Après Pierre Assouline, Luc Ferry ou encore Boris Cyrulnik [cf. Rue89], c’est au tour de François Fillon de s’en prendre au petit opus de 24 pages de Stéphane Hessel.
«J'ai vu qu'un débat s'était noué autour de l'indignation. Rien ne serait en effet moins français que l'apathie et l'indifférence. Mais l'indignation pour l'indignation n'est pas un mode de pensée» a déclaré François Fillon.
Dans un texte très critique à l'égard du gouvernement, déjà tiré à 950.000 exemplaires, l’ancien résistant et déporté politique à Buchenwald, aujourd’hui âgé de 93 ans, dénonce l’écart grandissant entre les très riches et les très pauvres, le traitement fait aux sans-papiers et aux Roms, la dictature des marchés financiers ou encore les acquis bradés de la Résistance comme la sécurité sociale et les retraites.
Signé par un homme qui a transformé sa vie en un modèle de militantisme politique – notamment au travers de son engagement associatif - «Indignez-vous !» est un appel à l’action citoyenne. Le premier ministre est-il vraiment allé au-delà du titre? Il semble bien n’y avoir vu qu’un éloge de la contestation gratuite:
«La complexité du monde actuel réclame d’abord de la lucidité, de l’exigence intellectuelle, parce que tout ne s’écrit pas en noir et blanc, mais elle réclame aussi et surtout des actes. […] Est-ce qu’on peut souhaiter le sens de la nuance au détriment de la violence? Est-il possible de parier sur la quête d'une vérité équilibrée, qui prétend construire plutôt que détruire?» s’est-il inquiété, avant d’enfoncer le clou : «Peut-on espérer que la difficile tâche d’agir pour la France ne soit pas étouffée par le penchant bien plus facile de tout contester? C’est en tout cas le vœu que je formule pour notre démocratie.»
Il n'est pas exclu que cette lecture, pour le moins réductrice, du texte de Stéphane Hessel trahisse les soucis d'un chef de gouvernement qui voit les Français s’arracher, «en cette année pré-électorale», le livre d'un homme encensant Martine Aubry, Pierre Mendès-France, Edgar Morin et DSK.
Jonathan Reymond
(avec AFP)