanoi : « Les officiels vietnamiens savaient pertinemment que j’avais été trotskiste, ils passaient là-dessus ; moi je n’ignorais pas qu’ils étaient staliniens et ne me faisais guère d’illusions sur le régime politique qui prévaudrait après la guerre; j’espérais quand même mieux que ce qui s’est produit ».
Comment interpréter un tel fiasco ?
L’explication n’est pas simple et donna lieu, à l’époque, à d’ardentes controverses dans la IVe Internationale. La majorité considérait que le PCV était, certes, de formation stalinienne et nourrissait donc de vives tendances à la bureaucratisation mais elle demeurait résolument optimiste en raison du combat exemplaire qu’il dirigeait. Il s’agissait pour elle d’une direction révolutionnaire partiellement empirique, susceptible d’évoluer sous l’influence de la mobilisation d’une population politisée, comme en témoignait la large démocratie à la base en contradiction avec le centralisme vertical (2). A ce point de vue s’était opposée, pendant toute une période, une minorité (essentiellement aux USA) pour qui le PCV n’était qu’un parti nationaliste à base paysanne, doté d’un programme stalinien petit-bourgeois de révolution par étapes (d’abord la révolution bourgeoise...). Seule la poussée des masses l’aurait obligé à dépasser les bornes qu’il avait prévues. Le groupe trotskiste vietnamien en France voyait les choses encore différemment et, a posteriori, son point de vue s’est révélé le plus lucide. Certes, le PCV avait été formé dans le moule stalinien de la IIIe Internationale, comme son homologue chinois, mais comme ce dernier, il a toujours su manœuvrer pour défendre ses intérêts nationaux sans trop indisposer son tuteur. Il était erroné de le représenter comme un parti petit-bourgeois poussé à l’action par les masses révoltées. Cette poussée n’existait ni en 1941 quand quelques dizaines de militants pourchassés prirent la décision audacieuse de commencer la lutte armée et créèrent le Viêt-Minh, ni dans les années soixante quand le Nord était ravagé par les bombes et le Sud étranglé par l’armée US, les flics et les mercenaires du régime fantoche. Le PCV a su être cette direction combattante, liée aux masses, farouchement décidée à vaincre et à conserver le pouvoir. Mais pour réaliser quoi ? Comme l’ont fait remarquer les zapatistes du Chiapas, les dirigeants d’une lutte armée victorieuse ne sont pas les plus aptes à construire une société civile démocratique en temps de paix. D’autant que la gangrène stalinienne corrodait déjà le Nord Viêt-nam au plus fort de son combat exemplaire.
Comment décrire l’amertume de l’auteur de ces lignes quand il apprit en 1991, à la lecture du livre de Georges Boudarel (3) qu’en pleine escalade, en 1967, alors qu’il se trouvait au milieu de cette population héroïque, la direction du PCV jetait en prison, sans aucun procès, cent à deux cents vieux militants lors de “l’affaire Hoang Minh Chinh”, accusés de “révisionnisme antiparti” krouchtchevien. Chinh connut 16 ans d’internements divers sans aucune décision de justice et n’est toujours pas réhabilité. On apprenait récemment que le propre secrétaire de Hô Chi Minh (de 1945 à 1954) avait fait partie de la même fournée sans que le brave Oncle ne lève le petit doigt pour le sauver (4). On avait donc affaire à un parti ouvrier bureaucratisé, certes de formation stalinienne, mais différant du parti stalinien standard (comme le PCF) en ce sens qu’il plaçait ses intérêts propres avant ceux de l’URSS. Il sut diriger avec brio une guerre de libération nationale (comme son homologue soviétique pendant la deuxième guerre mondiale) mais se révéla incapable de sortir du moule stalino-maoïste pour construire une société nouvelle en temps de paix.
Actuellement le Viêt-nam suit globalement l’évolution de la Chine et le culte du billet vert a remplacé celui de Staline mais le pouvoir politique est encore solidement entre les mains des cadres du PCV.
Il est heureux qu’en mai 1968 même les plus pessimistes n’eussent imaginé une telle trajectoire…
* Jean-Michel Krivine, chirurgien, a fait partie des équipes du Tribunal Russell qui se sont rendues au Viêt-nam en 1967 pour y enquêter sur les crimes de guerre américains. Il est décédé mardi 14 mai 2012.
Notes
1. Laurent Schwartz, Un mathématicien aux prises avec le siècle,
Ed. Odile Jacob, Paris 1997.
2. Pierre Rousset, Le parti communiste vietnamien, François Maspéro, Paris1973 (2e ed. Paris1975).
3. Georges Boudarel, Cent fleurs écloses dans la nuit du Viêt-nam (communisme et dissidence - 1954-1956), éd. Jacques Bertoin, Paris1991.
4. Chroniques vietnamiennes, édité par le Groupe trotskiste vietnamien, (membre de la LCR) - n° spécial - automne 1997
Mai 1968 et la guerre du Viêt-nam
Mercredi 15 mai 2013
Jean-Michel Krivine *
Quand on considère le tableau qu’offre le Viêt-nam en 1998 (règne de la bureaucratie, corruption effrénée et culte du dollar) on a du mal à imaginer que 30 ans plus tôt, tous les regards de la jeune génération et des révolutionnaires étaient tournés vers ce petit pays qui menait une lutte exemplaire contre le colosse américain. Comment l’intrépidité, l’esprit d’initiative et les proclamations de foi socialistes qui caractérisaient les combattants viêtnamiens ont-ils pu aboutir à un aussi pitoyable résultat ?
Certes, le Viêt-nam a gagné la guerre et son combat, incroyablement difficile, a joué un rôle essentiel dans la floraison d’explosions contestataires qui se sont produites dans le monde à la fin des années 1960. Contrairement aux prévisions marxistes (même trotskistes), le capitalisme ne se porte pas trop mal dans les années d’après-guerre et grâce, en particulier, à la course aux armements provoquée par la guerre froide, il parvient à bouleverser la technologie, à augmenter la productivité du travail, à améliorer nettement le niveau de vie moyen dans les pays développés alors que le chômage demeure très limité. Cependant le système de formation des jeunes ne suit pas et les valeurs régnantes demeurent celles de la société bourgeoise d’avant-guerre. La jeunesse étudiante devient contestataire. En l’absence de grandes luttes de classe dans les pays impérialistes, ce sont les vagues de la révolution coloniale qui vont la stimuler, la convaincre que la pensée marxiste n’est pas à mettre au rebut et que l’URSS n’a plus grand chose à voir avec le socialisme.
Après la victoire de la révolution cubaine à leur porte, les USA mirent tout en oeuvre pour enrayer la contagion et endiguer la poussée révolutionnaire partout dans le monde et en particulier autour de la Chine. Il y eut toute une série de coups d’État, plus ou moins fomentés par la CIA, au cours des années soixante (Indonésie, Congo, Brésil, Saint-Domingue), et après la défaite de la France en Indochine, les Américains s’empressèrent de prendre sa place laissée vacante au Sud Viêt-nam et de financer (donc de contrôler) le régime de Ngo Dinh Diem. Par ses méthodes terroristes et dictatoriales celui-ci provoqua la levée d’une résistance populaire que les communistes locaux encadrèrent au moyen d’un Front de Libération Nationale (FLN) créé en 1960. Malgré les milliards de dollars US qui lui furent généreusement octroyés, Diem fut tellement impuissant et discrédité que ses protecteurs américains organisèrent son assassinat le 1 novembre 1963. Ses remplaçants ne furent pas plus heureux dans leur guerre contre le FLN, maintenant largement soutenu par le Nord. Devant le risque d’un effondrement complet de leur allié et de la prise de contrôle du Sud par les communistes, le président Jonhson décida d’intervenir militairement.
A la suite d’une provocation en mer (“l’incident” du golfe du Tonkin), en août 1964, la 7e flotte US se mit à canonner et à bombarder la côte nord-viêtnamienne puis des nuées de B-52 ( les plus gros bombardiers de l’époque) quittèrent leurs bases au Sud Viêt-nam pour pilonner le Nord en se rapprochant de plus en plus de Hanoi. En même temps des fantassins US débarquaient par dizaines de milliers dans le Sud. Ils devaient atteindre le chiffre d’un demi million.
La guerre américaine fut véritablement criminelle et prouve encore une fois qu’on peut disposer d’un régime relativement démocratique sur le plan intérieur et se comporter de façon inhumaine et terroriste vis-à-vis de peuples considérés comme “inférieurs” : massacres, napalm, bombes à billes antipersonnel, défoliants, furent très largement utilisés cependant que la plupart des bâtiments du Nord étaient rasés (à l’exception de ceux de Hanoi).
A l’opposé, la façon dont le peuple vietnamien, étroitement encadré par le PC (appelé PTV, parti des travailleurs du Viêt-nam), sut résister à l’escalade et finalement la rendre inopérante, donna un exemple inouï qui inspira non seulement d’autres mouvements de libération nationale mais également des secteurs de la jeunesse et du mouvement ouvrier dans les pays développés.
Ici je souhaite livrer quelques souvenirs personnels. En novembre 1966 se tint la première réunion du « Tribunal international contre les crimes de guerre commis au Viêt-nam », encore appelé Tribunal Russell, du nom du célèbre philosophe anglais qui accepta de le parrainer. Son but était « d’établir sans crainte de quiconque ni à la faveur de qui que ce soit toute la vérité sur cette guerre ». Vingt six témoins de différents pays furent envoyés au Viêt-nam. En tant que chirurgien, j’ai eu la possibilité de séjourner du 17 février au 23 mars 1967 dans le Nord Viêt-nam, puis, avec mon collègue médecin Marcel-Francis Kahn et le cinéaste Roger Pic, du 16 au 30 septembre 1967 dans les zones libérées du Sud, non loin de Tay Ninh.
Comme j’étais encore membre du PCF (bien que déjà trotskiste....) et comme le PCF était jugé très sévèrement par les communistes vietnamiens à cause de sa mollesse pour appuyer leur combat (et de son soutien du bout des lèvres au tribunal Russell), les responsables vietnamiens me donnèrent une chance inespérée : me faire descendre jusqu’au 17e parallèle (la ligne de démarcation entre le Nord et le Sud). De cette équipée passionnante je retirais deux impressions prédominantes.
En premier lieu, la sauvagerie des bombardements US n’avait aucune limite. Après avoir quitté la capitale, j’ai dû constater que jusqu’au 17e parallèle, pas un bâtiment en dur n’avait été épargné par l’aviation américaine. Je devais enquêter notamment sur l’usage des bombes à billes et du napalm ainsi que sur les bombardements d’établissements hospitaliers. On m’a conduit dans tous les hôpitaux de province et dans plusieurs hôpitaux de district. Ils étaient tous marqués de larges croix-rouges et situés le plus souvent hors de la ville. Tous avaient été bombardés à plusieurs reprises, rasés et j’ai rapporté du carrelage de bloc opératoire recouvert de flaques de napalm. Il en allait de même des écoles et des habitations. Au Sud nous avons interrogé beaucoup de témoins qui nous ont détaillé les ratissages, bombardements, défoliations, opérés par les Américains et leurs protégés.
Mais en même temps nous avons été les témoins du formidable élan de la population pour résister et chasser l’envahisseur. J’ai pu observer admirativement comment la vie s’organisait sous terre dans les zones les plus bombardées du Nord : les écoliers étudiaient dans des tranchées, la tête recouverte d’un chapeau de paille tressée pour les protéger des billes, les hôpitaux décentralisés fonctionnaient en sous-sol et les salles d’opération souterraines étaient éclairées avec des phares de vélo, les magasins et les salles de réunion étaient creusés dans le sol. Nous circulions de nuit en command car et, de même que tous les camions empruntant la “piste Hô Chi Minh” pour rejoindre le Sud, nous ne disposions comme éclairage que d’une petite ampoule fixée sous le moteur. De chaque côté de la route des bâtons blancs étaient échelonnés tous les dix mètres, et la lampe permettait de constater que nous demeurions entre les bâtons, donc sur la route. Des équipes veillaient à ce que celle-ci demeure praticable. Une mobilisation populaire était indispensable pour aboutir à un tel résultat. D’autant qu’il fallait surveiller à intervalle régulier des lanternes, placées elles aussi le long de la route. Lorsque la feuille de bananier qui la recouvrait était remplacée par une feuille rouge, cela signifiait qu’il y avait un passage d’avions (non entendu avec le bruit du moteur de la voiture) et qu’il fallait s’arrêter et éteindre la petite ampoule sous le moteur. C’étaient souvent des jeunes filles des villages qui s’occupaient de ces lanternes. Dans tous les domaines l’ensemble de la population était ainsi mobilisée et, malgré leur écrasante supériorité technique, les Américains s’y cassèrent les dents.
Un journaliste du Monde qui avait d’abord été sur un porte-avions américain me dit un jour à l’époque : « Quand on m’a envoyé ensuite au Nord Viêt-nam, j’y suis allé avec l’idée qu’ils étaient foutus. Vous ne pouvez imaginer la débauche de moyens et d’appareils sophistiqués à la disposition de l’armée américaine. Mais après quelque temps de séjour ici, j’ai changé d’avis. C’est toute la population qui se bat, qui est encadrée et motivée. Contre cela, les Américains seront impuissants ».
Le Mai 68 français a été provoqué par la guerre du Viêt-nam. Le 18 mars 1968, une centaine de militants avaient attaqué le siège parisien de l’American Express dans le quartier de l’Opéra (vitres brisées, drapeau américain brûlé). Les flics arrêtent Xavier Langlade, le responsable du service d’ordre de la JCR, qui est étudiant à la faculté de Nanterre. Des arrestations de lycéens ont lieu les jours suivants. Nanterre s’embrase et les étudiants exigent leur libération et occupent la Tour qui domine le campus. Les étudiants seront relâchés mais l’agitation ne cessera plus et de Nanterre gagnera le Quartier latin. Signalons qu’auparavant s’étaient déjà produites de nombreuses manifestations anti-guerre en Belgique, en Allemagne, au Japon et surtout aux USA où les pertes de l’armée américaine ne donnaient aucune envie de se battre aux futurs appelés. En France plusieurs mouvements animés par ce qu’on appelait alors les “groupuscules” développeront des actions parfois spectaculaires avec le slogan « FLN vaincra ! » qui contrastait avec le timide « Paix au Viêt-nam ! » du PCF, égaré dans les méandres de la coexistence pacifique. Les trotskistes participent activement au Comité Viêt-nam national (CVN), au mouvement du Milliard pour le Viêt-nam, à l’Association médicale franco-viêtnamienne, les maoïstes animent les Comités Viêt-nam de base (CVB), tous contribuent à faire prendre conscience que la lutte généralisée et organisée de tout un peuple peut faire reculer un adversaire cent fois mieux armé. En 1975, ce sera la prise de Saïgon par l’armée populaire puis la réunification du Viêt-nam. La suite devait se révéler nettement moins enthousiasmante.
Dans les années de lutte contre la guerre, le slogan scandé : « Hô, Hô, Hô Chi Minh ! Che, Che, Che Guevara ! » était repris au cours de toutes les manifestations, au grand dam des trotskistes vietnamiens qui étaient, certes, de tous les comités de lutte mais, sachant comment le PCV avait systématiquement exterminé les trotskistes en 1945, souhaitaient un soutien plus critique. Et, de fait, on dut constater qu’après avoir terminé victorieusement sa lutte exemplaire, le PCV se mit à très rapidement édifier une société en tous points comparable à celles de ses homologues du “socialisme réel”, avec son parti unique, ses bureaucrates à tous les niveaux, ses magasins et hôpitaux “spéciaux”, ses centaines de milliers de prisonniers politiques “à rééduquer”, sa police politique omniprésente. Le FLN et l’Alliance des forces démocratiques, qui avaient clamé pendant des années leur volonté d’ouverture à la “troisième force”, leur désir d’établir un régime démocratique multi-partis, se virent mis sur la touche cependant que pratiquement tous les postes clés étaient occupés par des “nordistes” ou des gens qui ne devaient leur pouvoir qu’à la confiance qu’ils inspiraient aux “décideurs” du Nord et non pas à la population locale.
La déception se traduisit par l’exode des “boat people” mais elle atteignit également nombre d’“amis du Viêt-nam” qui avaient nourri bien des illusions pendant la guerre. Pour saisir toute leur amertume il suffit de se reporter aux Mémoires de Laurent Schwartz (1) qui fut un des principaux animateurs du CVN, du Tribunal Russell et qui eut l’occasion en 1968 de rencontrer Hô Chi Minh, Pham Van Dong et de donner une conférence aux cadres syndicaux et politiques de Hanoi : « Les officiels vietnamiens savaient pertinemment que j’avais été trotskiste, ils passaient là-dessus ; moi je n’ignorais pas qu’ils étaient staliniens et ne me faisais guère d’illusions sur le régime politique qui prévaudrait après la guerre; j’espérais quand même mieux que ce qui s’est produit ».
Comment interpréter un tel fiasco ?
L’explication n’est pas simple et donna lieu, à l’époque, à d’ardentes controverses dans la IVe Internationale. La majorité considérait que le PCV était, certes, de formation stalinienne et nourrissait donc de vives tendances à la bureaucratisation mais elle demeurait résolument optimiste en raison du combat exemplaire qu’il dirigeait. Il s’agissait pour elle d’une direction révolutionnaire partiellement empirique, susceptible d’évoluer sous l’influence de la mobilisation d’une population politisée, comme en témoignait la large démocratie à la base en contradiction avec le centralisme vertical (2). A ce point de vue s’était opposée, pendant toute une période, une minorité (essentiellement aux USA) pour qui le PCV n’était qu’un parti nationaliste à base paysanne, doté d’un programme stalinien petit-bourgeois de révolution par étapes (d’abord la révolution bourgeoise...). Seule la poussée des masses l’aurait obligé à dépasser les bornes qu’il avait prévues. Le groupe trotskiste vietnamien en France voyait les choses encore différemment et, a posteriori, son point de vue s’est révélé le plus lucide. Certes, le PCV avait été formé dans le moule stalinien de la IIIe Internationale, comme son homologue chinois, mais comme ce dernier, il a toujours su manœuvrer pour défendre ses intérêts nationaux sans trop indisposer son tuteur. Il était erroné de le représenter comme un parti petit-bourgeois poussé à l’action par les masses révoltées. Cette poussée n’existait ni en 1941 quand quelques dizaines de militants pourchassés prirent la décision audacieuse de commencer la lutte armée et créèrent le Viêt-Minh, ni dans les années soixante quand le Nord était ravagé par les bombes et le Sud étranglé par l’armée US, les flics et les mercenaires du régime fantoche. Le PCV a su être cette direction combattante, liée aux masses, farouchement décidée à vaincre et à conserver le pouvoir. Mais pour réaliser quoi ? Comme l’ont fait remarquer les zapatistes du Chiapas, les dirigeants d’une lutte armée victorieuse ne sont pas les plus aptes à construire une société civile démocratique en temps de paix. D’autant que la gangrène stalinienne corrodait déjà le Nord Viêt-nam au plus fort de son combat exemplaire.
Comment décrire l’amertume de l’auteur de ces lignes quand il apprit en 1991, à la lecture du livre de Georges Boudarel (3) qu’en pleine escalade, en 1967, alors qu’il se trouvait au milieu de cette population héroïque, la direction du PCV jetait en prison, sans aucun procès, cent à deux cents vieux militants lors de “l’affaire Hoang Minh Chinh”, accusés de “révisionnisme antiparti” krouchtchevien. Chinh connut 16 ans d’internements divers sans aucune décision de justice et n’est toujours pas réhabilité. On apprenait récemment que le propre secrétaire de Hô Chi Minh (de 1945 à 1954) avait fait partie de la même fournée sans que le brave Oncle ne lève le petit doigt pour le sauver (4). On avait donc affaire à un parti ouvrier bureaucratisé, certes de formation stalinienne, mais différant du parti stalinien standard (comme le PCF) en ce sens qu’il plaçait ses intérêts propres avant ceux de l’URSS. Il sut diriger avec brio une guerre de libération nationale (comme son homologue soviétique pendant la deuxième guerre mondiale) mais se révéla incapable de sortir du moule stalino-maoïste pour construire une société nouvelle en temps de paix.
Actuellement le Viêt-nam suit globalement l’évolution de la Chine et le culte du billet vert a remplacé celui de Staline mais le pouvoir politique est encore solidement entre les mains des cadres du PCV.
Il est heureux qu’en mai 1968 même les plus pessimistes n’eussent imaginé une telle trajectoire…
* Jean-Michel Krivine, chirurgien, a fait partie des équipes du Tribunal Russell qui se sont rendues au Viêt-nam en 1967 pour y enquêter sur les crimes de guerre américains. Il est décédé mardi 14 mai 2012.
Notes
1. Laurent Schwartz, Un mathématicien aux prises avec le siècle,
Ed. Odile Jacob, Paris 1997.
2. Pierre Rousset, Le parti communiste vietnamien, François Maspéro, Paris1973 (2e ed. Paris1975).
3. Georges Boudarel, Cent fleurs écloses dans la nuit du Viêt-nam (communisme et dissidence - 1954-1956), éd. Jacques Bertoin, Paris1991.
4. Chroniques vietnamiennes, édité par le Groupe trotskiste vietnamien, (membre de la LCR) - n° spécial - automne 1997
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
gérard menvussa a écrit:Bref, la "morale politique" de nos camarades de lutte ouvriére consiste a s'essuyer les pieds sur le cadavre d'un camarade qui a placé toute sa vie dans un combat pour le communisme, qui a risqué sa peau pour ce combat, pour se "faire" un de leur adversaire roseau en un front commun glauque avec le parti de gauche (ça et la destestation des arabes) . Comme le disait un de leurs défunts dirigeants "question de morale politique" Mais la morale politiques, ceux qui prétenduement "représentent" lutte ouvriére s'en tapent.
Encore un concentré de haine anti LO et anti PG de Gérard "moustachu" menvussa au mépris de la mémoire de Jean Michel Krivine. Tu clones la méthode du trollseau qui récupère dans un délire paranoïaque le combat de classe pour la défaite de l'impérialisme à son profit narcissique, en crachant sur des camarades qui se sont engagés dans ce combat et dans bien d'autres. Et tu oses parler de morale toi qui démontre ici chaque jour tes lacunes immenses en la matière...
Achille- Messages : 2738
Date d'inscription : 24/12/2011
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
gérard menvussa a écrit:Bref, la "morale politique" de nos camarades de lutte ouvriére consiste a s'essuyer les pieds sur le cadavre d'un camarade qui a placé toute sa vie dans un combat pour le communisme, qui a risqué sa peau pour ce combat, pour se "faire" un de leur adversaire roseau en un front commun glauque avec le parti de gauche (ça et la destestation des arabes) . Comme le disait un de leurs défunts dirigeants "question de morale politique" Mais la morale politiques, ceux qui prétenduement "représentent" lutte ouvriére s'en tapent.
Tu as vu ça où ? Personne n'a critiqué JM Krivine ici, mais simplement la grande gueule de service. Là, tu raocntes n'importe quoi. Et je n'ai jamais été à LO.
yannalan- Messages : 2073
Date d'inscription : 25/06/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Je me moque bien de ce que dit ou fait Roseau, qui est une grande personne et qui n'a pas besoin de moi pour se défendre ou attaquer... Ici c'est le fil sur une personnalité de mon organisation tout a fait respectable. Et un rassemblement hétéroclite de partisants du front de gauche et de LO qui utilisent ce fil pour régler des comptes dont personnellement je me fout totalement. Depuis que tu es là, tu trolles a qui mieux mieux les fils, ne connais que le mensonge et l'invective. Malheureusement, c'est totalement contre productif, mon pauvre Achille...Achille a écrit:gérard menvussa a écrit:Bref, la "morale politique" de nos camarades de lutte ouvriére consiste a s'essuyer les pieds sur le cadavre d'un camarade qui a placé toute sa vie dans un combat pour le communisme, qui a risqué sa peau pour ce combat, pour se "faire" un de leur adversaire roseau en un front commun glauque avec le parti de gauche (ça et la destestation des arabes) . Comme le disait un de leurs défunts dirigeants "question de morale politique" Mais la morale politiques, ceux qui prétenduement "représentent" lutte ouvriére s'en tapent.
Encore un concentré de haine anti LO et anti PG de Gérard "moustachu" menvussa au mépris de la mémoire de Jean Michel Krivine. Tu clones la méthode du trollseau qui récupère dans un délire paranoïaque le combat de classe pour la défaite de l'impérialisme à son profit narcissique, en crachant sur des camarades qui se sont engagés dans ce combat et dans bien d'autres. Et tu oses parler de morale toi qui démontre ici chaque jour tes lacunes immenses en la matière...
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Cette polémique est indécente dans ces circonstances et sans le moindre intérêt. Je propose aux modérateurs de la supprimer.
verié2- Messages : 8494
Date d'inscription : 11/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Achille a écrit:Roseau a écrit:Ceux qui comme moi ont la conscience d'avoir accéléré la fin de l'agression impérialiste
en Indochine, épargnant ainsi un nombre considérable de vies et de souffrances indescriptibles,
savent ce que nous devons à des camarades de la trempe de Jean-Michel !
Trollseau qui nous avait déjà expliqué en long en large comment lui quelques uns de ses camarades avaient déclenché mai 68 nous affirme maintenant qu'il a mis fin à l'agression impérialiste au Vietnam.
Il devrait consulter un spécialiste.
Comme d'hab, et ici de façon idécente,
le chargé de com du PG fait attaque personnelle, et RIEN sur le sujet.
En plus il laisse imaginer que l'opposition de dizaines de millions de gens dans le monde,
par des manifs et beaucoup d'autres moyens, en fait tous les moyens d'une guerre,
n'a pas accéléré la défaite impérialiste...
Les attaques personnelles contre ceux qui ne suivent pas JLM n'on pas leur place sur ce fil.
Un seul commentaires: les camarades vietnamiens de l'époque, et même d'aujourd'hui,
lui éclateraient de rire au nez, avec mépris en plus.
Dernière édition par Roseau le Jeu 16 Mai - 1:08, édité 1 fois
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
gérard menvussa a écrit:
..."Je me moque bien de ce que dit ou fait Roseau, qui est une grande personne et qui n'a pas besoin de moi pour se défendre ou attaquer... Ici c'est le fil sur une personnalité de mon organisation tout a fait respectable. Et un rassemblement hétéroclite de partisants du front de gauche et de LO qui utilisent ce fil pour régler des comptes dont personnellement je me fout totalement."...
La Menvussa,tu as coulé une bielle,ou as tu vu que des partisants du F.de G. et de LO reglent des comptes sur ce fil? JM Krivine était un Cde de la LCR/NPA qui lui n'avait pas de haine envers LO,comme toi et quelques autres ici,et il aimait tout particulièrement la fete de la pentecote de LO,et il y participait.
dug et klin- Messages : 813
Date d'inscription : 07/02/2012
Localisation : quelque part entre St-Malo et Collioure en passant par Sarlat
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Si ces camarades avaient ouvert un fil sur le sujet "roseau", il n'y aurait aucune réaction de ma part. Venir polluer ce sujet me semble indécent. Mais tu peut penser autrement. Quand à "detester LO", je déteste surtout ceux qui en montrent une idée carricaturale qui colle au cliché. Et tu n'est pas le dernier à montrer une image déplorable de ton organisation.
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 67
Localisation : La terre
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Si ces camarades avaient ouvert un fil sur le sujet "roseau", il n'y aurait aucune réaction de ma part. Venir polluer ce sujet me semble indécent. Mais tu peut penser autrement. Quand à "detester LO", je déteste surtout ceux qui en montrent une idée carricaturale qui colle au cliché. Et tu n'est pas le dernier à montrer une image déplorable de ton organisation.
Sois factuel Menvussa, quel est le camarade de LO qui vient d' insulter JM Krivine?
Sinon je suis vraiment atristé par la mort de JM Krivine dont j' ai adoré la chorale.
ulm- Messages : 385
Date d'inscription : 15/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
+1, oui c'est indécent.verié2 a écrit:Cette polémique est indécente dans ces circonstances et sans le moindre intérêt. Je propose aux modérateurs de la supprimer.
Vérosa_2- Messages : 683
Date d'inscription : 01/09/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
ulm a écrit:Si ces camarades avaient ouvert un fil sur le sujet "roseau", il n'y aurait aucune réaction de ma part. Venir polluer ce sujet me semble indécent. Mais tu peut penser autrement. Quand à "detester LO", je déteste surtout ceux qui en montrent une idée carricaturale qui colle au cliché. Et tu n'est pas le dernier à montrer une image déplorable de ton organisation.
Sois factuel Menvussa, quel est le camarade de LO qui vient d' insulter JM Krivine?
.
Bonne question au Matuvu/Menvussa de service...
Ce triste pitre ne nous fera pas oublier les qualités de ce camarade Krivine, ses engagements, son ouverture et sa gentillesse naturelle (pour ceux qui l'ont connu et respecté, j'en suis...).
Que le Menvussa tente de façon pourrie d'utiliser le décès d'un camarade respecté par LO comme JM Krivine pour cracher son fiel, ne juge que lui.
Hommage et respect pour notre camarade Krivine...qui nous manquera dès cette année...Et amitiés communistes à tous se proches et à ceux qui, comme lui, veulent faire sauter cette société dégueulasse....
Vals- Messages : 2770
Date d'inscription : 10/07/2010
Re: Décés de Jean-Michel Krivine
Un autre texte, pas connu de tous, toujours par notre regretté camarade Jean-Michel Krivine
« Hitlero-Trotskisme » : retour aux sources d’un ancien militant du PCF
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article28673
« Hitlero-Trotskisme » : retour aux sources d’un ancien militant du PCF
http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article28673
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Mai 68 et la guerre du Vietnam
Par J-M Krivine
http://npaherault.blogspot.com/2013/05/nous-avons-perdu-un-camarade.html#more
http://npaherault.blogspot.com/2013/05/nous-avons-perdu-un-camarade.html#more
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
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