Contre l'état d'urgence et les guerres
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Contre l'état d'urgence et les guerres
Contre l'état d'urgence, l'islamophobie et la poursuite de la guerre
« Grand meeting pour une politique de paix, de justice et de dignité »
Le 30 novembre 2015
Dans une tribune unitaire, un collectif d’associations et de personnalités lancent un appel. Contre les dérives racistes et islamophobes de l’état d’urgence, la politique guerrière de la France, le tout sécuritaire et l’état d’exception liberticide, ils en appellent à la paix, la justice et la dignité lors d’un Grand meeting le vendredi 11 décembre 2015 à 18h30 à la Bourse du Travail de Saint-Denis.
Moins d’un an après les massacres de janvier, les attentats sanglants qui viennent de frapper l’Île-de-France nous ont laissés dans l’horreur.
Elle est d’une ampleur et d’une intensité inédite : l’organisation État islamique a perpétré des attentats à l’aveugle. La terreur a cédé le pas à la tristesse, l’angoisse, la sidération. Il nous faut dépasser l’hébétude pour saisir les causes profondes qui ont mené à inscrire de tels crimes dans notre quotidien, et pour construire un avenir qui ne cède rien au pire.
Au sommet de l’État, en lieu et place de ce nécessaire travail, les partis de gouvernement ont préféré la fuite en avant, entraînant avec eux nos vies, nos destins, nos libertés et ceux de peuples qui auront à souffrir la vengeance d’un crime dont ils ne sont pas les auteurs. Ils disposent pour cela du soutien du Front National.
L’état d’urgence a été décrété et prolongé pour trois mois. Nos dirigeants frappent par ailleurs la Syrie de plus belle, dans un esprit de revanche. Ils bombardent une cible opaque, en grande partie insaisissable, et frappent, encore et encore, des civils.
L’exception devient la règle, et la figure guerrière s’impose comme ligne de conduite pour l’État. Cette montée en puissance n’est pas fortuite : le militarisme est central dans la stratégie du gouvernement français. Depuis la crise de 2008, pour compenser ses faiblesses industrielles et commerciales, la France joue la carte du militarisme auprès de ses « partenaires » européens. Sous Hollande, cette dynamique s’est emballée. Les interventions militaires se sont multipliées (Mali, Centrafrique, Irak, Syrie, etc.) Les ventes d’armes françaises n’ont jamais été aussi florissantes – faisant grossir les colonnes de réfugiés.
Ce militarisme n’est pas sans lien avec la progression du « djihadisme » : les frappes françaises sont autant d’arguments pour recruter de nouveaux combattants, certains pays du Golfe alimentent les organisations djihadistes et sont la source de leur idéologie.
On nous propose d’accepter cette logique mortifère, d’en faire un étendard. On nous somme de consentir à l’esprit de revanche. On nous demande d’accepter que l’état de guerre devienne un principe de gouvernement.
Les conséquences de cette incorporation collective dans la guerre sont déjà là. Grèves, rassemblements et manifestations sont suspendus. L’état d’urgence banalise la fermeture des frontières, les contrôles au faciès, les assignations à résidence, le fichage généralisé, les perquisitions musclées dans les lieux de vie ou de culte, la déchéance de nationalité (en y soumettant des binationaux nés en France).
Nos dirigeants vont jusqu’à envisager de modifier la Constitution, d’élaborer de nouvelles prérogatives de l’état d’exception, dont les dispositions sont encore floues mais inquiétantes.
Le racisme et l’islamophobie, prenant le prétexte des attentats, redoublent de virulence, et s’exercent en toute impunité. Des mosquées vandalisées aux lynchages de personnes désignées comme musulmanes, ces violences s’exercent sans susciter l’indignation unanime de ces mêmes dirigeants qui prétendent pourtant assurer la sécurité de tous.
Dans cette situation, seule une politique de paix est en mesure d’apporter une réponse à la hauteur des événements. Nous avons besoin d’une idée neuve de la paix, pas seulement d’un retour au statu quo. Cette idée de paix, elle doit être active dans notre opposition aux guerres menées par nos gouvernements. Cette politique de paix doit s’inventer au cœur de nos solidarités avec le peuple syrien, qui subit la concurrence mortifère de deux contre-révolutions, celle de Bachar al-Assad et celle des groupes « djihadistes », ainsi que les bombardements de la coalition occidentale.
Cette paix, elle doit se faire également au sein même du territoire français, mais à la seule condition de lutter contre le racisme, l’islamophobie, les discriminations – qui peuvent aussi faire naître le désespoir et conduire à la fascination pour des idéologies mortifères et la folie meurtrière. Cette idée de la paix doit donc s’incarner dans une lutte pour plus d’égalité sociale, s’incarner en un mouvement à même de réunir tous ceux et toutes celles pour qui l’union n’est pas une doctrine militaire.
Ici comme ailleurs, la paix est sous condition de justice et de dignité. C’est par cette politique que nous pourrons infléchir la folle fuite en avant de nos dirigeants, pour contrer ce climat de guerre, cette spirale meurtrière et liberticide.
Vendredi 11 Décembre à 18h30
à la Bourse du Travail de St-Denis
Métro Portes de Paris
11 dec 2015
Premiers signataires :
Bruxelles Panthères, Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), Émergence, association citoyenne de Carrières-sous-Poissy, Femmes plurielles, Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP), La Voix des Rroms, Liste des Sans-voix, Mwasi-Collectif Afroféministe , Parti des Indigènes de la République, Respaix Conscience Musulmane, Union Juive Française pour la Paix (UJFP).
Noel Mamère (Député, maire de Bègles), Sergio Coronado (Député), Bernard Friot (Économiste et sociologue), Alain Gresh (journaliste), Sihame Assbague (activiste), Imhotep (au nom du groupe IAM), Tariq Ramadan (universitaire), Kristin Ross (Professeure, New York University), Raphael Liogier (Sociologue, philosophe), Said Bouamama (Sociologue), Françoise Vergès (Politologue), Gilles Manceron (Historien), Christine Delphy (Féministe), Madjid Messaoudene (Élu à Saint-Denis), Olivier Lecour-Grandmaison (Historien), François Burgat (Politologue, directeur de recherces à l’IREMAM), Jacques Bidet (Philosophe), Cédric Durand (Économiste), Océanerosemarie (Auteure et comédienne), Grégoire Chamayou (Chercheur en philosophie au CNRS / ENS LSH), Razmig Keucheyan (Enseignant-chercheur en sociologie), Gilles Manceron (Historien), François Gèze (Éditeur), Farid Bennai (Militant associatif), Ugo Palheta (Sociologue), Laurent Cauwet (Éditeur), Jim Cohen (Revue Mouvements), Saimire Mile (Président de La voix des Rroms), Mohammed Ben Yakhlef (Élu à Villeneuve Saint Georges), Dominique Vidal (Journaliste, essayiste), Jules Falquet (Sociologue), Maxime Cervulle (Maître de conférences, Paris, Emmanuel Riondé (Journaliste), Laurent Lévy (Essayiste, militant d’Ensemble !-Front de Gauche), Stella Magliani-Belkacem (Éditrice-La fabrique éditions), Zakia Meziani (Association pour la reconnaissance des droits et libertés aux femmes musulmanes), Maximilien Sanchez (Conseiller municipal de Gentilly), Emir Cherdouh (Journaliste), René Monzat (Congrès Marx), Félix Boggio Éwanjé-Épée (revue Période), Sébastien Fontenelle (Journaliste), Elisabeth Longuenesse (Sociologue), Omar Benderra (Écrivain, militant droits humains), Fania Noel (Activiste), Catherine Samary (Altermondialiste).
Dernière édition par MO2014 le Lun 4 Jan - 17:04, édité 1 fois
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
https://www.change.org/p/le-gouvernement-fran%C3%A7ais-nous-refusons-la-guerre-2Adressée à Le gouvernement français
Nous refusons la guerre
Nous nous opposons aux bombardements du territoire syrien, qui ne conduiront qu’à plus de morts injustes là-bas et ici. La France doit renoncer immédiatement à ses guerres interventionnistes qui sont le problème et non la solution.
Nous nous opposons à l’état d’urgence et à la militarisation de la France, qui ne mènent qu’à un renforcement du racisme, du classisme et du sexisme.
Nous, qui avons pour certain.e.s perdu des proches là-bas et ici, refusons que la disparition de ces personnes soit instrumentalisée pour légitimer la politique impérialiste et belliciste de la France.
Nous appelons à :
- L’arrêt immédiat des bombardements
- L’arrêt immédiat de l’état d’urgence
- Une remise en question de la politique militariste de la France et du commerce d’armes
- Une réaffectation des crédits alloués aux guerres, vers la lutte contre les formes d’oppression et de discrimination racistes, sexistes et de classe qui marquent la société française
Cette pétition, initiée par des féministes à titre personnel, est ouverte à tou.te.s.
Premier.e.s signataires (par ordre alphabétique) :
Zahra Ali, chercheuse a l'université de Chester, militante féministe et antiraciste. Chadia Arab, chargée de recherche CNRS, université d'Angers. Paola Bacchetta, sociologue. Laila Benderra, Médecin. Rachele Borghi, maitresse de conférence féministe. Maguy Borrás militante féministe. Pascale Carayon militante féministe, ingenieure en sciences sociales. Audrey Chenu, auteure de Girlfight. Javiera Coussieu Reyes. Geneviève Cresson. Emma Crews, militante féministe. Jacqueline Crozet, militante féministe, Femmes en Noir Montbrison. Aurélie Damamme. Charlotte Dupont, comédienne. Inès de Luna, militante féministe antiraciste quartiers populaires, enseignante et artiste. Florence Degavre. Christine Delphy. Judith Depaule, metteure en scène. Nawal El Yadari, professeure de philosophie. Caroline Elissagaray, enseignante en lycée. Sil Enda, chercheuse. Jules Falquet, féministe et sociologue. María Luisa Femenias. Marie Laure Geoffray, enseignante-chercheuse et militante antisexiste. Tauana Olivia Gomes Silva, chercheuse en histoire et militante afroféministe. Anouk Guiné, Maître de Conférences à l'Université du Havre. Hélène Harder, cinéaste. Odile Hoffman, géographe IRD. Elisabeth Hofmann. Claudia Hasanbegovic, féministe. Marie Jolu-Planques, féministe. Azadeh Kian, Professeur des universités, Paris Diderot. Judith Kinanga Kapinga, éducatrice de jeunes enfants. Stéphanie Kunert, Maître de conférences, Université Lyon II. Louiza Lamia. Diane Lamoureux, professeure. Chloé Le Meur, professeure en collège. Amélie Le Renard, sociologue. Seloua Luste Boulbina, philosophe, collège international de philosophie. Delcele Mascarenhas Queiroz, professeure chercheuse de l´Universidade do Estado da Bahia. Rania Majdoub. Zakia Meziani, ARDLFM. Nasima Moujoud. Lydie Mushamalirwa, journaliste. Myriam Paris, doctorante en science politique. Carine Pionetti, chercheuse indépendante en environnement et droits des femmes. Hélène Pouit, photographe. Cha Prieur. Johanna Renard, militante féministe et doctorante. Meriem Rodary, anthropologue. Roselyne Rollier. Dominique Rosier. Leslie Salata. Aslı Telseren. Marlène Tuininga, journaliste militante. Stella Valiani. Aude Westphal, professeure de danse et d'histoire de la danse. Mira Younes, doctorante. Marta R. Zabaleta, économiste, écrivaine, poète. Najate Zouggari, doctorante en sciences sociales.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/141215/assignez-moi
Assignez-moi !
Alain Brossat (professeur de philosophie émérite, université Paris 8 Saint-Denis) et Olivier Le Cour Grandmaison (universitaire, maître de conférences en science politique à l'université d'Evry- Val d'Essonne) ont mis en circulation pendant le week-end des 12 et 13 décembre une lettre ouverte déjà signée par plus de 60 personnes qui brocarde l'état d'urgence.
Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
Je demande mon assignation à résidence, dans les meilleurs délais.
Il se trouve en effet que je partage l'essentiel des convictions de nombre de militants écologistes, altermondialistes et autres squatteurs qui ont fait tout récemment, par dizaines, l'objet de cette mesure administrative, dans le cadre de l'état d'urgence mis en place à l'issue des attentats du 13 novembre 2015 :
- Je suis l'adversaire déclaré des aventures militaires néo-coloniales actuellement conduites au nom de la France et d'un « droit de légitime défense » parfaitement nébuleux.
- Je trouve abject votre projet d'inscrire dans la Constitution de notre pays la possibilité de déchoir de leur nationalité des binationaux présumés coupables, mesure distinctement inspirée par le Front national auquel, au demeurant, vous prétendez « faire barrage ».
- Je trouve odieux que des musulmans fassent l'objet d'une assignation à résidence du simple fait qu'ils tiennent une sandwicherie halal ou fréquentent une mosquée estampillée comme suspecte – ou du simple fait qu'ils sont musulmans ou étiquetés comme tels.
- Je me refuse à me désolidariser des réfugiés (aujourd'hui par vous assimilés à des terroristes) avec lesquels je me bats pour qu'ils-elles puissent vivre là où bon leur semble. Je ne renoncerai pas à manifester auprès des collectifs des quartiers populaires qui, de Saint-Denis à Moellenbeek, n'ont pas attendu le 13 novembre pour vivre en état d'urgence (et, depuis des décennies, pour pleurer leurs morts des suites de « bavures policières »).
- Je m'oppose formellement au projet de construction d'un nouvel aéroport dans la région de Nantes et, pour cette raison, me déclare solidaire des Zadistes qui occupent la zone contestée.
- Je suis scandalisé-e par le fait que l'enquête concernant la mort de Rémi Fraisse, tué par un gendarme, ait été confiée à la gendarmerie.
- Je me suis délibérément abstenu-e de pavoiser au jour dit, ceci au mépris des consignes expressément dispensées aux citoyens par les services de l'Etat.
- Je considère que l'état d'urgence rendant possible, dans les conditions expéditives que vous savez, ma propre assignation à résidence (comme celle de tant d'autres) constitue une atteinte caractérisée aux droits des citoyens et aux libertés publiques – à commencer par l'interdiction de manifester. J'y vois l'ébauche d'un régime policier du plus mauvais aloi. Ce simple fait devrait suffire amplement à justifier l'exécution de la mesure susmentionnée.
Je ne doute pas un instant que vos services sauront utilement compléter ce tableau attestant ma dangerosité et rendant nécessaire mon assignation à résidence – ceci que mon nom figure ou non parmi ceux des suspects enregistrés sous la lettre « S ».
Si ces messieurs-dames de la police pouvaient, simplement, lorsqu'ils viendront me notifier cette mesure de salubrité publique, se dispenser de faire voler en éclats ma porte (que je suis tout-e disposé-e à leur ouvrir dès le premier coup de sonnette, à toute heure du jour ou de la nuit) et de dévaster mon logement dans lequel les livres, les ustensiles de cuisine et les kits de jardinage comptent en plus grand nombre que les armes de guerre, je leur (et vous) en vouerais une reconnaissance durable.
Dans l'espoir que ma démarche saura retenir votre attention, je vous prie, Monsieur le Ministre, etc., etc.
https://www.change.org/p/monsieur-le-ministre-de-l-int%C3%A9rieur-assignez-moi
Les premiers signataires
Gilbert Achcar (enseignant université Paris 8 Saint-Denis); Norman Ajari (militant décolonial et enseignant); Gérard Alle (écrivain et réalisateur); Jean-Claude Amara (porte-parole de Droits Devant!); Abdel Aouacheria (biologiste); Orgest Azizaj (traducteur, philosophe, binational);
Anne Baillard Gwernig (auteure); Sidi Mohammed Barkat (philosophe); Philippe Bazin (photographe); Farid Bennaï (membre du Front uni des immigrations et des quartiers populaires); Claude Bernard (ingénieur réseau); Isabelle Bettinger-Théaud (militante anticolonialiste); David Biet (intermittent du spectacle, technicien audiovisuel); Alain Bihr (universitaire retraité, militant libertaire); Stéphane Blondeau (graphiste); Philippe Bonnet (paysan); Said Bouamama (sociologue et militant du Front uni des immigrations et des quartiers populaires – FUIQP); Henri Braun (avocat); Olivier Brisson (avocat); Jean-Christophe Brochier (éditeur); Alain Brossat (universitaire);
Cédric Cagnat (philosophe); Cyril Cagnat (artisans audiovisuel); Laurent Cauwet (éditeur); Michèle Chadeisson (libraire); Estelle Chauvey (infirmière);
Jean-Pierre Dacheux (président de l'association Ici et Ailleurs pour une philosophie nomade); Jean-Louis Danflous (militant SUD à la retraite); Christine Delphy (sociologue, directrice de recherche émérite); Joachim Dupuis (professeur de philosophie);
Jérôme Ferrand (citoyen); Tony Ferri (philosophe, auteur de La compulsion de punir);
Jean-Pierre Garnier (sociologue); Albane Geslin (citoyenne); François Gèze (éditeur); Serge Grossvak (directeur du Centre Social, juif pacifiste); Nacira Guénif (Professeure Université Paris 8 Saint-Denis); Marjolaine Guillemin (coprésidente de la FASTI, coprésidente de l'ASTI d'Annonay);
M'hamed Kaki (président de l'association Les Oranges); Ali Kebir (professeur de philosophie);
Olivier Le Cour Grandmaison (universitaire);
Noël Mamère (député écologiste de la Gironde); Cyrille Marconi (enseignant-chercheur);
Alain Naze (enseignant à Mayotte);
Luca Paltrinieri (commerçant métaphysique); Christiane Passevant (Radio libertaire);
Jean-Cyril Vadi (dramaturge et metteur en scène); Christiane Vollaire (philosophe);
Olivier Razac (enseignant en philosophie); Mathilde Regad (citoyenne doctorante); Matthieu Renault (Maître de conférences en philosophie, Université Paris 8-Saint Denis); André Rosevègue (écosocialiste antisioniste); Philippe Roy (professeur de philosophie);
Louis Sala-Molins (philosophe); Julien Salingue (Docteur en science politique); Jacques et Françoise Salles (militants de la cause palestinienne); Catherine Samary (économiste, altermondialiste); Valentin Schaepelynck (enseignant-chercheur Paris; Michèle Sibony (UJFP); Pierre Stambul (coprésident de l'UJFP);
Louis-Georges Tin (maître de conférences université d'Orléans) ; Sylvie Tissot (sociologue);
Richard Wagman (Union Juive Française pour la Paix)...
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Appel unitaire: «Sortir de l’état d’urgence»
Des responsables politiques, syndicaux et associatifs ont réclamé jeudi la levée immédiate de l'état d'urgence instauré par le gouvernement après les attentats du 13 novembre, jugeant que ce régime d'exception entraîne des dérives sans répondre à la menace terroriste.
La Ligue des droits de l'homme (LDH), la CGT, et le Syndicat de la magistrature (SM), notamment, dénoncent un "détournement" du dispositif qui viserait aussi des personnes sans lien avec le terrorisme, syndicalistes ou écologistes.
"L'état d'urgence doit cesser alors qu'on nous parle de sa prorogation", a déclaré Françoise Dumont, présidente de la Ligue des droits de l'Homme. La LDH est signataire de cet appel (à lire ci-dessous), aux côtés de dizaines d'associations (Droit au logement, Maison des potes, Réseau Education sans frontières...) et de syndicats (CGT, Unef, UNL...). "Notre pays doit lutter contre le terrorisme mais sans s'accommoder de mesures disproportionnées (...), qui stigmatisent toute une partie de la population, divisent et sont contre-productives", a poursuivi la militante.
"Un climat de suspicion dans les entreprises", selon la CGT
Au nom de la CGT, Céline Verzeletti a souligné que des rassemblements syndicaux avaient été interdits et que des militants qui y avaient participé avaient été condamnés. "Dans les entreprises, nous avons noté un climat de suspicion et de délation", a-t-elle ajouté.
Laurence Blisson, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature, a dénoncé des perquisitions administratives et assignations à résidence décidées dans le cadre de l'état d'urgence, qui se basent sur la "seule suspicion, sur des infos très peu étayées". "Les citoyens de confession musulmane ont été pris pour cibles par le gouvernement", s'est insurgé Yasser Louati, porte-parole du CCIF. Il a rappelé que des mosquées ont été perquisitionnées et fermées et qu'aux Mureaux (Yvelines), les policiers ont fouillé la mosquée accompagnés de chiens, ce qui a "outré" la communauté des fidèles.
Représentant plusieurs associations issues de l'immigration, Mohamed Ben Saïd a fustigé la déchéance de la nationalité pour les binationaux nés Français convaincus de terrorisme, que François Hollande souhaite inscrire dans la constitution. Pour le militant, il s'agit d'"une mesure très discriminatoire qui ne règle pas le problème du terrorisme". Les organisations pointent aussi du doigt l'interdiction des rassemblements et manifestations, notamment dans le cadre de la COP21, qui s'est achevée le 12 décembre.
Le Conseil constitutionnel rendra sa décision le 22 décembre
Le Conseil d'Etat saisi par des écologistes a décidé le 11 décembre de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur la conformité de l'assignation à résidence à la Loi fondamentale. Il a ainsi contredit les tribunaux administratifs qui avaient rejeté les référés libertés des plaignants. Le Conseil constitutionnel a annoncé jeudi après l'examen du texte qu'il rendrait sa décision le 22 décembre.
Depuis l'instauration de l'état d'urgence après les attentats de Paris, 2.700 perquisitions administratives ont été menées et 360 personnes assignées à résidence, selon la chancellerie. Au total, 488 procédures judiciaires ont été engagées, dont une majorité concerne des infractions à la législation sur les armes (187 procédures) et sur les stupéfiants (167 procédures).
À lire :
L'appel unitaire : « Sortir de l’état d’urgence
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État d’urgence: pourquoi il faut refuser sa constitutionnalisation
L a réunion a eu lieu le 20 novembre à Matignon, au lendemain de la décision, votée par l’Assemblée nationale, d’étendre l’état d’urgence pendant trois mois.
Face à Manuel Valls, l’ensemble des responsables syndicaux sont regroupés. Avec, pour beaucoup, la même inquiétude : que les mesures exceptionnelles adoptées la veille dé- bordent largement du seul cadre de la lutte antiterroriste.
Céline Verzeletti, membre de la direction confédérale de la CGT, se souvient très bien de la réponse rassurante du premier ministre. « Non, je vous le confi rme, on est bien dans la lutte contre le terrorisme, et rien d’autre. Il ne s’agit pas d’entraver les libertés syndicales. » Manuel Valls va même plus loin. À part la grande mobilisation citoyenne de la COP21, il n’y aura pas d’interdiction des petites manifestations…
Presque un mois plus tard, la responsable syndicale, dont l’organisation avait pris position contre le prolongement de l’état d’urgence, tire un bilan dépité. « Malheureusement, nos craintes se sont confi rmées. »
Les préfets font un usage « élastique » des mesures d’exception Bien loin de traquer les seules fi lières djihadistes, le régime dérogatoire de l’état d’urgence a aussi une fâcheuse tendance à réprimer durement le mouvement social. Les interdictions de rassemblement et les assignations à résidence (354 depuis le 14 décembre) contre des personnes « dont le comportement peut constituer une menace pour la sécurité et l’ordre public » sont parfois utilisées par les pré- fets avec une élasticité coupable. Les mouvements sociaux et citoyens sont menacés
Depuis trois semaines, les exemples se multiplient (lire page 6). Il y a eu des coups d’éclat, comme l’impressionnante répression de la manifestation de la place de la République, le 22 novembre, débouchant sur 58 interpellations et des gardes à vue de parfois quarante-huit heures. Mais pas seulement. Ici, c’est une cégétiste convoquée au commissariat pour avoir organisé une manifestation pour la paix.
Ailleurs, une poignée de salariés empêchés par la police de tracter devant leur entreprise car ils sont « plus de deux » dans la rue. Ou encore cette traditionnelle manifestation de soutien à Mumia AbuJamal, interdite au nom d’un risque de trouble à l’ordre public… Autant de restrictions et brimades qui, mises bout à bout, ne peuvent qu’amener à la conclusion que le mouvement social est dans le viseur. Et inquiéter d’autant plus à l’heure où le gouvernement entend graver l’état d’urgence dans le marbre de la Constitution.
Lire la suite
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Adresser vos questions, vos contributions aux intervenants des Agoras de l’Humanité, samedi 9 janvier, Pierre Rosanvallon, Cynthia Fleury, Michel Terestchenko, Michèle Riot-Sarcey, Sophie Wahnich, Benjamin Stora....lire la suite :
http://www.humanite.fr/un-apres-charlie-deux-mois-apres-les-attentats-quelle-republique-593311
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
L’ultime rupture
23 décembre 2015 | Par Edwy Plenel | Mediapart
L’introduction dans notre Constitution de la déchéance de nationalité pour les binationaux nés Français serait un attentat contre la République, ruinant son principe d’égalité de tous les citoyens sans distinction d’origine. En portant ce projet, la présidence Hollande et le gouvernement Valls actent leur propre déchéance politique en signifiant leur ultime rupture avec le peuple de gauche.
L’histoire de la gauche est pavée de moments où l’essentiel est soudain en jeu parce qu’il a été trahi par ceux qui s’en réclamaient. De moments où il ne s’agit plus de savoir si l’on est d’accord ou non sur les politiques économique, sociale ou européenne suivies, mais où il est question de ce qui fonde durablement une identité politique, au-delà de ses aléas momentanés. Or, même si elle n’est en rien propriétaire de la morale ou du bien, la gauche, dans notre histoire républicaine, s’est affirmée en brandissant l’exigence démocratique fondamentale issue de la philosophie du droit naturel et de sa première traduction politique, la Déclaration des droits de l’homme de 1789. Ce fut toujours son étendard, son cri de ralliement, son dernier refuge.
Nous naissons libres et égaux en droit. Nous avons le droit d’avoir toutes et tous les mêmes droits, sans distinction d’origine, de sexe, de croyance, d’apparence. Et ces droits sont inaliénables et sacrés. C’est ainsi que nous sommes égaux devant la justice, répondant de nos actes selon les mêmes lois, sans différence de traitement et, notamment, de peines, sans discrimination liée à nos spécificités, par exemple le fait d’avoir hérité d’une double nationalité. Bref, il n’y a pas deux catégories de Français, dont l’une aurait une nationalité conditionnelle parce qu’elle aurait cette particularité d’avoir une autre nationalité. Non, il n’y a pas des Français plus que d’autres qui n’auraient qu’à répondre de leur crimes éventuels et d’autres qui, commettant les mêmes crimes, devraient être exclus de la nation alors même qu’ils sont nés Français, ont grandi en France, ne connaissent que la France.
Idéal souvent malmené dans la réalité mais néanmoins fondateur du pacte républicain, ce qui vient d’être rappelé n’est autre que ce qu’énonce notre loi fondamentale, la Constitution de la République française (lire ici et là). Et c’est cette loi fondamentale que la présidence Hollande et le gouvernement Valls entendent violenter avec le projet de loi constitutionnelle dit « de protection de la Nation » présenté au conseil des ministres du 23 décembre. Loin de protéger la Nation, ce texte entend la diviser, portant le ferment du démembrement d’une République indivisible pour tous ses citoyens en République divisée entre Français à raison de leur origine, ceux dont la double nationalité atteste d’un lien familial avec l’étranger, l’ailleurs et le monde, étant désignés comme Français sous réserve, Français d’occasion, Français en sursis. Comme la affirmé le Défenseur des droits, Jacques Toubon, dans un communiqué solennel, « la citoyenneté est aussi indivisible que la République ».
Pour dévaler un escalier, il n’y a que le premier pas qui coûte, écrivions-nous après le vote de la loi sur l’état d’urgence (lire ici). Et quand les amarres sont rompues, les dérives peuvent être infiniment rapides. Nous y sommes, donc : la supposée habileté politicienne du discours de François Hollande devant le Congrès, le 16 novembre, enfante, un mois plus tard, d’une monstruosité politique que, sans doute, aucun électeur du second président socialiste de la Cinquième République n’aurait imaginé. Le chemin de perdition emprunté avec ce projet de loi cumule l’infamie, l’imposture et l’irresponsabilité. L’infamie, c’est de suivre l’extrême droite. L’imposture, c’est de surenchérir sur Nicolas Sarkozy. L’irresponsabilité, c’est de nous exposer encore un peu plus, de nous fragiliser et de nous diviser, face au terrorisme.
Il est en effet infâme, c’est-à-dire vil, bas, indigne, qu’un pouvoir qui se prétend l’adversaire du Front national, épouse, à la lettre, l’idéologie de l’extrême droite, celle selon laquelle nos maux, quels qu’ils soient, nous viennent de l’étranger, ont pour cause les étrangers et supposent de chasser l’étranger qui est en nous. En brandissant dans l’urgence comme une mesure de protection, face à des attentats proférés pour la plupart par des Français, enfants égarés de notre nation, la déchéance de nationalité pour ceux d’entre eux qui sont binationaux parce que de parents étrangers, le pouvoir sème le poison de la purification nationale.
Il accrédite le préjugé xénophobe selon lequel nos malheurs viendraient de la part étrangère de notre peuple. Il sème l’illusion identitaire d’une nation qui se renforcerait et se protègerait en excluant l’allogène. Il diffuse l’aveuglement nationaliste d’un pays refusant de s’interroger sur lui-même, sa politique sociale ou sa politique étrangère, en affirmant à la face du monde qu’il ne saurait y avoir de terroristes autochtones et que d’autres nations, celles qui pourraient les accueillir alors même qu’ils n’y ont jamais vécu, en produisent, par héritage barbare, par identité culturelle, par religion dominante.
Faire de la déchéance nationale l’urgence politique, c’est convoquer un imaginaire d’exclusion, de tri et de sélection, où xénophobie et racisme s’entretiennent et s’épanouissent autour du bouc émissaire principal de notre époque, le musulman, de croyance, de culture ou d’origine. Car, chacun le devine, les nations qui, dans l’esprit de nos gouvernants, sont destinées à accueillir ces déchus de la nationalité sont celles-là même d’où viennent les bataillons d’immigrés qui, depuis plus d’un demi-siècle, ont régénéré nos classes populaires. Sans souci vivant du passé, sans mémoire vigilante ni fidélité historique, les apprentis sorciers qui, au palais de l’Elysée comme à l’hôtel Matignon, légitiment aujourd’hui ces amalgames où s’enracine la discrimination, semblent avoir oublié combien la déchéance de nationalité est l’arme idéologique de l’extrême droite. Non pas un dispositif technique, tant elle n’a aucune efficacité préventive, mais un levier propagandiste qui donne crédit à son idéologie inégalitaire, de hiérarchie et d’exclusion.
A peine renversée la République et instauré l’Etat français, les 10 et 11 juillet 1940, le premier geste du régime de Vichy ne fut-il pas de promulguer, le 16 juillet, une loi « relative à la procédure de déchéance de la qualité de Français » ? Dans la foulée, le 17 juillet, les naturalisés furent exclus de toute la fonction publique, puis, successivement, dès l’année 1940, des professions suivantes: médecins, dentistes, pharmaciens, avocats, vétérinaires, architectes. Le 22 juillet, une nouvelle « loi » – en fait, l'acte autoritaire d'un pouvoir dictatorial, le maréchal Pétain exerçant seul le pouvoir législatif – instaura une procédure expéditive de révision des naturalisations. Enfin, le 23 juillet 1940, était promulguée la « loi relative à la déchéance de la nationalité à l’égard des Français qui ont quitté la France », dont furent notamment victimes Charles de Gaulle et Pierre Mendès France.
Quand elle est ainsi élargie et renforcée, la déchéance nationale devient une pathologie du droit de la nationalité : elle ouvre une brèche dans laquelle peuvent s’engouffrer les fantasmes de communauté nationale épurée, avec des hiérarchies de loyauté. En visant explicitement des citoyens nés Français, et non pas des personnes nées étrangères ayant ensuite acquis la nationalité française, qui plus est des Français n’ayant aucun lien de citoyenneté avec le pays dont ils ont l’autre nationalité par héritage familial, le projet de loi constitutionnelle ouvre grand la porte aux pires arrière-pensées : sous la binationalité, c’est l’origine qui est disqualifiée, qu’elle soit culturelle, ethnique ou religieuse. De fait, tous nos compatriotes issus de la communauté juive d’Algérie se souviennent de l’abrogation par Vichy, dès octobre 1940, du décret Crémieux qui faisait d’eux des citoyens français à part entière. Soudain, tous, sans distinction, furent déchus de leur nationalité, à raison de leur origine.
Un imaginaire d’exclusion, de tri et de sélection
L’engrenage est terrible, et l’on comprend que le Front national, c’est-à-dire la formation politique héritière idéologique de Vichy, se félicite de cette bataille gagnée sans savoir à combattre, par simple désertion de leur camp des irresponsables qui nous gouvernent. C’est bien pourquoi nos récentes Républiques, que l’on se gardera pourtant d’idéaliser sur ce terrain de la nationalité, n’en ont pas moins tenu à distance la déchéance nationale, exclusion exceptionnelle, voire rarissime.
Quand, entre 1940 et 1944, sous Vichy, il y eut 15 154 dénaturalisations dont une majorité de Français juifs, pour un peu moins de 2 000 naturalisations d’adultes, la Troisième République n'appliqua que 16 déchéances entre 1927 et 1940 pour 261 000 naturalisations d’adultes. Rappelant dans Qu’est-ce qu'un Français ? (Folio, 2004) que, depuis la fin des années 1950, la déchéance pour déloyauté, dont est passible tout Français qui possède une nationalité étrangère, était « tombée en désuétude », l’historien Patrick Weil soulignait qu’elle « représente une sorte d’arme de dissuasion, un article 16 de notre droit de la nationalité. »
Ces comparaisons sont instructives : tout comme la bombe atomique, arme de destruction massive, ou les pleins pouvoirs, symbole d’un Etat d’exception, donc de non-droit, la déchéance nationale est faite pour ne pas servir. Elle est en quelque sorte l'impensé violent et autoritaire de notre droit de la nationalité. Un reliquat du passé, notamment de la guerre froide. De fait, la plupart des vieilles démocraties ne l’ont gardée en réserve que pour des situations extrêmement rares et sortant de l'ordinaire, touchant à l’espionnage entre nations. Vouloir l’actualiser et l’étendre, jusqu’à viser les comportements criminels de certains Français, c'est donc ressusciter une idéologie de l’exclusion et de la purification, celle-là même contre laquelle se sont reconstruites nos démocraties européennes depuis 1945.
Quelles que soient ses suites concrètes, cette transgression politique libère une violence qui n'est pas seulement symbolique. Le pacte social qui soude une nation autour d’un peuple souverain, communauté d’hommes libres assemblés librement, est rompu depuis le sommet de l’Etat. Un discours de guerre civile, agressant une partie de la population, toujours la même, celle qui est venue d’Afrique ou du Maghreb et où la binationalité est fréquente, tient lieu non seulement de parole officielle, mais désormais de projet constitutionnel. On aurait tort de se rassurer en pensant qu'il ne s’agit là que de gesticulations démagogiques : ces mots produisent forcément des actes, tant cette hystérie verbale est un appel à la violence. En ce sens, le crime contre la République se double d'une provocation contre la Nation, son unité et sa concorde.
Les principes ne se bradent pas au prétexte de la peur. Sauf à égarer la République elle-même, en concédant à ses ennemis, adversaires de sa liberté, ennemis de son égalité, négateurs de sa fraternité, ce qu’ils souhaitent précisément : sa perdition. Nous affirmons donc aujourd’hui, avec les mêmes mots, les mêmes rappels, ce que nous disions haut et fort, en 2010 (lire ici mon parti pris), quand Nicolas Sarkozy rompit le premier le pacte de concorde républicaine en affirmant, à Grenoble, que « la nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d’origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d’un fonctionnaire de police, d’un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l’autorité publique ».
Nous n’étions pas seuls. « La Nation, c’est un traitement digne et égal pour tous » : François Hollande a alors signé cet appel de septembre 2010 (le retrouver ici) où l’on lisait ceci : « Sous le faux prétexte d’assurer la sécurité des Français, le pouvoir tend en fait à imposer une idée aussi simple que malhonnête : les problèmes de notre société seraient le fait des étrangers et des Français d’origine étrangère ». « Non à l’extension des possibilités de déchéance de nationalité ! » clamait cette appel qui dénonçait, dans la politique de Nicolas Sarkozy, « une atteinte intolérable aux principes constitutifs de la Nation ». Aux côtés de l’actuel président de la République, parmi les signataires de cet appel solennel à un sursaut : Martine Aubry, alors première secrétaire du PS ; Claude Bartolone, aujourd’hui président de l’Assemblée nationale ; Bertrand Delanoë, alors maire de Paris ; Myriam El Khomry, aujourd’hui ministre du travail ; Laurent Fabius, actuel ministre des affaires étrangères ; Lionel Jospin, devenu membre du Conseil constitutionnel ; et, bien sûr, Christiane Taubira, la garde des sceaux qui, maintenant, se prépare à défendre l’inverse, c’est-à-dire ce déshonneur.
Interrogé à l’époque par Mediapart (lire l’entretien ici), Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France mais aussi témoin et acteur de la gauche réformiste française, nous expliquait que le sarkozysme « n’est plus une politique : il est une tentative permanente d’adaptation opportuniste aux réalités ». Dans sa désastreuse manœuvre tactique où il espère cannibaliser la droite face au Front national, le hollandisme se révèle donc une dérisoire prolongation du sarkozysme. Avec préscience, Pierre Rosanvallon estimait alors que « la forme la plus caricaturale et révoltante de ce sarkozysme, c’est l’union nationale négative. C’est la tentative de construire du consensus par les formulations les plus archaïques de la xénophobie ». Hélas – oui, hélas, car nous avons appelé de nos vœux cette alternance après l’hystérie de l’hyperprésidence de Nicolas Sarkozy –, sous son apparence plus cauteleuse et plus ronde, le hollandisme ouvre la voie aux mêmes passions tristes et dévastatrices, nées des noces de la peur et de la haine.
Enfin, à l’infamie de créditer l’extrême droite et à l’imposture de surenchérir sur Sarkozy, s’ajoute l’irresponsabilité de mesures qui, loin d’une quelconque efficacité, ne font que mettre la France sous tension, qu’aviver ses plaies, qu’accroître ses divisions. La déchéance de nationalité n’a aucune portée pratique vis-à-vis de jeunes ayant épousé une idéologie totalitaire qui fait du sacrifice de sa propre vie une arme de guerre. Elle ne répond à aucune des questions légitimes que posent les échecs sécuritaires d’un pouvoir n’ayant pas réussi à nous protéger des attentats de janvier et des massacres de novembre, mais ayant, de plus, choisi de nous exposer en se lançant dans des aventures guerrières – au Mali, en Irak, en Syrie, en Libye, hier sous Sarkozy mais sans doute demain sous Hollande – sur lesquelles nous n’avons aucun droit de regard et dont les cibles sont des pays dont les peuples ne nous ont jamais déclaré la guerre.
Les suites de l’état d’urgence l’ont amplement montré : la lutte antiterroriste n’est qu’un prétexte tacticien pour survivre au pouvoir, se faire réélire, affaiblir le camp adverse. Nous sommes bien loin des grands mots et des phrases ronflantes. L’intérêt politicien prend le pas sur l’intérêt général. De fait, le projet de loi constitutionnelle dit « de protection de la Nation » envisage aussi de constitutionnaliser l’état d’urgence, c’est-à-dire de banaliser un Etat de police et de bureau (préfectoral) qui impose sa loi à l’état de droit.
Les mesures prévues, dit le communiqué officiel du conseil des ministres, « seront placées sous le plein contrôle du juge administratif ». Bel aveu ! Ce juge-là est celui de l’Etat, au sein de l’Etat, par l’Etat lui-même. La justice congédiée, ses magistrats du parquet comme ses juges du siège, le seul contrôle, jusqu’au Conseil d’Etat, c’est celui que l’Etat concède à l’Etat, dans l’entre-soi administratif. Plus d’équilibre des pouvoirs, plus de pouvoir judiciaire, un tant soit peu indépendant, pour arrêter le pouvoir exécutif. Les figures intellectuelles du droit, à gauche, Mireille Delmas-Marty et Christine Lazerges notamment, viennent de l’affirmer dans un appel (lire ici) disant « Non à l’état d'urgence permanent » où elles dénoncent le projet sur la déchéance nationale comme un moyen de « contourner les fondements républicains du droit de la nationalité ».
Avec le gouvernement Valls, la prophétie orwellienne est au pouvoir. La guerre, c’est la paix. L’Etat, c’est le droit. L’indignité, c’est l’honneur. En politique, les ruptures morales sont autrement définitives que les divergences partisanes, de programme ou d’alliance. Elles brisent ce qui faisait du commun et du lien : une appartenance, une histoire, une complicité. Le communisme français tout comme son partenaire socialiste ont connu de tels moments, qu’ils s’agissent des crimes staliniens, des dérives mollettistes ou de l’affairisme mitterrandien. Ce sont des moments tragiques, tant ils déchirent des fidélités, mais aussi fondateurs, tant ils obligent à tracer une autre route.
Nous y sommes, sans retour.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
L'état d'urgence ? Dans les quartiers populaires, c'est depuis longtemps l'état normal.
L'étape suivante, rappelons-le, c'est l'état de guerre, avec la loi martiale.
Depuis sa mise en place, plusieurs appels contre "l'état d'urgence" fleurissent à l'initiative de tel ou tel regroupement démocratique, partis, associations, individus. Tout cela est très bien et il faut les soutenir. Tous.
A juste titre, tous soulignent l'atteinte inacceptable aux libertés que risque de pérenniser cette situation aggravée par les rajouts constitutionnels envisagés.
Cependant, soyons lucides, une sorte d'état de siège chirurgical est depuis longtemps à l'œuvre dans le pays, ne ciblant que les quartiers populaires. Alors que le reste de la France ne connaît pas d'altération si grande bouleversante de ses droits et libertés. Et puis comme l'ont expliqué nos édiles, pour écraser l'ennemi intérieur clairement désigné, les "musulmans radicalisés", un petit sacrifice n'est-il pas nécessaire?
C'est bien ce qui rend la majorité de la population assez insensible à la campagne en cours. L'Etat lui ayant bien fait comprendre que si vous n'êtes ni musulman, ni Noir, ni Rom, il n'y a pas de grande crainte à avoir.
Et du coup, poursuivant une politique de fascisation rampante du pays, François Hollande et Manuel Valls, eux, non seulement n'ont pas de souci politique à se faire mais ils peuvent escompter en tirer des dividendes électoraux.
Non seulement, ce sont les populations de ces quartiers qui sont les premières cibles de cet état d'urgence actuel mais il y a longtemps que les libertés élémentaires y sont bafouées. Du coup dans ces "zones sensibles" selon la terminologie médicale utilisée par l'Etat, l'état d'urgence a aggravé un état d'exception permanent.
En effet, harcèlements et provocations policières, contrôles d'identité racistes et musclés, usage de la délation, mise sous surveillance des mosquées, paupérisation avec son corollaire, l'économie parallèle, "le biz", et ses violences inhérentes, brutalités gratuites et meurtres policiers impunis sont le lot quotidien.
Certes, les mesures coercitives y sont aujourd'hui aggravées mais elles ne sont pas si nouvelles que ça. Effectivement si ces zones sont des zones de non droit, des territoires perdus de la république comme elles sont désignées avec mépris, c'est parce que c'est l'Etat lui-même qui n'y respecte ni la décence sociale due aux populations qui y vivent, ni ses propres lois ni les libertés fondamentales!
Certaines catégories de population, les Noirs, les Arabes, les Roms, les blancs pauvres subissent un régime de sous-citoyenneté depuis toujours dans une relative acceptation des grands partis politiques de ce pays. La situation actuelle montre que l'Etat est prêt à aller plus loin encore.
L'étape suivante rappelons le c'est l'état de guerre, avec la loi martiale. Et pouvoirs d'administration et de justice donnés à l'armée.
Alors, à quand un appel et une action réelle contre l'état normal dans les quartiers populaires ?
Youssef Boussoumah
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
https://www.change.org/p/a-toutes-et-tous-a-qui-sert-leur-guerre/u/14802162?tk=GRmioghD0pQeeihSoYBFmOcM0Htly9WKKdzjKmjcUOA&utm_source=petition_update&utm_medium=emailREUNION PUBLIQUE ANTI-GUERRE vendredi 15 janvier 19H, Bourse du Travail Paris
Tribune parue initialement dans Libération du 25 novembre 2015
2 janv. 2016 — Mettre en commun nos convictions et nos propositions contre la guerre, discuter des perspectives pour une mobilisation contre l'intervention, rendre davantage visible l'opposition à la guerre: tels seront les objectifs de cette réunion publique. Elle ne se veut pas un meeting, mais bel et bien une discussion collective et constructive pour imaginer ensemble des suites à donner, et pour que le texte "A qui sert leur guerre?", signé par plus de 5000 personnes, ne reste pas qu'un texte.
Nous tiendrons évidemment informé.e.s toutes celles et tous ceux qui n'auront pu être présent.e.s.
Rendez-vous à la Bourse du Travail de Paris, 3 rue du Château d'Eau (métro République), salle Varlin, le vendredi 15 janvier à 19H.
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Quand François Hollande gonfle le nombre de procédures antiterroristes
Le Monde.fr | 08.01.2016 à 19h41 Par Laurent Borredon et Ismaël Halissat
Le président François Hollande rend hommage aux forces de police, lors de ses vœux le 7 janvier 2016.
À l’occasion de ses vœux aux forces de sécurité le 7 janvier au matin, François Hollande justifie, une fois de plus, la nécessité de l’état d’urgence et de sa prolongation. Le président de la République explique dans la cour de la préfecture de Paris que ce régime exceptionnel « a permis des perquisitions administratives qui ont mis au jour vingt-cinq infractions en lien direct avec le terrorisme ».
Pourquoi c’est exagéré ?
25 infractions, le cache-misère de 3 000 perquisitions
Le président de la République affirme que les perquisitions administratives ont permis de découvrir vingt-cinq infractions en lien avec le terrorisme. Entre le 14 novembre et le 7 janvier, 3 021 perquisitions ont été permises sans le contrôle d’un juge, du fait des mesures exceptionnelles prises au lendemain des attentats. Portes cassées, appartements retournés et assignations à résidence abusives, les dérives de l’état d’urgence sont observées jour après jour. Tandis que la disproportion entre les moyens déployés par le pouvoir exécutif et le résultat de ces opérations est dénoncée par une multitude d’associations.
Quatre réelles procédures antiterroristes
Ce décalage est d’autant plus frappant, quand on observe ce qui se cache derrière les vingt-cinq infractions dont parle François Hollande. Le président de la République regroupe en réalité des situations très différentes. Selon le parquet de Paris, qui centralise les dossiers pour les crimes et délits terroristes, seules quatre procédures issues des perquisitions administratives sont entre les mains de sa section antiterroriste, au 7 janvier. Il s’agit de trois enquêtes préliminaires, et d’un quatrième dossier dans lequel un homme a été mis en examen.
Quelles sont les 21 infractions restantes, alors ? Elles concernent le délit d’apologie du terrorisme, inscrit depuis novembre 2014 dans le Code pénal. Les procédures s’appuient alors sur les tracts, les documents divers, ou encore sur des posts sur Facebook ou sur des sites de rencontres, découverts lors des fouilles (physiques et informatiques).
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/01/08/quand-francois-hollande-gonfle-le-nombre-de-procedures-antiterroristes_4844246_4355770.html#e2l7b7tuemO4BSMR.99
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Première grande manifestation unitaire contre l’État d'urgence, le 30 janvier, à 14h30 République. 4 mots d'ordre :
- Levée immédiate de l'état d'urgence et de l'état d'exception permanent.
- Abandon de la constitutionnalisation de l'état d'urgence et de la déchéance de nationalité.
- Arrêt de la répression et de la stigmatisation des manifestants et militants des mouvements sociaux, des migrants, des musulmans ou supposés l'être, des quartiers populaires.
- Respect de la liberté de manifester, de se réunir et de s'exprimer.
C'est un appel très large qui réunit pour la première fois toutes les forces politiques, syndicales, antiracistes + associations de l'immigration comme l'ATMF, la FTCR, le CCIF, la Mafed (Marche de la dignité), PIR...
A cette manif se joint tout le réseau autour de la LDH et de l'appel "nous ne céderons pas (http://www.ldh-france.org/cederons-pas/). Plus de détails dans les jours qui viennent avec le label "Stop état d'urgence!"
à suivre...
- Levée immédiate de l'état d'urgence et de l'état d'exception permanent.
- Abandon de la constitutionnalisation de l'état d'urgence et de la déchéance de nationalité.
- Arrêt de la répression et de la stigmatisation des manifestants et militants des mouvements sociaux, des migrants, des musulmans ou supposés l'être, des quartiers populaires.
- Respect de la liberté de manifester, de se réunir et de s'exprimer.
C'est un appel très large qui réunit pour la première fois toutes les forces politiques, syndicales, antiracistes + associations de l'immigration comme l'ATMF, la FTCR, le CCIF, la Mafed (Marche de la dignité), PIR...
A cette manif se joint tout le réseau autour de la LDH et de l'appel "nous ne céderons pas (http://www.ldh-france.org/cederons-pas/). Plus de détails dans les jours qui viennent avec le label "Stop état d'urgence!"
à suivre...
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
http://www.liberation.fr/direct/element/etat-durgence-et-decheance-de-nationalite-lavis-tres-severe-de-la-commission-nationale-des-droits-de_28868/
Etat d'urgence et déchéance de nationalité : l'avis très sévère de la Commission nationale des droits de l'homme
«Nombreux abus».
La Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) émet aujourd'hui une déclaration très sévère envers l'état d'urgence et la décision d'inscrire la déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour faits de terrorisme dans la Constitution.
Ainsi, la fin de l'état d'urgence ne saurait faire l'objet d'«une réforme législative, à plus forte raison constitutionnelle», estime la CNCDH. Dans le prolongement des réserves émises dès novembre par sa présidente, Christine Lazerges, auprès de Libération, l'autorité relève que l'application de l'état d'urgence s'est accompagnée «de nombreux abus», accompagnés d'«effets collatéraux dévastateurs» (voir à ce sujet notre application).
Quant à la déchéance de nationalité, la Commission «s'interroge sur la pertinence et l'efficacité d'une telle sanction face à cette nouvelle forme de terrorisme déterminée à mettre à bas les fondements mêmes du pacte républicain». Elle estime que la proposition «instaure une double différence de traitement entre les citoyens français», et que «ce type de distinctions est radicalement contraire à tous les principes républicains.»
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Contre la guerre
L’état d’urgence a été déclaré parce que la France est en guerre depuis le 13 novembre – a dit le 13 novembre à 23h 45 le président de la République française, François Hollande.
Or la France n’est pas plus en guerre qu’elle l’était la veille, ou un an avant. Elle bombarde l’Irak depuis 2014, et la Syrie depuis septembre 2015.
Depuis le 13 novembre, l’idée de guerre est utilisée comme un moyen de provoquer un état de panique générale —de panique calme, mais paniquée quand même.
Le pays a été sidéré par les tueries; il ne se savait pas menacé ; il ne savait même pas que la France bombardait l’Irak et la Syrie. Il a donc été facile pour le pouvoir de lui faire prendre des vessies pour des lanternes et de prétendre que la France allait, à cause de ces tueries, commencer à bombarder DAECH en représailles: parce que DAECH nous avait attaqués.
Mais aussi horrible soit DAECH, ce n’est pas DAECH qui attaqué le premier la France.
Or Hollande déclare : « Puisque nous sommes en guerre, et surtout que nous y sommes parce que nous avons été attaqués de façon « lâche » et « barbare », et en plus, « chez nous », nous allons « rétorquer » ». Tous les qualificatifs utilisés à propos des tueries et de la guerre qui s’ensuit, montrent un double standard—un 2 poids 2 mesures. Bien sûr les tueries étaient horribles. Il est difficile de trouver des tueries qui ne le soient pas.
Mais apparemment, si. Celles auxquelles procède l’aviation française, ne seraient pas des tueries, mais des « dommages collatéraux ». L’opinion avale qu’il s’agit de deux phénomènes bien différents.
Car nous sommes encore imprégnés d’une façon de penser coloniale : de l’idée que nous avons le droit et le devoir de rendre la justice partout dans le monde. Et c’est sur ce deux poids-deux mesure structurel, sur cette façon de penser que le gouvernement a tablé.
Et aussi sur le fait que, depuis le Vietnam, il n’y a plus ni photos, ni récits, des tueries provoquées par nos bombardements. Pas d’individus sous les bombes. Pas de preuves des meurtres. Pas même de chiffres.
En revanche les conséquences des attaques du 13 novembre « chez nous » ont été documentées du mieux qu’on pouvait ; les récits des rescapés, des SAMU, des pompiers, des policiers ont été sollicités, enregistrés, retransmis en boucle sur toutes les chaînes télévisées, imprimés dans tous les journaux ; puis, quand tous les récits, tous les témoignages furent épuisés, ce sont les photos des morts, puis leur biographie, qui ont été publiés. Deux mois après l’événement, ont commencé les commémorations.
Tout un pays a été occupé, fasciné, hypnotisé, par le récit de cette violence, récit auquel s’ajoutaient sans trêve de nouveaux détails qui tiraient les larmes des yeux. Le sentiment est devenu irrépressible que nous devions quelque chose à ces morts, ces pauvres morts que nous n’avions pas pu sauver. Comme ceux qui avaient été témoins de leur mort et qui se demandaient tout haut, pourquoi ils étaient, eux, encore en vie, nous éprouvions la culpabilité des survivants. L’esprit de vengeance, qui n’a pas besoin d’être sollicité pour apparaître, a surgi. Et avec lui, en dépit des objurgations à « pas d’amalgame », a ressurgi l’esprit de « si ce n’est toi, c’est donc ton frère », exacerbant un racisme post-colonial déjà très prospère.
Le gouvernement a organisé tout cela très vite : de « on nous a déclaré la guerre », à « l’état d’urgence », il s’est écoulé à peine quelques minutes. Du décret de l’état d’urgence au vote de sa prolongation par un Parlement quasi-unanime, à peine quelques jours.
Et pendant que le gouvernement allait à toute vitesse, nous allions, nous, très lentement. Désemparés, sonnés, nous étions devenus une population aux pieds de plomb. Nous n’avons pas protesté contre la prolongation de l’état d’urgence : est-ce que contester sa nécessité, cela n’aurait pas démontré un manque de compassion, une froideur inacceptables dans ce moment de deuil ?
La célérité du pouvoir à appliquer des changements dont on se demande comment ils ont pu être pensés si vite, contraste avec la lenteur de la population à « réaliser » : réaliser les attaques, réaliser les morts, réaliser l’état d’urgence, réaliser l’interdiction de se réunir. Toutes ces « réalisations » sont venues lentement, difficilement, et quand nous avons réalisé ce qu’on nous faisait, il était trop tard pour manifester.
Une frappe aérienne contre Daech en Syrie a été annoncée le dimanche 15 novembre. Une autre le lendemain et une autre le surlendemain. Puis, plus rien. L’aviation a-t-elle cessé ses frappes ? On n’en sait rien et personne ne proteste contre cette absence de nouvelles.
Au départ, le 13 novembre, Hollande a annoncé les attentats comme des attaques terroristes de Daech : « Nous sommes attaqués »a été le premier mensonge, le mensonge fondateur de toute cette période : les victimes sont innocentes, nous sommes innocents, le pays est innocent, le gouvernement est innocent.
Qui dira le contraire ? Le Dimanche 15, trois personnes parmi les intervenants à la télévision, l’ont fait : Fillon, Bayrou et Villepin. Ils mentionnent, comme allant de soi, que les attaques terroristes sont une réponse aux bombardements français sur l’Irak et la Syrie. Car, oui, c’est la France qui a commencé. Depuis le 27 septembre très exactement en Syrie, depuis l’automne 2014 en Irak. La France bombarde, en tant que membre d’une coalition comprenant les USA, l’Arabie Saoudite, le Qatar et quelques autres états du Golfe.
Or personne du gouvernement, ni le chef de l’Etat ni le premier ministre, ni aucun socialiste ne l’a dit ou laissé entendre.
Certes on ne peut pas effacer complètement les mots que l’un des témoins de l’attaque du Bataclan a entendu prononcer par un assaillant : « Nous sommes ici pour venger les gens que vous tuez en Syrie ». Mais ce propos ne donne lieu à aucun commentaire, ni d’un politique, ni d’un journaliste. Un propos de barbare n’est pas une parole, c’est un son inarticulé, un grognement de bête, un bruit.
La presse a bien mentionné le début des bombardements de Daech par la France en septembre—mais comme un fait divers. Cela n’a pas retenu l’attention. A cause de la façon discrète de présenter ces bombardements mais aussi parce qu’on s’est habitués à ce que la France fasse régner l’ordre dans son ex-empire colonial. Et la France bombarde, et commet des « homicides ciblés » dans tout le Sahel, depuis janvier 2013 sans que personne ne batte une paupière.
Pour quoi ? Dans quel but ? Avec quelles justifications ? Là est la question, non seulement en ce qui concerne la « vengeance » du Bataclan, mais toutes les autres « opex »--opérations extérieures menées depuis janvier 2013. Serval 1 puis Serval 2 au Mali, transformé en « Barkhane »--pour faire croire qu’il ne s’agit pas de la même chose, et cacher que, selon un militaire, « on est là pour longtemps » ; Sangaris en Centrafrique—une opération « humanitaire » censée éviter les massacres inter-religieux qui n’évite rien du tout ; Chammam à Djibouti, dont personne n’a entendu parler ; l’entrée dans la coalition anti-Daech en 2014, dont personne n’a entendu parler non plus, car il faut préserver le mensonge que la France agit seule, comme une grande.
D’après le journaliste du Monde, David Revault d’Allone, personne—y compris dans son gouvernement--ne comprend pourquoi Hollande est devenu un foudre de guerre. Quelques éléments éclairent cette transformation :
Deux résultats positifs émergent de ces guerres : pour la première fois, l’invendable avion Rafale, qui reste sur les rayons depuis plus d’une décennie, a été vendu. Le ministre de la guerre, Le Drian, en a fourgué 25 à l’Egypte, puis 25 au Qatar, deux états démocratiques. L’autre résultat, c’est que à chaque fois, la cote de François Hollande remonte—(puis retombe presque aussitôt). Un autre mobile pro-guerre apparaît selon ce même journaliste : Hollande apprécie le fait que quand il appuie sur un bouton, les paras sautent sur la cible dans les 6 heures—ce qui a fait de la « prise » de Tombouctou en 2013 le « plus beau jour de sa vie politique ». Tandis que quand il enjoint aux autres ministres « d’inverser la courbe du chômage », ça ne marche pas si vite, et même, ça ne marche pas du tout.
Enfin, un quatrième mobile apparaît, incroyable tant il semble enfantin ou mégalomane. Pour Hollande, la posture louis-quatorzième de garder le « rang » de la France, celui d’ « une puissance mondiale », joue autant que la volonté de garder l’uranium d’Afrique pour Areva. Or, commente Hubert Védrine, « nous sommes un pays chimérique, qui est de plus en plus ridicule à se prétendre universaliste alors que nous n’en avons pas les moyens ». Combien de morts faudra-t-il compter avant d’abandonner cette chimère ?
Beaucoup d’autres résultats sont à porter au débit de cette guerre. Le premier évidemment, ce sont les attaques « terroristes » sur le sol français. Mais « on ne s’y attendait pas » (le gouvernement, si). Car tous les pays du monde doivent accepter les incursions des puissances occidentales qui s’arrogent le droit de changer les gouvernements des autres, de bombarder leurs populations, de les laisser en ruines et en guerres civiles tout en maintenant que leur propre sol, leurs propres populations sont des sanctuaires ; qu’il est inconcevable que les « autres » osent les attaquer.
Et pourtant cela arrive.
Les attentats de Novembre sont la conséquence des bombardements sur la Syrie. Ce qui était le 15 novembre une évidence pour Fillon, Bayrou et Villepin, bien qu’ils se soient tus depuis lors, cette évidence, tout a été fait pour la nier. Jusqu’à l’absurde ; ainsi cette phrase : « Les attentats ne sont pas à cause de ce que nous faisons, mais à cause de ce que nous sommes ». Ce qui nous a valu une définition de « ce que nous sommes ». La francité c’est, depuis novembre, de « boire des bières en terrasse ». Boire des bières en terrasse n’est plus une action, un comportement, un loisir, une dépense : c’est une essence. Enfin, nous tenons ce que nous cherchons depuis des années : l’identité nationale.
Pour pouvoir continuer la guerre, il faut prétendre que c’est une nouvelle guerre, pas une guerre qui dure depuis plus d’un an dans sa partie syrienne, et qui a commencé depuis bien plus longtemps dans le Moyen-Orient.
Une guerre plus grave, donc nouvelle. Qui change tout. Qui permet de tout changer. De justifier l’état d’urgence, et la démolition programmée de l’Etat de droit. Tandis que l’état d’urgence devient à son tour une preuve de l’urgence et de la nécessité de la guerre.
Guerre et état d’urgence sont les deux composantes indissociables de l’état dans lequel l’Etat nous a mis.
Christine Delphy, 15 janvier 2015
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Alternative Libertaire met régulièrement à jour sur son site une carte interactive des manifestations du 30.
chejuanito- Messages : 566
Date d'inscription : 08/07/2010
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/250116/appel-contre-la-derive-autoritaire-de-l-etat
Appel contre la dérive autoritaire de l’Etat
Depuis le début de l’état d’urgence déclaré à la suite des terribles événements du 13 novembre 2015, s’est mise en place dans notre pays une politique sécuritaire qui n’a peut-être jamais, durant toute la Vème République, mis en péril à ce point les libertés fondamentales. C’est ainsi qu’en deux mois 385 personnes ont été assignées à résidence sans qu’une enquête judiciaire ait pu prouver leur implication criminelle. On peut de surcroît douter de l’efficacité de la politique mise en oeuvre puisque, à titre d’illustration, sur 3021 perquisitions, seulement 4 ont donné lieu à une procédure anti-terroriste. Le fait que le Premier ministre ait annoncé à plusieurs reprises durant le mois de janvier la prolongation de l’état d’urgence tant que Daech existera - ce qui revient à une prolongation indéfinie - nous laisse pour le moins dubitatifs.
Les prises à partie et discours véhéments de Manuel Valls dans cette période de fragilisation des droits de l’homme se sont multipliés. Il a pu ainsi invectiver le monde de la recherche en sciences sociales, accusant les sociologues en particulier qui cherchaient à expliquer les causes sociales des attentats de chercher en réalité à excuser les terroristes. Dans ce contexte, l’Observatoire de la laïcité, organe indépendant de conseil localisé à Matignon afin de fournir des informations objectives, des rapports, des avis sur la situation de la laïcité dans notre pays, a été la nouvelle cible du Premier Ministre lors d’une réunion du CRIF auquel il assistait. Manuel Valls a attaqué nommément le Président de l’Observatoire de la laïcité Jean-Louis Bianco parce qu’il a signé un appel en novembre 2015 publié dans le journal Libération dont certains signataires (80 au total) seraient à son sens des ennemis de la laïcité : « On ne peut pas signer des appels, y compris pour condamner le terrorisme, avec des organisations que je considère comme participant du climat que l’on a évoqué tout à l’heure ».
Cet appel (« Nous sommes unis ») était pourtant une condamnation du terrorisme et appelait à l’apaisement, y compris religieux. Il a été signé par une multitude de personnalités qui ne peuvent être soupçonnées d’être anti-laïques comme le Président de la Ligue de l’enseignement ou même de copiner avec l’islamisme intolérant comme le Grande Rabbin de France. Dans le même souffle et à la même occasion, le Premier Ministre s’en est pris au rapporteur général du même organisme indépendant, Nicolas Cadène, parce qu’il a envoyé le 6 janvier 2016 un tweet dans lequel il reproche à la philosophe Elisabeth Badinter d’avoir manqué de pédagogie dans certaines de ses affirmations lors de la matinale de France Inter du même jour. L’une des affirmations de la philosophe se trouvait être simplement fausse, contraire au droit. La laïcité n’impose pas en effet, contrairement aux dires de Madame Badinter, « la neutralité dans l’espace public » mais la neutralité des agents publics justement pour préserver la liberté d’expression des publics, autrement dit de tous les citoyens. Par ailleurs, lors de la même émission, Madame Badinter lança « qu’il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d’islamophobe ». Cette dernière phrase laisse entendre que l’islamophobie n’est pas une manière de voir honteuse et illégitime. Une telle affirmation peut en outre entrer dans la catégorie répréhensible d’incitation à la haine. Lorsque le premier ministre devant le CRIF défend ainsi Madame Badinter et ses propos contre l’Observatoire de la laïcité, il semble vouloir implicitement accréditer l’idée que s’il n’est évidemment pas légitime de se dire antisémite, il serait en revanche acceptable d’être islamophobe. Manuel Valls contrevient dès lors lui même, en tant qu’agent public, à la neutralité qui supposerait une égalité de traitement, y compris dans les discours des responsables politiques, de toutes les composantes religieuses vivant dans notre pays.
Nous nous élevons fermement contre ce qui n’apparaît plus seulement comme une dérive sécuritaire de l’Etat mais aussi comme une dérive autoritaire. Lorsqu’un premier ministre, en raison de ses idées et affects personnels, se laisse aller à remettre en cause publiquement un organisme indépendant, laissant entendre sur un ton menaçant qu’il allait lui-même le recadrer, il y a véritablement un abus de pouvoir qui ne peut être toléré dans un Etat de droit démocratique digne de ce nom.
(1) Premiers signataires :
Raphaël Liogier, professeur des universités IEP d’Aix-en-Provence, Collège international de philosophie ;
Christine Delphy, directrice de recherche honoraire au CNRS, sociologue et féministe ;
Alain Gresh, journaliste, fondateur du site Contre-Attaque ;
Jean Bauberot, ancien titulaire de la chaire « Histoire et sociologie de la laïcité » à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes ;
Edwy Plenel, journaliste, fondateur de Médiapart ;
Marwan Muhammad, statisticien, conseiller auprès de l'OSCE ;
Rokhaya Diallo, journaliste et réalisatrice...
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Pour l’arrêt des interventions militaires françaises
— 28 janvier 2016 à 18:01
Il faut organiser une résistance face aux guerres qui se mènent contre les populations, contre nous et en notre nom.
Pour l’arrêt des interventions militaires françaises
Près de 200 personnes se sont retrouvées, le vendredi 15 janvier, à la Bourse du travail de Paris, pour une première réunion antiguerre. Organisée dans le prolongement de l’appel «A qui sert leur guerre ?», signé par plus 5 700 personnes, cette première rencontre est apparue d’autant plus indispensable que la guerre est très largement invisibilisée par les médias. Comme si ce n’était pas là un sujet, comme si l’Etat français pouvait agir en toute absence de transparence - et en toute impunité. On sait peu de chose sur les frappes actuellement menées sous commandement français. Au sein d’une presse très silencieuse, on peut néanmoins piocher quelques bribes censées nous rassurer sur la «propreté» des bombardements français. Quant aux victimes civiles, elles continuent d’être assimilées aux tristement fameux «dommages collatéraux». Or, d’après certaines ONG, au cours de l’année écoulée, ce sont quelque 4 000 victimes civiles qui ont été tuées par les bombardements censés viser Daech.
La France était en guerre bien avant le 13 Novembre, lequel a largement servi de prétexte à intensifier ces engagements militaires. Les guerres de pillage n’ont pas manqué depuis le début des années 2000. Ces conflits doivent être désignés par leur nom : des guerres d’ingérence impérialiste. La France n’a aucun «rôle positif» dans ces interventions, malgré ses prétentions et ambitions puisées à l’ancien répertoire colonial. L’Etat français ferait bien de cesser de donner des leçons, quand la France est le troisième marchand d’armes mondial et quand elle vend à tour de bras ses Rafale, ses hélicoptères de combat et autres patrouilleurs à des régimes théocratiques et dictatoriaux comme l’Arabie Saoudite.
Mais la guerre devient désormais un moyen de gouverner - et de gouverner par la peur. Il n’y a pas qu’en Turquie que le pouvoir réprime et traque, au nom de la guerre contre le terrorisme, celles et ceux qui s’opposent à lui, comme vient de le faire Erdogan en faisant arrêter, pourchasser et brimer des universitaires contestataires. En France, l’état de guerre désormais proclamé justifie la privation croissante des libertés et des mesures directement inspirées de l’extrême droite comme la déchéance de la nationalité. L’état d’exception ouvert par ce gouvernement de guerre est en passe de devenir la règle. Cette situation, d’une extrême gravité, passe pourtant pour une évidence dans le discours politique dominant, comme s’il s’agissait de nous habituer à cet état martial et sécuritaire. Car cet état d’urgence permet de museler les colères et les luttes : cette guerre est aussi une guerre sociale. Si nous constatons une très grande diversité de positionnements quant aux réponses à apporter sur le plan international, nous pouvons et devons, en revanche, être unis dans l’exigence d’un bilan sur les guerres menées depuis des années théoriquement «contre le terrorisme» et qui, en réalité, ne cessent de l’alimenter.
Il nous faut donc riposter par une résistance à la hauteur de ce que nous subissons, à la hauteur des guerres qui se mènent contre les populations, contre nous et en notre nom. C’est pourquoi nous avons décidé de lancer un collectif national antiguerre, exigeant l’arrêt immédiat des bombardements, des interventions et des occupations. Ce collectif se déclinera en comités locaux, tout en étant attentif aux mobilisations internationales, telles qu’on a pu encore les voir en Espagne et en Grande-Bretagne tout récemment, et aux mouvements de résistance dans les pays directement frappés par les combats. Il sera actif dans la lutte contre ce que l’état de guerre et l’état d’urgence qui en découle infligent aux populations les plus touchées par le racisme et l’islamophobie, en particulier dans les quartiers populaires, aux sans-papiers et sans-logis, à celles et ceux qui subissent une situation de misère et de discrimination. Il fera du soutien aux migrants l’une de ses priorités. Nous participerons aux manifestations du 30 janvier pour la levée immédiate de l’état d’urgence.
Prochaine réunion du collectif le 3 février à 19 heures à la Bourse du travail, Paris. antiguerre16@gmail.com
Par Le collectif antiguerre
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Communiqué des collectifs « Nous ne céderons pas » et « Stop état d’urgence »
Paris, le 31 janvier 2016
A l’appel des collectifs « Nous ne céderons pas » et « STOP état d’urgence », des manifestations ont eu lieu samedi 30 janvier dans plus de 80 villes en France
Plus de 40 000 personnes, dont 20 000 à Paris, ont marché pacifiquement contre l’état d’urgence et les différents projets de loi qui le renforcent : constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la déchéance de la nationalité, reconduction de l’état d’urgence et durcissement des lois pénales.
Cette journée de mobilisation est un premier succès, malgré les intempéries, qui appelle d’autres initiatives.
D’ores et déjà, les deux collectifs appellent :
à un rassemblement à l’Assemblée nationale vendredi 5 février à 17h, lors des premiers débats sur la constitutionnalisation de l’état d’urgence et de la déchéance de la nationalité ;
à encourager localement les parlementaires à refuser cette grave régression démocratique.
Ils appellent également à soutenir les trois militants qui passent devant le tribunal mercredi 3 février au palais de justice de Paris, pour avoir bravé, le 22 novembre dernier, l’interdiction de manifester en soutien aux réfugiés décrétée par la préfecture de police.
Collectif « Nous ne céderons pas »
Collectif « Stop état d’urgence »
www.etatdurgence.fr
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
https://www.change.org/p/une-urgence-dire-nonaupermisdetuerUne urgence : dire #NonAuPermisDeTuer !
AMAL BENTOUNSI France
Le 15 janvier 2016 la justice a acquitté un policier qui avait tué mon frère d’une balle dans le dos.
Malgré tous les témoignages mettant à mal la version du policier, la cour a tranché en faveur du tueur. Car "un policier ne tire qu’en situation de légitime défense", expliquait le porte-parole du syndicat policier à la barre. "Vous affirmez quelque chose qui reste à prouver", lui avait rétorqué l’avocat de la famille. Mais cette garantie risque de disparaître : le Gouvernement souhaite désormais inscrire la présomption de légitime défense pour les policiers dans la loi. Si cette loi passe, tout policier qui aurait tué une personne serait considéré a priori en situation de légitime défense, sans être inquiété par la justice.
Amine n'avait que 28 ans lorsqu'il a été tué par ce policier, le 21 avril 2012.
On pourrait donc croire que l’inquiétude vient d’une vision biaisée d’une famille endeuillée. Et pourtant, tous les journalistes en sont témoins : la police, dans cette affaire, a menti, au point où l’avocat général, représentant de l’Etat, a lui-même demandé à ce que l’accusé, Damien Saboundjian, soit condamné. Le magistrat considérant ce dernier "dangereux", il a demandé à ce que le jury "rende une décision qui ne puisse pas être interprétée comme un permis de tuer". Une première en France.
On pourrait croire aussi qu’il n’y a pas de fumée sans feu. Car au fond, Amine était un "bon client" pour la légitime défense : il était de ceux qu’on appelle les "délinquants multirécidivistes" qui mériteraient de mourir, pour qui la peine de mort n'a pas été abolie.
Mais les familles des adolescents Zyed et Bouna qui rentraient chez eux après un match de foot en 2005, du retraité Ali Ziri qui rentrait chez lui en voiture en 2007, ou du jeune écolo Rémi Fraisse qui avait rejoint une manifestation en 2014 le savent tout autant que les 15 familles par an (en moyenne !) qui perdent un proche entre les mains de la police en France : délinquant ou pas, le procédé est toujours le même. Criminalisation de la victime pour trouver une excuse plausible au policier, et détourner l’attention de tous les mensonges et incohérences dans le dossier ; protection et acquittement du tueur.
Nous n’avons pas en France un problème de policiers tués par des citoyens. Nous avons un problème de citoyens tués par la police, en toute impunité. Problème qui a d’ailleurs fait l’objet de deux rapports d’Amnesty International en 5 ans.
Avec les familles Wissam El Yamni, Abdoulaye Camara, Lahoucine Aït Omghar, Amadou Koumé, Mourad Touat et Hocine Bouras, Taghbalout Karim décédées les années suivantes, nous avons décidé de nous unir pour nous donner la force de nous battre, et réclamé une juridiction indépendante pour enquêter sur les morts survenues dans l’exercice de la fonction des agents des forces de l’ordre.
Mais à la place, c’est l’inscription du permis de tuer des policiers dans la loi que le Gouvernement a choisi. Avec la lutte antiterroriste comme prétexte, la proposition de loi qui risque de passer inaperçue est présentée en conseil des ministres le 3 février. Or si nous voulons donner espoir à ceux qui ne croient plus au slogan des frontons des mairies françaises, nous avons tous le devoir de nous y opposer.
Car un policier qui n’est plus justiciable est une menace pour la démocratie. Et dans une République qui vient d’autoriser le port d’arme hors service, on ose à peine en imaginer les risques.
Nous ne voulons pas que la liste des victimes s’allonge à un rythme encore plus élevé chaque année.
Nous ne voulons pas devenir les monstres que le traumatisme et le déni de justice produisent. Nous voulons garder espoir en l’Etat de Droit, pour que chaque famille endeuillée puisse un jour voir la Justice.
Nous vous demandons, Mesdames et Messieurs les parlementaires, de voter NON au permis de tuer.
Amal Bentounsi
Collectif Urgence notre police assassine
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
Depuis la déclaration de l'état d'urgence en France, les autorités ont comptabilisé 3210 perquisitions. Plus de 400 personnes ont été assignées à résidence et 12 lieux de cultes fermés, une mise en examen pour terrorisme...
http://www.amnesty.fr/etat-urgence
http://www.amnesty.fr/etat-urgence
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014
Re: Contre l'état d'urgence et les guerres
http://www.politis.fr/articles/2016/02/cet-obscur-desir-de-proteger-la-nation-34088/Cet obscur désir de protéger la nation
Pour Nacira Guénif les pulsions totalitaires de Valls et de Hollande puisent dans un passé politique qui les hante.
Se prévalant d’un état d’urgence en voie de constitutionnalisation, un gouvernement socialiste qui n’en est plus à un reniement près, vient d’infliger un nouveau camouflet aux citoyens de seconde zone qui ont pourtant contribué à son élection. Alors qu’ils demandaient depuis 30 ans le droit de vote des étrangers, pour affirmer la dignité de leurs parents, il leur est répondu par la gifle cinglante de la déchéance de nationalité. Ce que le congrès ne pouvait pas pour la première réforme – faute parait-il de majorité constitutionnelle - il le pourrait pour l’autre, car la protection de la nation l’exigerait. Et la cible en est toute trouvée : les nouveaux français. Disposant de l’avantage indu d’une double nationalité mêlant une France exigeant une loyauté sans faille, à des États avec lesquels elle s’acoquine pourtant sans entrave, voilà qu’il leur faut supporter le fardeau d’une nouvelle infamie née de la suspicion entretenue à leur encontre en raison de leurs noms imprononçables et de leur identité trouble, et ce quels que soient les actes dont ils se seront rendu responsables.
Désormais, Hollande et Valls cèdent sans restriction aux désirs les plus fous de certains droitiers haineux et d’une extrême droite qui n’a même plus besoin d’être élue pour faire appliquer son programme : on frémit. Que ces deux futurs candidats socialistes à la présidentielle obtempèrent devant des injonctions qu’ils dénonçaient naguère n’est que la suite logique de la dédiabolisation d’une pensée fascisante qu’ils alimentent de fait, tout en s’en défendant la main sur le cœur : on s’inquiète. Que cela trahisse les manières brouillonnes d’un gouvernement contraint à une improvisation hasardeuse, qu’il a fallu faire tenir d’aplomb une fois le coup parti, quand il ne cède pas à l’opportunisme, ne doit plus divertir de l’essentiel : répliquer au dernier camouflet infligé par un pouvoir à la dérive aux citoyens dont les allégeances multiples ou les convictions radicales en font des ennemis de l’intérieur.
Cette punition collective prend la forme d’un vertigineux empilement entre état d’urgence, assignations à résidences, dont certaines viennent d’être cassées par le Conseil d’état, déchéance de nationalité pour crimes et délits liés à des actes de terrorisme, et extension du permis de tuer grâce à l’état de nécessité qui supplante la légitime défense. Cet emballement sécuritaire constitue la dernière diversion hasardeuse de gouvernants égarés dans un champ politique miné par leurs soins. Recours exhumés des régimes d’exception de Vichy et de la guerre d’Algérie, ils sont triturés par des apprentis sorciers pour ficeler sur un coin de table une mesure qui certes frappe les imaginations et met la sphère médiatique en émoi mais n’en dénote pas moins une parfaite irresponsabilité. À pratiquer la surenchère, entre refus du bout des lèvres de l’amalgame et vieux réflexe de désignation des coupables, l’appareil d’état aggrave la désorientation qui l’entrave depuis des décennies. Or, prétendre protéger la nation en désignant lesdits bi-nationaux à la suspicion, parce qu’ils seraient le puit sans fond du terroriste de demain, c’est professer ce que l’on se défend de faire. Et, plus insidieux encore, c’est occuper l’esprit et la vie de ces citoyens, bouc émissaires commodes en les contraignant à constamment se défendre du soupçon qui pèse sur eux plutôt que de continuer à être ce qu’ils et elles sont déjà : les citoyens ordinaires d’un pays qui peinent à les accepter pour tels et leur jette constamment à la figure racisme et discrimination. À ce degré d’acharnement, la pathologie n’est plus du côté que l’on croit.
Or qu’on ne s’y trompe pas, l’indignité de la mesure de déchéance ne réside pas dans le fait qu’elle ne sera pas dissuasive maintenant ni édifiante lorsqu’elle sera peut-être mise en œuvre au terme de longues peines. Elle procède de l’effet d’amalgame immédiat et redoutable qui est dénoncé à l’envi et pratiqué sans entrave. Lesdits bi-nationaux sont dès à présent dans le viseur des censeurs et inquisiteurs de tous poils. La déchéance vient entériner un état de fait qui deviendra donc un état de droit au nom de la protection d’une nation contre une partie de ses citoyens jugés a priori indignes en raison de ce qu’ils sont. Leur déchéance est déjà à l’œuvre collectivement parce qu’il est prouvé depuis longtemps et sans que cela inquiète quiconque que leur vie ne vaut rien et qu’elle est donc suspendue à l’arbitraire d’abus de pouvoir au point de la supprimer en toute impunité. L’obscénité d’un ordre politique injuste et inégalitaire réside dans ces pratiques qui ont lieu sous nos yeux.
La déchéance des bi-nationaux est anticipée par les délits de faciès, les dénis de droit, les vexations, humiliations et intimidations qui font le lit des discriminations routinisées de l’administration et des institutions, devenues une mauvaise habitude presque inextirpable. Le racisme systémique trouve à s’exprimer sans que quiconque ne cille devant l’outrage fait à la dignité des personnes et au droit commun. C’est ainsi que la victime est tenue pour coupable de ce qui lui arrive, fusse la mort. Aux assises de Bobigny le 15 janvier 2016, le verdict acquittant le policier ayant tué d’une balle dans le dos Amine Bentounsi vient d’en faire la démonstration implacable. Ainsi le racisme s’est mué en une vertu patriotique que l’on s’arrache sur le marché d’une morale ethniquement pure et est prônée au plus haut niveau de l’état lorsque la justice disculpe des policiers déviants et incompétents. Avec le verdict attendu dix ans du procès des policiers mis en cause dans la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, la preuve est faite que la déchéance d’humanité de certains membres de la société française est déjà à l’œuvre, ouvrant la voie à la constitutionnalisation de la déchéance de nationalité, ravalée à une simple formalité. Si cet inutile excès de zèle de l’exécutif ne vise pas les nouveaux français d’ascendance migrante et coloniale, qui donc vise-t-il ? Car, ils et elles n’ont aucun mal à se reconnaître les destinataires de cet ultime camouflet.
En renforçant la légitimité de pratiques d’exception faites pour des temps exceptionnels, qu’ils réactivent face à une menace terroriste opportunément agitée par ses meilleurs porte-voix, Hollande et Valls se trompent d’époque et se fourvoient sur la méthode. Il n’y a plus de légitimité à maintenir un quelconque empire, fut-il économique et énergétique : le silence imposé lors de la cop 21, en recourant à l’assignation à résidence le rappelle éloquemment. Il feint d’ignorer le fait que ses décisions, relayées par un Valls apparemment aux ordres, entrave le mouvement de larges segments de la société française, pas seulement à gauche, vers une société plus juste et plus égalitaire, plus soucieuse de rapports responsables aux peuples pris sous le feu de guerres impériales qui sèment un chaos persistant. Sans imagination, ni clairvoyance, en policier bureaucrate élu qu’il accepte de devenir, il entend administrer la répression contre le confortable ennemi de l’intérieur dont la France s’est dotée tout en promouvant sans relâche à l’extérieur une civilisation supposée irréprochable. En cela, il s’inscrit fidèlement dans une généalogie visant à défigurer toujours plus, s’il en était besoin, une constitution à bout de souffle et s’acharne sur celles et ceux qui en incarnent la part refoulée. Ainsi ce serait contre la présence définitive d’un refoulé colonial rappelé par ces bi-nationaux que s’exprimerait par la voie constitutionnelle cet autre refoulé fascisant.
Depuis longtemps déjà, l’assignation à résidence des arabes, noirs et musulman-e-s n’exige pas l’état d’urgence réactivé par les attaques du 13 novembre, car les contrôles en tout genre vont bon train. Pourtant, instauré en 1955, sévissant durant toute la guerre d’Algérie, exhumé pour mater d’autres « événements » en Nouvelle-Calédonie en 1985, puis brandi en 2005 comme une punition de 3 semaines face aux gesticulations d’une jeunesse populaire mal élevée, l’état d’urgence est en passe d’être perfectionné dans sa mécanique répressive par l’adjonction à l’assignation à résidence d’une déchéance de nationalité à large spectre. Déchoir un peu plus ceux qui sont déjà pris dans l’étau de la suspicion, prisonniers de leur corps, étranger quoi qu’ils fassent, c’est le sort qu’entend leur réserver un état devenu policier. Car si cette loi n’est censée s’appliquer qu’à des cas extrêmes, nous dit-on, il est aisé de mesurer l’ampleur de l’opprobre que son adoption jettera encore plus sur de vastes groupes de français selon leur faciès, leur nom et leur origine, religion, réelles ou supposées. Et d’anticiper le déchainement de haine ainsi autorisée à s’exprimer toujours plus.
Pour comprendre, sans excuser, les ressorts qui motivent ses instigateurs, remontons jusqu’aux sources de la mécanique totalitaire à laquelle Hollande et Valls cèdent sans discernement. Ils gisent dans le passé qui a forgé leur vocation politique et semblent se retourner contre eux pour leur sauter à la gorge.
En cédant à de basses manœuvres politiciennes sans en apercevoir les conséquences massives, Hollande est hanté - à son insu ? - par le spectre de personnages qui ont fait en leur temps des concessions à un état autoritaire aux relents putschistes, dont les vestiges sont consignés dans la constitution de la 5ème république, à laquelle il entend apporter sa marque. Voulue et pensée par et pour un seul homme, le général de Gaulle, cette constitution a fourni le cadre d’accomplissement de son dessein : liquider l’empire français sous la forme d’un état colonial pour mieux le reconfigurer dans les contours actuels, notamment de la françafrique, et mettre fin à ce qu’il a bien compris être une guerre d’indépendance en Algérie. Avant son retour, un certain Mitterrand avait tout autorisé et avalisé, y compris la torture, pour venir à bout des rebelles et mater l’insurrection algérienne. Les héritiers de cette lutte émancipatrice, qui un jour coexisteront avec « la génération Mitterrand », savaient tout de ses compromissions et convictions inflexibles qu’il n’a jamais reniées. Ce sont ces deux spectres emblématiques du passé amnistié de la France impériale et coloniale qui hantent un Hollande à la peine, s’efforçant, comme son prédécesseur préconisant la déchéance de nationalité à Grenoble dans un discours romophobe en diable, d’enfiler le costume trop grand pour lui du chef de guerre, du corps du roi, n’en révélant que mieux la pauvre défroque.
Hanté par d’autres fantômes, Valls a livré son interprétation du monde exposé à la terreur lorsqu’au lendemain du congrès de Versailles du 16 novembre 2015, il s’est appuyé sur l’exemple du Royaume-Uni thatchérien réprimant l’IRA et de l’Espagne franquiste criminalisant l’ETA pour justifier qu’il ne serait pas possible de déjouer tous les attentats et d’assurer une complète sécurité à tous les français, sauf si... Passée inaperçue dans le torrent de déclarations et de commentaires, cette référence à des états qui n’avaient rien de démocratique et tout de policier dont l’un fut le théâtre de sa jeunesse ne laisse pas d’étonner, même s’il a tenté récemment de l’édulcorer. Un éclairage oblique de cet argument équivoque nous est offert par Cet obscur objet du désir de Luis Buñuel, dont l’intrigue sexuelle nouée par la perversité de personnages bifaces était rythmée, comme en contrepoint, par l’explosion de bombes à la lisière de ce monde convaincu de son bon droit et saturé par une insatiable quête de jouissance. Hunger de Steve McQueen complète le tableau en nous rappelant le prix élevé que toute répression prélève sur le corps de celui qui est désigné comme l’ennemi sans que cela ne fasse ciller quiconque. Comme l’indique des sondages favorables au tour d’écrou qui vient, l’indifférence s’installe imperceptiblement face à l’extension des multiples formes de la violence d’état croyant répondre à l’extrémisme violent.
Ainsi Hollande comme Valls manifestent les signes d’une dépendance à l’égard d’un passé trouble qui les habite et semble parler par leur voix, comme s’ils ne pouvaient en réprimer les secousses les plus profondes. Pour des motifs propres à la biographie de chacun et à leurs mobiles secrets, le spectre du totalitarisme fraie insidieusement sa voie dans les esprits confus du tandem socialiste qui nous gouverne. La reprise en main autoritaire restée tapie en leur for intérieur, trouvant sans mal à s’y lover, attendant le moment de frapper, vient de vaincre leur réticence d’honnête homme de gauche, tels qu’ils se plaisent à se voir. L’état d’urgence, la déchéance de nationalité et l’arsenal législatif annoncé tout comme leurs probables dommages collatéraux le démontrent. Tout cela parce qu’ils seraient animés par un obscur désir de protéger la nation.
Les masques sont tombés et révèlent le sinistre visage d’un nationalisme militarisé et grimaçant dont le rictus raciste rappelle des périodes sombres qu’on pensait remisées dans le passé, définitivement. Reste à les y renvoyer.
En marchant sur Versailles ?
MO2014- Messages : 1287
Date d'inscription : 02/09/2014

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