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"les institutions" : piège ou chance ?

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Message  gérard menvussa Sam 27 Aoû - 8:32

.C'est un débat qui me semble indispensable, mais qui est "sous jacent". Le texte de Samy me semble intéressant pour commencer, non pas que je sois devenu un grand fanatique (de Sam the sham) mais parce que c'est à peu prêt le seul, et qu’il est (le texte) synthétique....


Le débat « sur les Institutions » au NPA. Vieilles questions, nouveaux problèmes
JOHSUA Samuel
22 août 2011
version imprimable n°22660


Avertissement

Ce texte s’ajoute à d’autres contributions sur le thème, en particulier venant de ma part. Il concerne la question proprement dite « des Institutions », vu que sous ce vocable parfois mal maîtrisé se concentre une bonne part des polémiques actuelles et passées au NPA. Il y a évidemment des questions connexes et proches mais qui n’y seront pas reprises, du fait qu’elles le sont déjà ailleurs. Sur la fonction de notre participation aux élections, je renvoie à mon texte « le NPA et les élections » [1]. Sur la nécessité, les limites et la possibilité d’alliances pour peser électoralement et obtenir des élus je renvoie encore à un autre texte [2]. Sur la « démarche transitoire » et en particulier la question du « gouvernement des travailleurs », je renvoie à mon texte « vingt défis », partie 2, point 20 [3].
Le cadre de ce texte

Ce texte prend appui sur deux contributions Phénix pour mettre à nouveau en discussion la question du rapport aux institutions. Celles de Francis Vergnes et Louis-Marie Barnier. Je sais bien qu’il existe au NPA d’autres positions qui elles opposent par principe « les luttes » et « les institutions ». Et pour lesquelles la « gangrène » commence, entre autres, par … 2 élus au Conseil Régional de la plus petite Région de France, le Limousin (2, pas un de plus). Lesquels ne sont même pas en charge de la gestion. J’ai écrit un texte [4] qui traite en partie du décevant surgissement de ces positions, très contraires à nos Principes Fondateurs [5]. Je laisse ceci pour d’autres débats.

Les textes de Francis Vergnes [6] et de Louis-Marie Barnier [7] partent a priori des mêmes références que celles que j’ai avancées. C’est donc à ce propos que la discussion me paraît la plus intéressante. Appréciation qu’il faudra garder en tête en lisant les termes parfois un peu vifs de cette contribution. Je ne vais pas discuter du fait de savoir si vraiment ces références nous sont communes au-delà des proclamations. Je préfère traiter au fond des divergences sérieuses que ces textes font apparaître, sous réserve de malentendus toujours possibles. Et essayer de poser les questions autrement. Pour le coup, c’est l’intérêt général de nos débats, on peut le supposer.

Après ces remarques introductives, voilà le résumé des éléments que je vais défendre.

- La manière dont F. et LM. abordent la question se rapproche de celle dont elle le fût dans la dernière période des élaborations dites « eurocommunistes », essentiellement au Parti communiste italien. Et on ne voit guère pourquoi les expériences menées à ce titre (toutes des désastres) auraient des conséquences différentes, juste parce que c’est nous qui les mènerions à leur terme.

- Il s’agit là de problèmes finalement assez traditionnels, même s’il convient de les reprendre pour chaque période. En fait la question à débattre en priorité doit être celle des nouveautés survenues dans la nature des institutions centrales de la bourgeoisie. Je vais à ce moment reprendre et développer ce que j’ai avancé dans mon texte « 20 défis », plus spécialement dans la deuxième partie de ce texte [8], et surtout dans un texte ultérieur [9], dans une partie de son point 6.
Ne pas se tromper sur Antonio Gramsci

L’idée d’opposer « luttes » et « institutions » a pris une certaine force dans le NPA. Il est pourtant impossible de défendre sérieusement une telle opposition. Si on laisse de côté un moment le cas des institutions politiques élues dans le cadre de la démocratie bourgeoise, il est clair qu’une partie majeure de nos combats vise à gagner des positions de force dans les institutions existantes. Si, comme c’est mon cas, on en tient en plus pour une perspective de « contre-hégémonie » gramscienne, cela consiste en même temps à essayer de propulser le plus possible d’institutions concurrentes. Guillaume Liégard a développé ceci plusieurs fois, mais il n’est jamais inutile de le rappeler. Considérons par exemple le système éducatif. Le lien avec l’État (surtout en France) est patent. D’un certain point de vue, c’est une extension de ce dernier (un appareil idéologique d’État disait Althusser). Mais en même temps c’est un lieu de confrontation de classe qu’il est hors de question de déserter. Sinon, pourquoi s’opposer à la loi LRU ? Selon une formule que j’utilise sur ce sujet précis : « on ne peut pas avoir une école pleinement démocratique dans une société qui ne l’est pas ; mais cette école peut l’être plus ou moins, démocratique ». On peut, sans aucune limite, avancer la même chose de toutes les institutions bourgeoises [10].

LM, sans doute dans une tentative de se garder des critiques en réformisme, veut bien s’occuper de la justice, mais ni de la police ni de l’armée. Diable ! La justice, on voit bien qu’on ne peut pas s’en désintéresser, puisqu’elle est liée au droit. Et qu’une partie majeure des combats de classe consiste à modifier ce droit dans un sens plus favorable, ou à empêcher les dégradations. Mais nous ne pouvons pas plus nous désintéresser de la police. Si j’ai bonne mémoire, nous demandons l’interdiction des Tasers ? Voire même le désarmement des policiers ? Quant à l’armée, à la LCR (le NPA je ne sais pas) nous étions favorables à la conscription (même si c’est passé de mode) avec… droit syndical pour les appelés. Et peut-on penser qu’on aurait pu lors de la révolution portugaise de 1974 se passer d’une « politique militaire » avec les régiments tels qu’ils étaient…

Non, il n’y a aucune exception. Tant que nous ne pouvons pas remplacer ces institutions, nous devons avoir une politique de démocratisation pour chacune d’elles. En même temps (c’est là l’aspect contre-hégémonique) nous cherchons à impulser des institutions concurrentes issues de pratiques nouvelles. Bien entendu ceci dépend des rapports de force. On peut avec profit développer l’éducation populaire, mais avant qu’elle soit en mesure de remplacer l’école elle-même, il y a de la marge. Prises ainsi, ce sont toutes les structures du mouvement ouvrier (et du mouvement d’émancipation d’une manière plus générale) qui sont des embryons de contre institutions. Associations, syndicats, partis ; initiatives économiques, culturelles tout aussi bien. Même… institutions sportives. Mais il vaut mieux dire « qui devraient ou pourraient l’être », contre-hégémoniques. Ce n’est jamais facile ni donné une fois pour toutes. Il est quasiment impossible de trouver des contre-institutions « pures ». Obtenir une subvention par exemple peut être une conquête, puis un droit acquis. Mais on voit bien que le lien est alors fait avec le système hégémonique. Surtout, dès leur création et tout au long de leur existence, il existe un combat permanent de la bourgeoisie pour les interdire et les détruire, à défaut pour les circonscrire, et, surtout au final, pour les intégrer au système de domination global.

L’exemple de la sécurité sociale pris par LM. est effectivement révélateur. Contrairement à une vision simpliste, celle-ci constitue bien, comme il le dit, une arme aux mains des travailleur-se-s par le fait qu’elle permet d’atténuer sensiblement la concurrence entre eux/elles. On peut parler d’un mécanisme de type communiste au sein même du capitalisme. En théorie en effet, elle devrait fonctionner sur le modèle « de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». Il n’est jamais inutile de rappeler qu’à l’origine, elle provient d’initiatives propres au mouvement ouvrier. Et qu’on voit bien comment la classe dirigeante cherche à la détruire, à la limiter, ou à l’intégrer sous une forme assurantielle.

Et même concernant les institutions électives, la question se pose. Globalement, ce que je viens de développer prolonge les réflexions de Gramsci (et avant, on l’ignore souvent, de Lénine et Trotski) sur l’impossibilité dans les pays de vieille démocratie comme les nôtres de se passer de la « guerre de positions », laquelle comprend les institutions électives. C’est donc vrai aussi de la nécessité de notre présence comme élus si nous le pouvons. Imaginer qu’une offensive révolutionnaire pourrait se dérouler dans un pays comme le nôtre sans être accompagnée (précédée, suivie) d’effets électoraux sort des limites de l’épure raisonnable. Et, si on ne l’imagine pas, cela signifie que nous devons avoir une politique spécifique dans ces institutions, qui ne se limite pas à y être les porte parole des luttes [11].

Le-la prolétaire concret-e, membre d’une classe dominée politiquement, idéologiquement et économiquement, et donc en position récurrente de faiblesse, va chercher tous les appuis disponibles. Et se tourne régulièrement vers « les élus » (surtout s’ils sont de proximité). Parce qu’on leur attribue à la fois une responsabilité d’intérêt général et les moyens de faire. Attribution très exagérée dans les deux cas. Mais face au dénuement concret d’un prolétaire isolé, ça peut représenter quelque chose. Nous-mêmes n’hésitons pas à demander des salles de réunion… Ce rôle de « délégué » n’est pas seulement celui d’un porte-parole mais celui d’un facilitateur quand c’est possible. Comme pour le cas d’un délégué syndical d’ailleurs. Un parti qui n’est pas en mesure de jouer cette fonction perd une part importante de sa fonctionnalité aux yeux des masses [12]. Surtout que le plus souvent il ne s’agit pas de n’importe quelle « masse ». Un élu municipal est en contact de bien plus près avec la partie majoritaire de la population prolétaire, sans droits, au chômage ou au black, salariée dans de toutes petites boîtes, ceci dans un pays dans lequel le taux de syndicalisation est celui qu’on connaît. C’est une rencontre rare dans le cas du militantisme courant du NPA. Cette population se tourne en premier (si encore elle le fait) vers les élus de base, bien avant une quelconque auto-organisation dont elle n’a pas les moyens concrets. Jusqu’à ces personnes venues en fin de course, les week-end, quand il ne reste plus que les permanences municipales (si elles existent) exposer leur misère et quémander une solution : malades psychiatriques refusés à l’hôpital, femmes – battues ou non – mises à la porte avec leurs enfants, etc.

Ceci permet aussi de critiquer un biais toujours présent quand on discute « institutions » électives au NPA. Dans une veine anarchisante, une partie décisive (sinon unique) de la méfiance vis-à-vis d’elles porterait sur leur aspect inévitablement délégataire. Certes cet aspect et les dangers qu’il comporte ne sont nullement une invention. Mais ils ne sont pas l’apanage des institutions politiques élues. C’est un problème propre à toute organisation, que l’on retrouve aussi bien dans les partis, les syndicats, la direction d’une entreprise auto-gérée, etc… Qu’il faille prendre le problème à chaque fois dans sa spécificité ne conduit pas à perdre de vue que c’est une question générale. Mais, inversement, cela signifie que pour des révolutionnaires les problèmes posés par les instances élues de la démocratie bourgeoise ne s’y laissent certainement pas enfermer.

Mais alors où est la divergence avec LM. et F. ? Elle se concentre dans un premier temps sur le type de liens qu’ils imaginent entre les deux sortes d’institutions (hégémoniques et contre-hégémoniques), pensées par eux sur une mode combiné, pacifié, évitant toute confrontation frontale. Ce en quoi ils sont à l’opposé de Gramsci. Disons pour être plus précis qu’ils sont en ligne avec les déformations bien documentées apportées par le Parti communiste italien – et en particulier sa « gauche », comme chez Pietro Ingrao – aux apports du révolutionnaire italien. D’une manière plus nette chez LM, cette position est présente aussi chez F.

Je cite LM :

« Il faut donc leur faire jouer un rôle différent, opposé : les institutions doivent devenir des soutiens à la lutte des classes, des vecteurs de luttes, des lieux de construction des collectifs qui se structurent. Il faut y mettre « l’action politique institutionnelle au service des mouvements et d’une pédagogie politique auprès de la population ».
…/…
« Les institutions démocratiques nées dans les luttes dans/contre le système, et la participation aux institutions existantes liées au suffrage universel, doivent aller conjointement dans le sens de la construction de rapports de force, de l’émergence d‘un sujet collectif portant les différentes luttes, représentant « l’intérêt général ».

Répétons qu’il ne s’agit pas de mobiliser contre LM. et F. l’opposition simpliste entre « luttes » et « institutions ». Je parle bien ici de luttes entre institutions, hégémoniques ou contre-hégémoniques. Or il ne fait aucun doute qu’au lieu d’opposer les deux types d’institutions, il s’agit chez eux de les accorder. Autrement dit, non pas d’affaiblir de l’intérieur (par l’imposition de rapports de force plus favorables) les institutions bourgeoises, mais de les faire fonctionner au profit de l’émancipation, donc de les « transformer » durablement de l’intérieur. C’est, au sens le plus profond, une option réformiste. Qui pose une question centrale concernant surtout les institutions de gestion de l’État central (gouvernement, grandes collectivités territoriales). Est-ce une option réaliste ? Si oui, comment se fait-il qu’on n’y soit pas arrivé depuis des siècles ? Cela tient-il juste à la « trahison » des représentants en charge de la chose ? Il suffirait que ce soit nous qui nous y collions [13] ? La réponse est connue : on ne peut pas y parvenir parce que, par nature, ces institutions ne peuvent pas être fondamentalement détournées de leur fonction originelle de gestion centralisée des intérêts généraux de bourgeoisie.

F. d’ailleurs a un doute au final, « Cela ne résout bien sûr pas la question du pouvoir en tant que telle et je pense que d’autres contributions au Phénix, permettront de la reprendre mais cela rappelle un paramètre qu’il me semblerait assez problématique d’occulter. » Je ne crois pas que ce soit juste une question d’élaboration… C’est bien sa façon de poser la question qui empêche toute solution.

Mais alors disent LM. et F., comment prolonger les mobilisations ? Citons F. : « Or cela n’est guère possible si l’on n’a pas au préalable travaillé de l’intérieur les institutions existantes. D’une façon plus générale cela renvoie aux liens que l’on peut établir entre une culture de mobilisation qui est la nôtre et la consolidation des résultats obtenus en terme de droit sociaux durables. Imagine-t-on pour ne prendre qu’un seul exemple que le rapport de force qui permit en 36 de conquérir les congés payés aurait permis de les appliquer durablement et partout sans l’existence d’une loi elle même imbriquée dans des institutions juridiques et politiques. » Et LM dit la même chose : « Comment imaginer aussi que « le rapport de force qui permit en 36 de conquérir les congés payés aurait permis de les appliquer durablement et partout sans l’existence d’une loi elle même imbriquée dans des institutions juridiques et politiques ? ».

L’argument paraît imparable, il est d’ailleurs repris régulièrement par le FG (et encore par Mélenchon dans sa confrontation avec Besancenot pour « Regards »). Mais il est faux ! ça s’imagine très bien, et c’est d’ailleurs le cas le plus courant. La plupart des succès sociaux du 20e siècle ont été actés par… des gouvernements de droite. La sécurité sociale comme droit reconnu globalement ? C’est Beveridge (économiste libéral converti au keynésiannisme) qui l’élabore sur demande… de Churchill (de droite, est-il utile de le rappeler ?) en pleine guerre. C’est le gouvernement De Gaulle qui l’établit en France. Le SMIG (qui deviendra SMIC), une conquête si importante ? Le gouvernement Bidault (MRP) en 1950. La reconnaissance des sections d’entreprise ? De Gaulle encore, après 68. La libéralisation du droit au divorce, le vote à 18 ans, le droit à l’avortement ? : Giscard. Et avant, l’impôt sur le revenu progressif ? Une Assemblée à majorité radicale, un Sénat de droite. La Loi laïque de 1905 ? Pareil (un gouvernement « républicain opportuniste », avec l’appui du dehors de Jaurès, mais l’opposition de nombre de socialistes). Et les reculs les plus importants sur le dernier demi-siècle avant Sarko, ils viennent d’où ? Ces reculs sont actés par des gouvernements de gauche, dont, principalement ceux de Fabius et Bérégovoy. Et encore : comme on l’a vu ci-dessus, F. reprend classiquement l’argument que la grève de 36 ne pouvait aboutir sans que les avancées soient transcrites par une majorité de gauche. Et il fait comment avec 68 [14] ?

De plus si on suit F. et LM., est-ce à dire que dans les pays, nombreux, de bipartisme, jamais aucun mouvement social ne peut obtenir des évolutions majeures inscrites dans la Loi ? On fait quoi du mouvement pour les droits civiques aux USA ? On est stupéfaits que cet argument, qui n’a aucun fondement historique, soit repris comme argument central par les camarades.

Comment expliquer un tel mystère, le prolongement de la mobilisation populaire acté par un gouvernement de droite ? C’est que, pour l’essentiel, les conquêtes sociales sont non seulement un effet des luttes (là on sera tous d’accords), mais un effet de période, des rapports de force. Qu’ils soient favorables, et tous les gouvernements, de droite comme de gauche, devront l’enregistrer. Qu’ils tournent en notre défaveur, et ces gouvernements seront conduits aux mêmes politiques réactionnaires. Nous avons sous les yeux la manière commune dont les gouvernements gèrent la crise de la dette, sans que leur couleur électorale ne joue le moindre rôle significatif.

Pourquoi alors voter à gauche dans des seconds tours ? Vieille question. La réponse en termes de différence de politique réellement menée par la droite et la gauche, comme je viens de l’indiquer, est en général complètement fausse. Disons au moins qu’il n’y a aucune automaticité. Ceci peut être vrai partiellement, et pendant un temps. Ainsi un gouvernement de droite fera attention aux médecins, un gouvernement de gauche aux profs ; mais avec une limite qu’on connaît bien, et sur le long terme, ça convergera. La réponse à ces questions de vote n’est pas institutionnelle, mais sociale. En général (mais pas toujours), un poids plus fort de la gauche donne une confiance plus forte. De plus et surtout, il n’est pas question que cette question électorale serve à nous séparer de nos camarades de combat. Mais pas, vraiment pas, avec les arguments donnés par F. et LM.

La deuxième question à considérer est la nécessaire rupture avec le traitement « à plat » de tous les types d’institutions considérées comme semblables dans leur fonction. F. avance ainsi « Il faut sans doute aller plus loin dans la consolidation de possibles droits sociaux fondamentaux (logement, revenu, etc..) et d’espaces institutionnels. …/… Il s’agit de percevoir les germes d’une autre société possible présents ici et maintenant, dans des espaces en partie débarrassés, parce que telle est la volonté de ceux qui les animent, de la tutelle du capital. : coopératives ouvrières, espaces autogérés, squats, quartiers, et pourquoi pas communes et villes. Il faut se représenter ces avancées non comme une contre société à la LO ou PC des années 30 (la classe ouvrière restant aux portes de la cité, on construit une contre société autour du parti et de ses appendices.. à l’abri des mauvaises influences ) mais comme une occupation de la vie sociale et institutionnelle dans la société telle qu’elle est. Cette thématique entre assez en résonances avec celle de « communs » à défendre ou à reconquérir. S’il est difficile de trancher par avance sur le caractère viable de tels « espaces autogérés » la ligne stratégique consistant à fédérer de telles pratiques sociales alternatives n’a rien d’irréaliste. » Et, plus loin : « Il s’agit de travailler à modifier le fonctionnement de ces institutions du capitalisme néolibéral en sorte que les pratiques de coopération, d’échange, de solidarités prennent le dessus. ». Ce qu’il décrit en premier concerne la contre-hégémonie, mais en second des instances majeures de l’hégémonie bourgeoise. On voit bien à quel point il est insensible aux positions profondes de Gramsci, pour qui les deux hégémonies se combattent (sur un temps long, d’où la « guerre de position »), et sont incompatibles (un prélude donc à une éventuelle « guerre de mouvement »).

Pour avancer il faut au contraire distinguer ce que F. mélange : les « coopératives ouvrières, espaces autogérés, squats, quartiers, et pourquoi pas communes et villes » c’est une chose que je partage sans difficulté (Philippe Corcuff y insiste souvent, avec raison et j’ai signalé les textes de Guillaume Liégard dans le même sens). Les « institutions du capitalisme néolibéral », c’est une toute autre affaire.

Pour être moins simpliste, on pourrait dire d’abord qu’à tout moment, nous devons dans la mesure du possible privilégier une « contre-hégémonie », anti-système, et l’auto-activité. Ensuite, pour ce qui relève des institutions du système adverse, il faut distinguer celles qu’il faudra conserver (et réformer) de celles qu’il faudra détruire (et remplacer). En comptant avec tous les cas intermédiaires. Ceci demanderait un débat spécifique puisque ça touche à ce que nous entendons par « extinction de l’État ». Je renvoie à mon texte « vingt défis » partie 1 en son point 2 [15], et à Daniel Bensaïd [16].

Ainsi, il existe un code de la route. Je vois mal lutter pour le « détruire ». Je ne connais pas suffisamment, mais je suppose que l’influence du Capital s’y fait sentir aussi et que ceci devrait nous conduire à « le réformer ». Il en est de même par exemple des réseaux épidémiologiques, où la nécessité de réforme est plus nette évidemment, mais qu’un gouvernement anticapitaliste ne « détruirait » certainement pas. A l’autre bout, nous trouvons ce qui est irrécupérable : pour l’essentiel, l’appareil de répression au premier chef, et guère loin, les grandes institutions électives. Pour l’école (que le/la lecteur/lectrice m’excuse, c’est ce que je connais le mieux), difficile de trancher. On sous-estime souvent la profondeur des changements nécessaires. Mais aussi, de l’autre côté, ce qui relève de contraintes plus générales, propres à sa fonction spécifique plus qu’au système de domination. La « forme scolaire » par exemple en elle-même (autrement dit, au final, ce que nous appelons l’école aujourd’hui), si récente dans l’histoire et si efficace. Le seul exemple connu de révolution éducative à une large échelle, la politique russe de 1918 à 1925 environ, l’a maintenue pour l’essentiel, et ce n’est pas pour rien. Considérons encore la famille. « Réformer » ou « détruire » ? On va retirer les enfants aux parents pour une vie séparée et collective ? Qui aujourd’hui est à même de répondre à la question ? [17]

Ainsi F. et LM. ratent l’essentiel. Dans tous les cas, sans exception, nous devons penser une présence et une politique vis à vis des institutions existantes, de quelque ordre ou niveau qu’elles soient. Dans tous les cas, cette présence doit être confrontée à une politique de contre-hégémonie, où ce sont d’autres institutions, concurrentes, que nous cherchons à développer. Lesquelles peuvent l’être parfois dans la foulée de ce qui existe (au prix de réformes le cas échéant), et parfois nécessitent un changement profond, une révolution, qui implique leur « destruction » [18] [19]. En passant bien entendu par d’innombrables cas intermédiaires dont seul le mouvement réel d’émancipation peut donner la clé.

Enfin je voudrais rappeler ici combien ce débat – important – ne peut en aucun cas résumer la « dialectique » entre mobilisations et « inscriptions durables » de celles-ci. Certes il faut tenir compte de ce que les luttes collectives sont rares (et les révolutions exceptionnelles) et que les imaginer seulement dans une succession sans fin (ou avec une fin rêvée sous forme d’une grève générale insurrectionnelle) passe là aussi, d’une manière symétrique, à côté de la réalité. Certes cette inscription peut avoir un versant « institutionnel », au premier chef dans la croissance possible des organisations alternatives et de l’auto-activité qu’elles permettent d’installer dans la durée [20]. Elle a aussi et surtout un versant « idéologique » au sens large. Culturel, comme le dirait Gramsci. Guillaume Liégard l’a rappelé [21], Jacques Fortin [22] aussi, et avant eux déjà Daniel Bensaïd. Installer des horizons différents, des « visions du monde » opposées, un autre « bon sens » selon l’excellente formule de Gramsci ceci est, en définitive, la colonne vertébrale de la guerre de position. Pour parler comme Marx, les idées deviennent force matérielle quand elles s’emparent des masses. D’ailleurs il apparaît de plus en plus que c’est là que nous sommes principalement en position de faiblesse. L’option socialiste, celle de l’autogestion, du pouvoir démocratique des travailleurs, étant loin de faire « bon sens » après la cassure que représentent les conditions de la chute du stalinisme en 1989 [23].
Des conditions nouvelles qui renforcent les options contre-hégémoniques

Ce dernier point – la cassure produite par la chute du Mur - est majeur. Il est l’un de ceux qu’il nous faut envisager avec lucidité quant aux conditions nouvelles créées par ce changement de situation. Ceci à cause de l’ampleur des modifications qui leur sont liées, concernant le fonctionnement du capitalisme (modifications qui avaient débuté auparavant) et aussi celles touchant à la gauche politique et sociale. Il est difficile de songer que tout ceci n’ait pas de conséquences sur la manière dont des options révolutionnaires, mais aussi « eurocommunistes » pourraient être discutées désormais.

D’une manière étonnante en effet, F. et LM. en tirent argument, mais pour renforcer la « subversion » des institutions centrales. Citons F. : « Sous l’empire du néolibéralisme il s’est produit une mutation de l’ensemble de institutions sommées de créer des situations de marché, de compétition et de concurrence même là où il n’y a pas de marchandise. Il ne s’agit pas de revenir à l’Etat pour contre carrer cette privatisation des existences sociales et individuelles puisque dans bien des cas c’est l’Etat néolibéral qui a construit ces situations. Il s’agit de travailler à modifier le fonctionnement de ces institutions du capitalisme néolibéral en sorte que les pratiques de coopération, d’échange, de solidarités prennent le dessus. Est-il concevable de mener ce travail sans être d’une façon ou d’une autre dans la place et sans contester ce « management » et cette mise aux normes capitalistes de toute l’action publique ? ». Et LM. : « La « subversion » des institutions représentatives actuelles vise à leur faire jouer ce rôle, contraire à la fonction de maintien de l’ordre social que leur affecte le capitalisme ». Comment passer du fait indéniable, que le néo-libéralisme a un versant institutionnel qui limite, voire détruit, les espaces démocratiques conquis auparavant, avec ceci qu’il conviendrait plus que jamais de les « subvertir » ? Comment une telle « subversion » qui n’a pas été possible quand le résultat d’un vote voulait dire quelque chose, même de manière limitée, le serait-il devenu ? Quand ce résultat n’a plus qu’un effet anecdotique non comme signal social (ce qu’il conserve) mais dans les politiques réelles possibles ?

Je renvoie donc à mes textes précédents concernant ces conditions nouvelles, sur lesquels il n’y a de commentaire d’aucun des deux camarades. En résumant mes arguments pour le présent propos on peut dire que :

a) Les classes dominantes ont réussi à installer un « cercle de fer » à l’échelle mondiale, imposant la globalisation capitaliste et empêchant jusqu’à maintenant toute tentative d’en sortir, même d’une manière limitée. Le secours et le soutien apporté à ce modèle par de puissants pays émergents n’est pas pour rien dans sa solidité.

b) Ceci va de pair, partout, avec un rétrécissement drastique des marges laissées par les processus démocratiques bourgeois. Les États, en accompagnant la dépossession de leurs fonctions sociales et économiques, voire en les impulsant, se sont mis par là même largement à l’abri des turbulences politico-sociales. Si, par conséquence immédiate, cela élargit les effets de crises économiques majeures, cela réduit en même temps considérablement l’impact des aléas électoraux.

c) Ceci conduit à la confirmation de la mutation en nature de la social-démocratie laquelle vivait de ces marges. Si on tient compte en plus de l’affaiblissement du poids politique des représentations parlementaires (avec la « gouvernance » généralisée, dont l’UE donne un exemple caricatural) ; de la restriction des marges d’autonomie des institutions plus locales [24], cela nécessite la reprise à nouveaux frais de la relation à cette question spécifique des institutions démocratiques bourgeoises.

d) Dans des pays de vieille tradition parlementaire, cela bouleverse les relations au combat politique. Les aspirations populaires ont de plus en plus de mal à se projeter dans ce cadre. C’est le sens essentiel des mouvements répétés du type des « Indignés ». Mais même progressistes, ces mouvements se consument malheureusement en eux-mêmes. Sans doute parce que le sentiment diffus mais profond existe qu’il faudrait, pour réellement changer les choses, des confrontations bien plus radicales, qui mèneraient très loin dans l’affrontement. Or la confiance en la possibilité que celles-ci soient menées victorieusement est inexistante.

e) C’est que s’écarter tendanciellement du système représentatif traditionnel ne conduit nullement et automatiquement à une prise en charge d’un changement révolutionnaire de la société. Le problème est alors d’arriver à bâtir des partis qui évitent la marginalisation et dont la fonction d’aide au mûrissement des confrontations fondamentales soit attestée, même s’ils ne peuvent viser des ambitions plus grandes [25]. Ceci ne peut se faire qu’à la frontière entre le « social » et le politique, de la traduction politique du social et en retour de la fécondation politique de celui-ci. Mais là se pose une question de plus, nouvelle dans une certaine mesure. La mutation social-libérale exclut les PS de cette « unité » fondamentale [26], et cette exclusion est une condition sur le moyen terme de ne pas être soi-même pris dans le rejet « hors système ».

Tout le monde aura remarqué que dire cela ne fait pas avancer vers une solution à portée de main qui clarifierait la nature d’une politique révolutionnaire dans un pays comme le nôtre, après 1989 et dans l’état des rapports de force que nous connaissons. Mais on peut faire comme en mathématiques. Parfois, avant de trouver une solution à un problème, on s’attache d’abord à prouver qu’il y en a au moins une. Et parfois, on prouve qu’il n’y en a pas (c’est ce qu’on appelle un « théorème d’existence »). Les mathématiciens confrontés à une tel résultat négatif considèrent, à juste titre, que c’est une avancée majeure : plus la peine de chercher dans cette direction. Parvenir à subvertir au sens plein les institutions centrales de la bourgeoisie apparaît moins crédible que jamais. Cherchons donc ailleurs et autrement. Sans certitude d’y parvenir ? Pour sûr. Mais tant qu’un théorème d’inexistence à ce propos n’aura pas été prouvé, on peut continuer…

F. ironise sur certains débats « Phénix » qui discutent sans fin « stratégie révolutionnaire », alors que nous en sommes à 40 ans sans révolution en Europe. Manière dit-il de se défausser des débats plus immédiats. Mais non ! On voit bien qu’il y a un lien. Même sans avoir la moindre idée de la forme d’une très éventuelle révolution future, le débat avec le réformisme demeure d’une actualité quotidienne. Loin d’être une simple question de degré dans la radicalité, les divergences au sein de la gauche de la gauche portent sur une question bien plus profonde : dans quelle mesure est possible une « révolution citoyenne » (formule qui a pris la suite de la « révolution par les urnes » sans en changer substantiellement la nature) ?

F. dit qu’il faut : « la recherche d’unité de la gauche de transformation sociale et une confrontation avec d’autres, avec sa part de différenciation et sa part d’intégration d’éléments empruntés aux mille et une formes de résistance, d’expression et d’inventions démocratiques qui s’actualisent ici et là ». Mais, outre le fait qu’est discutable le terme admis par civilité de « gauche de transformation sociale », le fond du problème demeure. Il est des crispations sur les formules qui caractérisent désormais nombre de camarades du NPA. Pour eux-elles, la « ligne de classe » passerait par exemple entre ceux qui sont favorables à l’interdiction de tous les licenciements (les bons) et ceux pour qui « commencer par les entreprises qui font du profit » apparaît plus raisonnable (les autres). Ces crispations ne sont pas les miennes [27]. En réalité, même le quart du programme du FG ne pourrait entrer en application sans une confrontation aux allures de conflagration avec les institutions européennes. Ce qui laisse de la marge pour discuter de compromis acceptables sur les formules et les contenus. Et si possible pour des alliances, y compris électorales, voire des fronts si les conditions en sont données (avec comme point crucial l’indépendance vis à vis du PS).

Mais à l’intérieur de ces alliances éventuelles des divergences se maintiendraient. Pas principalement sur « les contenus » mais sur les moyens de les faire advenir. Et c’est justement la possibilité d’y arriver au final par « la subversion » des institutions qui est en cause. On ne peut pas oublier que quand en 2010 l’issue, même improbable, s’est présentée de parvenir à une victoire partielle « par la rue », c’est l’option (elle totalement illusoire) du référendum qui fut mise en avant par le PG. La « révolution par les urnes » n’est pas plus réaliste aujourd’hui qu’en 1981 ; elle l’est même beaucoup moins. Je suis sûr qu’avec Francis et Louis-Marie on devrait être largement d’accord avec ceci. Mais alors il faut remonter dans l’argumentation et mettre en discussion leur approche « des institutions ». Il est possible que l’argumentation soit chez eux essentiellement une position en réaction devant des tentations gauchistes infantiles, il est vrai particulièrement exaspérantes. Mais peut-être est-ce plus profond. C’est la fonction même du débat entre nous que de le savoir.

Samy Johsua
Annexe : Qu’est-ce qu’une institution ?

Les camarades du NPA excédés de la violence des oppositions et des tendances/fractions n’ont aucun secours à attendre de la Faculté et des débats académiques. Présentant à l’extérieur l’image d’une communauté dévouée au savoir, à l’intérieur, c’est le règne de la concurrence, des coups bas, de la mesquinerie. C’est dans cette « grande famille » que pourtant des théories se déploient et que, modestement, j’y ai forgé les miennes sur ce sujet. Pour les quelques uns/unes qui lient ces activités universitaires avec un engagement politique (il n’y en a plus beaucoup), ce dernier est un antidote.

Je vais donner un bref résumé de mes théories, mais il est hors de question pour moi de batailler pour qu’elle deviennent ne serait-ce qu’influente dans nos débats. La vie politique exige qu’on arrive à se mettre d’accord sur des tâches communes sans imposer à quiconque une vérité théorique quelle qu’elle soit. Au contraire, cet accord devrait être possible à partir de visions du monde différentes (et même de visions du marxisme…). Je développe ici uniquement ce qui peut faire comprendre « d’où je parle » comme on disait à une certaine époque.

Je reprend de plus quelques termes d’échanges privés avec Philippe Corcuff et Mikael Lowy (échanges toujours passionnants à mes yeux, qu’ils en soient remerciés).

Mon entrée sur la question est celle de Mary Douglas. Une anthropologue peu connue, et de plus une relativiste des plus radicales. Comme on le sait sans doute, le relativisme n’est pas ma tasse de thé. Mon intérêt pour elle est ailleurs. « Comment pensent les institutions » ? C’est son livre majeur [28]. On peut généraliser ce qu’elle y défend (c’est du moins ce que moi j’ai fait avec quelques collègues) de la manière suivante. Appelons « institution » toute structure qui conditionne les relations humaines. Toute, c’est toute. « La société » en est une ; mais aussi la famille ; une salle de classe ; un épisode d’échange verbal dans cette classe ; le métro aux heures de pointe ; un ascenseur ; un match de l’OM au Vélodrome.

L’idée est que toutes les actions humaines y seront alors soutenues par des techniques qui sont en partie générales et en partie propres à la dite institution. Et qu’elles seront encadrées (le bon terme est « déterminées », mais il peut apparaître trop fort pour certains) par des « règles » (il existe un débat sur la nature de cette notion de « règles » ; je laisse). Cette « technique située » est ce que Marcel Mauss appelle un acte « traditionnel efficace ». Parmi ces règles, il faut compter au premier chef des « contrats sociaux » spécifiques qui conditionnent, en général implicitement, les relations dans l’institution (par exemple, on essaye d’éviter le contact physique dans un ascenseur et même le regard direct ; aucune loi ne l’interdit explicitement ; mais implicitement « ça va de soi ». Je ne me prononce pas sur ce que ferait DSK…).

Comme dans la théorie mathématique des ensembles, on peut prendre l’institution ainsi définie « aussi petite » ou « aussi grande » qu’on le souhaite. Et celle-ci peut être elle-même appuyée sur d’autres institutions et en contenir d’autres. Une institution ainsi définie repose en effet sur un nombre plus ou moins grand d’autres institutions. Prenons le cas d’un échange entre un élève et son professeur lors d’un cours de mathématiques dans une classe habituelle. On sous estime souvent ceci que la dite classe, même fût-elle vide d’élèves et de maîtres, est une institution spécifique, dont la fonction est produite par toute une histoire. Que les seules caractéristiques qui sont les siennes contraignent étroitement la nature des échanges possibles. Par ailleurs, si l’on parle mathématiques, là encore, impossible de ne pas tenir compte de l’institution-mère (celle des mathématiques « savantes ») et de son influence dans l’échange. Bref, quel que soit l’exemple choisi, il est impossible de trouver une institution autosuffisante.

Une question surgit alors, parmi bien d’autres : comment les institutions s’influencent-elles les unes les autres ? Il est évident qu’elles le font : mais dans quelle mesure, dans quel ordre, avec quelle hiérarchie ? Existe-t-il une réponse définitive à la question de la manière dont elles s’influencent ou faut-il se résigner à construire à chaque fois une réponse ad hoc (par exemple pour le cas suivant : une mère et son enfant - institution familiale - dans un ascenseur - autre institution - avec un homme inconnu – division sexuelle…) ? Étant donné que je me méfie comme de la peste du « point de vue de Dieu », autrement dit d’une théorie en surplomb qui aurait réponse à tout, j’opterai plutôt pour le deuxième terme de l’alternative. Mais encore faut-il qu’il y ait…des ascenseurs comme machines, donc la techno-science et le capitalisme. Si certains se mettent en chasse des liens conditionnant ces niveaux entre eux, pourquoi pas ? Ils en ont le droit méthodologique, reste à savoir si ça a un intérêt scientifique ou même social.

Cette façon de prendre le problème est radicalement « sociale ». Il n’existe aucun moment, aucune situation, où une personne se trouverait hors institution et hors « contrat social ». Enfermé dans ma salle de bains je reste entouré d’objets qui portent une signification sociale, je porte une « image de moi », etc… On est toujours « assujetti » à une ou des institutions. Leur détermination peut être fugace (ascenseur) ou durable, et de plus cela dépend crucialement du contexte. Cette entrée a aussi l’avantage de donner une issue à la question de ce qui constitue au fond une « personne » donnée. Elle donne aussi la possibilité de l’existence de sa « liberté » de choix. Loin d’être un surgissement non questionnable et non déterminé, cette liberté, réelle, surgit en fait du jeu, contradictoire ou non, entre l’infinité des institutions. C’est une des raisons pour laquelle l’attribution obligatoire à une communauté donnée essentialise la personne et la prive de dimensions de liberté. De plus c’est le jeu entre institutions qui permet de penser l’épineuse question de leur évolution et donne un moteur possible pour cette dernière. En effet, aucune institution n’est donnée une fois pour toutes, toutes ont une histoire et un avenir.

On peut trouver des arguments pour ces propositions chez Ignace Meyerson (un psychologue un peu spécial) ; chez Lev Vygotsky (plus ou moins… ; c’est un marxiste russe des années 20-30, créateur de la « psychologie historico culturelle », devenu très influent aujourd’hui) ; chez Jean-Pierre Vernant (ethnologue marxiste spécialiste de la Grèce antique) et chez… Lucien Sève (eh oui !). Mais aussi chez Bourdieu. Chez lui aussi ce jeu entre institutions est constitutif de l’individu. Mais ensuite il en est comme « bloqué » une fois « constitué », ceci par « l’habitus » social qui le caractérise et qu’il « transporte » partout. Ou à l’autre bout du spectre chez Luc Boltanski (où au contraire le jeu est fluide et la création permanente, encore que ses élaborations récentes l’ont ramené vers des positions « équilibrées » dirions-nous). En allant plus loin encore, on trouverait Castoriadis et tous les types d’« instituants » (dont je ne partage pas toutes les thèses, mais laissons) pour qui ces relations institutionnelles se bâtissent sans limites (le capitalisme comme « le soviétisme » venant étouffer au premier chef cette capacité proprement humaine).

Les spécialistes auront repéré qu’il existe un débat pour savoir si « la structure » des structuralistes est la même chose que « les institutions » définies comme je le fais. Je laisse encore… Comment ces institutions proprement humaines se combinent-elles avec les données « naturelles », physico-chimiques et biologiques, ou écologiques au sens large, c’est de même une question cruciale si comme moi, on ne considère pas, à l’instar des relativistes, que « tout est social ». Je laisse aussi.

Et le marxisme ? Il est à l’évidence compatible avec ce qui précède à partir du moment où ce sont les relations que les humains tissent entre eux dans des institutions préalables qui sont à la racine de chaque comportement, et pas une quelconque « âme », « idée » ou « force vitale ». Comme le dit Marx, « Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; c’est inversement leur être social qui détermine leur conscience ». La question plus délicate est que le marxisme donne une réponse particulière à ce qu’est « l’être social », donc entre autres à la manière dont les institutions se hiérarchisent. Le risque d’un retour à « un point de vue de Dieu » est patent si on s’en tient à une hiérarchie reposant strictement sur les seuls rapports « en vue de la production ».

On peut améliorer beaucoup en s’en tenant à Marx lui-même et à beaucoup de ses successeurs en parlant de « rapports sociaux de production ». Lesquels ne se ramènent donc jamais à la seule relation économique, mais incluent d’autres niveaux – idéologiques, juridiques, etc. - comme condition même de la reproduction du système de production. Il restera la difficulté de passer de ceci aux relations dans un ascenseur, à la manière de se comporter face aux ronflements, aux manières de table, à l’existence ou non de chambres séparées, aux types de pratiques sexuelles, toutes relations sociales étudiées (parmi mille autres) par les sociologues et les historiens. De plus on tombe sur une difficulté bien connue de ces derniers. À une base « économique » donnée correspond dans la réalité historique attestée une masse de superstructures différentes. Les « chasseurs-cueilleurs » sont parfois des petits groupes villageois, parfois des cités entières (avec des chefs, des prêtres, etc…).

On peut avancer un pas plus loin, comme dans la présentation moderne du darwinisme, en affirmant la négation plus que le positif. Si les superstructures d’une société donnée ne sont durablement pas compatibles avec son mode de production dominant, la crise est certaine (la disparition de la société, la révolution, etc.). Mais on ne peut « expliquer » totalement en positif une superstructure donnée par la seule donnée de la base économique.

Ma réponse à ces problèmes est la suivante. Au lieu de chercher une relation verticale (infra/supra), il vaut mieux voir ça horizontalement. Certaines structures en conditionnent d’autres, ou au moins les influencent. Mais ceci en général d’une manière assez locale. D’autres ont une portée beaucoup plus étendue. Et deux seulement ont une portée absolument générale. Le rapport de production est l’un d’entre eux. L’autre, combiné ou/et concurrent, est la division sexuelle. Prenons par la négative : il est impossible de trouver une structure (ou « institution ») où l’influence du rapport « économique » serait totalement absente ; de même du rapport social sexuel. Même quand ces rapports ne sont pas immédiatement déterminants, ils sont présents.

Par analogie un peu exagérée, on a dans un cas un ordre uniquement local, comme celui qui règle les relations entre molécules dans un liquide, et dans l’autre cas un ordre à longue portée, comme dans un solide cristallin. Dans ce cadre général, le capitalisme marque une rupture historique décisive. Et d’ailleurs la description marxiste pleinement déployée est surtout spectaculairement efficace dans ce cas. Non seulement le capitalisme remporte par KO la victoire face aux anciens modes de production ; non seulement la portée de son influence devient encore plus universelle et concerne toutes les « institutions » presque sans exception ; mais encore ceci est vrai pour l’intensité de la détermination. Par exemple la marchandisation du monde qu’implique le capitalisme (il n’y a pas d’équivalent dans les autres modes de production par l’ampleur et la profondeur) modèle un nombre exponentiellement croissant des aspects de la vie sociale. Si bien qu’au final, son renversement devient la condition de tous les changements fondamentaux et généralisés pour un grand nombre d’institutions importantes.

Et quel rapport avec le débat de ce texte ? C’est qu’il faut traiter chaque « institution » avec sa spécificité. Les institutions centrales de l’État bourgeois par exemple. Retour à la politique.

Samy
JOHSUA Samuel
Notes

[1] Samy Johsua, « Le NPA et les élections ». Extraits :
« Il y a ainsi un enjeu dans chaque élection pour le npa, celui d’élargir son audience. Mais le résultat d’une élection compte, évidemment. Il est très étonnant de lire le terme « tactique » réservé à la seule attitude entre les deux tours. C’est l’ensemble de notre positionnement pour chaque élection (entre deux tours, mais aussi cadre d’alliance, type de propagande, mots d’ordre favorisés, etc…) qui est « tactique ». Relève de la « stratégie » des éléments bien plus fondamentaux. Que le PG, par exemple, défende une « révolution par les urnes » et que le NPA en tienne pour « une révolution par en bas » voilà un clivage de portée stratégique. Qui peut nous conduire d’ailleurs à boycotter les élections elles-mêmes. Ainsi celles de juin 68, qui avaient pour fonction exclusive de détruire la grève générale. A un niveau moindre, notre refus de participer aux exécutifs socialistes relève d’un choix de longue portée, d’un niveau « stratégique » si l’on veut. Le niveau « tactique », lui, conduit à ce que l’attitude qu’on adopte soit fonction d’une analyse de chaque scrutin, dans chaque situation politique. Ce serait un point de vue boutiquier de ne pas saisir que l’élection n’est pas qu’une tribune. C’est aussi à la fois une image déformée des rapports de force politiques et sociaux et un élément de ces rapports de force. »

[2] Samy Johsua, Débat « Phénix » – Compromis, accords, fronts : du nouveau sous le soleil ? , ESSF (article 21540) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[3] Samy Johsua, Vingt défis pour la pensée communiste du siècle débutant – Partie II, ESSF (article 21391), :
http://www.europe-solidaire.org/spi...
Extraits : « 20. Le gouvernement des travailleurs.
… c’est le même genre de préoccupations qui a sous-tendu les réflexions sur « la démarche de transition ». Celle-ci demande un programme qui puisse conduire des revendications principales à la mise en cause du capitalisme. Disons que c’est « la valise » qui renferme les écrits du programme, le contenu, le « quoi ». Mais il y faut « une poignée », autrement dit une réponse au « comment ». Une partie de la réponse au « comment » est donc « en miroir » (ça dépend de vous, de votre mobilisation). Mais si c’est la seule, à quoi bon un parti ? Si les masses sont en état de créer cette poignée là par leur propre mouvement, c’est donc que nous sommes entrés en fait en situation révolutionnaire, dans laquelle, si la démarche transitoire ne disparaît pas, elle change radicalement de nature. Mais sinon, comme doivent exister des revendications transitoires sociales, sociétales, écologiques, démocratiques, il doit exister une proposition « chapeau » d’ordre gouvernemental (la conséquence inévitable, comme dit l’IC). Pour l’Internationale Communiste, c’était l’appel à « tous les partis ouvriers » … à former un gouvernement de rupture avec le capitalisme. »

[4] Débat « Phénix » – Compromis, accords, fronts : du nouveau sous le soleil ? , ESSF (article 21540) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[5] Extraits : « Nous participons aux élections pour défendre nos idées, pour rassembler très largement la population autour de notre programme. Nous défendons la proportionnelle intégrale et réclamons d’avoir un nombre d’élus conforme au poids que nous avons dans la société.
De la municipalité au parlement, nous soutiendrons toutes les mesures qui amélioreraient la situation des travailleurs, les droits démocratiques et le respect de l’environnement. Nous contribuerons à leur mise en œuvre si les électeurs nous en donnent la responsabilité. Mais nous resterons fidèles à ce pourquoi nous luttons et ne participerons à aucune coalition contradictoire avec ce combat.
Nos élu-e-s refusent de cogérer le système. Ils s’opposent avec ténacité aux mesures antisociales et défendent bec et ongles, en toute indépendance des majorités de droite ou social-libérales, les intérêts des travailleurs et de la population. »

[6] « Phénix » : Une espace de réflexion stratégique... pour quelle politique ?, ESSF (article 21480) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[7] Débat Phénix : dégager sept tâches pour une stratégie de transition, ESSF (article 22139) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[8] Vingt défis pour la pensée communiste du siècle débutant – Partie II, ESSF (article 21391) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[9] La crise du NPA et les mots pour le dire , ESSF (article 21850) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[10] Cela suppose qu’on se mette d’accord sur ce qu’on appelle « institution ». J’ai mes propres repères théoriques sur la question, que je donne en annexe. En annexe, cela veut bien dire qu’on peut sans difficulté se passer de sa lecture pour suivre le déroulé des arguments principaux.

[11] Il est toujours bon de rappeler que les élus LCR au Parlement Européen, et même ceux de LO, votaient souvent en faveur des délibérations proposées !

[12] Voir sur ce point (entre autres) Un texte de Jacques Fortin, « Après le NPA ? le Parti Anticapitaliste… », ESSF (article 22610) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[13] Ayant moi-même été élu 6 ans et été membre d’un exécutif dirigé par le communiste Guy Hermier, je ne partage pas du tout le mépris (voire les insultes) qui sourdent de nos rangs vis à vis de celles et ceux qui essayent de faire au mieux comme élu-e-s. J’ai développé ceci dans d’autres textes que je ne reprends pas ici. Beaucoup d’élu-e-s sont ce que j’appelle des « militant-e-s de dossiers », cherchant à faire avancer une question particulière. Ils-elles y parviennent parfois. Mais, même quand ils-elles recherchent le lien avec les mobilisations externes, à partir du moment où ils-elles sont solidaires d’une politique plus générale, leur main gauche qui travaille à « faire avancer le dossier » finit par ignorer la main droite qui vote les délibérations libérales. Je suis ainsi resté stupéfiait quand MG Buffet semblait sincèrement ulcérée que son bilan aux Sports ait été jeté aux orties en 2002 par les électeurs, qui eux jugeaient globalement la gauche plurielle. Bien entendu, plus on vise haut dans la hiérarchie des institutions électives, plus cette dissociation est forte et la main gauche presque paralysée. Mais ces jugements n’ont rien à voir avec une mise en cause personnelle des élu-e-s : c’est un effet de système. D’où le retour à la question : pourquoi serait-ce différent juste parce qu’on aurait remplacé Buffet par LM. ?

[14] Il faudra bien un jour reprendre le débat sur 36. Certes il s’agit d’un cas (exceptionnel et même unique en France) de combinaison complexe entre processus de rupture sociaux et électoraux. Mais quand on parle de 36, est-ce de la victoire du Front Populaire ou de la grève générale ? Ou des deux ? Je défends d’une manière constante que, en France, ce n’est jamais la « perspective politique » qui crée le mouvement, mais l’inverse. C’est 68 qui permet l’Union de la Gauche (une fois éliminée la portée révolutionnaire de la grève générale) et ensuite 81. Pas l’inverse. Et 36 n’échappe pas à la règle. C’est 34 qui ouvre le bal et donne la possibilité électorale de ce qui est aussi un dévoiement par l’alliance avec le Parti Radical. Alliance très modérée sur le programme ; les 40 heures et les congés payés proviennent de la grève générale elle-même comme on le sait. De plus, c’est le même gouvernement de Front Populaire qui défendra la non-intervention en Espagne. Et c’est la même Chambre qui votera les pleins pouvoirs à Pétain. Il est bon de s’en souvenir.

[15] Samy Johsua, Vingt défis pour la pensée communiste du siècle débutant – Partie I, ESSF (article 20726) :
http://www.europe-solidaire.org/spi....

[16] Daniel Bensaïd, [La Commune, l’Etat et la Révolution], ESSF (article 7176) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...
(le début de la citation est de Marx - SJ), « En un mot, toutes les fonctions publiques, même les rares fonctions qui auraient relevé d’un gouvernement central devaient être assumées par des agents communaux et placées par conséquent sous la direction de la Commune. C’est entre autres choses une absurdité de dire que les fonctions centrales, non point les fonctions d’autorité sur le peuple, mais celles qui sont nécessitées par les besoins généraux et ordinaires du pas, ne pourraient plus être assurées. Ces fonctions devaient exister, mais les fonctionnaires eux-mêmes ne pouvaient plus, comme dans le vieil appareil gouvernemental, s’élever au-dessus de la société réelle, parce que les fonctions devaient être assumées par des agents communaux et soumises par conséquent à un contrôle véritable. La fonction publique devait cesser d’être une propriété personnelle. ». Il ne s’agit donc pas d’interpréter le dépérissement de l’Etat comme l’absorption de toutes ses fonctions dans l’autogestion sociale ou dans la simple « administration des choses ». Certaines de ces « fonctions centrales » doivent continuer à exister, mais comme fonctions publiques sous contrôle populaire. En ce cas, le dépérissement de l’Etat ne signifie pas le dépérissement de la politique ou son extinction dans la simple gestion rationnelle du social. Il peut signifier aussi bien l’extension du domaine de la lutte politique par la débureaucratisation des institutions et la mise en délibération permanente de la chose publique.
…/…
Cette forme, il faut le souligner tant il est facile de l’oublier, reste celle du suffrage universel et de la représentation territoriale des communes et des quartiers : « La Commune devait être composée de conseillers municipaux des divers arrondissements (comme Paris en a été l’initiateur et le modèle, ce sera notre référence) élus au suffrage de tous les citoyens, responsables et révocables à tout moment. La majorité de cette assemblée était naturellement composée d’ouvrier ou de représentants reconnus de la classe ouvrière. ». Dans l’Adresse du 31 mai 1871 au Conseil général de l’AIT, Marx insiste : « le suffrage universel devait servir au peuple constitué en communes » et « rien ne pouvait être plus étranger à l’esprit de la Commune que de remplacer le suffrage universel par une investiture hiérarchique ». Il n’envisage pas de restriction sur critères sociaux du droit de vote. Il exprime seulement sa conviction que la majorité politique correspondra « naturellement » à la majorité sociale. Quant au rapport des représentants aux représentés, des mandataires à leurs mandants, il est celui d’un contrôle permanent concrétisé par les principes de responsabilité et de révocabilité. Les représentants ont en permanence à rendre compte de leurs actes et en cas de litige avec les représentés, à remettre en jeu leur mandat.

[17] Jacques Fortin montre bien la complexité de la question à propos de la revendication du droit au mariage homosexuel (texte cité).

[18] Ce terme ne doit pas être pris trop à la lettre. On doit « détruire » l’armée bourgeoise, mais il est peu probable que cela signifie qu’on ne récupère ni les armes ni les bâtiments ni le réseau de satellites. Voire même des gradés, comme au Portugal lors de la révolution des œillets ou…dans l’Armée Rouge de Trotski.

[19] Même dans ce cas on peut quand c’est possible, expérimenter de l’intérieur des politiques partiellement alternatives, comme ce fut les cas avec les « budgets participatifs » au Brésil. Tout en se souvenant que la limite en fut vite atteinte. Qu’en tout état de cause ça n’a jamais concerné qu’une petite partie des budgets en question, et qu’enfin toute extension au delà des municipalités s’est révélée impossible. Gageons qu’il en sera de même dans le futur, malgré les vains souhaits de certains.

[20] Comme dit Marx dans Le Manifeste, « Le résultat véritable de leurs luttes est moins le succès immédiat que l’union grandissante des travailleurs »

[21] Voir par exemple : Guillaume Légard, Quelques réflexions sur les questions stratégiques, ESSF (article 20748) :
http://www.europe-solidaire.org/spi...

[22] Jacques Fortin, « Après le NPA ? le Parti Anticapitaliste… », ESSF (article 22610) :
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[23] Voir Enzo Traverso, L’histoire comme champ de bataille, Paris, La Découverte.

[24] Chez nous, conseils généraux, départementaux, grandes municipalités. De par la loi, la plus grande partie de leur budget est préformatée d’en haut. Il n’y a sérieusement et sur l’essentiel aucune différence possible entre gestions de droite et de gauche, et d’ailleurs, aucune différence dûment constatée. J’ai indiqué ailleurs que le débat devrait être sérieusement ouvert quant à notre participation à, la gestion de municipalités de taille moyenne (dans mon texte « vingt défis »).

[25] Débat décisif abordé par nombre de contributions « Phénix » ; impossible de les citer toutes.

[26] Les consignes de vote, les unités d’action avec ce genre de partis sont une toute autre question.

[27] Il y a dans toutes les fractions du NPA une révérence étonnante quant à la lettre des programmes. Talmudique pourrait-on dire. Pourtant on devrait savoir depuis le temps que si un mauvais programme unitaire signe en général d’emblée l’échec, un bon ne garantit rien. Pas même le fait de demander des comptes s’il est trahi. En général, seule domine la désespérance devant les promesses non tenues. D’un autre côté si la justesse et la pureté d’un programme faisait office de jugement divin, avec la masse de sectes qui en ont en produit à jet continu (et continuent à le faire, y compris au sein du NPA), on aurait bien fini par trouver la pierre philosophale. Mais voilà : la révolution russe elle-même s’est réalisée sur trois mots d’ordre (« La paix, le pain, la terre ») dont aucun n’était socialiste ni même anticapitaliste. Et ceci après que le parti de Lénine ait, sur son instigation avec ses « thèses d’avril », jeté aux orties son propre programme. Là aussi, depuis le temps on devrait savoir que ce qui compte c’est le « moment stratégique » comme le nommait Bensaïd, la combinaison de mots d’ordre programmatiques et de conditions propres à la période. Et sa traduction en moyens de les réaliser (en octobre 1917, « Tout le pouvoir aux Soviets »).

[28] Mary Douglas, How Institutions Think (1986) [publié en français sous le titre Comment pensent les institutions, Éd . de la Découverte, 1999].Louis Maris Barnier
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"les institutions" : piège ou chance ?  Empty Les révolutionnaires et les institutions

Message  Antonio Valledor Lun 2 Déc - 20:24

" Récupérons cette orientation fondamentale : les marxistes ne peuvent s’engager qu’à « faire tout ce qu’ils peuvent dans l’intérêt des travailleurs » et, en même temps, expliquer que dans la mesure où l’Etat et les leviers de l’économie restent dans les mains de la bourgeoisie, les possibilités de leur politique municipale sont extrêmement limitées.

La même chose s’applique, et même d’une manière plus accentuée, dans le cas d’une participation des révolutionnaires aux parlements nationaux. Les forces de gauche devraient faire prendre conscience de ces questions et obstacles réels à leurs électeurs et à la population. Comme disait Marx, il est fondamental d’apprendre à lutter sans illusions."

http://www.avanti4.be/debats-theorie-histoire/article/les-revolutionnaires-et-les-institutions

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