Public/privé : quel prolétariat ?
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chejuanito
Duzgun
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Marie-Georges
sylvestre
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Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Ce point ne vient pas se substituer à la question de la place dans le rapport de production, qui est centrale pour tout marxiste.
Par contre, il faut effectivement être conscient de la parcellisation du travail aujourd'hui, qui sans mettre fin au capitalisme des monopoles, a créé des myriades d'entreprises sous-traitantes filialisées etc pour éviter la concentration des travailleurs et diviser le prolétariat.
Le résultat, c'est que dans le privé, il y a d'un côté quelques très grosses entreprises "bastions syndicaux" avec des syndicats collabos et corporatistes dans la plupart des cas, de l'autre plein de petites entreprises "déserts syndicaux" avec des conditions de travail bien pire, précarisées, etc, et qui travaillent pour les premières.
Les premiers sont vus par les seconds comme des privilégiés, et au mieux comme une perspective à atteindre (donc il faut fermer sa gueule et faire le maximum pour être embauché par la grosse entreprise cliente).
Les seconds pensent qu'ils sont effectivement "privilégiés" et qu'il ne faut pas en faire trop, être responsable, mais défendre avant tout leurs avantages par rapport à leurs sous-traitants et fournisseurs (et plus globalement au reste du privé).
Les premiers ont de moins en moins de tâches productives alors que ces tâches sont de plus en plus "externalisées" vers les seconds (qui sont donc de plus en plus nombreux).
Cette nouvelle organisation capitaliste est une trouvaille géniale du point de vue de la bourgeoisie pour contre-carrer le mouvement ouvrier et le rendre impuissant.
Face à ça, il est évident que l'on a un certain retard, mais que c'est pourtant un axe stratégique majeur :
1/ on doit absolument avoir une présence dans le prolétariat en développement (et pas seulement dans celui en déclin)
2/ si pour un mouvement d'ensemble, il faut évidemment que des grosses concentrations de travailleurs puissent servir de secteurs moteurs, il n'est pas imaginable d'agir uniquement avec ceux que les autres considèrent à tort ou à raison comme "privilégiés"
3/ pour que la grève pèse, il faut absolument qu'elle atteigne le bas de l'échelle de production (sans quoi la production continue, mais sans ses couches directrices), et que celle-ci puisse déborder les autres couches
4/ la structure salariale des "déserts syndicaux" étant bien plus jeune, et les capacités de mobilisation de la jeunesse étant bien plus importants ....... (inutile de détailler)
En clair, il faut effectivement considérer le privé dans son ensemble par rapport au public, mais aussi les contradictions internes au privé.
On ne peut pas dire "tout se vaut", il y a bien des rapports de production, une structure de ces rapports à prendre en compte, des secteurs à prioriser en terme d'implantation et d'influence...
Tout dépend aussi si l'on considère qu'une révolution aura lieu demain(!) ou si l'on pense que ce sera un travail de plus longue haleine qu'il faut préparer (auquel cas gagner de l'influence chez les retraités est peut-être de la peine perdue... développer les idées révolutionnaires chez les jeunes travailleurs est peut-être plus pertinent...).
Par contre, il faut effectivement être conscient de la parcellisation du travail aujourd'hui, qui sans mettre fin au capitalisme des monopoles, a créé des myriades d'entreprises sous-traitantes filialisées etc pour éviter la concentration des travailleurs et diviser le prolétariat.
Le résultat, c'est que dans le privé, il y a d'un côté quelques très grosses entreprises "bastions syndicaux" avec des syndicats collabos et corporatistes dans la plupart des cas, de l'autre plein de petites entreprises "déserts syndicaux" avec des conditions de travail bien pire, précarisées, etc, et qui travaillent pour les premières.
Les premiers sont vus par les seconds comme des privilégiés, et au mieux comme une perspective à atteindre (donc il faut fermer sa gueule et faire le maximum pour être embauché par la grosse entreprise cliente).
Les seconds pensent qu'ils sont effectivement "privilégiés" et qu'il ne faut pas en faire trop, être responsable, mais défendre avant tout leurs avantages par rapport à leurs sous-traitants et fournisseurs (et plus globalement au reste du privé).
Les premiers ont de moins en moins de tâches productives alors que ces tâches sont de plus en plus "externalisées" vers les seconds (qui sont donc de plus en plus nombreux).
Cette nouvelle organisation capitaliste est une trouvaille géniale du point de vue de la bourgeoisie pour contre-carrer le mouvement ouvrier et le rendre impuissant.
Face à ça, il est évident que l'on a un certain retard, mais que c'est pourtant un axe stratégique majeur :
1/ on doit absolument avoir une présence dans le prolétariat en développement (et pas seulement dans celui en déclin)
2/ si pour un mouvement d'ensemble, il faut évidemment que des grosses concentrations de travailleurs puissent servir de secteurs moteurs, il n'est pas imaginable d'agir uniquement avec ceux que les autres considèrent à tort ou à raison comme "privilégiés"
3/ pour que la grève pèse, il faut absolument qu'elle atteigne le bas de l'échelle de production (sans quoi la production continue, mais sans ses couches directrices), et que celle-ci puisse déborder les autres couches
4/ la structure salariale des "déserts syndicaux" étant bien plus jeune, et les capacités de mobilisation de la jeunesse étant bien plus importants ....... (inutile de détailler)
En clair, il faut effectivement considérer le privé dans son ensemble par rapport au public, mais aussi les contradictions internes au privé.
On ne peut pas dire "tout se vaut", il y a bien des rapports de production, une structure de ces rapports à prendre en compte, des secteurs à prioriser en terme d'implantation et d'influence...
Tout dépend aussi si l'on considère qu'une révolution aura lieu demain(!) ou si l'on pense que ce sera un travail de plus longue haleine qu'il faut préparer (auquel cas gagner de l'influence chez les retraités est peut-être de la peine perdue... développer les idées révolutionnaires chez les jeunes travailleurs est peut-être plus pertinent...).
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Ouais, ce serait bien d'avoir des données chiffrées pour avancer. Par exemple est-il vrai que les enseignants sont plutôt vieux ? Bof.
Et est-il vrai que la division entre secteurs vus comme "privilégiés", plus syndiqués, etc. constitue une "nouvelle organisation du capitalisme" ? Bof. Et est-il vrai que les travailleurs mieux payés ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier ? Bof.
Charlie Post, Le mythe de l'aristocratie ouvrière
Et est-il vrai que la division entre secteurs vus comme "privilégiés", plus syndiqués, etc. constitue une "nouvelle organisation du capitalisme" ? Bof. Et est-il vrai que les travailleurs mieux payés ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier ? Bof.
Un examen plus systématique de l’histoire des luttes ouvrières dans les pays du Nord, au cours du siècle dernier, ne confirme cependant pas l’affirmation que les travailleurs bien payés sont généralement réformistes ou conservateurs tandis que ceux mal payés seraient plus radicaux ou révolutionnaires. Le plus important contre-exemple, c’est la classe ouvrière russe au début du XXe siècle. La colonne vertébrale des Bolcheviques de Lénine (quelque chose dont il était assurément très conscient) était formée par les travailleurs industriels les mieux payés des villes russes, des ouvriers qualifiés dans les plus grandes usines. Les travailleurs moins payés, comme ceux du textile à prédominance féminine, étaient généralement soit non organisés, soit apolitiques (jusqu’au début de la Révolution février 1917) ou alors soutenaient les Mencheviques réformistes[36]. En fait, la base de masse de l’aile gauche antiguerre des partis socialistes d’avant la Première Guerre mondiale et des partis communistes après la guerre était constituée par des travailleurs relativement bien payés dans les grandes usines de la métallurgie. Ces travailleurs menèrent des luttes militantes contre l’accélération des cadences et contre leur déqualification qui devinrent des luttes politiques contre la conscription et la guerre. Le Parti communiste allemand devint un parti de masse quand des dizaines de milliers de métallurgistes bien payés quittèrent fin 1920-début 1921 le Parti socialdémocrate indépendant d’Allemagne (USPD) pour rejoindre les communistes. Les partis communistes français et italien devinrent également des partis de masse grâce au recrutement de milliers d’ouvriers qualifiés qui avaient mené les grèves de l’après-Première Guerre mondiale. Ces travailleurs bien payés étaient également surreprésentés dans les partis communistes plus petits de Grande- Bretagne et des Etats-Unis[37]. Des travailleurs bien payés, quoiqu’en général expropriés de leurs qualifications, dans des grandes industries, ont continué de jouer un rôle dirigeant durant les soulèvements de masse, au cours du XXe siècle. Lors de la montée des luttes aux Etats-Unis dans les années 1930, qui a conduit à la fondation de la CIO [Congress of Industrial Organizations, qui s’organise dès 1935], des travailleurs généralement bien payés de l’automobile, de l’acier, du caoutchouc et d’autres industries de production de masse, avec souvent des ouvriers industriels qualifiés à leur tête, ont impulsé la création de syndicats dans l’industrie, qui réunissaient qualifiés et non-qualifiés, hauts salaires et bas salaires. Dans les organisations radicales et révolutionnaires des années 1930 aux Etats-Unis, les mêmes travailleurs bien payés et qualifiés étaient également surreprésentés[ 38]. Des travailleurs relativement bien payés étaient également à l’avant-garde des luttes de masse prérévolutionnaires en France en 1968, en Italie en 1969-70, au Royaume-Uni entre 1967 et 1975 et au Portugal en 1974-75. Ce sont des travailleurs relativement « aristocratiques » parmi au sein des transports routiers, de l’automobile, des télécommunications, de l’enseignement public et de la poste qui furent au centre des grèves non officielles (non lancées et reconnues par les appareils syndicaux), des grèves sauvages qui secouèrent l’industrie des Etats-Unis entre 1965 et 1975. En France, en 1995, des travailleurs bien payés des télécommunications, des chemins de fer, de la poste, de l’électricité, de la santé publique et de l’enseignement menèrent les grèves du secteur public qui furent les premières luttes ouvrières victorieuses contre le néolibéralisme. A l’automne de 2004, en Allemagne, les travailleurs de l’automobile, parmi les mieux payés du pays, s’opposèrent aux licenciements en défiant leurs propres dirigeants syndicaux en engageant un mouvement de grève.
Charlie Post, Le mythe de l'aristocratie ouvrière
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Je n'ai jamais rien dit de tel!?sylvestre a écrit:Ouais, ce serait bien d'avoir des données chiffrées pour avancer. Par exemple est-il vrai que les enseignants sont plutôt vieux ? Bof.
Je n'ai jamais rien dit de tel!?sylvestre a écrit:Et est-il vrai que la division entre secteurs vus comme "privilégiés", plus syndiqués, etc. constitue une "nouvelle organisation du capitalisme" ? Bof. Et est-il vrai que les travailleurs mieux payés ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier ? Bof.
Ceci étant, Lénine évoque déjà dans L'impérialisme stade suprême du capitalisme le problème de la formation de l'aristocratie ouvrière dans les pays impérialistes.
Quant au texte que tu cites, notons d'abord que le "privilégié" n'est pas forcément considéré sur la base salariale (un fonctionnaire n'est pas forcément mieux payé qu'un salarié du privé, c'est bien souvent l'inverse). Ensuite, le fait que ces travailleurs - vus par les autres comme "privilégiés" - se mettent plus facilement en grève, mènent des grèves plus importantes etc, c'est exactement ce que je dis. Je ne vois donc pas en quoi ce texte est censé me contredire??
Mais croire qu'on peut mener aujourd'hui une mobilisation sociale victorieuse voire une révolution, avec juste quelques bastions combatifs, sans s'occuper du reste du prolétariat, ça me paraît doucement utopique (en plus d'être dangereusement source de bureaucratisation).
Désolé de penser qu'il faut œuvrer à l'unité du prolétariat et agir pour cela prioritairement dans les couches les plus exploitées du prolétariat (sans-papiers, précaires, sous-traitants, minorités, etc).
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:Je n'ai jamais rien dit de tel!?sylvestre a écrit:Ouais, ce serait bien d'avoir des données chiffrées pour avancer. Par exemple est-il vrai que les enseignants sont plutôt vieux ? Bof.
Tu as dit "la structure salariale des "déserts syndicaux" étant bien plus jeune," ce qui signifie a priori que la structure salariale des "non-déserts syndicaux" est bien plus vieille.
Je n'ai jamais rien dit de tel!?sylvestre a écrit:Et est-il vrai que la division entre secteurs vus comme "privilégiés", plus syndiqués, etc. constitue une "nouvelle organisation du capitalisme" ? Bof. Et est-il vrai que les travailleurs mieux payés ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier ? Bof.
Ben si : "Cette nouvelle organisation capitaliste est une trouvaille géniale du point de vue de la bourgeoisie pour contre-carrer le mouvement ouvrier et le rendre impuissant." et "Les seconds pensent qu'ils sont effectivement "privilégiés" et qu'il ne faut pas en faire trop, être responsable, mais défendre avant tout leurs avantages par rapport à leurs sous-traitants et fournisseurs (et plus globalement au reste du privé)."
Ceci étant, Lénine évoque déjà dans L'impérialisme stade suprême du capitalisme le problème de la formation de l'aristocratie ouvrière dans les pays impérialistes.
Et il faisait justement de graves erreurs sur ce point, qui ont été corrigées depuis, entre autres par le texte que je cite.
Quant au texte que tu cites, notons d'abord que le "privilégié" n'est pas forcément considéré sur la base salariale (un fonctionnaire n'est pas forcément mieux payé qu'un salarié du privé, c'est bien souvent l'inverse).
En fait hauts salaires et stabilité de l'emploi vont généralement ensemble - d'un côté les patrons paient des hauts salaires à certaines catégories de travailleurs précisément pour éviter qu'ils partent, de l'autre le résultat d'un rapport de forces plus favorables aux travailleurs dans un secteur donné mène à la fois à de plus hauts salaires et à de meilleures garanties vis à vis de l'emploi, il en est de même du reste des heures de travail, des conditions de travail, etc.
Ensuite, le fait que ces travailleurs - vus par les autres comme "privilégiés" - se mettent plus facilement en grève, mènent des grèves plus importantes etc, c'est exactement ce que je dis. Je ne vois donc pas en quoi ce texte est censé me contredire??
Mais croire qu'on peut mener aujourd'hui une mobilisation sociale victorieuse voire une révolution, avec juste quelques bastions combatifs, sans s'occuper du reste du prolétariat, ça me paraît doucement utopique (en plus d'être dangereusement source de bureaucratisation).
Désolé de penser qu'il faut œuvrer à l'unité du prolétariat et agir pour cela prioritairement dans les couches les plus exploitées du prolétariat (sans-papiers, précaires, sous-traitants, minorités, etc).
Une fois de plus tu enfonces des portes ouvertes. Personne ne parle de " mener aujourd'hui une mobilisation sociale victorieuse voire une révolution, avec juste quelques bastions combatifs".
Ce qui est en question ici, c'est la notion qu'il faille faire une priorité spéciale de l'implantation du NPA dans les couches que tu as décrites, et qui étaient d'abord les entreprises du privé en général, puis les petites entreprises du privé ("déserts syndicaux").
Je pense qu'il y a une illusion qui peut mener à des déceptions assez grandes qui consiste en gros à contreposer les "secteurs combatifs" (plus grosses entreprises du privé, et fonction publique), qui seraient combatifs d'une mauvais manière ("syndicats collabos et corporatistes dans la plupart des cas") et les "déserts syndicaux" vus comme des pages vierges où les anticapitalistes pourraient trouver la voie pour contourner les directions syndicales.
Je pense qu'on ne contournera pas les directions syndicales, qu'il s'agit plutôt de les pousser au maximum de leurs potentialités, et de forger les instruments capables de les dépasser. Pour cela je pense notamment que notre but immédiat doit être de renforcer les syndicats existants, et notamment bien sûr dans les dits "déserts syndicaux", mais également dans les soi-disant "bastions" où en fait la syndicalisation ne touche souvent qu'une petite minorité des travailleurs, où les liens militants sont lâches et l'activité faible.
Certes, des exemples de radicalisation soudaine existent par légions dans des secteurs auparavant peu organisés de la classe ouvrière dans l'histoire, mais tout aussi nombreux sont les exemples de démoralisation soudaine et de dilapidation du capital militant acquis.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
En effet mais ça n'a rien à voir avec les profs.sylvestre a écrit:Tu as dit "la structure salariale des "déserts syndicaux" étant bien plus jeune," ce qui signifie a priori que la structure salariale des "non-déserts syndicaux" est bien plus vieille.
Il se trouve que les grosses entreprises emploient des sous-traitants, des intérimaires, utilisent des filiales etc, et piochent souvent leurs futurs employés dans ce vivier (ainsi ils sont déjà formés au métier, déjà testés, etc).
Les grosses entreprises ont globalement un salariat plus âgé (et plus haut placés) que leurs filiales, sous-traitants, etc.
Ça ne veut pas dire que les précaires, intérimaires, sous-traitants, etc, sont tous des jeunes, mais que la moyenne d'âge y est quand-même beaucoup plus jeune (et c'est souvent vu comme étant une situation temporaire, en espérant pouvoir trouver une meilleure situation par la suite).
Et comment défendent-ils leurs avantages si ce n'est par la grève? Par contre, l'atomisation du salariat et la destruction des grandes concentrations ouvrières est réellement une arme de la bourgeoisie. Discutes-en avec les camarades de l'automobile par exemple, ils te l'expliqueront bien mieux que moi!sylvestre a écrit:Ben si : "Cette nouvelle organisation capitaliste est une trouvaille géniale du point de vue de la bourgeoisie pour contre-carrer le mouvement ouvrier et le rendre impuissant." et "Les seconds pensent qu'ils sont effectivement "privilégiés" et qu'il ne faut pas en faire trop, être responsable, mais défendre avant tout leurs avantages par rapport à leurs sous-traitants et fournisseurs (et plus globalement au reste du privé)."
Non, je pense que les faits historiques lui ont donné raison. Il n'y a pas eu de révolution socialiste dans les pays impérialistes dominants, et cette perspective s'est même éloignée de plus en plus.sylvestre a écrit:Ceci étant, Lénine évoque déjà dans L'impérialisme stade suprême du capitalisme le problème de la formation de l'aristocratie ouvrière dans les pays impérialistes.
Et il faisait justement de graves erreurs sur ce point, qui ont été corrigées depuis, entre autres par le texte que je cite.
La création et le développement d'une aristocratie ouvrière liée à la bourgeoisie, notamment en France après guerre (habile action de De Gaulle envers le PCF, etc), a permis à la bourgeoisie de garder le contrôle sur le prolétariat, d'acheter son silence et la "paix sociale".
Si tu pars du principe que l'aristocratie ouvrière n'existe pas (que sont alors les Thibaut, Chérèque et cie?), ça change effectivement du tout au tout l'analyse de la société capitaliste contemporaine dans laquelle nous évoluons, et donc les tâches politiques des révolutionnaires qui en découlent.
C'est inexact. Pour un même poste, la paye est plus importante en intérim qu'en CDI par exemple. De même à niveau de formation équivalente, les fonctionnaires sont souvent moins bien payés que les travailleurs du privé (bien qu'il y ait de fortes disparités).sylvestre a écrit:En fait hauts salaires et stabilité de l'emploi vont généralement ensemble - d'un côté les patrons paient des hauts salaires à certaines catégories de travailleurs précisément pour éviter qu'ils partent, de l'autre le résultat d'un rapport de forces plus favorables aux travailleurs dans un secteur donné mène à la fois à de plus hauts salaires et à de meilleures garanties vis à vis de l'emploi, il en est de même du reste des heures de travail, des conditions de travail, etc.
Il y a de larges secteurs du privé où les salaires sont plus que corrects, mais où en contre-partie le droit du travail n'est absolument pas appliqué.
Clairement, c'est beaucoup moins mécanique que ce que tu dis, même si ça peut aussi suivre la logique que tu décris.
Je ne prétend pas réinventer la poudre mais effectivement, simplement énoncer des évidences.sylvestre a écrit:Ensuite, le fait que ces travailleurs - vus par les autres comme "privilégiés" - se mettent plus facilement en grève, mènent des grèves plus importantes etc, c'est exactement ce que je dis. Je ne vois donc pas en quoi ce texte est censé me contredire??
Mais croire qu'on peut mener aujourd'hui une mobilisation sociale victorieuse voire une révolution, avec juste quelques bastions combatifs, sans s'occuper du reste du prolétariat, ça me paraît doucement utopique (en plus d'être dangereusement source de bureaucratisation).
Désolé de penser qu'il faut œuvrer à l'unité du prolétariat et agir pour cela prioritairement dans les couches les plus exploitées du prolétariat (sans-papiers, précaires, sous-traitants, minorités, etc).
Une fois de plus tu enfonces des portes ouvertes. Personne ne parle de " mener aujourd'hui une mobilisation sociale victorieuse voire une révolution, avec juste quelques bastions combatifs".
J'ai d'autant plus de mal à voir où tu veux en venir de ton côté.
Du point de vue marxiste et si l'objectif est de renverser les rapports de production et de propriété capitaliste, il est évident qu'il faut que ceux qui occupent la place d'exploité dans ce rapport de production, s'organisent et le renversent.
C'est le b-a-ba du marxisme, ça n'est pas la réinvention de la poudre.
L'implantation et l'influence dans d'autres secteurs est évidemment utile. Mais dire qu'elle est d'égale importance, et donc que l'analyse qualitative et pas seulement quantitative de qui sont nos militants, nos sympathisants, etc, n'aurait donc pas d'importance, ça me paraît totalement erroné.
Maintenant, nous ne tomberons manifestement pas d'accord, c'est pas bien grave!
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:En effet mais ça n'a rien à voir avec les profs.sylvestre a écrit:Tu as dit "la structure salariale des "déserts syndicaux" étant bien plus jeune," ce qui signifie a priori que la structure salariale des "non-déserts syndicaux" est bien plus vieille.
Tu manques de rigueur. Soit les employés déserts syndicaux sont notablement plus jeunes que ceux des "bastions syndicaux", soit non. As-tu des données sur la question, qu'on puisse voir en détail ?
Et comment défendent-ils leurs avantages si ce n'est par la grève?sylvestre a écrit:Ben si : "Cette nouvelle organisation capitaliste est une trouvaille géniale du point de vue de la bourgeoisie pour contre-carrer le mouvement ouvrier et le rendre impuissant." et "Les seconds pensent qu'ils sont effectivement "privilégiés" et qu'il ne faut pas en faire trop, être responsable, mais défendre avant tout leurs avantages par rapport à leurs sous-traitants et fournisseurs (et plus globalement au reste du privé)."
Là n'était pas la question (même s'il est tout à fait inexact de dire que les travaileurs des grandes entreprises défendent leurs "avantages par rapports à leurs sous-traitants et fournisseurs" par la grève - ils défendent leurs intérêts face à leurs employeurs, et leur lutte quand elle est victorieuse aide au contraire la lutte du reste du secteur privé, et souvent très directement des employés de leurs sous-traitants etc.) mais de savoir si tu penses que "les travailleurs mieux payés (ou "privilégiés" en général) ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier")
Non, je pense que les faits historiques lui ont donné raison. Il n'y a pas eu de révolution socialiste dans les pays impérialistes dominants, et cette perspective s'est même éloignée de plus en plus.sylvestre a écrit:Ceci étant, Lénine évoque déjà dans L'impérialisme stade suprême du capitalisme le problème de la formation de l'aristocratie ouvrière dans les pays impérialistes.
Et il faisait justement de graves erreurs sur ce point, qui ont été corrigées depuis, entre autres par le texte que je cite.
La création et le développement d'une aristocratie ouvrière liée à la bourgeoisie, notamment en France après guerre (habile action de De Gaulle envers le PCF, etc), a permis à la bourgeoisie de garder le contrôle sur le prolétariat, d'acheter son silence et la "paix sociale".
Si tu pars du principe que l'aristocratie ouvrière n'existe pas (que sont alors les Thibaut, Chérèque et cie?), ça change effectivement du tout au tout l'analyse de la société capitaliste contemporaine dans laquelle nous évoluons, et donc les tâches politiques des révolutionnaires qui en découlent.
Je te recommande la lecture de l'article, c'est très convaincant, et on peut éventuellement en parler en détail. J'ai la forte impression que tu confonds "aristocratie ouvrière" et bureaucratie syndicale. C'est tout à fait différent comme concept : l'aristocratie ouvrière pour Lénine, c'est une mince couche d'ouvriers des pays impérialistes qui tirent bénéfice de la surexploitation des pays sous domination impérialiste. Problème : empiriquement cette théorie n'est pas valide, les employeurs ne s'amusent pas à redistribuer leurs profits, impérialistes ou pas, à leurs ouvriers.
La bureaucratie syndicale c'est une couche qui a une fonction de médiatrice entre les travailleurs et le capital, et est de ce fait traversée par les contradictions à l'œuvre entre la défense des intérêts des travailleurs et le maintien d'une situation qui justifie leur existence - le capitalisme. De telles bureaucraties existent d'ailleurs tout aussi bien dans les pays sous domination impérialiste.
C'est inexact. Pour un même poste, la paye est plus importante en intérim qu'en CDI par exemple.sylvestre a écrit:En fait hauts salaires et stabilité de l'emploi vont généralement ensemble - d'un côté les patrons paient des hauts salaires à certaines catégories de travailleurs précisément pour éviter qu'ils partent, de l'autre le résultat d'un rapport de forces plus favorables aux travailleurs dans un secteur donné mène à la fois à de plus hauts salaires et à de meilleures garanties vis à vis de l'emploi, il en est de même du reste des heures de travail, des conditions de travail, etc.
D'une part c'est là le résultat de conquêtes collectives, d'autre part c'est plus compliqué que ça, du fait du facteur ancienneté.
De même à niveau de formation équivalente, les fonctionnaires sont souvent moins bien payés que les travailleurs du privé (bien qu'il y ait de fortes disparités).
Il y a de larges secteurs du privé où les salaires sont plus que corrects, mais où en contre-partie le droit du travail n'est absolument pas appliqué.
Je pense que tu veux dire "en revanche" plutôt qu'"en contre-partie" : ce n'est pas un échange de l'un contre l'autre.
A part ça quels sont ces secteurs ? En général ceux où c'est la pénurie de main d'œuvre qualifiée qui explique des hauts salaires, sans qu'il y ait eu d'activité importante de défenses de leurs intérêts par les travailleurs du secteur (qui le paient tôt ou tard quand la pénurie se résorbe, voir l'évolution des conditions des informaticiens durant les vingt dernières années)
Je ne prétend pas réinventer la poudre mais effectivement, simplement énoncer des évidences.
J'ai d'autant plus de mal à voir où tu veux en venir de ton côté.
Je l'ai explicité : mettre en garde contre des illusions, notamment sur la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc.
Du point de vue marxiste et si l'objectif est de renverser les rapports de production et de propriété capitaliste, il est évident qu'il faut que ceux qui occupent la place d'exploité dans ce rapport de production, s'organisent et le renversent.
C'est le b-a-ba du marxisme, ça n'est pas la réinvention de la poudre.
L'implantation et l'influence dans d'autres secteurs est évidemment utile.
Je trouve que ce que tu dis est grave, à savoir que les travailleurs des "autres secteurs" ne sont pas exploités.... Le maintiens-tu ? Est-ce bien des travailleurs en CDI dans les grandes entreprises et des fonctionnaires que tu parles ? Est-ce là pour toi une "évidence" ?
Maintenant, nous ne tomberons manifestement pas d'accord, c'est pas bien grave!
Pourquoi ne serait-ce pas grave ? Il me semble que nous parlons de choses sérieuses.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
On parlait du privé je te rappelle.sylvestre a écrit:Tu manques de rigueur. Soit les employés déserts syndicaux sont notablement plus jeunes que ceux des "bastions syndicaux", soit non. As-tu des données sur la question, qu'on puisse voir en détail ?
On doit au moins pouvoir trouver les statistiques de type d'emploi (CDD/CDI/Intérim) par tranche d'âge. Pour la sous-traitance je ne sais pas s'il y a des statistiques, d'autant qu'il y a différents niveaux et types de sous-traitance, donc j'en parle plutôt par expérience directe.
Face à leur employeur, ils pourraient aussi défendre l'embauche des intérimaires et sous-traitants, ou des droits égaux pour eux. En clair défendre tous les travailleurs travaillant pour leurs employeurs et pas seulement les employés directs. Et certains le font (timidement) parfois.sylvestre a écrit:Là n'était pas la question (même s'il est tout à fait inexact de dire que les travaileurs des grandes entreprises défendent leurs "avantages par rapports à leurs sous-traitants et fournisseurs" par la grève - ils défendent leurs intérêts face à leurs employeurs, et leur lutte quand elle est victorieuse aide au contraire la lutte du reste du secteur privé, et souvent très directement des employés de leurs sous-traitants etc.) mais de savoir si tu penses que "les travailleurs mieux payés (ou "privilégiés" en général) ne peuvent pas constituer l'avant-garde du mouvement ouvrier")
A l'inverse, ils sont souvent plutôt satisfait de l'appel à la sous-traitance et à l'intérim, qui "protège" en quelque sorte les emplois des employés directs, en servant de variable d'ajustement. J'aurais pu te passer des exemplaires de tracts syndicaux assez scandaleux dans ce genre (si je les avais conservés... ).
La bureaucratie syndicale est une partie de l'aristocratie ouvrière, dans la mesure où elle est bien achetée par la bourgeoisie, et non bureaucratisée par elle-même. Effectivement je ne limite pas le terme au fait qu'ils tirent spécifiquement bénéfice de la surexploitation des pays sous domination impérialiste, car à ce moment là nous en ferions tous partie aujourd'hui (la consommation et le "pouvoir d'achat" dans les pays occidentaux est directement liée à la domination impérialiste).sylvestre a écrit:Je te recommande la lecture de l'article, c'est très convaincant, et on peut éventuellement en parler en détail. J'ai la forte impression que tu confonds "aristocratie ouvrière" et bureaucratie syndicale. C'est tout à fait différent comme concept : l'aristocratie ouvrière pour Lénine, c'est une mince couche d'ouvriers des pays impérialistes qui tirent bénéfice de la surexploitation des pays sous domination impérialiste. Problème : empiriquement cette théorie n'est pas valide, les employeurs ne s'amusent pas à redistribuer leurs profits, impérialistes ou pas, à leurs ouvriers.
La bureaucratie syndicale c'est une couche qui a une fonction de médiatrice entre les travailleurs et le capital, et est de ce fait traversée par les contradictions à l'œuvre entre la défense des intérêts des travailleurs et le maintien d'une situation qui justifie leur existence - le capitalisme. De telles bureaucraties existent d'ailleurs tout aussi bien dans les pays sous domination impérialiste.
Quant au reste, si l'on prend par exemple la distribution d'actions ou de stock-options par de nombreuses entreprises à leur salariés, c'est quoi? Ou bien simplement la participation, l'intéressement?
Bref je lirai à l'occasion ton (long) article, mais pour connaître personnellement au quotidien cette situation dans la sous-traitance, je vois mal comment on peut ignorer ce phénomène consciemment organisé par la bourgeoisie, de division du prolétariat en différentes couches (avec des degrés d'exploitation différents), d'achat de la paix sociale, etc.
Non je veux bien dire en contre-partie, car c'est bien l'argument : on ne respecte pas le droit du travail, mais tu es mieux payé, donc tu fermes ta gueule (pas dit en ces termes, évidemment). Et le salarié accepte en se disant qu'il a quand-même de la chance, etc. Mécanisme assez classique en somme, mais très lié à l'individualisation du rapport employeur/employé et à l'atomisation du travail.sylvestre a écrit:Je pense que tu veux dire "en revanche" plutôt qu'"en contre-partie" : ce n'est pas un échange de l'un contre l'autre.
Je suis curieux de savoir ce que tu appelles des "illusions". D'autant que je ne me suis pas exprimé sur "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires", ni sur la place des syndicats (vaste sujet qui peut se décliner de plein de manières).sylvestre a écrit:Je ne prétend pas réinventer la poudre mais effectivement, simplement énoncer des évidences.
J'ai d'autant plus de mal à voir où tu veux en venir de ton côté.
Je l'ai explicité : mettre en garde contre des illusions, notamment sur la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc.
Tu as décidément une certaine propension à lire des choses qui ne sont pas écrites...sylvestre a écrit:Du point de vue marxiste et si l'objectif est de renverser les rapports de production et de propriété capitaliste, il est évident qu'il faut que ceux qui occupent la place d'exploité dans ce rapport de production, s'organisent et le renversent.
C'est le b-a-ba du marxisme, ça n'est pas la réinvention de la poudre.
L'implantation et l'influence dans d'autres secteurs est évidemment utile.
Je trouve que ce que tu dis est grave, à savoir que les travailleurs des "autres secteurs" ne sont pas exploités.... Le maintiens-tu ? Est-ce bien des travailleurs en CDI dans les grandes entreprises et des fonctionnaires que tu parles ? Est-ce là pour toi une "évidence" ?
Peux-tu m'indiquer où j'ai écrit que "les travailleurs des autres secteurs (que la propriété capitaliste) ne sont pas exploités"? (au contraire, j'ai même souligné "dans ce rapport de production")
On peut bien être en désaccord sur des choses sérieuses. En quoi est-ce "grave"?sylvestre a écrit:
Maintenant, nous ne tomberons manifestement pas d'accord, c'est pas bien grave!
Pourquoi ne serait-ce pas grave ? Il me semble que nous parlons de choses sérieuses.
Tant que tu ne me dis pas que parce que je suis travailleur du privé, dans la sous-traitance, et que j'ai moins de 40 ans, je n'ai pas ma place au NPA, ou que je ne dois pas militer et faire du travail de masse dans mon milieu, ou je ne sais quoi d'autre, je pense que je vivrai très bien notre désaccord.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:On parlait du privé je te rappelle.sylvestre a écrit:Tu manques de rigueur. Soit les employés déserts syndicaux sont notablement plus jeunes que ceux des "bastions syndicaux", soit non. As-tu des données sur la question, qu'on puisse voir en détail ?
Non, on parlait des déserts syndicaux par opposition au reste, tu avais soutenu la distinction public/privé en invoquant les déserts syndicaux du privé, et tu as précisé ta pensée quand je t'ai signalé l'existence de bastions syndicaux dans le privé.
On doit au moins pouvoir trouver les statistiques de type d'emploi (CDD/CDI/Intérim) par tranche d'âge. Pour la sous-traitance je ne sais pas s'il y a des statistiques, d'autant qu'il y a différents niveaux et types de sous-traitance.
Autrement dit, tu n'en sais rien ? Je t'incite fortement à chercher de la doc quand tu défends un point de vue polémique. On se laisse trop souvent avoir par des idées reçues, et puis de toutes façons c'est moins convaincant quand on a pas des sources fiables à proposer.
Face à leur employeur, ils pourraient aussi défendre l'embauche des intérimaires et sous-traitants, ou des droits égaux pour eux. En clair défendre tous les travailleurs travaillant pour leurs employeurs et pas seulement les employés directs. Et certains le font (timidement) parfois.
A l'inverse, ils sont souvent plutôt satisfait de l'appel à la sous-traitance et à l'intérim, qui "protège" en quelque sorte les emplois des employés directs, en servant de variable d'ajustement. J'aurais pu te passer des exemplaires de tracts syndicaux assez scandaleux dans ce genre (si je les avais conservés...
Ce serait utile.
(question de l'aristocratie ouvrière en suspens pendant que tu lis l'article)
Non je veux bien dire en contre-partie, car c'est bien l'argument : on ne respecte pas le droit du travail, mais tu es mieux payé, donc tu fermes ta gueule (pas dit en ces termes, évidemment). Et le salarié accepte en se disant qu'il a quand-même de la chance, etc. Mécanisme assez classique en somme, mais très lié à l'individualisation du rapport employeur/employé et à l'atomisation du travail.sylvestre a écrit:Je pense que tu veux dire "en revanche" plutôt qu'"en contre-partie" : ce n'est pas un échange de l'un contre l'autre.Je suis curieux de savoir ce que tu appelles des "illusions". D'autant que je ne me suis pas exprimé sur "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires", ni sur la place des syndicats (vaste sujet qui peut se décliner de plein de manières).sylvestre a écrit:Je ne prétend pas réinventer la poudre mais effectivement, simplement énoncer des évidences.
J'ai d'autant plus de mal à voir où tu veux en venir de ton côté.
Je l'ai explicité : mettre en garde contre des illusions, notamment sur la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc.
Au contraire tu ne parles que de ça - à moins que depuis le début du fil tu parles de l'implantation de ton assoce de joueurs de bridge ?
Tu as décidément une certaine propension à lire des choses qui ne sont pas écrites...sylvestre a écrit:Du point de vue marxiste et si l'objectif est de renverser les rapports de production et de propriété capitaliste, il est évident qu'il faut que ceux qui occupent la place d'exploité dans ce rapport de production, s'organisent et le renversent.
C'est le b-a-ba du marxisme, ça n'est pas la réinvention de la poudre.
L'implantation et l'influence dans d'autres secteurs est évidemment utile.
Je trouve que ce que tu dis est grave, à savoir que les travailleurs des "autres secteurs" ne sont pas exploités.... Le maintiens-tu ? Est-ce bien des travailleurs en CDI dans les grandes entreprises et des fonctionnaires que tu parles ? Est-ce là pour toi une "évidence" ?
Peux-tu m'indiquer où j'ai écrit que "les travailleurs des autres secteurs (que la propriété capitaliste) ne sont pas exploités"?
Relis-toi, et tu verras qu'il n'y a pas d'autre manière de comprendre ce que tu écris : tu distingues "ceux qui occupent la place d'exploité" et "les autres secteurs". Qu'est-ce donc qui distinguerait ces "autres secteurs" si ce n'est que les travailleurs n'y sont pas exploités ?
sylvestre a écrit:
Tant que tu ne me dis pas que parce que je suis travailleur du privé, dans la sous-traitance, et que j'ai moins de 40 ans, je n'ai pas ma place au NPA, ou que je ne dois pas militer et faire du travail de masse dans mon milieu, ou je ne sais quoi d'autre, je pense que je vivrai très bien notre désaccord.
Il me semble que nous ne parlons pas de ton action militante individuelle, mais de l'orientation générale du parti.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Et bien on ne parlais pas de la même chose, manifestement.sylvestre a écrit:Non, on parlait des déserts syndicaux par opposition au reste, tu avais soutenu la distinction public/privé en invoquant les déserts syndicaux du privé, et tu as précisé ta pensée quand je t'ai signalé l'existence de bastions syndicaux dans le privé.
Ce point est une telle évidence que je ne pensais pas nécessaire de chercher des "preuves" statistiques. Je ne vois pas bien l'aspect "polémique" à vrai dire.sylvestre a écrit:Autrement dit, tu n'en sais rien ? Je t'incite fortement à chercher de la doc quand tu défends un point de vue polémique. On se laisse trop souvent avoir par des idées reçues, et puis de toutes façons c'est moins convaincant quand on a pas des sources fiables à proposer.
Les tracts?sylvestre a écrit:Face à leur employeur, ils pourraient aussi défendre l'embauche des intérimaires et sous-traitants, ou des droits égaux pour eux. En clair défendre tous les travailleurs travaillant pour leurs employeurs et pas seulement les employés directs. Et certains le font (timidement) parfois.
A l'inverse, ils sont souvent plutôt satisfait de l'appel à la sous-traitance et à l'intérim, qui "protège" en quelque sorte les emplois des employés directs, en servant de variable d'ajustement. J'aurais pu te passer des exemplaires de tracts syndicaux assez scandaleux dans ce genre (si je les avais conservés...
Ce serait utile.
J'ai parlé d'influence et de l'impossibilité révolutionnaire sans influence sur des secteurs clés que sont le privé, la jeunesse, les classes populaires...sylvestre a écrit:Au contraire tu ne parles que de ça - à moins que depuis le début du fil tu parles de l'implantation de ton assoce de joueurs de bridge ?
Je n'en ai pas déduit une "façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires" ni la "place des syndicats". Le premier peut découler en partie des secteurs que l'on considère comme "forces motrices de l'histoire", mais c'est largement insuffisant. Le second me paraît toucher à des choses dont nous n'avons absolument pas discuté jusqu'ici, dont la nature des syndicats, et quel travail pour les révolutionnaires dans les syndicats (ce qui est plus lié à notre conception du travail de masse, et de l'appréciation que l'on peut avoir de la nature des différentes organisations "de masse").
Non, j'ai précisé très explicitement "exploités dans ce rapport de production". Inutile d'essayer de me faire dire ce que je n'ai pas dit.sylvestre a écrit:Relis-toi, et tu verras qu'il n'y a pas d'autre manière de comprendre ce que tu écris : tu distingues "ceux qui occupent la place d'exploité" et "les autres secteurs". Qu'est-ce donc qui distinguerait ces "autres secteurs" si ce n'est que les travailleurs n'y sont pas exploités ?
Nous avons déjà discuté de la propriété capitaliste. Et nous ne sommes peut-être pas d'accord sur ce qui relève de la propriété capitaliste ou pas (je ne pense pas que tous les secteurs relèvent de la propriété capitaliste).
Le militantisme individuel s'inscrit dans l'orientation générale du parti. S'il devient incompatible, il faut quitter le parti (ou changer de militantisme).sylvestre a écrit:Il me semble que nous ne parlons pas de ton action militante individuelle, mais de l'orientation générale du parti.
Mais si un jour le parti décide que le privé, la jeunesse et les classes populaires, ne sont plus des secteurs clés, et que notre influence sur ces secteurs n'a aucune importance (ou pas plus que n'importe quel autre), je me poserai effectivement de sérieuses questions sur l'orientation politique du parti et sur ma place dans celui-ci.
Sauf que cette orientation politique ne se décidera de toute façon pas dans une discussion de forum, entre toi et moi. Donc non, ce désaccord entre nous n'est pas bien grave. De mon point de vue en tout cas.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Ok, j'avoue commencer à fatiguer sur toute une série de points sur lesquels les désaccords ont été assez clarifiés - ce qui est déjà ça. Y a juste un truc qui me titille là tout de suite :
Faut se méfier des évidences. Quand bien même les travailleurs précaires seraient plus jeunes (je n'en sais rien, il y a pas mal de précaires parmi les travailleurs plus âgés, mais c'est probable), se pose la question de la profondeur de la différence avec les salariés en CDI. La recherche est au moins intéressante.
Ce point est une telle évidence que je ne pensais pas nécessaire de chercher des "preuves" statistiques. Je ne vois pas bien l'aspect "polémique" à vrai dire.
Faut se méfier des évidences. Quand bien même les travailleurs précaires seraient plus jeunes (je n'en sais rien, il y a pas mal de précaires parmi les travailleurs plus âgés, mais c'est probable), se pose la question de la profondeur de la différence avec les salariés en CDI. La recherche est au moins intéressante.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
La recherche serait intéressante, mais il n'est pas facile d'avoir la statistique réellement intéressante, à moins de la compiler soi-même. Car il y a plein de manières de compter. Et la "précarité" n'a pas de définition, de frontière précise.sylvestre a écrit:Ok, j'avoue commencer à fatiguer sur toute une série de points sur lesquels les désaccords ont été assez clarifiés - ce qui est déjà ça. Y a juste un truc qui me titille là tout de suite :Ce point est une telle évidence que je ne pensais pas nécessaire de chercher des "preuves" statistiques. Je ne vois pas bien l'aspect "polémique" à vrai dire.
Faut se méfier des évidences. Quand bien même les travailleurs précaires seraient plus jeunes (je n'en sais rien, il y a pas mal de précaires parmi les travailleurs plus âgés, mais c'est probable), se pose la question de la profondeur de la différence avec les salariés en CDI. La recherche est au moins intéressante.
De même que la sous-traitance, le plus souvent en CDI, ne se distingue pas par la nature du contrat avec l'employeur.
Par contre, j'ai expliqué "qualitativement" pourquoi les employés en sous-traitance sont globalement plus jeunes (de manière succincte c'est vrai, mais ce n'est pas le centre du problème).
Donc oui, il y aurait un gros boulot à faire sur ces sujets. A la fois statistique et théorique. Je crois que le NPA a aujourd'hui un certain retard sur l'évolution du prolétariat, et la réflexion théorique et pratique associée. Certes moins que les autres partis, mais ce n'est pas une raison.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
A vrai dire, je ne vois pas bien ce que ton article apporte concrètement à notre discussion. Nous n'étions pas en train de chercher les racines du réformisme ou du conservatisme des masses. Ni en train de chercher la solution pour contrer l'idéologie capitaliste, au travers de l'expérience issue des luttes de masse (évidence!).
Le problème, c'est justement quand ces luttes "de masse" ne sont plus "de masse" mais sectorielles. Quand les autres travailleurs, plutôt que de rejoindre les travailleurs en lutte, considèrent ceux-ci comme étant privilégiés et rejettent leurs luttes (ou au mieux restent neutre).
En tant que NPA, on a notamment combattu ça en distribuant des tracts de soutien aux cheminots en grève, aux usagers devant la gare (c'est peut-être peu, mais c'est important, et on était les seuls à le faire). Car à moins d'être simplement spectateur de ce qu'il se passe, notre rôle doit être de créer une solidarité active du reste de la population quand les cheminots ou les profs sont en lutte. Notre rôle est de combattre l'isolement dans lequel essaient de les plonger la bourgeoisie.
Mais tout ça, ça demande nécessairement une influence sur les milieux en question (évidence), ce qui nous ramène au point de départ. Un parti sans influence dans le privé et les classes populaires est incapable de créer de telles solidarité (évidence).
Enfin, un parti sans influence sur la jeunesse, n'influençant quasiment que les retraités, n'est pas un parti d'avenir (évidence) ni un parti capable de dynamiser les luttes.
Bref, tout ça ne me paraissait qu'un somme d'évidences pour toute personne qui pense que ça se joue dans les luttes, et non pas dans les urnes et les couloirs des ministères bourgeois. D'où mon incompréhension sur tout le sens de ce débat.
Alors peut-être pour clarifier les choses, le mieux est que tu expliques ce que tu penses sur "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc", puisque tu crains que ces positions (penser qu'il faut avoir de l'influence sur des secteurs clés) risque de mener à des "illusions"?
Faut-il laisser tomber l'intervention dans les secteurs où nous n'avons pas ou peu de prises? Laisser tomber les secteurs où les bureaucraties syndicales n'ont pas de poids? Concentrer notre activité sur le public? (par exemple)
Faut-il simplement compter nos voix aux élections et considérer que chaque voix est d'importance équivalente? (car pas de secteur clé plus qu'un autre, chacun est d'importance strictement équivalente)
J'admets que j'ai du mal jusqu'ici à démêler ce que tu penses, et quel est vraiment le désaccord (en dehors de la place de l'État par rapport au capital, et la différenciation propriété capitaliste/propriété étatique/appareil d'État).
Le problème, c'est justement quand ces luttes "de masse" ne sont plus "de masse" mais sectorielles. Quand les autres travailleurs, plutôt que de rejoindre les travailleurs en lutte, considèrent ceux-ci comme étant privilégiés et rejettent leurs luttes (ou au mieux restent neutre).
En tant que NPA, on a notamment combattu ça en distribuant des tracts de soutien aux cheminots en grève, aux usagers devant la gare (c'est peut-être peu, mais c'est important, et on était les seuls à le faire). Car à moins d'être simplement spectateur de ce qu'il se passe, notre rôle doit être de créer une solidarité active du reste de la population quand les cheminots ou les profs sont en lutte. Notre rôle est de combattre l'isolement dans lequel essaient de les plonger la bourgeoisie.
Mais tout ça, ça demande nécessairement une influence sur les milieux en question (évidence), ce qui nous ramène au point de départ. Un parti sans influence dans le privé et les classes populaires est incapable de créer de telles solidarité (évidence).
Enfin, un parti sans influence sur la jeunesse, n'influençant quasiment que les retraités, n'est pas un parti d'avenir (évidence) ni un parti capable de dynamiser les luttes.
Bref, tout ça ne me paraissait qu'un somme d'évidences pour toute personne qui pense que ça se joue dans les luttes, et non pas dans les urnes et les couloirs des ministères bourgeois. D'où mon incompréhension sur tout le sens de ce débat.
Alors peut-être pour clarifier les choses, le mieux est que tu expliques ce que tu penses sur "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc", puisque tu crains que ces positions (penser qu'il faut avoir de l'influence sur des secteurs clés) risque de mener à des "illusions"?
Faut-il laisser tomber l'intervention dans les secteurs où nous n'avons pas ou peu de prises? Laisser tomber les secteurs où les bureaucraties syndicales n'ont pas de poids? Concentrer notre activité sur le public? (par exemple)
Faut-il simplement compter nos voix aux élections et considérer que chaque voix est d'importance équivalente? (car pas de secteur clé plus qu'un autre, chacun est d'importance strictement équivalente)
J'admets que j'ai du mal jusqu'ici à démêler ce que tu penses, et quel est vraiment le désaccord (en dehors de la place de l'État par rapport au capital, et la différenciation propriété capitaliste/propriété étatique/appareil d'État).
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Bref, tout ça ne me paraissait qu'un somme d'évidences pour toute personne qui pense que ça se joue dans les luttes, et non pas dans les urnes et les couloirs des ministères bourgeois. D'où mon incompréhension sur tout le sens de ce débat.
Alors peut-être pour clarifier les choses, le mieux est que tu expliques ce que tu penses sur "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc", puisque tu crains que ces positions (penser qu'il faut avoir de l'influence sur des secteurs clés) risque de mener à des "illusions"?
Tu dis que tu ne comprends pas sur quoi tourne la discussion. Elle ne tourne pas sur la question de savoir si il faut avoir de l'influence sur les secteurs clés. Elle tourne sur la définition de ces secteurs clés. Et en particulier sur l'adéquation d'un critère, d'où la question que je posais en ouverture de fil :
En quoi les travailleurs du privé sont-ils plus un "secteur-clé" que les travailleurs du secteur public ?
J'ai eu de ta part une série de réponses à cette question, mais contradictoires :
- les travailleurs du privé sont plus un secteur clé du fait de leur place dans le 'système de production", mais en même temps tu as admis que les travailleurs du public étaient également au cœur du système de production capitaliste. ("Personne n'exclut tel ou tel salarié en fonction de sa "productivité"!?")
- les travailleurs du privé sont plus jeunes, en tous cas les précaires des petites entreprises - mais tu n'as pas de données précises sur la question, et de mon côté je t'ai montré que de nombreux jeunes étaient employés dans le public
- les travailleurs du privé sont moins syndiqués et moins combatifs que ceux du public en tous cas dans les petites entreprises - mais il reste à montrer en quoi le fait d'être moins syndiqué et moins combatifs est le signe qu'il s'agit d'un secteur clé. On serait même tenté a priori de penser le contraire.
- les travailleurs du privé voient ceux du public comme des privilégiés - mais outre que les salaires sont plus faibles à niveau de qualification égal dans le public de nombreux salariés du public sont précaires - et d'autre part le fait que telle catégorie soit perçue comme "privilégiée" par les autres secteurs de la classe ouvrière ne permet pas de déduire qu'il ne s'agit pas d'un secteur clé (exemples tirés de l'article).
Perso je pense simplement que la division privé/public n'est pas pertinente pour déterminer quels sont les secteurs-clés.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
OK j'ai bien compris que tu considères que quel que soit leur travail, quel que soit leur employeur, tout le monde a exactement la même importance dans les rapports de production (sauf les salariés que tu considères "improductifs" comme les comptables et les caissières).sylvestre a écrit:Tu dis que tu ne comprends pas sur quoi tourne la discussion. Elle ne tourne pas sur la question de savoir si il faut avoir de l'influence sur les secteurs clés. Elle tourne sur la définition de ces secteurs clés. Et en particulier sur l'adéquation d'un critère, d'où la question que je posais en ouverture de fil :En quoi les travailleurs du privé sont-ils plus un "secteur-clé" que les travailleurs du secteur public ?
En revanche, tu fais bien de reformuler ce que tu as compris car je me rends compte à quel point tu m'as mal compris (voire tu m'attribues des propos sortis de ton imagination) :
Non je n'ai jamais dit ça. Un flic ou un soldat n'est pas "au cœur du système de production capitaliste". Il sert à maintenir la propriété capitaliste et à défendre les intérêts communs des capitalistes, à maintenir leur domination de classe.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé sont plus un secteur clé du fait de leur place dans le 'système de production", mais en même temps tu as admis que les travailleurs du public étaient également au cœur du système de production capitaliste. ("Personne n'exclut tel ou tel salarié en fonction de sa "productivité"!?")
J'ai dit qu'il fallait distinguer propriété capitaliste, propriété étatique et appareil d'État, et que les trois ne sont pas équivalents.
Pour toi une propriété étatique et capitaliste, c'est la même chose car l'État est un capitaliste comme un autre et parmi d'autres. Or je ne considère pas l'État comme "un capitaliste comme un autre", mais comme un outil à leur service, ce qui n'est pas la même chose.
Je n'ai jamais dit nulle part une idiotie du type "les travailleurs du privé sont plus jeunes". J'ai comparé à l'intérieur du privé la structure salariale entre les grandes entreprises donneuses d'ordres et leurs fournisseurs/sous-traitants.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé sont plus jeunes, en tous cas les précaires des petites entreprises - mais tu n'as pas de données précises sur la question, et de mon côté je t'ai montré que de nombreux jeunes étaient employés dans le public
Il n'y a à ma connaissance aucune différence d'âge entre public et privé, si ce n'est peut-être chez les plus de 55 ans où les mises à la porte (pré-retraites) sont probablement plus courantes dans le privé.
Le problème du privé n'est pas un problème de combativité, mais bien d'organisation. Je ne crois pas que le public soit "plus combatif". Les luttes les plus dures (avec séquestration du patron, etc) apparaissent le plus souvent dans le privé.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé sont moins syndiqués et moins combatifs que ceux du public en tous cas dans les petites entreprises - mais il reste à montrer en quoi le fait d'être moins syndiqué et moins combatifs est le signe qu'il s'agit d'un secteur clé. On serait même tenté a priori de penser le contraire.
Alors là, si tu ne penses pas que le fait que certains secteurs soient vus comme privilégiés par d'autres secteurs (que ce soit à tort ou à raison est secondaire), et qu'il faut influer sur ces autres secteurs pour faire jouer la solidarité et l'unification des travailleurs, je ne sais pas quoi rajouter.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé voient ceux du public comme des privilégiés - mais outre que les salaires sont plus faibles à niveau de qualification égal dans le public de nombreux salariés du public sont précaires - et d'autre part le fait que telle catégorie soit perçue comme "privilégiée" par les autres secteurs de la classe ouvrière ne permet pas de déduire qu'il ne s'agit pas d'un secteur clé (exemples tirés de l'article).
Surtout quand on sait le nombre de fois où des camarades profs (par exemple) nous expliquent que les profs voudraient bien se bouger face à telle ou telle attaque gouvernementale, mais qu'ils ne veulent pas de peur que leur grève soit mal vue dans l'opinion publique, et qu'ils passent une nouvelle fois pour les privilégiés "fouteurs de merde". Donc non seulement ça pose le problème du soutien du reste de la population, mais en plus cette absence de soutien est un frein à l'action. A part ça no problemo?
A partir du moment où tu penses que l'État est juste un capitaliste parmi d'autres, que la propriété étatique et privée sont de même nature, donc qu'il n'y a aucune différence entre l'exploitation par l'État et par un capitaliste privé, ça a une certaine logique effectivement.sylvestre a écrit:Perso je pense simplement que la division privé/public n'est pas pertinente pour déterminer quels sont les secteurs-clés.
Mais ça rentre quand-même en contradiction avec ce que nous (NPA) disons officiellement aujourd'hui, comme quoi une politique anticapitaliste implique des incursions dans la propriété privée. Est-ce que pour toi il faudrait faire à l'identique des incursions dans la propriété étatique et dans la propriété privée?
Même si tout ça ne répond pas à "la façon dont on peut construire des organisations révolutionnaires, sur la place des syndicats, etc", selon toi sans illusions. Mais si je comprends bien ta vision, il faut se concentrer sur le public et les grosses entreprises, et y mener la bataille contre les bureaucraties syndicales. C'est ça?
Cela veut-il dire pour toi qu'on peut se contenter de n'influencer que le public, comme le fait le front de gauche?
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:OK j'ai bien compris que tu considères que quel que soit leur travail, quel que soit leur employeur, tout le monde a exactement la même importance dans les rapports de production (sauf les salariés que tu considères "improductifs" comme les comptables et les caissières).sylvestre a écrit:Tu dis que tu ne comprends pas sur quoi tourne la discussion. Elle ne tourne pas sur la question de savoir si il faut avoir de l'influence sur les secteurs clés. Elle tourne sur la définition de ces secteurs clés. Et en particulier sur l'adéquation d'un critère, d'où la question que je posais en ouverture de fil :En quoi les travailleurs du privé sont-ils plus un "secteur-clé" que les travailleurs du secteur public ?
Donc pas "quel que soit leur travail".
En revanche, tu fais bien de reformuler ce que tu as compris car je me rends compte à quel point tu m'as mal compris (voire tu m'attribues des propos sortis de ton imagination) :Non je n'ai jamais dit ça. Un flic ou un soldat n'est pas "au cœur du système de production capitaliste". Il sert à maintenir la propriété capitaliste et à défendre les intérêts communs des capitalistes, à maintenir leur domination de classe.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé sont plus un secteur clé du fait de leur place dans le 'système de production", mais en même temps tu as admis que les travailleurs du public étaient également au cœur du système de production capitaliste. ("Personne n'exclut tel ou tel salarié en fonction de sa "productivité"!?")
D'accord là-dessus : les flics et les soldats ne sont pas de travailleurs productifs. En revanche les cheminots le sont. Et les enseignants et les cantonniers sont indirectement productifs (ils construisent les infrastructures qui permettent le fonctionnement de l'économie, forment la main d'œuvre).
J'ai dit qu'il fallait distinguer propriété capitaliste, propriété étatique et appareil d'État, et que les trois ne sont pas équivalents.
Pour toi une propriété étatique et capitaliste, c'est la même chose car l'État est un capitaliste comme un autre et parmi d'autres. Or je ne considère pas l'État comme "un capitaliste comme un autre", mais comme un outil à leur service, ce qui n'est pas la même chose.
Il faut développer ça. Pourquoi ne pas considérer l'Etat comme un capitaliste comme un autre quand on considère une entreprise comme la SNCF ou feu France Télécom d'une part ? Ensuite un outil à leur service qui par exemple soigne et forme la main d'œuvre qui est employée par les capitalistes privés n'est-elle pas tellement au service de l'économie capitaliste qu'il s'agit en fait d'une partie de celle-ci ? Il y a une distinction nette de ce point de vue avec la police et l'armée qui ont uniquement une fonction de contrôle social, tu ne trouves pas ?
Je n'ai jamais dit nulle part une idiotie du type "les travailleurs du privé sont plus jeunes". J'ai comparé à l'intérieur du privé la structure salariale entre les grandes entreprises donneuses d'ordres et leurs fournisseurs/sous-traitants.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé sont plus jeunes, en tous cas les précaires des petites entreprises - mais tu n'as pas de données précises sur la question, et de mon côté je t'ai montré que de nombreux jeunes étaient employés dans le public
Il n'y a à ma connaissance aucune différence d'âge entre public et privé, si ce n'est peut-être chez les plus de 55 ans où les mises à la porte (pré-retraites) sont probablement plus courantes dans le privé.
Dont acte, j'avais mal compris.
Alors là, si tu ne penses pas que le fait que certains secteurs soient vus comme privilégiés par d'autres secteurs (que ce soit à tort ou à raison est secondaire), et qu'il faut influer sur ces autres secteurs pour faire jouer la solidarité et l'unification des travailleurs, je ne sais pas quoi rajouter.sylvestre a écrit:- les travailleurs du privé voient ceux du public comme des privilégiés - mais outre que les salaires sont plus faibles à niveau de qualification égal dans le public de nombreux salariés du public sont précaires - et d'autre part le fait que telle catégorie soit perçue comme "privilégiée" par les autres secteurs de la classe ouvrière ne permet pas de déduire qu'il ne s'agit pas d'un secteur clé (exemples tirés de l'article).
Ce n'est pas ce que j'écrivais. Je répète : le fait que certains secteurs soient considérés comme privilégiés ne permet pas de déduire qu'il ne s'agit pas de secteurs clés.
A partir du moment où tu penses que l'État est juste un capitaliste parmi d'autres, que la propriété étatique et privée sont de même nature, donc qu'il n'y a aucune différence entre l'exploitation par l'État et par un capitaliste privé, ça a une certaine logique effectivement.sylvestre a écrit:Perso je pense simplement que la division privé/public n'est pas pertinente pour déterminer quels sont les secteurs-clés.
Mais ça rentre quand-même en contradiction avec ce que nous (NPA) disons officiellement aujourd'hui, comme quoi une politique anticapitaliste implique des incursions dans la propriété privée. Est-ce que pour toi il faudrait faire à l'identique des incursions dans la propriété étatique et dans la propriété privée?
C'est certain. L'illusion suivant laquelle il suffit de nationaliser pour que les travailleurs contrôlent une entreprise est à combattre (et est déjà largement combattue par le NPA d'ailleurs, peut-être pas assez, c'est un débat).
Mais si je comprends bien ta vision, il faut se concentrer sur le public et les grosses entreprises, et y mener la bataille contre les bureaucraties syndicales. C'est ça?
Cela veut-il dire pour toi qu'on peut se contenter de n'influencer que le public, comme le fait le front de gauche?
(Je laisse côté le Front de Gauche, ce n'est pas mon sujet ici.)
Non, il ne faut pas se contenter d'influencer seulement dans le secteur public.
Se concentrer sur les grosses entreprises, sur les réseaux où plus largement il y a des contacts nombreux entre travailleurs qui permettent d'organiser des luttes communes (ça peut être entre travailleurs de différentes petites entreprises travaillant sur le même lieu, par exemple des sous-traitants), ça me paraît pas idiot en effet. A contrario se concentrer sur les chômeurs et les travailleurs isolés, ça me semblerait valeureux d'un côté, mais pas forcément le plus efficace stratégiquement.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Oui et ce mépris des caissiers n'a aucun sens. Leur grève a tout autant de poids que celle de n'importe quel autre corps d'employés de la grande distribution. Ta différenciation est clairement erronée.sylvestre a écrit:Donc pas "quel que soit leur travail".Duzgun a écrit:OK j'ai bien compris que tu considères que quel que soit leur travail, quel que soit leur employeur, tout le monde a exactement la même importance dans les rapports de production (sauf les salariés que tu considères "improductifs" comme les comptables et les caissières).
D'où la différence importante entre appareil d'État et propriété étatique, cette dernière pouvant très bien devenir privée (et l'est déjà en grande partie au travers de la filialisation, la sous-traitance etc).sylvestre a écrit:D'accord là-dessus : les flics et les soldats ne sont pas de travailleurs productifs. En revanche les cheminots le sont.
Non, le rôle d'un enseignant (pour le capitalisme) est la reproduction de la force de travail. Il n'intervient pas dans le processus de production.sylvestre a écrit:Et les enseignants et les cantonniers sont indirectement productifs (ils construisent les infrastructures qui permettent le fonctionnement de l'économie, forment la main d'œuvre).
Le parallèle avec ta mise de côté des caissiers est saisissant : si les caissiers arrêtent de travailler, le processus de production capitaliste est directement atteint. Si les enseignants arrêtent de travailler, le seul impact éventuel sur le processus de production est que les parents vont devoir trouver des solutions pour garder leurs enfants et peut-être poser des jours de congés. Il faudrait des années (de grève) avant que le manque de renouvellement de la force de travail atteignent l'appareil productif.
La distinction nette avec la police, l'armée, la justice (l'appareil d'État), c'est ce que je dis depuis le début en distinguant propriété étatique et appareil d'État.sylvestre a écrit:Il faut développer ça. Pourquoi ne pas considérer l'Etat comme un capitaliste comme un autre quand on considère une entreprise comme la SNCF ou feu France Télécom d'une part ? Ensuite un outil à leur service qui par exemple soigne et forme la main d'œuvre qui est employée par les capitalistes privés n'est-elle pas tellement au service de l'économie capitaliste qu'il s'agit en fait d'une partie de celle-ci ? Il y a une distinction nette de ce point de vue avec la police et l'armée qui ont uniquement une fonction de contrôle social, tu ne trouves pas ?
En revanche, l'État n'accumule pas du capital et tire l'essentiel de ses revenus de la levée des impôts (et non de l'extraction de la plus-value). Il engage également des dépenses publiques, et son activité n'est absolument pas "profitable" puisqu'il est systématiquement en déficit. L'État n'est pas "un capitaliste", c'est un outil au service des capitalistes, mais qui dissimule son caractère de classe derrière une apparente neutralité (l'État représente le pouvoir "légitime", l'arbitre).
La nature de l'exploitation par l'État n'a strictement rien à voir avec celle d'un capitaliste. D'ailleurs l'intérêt de classe des capitalistes est non pas que les entreprises étatiques soient profitables, mais au contraire qu'elles soient en déficit : les activités profitables au privé, les activités non profitables à l'État. L'Etat n'est d'ailleurs pas en concurrence avec les autres capitalistes (comme capitaliste parmi d'autres), mais au service de l'ensemble de leur classe, jouant également le rôle d'arbitre entre eux (rôle "pacificateur").
Bref, considérer l'État comme "capitaliste comme un autre" et parmi d'autres, c'est passer totalement à côté de la nature et du rôle de l'État.
Ce n'est pas exactement la question, mais ce serait effectivement souhaitable que le NPA rappelle qu'il est aussi pour la socialisation des entreprises étatiques, et non pas pour le statu quo. Tout comme nous sommes pour la socialisation et non l'étatisation/nationalisation des entreprises privées (ce serait bien de le dire plus clairement).sylvestre a écrit:C'est certain. L'illusion suivant laquelle il suffit de nationaliser pour que les travailleurs contrôlent une entreprise est à combattre (et est déjà largement combattue par le NPA d'ailleurs, peut-être pas assez, c'est un débat)
Sauf que le processus de socialisation d'une entreprise privée et d'une entreprise étatique est assez différent.
Mais la question centrale était plus généralement celle de l'incursion dans la propriété privée..... de la puissance publique (puisque c'est ce que nous défendons). C'est bien qu'en tant que parti nous différencions bel et bien la propriété capitaliste privée de la propriété étatique "publique".
De même, nous nous battons régulièrement contre la privatisation d'entreprises étatiques (La Poste...), comme quoi nous faisons bien une différence entre ce qui relève d'une propriété étatique (vue comme "bien public") et qui n'est pas totalement soumis à la recherche de profit et au marché, et ce qui relève d'une propriété privée.
Cela veut bien dire qu'en tant que parti, nous considérons qu'être sous propriété étatique est préférable à être sous propriété privée, qu'il y a bien une différence entre les deux, que l'État n'est pas un capitaliste comme un autre (sinon nous resterions neutre là-dessus).
Se concentrer sur les chômeurs et travailleurs isolés, c'est sans doute peu efficace effectivement, même si tout dépend du niveau d'organisation atteignable dans le milieu. Mais ne s'intéresser qu'aux travailleurs des grosses entreprises donneuses d'ordre, c'est se couper de la majorité des travailleurs, et surtout se couper des travailleurs directement productifs (et pas seulement donneurs d'ordre). Tout en sachant que c'est en plus un secteur en déclin puisqu'il y a de moins en moins de grosses concentrations ouvrières (les bourgeois ne sont pas cons, ils savent ce qu'ils risquent), et que celles-ci ont de plus en plus un rôle "dirigeant" et non pas directement productif.sylvestre a écrit:Non, il ne faut pas se contenter d'influencer seulement dans le secteur public.
Se concentrer sur les grosses entreprises, sur les réseaux où plus largement il y a des contacts nombreux entre travailleurs qui permettent d'organiser des luttes communes (ça peut être entre travailleurs de différentes petites entreprises travaillant sur le même lieu, par exemple des sous-traitants), ça me paraît pas idiot en effet. A contrario se concentrer sur les chômeurs et les travailleurs isolés, ça me semblerait valeureux d'un côté, mais pas forcément le plus efficace stratégiquement.
Je pense que le NPA ferait bien d'engager une réelle réflexion sur les mutations du système de production capitaliste, si l'on ne veut pas construire sur des "illusions", pour reprendre ton terme. Le capitalisme se parcellise? Plutôt que d'ignorer l'évolution et de réduire son champ de vision aux "mammouths" survivants, il serait sans doute bon d'anticiper et de réfléchir aux nouvelles solutions en terme d'organisation des travailleurs, tout comme en terme de militantisme dans et vers ces milieux, etc.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:Oui et ce mépris des caissiers n'a aucun sens. Leur grève a tout autant de poids que celle de n'importe quel autre corps d'employés de la grande distribution. Ta différenciation est clairement erronée.sylvestre a écrit:Donc pas "quel que soit leur travail".Duzgun a écrit:OK j'ai bien compris que tu considères que quel que soit leur travail, quel que soit leur employeur, tout le monde a exactement la même importance dans les rapports de production (sauf les salariés que tu considères "improductifs" comme les comptables et les caissières).
- Moi mépriser les caissiers ? Quelle idée stupide.
- Les salariés que je considère improductifs (et que tous ceux qui se réfèrent à la théorie marxistes considèrent improductifs - ce n'est pas un jugement de valeur, mais une catégorie économique) sont ceux qui ne produisent pas de marchandises. Bien entendu, ça ne les empêche pas d'être indispensables au processus de circulation et de valorisation du capital.
- Donc ce à quoi j'essaie de t'inciter c'est à plus de précision dans le vocabulaire : non, tous les travailleurs n'ont pas la même importance dans le processus de production - mais ce n'est pas la même chose que le processus d'accumulation.
D'où la différence importante entre appareil d'État et propriété étatique, cette dernière pouvant très bien devenir privée (et l'est déjà en grande partie au travers de la filialisation, la sous-traitance etc).sylvestre a écrit:D'accord là-dessus : les flics et les soldats ne sont pas de travailleurs productifs. En revanche les cheminots le sont.
Là n'est pas la question : la police et l'armée peuvent très bien êtres privatisées.
Non, le rôle d'un enseignant (pour le capitalisme) est la reproduction de la force de travail. Il n'intervient pas dans le processus de production.sylvestre a écrit:Et les enseignants et les cantonniers sont indirectement productifs (ils construisent les infrastructures qui permettent le fonctionnement de l'économie, forment la main d'œuvre).
Le parallèle avec ta mise de côté des caissiers est saisissant : si les caissiers arrêtent de travailler, le processus de production capitaliste est directement atteint. Si les enseignants arrêtent de travailler, le seul impact éventuel sur le processus de production est que les parents vont devoir trouver des solutions pour garder leurs enfants et peut-être poser des jours de congés. Il faudrait des années (de grève) avant que le manque de renouvellement de la force de travail atteignent l'appareil productif.
Tu confonds deux choses différentes : la place dans le processus de production et l'impact à court terme d'un arrêt de travail sur l'employeur. (Une grève des caissières n'atteint pas non plus l'appareil productif, il atteint immédiatement le fonctionnement du commerce dans lequel elles travaillent - en revanche un ouvrier qui construit une centrale nucléaire a un travail productif, mais les délais de fabrication des des centrales nucléaires étant étendus, son arrêt de travail n'a d'importance pour l'employeur qu'au bout d'un temps relativement long).
En revanche, l'État n'accumule pas du capital et tire l'essentiel de ses revenus de la levée des impôts (et non de l'extraction de la plus-value).Il engage également des dépenses publiques, et son activité n'est absolument pas "profitable" puisqu'il est systématiquement en déficit. L'État n'est pas "un capitaliste", c'est un outil au service des capitalistes, mais qui dissimule son caractère de classe derrière une apparente neutralité (l'État représente le pouvoir "légitime", l'arbitre).
La nature de l'exploitation par l'État n'a strictement rien à voir avec celle d'un capitaliste. D'ailleurs l'intérêt de classe des capitalistes est non pas que les entreprises étatiques soient profitables, mais au contraire qu'elles soient en déficit : les activités profitables au privé, les activités non profitables à l'État. L'Etat n'est d'ailleurs pas en concurrence avec les autres capitalistes (comme capitaliste parmi d'autres), mais au service de l'ensemble de leur classe, jouant également le rôle d'arbitre entre eux (rôle "pacificateur").
Bref, considérer l'État comme "capitaliste comme un autre" et parmi d'autres, c'est passer totalement à côté de la nature et du rôle de l'État.
L'Etat comme arbitre (véreux) c'est le b-a ba, observé par Marx et Engels en leur temps. Depuis Marx et Engels, quelques développement ont eu lieu, observés notamment par Hilferding, Lénine, Boukharine.... Le rôle de l'Etat dans l'accumulation du capital a pris au cours du vingtième siècle un essor qui crève les yeux : contrôle de grandes entreprises, mise en place d'un système d'éducation et de santé beaucoup plus étendu etc. En ce qui concerne leur caractère profitable, l'essentiel est de comprendre que l'Etat agit comme représentant collectif de la classe capitaliste dans son intervention dans l'économie. Par conséquent sa fonction est de faciliter l'accumulation du capital en général - et non l'accumulation particulière du capital dans le secteur public. Il est de ce point de vue aussi absurde de décréter que son activité n'est pas capitaliste quand elle est déficitaire que de déduire du fait que la branche de recherche ou de fabrication de telle ou telle pièce d'une entreprise privée est déficitaire l'idée que cette branche spécifique ne serait pas capitaliste.
Mais bien entendu de nombreuses branches sous contrôle de l'Etat sont bénéficiaires : actuellement, SNCF, EDF... auparavant Renault, Rolls Royce... comment prétendre que Renault et Rolls Royce avaient cessé d'être des entreprises capitalistes quand elles étaient nationalisées ?
Bien évidemment il n'est pas un capitalisme "comme un autre", je ne crois pas avoir jamais employé cette formule - il partage certaines caractéristiques avec l'ensemble des capitalistes et insère son action dans le processus d'ensemble d'accumulation du capital.
Ce n'est pas exactement la question, mais ce serait effectivement souhaitable que le NPA rappelle qu'il est aussi pour la socialisation des entreprises étatiques, et non pas pour le statu quo. Tout comme nous sommes pour la socialisation et non l'étatisation/nationalisation des entreprises privées (ce serait bien de le dire plus clairement).sylvestre a écrit:C'est certain. L'illusion suivant laquelle il suffit de nationaliser pour que les travailleurs contrôlent une entreprise est à combattre (et est déjà largement combattue par le NPA d'ailleurs, peut-être pas assez, c'est un débat)
Sauf que le processus de socialisation d'une entreprise privée et d'une entreprise étatique est assez différent.
Mais la question centrale était plus généralement celle de l'incursion dans la propriété privée..... de la puissance publique (puisque c'est ce que nous défendons). C'est bien qu'en tant que parti nous différencions bel et bien la propriété capitaliste privée de la propriété étatique "publique".
De même, nous nous battons régulièrement contre la privatisation d'entreprises étatiques (La Poste...), comme quoi nous faisons bien une différence entre ce qui relève d'une propriété étatique (vue comme "bien public") et qui n'est pas totalement soumis à la recherche de profit et au marché, et ce qui relève d'une propriété privée.
Cela veut bien dire qu'en tant que parti, nous considérons qu'être sous propriété étatique est préférable à être sous propriété privée, qu'il y a bien une différence entre les deux, que l'État n'est pas un capitaliste comme un autre (sinon nous resterions neutre là-dessus).
La question est de savoir pourquoi nous nous battons contre la privatisation, et, le cas échéant pour la nationalisation de certaines entreprises. La réponse n'est pas et ne peut pas être que la propriété d'Etat est meilleure en soi. Toute l'histoire des entreprises nationalisées le montre. Quand les mineurs ont mené leur combat héroïque en 1984-1985, ils le menaient contre Thatcher directement, justement parce que les mines britanniques étaient nationalisées. Nous ne pouvons demander la nationalisation de telle ou telle entreprise que comme moyen d'arriver à d'autres fins (maintien de l'emploi, des statuts, des missions de service public, etc.). Nous ne pouvons dénoncer la privatisation de telle ou telle entreprise que pour éviter tel ou tel recul. De ce point de vue il y a nécessité d'une critique de la pensée héritée du consensus gaulliste des entreprises publiques se retrouvant de ce fait "biens de la nation", et qui eurent comme aboutissement la politique de nationalisation en trompe-l'œil du gouvernement Mauroy de 1981.
Se concentrer sur les chômeurs et travailleurs isolés, c'est sans doute peu efficace effectivement, même si tout dépend du niveau d'organisation atteignable dans le milieu. Mais ne s'intéresser qu'aux travailleurs des grosses entreprises donneuses d'ordre, c'est se couper de la majorité des travailleurs,sylvestre a écrit:Non, il ne faut pas se contenter d'influencer seulement dans le secteur public.
Se concentrer sur les grosses entreprises, sur les réseaux où plus largement il y a des contacts nombreux entre travailleurs qui permettent d'organiser des luttes communes (ça peut être entre travailleurs de différentes petites entreprises travaillant sur le même lieu, par exemple des sous-traitants), ça me paraît pas idiot en effet. A contrario se concentrer sur les chômeurs et les travailleurs isolés, ça me semblerait valeureux d'un côté, mais pas forcément le plus efficace stratégiquement.
J'ai explicitement précisé qu'il ne fallait pas ne s'intéresser qu'aux entreprises donneuses d'ordre. Me lis-tu à l'occasion ?
et surtout se couper des travailleurs directement productifs (et pas seulement donneurs d'ordre).
Encore un mélange - les travailleurs des entreprises donneuses d'ordre sont a priori tout aussi productifs que ceux des sous-traitants. Dans les sous-traitant comme dans les entreprises donneuses d'ordre il y a des "donneurs d'ordre" (des cadres) mais ça n'a rien à voir.
Tout en sachant que c'est en plus un secteur en déclin puisqu'il y a de moins en moins de grosses concentrations ouvrières (les bourgeois ne sont pas cons, ils savent ce qu'ils risquent), et que celles-ci ont de plus en plus un rôle "dirigeant" et non pas directement productif.
Je pense que le NPA ferait bien d'engager une réelle réflexion sur les mutations du système de production capitaliste, si l'on ne veut pas construire sur des "illusions", pour reprendre ton terme. Le capitalisme se parcellise? Plutôt que d'ignorer l'évolution et de réduire son champ de vision aux "mammouths" survivants, il serait sans doute bon d'anticiper et de réfléchir aux nouvelles solutions en terme d'organisation des travailleurs, tout comme en terme de militantisme dans et vers ces milieux, etc.
En fait si on regarde les salariés travaillent dans de plus grandes entreprises qu'auparavant, mais dans des établissement plus petits.
http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1289#inter1
en 2006, 33 % des salariés travaillent dans une entreprise de plus de 1 000 salariés
Les salariés du secteur privé travaillent aujourd’hui dans des plus grandes entreprises qu’il y a trente ans. Ces entreprises englobent une ou plusieurs sociétés (on parle alors de groupe), qui englobent elles-mêmes un ou plusieurs établissements (encadré). Mais si les entreprises, centres de décision et des orientations stratégiques, ont grandi au fil du temps, ce n’est pas le cas des établissements qui sont désormais plus petits. Les entreprises ont donc grandi en rassemblant de plus en plus d’établissements. Ainsi, les salariés travaillent maintenant sur des lieux de production plus petits (les établissements), mais ils dépendent plus souvent d’une très grande structure (entreprise) : en 2006, 33 % des salariés travaillent dans une entreprise de plus de 1 000 salariés contre 27 % en 1985. En revanche, 38 % travaillent dans un établissement de moins de 20 salariés contre 34 % en 1985.
Le développement des grandes structures a accompagné les multiples transformations de l’économie française et notamment la tertiarisation de l’emploi : alors que les grands sites industriels déclinent, les grands groupes de services sont en plein essor. Or chaque secteur d’activité a ses modalités propres d’organisation : les établissements du tertiaire étant plus petits que ceux de l’industrie, la taille moyenne des établissements a diminué. Malgré tout, entre 1979 et 2006, ces établissements se sont de plus en plus regroupés dans de grosses entreprises.
Avec une tendance générale à la concentration, trois grands secteurs illustrent des évolutions structurelles différenciées : l’industrie manufacturière qui perd des salariés presque chaque année depuis 30 ans, les services aux entreprises qui depuis 1979 sont en pleine croissance grâce à l’informatique et au développement des fonctions de support (nettoyage, comptabilité, recherche et développement, informatique, publicité…) et, enfin, le commerce de détail qui n’a pas beaucoup grandi mais s’est complètement réorganisé avec l’émergence des grandes surfaces.
Ces trois secteurs comptent, en 2006, près de 7 millions de salariés. Dans les autres secteurs qui sont les industries agro-alimentaires, l’énergie, la construction, le commerce de gros et d’automobiles, les autres services aux entre prises, les services aux particuliers et les activités financières et immobilières, les mêmes mouvements sont à l’œuvre.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Pas le temps ni l'envie de m'étendre indéfiniment, mais ta réponse a le mérite de clarifier quelques points.
Cependant quand tu dis :
A moins de croire aux délires "anarcaps" (les plus extrémistes des libertariens), la disparition de l'appareil d'État en régime capitaliste (par sa privatisation) n'est pas possible. Sinon c'est la guerre civile.
"Pourquoi ne pas considérer l'Etat comme un capitaliste comme un autre (...) ?" (répondant à "Or je ne considère pas l'État comme "un capitaliste comme un autre", mais comme un outil à leur service, ce qui n'est pas la même chose.")
L'État a donc un rôle particulier pour la classe capitaliste, c'est un outil au service d'une classe dans son ensemble, et pas un simple "capitaliste comme un autre" et "parmi d'autres". Les propriétés étatique (~publique) et capitaliste (~privée) sont donc bien de nature différente.
Pour le reste, je ne rentre pas dans les détails. Je ne sais pas quelle connaissance/expérience concrète tu as de la production industrielle aujourd'hui, mais nous n'avons manifestement pas la même (notamment sur l'organisation entre donneurs d'ordre et exécutants, et l'externalisation des "tâches productives"). On pourra toujours en discuter directement à l'UE si on trouve un moment.
De même, si le terme de "production" d'une valeur d'échange (bien ou service) te dérange, parlons de "rapports d'exploitation" plutôt que de "rapports de production", ça ne changera pas la problématique de fond (c'est bien la place du travailleur dans le rapport d'exploitation capitaliste permettant de générer la plus-value, qui fait le poids d'une grève)
Cependant quand tu dis :
Je pense que tu te trompes. Ils peuvent très bien privatiser certains services, de plus ou moins grande importance (c'est déjà le cas), mais pas être privatisés en tant que tels, globalement. Sinon ça devient des milices privées et ça n'a absolument pas la même légitimité (légitimité venant justement de l'État) censé les placer au dessus de la mêlée. Même chose pour la justice. Car le problème c'est que l'appareil d'Etat ne sert pas seulement à assurer la domination de classe des capitalistes, mais aussi à pacifier les rapports entre les capitalistes eux-mêmes.sylvestre a écrit:Là n'est pas la question : la police et l'armée peuvent très bien êtres privatisées.
A moins de croire aux délires "anarcaps" (les plus extrémistes des libertariens), la disparition de l'appareil d'État en régime capitaliste (par sa privatisation) n'est pas possible. Sinon c'est la guerre civile.
Tu me rassures. J'avais manifestement mal interprété cette phrase :sylvestre a écrit:Bien évidemment il n'est pas un capitalisme "comme un autre", je ne crois pas avoir jamais employé cette formule
"Pourquoi ne pas considérer l'Etat comme un capitaliste comme un autre (...) ?" (répondant à "Or je ne considère pas l'État comme "un capitaliste comme un autre", mais comme un outil à leur service, ce qui n'est pas la même chose.")
Ouf! Nous sommes donc d'accord.sylvestre a écrit:l'essentiel est de comprendre que l'Etat agit comme représentant collectif de la classe capitaliste
L'État a donc un rôle particulier pour la classe capitaliste, c'est un outil au service d'une classe dans son ensemble, et pas un simple "capitaliste comme un autre" et "parmi d'autres". Les propriétés étatique (~publique) et capitaliste (~privée) sont donc bien de nature différente.
Donc tu es totalement d'accord avec ce que je disais ("il y a de moins en moins de grosses concentrations ouvrières"), ça tombe bien.sylvestre a écrit:En fait si on regarde les salariés travaillent dans de plus grandes entreprises qu'auparavant, mais dans des établissement plus petits.
Pour le reste, je ne rentre pas dans les détails. Je ne sais pas quelle connaissance/expérience concrète tu as de la production industrielle aujourd'hui, mais nous n'avons manifestement pas la même (notamment sur l'organisation entre donneurs d'ordre et exécutants, et l'externalisation des "tâches productives"). On pourra toujours en discuter directement à l'UE si on trouve un moment.
De même, si le terme de "production" d'une valeur d'échange (bien ou service) te dérange, parlons de "rapports d'exploitation" plutôt que de "rapports de production", ça ne changera pas la problématique de fond (c'est bien la place du travailleur dans le rapport d'exploitation capitaliste permettant de générer la plus-value, qui fait le poids d'une grève)
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:Pas le temps ni l'envie de m'étendre indéfiniment, mais ta réponse a le mérite de clarifier quelques points.
Cependant quand tu dis :Je pense que tu te trompes. Ils peuvent très bien privatiser certains services, de plus ou moins grande importance (c'est déjà le cas), mais pas être privatisés en tant que tels, globalement. Sinon ça devient des milices privées et ça n'a absolument pas la même légitimité (légitimité venant justement de l'État) censé les placer au dessus de la mêlée. Même chose pour la justice. Car le problème c'est que l'appareil d'Etat ne sert pas seulement à assurer la domination de classe des capitalistes, mais aussi à pacifier les rapports entre les capitalistes eux-mêmes.sylvestre a écrit:Là n'est pas la question : la police et l'armée peuvent très bien êtres privatisées.
A moins de croire aux délires "anarcaps" (les plus extrémistes des libertariens), la disparition de l'appareil d'État en régime capitaliste (par sa privatisation) n'est pas possible. Sinon c'est la guerre civile.
Je ne suis pas d'accord avec cette analyse. En fait pendant la majorité de l'histoire de l'humanité les armées ont été "privées" au sens où il s'agissait de bandes de mercenaires. L'appareil d'Etat ne doit pas être considéré du point de vue formel, mais du point de vue de la source effective du pouvoir, c'est à dire du point de vue qui nous occupe l'organisation du monopole de la violence légitime, vue comme monopole de la légitimation de la violence. Du coup la distinction fonctionnaires/salariés de droit privé pour les forces de police et d'armée n'est pas fondamentale.
Tu me rassures. J'avais manifestement mal interprété cette phrase :sylvestre a écrit:Bien évidemment il n'est pas un capitalisme "comme un autre", je ne crois pas avoir jamais employé cette formule
"Pourquoi ne pas considérer l'Etat comme un capitaliste comme un autre (...) ?" (répondant à "Or je ne considère pas l'État comme "un capitaliste comme un autre", mais comme un outil à leur service, ce qui n'est pas la même chose.")
Oui, il m'arrive de souligner qu'on peut être d'accord sur une formulation, mais qu'il faut clarifier pourquoi on est d'accord.
Ouf! Nous sommes donc d'accord.sylvestre a écrit:l'essentiel est de comprendre que l'Etat agit comme représentant collectif de la classe capitaliste
L'État a donc un rôle particulier pour la classe capitaliste, c'est un outil au service d'une classe dans son ensemble, et pas un simple "capitaliste comme un autre" et "parmi d'autres". Les propriétés étatique (~publique) et capitaliste (~privée) sont donc bien de nature différente.
Il faut simplement préciser qu'il est à la fois un capitaliste exceptionnel et un capitaliste "comme un autre". Il est "comme un autre" en ce sens qu'il est capitaliste, qu'il exploite de la main d'œuvre salariée afin d'accumuler du capital. Et il est exceptionnel en ce sens qu'il est le représentant de la classe capitaliste dans son ensemble, et prend en compte une grande partie des tâches improductives ou indirectement productives nécessaire au maintien de la domination de classe et à l'accumulation du capital par les capitalistes privés.
Donc tu es totalement d'accord avec ce que je disais ("il y a de moins en moins de grosses concentrations ouvrières"), ça tombe bien.sylvestre a écrit:En fait si on regarde les salariés travaillent dans de plus grandes entreprises qu'auparavant, mais dans des établissement plus petits.
Là encore il faut préciser. Il y a moins de grands établissements, donc moins de collègues qui se côtoient au jour le jour, mais plus de "concentrations ouvrières" au sens où les travailleurs se côtoient beaucoup plus qu'avant dans l'espace urbain, et d'autre part plus de travailleurs travaillant dans des grandes entreprises, la possibilité de contacts professionnels et de luttes simultanées et plus grande. Bref la situation est dynamique, mais beaucoup moins univoque que ce que tu disais.
Pour le reste, je ne rentre pas dans les détails. Je ne sais pas quelle connaissance/expérience concrète tu as de la production industrielle aujourd'hui, mais nous n'avons manifestement pas la même (notamment sur l'organisation entre donneurs d'ordre et exécutants, et l'externalisation des "tâches productives"). On pourra toujours en discuter directement à l'UE si on trouve un moment.
Avec plaisir, mais si tu as des données, c'est souvent plus commode de les donner par internet - j'ai toujours du mal à insérer des liens à l'oral...
De même, si le terme de "production" d'une valeur d'échange (bien ou service) te dérange, parlons de "rapports d'exploitation" plutôt que de "rapports de production", ça ne changera pas la problématique de fond (c'est bien la place du travailleur dans le rapport d'exploitation capitaliste permettant de générer la plus-value, qui fait le poids d'une grève)
Si on parle de générer de la plus-value on parle uniquement de rapport de production.
Excuse-moi, mais c'est une notion marxiste assez fondamentale, et si on est pas d'accord sur ces définitions on aura du mal à se comprendre : selon Marx (et je trouve qu'il a raison) la plus-value est générée uniquement dans le processus de production des marchandises. Le travail salarié qui s'opère en-dehors de ce processus, quelle que soit sa nécessité pour le système (par exemple la vente) est lui aussi exploité, mais ne génère pas de plus-value. Tout le revenu du secteur du commerce et de la finance (patrons et salariés) est donc une ponction sur la plus-value.
Il y a un résumé pas mal ici.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
La violence est légitime parce que c'est celle de l'État et non d'un capitaliste privé. C'est justement ça qui la légitime.sylvestre a écrit:Je ne suis pas d'accord avec cette analyse. En fait pendant la majorité de l'histoire de l'humanité les armées ont été "privées" au sens où il s'agissait de bandes de mercenaires. L'appareil d'Etat ne doit pas être considéré du point de vue formel, mais du point de vue de la source effective du pouvoir, c'est à dire du point de vue qui nous occupe l'organisation du monopole de la violence légitime, vue comme monopole de la légitimation de la violence. Du coup la distinction fonctionnaires/salariés de droit privé pour les forces de police et d'armée n'est pas fondamentale.
Que la police ou l'armée sous-traite, c'est une évidence et ça n'a rien d'une nouveauté. Que la police ou l'armée soit entièrement privatisée, impliquant la disparition de l'appareil d'État, c'est un rêve d'anarcap (même la plupart des libertariens n'envisagent pas cette possibilité), qui n'est pas envisageable pour quiconque a une analyse de classe de l'État (outil de domination nécessaire de la classe capitaliste).
L'État n'est pas "un capitaliste", il est l'outil transversal à l'ensemble des capitalistes pour défendre leurs intérêts de classe et maintenir leur domination.sylvestre a écrit:Il faut simplement préciser qu'il est à la fois un capitaliste exceptionnel et un capitaliste "comme un autre". Il est "comme un autre" en ce sens qu'il est capitaliste, qu'il exploite de la main d'œuvre salariée afin d'accumuler du capital. Et il est exceptionnel en ce sens qu'il est le représentant de la classe capitaliste dans son ensemble, et prend en compte une grande partie des tâches improductives ou indirectement productives nécessaire au maintien de la domination de classe et à l'accumulation du capital par les capitalistes privés.
L'État n'accumule pas du capital, il veille à mettre en place (et maintenir) les conditions d'accumulations de capital (privé).
La possibilité de luttes simultanées plus grande? Oui, la parcellisation du travail rend les rapports transversaux et interprofessionnels potentiellement plus faciles.sylvestre a écrit:Là encore il faut préciser. Il y a moins de grands établissements, donc moins de collègues qui se côtoient au jour le jour, mais plus de "concentrations ouvrières" au sens où les travailleurs se côtoient beaucoup plus qu'avant dans l'espace urbain, et d'autre part plus de travailleurs travaillant dans des grandes entreprises, la possibilité de contacts professionnels et de luttes simultanées et plus grande. Bref la situation est dynamique, mais beaucoup moins univoque que ce que tu disais.
A condition d'être implanté dans ces secteurs, ce qui était bien la remarque de départ. Car ce qui est une potentialité est aujourd'hui à peu près inexistant, bien au contraire.
Donc si l'on en conclut qu'il y a là un terrain stratégique à développer, nous sommes finalement d'accord.
(quant à la "dynamique" de la situation, je connais assez bien)
Il y a certes les données brutes d'un côté, mais il y a surtout la politique industrielle en cours, et pour ce qu'on connait de l'intérieur, je préfère les discussions orales (prudence entre autres).sylvestre a écrit:Avec plaisir, mais si tu as des données, c'est souvent plus commode de les donner par internet - j'ai toujours du mal à insérer des liens à l'oral...
Donc pour toi un service ne génère pas de plus-value?sylvestre a écrit:Si on parle de générer de la plus-value on parle uniquement de rapport de production.
J'ai déjà précisé que ça s'applique aux services autant qu'aux biens, et aux biens immatériels autant qu'aux biens matériels.
Nous sommes manifestement en désaccord sur ce point.
Maintenant tout dépend ce que tu mets derrière "marchandise", car en régime capitaliste, tout est marchandise (à commencer par la force de travail), y compris les services (ce qui comprend l'échange et la distribution).
Ton lien "résumé" va également dans mon sens. Y compris sur la question de l'État et des fonctionnaires au sens strict (l'appareil d'État et non les entreprises sous propriété étatique) d'ailleurs.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:La violence est légitime parce que c'est celle de l'État et non d'un capitaliste privé. C'est justement ça qui la légitime.sylvestre a écrit:Je ne suis pas d'accord avec cette analyse. En fait pendant la majorité de l'histoire de l'humanité les armées ont été "privées" au sens où il s'agissait de bandes de mercenaires. L'appareil d'Etat ne doit pas être considéré du point de vue formel, mais du point de vue de la source effective du pouvoir, c'est à dire du point de vue qui nous occupe l'organisation du monopole de la violence légitime, vue comme monopole de la légitimation de la violence. Du coup la distinction fonctionnaires/salariés de droit privé pour les forces de police et d'armée n'est pas fondamentale.
Que la police ou l'armée sous-traite, c'est une évidence et ça n'a rien d'une nouveauté. Que la police ou l'armée soit entièrement privatisée, impliquant la disparition de l'appareil d'État, c'est un rêve d'anarcap (même la plupart des libertariens n'envisagent pas cette possibilité), qui n'est pas envisageable pour quiconque a une analyse de classe de l'État (outil de domination nécessaire de la classe capitaliste).
Tu n'as pas vraiment répondu à ce que j'écrivais. Pour simplifier, on peut parfaitement imaginer que l'armée et la police d'un pays soient entièrement constituée par des entreprises privées répondant à des appels d'offre de l'Etat. Ce qui me permet au passage de souligner que toute une partie de l'économie privée est en fait constituée de fournisseurs directs de l'Etat et des collectivités territoriales.
L'État n'est pas "un capitaliste", il est l'outil transversal à l'ensemble des capitalistes pour défendre leurs intérêts de classe et maintenir leur domination.
L'État n'accumule pas du capital, il veille à mettre en place (et maintenir) les conditions d'accumulations de capital (privé).
Non il n'est pas seulement cela, et oui l'Etat accumule du capital. EDF et la SNCF ont accumulé un capital considérable, comment le nier ?
La possibilité de luttes simultanées plus grande? Oui, la parcellisation du travail rend les rapports transversaux et interprofessionnels potentiellement plus faciles.sylvestre a écrit:Là encore il faut préciser. Il y a moins de grands établissements, donc moins de collègues qui se côtoient au jour le jour, mais plus de "concentrations ouvrières" au sens où les travailleurs se côtoient beaucoup plus qu'avant dans l'espace urbain, et d'autre part plus de travailleurs travaillant dans des grandes entreprises, la possibilité de contacts professionnels et de luttes simultanées et plus grande. Bref la situation est dynamique, mais beaucoup moins univoque que ce que tu disais.
A condition d'être implanté dans ces secteurs, ce qui était bien la remarque de départ. Car ce qui est une potentialité est aujourd'hui à peu près inexistant, bien au contraire.
Donc si l'on en conclut qu'il y a là un terrain stratégique à développer, nous sommes finalement d'accord.
Oui.
Il y a certes les données brutes d'un côté, mais il y a surtout la politique industrielle en cours, et pour ce qu'on connait de l'intérieur, je préfère les discussions orales (prudence entre autres).sylvestre a écrit:Avec plaisir, mais si tu as des données, c'est souvent plus commode de les donner par internet - j'ai toujours du mal à insérer des liens à l'oral...
Ce qu'on connaît de l'intérieur est forcément très limité. (sauf si tu bosses au ministère de l'industrie et que tu as accès à des statistiques secrètes mais bon).
Donc pour toi un service ne génère pas de plus-value?sylvestre a écrit:Si on parle de générer de la plus-value on parle uniquement de rapport de production.
J'ai déjà précisé que ça s'applique aux services autant qu'aux biens, et aux biens immatériels autant qu'aux biens matériels.
Nous sommes manifestement en désaccord sur ce point.
Maintenant tout dépend ce que tu mets derrière "marchandise", car en régime capitaliste, tout est marchandise (à commencer par la force de travail), y compris les services (ce qui comprend l'échange et la distribution).
Ton lien "résumé" va également dans mon sens. Y compris sur la question de l'État et des fonctionnaires au sens strict (l'appareil d'État et non les entreprises sous propriété étatique) d'ailleurs.
Tu es surtout en désaccord avec toute la tradition marxiste, ce qui est plus gênant. Je précise à nouveau : il ne s'agit pas de faire la distinction entre production de marchandises matérielles et production de services (réparations, restauration, etc.), qui sont aussi des marchandises au sens marxistes, mais de la distinction entre la production de ces marchandises de différentes sortes et le secteur de la circulation de ces marchandises, c'est à dire la vente, la finance, etc. Il faut faire attention car la distinction des statistiques bourgeoises actuelles entre "industrie" et "services" ne correspond pas à ces catégories marxistes et du coup n'aide pas à comprendre où se situe la production de plus-value.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Non l'armée et la police peut sous-traiter énormément, mais à aucun moment elle ne sortira de l'appareil d'État. Tu parles toi-même de réponses à appels d'offre de l'État (c'est-à-dire la situation actuelle) et non pas de privatisation, c'est donc que tu l'admets toi aussi.sylvestre a écrit:Tu n'as pas vraiment répondu à ce que j'écrivais. Pour simplifier, on peut parfaitement imaginer que l'armée et la police d'un pays soient entièrement constituée par des entreprises privées répondant à des appels d'offre de l'Etat. Ce qui me permet au passage de souligner que toute une partie de l'économie privée est en fait constituée de fournisseurs directs de l'Etat et des collectivités territoriales.
Comme tu dis, "toute une partie de l'économie privée est en fait constituée de fournisseurs directs de l'Etat et des collectivités territoriales", c'est déjà le cas. La part peut devenir plus ou moins importante, mais pas aboutir à une privatisation totale de l'appareil d'État (armée, police, justice...).
Autant les entreprises sous propriété étatique peuvent être privatisées, autant l'appareil d'État ne peut pas.
EDF ou la SNCF, ce n'est pas l'État, ce sont des entreprises sous propriété étatique. A partir du moment où elles sont profitables, l'État ne cherche pas à accumuler du capital par leur biais, mais à les privatiser.sylvestre a écrit:Non il n'est pas seulement cela, et oui l'Etat accumule du capital. EDF et la SNCF ont accumulé un capital considérable, comment le nier ?
Ce que l'État prend en charge, ce sont les investissement colossaux au départ (que le privé ne peut pas gérer), pour ensuite privatiser une fois que ça devient rentable. L'exemple des autoroutes l'illustre très bien.
A aucun moment, l'État n'utilise ses propriétés étatiques pour chercher à augmenter son capital et faire de nouveaux investissements capitalistes. De toute façon, l'État tire ses revenus avant tout des impôts et non pas des revenus capitalistes.
Il me semblait que tu disais l'inverse juste avant, sur ces secteurs. Si nous sommes d'accord tant mieux. On finit par se rendre compte qu'on est d'accord sur les secteurs stratégiques "clés" en fin de compte!sylvestre a écrit:Oui.Donc si l'on en conclut qu'il y a là un terrain stratégique à développer, nous sommes finalement d'accord.
C'est à la fois limité et pas tant que ça. Il ne s'agit pas d'accès statistique (car il n'y a pas de statistiques là-dessus, ce serait très difficile) mais de connaissance de la tendance concrète de la politique industrielle d'un certain nombre de grosses entreprises (donneuses d'ordre).sylvestre a écrit:Ce qu'on connaît de l'intérieur est forcément très limité. (sauf si tu bosses au ministère de l'industrie et que tu as accès à des statistiques secrètes mais bon).
Si l'on voulait résumer, la caricature de Tchuruk ("l'entreprise sans usines") n'est pas loin de la tendance réelle.
Je te rassure : non. D'ailleurs, le lien que tu as posté allait exactement dans mon sens. C'est toujours facile d'excommunier genre "j'ai compris Marx mieux que toi". Outre que le soi-disant argument d'autorité est faible, encore faudrait-il que ce soit vrai.sylvestre a écrit:Tu es surtout en désaccord avec toute la tradition marxiste, ce qui est plus gênant.
(j'ai parfois l'impression que tu me prends pour le dernier des neuneus )
Donc tu admets qu'il faut inclure les services, mais tu considères que la grande distribution n'est pas un service. C'est précisément de là que vient le problème.sylvestre a écrit:Je précise à nouveau : il ne s'agit pas de faire la distinction entre production de marchandises matérielles et production de services (réparations, restauration, etc.), qui sont aussi des marchandises au sens marxistes, mais de la distinction entre la production de ces marchandises de différentes sortes et le secteur de la circulation de ces marchandises, c'est à dire la vente, la finance, etc.
Ton texte l'explicite très clairement sur la vente en général : "Même s'ils ne produisent pas de la plus-value, leur travail "procure" quand même de la plus-value pour leur employeur; dans ce sens ils valorisent le capital de celui-ci". Sachant que la grande distribution remplit un service plus large que la simple vente.
Voir également la partie 4 des "réflexions" sur la nécessité d'intégrer ces salaires au capital variable comme partie du travail du "travailleur collectif".
De même considérer que les cheminots, routiers, etc, ne remplissent pas un service et ne créent pas de plus-value quand ils déplacent des biens matériels, serait tout aussi erroné.
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:EDF ou la SNCF, ce n'est pas l'État, ce sont des entreprises sous propriété étatique. A partir du moment où elles sont profitables, l'État ne cherche pas à accumuler du capital par leur biais, mais à les privatiser.sylvestre a écrit:Non il n'est pas seulement cela, et oui l'Etat accumule du capital. EDF et la SNCF ont accumulé un capital considérable, comment le nier ?
Ce que l'État prend en charge, ce sont les investissement colossaux au départ (que le privé ne peut pas gérer), pour ensuite privatiser une fois que ça devient rentable. L'exemple des autoroutes l'illustre très bien.
A aucun moment, l'État n'utilise ses propriétés étatiques pour chercher à augmenter son capital et faire de nouveaux investissements capitalistes. De toute façon, l'État tire ses revenus avant tout des impôts et non pas des revenus capitalistes.
Jusqu'à nouvel ordre la SNCF est toujours publique et EDF est détenuà 84,9% par l'Etat. Il y a certes une tendance ces derniers temps à privatiser les secteurs profitables, mais ce n'est pas du tout systématique. En tout cas jusqu'à maintenant, et au cours des décennies qui ont précédé, l'Etat a accumulé du capital avec ces entreprises.
Il me semblait que tu disais l'inverse juste avant, sur ces secteurs. Si nous sommes d'accord tant mieux. On finit par se rendre compte qu'on est d'accord sur les secteurs stratégiques "clés" en fin de compte!sylvestre a écrit:Oui.Donc si l'on en conclut qu'il y a là un terrain stratégique à développer, nous sommes finalement d'accord.
Ce n'est pas pareil de dire qu'il y a un terrain stratégique à développer que de dire qu'il s'agit de secteurs "clés" par opposition à d'autres comme l'éducation.
[quote]
Donc tu admets qu'il faut inclure les services, mais tu considères que la grande distribution n'est pas un service. C'est précisément de là que vient le problème.sylvestre a écrit:Je précise à nouveau : il ne s'agit pas de faire la distinction entre production de marchandises matérielles et production de services (réparations, restauration, etc.), qui sont aussi des marchandises au sens marxistes, mais de la distinction entre la production de ces marchandises de différentes sortes et le secteur de la circulation de ces marchandises, c'est à dire la vente, la finance, etc.
Ton texte l'explicite très clairement sur la vente en général : "Même s'ils ne produisent pas de la plus-value, leur travail "procure" quand même de la plus-value pour leur employeur; dans ce sens ils valorisent le capital de celui-ci". Sachant que la grande distribution remplit un service plus large que la simple vente.
Voir également la partie 4 des "réflexions" sur la nécessité d'intégrer ces salaires au capital variable comme partie du travail du "travailleur collectif".
De même considérer que les cheminots, routiers, etc, ne remplissent pas un service et ne créent pas de plus-value quand ils déplacent des biens matériels, serait tout aussi erroné.
Il n'en reste pas moins que sur le point central de notre discussion la distinction que tu fais est invalide. Du point de vue de la classe capitaliste dans son ensemble le secteur de la vente est improductive de plus-value (traiter la question du point de vue du capitaliste individuel est complétement à côté de la plaque si on parle de stratégie révolutionnaire, de changement à l'échelle de la société. De plus il existe un secteur vente dans toute entreprise productive de plus-value.) (d'autre part, même pour le capitaliste commercial individuel le terme "plus-value" est tout à fait impropre, et ne peut mener qu'à la confusion)
Ce n'est donc pas sur la nature productive ou improductive de plus-value que l'on peut baser une stratégie, une priorisation de certains secteurs du prolétariat par rapport à d'autres.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Oui, il y a aussi des éléments qui se mêlent à tout ça, 1/ l'importance stratégique d'un secteur pour l'État 2/ la lutte des classes..sylvestre a écrit:Jusqu'à nouvel ordre la SNCF est toujours publique et EDF est détenuà 84,9% par l'Etat. Il y a certes une tendance ces derniers temps à privatiser les secteurs profitables, mais ce n'est pas du tout systématique. En tout cas jusqu'à maintenant, et au cours des décennies qui ont précédé, l'Etat a accumulé du capital avec ces entreprises.
L'importance stratégique d'un secteur, ça explique pourquoi ce qui touche à l'énergie, aux transports, à certaines technologies de pointe sensibles, notamment pour le militaire (aéronautique, spatial, nucléaire...), sont systématiquement des affaires d'État. Et que l'État se débrouille pour maintenir certains secteurs soit sous contrôle direct de l'État (en plus de l'appareil d'État au sens strict), soit sous capitaux français (c'est ainsi que quand Alcatel a été racheté par Lucent, sa branche spatiale est passé sous contrôle Thales par exemple).
En faisant cela, il ne fait rien d'autre que protéger son appareil d'État. Il ne conserve pas EDF pour ses profits, mais bien parce que la question énergétique est une question stratégique sensible, et qu'elle comprend le nucléaire, dont l'importance militaire est évidente.
A cela se rajoute évidemment la lutte des classes, qui fait que même quand l'État souhaiterait privatiser des secteurs rentables, l'état des rapports de force dans la lutte des classes ne le lui permet pas forcément (ou pas immédiatement, ou pas tout d'un bloc, etc).
Par contre, ce qui est certain, c'est qu'à aucun moment l'État ne conserve des entreprises par volonté d'accumuler du capital. Si l'État veut augmenter ses moyens, il lui suffit d'augmenter les impôts. Si une entreprise est très rentable et n'a pas d'importance stratégique au niveau politique, l'État fera tout pour la donner au privé.
L'objectif de l'État reste de toute façon d'être en déficit, pour permettre à la classe capitaliste de profiter de la juteuse dette de l'État...
L'implantation militante dans l'éducation a un double intérêt :sylvestre a écrit:Ce n'est pas pareil de dire qu'il y a un terrain stratégique à développer que de dire qu'il s'agit de secteurs "clés" par opposition à d'autres comme l'éducation.
- le temps que ça libère pour militer (d'autant plus important quand l'on a peu ou pas de permanents)
- l'influence sur les nouvelles générations (bien que je n'en mesure pas très bien l'effet éventuel)
En clair, ça a un intérêt indirect pour gagner de l'influence dans les autres secteurs (donc plutôt un intérêt en terme d'implantation que d'influence).
Par contre, j'attends que tu m'expliques en quoi tu penses que les enseignants occupent une place stratégique dans les rapports capitalistes en vue de son renversement. Je ne vois qu'une potentialité d'action indirecte.
Libre à toi de penser qu'un lien que tu as toi-même posté mène à la confusion, mais je pense que ton raisonnement est erroné. La valorisation du capital et l'obtention du capital ne se fait qu'au bout du cycle A-M-A', c'est-à-dire qu'il englobe le procès d'ensemble du producteur jusqu'au consommateur. Le vendeur fait partie du "travailleur collectif", en bout de chaîne. Sans lui la chaîne se brise et il n'y a aucune plus-value. On ne peut se contenter de comptabiliser jusqu'au moment où un bien est "produit". Il faut aussi compter le service de mise à disposition du consommateur (transport, approvisionnement... et bien-sûr vente).sylvestre a écrit:Il n'en reste pas moins que sur le point central de notre discussion la distinction que tu fais est invalide. Du point de vue de la classe capitaliste dans son ensemble le secteur de la vente est improductive de plus-value (traiter la question du point de vue du capitaliste individuel est complétement à côté de la plaque si on parle de stratégie révolutionnaire, de changement à l'échelle de la société. De plus il existe un secteur vente dans toute entreprise productive de plus-value.) (d'autre part, même pour le capitaliste commercial individuel le terme "plus-value" est tout à fait impropre, et ne peut mener qu'à la confusion)
Sinon, ça voudrait dire que pour calculer la plus-value d'un bien matériel produit en Chine et vendu en France, tu te contenterais de comptabiliser le capital constant et variable dépensé en Chine pour sa "production" (sauf que la plus-value n'est pas réalisée à ce moment là), sans comptabiliser la mise à disposition du consommateur, donc le transport jusqu'en France, le stockage, l'approvisionnement, etc.
Pour bloquer la machine capitaliste, il faut bien bloquer sa production de plus-value.sylvestre a écrit:Ce n'est donc pas sur la nature productive ou improductive de plus-value que l'on peut baser une stratégie, une priorisation de certains secteurs du prolétariat par rapport à d'autres.
Si tu bloques des secteurs réellement improductifs en plus-value, les capitalistes n'en ont rien à faire, puisqu'ils peuvent continuer tranquillement à faire leur beurre...
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Public/privé : quel prolétariat ?
Duzgun a écrit:
Par contre, ce qui est certain, c'est qu'à aucun moment l'État ne conserve des entreprises par volonté d'accumuler du capital. Si l'État veut augmenter ses moyens, il lui suffit d'augmenter les impôts. Si une entreprise est très rentable et n'a pas d'importance stratégique au niveau politique, l'État fera tout pour la donner au privé.
L'objectif de l'État reste de toute façon d'être en déficit, pour permettre à la classe capitaliste de profiter de la juteuse dette de l'État...
Le problème n'est pas l'"intention" de l'Etat (étrange d'attribuer une volonté propre à un organe au service d'une classe). Le problème pour la classe dominante est toujours la conservation et l'accroissement de son pouvoir. Cela peut vouloir dire une accumulation menée effectivement par l'Etat ou sous son étroit contrôle (sans aller chercher le cas polémique de l'URSS, il y a par exemple celui de la Corée du Sud des années 60-70). Autrement dit que l'accumulation du capital se fasse par l'Etat ou de façon privée est une question secondaire pour la classe dominante, une question tactique si l'on veut, qui dépend du contexte particulier du pays et de la période.
Il n'y a pas en tous cas d'"objectif de l'Etat partout et toujours d'être en déficit, les excédents budgétaires étaient très fréquents durant les "Trente glorieuses". Il n'est pas plus avantageux pour la bourgeoisie d'avoir un état se finançant par la dette avec une fiscalité progressive qu'un Etat en équilibre budgétaire avec une fiscalité régressive.
Par contre, j'attends que tu m'expliques en quoi tu penses que les enseignants occupent une place stratégique dans les rapports capitalistes en vue de son renversement. Je ne vois qu'une potentialité d'action indirecte.
Mais on peut dire ça de n'importe quel secteur considéré isolément. En quoi les travailleurs du secteur de l'automobile occupent-ils une position stratégique pour renverser le capitalisme à eux seuls ? Ils peuvent bien sûr emmerder rapidement leur employeur (tout comme les enseignants), mais même en cas d'arrêt total de la production il y a déjà beaucoup de véhicules en état de marche suffisant à faire marcher l'économie, et cela prendra des années pour que le problème devienne systémique.
Libre à toi de penser qu'un lien que tu as toi-même posté mène à la confusion, mais je pense que ton raisonnement est erroné. La valorisation du capital et l'obtention du capital ne se fait qu'au bout du cycle A-M-A', c'est-à-dire qu'il englobe le procès d'ensemble du producteur jusqu'au consommateur. Le vendeur fait partie du "travailleur collectif", en bout de chaîne. Sans lui la chaîne se brise et il n'y a aucune plus-value. On ne peut se contenter de comptabiliser jusqu'au moment où un bien est "produit". Il faut aussi compter le service de mise à disposition du consommateur (transport, approvisionnement... et bien-sûr vente).
C'est ce qu"on appelle la réalisation de la plus-value. Effectivement indispensable ! Tout comme est indispensable la garde des enfants des travailleurs pour qu'ils puissent produire (et vendre) et la formation des futurs travailleurs. Bref on arrive à la constatation que les travailleurs employés par la classe capitaliste (fût-ce par l'intermédiaire de leur représentant collectif l'Etat) sont.... utiles à l'accumulation du capital à divers égards.
Sinon, ça voudrait dire que pour calculer la plus-value d'un bien matériel produit en Chine et vendu en France, tu te contenterais de comptabiliser le capital constant et variable dépensé en Chine pour sa "production" (sauf que la plus-value n'est pas réalisée à ce moment là), sans comptabiliser la mise à disposition du consommateur, donc le transport jusqu'en France, le stockage, l'approvisionnement, etc.
Une marchandise n'a pas besoin d'être vendue pour avoir de la valeur - assez évident non ? Donc la production de la plus-value se passe uniquement dans le processus de production de la marchandise. C'est un point très important qui différencie Marx des libéraux etc. qui pensent que l'échange crée la valeur etc. Mais la marchandise doit être vendue pour que le processus d'accumulation continue (pour que le capitaliste puisse acheter de nouveaux moyens de productions, etc.). Ce n'est pas paradoxal.
(cela dit, en fait le transport et le stockage font partie du processus de production de la marchandise - ce qui n'en fait pas partie c'est la comptabilité, d'où mon exemple spécifique de la caissière)
Pour bloquer la machine capitaliste, il faut bien bloquer sa production de plus-value.sylvestre a écrit:Ce n'est donc pas sur la nature productive ou improductive de plus-value que l'on peut baser une stratégie, une priorisation de certains secteurs du prolétariat par rapport à d'autres.
Ou sa réalisation, comme tu l'as noté.
Par ailleurs le but pour les révolutionnaires n'est pas de bloquer la machine capitaliste - ça, ça peut suffire si on veut juste satisfaire des revendications dans le cadre du capitalisme - mais de la briser, et pour cela il est crucial de considérer l'ensemble des relations sociales dont dépend l'accumulation du capital (donc aussi le travail des femmes au foyer, les forces de répression, les appareils idéologiques d'Etat, le processus d'éducation, etc.)
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
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