Le Pen, vulgaire plagiaire
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Le Pen, vulgaire plagiaire
Les Lecteurs Préfèreront Toujours L'original À La Copie !
Peu d'anars le savent mais Jean-Marie Le Pen a consacré son mémoire de DES de Sciences Politiques (Diplôme d'Etudes Supérieures) au mouvement anarchiste. "L'oeuvre", qui a en fait été écrite à deux, avec un certain Jean-Loup Vincent, et produite en 1971, s'intitule "Le Courant anarchiste en France depuis 1945". Un scan de mauvaise qualité de ce mémoire est disponible ici:
http://anarlivres.free.fr/pages/documents/memoire_JMLePen.pdf
Cet ouvrage, qui paraît au premier abord fort documenté et assez objectif connaissant l'un des personnages qui l'ont écrit, se révèle en fait n'être par endroits qu'une paraphrase voire un simple copié-collé d'ouvrages libertaires, laissant planer le doute sur le reste du mémoire.
« L'inspiration » principale semble être Maurice Joyeux, militant de la FA et notamment deux de ses ouvrages, L'anarchie et la révolte et la jeunesse et L'hydre de Lerne, paru récemment à cette époque (respectivement 1970 et 1967). Le mémoire s'apparente parfois à un copié-collé de chapitres entiers de L'hydre de Lerne. Concernant L'anarchie et la révolte..., le plagiat est moins flagrant, il s'agit plutôt de paraphrases (peut-être est-ce dû au fait que le livre est cité dans la bibliographie, contrairement à l'Hydre de Lerne qui n'a pas cette chance, le plagiat étant probablement trop évident).
Qui de Jean-Marie Le Pen ou Jean-Loup Vincent a commis le plagiat ? Un seul ? Les deux ? Il est difficilement concevable que, dans une écriture à quatre mains, l'un des co-auteurs, qui est censé avoir lu un minimum sur le sujet, ne se soit pas aperçu du plagiat de l'autre. On ne saura probablement jamais, mais le fait est là, cette « oeuvre » que Le Pen affiche fièrement dans son CV au côté de ses autres ouvrages, tels que Les Français d'abord ou La France est de retour, n'est en grande partie qu'un vulgaire copié-collé.
Les ouvrages utilisés pour la comparaison sont :
- L'hydre de Lerne, Maurice Joyeux, 1967, Editions du Monde libertaire
- L'anarchie et la révolte et la jeunesse, Maurice Joyeux, 1970 (n'ayant pas pu me procurer une version papier de l'édition de 1970, les références de pages citées correspondent en fait à une version revue et augmentée: L'anarchie dans la société contemporaine, paru en 1977)
L'anarchie et la révolte et la jeunesse est consultable ici: http://raforum.apinc.org/bibliolib/HTML/Joyeux-AnarchieRev.html
- Noir et Rouge, anthologie 1956-1970, Editions Spartacus
Afin de mettre en lumière l'oeuvre de plagiat de Jean-Ma et de son collègue, la suite de cet article ne sera qu'une série d'allers-retours entre les textes originaux et le Mémoire. Quand les extraits sont relativement longs, les passages originaux qui se retrouvent plus ou moins tels quels dans le mémoire sont soulignés.
Si des personnes débusquent d'autres passages volés dans d'autres livres ou revues, je les invite à le signaler afin mettre à jour l'ampleur réelle du crime.
Le travail de plagiat commence à la page 9 du Mémoire.Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p29
« avant la Dernière Guerre mondiale, deux idéologies se partageaient le mouvement révolutionnaire en marge des grands partis politiques de gauche : l'idéologie trotskyste et l'idéologie anarchiste. »
Le Pen et Vincent, Mémoire, p9
« Entre les deux guerres mondiales, deux idéologies se partageaient le mouvement révolutionnaire en marge des grands partis politiques de gauche : l'idéologie trotskiste et l'idéologie anarchiste. »Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p30-31
« Au lendemain de la Première Guerre mondiale, le mouvement anarchiste avait eu son heure de gloire grâce surtout à ses militants syndicalistes occupant des responsabilités importantes. Ils avaient été l’élément décisif provoquant l’éclatement syndical et, sans d’ailleurs s’en rendre compte, ils tirèrent du feu des marrons que les communistes s’empresseront de s’approprier. Cela avait été rendu possible par de nombreuses défections produites dans leurs rangs, dues à l’attraction formidable de la Révolution russe sur le mouvement ouvrier international.
Entre les deux guerres, les anarchistes étaient éparpillés dans une poussière de groupes, chacun se spécialisant sur un thème humanitaire. Cette dispersion affaiblissait le noyau central constitué par l’Union anarchiste dont le journal était Le Libertaire. La guerre d’Espagne devait lui redonner de la vigueur, mais l’impossibilité de créer des structures d’encadrement solides, l’individualisme et le personnalisme, qui étaient ses maladies infantiles, ne lui permirent pas de tirer de cet événement providentiel pour sa propagande tout le parti que cela supposait. ? Accolée aux partis trotskystes et à la gauche révolutionnaire, l’Union anarchiste végétait dans un « Front révolutionnaire », frère rachitique du Front populaire. Ni les trotskystes de tout poil ni les anarchistes réunis dans des groupes syndicalistes « Lutte de classes », groupes d’opposition aux directions des grandes centrales ouvrières, n’avaient joué le rôle primordial au cours des journées exaltantes de juin 1936 ; ou plutôt, les anarchistes qui tiraient de leur personnalisme congénital quelques possibilités d’action n’y avaient joué qu’un rôle individuel, parfois important mais sans répercussion directe sur l’évolution de l’idéologie politique qu’ils étaient sensés représenter.
Et en fin de compte, le grand ramassage des militants ouvriers de 1939, prélude de la Seconde Guerre mondiale et conséquence directe du pacte germano-soviétique, s’il avait permis, sous le prétexte commode de l’anticommunisme, de démembrer le mouvement révolutionnaire d’extrême gauche, n’avait écrémé chez les anarchistes, comme chez les socialistes révolutionnaires de tout poil, que de minces effectifs. Ceux-ci devaient, pendant quatre ans, croupir à Montluc, à Vencia, à Lodève, à Mauzac, etc. »
Le Pen et Vincent, Mémoire, p 9-10
« Après la première guerre, les anarchistes avaient joué un rôle important grâce surtout à leurs militants syndicalistes. Ils avaient été les éléments décisifs de l'éclatement syndical, mais les marrons qu'ils tirèrent du feu le furent au profit des communistes, maîtres de la CGTU. Ils s'éparpillèrent alors dans une multitude groupes, chacun de ceux-ci ayant son thème particulier. Le courant anarchiste se partageant inégalement entre la Fédération anarchiste de langue française et l'Union anarchiste qui éditait "le Libertaire".
Ni le printemps syndical de 1936, ni la guerre d'Espagne, deux évènements capitaux, deux occasions exceptionnelles pour un mouvement révolutionnaire ne furent exploités par un groupement paralysé par l'individualisme et une aversion profonde pour toute forme d'organisation.
Alliés aux trotskystes et aux syndicalistes révolutionnaires, les anarchistes animaient un Front Révolutionnaire, pâle reflet du Front Populaire. Leurs militants, réunis dans les groupes d'opposition "lutte de classe", n'eurent qu'une influence limitée.
C'est dans le registre humanitaire que quelques individualités réussirent le mieux à soulever de puissantes vagues d'agitation lors des campagnes en faveur des anarchistes américains Sacco et Vanzetti et des anarchistes espagnols Ascaso, Durruti et Oliver.
En 1939, les campagnes pacifistes et notamment l'édition du tract "Paix immédiate" devaient faire subir les rigueurs de la loi à plusieurs militants. Ceux-ci croupirent pendant la guerre dans des forteresses comme Montluc ou des camps comme Vencia, Lodève ou Mauzac. Ils n'en sortiront qu'à la Libération, parfois même longtemps après. »
Maurice Joyeux, L'hydre de Lerne, p2
« Et, le 21 décembre 1944, Le Libertaire reparaissait. Il était l'organe du mouvement libertaire, qui était lui-même « l'émanation des deux courants libertaires qui existaient avant la guerre, la Fédération anarchiste et l'Union anarchiste », nous apprenait ce premier numéro, dont l'éditorial se terminait par cette belle phrase :
« Dans une ambiance fraternelle, grâce à la droiture et au dévouement de chacun, nous travaillerons tous, pour une même cause. » »
Le Pen et Vincent, Mémoire, p11
« A Paris, les militants clandestins se réunissent à la Bourse du Travail. Leurs travaux aboutirent, le 21 décembre 1944, à la parution du "Libertaire", nouvelle mouture de l'ancien titre fondé en 1895 par Louise Michel et Sébastien Faure. Il se proclamait "organe du Mouvement libertaire, émanation des deux courants libertaires qui existaient avant la guerre, la Fédération anarchiste et l'Union Anarchiste". L'éditorialiste concluait : "Dans une ambiance fraternelle, grâce à la droiture et au dévouement de chacun, nous travaillerons tous, pour une même cause." »
Joyeux, L'hydre de Lerne, p3-4
« C'est le 9 octobre 1945 que fut créée, à la salle des Sociétés savantes, la Fédération anarchiste.
L'accouchement fut difficile. Trois groupes devaient s'affronter avec passion. D'une part, les militants pacifistes ou individualistes, qui désiraient le retour aux facilités agréables et de bon ton de l'avant-guerre; d'autre part, les militants ouvriers, qui voulaient créer un instrument de combat qui soit le fer de lance du mouvement ouvrier révolutionnaire, et, entre ces deux factions qui s'opposaient ans aménité, les « sages », dont certains, comme Lapeyre, Laisant, Vincey, avaient été parmi les premiers à reconstituer le mouvement, et, tout en désirant le voir évoluer vers une organisation plus rationnelle que par le passé, tenaient compte de l'état d'esprit des militants et se refusaient à régler les problèmes à l'aide de motions de congrès. Ils préconisaient un organisme souple, susceptible de favoriser une évolution sagement digérée.
Au cours de cette conférence, le ton devait rapidement monter. Une partie de l'assistance quittait la salle, et nous fûmes à deux doigts de la rupture. C'est alors que quelques militants se réunirent pour rédiger une motion de conciliation (la première d'une longue lignée), et, le lendemain, en l'absence de la faction la plus dure, cette motion était votée à l'unanimité. La Fédération anarchiste était née.
Cette motion « chèvre-chou» dotait l'organisation de structures bizarres qui étaient pratiquement inappliquables. Elle créait un organisme national, le Mouvement libertaire, fédérant trois tendances représentées par trois journaux:
- Ce qu'il faut dire, qui rassemblait Louvet et ses amis;
- Le Combat syndicaliste, organe de la minorité anarcho-syndicaliste de la CGT, animé par Pierre Besnard ;
- Le Libertaire, organe de la Fédération anarchiste, créé par une autre motion du Congrès. »
Mémoire , p11-12
« C'est le 9 octobre 1945, dans une salle vouée aux mouvements plus riches d'espoir que d'effectifs, la Salle des Sociétés savantes, que naquit la Fédération anarchiste. quelques jours plus tard, Voline mourait.
L'accouchement avait été délicat. Trois tendances s'y étaient affrontées: les militants pacifistes et individualistes, hostiles à toute contrainte ou discipline, et qui ne voyaient dans la Fédération qu'un lieu de rencontre, les militants ouvriers, qui espéraient créer le fer de lance du mouvement ouvrier révolutionnaire, et, entre ces deux factions qui ne se ménageaient pas,un groupe composé surtout des premiers fondateurs. Ceux-ci désiraient, certes, évoluer vers une organisation plus rationnelle et plus efficace que par le passé, mais, tenant compte de l'état d'esprit des militants, ils se refusèrent à régler le problème de façon autoritaire et préconisèrent un organisme souple. On se mit d'accord sur une motion de "synthèse". La Fédération anarchiste était née.
Le Mouvement Libertaire fédérait trois tendances représentées par trois journaux: "Ce qu'il faut dire", de Louvet, "Le Combat syndicaliste", organe de la minorité anarcho-syndicaliste de la CGT animé par Pierre Besnard, et enfin "Le Libertaire", organe de la nouvelle Fédération anarchiste. »
Le travail de moine copiste de Le Pen et de son acolyte oblige à reproduire entièrement le chapitre intitulé « La première Fédération anarchiste » de L'hydre de Lerne de Joyeux (p5 à . Les parties soulignées, afin de montrer l'ampleur du plagiat à cet endroit, sont les morceaux recopiés tels quels ou quasiment tels quels dans le mémoire.« Née à la fin de 1946, la Fédération anarchiste va se développer pour atteindre son point de saturation vers 1950. Son journal, devenu hebdomadaire, tire alors à 35 000 exemplaires et son bouillonnement est réduit; nous comptons plus de 2 000 abonnés, et certains numéros spéciaux, en particulier celui de la grève de Renault en 1947, atteignent 100 000 exemplaires. La souscription a de quoi faire rêver tout administrateur. Dans toutes les Communes de la Seine, de Seine-et-Oise, des groupes se montent. Dans toutes les grandes villes de France, des camarades se rassemblent. Cependant, lorsqu'on examine cette poussée, il faut faire trois constatations. D'abord, nous bénéficions du renouveau politique apporté par la Libération. Ensuite, ces groupes vont rassembler des curieux autour de vieux militants souvent fatigués, et l'euphorie nous fera baptiser groupes des rassemblements éphémères qui n'auront aucune vie militante réelle.
De cette période il est resté ce type de militants que nous connaissons encore aujourd'hui. C'est généralement un camarade estimable, connu de la population de son bourg, sa qualité d'anarchiste le singularise. Enfant du pays, il est accepté de tous comme un élément du folklore. On le voit à la Libre-Pensée, à la Ligue des Droits de l'Homme, dans l'une des unions locales de syndicat. Il s'occupe de la jeunesse, parfois des organisations culturelles. Il est partout et nulle part; il ne joue aucun rôle réel dans le domaine de la pensée anarchiste. En général, au congrès, lorsqu'il y vient, il est sévère, pur, intransigeant sur les grands principes ; dans sa localité, il vote à gauche, traficote, en tout bien, tout honneur d'ailleurs, avec les cocos ou les socialistes. Souvent usé jusqu'à la corde, il est incapable de rassembler autour de lui les partisans d'un combat révolutionnaire. Il trouve son auditoire à travers tout ce bla-bla humanitaire et moral qui est le lot des communistes et des socialistes de la province et qui crée entre eux et nous une unité factice qui vole en éclats dès que tout ce bavardage doit se traduire en actes qui engagent.
C'est là que va se créer cette équivoque qui nous fit tant de mal, et qui est en train de faire crever notre mouvement.
Bien sûr, le problème qui se posait alors, comme celui qui se pose aujourd'hui, était le problème de l'assignation de ces néoanarchistes, et ce problème conditionnait tout l'avenir. C'est pour permettre cette assignation que des organismes furent créés. Ils furent au nombre de trois.
Le premier fut un comité national, le deuxième un comité de presse, pour faire le journal, le troisième une organisation de jeunesse destinée à infuser aux nouveaux adhérents les rudiments de la doctrine anarchiste. Enfin, le vote majoritaire fut introduit dans toutes les assises de notre Fédération.
Quels étaient alors les courants de pensée dans notre mouvement?
D'abord un courant individualiste, qui n'avait rien à voir avec les théories de Bontemps, qui ne joua aucun rôle et appartenait ce groupe, volontairement écarté à la Libération.
Cette tendance était représentée par Vincey et, avec des nuances par Arru. C'était une pensée qui se réclamait de l'individualisme anarchiste américain, qui admet le choix collectif mais qui propose l'action et la responsabilité individuelle pour accomplir l'acte déterminé collectivement. C'est par excellence l'anarchisme de forte personnalité, et Vincey, à Paris, dans sa spécialité, l'économie, Arru, à Marseille, devaient jouer un rôle important dans le développement de ces idées. C'est d'ailleurs parfois plus un état d'âme qu'une théorie, et nombreux sont ceux de nos camarades qui s'en sont rendu compte.
Il y avait un fort courant communiste-libertaire. Mais expliquons-nous sur ce courant. Accoler à notre proclamation d'anarchiste le mot communiste remonte au siècle dernier, Proudhon nous avait mis en garde contre le « communisme intégral» et avait inventé, pour définir son socialisme dans la diversité, le terme d'«équivalence», qui mériterait une étude. C'est, je crois, de tous les syndicalistes qui à cette époque puisaient leurs enseignements chez Proudhon, Eugène Varlin qui, le premier, employa le terme communiste en y ajoutant le qualificatif de libre. Bakounine l'emploiera puis le réfutera tour à tour. Il l'utilisera pour l'arracher des mains de Marx, mais il le réfutera dans une page célèbre lorsqu'il comprendra l'équivoque. Il sera repris par Sébastien Faure, mais le contenu que lui donnera celui-ci sera bien différent de celui qu'on lui donne aujourd'hui, et ce sens sera généralement celui qu'on acceptera jusqu'au lendemain de la guerre de 1914-1918.
Pourtant, dès l'amnistie, un événement considérable, la Révolution russe, va peser sur notre mouvement libertaire, et pour certains le communisme libertaire ne va plus être une addition de pensées à travers Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Grave, Faure et Besnard, qui aboutit à une espèce de fusion des théories sociales des anarchistes, mais, au nom de l'efficacité symbolisée par la réussite de la révolution russe, un compromis entre le marxisme et l'anarchisme. Et ce sera la deuxième tête de l'hydre que nous couperons et qui repoussera chaque fois.
C'est en jouant de cette équivoque que ce fort courant, que j'ai signalé plus haut, dans la Fédération anarchiste des années qui ont suivi la fin de la dernière guerre, s'emparera du mouvement et présidera (déjà) à sa dissolution. Mais on peut dire que, de 1920 à nos jours, les tentatives de désagrégation de notre mouvement ont été menées sous le prétexte d'efficacité, sur l'ambiguïté voulue par certains du terme « communisme libertaire », ce qui explique que plusieurs d'entre nous qui sommes réellement communistes libertaires dans le sens où l'entendaient Varlin, Bakounine, Kropotkine, Faure et quelques autres en ont été réduits à se proclamer « socialistes libertaires », ce qui entretenait une autre confusion, également peu ragoûtante, ou plutôt "collectivistes libertaires", ce qui nous rapprochait de l'anarcho-syndicalisme.
Enfin, une troisième tendance agitait notre Fédération anarchiste. C'était la tendance anarcho-syndicaliste. La pensée anarcho-syndicaliste est née avec le mouvement anarchiste. Nous lui devons depuis Proudhon et la Première Internationale les pages les plus glorieuses de notre histoire.
En France, elle fut extrêmement vivace (mais non pas dominante, comme on le dit complaisamment) dans la CGT d'avant-guerre. C'est Pierre Besnard qui devait au congrès de Lille en 1921 lui donner une doctrine à travers le magnifique discours qu'il prononça à cette occasion.
Mais on avait déjà vu se dessiner ses contours pendant la fameuse controverse qui, en 1907, avait opposé Malatesta à Monatte. Après la scission, Besnard fut le premier secrétaire anarchiste de la CGTU communiste. Plus tard il va fonder la CGTSR, organisation anarcho-syndicaliste, et alors deux mouvements vont se dessiner. D'une part, coupée des masses restées soit à la CGT réformiste, soit à la CGTU communiste, la CGTSR va dépérir.En 1936, elle n'a aucune influence sur le mouvement d'occupation d'usines. Par ailleurs elle va entrer en conflit latent avec l'Union anarchiste qui la concurrence de par son caractère social et dont de nombreux militants sont restés dans les organisation syndicales dites réformistes. »
Le Pen et Vincent, peu inspirés, recopient. A noter, tout de même, une tentative d'originalité: le paragraphe sur le communisme libertaire est déplacé à la fin de la partie au lieu d'être au milieu. Anticommunisme primaire, quand tu nous tiens... Pages 12 à 15 du Mémoire.
« La Fédération va se développer alors jusqu'en 1950 où elle atteindra son maximum. Déjà, en 47, au congrès d'Angers on annonce que les effectifs ont triplé en un an. Le journal, devenu hebdomadaire, tire à 35 000 exemplaires, dont 2 000 sont abonnés. Certains numéros spéciaux comme celui consacré en 1947 à la grève de Renault, dépassent 100 000 exemplaires.
Dans toute la région parisienne et les grandes villes, des groupes se créent, portant très souvent les noms des grands doctrinaires ou des personnages célèbres de l'anarchie: Proudhon, Bakounine, Elisée Reclus, Sacco-Vanzetti, Henry.
En vérité, ces groupes seront souvent des rassemblements éphémères.
Seuls sont durables ceux qu'animent des militants de qualité. Souvent en effet, la valeur du militant "anarchiste" est médiocre. L'anarchiste est souvent un personnage parfaitement honorable, mais fier de son singularisme. Il est accepté de tous comme un élément du folklore. C'est "l'anar". Il fréquente la Libre-Pensée, la Ligue des Droits de l'Homme, la LICA, l'union locale du syndicat. Au congrès, il est pur et dur, intransigeant sur les grands principes ; sur le plan local, il est plus souple, se complaisant dans les thèmes "de gauche" qui créent avec communistes et socialistes une unité apparente qui vole en éclats dès qu'on quitte le terrain du bavardage ou des bonnes intentions pour passer aux actes. Il s'agit moins d'un militant révolutionnaire que d'un sympathisant assez inefficace.
Après la guerre, de nombreux jeunes chez qui les contraintes de l'occupation avaient créé un violent désir de libération individuelle firent dans ces groupes des passages turbulents mais de courte durée. L'assimilation de ces néo-anarchistes posait à la Fédération des problèmes difficiles. Pour tenter de les résoudre, on créa trois organismes : un Comité National, un comité de Presse, une organisation de jeunesse. Le vote majoritaire fut introduit dans toutes les assises de la Fédération pour tenter de dégager une direction qui soit la résultante des tendances divergentes du mouvement.
Quels étaient donc les courants de pensée qui constituaient l'anarchisme d'après-guerre?
D'abord un courant individualiste, représenté par des hommes comme Vincey et Arru. Leur pensée se réclamait de l'individualisme anarchiste américain qui admet le choix collectif mais qui propose l'action et la responsabilité individuelle pour accomplir l'acte déterminé collectivement. C'est par excellence l'anarchisme des fortes personnalités. Vincey, à Paris, dans sa spécialité, l'économie, Arru, à Marseille, devaient l'un et l'autre jouer un rôle important dans la diffusion de ces idées. L'individualisme était par ailleurs, pour beaucoup de ceux qui se croyaient anarchistes, plus un état d'âme qu'une théorie. Incapables de la moindre cohésion pourtant recommandée par Stirner, les individualistes se retireront sur la pointe des pieds pour former des groupes autonomes qui ne seront pas sans influence sur l'avenir. Les idées d'Emile Armand, en particuliers sur la libération sexuelle, feront le chemin que l'on sait.
Un autre courant fut celui de l'anarcho-syndicalisme. La pensée anarcho-syndicaliste est née avec l'anarchisme, qui lui doit depuis Proudhon et la première Internationale les plus belles pages de son histoire. Sans avoir l'importance qu'elle eut en Espagne, où l'anarchisme l'emporte sur le communisme chez les masses populaires, la pensée anarchiste fut en France extrêmement vivace, bien qu'elle ne fut jamais dominante, contrairement à ce qui est parfois soutenu, dans la CGT d'avant 14. Elle fut exprimée au congrès de Lille en 1921 par Pierre Besnard, mais elle avait déjà été plus qu'esquissée dans la farouche controverse qui oppose en 1907 Malatesta à Monatte. après la scission de la CGT, Besnard fut le premier secrétaire de la CGTU. Battu l'année suivante, il fonda la CGT-SR dont l'influence ne cessera de décroitre jusqu'en 36 et qui entrera en conflit même avec l'Union anarchiste.
Après 45, les anarcho-syndicalistes se désintéresseront très vite de la Fédération et porteront leurs efforts sur la création de la Confédération Nationale du Travail.
Le communiste libertaire constitue le troisième courant. Le mot communisme ne doit point ici tromper. Il contient, en effet, une source importante d'équivoque. Pour certains, le mot lui-même appartient au vocabulaire de l'Anarchie. Il fut couramment utilisé par les anarchistes et représentait pour eux en quelque sorte la somme de leurs théories sociales. Pour d'autres, éblouis par l'efficacité des techniques révolutionnaires qui avaient déclenché et conduit la Révolution russe, il était un compromis nécessaire entre marxisme et anarchisme.
Cette équivoque sera à l'origine de violents conflits à l'intérieur de la Fédération et la conduira à sa désagrégation quand Fontenis l'emportera en 1951.
Ce qui devait causer la disparition de la Fédération née après la deuxième guerre mondiale, ce fut moins la lutte des tendances que le système majoritaire introduit dans les Congrès pour régler les litiges. Rappelons que la Fédération s'était constituée dans l'ambition de faire du nouveau, d'échapper à l'impuissance et à la stérilité bavarde qui l'avait caractérisé avant la guerre. Cette réaction contre la pagaille permettra à certains, comme Fontenis, d'affirmer leur volonté d'organisation et d'efficacité et les amèneront à prendre les leviers de commande en 1951, lors du congrès de Bordeaux. »
Joyeux,L'hydre de Lerne, p9
« J'ai expliqué plus haut les structures de l'organisation née de de la guerre. Ce qui devait causer sa perte fut moins les luttes de tendances à l'intérieur de l'organisation que le système majoritaire introduit dans les congrès pour régler les litiges. La démocratie, la loi du nombre qu'imprudemment nous avions laissé introduire chez nous au nom de l'efficacité, devait permettre aux « communistes libertaires» nouvelle manière de s'emparer du journal et du mouvement, de jeter dehors tous ceux qui s'opposaient à eux et, en fin de compte, de vider la Fédération anarchiste de sa substance. »
Le Pen et Vincent, Mémoire, p16
« Ce qui devait causer la disparition de la Fédération née après la deuxième guerre mondiale, ce fut moins la lutte des tendance que le système majoritaire introduit dans les congrès pour régler les litiges. Rappelons que la Fédération s'était constituée dans l'ambition de faire du nouveau, d'échapper à l'impuissance qui l'avait caractérisé avant la guerre. »Maurice Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p59
« … Enfin, après avoir travaillé dans le détail, on s’attaqua au gros qui, avec cette passivité propre aux militants dans les périodes de creux, avait laissé faire et, en un tournemain, la Fédération anarchiste se trouva transformée en une Fédération communiste libertaire dont les moyens déclarés étaient électoraux et dont le modèle révolutionnaire s’indexait sur la rébellion nationaliste algérienne. Même si, à cette époque, on ne posa pas à font le problème théorique, ce fut la première tentative de l’hérésie marxiste qui avait gagné l’économie capitaliste et qui s’attaquait à la pensée libertaire. »
p 66 « ...les politiciens qui avaient investi la Fédération anarchiste emboîtèrent le pas et, après avoir récupéré André Marty exclu du parti communiste, ils essaieront d’identifier la lutte des partisans de Messali Hadj, alors en perte de vitesse, à l’anarchisme particulier qu’ils proposaient aux jeunes... »
Le Pen, p16
« La Fédération anarchiste devenait en décembre 1953 la Fédération Communiste Libertaire dont les moyens politiques seront électoraux et dont le modèle révolutionnaire s’indexait sur la rébellion nationaliste algérienne. Même si, à cette époque, on ne posa pas à font le problème théorique, ce fut la première tentative de l’hérésie marxiste qui avait gagné l’économie capitaliste et qui s’attaquait à la pensée libertaire. La Fédération Communiste Libertaire récupéra Marty exclu du Parti Communiste( Durruti dut se retourner dans sa tombe!) et pris position pour le vieux Massali Hadj, leader du MTLD. »
Plus largement, pour toute la partie auberges de jeunesses-grève Renault de 1947, voir les parties du même nom dans L'anarchie dans la société contemporaine.Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p 49
« ...C’est alors que les militants révolutionnaires firent la faute que justement il ne fallait pas commettre : ils se retireront pour former le M.I.A.J., conservant toutes les valeurs qui présidèrent à la naissance des Auberges à la Libération, mais qui, coupé de la grande masse des jeunes, n’aura qu’une vie végétative. »
Mémoire, p19
« C'est pourtant un autre groupe, celui des gestionnaires qui finira par l'emporter comme le juge sur les plaideurs. Les militants révolutionnaires quitteront -mot illisible- le MLAJ pour former le MIAJ. Coupé de la grande masse des jeunes, ce dernier végétera tandis que, vidé de sa substance militante et politique, le premier glissera vers l'organisation des loisirs. »
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine , p51
« A la Libération, la C.G.T., rapidement reconstituée dans cette euphorie qui ignore naïvement les problèmes essentiels, avait fait de la Régie un bastion. »
p53« A la Régie Renault, il existait une minorité syndicaliste révolutionnaire composée de jeunes ouvriers. »
Mémoire, p19
« A la Libération, Renault, devenu régie nationale, avait été transformé en bastion par la CGT. Mais il existait aussi une minorité révolutionnaire composée de jeunes ouvriers. »Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p55
« Le Libertaire mettra les travailleurs en garde : « Les métallos de chez Renault sont en grève contre les directions syndicales traîtres. Le comité de grève sorti spontanément de la lutte ne doit pas avoir peur de s’affirmer face aux autorités... il faut que les grévistes passent à une action énergique, qu’ils s’imposent. Non seulement ils doivent occuper l’usine, mais ils doivent la remettre en marche pour leur propre compte sous leur propre gestion. » Le problème de la grève gestionnaire est posé.. »
Mémoire, p20
« Le Libertaire titre : « Les métallos de chez Renault sont en grève contre les directions syndicales traîtres. Il lance le slogan de la grève gestionnaire. » »
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine p 61
« Nous sommes loin du compte. Le trust intellectuel qui entoure Garry Davis pense exactement le contraire et celui-ci, tel le Christ, continue son périple et répand la bonne parole jusque chez Ferrodo, une usine de Saint-Ouen. Le sommet de cette campagne pour la citoyenneté du monde sera le meeting du Vel’ d’Hiv’, où quinze mille personnes rassemblées écoutent le prophète et que les militants de la Fédération anarchiste transformeront en une vaste kermesse libertaire. Il suffira qu’au milieu des formules creuses relevant d’un pacifisme bêlant, un vieux savant, le professeur Girard, s’écrie que « la misère était la cause des guerres et que la situation de l’humanité était dans les mains des hommes, qu’il fallait faire la révolution », pour que l’assemblée s’évade du cirque pour retrouver la virilité révolutionnaire.
Après quelques succès prometteurs, le mouvement « Les Citoyens du monde » » stagne. Seule la jeunesse en marge, les étudiants et quelques intellectuels se sont laissés convaincre. »
Mémoire, p20
« Garry Davis, le "citoyen du monde", fut au centre, en 1950, d'un mouvement de curiosité et d'adhésion. Les anarchistes furent nombreux à suivre ses meetings. Cette campagne culminera au Vel’ d’Hiv’, réunion monstre que les anarchistes transformèrent en kermesse libertaire. Puis le mouvement stagna. »Joyeux, L'hydre de Lerne, p17
« La volonté de mettre fin aux perpétuels déchirements qui secouaient notre mouvement. fruit des efforts incessants des politiciens acharnés à sa marxisation dans le but d'en tirer des avantages particuliers, communs aux partis intégrés dans le système, se concrétisa dans la création d'un organisme qui aujourd'hui fait couler beaucoup d'encre, l'Association pour l'étude et la diffusion des philosophes rationalistes.
D'abord, et nous le disons tout de suite, cette association fut créée, à l'unanimité, par le congrès de fondation de la deuxième Fédération anarchiste. Ses structures revêtirent exactement le caractère d'un " contrat ", suivant en cela la proposition fédérative émise par Proudhon: les hommes s'associaient, à la suite d'un accord librement consenti, pour une certaine tâche. Pour accomplir cette oeuvre, ils s'en donneraient les moyens. Mais ces moyens - la Fédération, son journal et son siège - devaient respecter l'accord passé au congrès de la fondation, que l'Association garantissait. Faute de quoi l'entreprise serait dissoute, et chacun reprendrait sa liberté. Enfin, toutes les décisions touchant le remaniement des structures devaient être prises à l'unanimité des fondateurs de la Fédération.
Quels étaient ses fondateurs? Au congrès de la Maison Verte, dans le XVIIIe arrondissement, assistaient les représentants des trois familles spirituelles composant notre mouvement anarchiste. Les individualistes, qui, nombreux, nous avaient rejoints au moment le plus chaud de la lutte contre la marxisation, les anarchosyndicalistes, les communistes libertaires, les vrais, ceux qui s'étaient refusés de confondre communistes libertaires avec marxistes. Ensemble, ils vont dessiner les grandes lignes de ce que sera l'organisation anarchiste, et l'Association ne fera que reprendre dans ses textes les décisions du congrès de formation.
La première des décisions qui furent prises fut la création d'une Fédération anarchiste constituée par tous les individualistes, par tous les syndicalistes, tous les collectivistes qui voulaient y adhérer, et cela sur un pied de parfaite égalité. Cette première décision, qui commandera toutes les autres, sera également l'article principal des statuts de l'Association. On peut donc dire que ceux qui ne souscrivent pas à cette déclaration n'ont rien à faire à la Fédération anarchiste.[...] »
Mémoire, mémoire p21 (il manque la p22, nous ne connaîtrons pas la fin de l'histoire...)
« La volonté de mettre fin aux perpétuelles querelles qui déchiraient le mouvement aboutit à la création de l'Association pour l'étude et la diffusion des philosophes rationalistes.
Cette association fut crée à l'unanimité par le Congrès de fondation de la Maison Verte dans le 18ème arrondissement. Ses structures revêtirent le caractère d'un contrat suivant la proposition fédérative émise par Proudhon. c'est à dire que les hommes s'associaient à la suite d'un accord librement consenti pour une certaine tâche. Pour l'accomplir, ils créeraient les moyens, mais ceux-ci, la Fédération, son journal, son siège, devraient respecter l'accord passé au Congrès de fondation que l'association garantissait. Faute de quoi l'entreprise serait dissoute, et chacun reprendrait sa liberté. Enfin, toutes les décisions touchant le remaniement des structures devaient être prises à l'unanimité des fondateurs de la Fédération réuni en Congrès. L'affaire Fontenis avait servi de leçon!
La première décision créait une Fédération anarchiste constituée par tous les individualistes, [page manquante] »Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p66
«Et, solidement arc-boutée contre la démagogie de caractère marxiste, la Fédération refusera de se laisser engager derrière des personnages comme Ben Bella, Castroet quelques autres. La situation actuelle des populations « libérées du colonialisme » et qui sont exploitées par leur bourgeoisie locale fortifiée pour des décennies par « leur victoire », est la démonstration la plus évidente de son désir de clarté. « Pendant des siècles, disait Le Libertaire, les hommes se sont fait tuer pour du vent, pour des mots, pour la satisfaction de changer de maître. Sous le fallacieux prétexte que tout n’était pas possible, les révolutionnaires sont devenus des oppresseurs. Il faut en finir avec l’équivoque. Toute révolution qui n’a pas, en première page de son programme, l’égalité économique, est un mensonge destiné à substituer une classe à une autre, mais à maintenir les classes. » . »
Mémoire, p23
« la Fédération refusera toujours de se laisser engager derrière des hommes comme Ben Bella, Castro.
« Pendant des siècles, ajoutait Le Libertaire, les hommes se sont fait tuer pour du vent, pour des mots, pour la satisfaction de changer de maître. Sous le fallacieux prétexte que tout n’était pas possible, les révolutionnaires sont devenus des oppresseurs. Il faut en finir avec l’équivoque. Toute révolution qui n’a pas, en première page de son programme, l’égalité économique, est un mensonge destiné à substituer une classe à une autre, mais à maintenir les classes. » . »
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p67
« C’est elle qui sera à l’origine, en 1958, des comités de défense révolutionnaires qui réuniront les trotskystes, les syndicalistes révolutionnaires, les surréalistes, contre le coup d’État gaulliste. Elle participera à la maigre manifestation, à la République, au sein du groupe compact de tous les gauchistes d’alors à la tête duquel, entouré d’intellectuels, il y avait André Breton. En 1962, au cours de la nuit tragique où Paris attendait l’arrivée des parachutistes venus d’Algérie pour remettre de l’ordre dans le pays, elle répond à l’appel de la Fédération de l’Éducation nationale et participera à l’organisation de la résistance, en liaison avec les organisations révolutionnaires d’extrême gauche et avec le syndicalisme libre. »
Mémoire, p24
« Elle sera à l’origine des Comités de Défense Révolutionnaires (CDR) qui réuniront trotskystes, syndicalistes révolutionnaires et surréalistes, contre le coup d’État gaulliste en 1958. Elle participera à la maigre manifestation gauchiste de la République menée par André Breton. Elle répondra aussi à l’appel de la Fédération Nationale lors du putsh des généraux, ainsi qu'à des réunions contre l'OAS. »
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine p110
« La revue situationniste fut un mélange d’un marxisme doctrinal qui allait rechercher ses références jusque dans les œuvres de jeunesse de Marx, et des penseurs libertaires.. »
p111 « On peut arrêter que ce qu’ils nous proposent, même si ce qu’ils nous proposent est transcrit dans un langage pour initiés, peut nous servir de point de départ. Ça peut donner ceci : « La fonction de l’Internationale situationniste est une fonction axiale : être partout comme un axe que l’agitation populaire fait tourner et qui propage à son tour, en le multipliant, le mouvement initialement reçu » Ou bien encore ceci : « Les situationnistes reconnaîtront les leurs sur le critère de la cohérence révolutionnaire, dans un contexte économique, social, humain. » »
p112 « Pour Alain Buhler, « l’Internationale situationniste est à la fois marxiste et anarchiste ». »
p114 « Les situationnistes proposent un catalogue dans lequel chacun peut reconnaître les siens et ce sera une des raisons parmi d’autres de leur succès auprès des têtes folles de l’université. Les marxistes y retrouveront, entre autres choses, le matérialisme historique, les trotskystes, la nécessité de la révolution permanente, les anarchistes, la spontanéité des masses, les surréalistes, la théorie du spectacle, les staliniens, le culte de leur propre élite, les nihilistes, le paroxysme, les politiciens de tout poil, le goût des tactiques subtiles grosses comme des cordages. »
p116 « Cependant cette agitation frénétique politico-littéraire enflamma une jeunesse universitaire qui était saturée des contraintes que nécessite l’organisation, ... »
Le Pen, p 26-27 (intégralité du chapitre sur le situationnisme)
« Les situationnistes s'étaient fait connaître du grand public en 67 par la publication d'une brochure intitulée : "De la misère en milieu étudiant", et par la conquête de l'Association Générale des Etudiants de Strasbourg.'internationale situation était un mélange de marxisme doctrinal allant chercher ses références dans les œuvres de jeunesse de Marx et des penseurs libertaires. Que voulaient les situationnistes?
« La fonction de l’Internationale situationniste, déclare une de leurs propositions est une fonction axiale : être partout comme un axe que l’agitation populaire fait tourner et qui propage à son tour, en le multipliant, le mouvement initialement reçu ». Les situationnistes reconnaîtront les leurs sur le critère de la cohérence révolutionnaire dans un contexte économique, social, humain. Pour Alain Buhler, « l’Internationale situationniste est à la fois marxiste et anarchiste ».
Les états-majors des partis révolutionnaires classiques, et en particulier la fédération Anarchiste, ne vit pas d'un très bon oeil cette agitation dont il faut reconnaître qu'elle eut une influence certaine sur la jeunesse des écoles. Canulars de jeunesses dorées, gromelèrent les anars traditionnels. A la vérité, le succès du situationnisme tenait au fait que n'était qu'une auberge espagnole, chacun y trouvait ce qui lui plaisait : les marxistes, le matérialisme historique, les trotskystes, la révolution permanente, les anarchistes, la spontanéité des masses, les surréalistes, la théorie du spectacle, les communistes, le culte de leur propre élite, les nihilistes, le paroxysme. Tel qu'il était présenté, ce cocktail chatoyant monta à la tête de l'université.
Cette agitation politico-littéraire prenait des proportions exagérées par le vide politique du moment. Leur mise en cause globale de la société, le refus de discuter avec les organes de transmission étatiques qu'ils voulaient ignorer, la volonté d'établir un contact direct, sans intermédiaire, avec le peuple, tout cela était très anarchiste et même très proudhonien. Leur influence sera très forte et très directe sur le mouvement de Mai 68 et sur le groupe du 22 mars qui en fut le détonateur. »
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p121
« Les qualités incontestables des jeunes de Nanterre les avaient conduits à des responsabilités dans Le Monde libertaire et à une certaine influence dans le milieu anarchiste. »
P122 « On peut supposer, à des nuances près, que les problèmes des étudiants de Nanterre envers la Fédération anarchiste étaient ceux des autres groupuscules qui, auprès des étudiants, se disputaient le marché révolutionnaire. La rupture avec les organisations adultes, l’effacement des oppositions doctrinales qui séparent les différents courants d’opinion qui se réclament du socialisme, l’espèce d’unité esthétique que leur procurait leur qualité de jeunes, d’intellectuels en puissance et peut-être, pour beaucoup de ceux qui furent des animateurs, le caractère de leurs études sociologiques, philosophiques, littéraires, leur laissaient le champ libre. »
Mémoire, p28-29 (passage peu lisible, fautes possibles)
"Plusieurs des membres du groupe de Nanterre militaient à la Fédération ou occupaient des postes au "Monde libertaire" où leur dynamisme leurs valait d'ailleurs une influence certaine."
"Il faut noter d'ailleurs que cette incompatibilité d'humeur entre les marxistes et leur jeunesse n'était pas propre aux anarchistes, les communistes avaient connu les mêmes avatars avec l'affaire du journal "Clarté". Pour ces jeunes qui trouvaient dans leur âge commun un lien puissant, chez qui les oppositions idéologiques et historiques étaient moins fortes que chez les adultes, à qui leur niveau d'instruction donnait un certain complexe de supériorité, les responsables des organisations d'extrême-gauche apparaissaient comme des -mot illisible (caciques?)- aussi dépassés que leurs parents ou leurs professeurs.
Joyeux, L'anarchie dans la société contemporaine, p125
« Depuis des années, la liaison entre les mouvements anarchistes internationaux était assurée par un bureau de relations qui se bornait à transmettre aux sections nationales des informations du monde entier. Ce système très souple, trop lâche, était un héritage de cette méfiance des anarchistes envers toute centralisation créatrice d’appareils qui, rapidement, devient dictatoriale. »
Mémoire, p31
« ...On s'était borné à créer un simple organe de liaison chargé de transmettre aux sections nationales des informations du monde entier.
Ce système très souple, très lâche, était un héritage de cette méfiance envers toute centralisation à vocation autoritaire. »
Au-delà du travail de moine copiste strictement dit, le mémoire reprend souvent, dans leur structure-même, les livres pillés.
Exemple d'enchainement de chapitres dans le Mémoire :
les auberges de jeunesse - la grève Renault en 47 - Garry Devis
Les chapitres de Joyeux (L'anarchie et la révolte et la jeunesse), eux, s'intitulaient et se suivaient comme suit: les Auberges à l'assaut de la société - la grève de la Régie Renault - la tentation politique des anarchistes - Garry Devis et l'illusion pacifiste
Plus loin, le Mémoire s'articule comme suit: les situationnistes - le groupe de Nanterre - l'Internationale anarchiste: Carrare
Quant à L'anarchie et la révolte et la jeunesse , il s'articule comme suit :
Le situationnisme. - Les jeunesses des partis de gauche : jeunesse du parti socialiste, jeunesse du P.S.U., le groupement communiste « Clarté » - Le Groupe du 22 mars et le pâté d’alouettes. - Carrare.
Plus largement, au-delà de Maurice Joyeux, qui est la cible privilégiée du plagiat, il est probable que Le Pen et Vincent aient recopié des textes fraichement publiés à l'époque, ne s'embarrassant pas de recherches historiques, comme l'illustre un article de Noir et Rouge publié en 1970 : Sur le néo-anarchisme, paru en Juin 1970 et qui semble avoir fortement inspiré nos deux étudiants. Voici quelques passages significatifs, parmi d'autres.
Revue Noir et rouge, Sur le néo-anarchisme, Juin 1970 (Anthologie, p47)
« Le premier numéro de « Noir et Rouges » est sorti à 50 exemplaires ronéotypés en mars 1956 ; nous terminerons au n°46 en juin 1970 à 3000 exemplaires, 3500 même au n°45. »
Mémoire, p47
« "Noir et Rouge" était né en mars 1956 sous la forme d'un bulletin ronéotypée à 50 exemplaires. Sa parution trimestrielle cesse après 14 ans, au numéro 46, en juin 1970. La revue se présente alors sous la forme d'une brochure d'une cinquantaine de pages imprimée s tirant à 3.000 exemplaires, sous le sous-titre "Cahiers d'études anarchistes". »Revue Noir et rouge, Sur le néo-anarchisme, Juin 1970 (Anthologie, p48)
« En 1955, divers groupes et camarades, la plupart après une décevante expérience et leur départ d'une Fédération anarchiste transformée en décembre 1953 en Fédération Communiste Libertaire (FCL) aboutissant à une sorte de parti plus trotskyste que libertaire qui devait se suicider politiquement après le summum de la participation aux élections législatives de 1956 (cf. NR N°9 « La FCL et les élections du 2 janvier 1956 »), décidaient de se regrouper et créaient les GAAR en novembre 1955. »
Le Pen et Vincent, Mémoire, p44
« Un -mot illisible- nombre de militants avaient quitté la Fédération Communiste Libertaire quand celle-ci, devenue une sorte de parti plus trotskyste qu'anarchiste, avait décidé de se lancer dans la bataille électorale en novembre 1955. ils décidèrent de se regrouper et fondèrent en novembre 1955 les GAAR (Groupes Anarchistes D'action Révolutionnaire). ils créèrent une revue "Noir et Rouge" et un bulletin intérieur "Liaisons". »Revue Noir et rouge, sur le néo-anarchisme, Juin 1970 (Anthologie, p53)
Et puisque nous parlons de brochure, rappelons que ces années nous virent également, en plus des cahiers, diffuser des brochures ronéotypées consacrées à un problème particulier ; citons entre autres : Espagne 62, Anarchisme, Kropotkine fédéraliste, Espagne noire et rouge (brochure imprimée parl 'UGAC, conférence faite par notre groupe au cours d'un cycle de causeries communes fin 1963, dont la brochure « l'Organisation » éditée par NR était une autre illustration), Collectivistes en Espagne révolutionnaire, La plate-forme d'Archinoir, etc. Sans oublier une brochure imprimée à fort tirage « L'autogestion, l'Etat et la révolution »début d'une série tentée à l'été 1968 avec ICO. »
Mémoire, p48
« Rédigée par des militants qui seront de moins en moins nombreux, la revue a abordé toute une série de sujets auxquels étaient consacré un ou plusieurs numéros. Bornons-nous à en énumérer quelques-uns: la Fanc-Maçonnerie, Parlement et élections, Nationalisme, gauche et révolution, Dossier espagnol, Action violente, action minoritaire et action de masse, La guerre d'Algérie, La révolution cubaine, Espagne 62, Anarchisme, Kropotkine fédéraliste, Espagne noire et rouge, L'organisation, Collectivistes en Espagne révolutionnaire, La plate-forme d'Archinoir, L'autogestion, l'Etat et la révolution, L'autogestion en Algérie, Cohn-Benditistes ?, au-delà du gauchisme, etc... »
Notons au passage l'erreur de Le Pen et Vincent, qui ont confondu Archinoir (revue libertaire de l'époque) et Archinov... Belle performance pour des personnes censées écrire un mémoire sur l'anarchisme!
Pour conclure cette étude comparative, terminons sur une touche humoristique en citant un extrait de l'avant-propos du Mémoire ( p5), dont on peut aujourd'hui mesurer l'ironie :
« Disons tout de suite les difficultés innombrables auxquelles on se heurte dans une telle recherche. Etudiant le quart de siècle qui nous sépare de la deuxième guerre mondiale, on s'aperçoit qu'au manque de recul s'ajoute une absence presque totale sur le sujet. »
Samuel Préjean
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