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La condition humaine, d'André Malraux

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La condition humaine, d'André Malraux Empty La condition humaine, d'André Malraux

Message  sylvestre Mer 6 Oct - 17:45

Je suis en train de lire ce roman de 1933 qui se situe pendant la révolution chinoise de 1927, où les forces communistes, amenées à une politique désastreuse de subordination au Kuomintang bourgeois par l'Internationale dominée par Staline et Boukharine, dilapidèrent leurs forces et furent quasiment anéanties. C'est excellent, ça donne une vraie idée de l'époque, des dilemmes des acteurs, etc. Bizarre de penser au destin de l'auteur, qui allait devenir ministre de De Gaulle.

Je suis tombé sur une citation de Trotsky :

http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/litterature/lt_19370409.htm
En 1926, Malraux se trouvait en Chine au service du Komintern-Kuomintang, et il est l'un de ceux qui portent la responsabilité de l'étranglement de la Révolution chinoise. Dans ses deux romans, Malraux, sans le vouloir, a donné un tableau révélateur de la politique du Komintern en Chine. Mais il ne sut pas comment tirer les conclusions nécessaires de ses propres expériences.

A-t-on des précisions sur ce passage de Malraux "au service du Komintern-Kuomintang" ?
sylvestre
sylvestre

Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010

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La condition humaine, d'André Malraux Empty Re: La condition humaine, d'André Malraux

Message  Babel Ven 8 Juil - 8:57

sylvestre a écrit:Je suis en train de lire ce roman de 1933 qui se situe pendant la révolution chinoise de 1927, où les forces communistes, amenées à une politique désastreuse de subordination au Kuomintang bourgeois par l'Internationale dominée par Staline et Boukharine, dilapidèrent leurs forces et furent quasiment anéanties. C'est excellent, ça donne une vraie idée de l'époque, des dilemmes des acteurs, etc. Bizarre de penser au destin de l'auteur, qui allait devenir ministre de De Gaulle.

Je suis tombé sur une citation de Trotsky :

http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/litterature/lt_19370409.htm
En 1926, Malraux se trouvait en Chine au service du Komintern-Kuomintang, et il est l'un de ceux qui portent la responsabilité de l'étranglement de la Révolution chinoise. Dans ses deux romans, Malraux, sans le vouloir, a donné un tableau révélateur de la politique du Komintern en Chine. Mais il ne sut pas comment tirer les conclusions nécessaires de ses propres expériences.

A-t-on des précisions sur ce passage de Malraux "au service du Komintern-Kuomintang" ?

Je ne partage pas ton opinion sur ce bouquin, dont la réputation me semble largement surfaite.
Le Vieux porte en effet un jugement assez sévère sur les agissements de cet affabulateur notoire, mais son manque d'informations factuelles, lié à sa situation de reprouvé universel, ne lui permettait pas d'apprécier à sa juste mesure l'épaisseur du rideau de fumée dont celui-ci s'entourait. Clara, sa compagne d'alors, a écrit un récit, que je n'ai pas lu, faisant la lumière sur certains des bobards que n'a eu de cesse de s'inventer, de façon quasi compulsive, celui qui demeura, hélas, l'homme de sa vie.

Concernant la génèse de l'oeuvre, ce que je sais, c'est qu'en 1925 Malraux est en Indochine, lors des événements de Canton, et qu'il se prétend "chef du Kuomintang en Cochinchine" ; rien que ça.
En réalité, ses biographes l'ont établi depuis, en août 1925, Malraux n'a qu'une connaissance très superficielle de Shanghaï, où il ne passe que 4-5 jours de vacances. La ville ne constitue pour lui qu'une étape, dans un tour du monde 7 mois où il visite successivement les concessions européennes, et l'avenue des Deux Républiques (qui est la seule à être citée dans le roman).

En fait, sa Chine c'est l'Indochine, qu'il connaît mieux, "Shanghaï" et "Canton" n'y étant que les transpositions de Saïgon et Cholon. D'ailleurs, Malraux se trouve à des milliers de kms de Shanghaï, au moment où éclate l'insurrection armée de 1927. Il est à Paris, et de la tragédie de la révolution chinoise, il ne sait que ce qu'en dit alors la grande presse : reportages du Petit Parisien, du Figaro, de l'Agence Reuters, articles d'Albert Londres...

De ce fait, ses "révolutionnaires professionnels" manquent sacrément de crédibilité : agissant constamment à découvert, ils ne possèdent aucune organisation militaire structurée, ni de cellule, ni de section, ni d'aucune organisation de rayon proprement dite. Pas relais Parti-Masse, susceptible d'assurer la réussite de l'insurrection armée.

Réduit à une poignée d'amis franco-japonais (Kyo), belge (Hemmerlich), allemand (May), russe (Katow), et de 4 ou 5 Chinois, leur groupe a tout d'une amicale des coeurs purs et souffrants, condamnée à marcher inéluctablement vers l'abattoir... Face à eux, s'agitent les silhouettes falotes du Mal, plus (König, Chpilewski, Clappique) ou moins (Ferral) habitées par la dérision grotesque, exception faite peut-être de Vologuine, l'envoyé de l'IC, véritable figure paradoxale du fonctionnaire stalinien.

Obsédés de métaphysique (ah, les monologues interminables de Gisors-le-mythomane en plein trip d'opium !... ah, les affres abscons de Tchen-le-sanguinaire, tourmenté à la fois par sa libido et par sa pulsion morbide !), ses héros ne sont que des pantins narcissiques et complaisants, surtout préoccupés d'eux-mêmes et de leur hypothétique postérité.

Avec son titre pascalien ronflant, destiné à mettre en exergue la profondeur supposée de la réflexion existentielle --avec, au passage, la mise en scène allégorisée, à la manière d'hypotyposes gore, de fragments des Pensées: ainsi, celle de l'attente de la mort dans le préau--, le roman s'inscrit plutôt dans la tradition philosophique et romanesque occidentale (un soupçon de Kierkegaard, une cuiller à soupe de Nietzsche, deux doigts de Dostoïevski pour les tourments compassionnels, une pincée de Conrad, pour le climat exotique), qu'il n'est une réflexion authentique (= sérieuse, documentée et s'appuyant sur l'expérience pratique...) sur les possibilités de réussite d'une insurrection ouvrière, au tournant des années vingt-trente.

Mais, au fond, que demander de plus à un roman ? De n'être qu'une fiction, ce qu'il est. Mais certainement pas de prétendre à autre chose qu'il n'est. Si tu veux une explication au passage du bonhomme de la "mouvance" communiste (au sens très-très large !) à un gaullisme pur jus, c'est je crois de ce côté-là qu'il faut la chercher : du côté de l'imposture et de la mythomanie.

Sous la plume de Malraux, la légende vivante du siècle des guerres et des révolutions devient une sorte de Légende Dorée, à la manière de ces Vies des Saints que l'Eglise médiévale destinait à l'édification des masses pieuses.

Bon, j'arrête de déverser ma bile sur ce numéro 1 de la collection poche-Folio qui, après tout, ne m'a rien fait. Dans tous les sens du terme.

Babel

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