Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
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Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
WWF : écolo-tartuferie ou green-washage ?
http://www.lexpress.fr/actualite/wwf-et-les-entreprises-les-liaisons-dangereuses_1001238.html#xtor=AL-447
Et entre-nous,
http://www.lexpress.fr/actualite/wwf-et-les-entreprises-les-liaisons-dangereuses_1001238.html#xtor=AL-447
WWF et les entreprises, les liaisons dangereuses
Par Julie de La Brosse, publié le 10/06/2011 à 11:17
En multipliant les partenariats avec les entreprises, l'antenne française de l'ONG mondiale assure faire progresser la cause écolo. Mais cette stratégie suscite de plus en plus de critiques.
Quel est le rapport entre un charmant panda et un vulgaire sac de ciment? A première vue, aucun. Le premier sert d'emblème à la plus puissante association environnementale du monde, tandis que le second est accusé par les militants écologistes de favoriser le dérèglement climatique. En signant un partenariat avec Lafarge, en 2010, le WWF France a fini par accepter d'unir ces deux images a priori antinomiques. Dix ans après sa maison mère, qui, elle, n'avait pas eu les mêmes réticences. Aujourd'hui, l'élève pourrait bien dépasser le maître : l'antenne tricolore de l'ONG environnementale multiplie les partenariats stratégiques avec les entreprises.
Elles sont désormais 14, et non des moindres - Carrefour, Castorama, Crédit agricole, Orange ou encore Pierre & Vacances -, à avoir conclu un accord avec le WWF France. En échange d'une somme d'argent très raisonnable - 400 000 euros par an pour le haut de la fourchette -, ces sociétés bénéficient de l'expertise et des conseils de la fondation pour réaliser les progrès auxquels elles se sont engagées. Surtout, elles profitent de la notoriété du célèbre panda, des 4,8 millions d'adhérents du WWF dans le monde et de l'image de la sympathique Isabelle Autissier, présidente de l'organisation en France. Un bon point marketing.
C'est en 1998 que le WWF France a commencé à prospecter du côté du CAC 40. "La seule façon de faire avancer les choses, c'est de parler avec ceux qui détiennent le pouvoir", explique Serge Orru, directeur général depuis 2006. Cet ancien pro du tourisme, fils de cheminot et passionné d'écologie, assume parfaitement la démarche. L'année dernière, grâce à ces partenariats, la fondation a engrangé 3 millions d'euros. Auxquels se sont ajoutés 1,6 million au titre des contrats de licences : une quarantaine d'entreprises ont ainsi le droit d'accoler le panda, qui sur un tee-shirt, qui sur un lave-linge, une imprimante ou une poêle ! Tout compris, cette manne représente 29 % du budget de la fondation... laquelle s'est engagée à ne pas dépasser le seuil de 30 % alimentés par les entreprises.
Des accusations de "green-washing"
Les partenariats produisent des résultats : Carrefour a retiré l'huile de palme sur un tiers de ses produits, arrêté la commercialisation du thon rouge et renoncé au bois non certifié pour le mobilier de jardin. Castorama a réduit de moitié son linéaire d'herbicides et Orange propose désormais à tous ses clients la facture dématérialisée et a allongé la durée de vie de ses mobiles...
Mais, depuis quelque temps, l'histoire d'amour entre l'ONG et les multinationales dérange. Surtout dans la sphère écologiste. Certaines associations dénoncent une "indécente proximité" avec les milieux économiques et politiques et accusent le panda de "green-washing". En clair, il permettrait aux vilains pollueurs de verdir leur image à peu de frais.
"Une fois qu'elles ont le panda, les entreprises n'ont plus aucun intérêt à faire des efforts pour l'environnement, déplore Sylvain Angerand, des Amis de la Terre. Nous sommes alors complètement bloqués dans nos actions et nos moyens de pression." Il y a quelques années, l'organisation écologiste avait lancé une campagne "Banques françaises, épargnez le climat", qui épinglait le Crédit agricole. Réponse de la banque ? Plutôt que de s'efforcer de coller au cahier des charges proposé par l'association, elle signait un partenariat avec le WWF.
Forte de l'emblème du panda, que le WWF assure délivrer avec beaucoup de parcimonie, l'entreprise peut chercher à se protéger contre les risques d'une mauvaise publicité. "Le WWF est un critical friend", résume Kareen Rispal, responsable du développement durable chez Lafarge. L'ONG alerte et critique, mais jamais en public. Au point de créer quelques tensions parmi les 93 salariés de la fondation, notamment entre les experts scientifiques, chargés des missions environnementales, et les responsables de partenariats, soucieux de préserver le client. "Nous ne sommes pas associés au processus de sélection en amont, explique un ancien expert. Résultat, il nous arrivait parfois de devoir travailler avec des entreprises pour lesquelles l'évolution des pratiques nous semblait impossible." Le WWF, qui se défend d'avoir jamais sombré dans la complaisance, se réserve le droit d'évincer ses partenaires, comme il l'a fait avec la Caisse d'épargne en 2009 ou GDF quand le gazier s'est rapproché de Suez. Et comme il pourrait bien le faire demain avec Pierre & Vacances.
"Le problème du WWF est qu'il dresse un constat dramatique de la situation sans jamais remettre en question l'origine du mal, c'est-à-dire le modèle des entreprises elles-mêmes", regrette Fabrice Nicolino, auteur de Qui a tué l'écologie? (éd. LLL), un pamphlet contre l'action des associations écologistes. Depuis qu'il a signé avec l'ONG, le groupe Lafarge a réduit de 21,7 % ses émissions de CO2 par tonne de ciment produite. Mais il a été récemment accusé par le Réseau Action Climat d'Europe de financer des sénateurs américains climato-sceptiques. "Et le WWF ne trouve rien à y redire !" s'offusque le journaliste militant.
Là n'est pas la seule contradiction. Aujourd'hui, l'organisation s'interdit de discuter avec les pétroliers, les nucléocrates et a refusé un partenariat à Air France. Mais elle prête volontiers son panda à Aéroport de Paris, pourtant dans le même secteur. En 2009, alors que le monde traverse une crise historique, elle soutient le premier Salon du luxe et du développement durable. "Dès l'origine, le WWF s'est fondu dans les milieux capitalistes. Il ne s'est jamais opposé au modèle productiviste ou à la société de consommation, car sa mission première a toujours été la conservation de la nature", explique Denis Chartier, universitaire et auteur d'une thèse sur le sujet (voir l'encadré). Aux Etats-Unis, notamment, l'association siège dans des tables rondes sur le soja "responsable" aux côtés de firmes comme le géant des semences Monsanto.
180 000 donateurs dans l'Hexagone
Heureusement pour le WWF français, les attaques restent relativement circonscrites au cercle des écolos purs et durs. En l'espace de cinq ans, il a même recruté 50 000 donateurs supplémentaires et en compte désormais 180 000 dans l'Hexagone. Récemment, un rapport parlementaire sur la transparence du financement des organisations environ-nementales reprochait à la fondation Hulot ses liens troubles avec les entreprises, mais louait les partenariats du WWF. "Qui irait critiquer une ONG prête à la conciliation permanente ?" conclut Sylvain Angerand. "On ne reproche pas à la CGT de négocier avec le gouvernement", réplique, courroucé, Serge Orru. Le gentil panda sait aussi sortir ses griffes.
Protéger la nature ou la planète?
En 1961, Sir Julian Huxley, un riche chasseur britannique soucieux de pouvoir laisser libre cours à sa passion, crée le World Wildlife Fund (Fonds mondial pour la nature). Son but ? Protéger la biodiversité et les systèmes naturels. Depuis cinquante ans, l'association est contrôlée non pas par des écologistes, mais par des dirigeants d'entreprise ou des personnalités issues de familles royales. Grâce à l'éminence de ses membres, le WWF participe aux réseaux politiques, économiques et internationaux, jusqu'à l'OMC! Mais, à l'heure où certains scientifiques ne donnent pas plus de cent ans à la planète, l'idéologie "conservationniste" se voit contestée. Le WWF est en effet accusé d'avoir pour seul dessein le rachat des forêts à haute diversité biologique, pour y développer des parcs naturels sans se préoccuper du sort des populations locales. Il est aussi suspecté de ne pas partager les principaux combats écologiques, contre les OGM ou le nucléaire, ou encore de vanter les mérites des agrocarburants, pourtant jugés plus néfastes pour le climat que les combustibles fossiles.
J. L. B.
Et entre-nous,
Bain... Ca se discute... Ca dépent ce qu'on entend par "négocier"... Ca peut être acheter le silence par exemple...Serge Orru a écrit:"On ne reproche pas à la CGT de négocier avec le gouvernement", réplique, courroucé, Serge Orru.
Dernière édition par BouffonVert72 le Ven 15 Juil - 0:00, édité 1 fois (Raison : Changement de titre du topic pour étendre le sujet)
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Re: Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
http://www.liberation.fr/terre/01012347097-volee-de-bois-vert-au-wwf-france
05/07/2011 à 00h00
Volée de bois vert au WWF France
Dans une lettre, les salariés de l’ONG reprochent à leur directeur, Serge Orru, une gestion motivée par des ambitions politiques et des pratiques internes douteuses.
Par CORALIE SCHAUB
Zen, le panda ? L’ursidé peut-être. Le WWF France, pas vraiment. Cet après-midi, Isabelle Autissier, la présidente de la branche française de l’ONG mondiale de défense de l’environnement, réunit les salariés pour tenter d’éviter la crise de nerfs. Le 17 juin, une lettre signée par «57 salariés du WWF France» (sur 60 approchés) et publiée sur Rue89, réclamait la tête du directeur général, Serge Orru. Présenté comme un «cri d’exaspération» de la base, le courrier porte sur deux points : le détournement des moyens du WWF au profit personnel de Serge Orru et la déliquescence du management. Selon la lettre accusatoire, Orru utiliserait l’ONG comme «marchepied d’une carrière politique» - il briguerait un siège de député en 2012. Il lui est aussi reproché d’avoir «affaibli l’unité des ONG» en proposant, en solo, à Nicolas Sarkozy un audit sur le coût du nucléaire, alors qu’une position commune était arrêtée avec les autres ONG. Bref, Orru la jouerait trop perso.
Ambiance. Le management ? Il est question d’insultes, de comportements à la limite du harcèlement moral, de «chantages, manipulations et pratiques douteuses» ou de «propos vulgaires». Résultat : un «profond malaise des salariés», et un turn-over très élevé (plus de 25%), dixit la lettre. Face à cette charge, Autissier fait bloc derrière son DG. Dans un courrier daté du 20 juin, elle se dit «choquée que de telles accusations soient émises d’une façon publique». Pour la présidente, si quelqu’un parle à la presse, ce sera «une faute grave». Quant au conseil d’administration, il considère que «ces allégations erronées ont un caractère diffamatoire». Chaude ambiance.
Le WWF est en France une des principales associations de défense de l’environnement aux côtés de Greenpeace et des Amis de la Terre. Spécialisée à l’origine dans la défense de la biodiversité, elle a élargi ses activités à tous les gros dossiers du moment (climat, alimentation, etc.). Et noué, depuis quelques années, des partenariats avec des entreprises (Lafarge, par exemple) qu’elle tente d’initier à des pratiques plus écocompatibles. Partenariats qui, curieusement, ne sont pas l’objet des attaques en interne qui évoquent plutôt un «climat de terreur et d’insécurité».Aucun salarié joint par Libération n’a voulu parler ouvertement. Mais la plupart confirment l’exaspération générale. «Les faits sont faciles à prouver», dit l’un. «Le DG a dérapé car il n’y a pas de cadre à sa fonction, explique l’autre. La gouvernance est opaque, on ne sait pas qui décide quoi.» Tous regrettent la publication du courrier sur le site de Rue89 : «On n’a pas du tout eu l’intention de faire s’écrouler la baraque, on aime le WWF et on a envie qu’il retrouve ses valeurs de départ.»
Serge Orru, lui, nie tout. Ne veut pas non plus parler, mais se lâche un peu quand même : il se dit «meurtri», et évoque une «tentative de déstabilisation au moment où le WWF prend de plus en plus de pouvoir politique». Et de s’interroger : «A qui profite le fiel ?» Expression reprise dans une lettre de soutien paraphée par le gratin «écolo» (Pierre Rabhi, Yann Arthus-Bertrand, Corinne Lepage…). Selon Orru et ses partisans, c’est le WWF qu’on vise : «Orru dérange, dit la lettre. On ne lui pardonne pas d’avoir dynamisé et renforcé l’influence et le rôle du WWF en France.» Depuis son arrivée, le nombre de salariés est passé de 60 à 100, le budget de 10 à 19 millions d’euros, les donateurs de 130 000 à 180 000…
sorcières. Seule autorisée à causer aux médias, Isabelle Autissier livre son analyse : «Il y a une vraie crise de croissance. Depuis deux ans, les gens se sentent un peu perdus. D’autant qu’ils sont très jeunes - en moyenne 26 ans - et très diplômés. On a peut-être réagi un peu trop tardivement.» Elle veut que l’ONG «sorte plus forte de cette crise». En accélérant le recrutement d’un DRH et en demandant un audit organisationnel. Elle compte aussi sur le prochain plan d’action (2012-2017) pour remotiver les troupes. Et jure qu’il n’y aura pas de chasse aux sorcières.
Du côté des salariés contactés, on ne comprend pas ce soutien au DG et on regrette que la lettre du 17 juin n’ait été jugée que sur la forme au détriment du fond. Bref, l’incompréhension est totale, de part et d’autre. Arnaud Gossement, ex porte-parole de France Nature Environnement (FNE) et avocat, voit dans cette crise un phénomène propre au milieu : «Le Grenelle et la nécessaire professionnalisation ont mis le bazar dans les ONG, ça les a forcées à se remettre en cause. Elles sont devenues des contre-pouvoirs, l’équivalent des syndicats de salariés. Et puis, la mauvaise ambiance au sein des ONG ne date pas d’hier, ce sont des structures remplies de gros egos.» Le panda ? Ni tout noir ni tout blanc… ni tout zen décidément.
BouffonVert72- Messages : 1748
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Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
http://wikistrike.over-blog.com/article-comment-les-plus-gros-pollueurs-de-la-planete-s-achetent-des-organisations-ecologistes-79357606.html
Mercredi 13 juillet 2011 3 13 /07 /Juil /2011 21:32
Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
Comment les plus gros pollueurs de la planète « s’achètent » des organisations écologistes
Jusqu’où les organisations environnementales sont-elles prêtes à se compromettre pour conclure des partenariats avec des grandes entreprises ? Basta ! a recueilli le témoignage accablant d’une ancienne salariée de la puissante ONG états-unienne Conservation International, Christine MacDonald, journaliste et auteur du livre Green. Inc. En échange de généreuses donations, cette organisation aide des multinationales comme Monsanto, BP, Total ou Walmart à « verdir » leur image. Ou conseille le vendeur d’armes Lockheed Martin pour recycler les éclats d’obus ramassés sur les champs de bataille.
Peut-on être à la fois vendeur d’armes et protéger environnement ? Oui, répond Conservation International, une ONG états-unienne. Dans une vidéo publiée par le magazine anglais Don’t Panic (voir ci-dessous), deux journalistes se sont fait passer pour des représentants de Lockheed Martin, une entreprise américaine qui équipe de nombreuses armées en avions de chasse et bombardiers. Leur objectif ? Voir comment l’association de préservation de l’environnement peut les aider à « verdir » leur image.
Les actions en faveur de l’environnement présentées par les faux représentants de Lockheed Martin sont pour le moins stupéfiantes : « Nous leur avons dit qu’une de notre principale stratégie pour préserver l’environnement était le recyclage des éclats d’obus des zones de batailles, que nous utilisions pour fabriquer de nouvelles bombes », raconte Heydon Prowse, un journaliste de Don’t Panic. Des arguments développés sur le site de Lockheed Martin. De quoi indigner la représentante de Conservation International ? Pas du tout. Elle propose aux vendeurs d’armes de devenir membre d’un « Conseil du Business et de Soutenabilité » qui rassemble déjà les entreprises Cargill, Shell, Monsanto ou Chevron – des modèles de développement durable ! – et d’apparaître ainsi sur le site de l’ONG dans la liste des entreprises engagées dans la protection de l’environnement.
Des « oiseaux de proie » comme mascotte
En échange, l’entreprise américaine doit s’acquitter de 37.500 dollars. Et pour 240.000 dollars environ, d’autres options de sponsoring peuvent être envisagées. Autres possibilités : développer des « messages verts » pertinents ou utiliser les « oiseaux de proie » d’Afrique du Nord, une espèce en danger, comme une mascotte pour Lockheed Martin, actif dans le secteur de l’aviation.
Comme l’industrie pétrolière ou celle des OGM, les entreprises de « défense et de sécurité » ne semblent pas être incompatibles, pour Conservation International, avec la défense de l’environnement. Northrop Grumman, une entreprise de défense étasunienne, fournisseur du Pentagone, fait déjà partie de son fameux conseil de « soutenabilité ». Le directeur de Northrop est d’ailleurs membre du Conseil d’Administration de Conservation International. Bienvenue au club !
Christine MacDonald connaît bien Conservation International. Cette journaliste indépendante a travaillé pendant sept mois, en 2006, pour l’organisation environnementale, dans le secteur de la communication. De son expérience et d’un travail d’investigation qui a suivi, elle a écrit un livre, Green Inc. : An Environmental Insider Reveals How a Good Cause Has Gone Bad, qui expose son regard très critique sur ces organisations environnementales de conservation. Entretien.
Basta ! : Que pensez-vous de l’enquête réalisée par Don’t Panic ?
Christine MacDonald : Elle souligne combien Conservation International (CI) et ses rivaux parmi les grosses associations de préservation de l’environnement, ont perdu de vue leur mission dans la compétition qu’elles se mènent pour récolter des dons d’entreprises (son budget avoisine les 290 millions de dollars, ndlr). Si vous observez comment la responsable de CI répond (voir la vidéo en anglais ci-dessus), jamais elle ne suggère que CI pourrait aider Lockheed Martin à améliorer ses pratiques environnementales. Au contraire, toute la discussion se centre sur comment CI peut aider l’entreprise à améliorer son image en liant sa marque à des espèces en danger.
Comment expliquer que cette organisation environnementale, comme d’autres, semble ne pas se soucier de la nature des activités de grosses entreprises avec qui elle passe des accords ?
Un employé de CI que j’ai interviewé après son départ de l’ONG l’a résumé ainsi : pour ces groupes de conservation, il est « sexy » de recruter des donateurs du monde de l’entreprise, et recruter les entreprises les plus polluantes est ce qu’il y a de plus « sexy ». En accumulant les partenariats, les organisations gagnent du prestige : elles disent qu’elles sont écoutées par le monde de l’entreprise et qu’elles sont donc en train de les influencer vers un plus grand respect de l’environnement. Et puisque les ONG sont de plus en plus nombreuses à chercher à attirer ces fonds, il y a ainsi une véritable compétition entre elles.
Ces organisations environnementales doivent alimenter leurs réserves financières. Elles fonctionnent selon le même modèle que les grosses entreprises, avec des présidents, un conseil d’administration, une hiérarchie verticale. Mais elles ne fabriquent et ne vendent rien. Seules leurs marques, qui sont reconnues par beaucoup de monde, peuvent leur rapporter de l’argent.
Comment fonctionnent ces organisations de conservation de l’environnement ?
Comme le montre la vidéo de Don’t Panic, CI est un groupe expert dans la mise en valeur de son nom – sa marque – afin d’attirer les fonds. Des fonds dont l’organisation a besoin pour payer ses hauts salaires [le PDG de CI, Peter Seligmann, a gagné plus de 470.000 dollars en 2010], maintenir ses bureaux huppés tout autour du monde et continuer à redistribuer ses millions de dollars chaque année, à de plus petits groupes environnementaux et des chercheurs [1]. Cette redistribution à des plus petits groupes est très importante puisqu’elle aide les organisations comme CI à maintenir leur position dans le haut de la hiérarchie de ceux qui luttent pour la conservation de l’environnement. En plus, ce poids économique est brandi pour décourager les autres ONG environnementales de les critiquer, par peur de perdre leurs fonds.
Certaines organisations, comme le WWF, affirment qu’ils doivent travailler main dans la main avec les grosses entreprises de façon à les faire changer. Qu’en pensez-vous ?
Depuis des décennies, des ONG comme CI, The Nature Conservancy (TNC), le WWF, liées à des grosses entreprises, clament qu’elles influencent leurs bienfaiteurs du monde de l’entreprise vers un fonctionnement plus respectueux de l’environnement. On se rend compte facilement que les progrès réalisés par ces entreprises sont superficiels. L’approche court-termiste, qui valorise les logiques boursières plutôt qu’une croissance soutenable, continue de dominer.
Ce qui ne semble pas déranger de nombreuses associations de préservation...
Si vous regardez la composition des donateurs et des membres du Conseil d’administration d’organisations comme CI, WWF ou le TNC, c’est le bottin mondain des pires pollueurs de la planète ! Ces mêmes entreprises financent des campagnes de lobbying extrêmement coûteuses à Washington pour bloquer des lois qui visent à répondre aux enjeux climatiques. Ils attaquent l’Agence étasunienne de Protection de l’Environnement et affaiblissent les lois contre la pollution ou pour la santé publique. Tout en utilisant, parallèlement, leurs liens avec ces groupes environnementaux pour revaloriser leur image publique. Depuis longtemps, ces grands pollueurs savent faire taire les critiques. À chaque fois qu’une entreprise fait une donation à un groupe environnemental, cela sert à « utiliser » l’organisation et à affaiblir ses missions.
Quand vous travailliez pour CI, les employés étaient-ils conscients de cette manipulation et de ce greenwashing ?
Il y avait beaucoup de grognements à l’intérieur de CI sur certains de ses partenariats. Particulièrement avec les entreprises pétrolières comme BP et les compagnies minières, qui devaient répondre à la fois aux critiques environnementales mais aussi aux violations de droits humains. Mais peu de gens faisaient entendre leurs critiques, même à l’intérieur de l’organisation.
Lors d’une réunion de l’équipe de la communication, un de mes collègues parlait de projets pour étendre une grosse campagne publique menée avec BP. Quelques jours avant, j’avais lu que BP était nommée par l’Agence de Protection de l’Environnement (EPA) comme le propriétaire de la raffinerie la plus polluante du pays. Une de mes collègues le fit remarquer. Le groupe réagit alors comme si elle avait dit quelque chose de vraiment impoli. Pas une seule personne parmi les 30 à 40 présents, tous soi-disant écologistes, n’avait quelque chose à redire à propos du partenariat entre CI et une entreprise que l’EPA – pas vraiment un repère d’activistes radicaux – avait désignée comme le plus grand pollueur du pays. Après quelques minutes d’un silence embarrassant, la réunion reprit, comme si la remarque n’avait jamais été faite. Et peu de temps après, la campagne avec BP a été mise en route.
Comment ont réagi vos anciens collègues à la publication de votre livre ?
Les réactions ont été variées. Plusieurs employés actuels ou anciens de CI ont aimé mon livre. Ils ont l’impression qu’enfin, ces questions sont rendues publiques. Mais pour ceux qui continuent à travailler dans ce secteur, prendre la parole est très risqué. Un employé de Nature Conservancy a perdu son emploi après avoir fait l’éloge de mon livre sur Internet. D’autres, à l’intérieur de Conservation International, ont essayé de discréditer mon livre comme étant inexact, mais ils n’ont pas vraiment eu de succès.
Trois ans après sa publication, Green Inc. semble avoir plus d’écho, alors que de nombreuses personnes deviennent conscientes que ces groupes environnementaux sont redevables vis-à-vis des entreprises avec qui elles travaillent. On commence à se demander si ce lien avec les entreprises polluantes n’est pas une des raisons pour lesquelles le mouvement environnemental n’a pas réussi à mobiliser dans la lutte contre le changement climatique. Je me réjouis de voir un débat s’ouvrir sur les moyens de revitaliser le mouvement environnemental. Ce qui est moins clair, c’est de savoir si ce débat mènera à l’action ou non.
Propos recueillis par Simon Gouin
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