Des quotas dans le foot ?
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louhans
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Zappa
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Re: Des quotas dans le foot ?
Un article de Rue 89 : " Les patrons des Bleues veulent moins de Noirs et d'Arabes "
http://www.rue89.com/2011/04/28/les-patrons-des-bleus-veulent-moins-de-blacks-de-beurs-201689
Ils font presque pire que céder aux aspirations nationalo-racistes d'une partie du public français de l'équipe de foot, ils font un espèce de raisonnement dans la plus pure tradition colonialiste :
- 1) pendant des années on a mis l'accent dans les centres de formation sur les joueurs très physiques, très athlétiques et en terme de résultats c'est pas bon
- 2) les joueurs très athlétiques sont noirs
- 3) si on veut des joueurs techniques, il nous faut des blancs donc moins de noirs dans les centres de formation et en équipe de france
Mais ça serait à se tenir les côtes si c'était pas aussi nauséabond et navrant. Les hommes dans les instances dirigeantes qui ont formulé ces idées connaissent ils seulement un minimum l'histoire du football ? ( qui regorge de joueurs noirs et arabes très techniques, forcément )
http://www.rue89.com/2011/04/28/les-patrons-des-bleus-veulent-moins-de-blacks-de-beurs-201689
Ils font presque pire que céder aux aspirations nationalo-racistes d'une partie du public français de l'équipe de foot, ils font un espèce de raisonnement dans la plus pure tradition colonialiste :
- 1) pendant des années on a mis l'accent dans les centres de formation sur les joueurs très physiques, très athlétiques et en terme de résultats c'est pas bon
- 2) les joueurs très athlétiques sont noirs
- 3) si on veut des joueurs techniques, il nous faut des blancs donc moins de noirs dans les centres de formation et en équipe de france
Mais ça serait à se tenir les côtes si c'était pas aussi nauséabond et navrant. Les hommes dans les instances dirigeantes qui ont formulé ces idées connaissent ils seulement un minimum l'histoire du football ? ( qui regorge de joueurs noirs et arabes très techniques, forcément )
Zappa- Messages : 146
Date d'inscription : 25/07/2010
Le signal d'alarme du football français
Par Edwy Plenel
Source : Mediapart
(J’ai mis texte intégral et non pas lien, car c’est payant.
Ceux qui peuvent s’abonner, je viens de le refaire, ça vaut le coup sur bp de sujets…)
La Constitution d'une République est le texte qui lui donne sens et vie. Or celle de la nation française, malgré les changements de régimes et de majorités, commence par le même préambule depuis 1946, donc aussi bien sous la Quatrième que sous la Cinquième République. C'est dire l'importance de ce qui y est énoncé: non pas des dispositions institutionnelles forcément périssables, mais des principes solennels fermement inviolables.
C'est ainsi que l'article premier de ce préambule constitutionnel s'ouvre par ces mots: « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »
Il fallut deux guerres mondiales, des millions de morts, des génocides et des massacres, des crimes contre l'humanité, bref le surgissement de la barbarie au cœur de la culture et de la civilisation européennes, pour que chacun de ces mots-là soient gravés en tête de notre Constitution républicaine. Indivisible, la République accorde les mêmes droits à tous ses citoyens, les plus proches ou les plus lointains, d'Ile-de-France ou d'Outre-mer, nés en Europe ou venus d'Afrique, d'ascendance étrangère ou de vieille souche. Loin de signifier le rejet des croyances, sa laïcité signifie qu'elle les respecte dans leur diversité, y compris l'islam, fût-elle majoritairement de culture catholique. Indissociables, ses ambitions démocratique et sociale l'obligent enfin à assurer l'égalité de toutes et tous, sans faire de distinction « d'origine, de race ou de religion ».
Il suffit de ce rappel pour comprendre qu'aucune autorité de ce pays, et notamment aucun tribunal, ne pourrait admettre qu'on se livre, sous quelque prétexte que ce soit, à un tri entre Français selon leur origine étrangère, la couleur de leur peau ou la religion qu'ils pratiquent. Il suffit de l'avoir à l'esprit pour comprendre l'enjeu décisif de l'enquête menée par Mediapart au cœur du football français : elle établit que les plus hauts responsables opérationnels de ce sport national ont récemment envisagé d'organiser une discrimination dans le recrutement des joueurs fondée sur des critères d'origine, de race ou de religion.
Au prétexte qu'un jour ou l'autre, ils pourraient aller jouer sous d'autres drapeaux, des jeunes Français d'origine étrangère seraient jugés moins français que d'autres, moins fiables et moins fidèles, quelles que soient leurs aptitudes et leurs compétences (notre article ici). Au prétexte que le jeu des équipes devrait devenir moins physique et plus technique, des jeunes Français d'origine africaine seraient écartés selon des critères racialistes, identifiant la couleur noire de leur peau à un type humain déterminé. Au prétexte que les joueurs musulmans seraient des fauteurs de trouble, des jeunes Français ayant l'islam pour religion seraient exclus des sélections, leur croyance et leur culture étant ramenées aux qualificatifs « gris », « islamistes » ou « sarrasins ».
Mediapart à la disposition de la commission d'enquête
Telle est, abruptement résumée, la réalité que notre enquête a révélée. Nous ne nous appuyons pas seulement sur ce qui s'est dit lors de la réunion officielle de la Direction technique nationale (DTN) de la Fédération française de football (FFF), tenue le 8 novembre 2010 à Paris et dont nous avons publié le verbatim. Elles-mêmes choquées par cette dérive qu'elles n'arrivaient pas à empêcher, nos sources nous ont rapporté d'autres faits, d'autres anecdotes, d'autres réunions.
Notre premier article évoque ainsi, outre la réunion du 8 novembre 2010, un colloque de la DTN tenu du 18 au 21 juillet 2010 ainsi qu'un séminaire officiel réuni le 18 mars. De plus, toutes les informations venues de nos sources étaient recoupées par les déclarations publiques des responsables concernés qui habillaient d'euphémismes transparents leur projet de « blanchiment », selon l'expression du quotidien L'Equipe, du football français.
Bref, Mediapart a dévoilé publiquement ce qu'une grande part des acteurs professionnels du football savait, subodorait ou devinait. La ministre de la jeunesse et des sports, Chantal Jouanno, ne s'y est pas trompée, prenant d'emblée au sérieux notre travail et, tout autant, la mesure de la gravité de ce qui était révélé. Au lendemain de notre premier article, elle a immédiatement réclamé une enquête de la FFF, complétée par des investigations de l'Inspection de la jeunesse et des sports. Et le jour du deuxième – le fameux verbatim –, elle a obtenu la suspension immédiate du DTN, François Blaquart, suivie des excuses contrites de l'entraîneur de l'équipe de France, Laurent Blanc.
L'un et l'autre – et notamment le second – avaient en effet menti, vendredi 29 avril, en affirmant que ce que rapportait Mediapart n'était jamais venu à leurs oreilles. La publication, le lendemain, d'extraits fidèles de la discussion opérationnelle, tenue très officiellement en novembre 2010, a ruiné cette première ligne de défense.
Une deuxième ligne a alors été rapidement échafaudée, trouvant quelques relais parmi des lecteurs trop pressés (par exemple, Daniel Schneidermann d'Arrêt sur images). Mediapart instruirait à l'encontre des dirigeants du football français un procès détestable de racisme – mot que nous n'avons pourtant pas utilisé, lui préférant ceux plus précis et plus concrets de discrimination ou de ségrégation. Alors qu'en vérité, il ne s'agirait que de régler des problèmes de concurrence économique – l'exode des binationaux – et de technique de jeu – le profil des joueurs.
Aussi pédagogique qu'informé, notre dernier article a montré combien il s'agissait là de faux prétextes, de l'habillage en somme de cette discrimination qu'il fallait, selon les propos tenus en novembre 2010, tenir secrète : « On peut baliser, en non-dit, sur une espèce de quota, expliquait alors le DTN. Mais il ne faut pas que ce soit dit. Ça reste vraiment que de l'action propre. Bon voilà, on fait attention. On a les listes, à un moment donné... » Non seulement aucun de ces deux arguments ne tient factuellement, mais de plus ils illustrent le sujet même de nos révélations : comment, auprès d'esprits informés, gagne l'insensibilité aux discriminations et l'oubli de nos valeurs.
Quand des photos d'une vingtaine d'équipes de jeunes de 15 ans sont projetées lors d'une réunion de la DTN, le 18 mars dernier, pour illustrer l'objectif à atteindre, on ne parle évidemment pas de nationalité, mais d'apparence. C'est la proportion importante de joueurs de types noirs ou arabes qui est soulignée, à un âge où ils rêvent tous de faire carrière sous le drapeau tricolore et où la question d'une nationalité de rechange ne se pose évidemment pas pour eux, et ne se posera pour la plupart jamais.
De plus, répétons-le, tout Français a le droit de bouger, d'évoluer, de changer et d'arpenter le monde. Et cette réussite de nos talents à l'étranger n'est-elle pas l'une de nos fiertés nationales, illustrant notre envie d'ailleurs et notre goût des autres ? Qui s'étonnerait des ingénieurs, des médecins, des informaticiens, des avocats, des banquiers, etc., qui s'en vont travailler dans d'autres pays et, parfois, en prennent la nationalité ?
Jusqu'au dérapage incompréhensible d'un sociologue respectable évoquant un « morphotype africain » (voir la réponse de Michel Wieviorka à Stéphane Beaud), c'est le miroir que nous tend cette histoire qui est détestable, et non pas les révélations de Mediapart qui, espérons-le, serviront utilement à le briser. Ce n'est pas la République française qui est ici portraiturée mais son contraire même : un pays qui, au cœur de son sport le plus populaire, accepte de faire un tri, dès le jeune âge, parmi ses nationaux, au prétexte caché de leur origine étrangère, de leur peau noire ou de leur religion musulmane.
Les dirigeants du football qui ont mis en marche cette machine infernale ne se pensent pas racistes, et nous ne les avons jamais accusés de l'être. Mais, par ignorance ou inconscience, ils font le jeu des racistes en cédant à un air du temps lui-même détestable, celui qui hiérarchise les Français selon leur origine, leur apparence ou leur croyance.
Dans cette affaire, Mediapart n'a qu'un but, outre la vérité de ses informations : que l'on siffle au plus vite la fin de ce jeu malsain. Et que l'on se saisisse de cette occasion pour relever notre nation, ici tombée bien bas, en faisant la pédagogie de ses valeurs républicaines et de ses principes constitutionnels. Notre enquête collective s'appuie sur des preuves et sur des témoins. Nous sommes à la disposition de la commission d'enquête désignée par la FFF et confiée au député Patrick Braouezec pour l'aider dans sa mission. Et, ainsi, sortir la France de ce mauvais cauchemar.
Lire Aussi
• Foot français: les dirigeants veulent moins de noirs et d'arabes
• Quotas dans le foot: la vérité au mot près
• La binationalité: vrai phénomène, faux problème
• Foot et politique : quinze années d'instrumentalisation et de dérapages
Source : Mediapart
(J’ai mis texte intégral et non pas lien, car c’est payant.
Ceux qui peuvent s’abonner, je viens de le refaire, ça vaut le coup sur bp de sujets…)
La Constitution d'une République est le texte qui lui donne sens et vie. Or celle de la nation française, malgré les changements de régimes et de majorités, commence par le même préambule depuis 1946, donc aussi bien sous la Quatrième que sous la Cinquième République. C'est dire l'importance de ce qui y est énoncé: non pas des dispositions institutionnelles forcément périssables, mais des principes solennels fermement inviolables.
C'est ainsi que l'article premier de ce préambule constitutionnel s'ouvre par ces mots: « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »
Il fallut deux guerres mondiales, des millions de morts, des génocides et des massacres, des crimes contre l'humanité, bref le surgissement de la barbarie au cœur de la culture et de la civilisation européennes, pour que chacun de ces mots-là soient gravés en tête de notre Constitution républicaine. Indivisible, la République accorde les mêmes droits à tous ses citoyens, les plus proches ou les plus lointains, d'Ile-de-France ou d'Outre-mer, nés en Europe ou venus d'Afrique, d'ascendance étrangère ou de vieille souche. Loin de signifier le rejet des croyances, sa laïcité signifie qu'elle les respecte dans leur diversité, y compris l'islam, fût-elle majoritairement de culture catholique. Indissociables, ses ambitions démocratique et sociale l'obligent enfin à assurer l'égalité de toutes et tous, sans faire de distinction « d'origine, de race ou de religion ».
Il suffit de ce rappel pour comprendre qu'aucune autorité de ce pays, et notamment aucun tribunal, ne pourrait admettre qu'on se livre, sous quelque prétexte que ce soit, à un tri entre Français selon leur origine étrangère, la couleur de leur peau ou la religion qu'ils pratiquent. Il suffit de l'avoir à l'esprit pour comprendre l'enjeu décisif de l'enquête menée par Mediapart au cœur du football français : elle établit que les plus hauts responsables opérationnels de ce sport national ont récemment envisagé d'organiser une discrimination dans le recrutement des joueurs fondée sur des critères d'origine, de race ou de religion.
Au prétexte qu'un jour ou l'autre, ils pourraient aller jouer sous d'autres drapeaux, des jeunes Français d'origine étrangère seraient jugés moins français que d'autres, moins fiables et moins fidèles, quelles que soient leurs aptitudes et leurs compétences (notre article ici). Au prétexte que le jeu des équipes devrait devenir moins physique et plus technique, des jeunes Français d'origine africaine seraient écartés selon des critères racialistes, identifiant la couleur noire de leur peau à un type humain déterminé. Au prétexte que les joueurs musulmans seraient des fauteurs de trouble, des jeunes Français ayant l'islam pour religion seraient exclus des sélections, leur croyance et leur culture étant ramenées aux qualificatifs « gris », « islamistes » ou « sarrasins ».
Mediapart à la disposition de la commission d'enquête
Telle est, abruptement résumée, la réalité que notre enquête a révélée. Nous ne nous appuyons pas seulement sur ce qui s'est dit lors de la réunion officielle de la Direction technique nationale (DTN) de la Fédération française de football (FFF), tenue le 8 novembre 2010 à Paris et dont nous avons publié le verbatim. Elles-mêmes choquées par cette dérive qu'elles n'arrivaient pas à empêcher, nos sources nous ont rapporté d'autres faits, d'autres anecdotes, d'autres réunions.
Notre premier article évoque ainsi, outre la réunion du 8 novembre 2010, un colloque de la DTN tenu du 18 au 21 juillet 2010 ainsi qu'un séminaire officiel réuni le 18 mars. De plus, toutes les informations venues de nos sources étaient recoupées par les déclarations publiques des responsables concernés qui habillaient d'euphémismes transparents leur projet de « blanchiment », selon l'expression du quotidien L'Equipe, du football français.
Bref, Mediapart a dévoilé publiquement ce qu'une grande part des acteurs professionnels du football savait, subodorait ou devinait. La ministre de la jeunesse et des sports, Chantal Jouanno, ne s'y est pas trompée, prenant d'emblée au sérieux notre travail et, tout autant, la mesure de la gravité de ce qui était révélé. Au lendemain de notre premier article, elle a immédiatement réclamé une enquête de la FFF, complétée par des investigations de l'Inspection de la jeunesse et des sports. Et le jour du deuxième – le fameux verbatim –, elle a obtenu la suspension immédiate du DTN, François Blaquart, suivie des excuses contrites de l'entraîneur de l'équipe de France, Laurent Blanc.
L'un et l'autre – et notamment le second – avaient en effet menti, vendredi 29 avril, en affirmant que ce que rapportait Mediapart n'était jamais venu à leurs oreilles. La publication, le lendemain, d'extraits fidèles de la discussion opérationnelle, tenue très officiellement en novembre 2010, a ruiné cette première ligne de défense.
Une deuxième ligne a alors été rapidement échafaudée, trouvant quelques relais parmi des lecteurs trop pressés (par exemple, Daniel Schneidermann d'Arrêt sur images). Mediapart instruirait à l'encontre des dirigeants du football français un procès détestable de racisme – mot que nous n'avons pourtant pas utilisé, lui préférant ceux plus précis et plus concrets de discrimination ou de ségrégation. Alors qu'en vérité, il ne s'agirait que de régler des problèmes de concurrence économique – l'exode des binationaux – et de technique de jeu – le profil des joueurs.
Aussi pédagogique qu'informé, notre dernier article a montré combien il s'agissait là de faux prétextes, de l'habillage en somme de cette discrimination qu'il fallait, selon les propos tenus en novembre 2010, tenir secrète : « On peut baliser, en non-dit, sur une espèce de quota, expliquait alors le DTN. Mais il ne faut pas que ce soit dit. Ça reste vraiment que de l'action propre. Bon voilà, on fait attention. On a les listes, à un moment donné... » Non seulement aucun de ces deux arguments ne tient factuellement, mais de plus ils illustrent le sujet même de nos révélations : comment, auprès d'esprits informés, gagne l'insensibilité aux discriminations et l'oubli de nos valeurs.
Quand des photos d'une vingtaine d'équipes de jeunes de 15 ans sont projetées lors d'une réunion de la DTN, le 18 mars dernier, pour illustrer l'objectif à atteindre, on ne parle évidemment pas de nationalité, mais d'apparence. C'est la proportion importante de joueurs de types noirs ou arabes qui est soulignée, à un âge où ils rêvent tous de faire carrière sous le drapeau tricolore et où la question d'une nationalité de rechange ne se pose évidemment pas pour eux, et ne se posera pour la plupart jamais.
De plus, répétons-le, tout Français a le droit de bouger, d'évoluer, de changer et d'arpenter le monde. Et cette réussite de nos talents à l'étranger n'est-elle pas l'une de nos fiertés nationales, illustrant notre envie d'ailleurs et notre goût des autres ? Qui s'étonnerait des ingénieurs, des médecins, des informaticiens, des avocats, des banquiers, etc., qui s'en vont travailler dans d'autres pays et, parfois, en prennent la nationalité ?
Jusqu'au dérapage incompréhensible d'un sociologue respectable évoquant un « morphotype africain » (voir la réponse de Michel Wieviorka à Stéphane Beaud), c'est le miroir que nous tend cette histoire qui est détestable, et non pas les révélations de Mediapart qui, espérons-le, serviront utilement à le briser. Ce n'est pas la République française qui est ici portraiturée mais son contraire même : un pays qui, au cœur de son sport le plus populaire, accepte de faire un tri, dès le jeune âge, parmi ses nationaux, au prétexte caché de leur origine étrangère, de leur peau noire ou de leur religion musulmane.
Les dirigeants du football qui ont mis en marche cette machine infernale ne se pensent pas racistes, et nous ne les avons jamais accusés de l'être. Mais, par ignorance ou inconscience, ils font le jeu des racistes en cédant à un air du temps lui-même détestable, celui qui hiérarchise les Français selon leur origine, leur apparence ou leur croyance.
Dans cette affaire, Mediapart n'a qu'un but, outre la vérité de ses informations : que l'on siffle au plus vite la fin de ce jeu malsain. Et que l'on se saisisse de cette occasion pour relever notre nation, ici tombée bien bas, en faisant la pédagogie de ses valeurs républicaines et de ses principes constitutionnels. Notre enquête collective s'appuie sur des preuves et sur des témoins. Nous sommes à la disposition de la commission d'enquête désignée par la FFF et confiée au député Patrick Braouezec pour l'aider dans sa mission. Et, ainsi, sortir la France de ce mauvais cauchemar.
Lire Aussi
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• La binationalité: vrai phénomène, faux problème
• Foot et politique : quinze années d'instrumentalisation et de dérapages
Roseau- Messages : 17750
Date d'inscription : 14/07/2010
Des quotas dans le foot ?
dans Médiapart :
Luc Sonor: «Quand ça va mal, les noirs et les arabes sont les boucs émissaires»
Ancien joueur professionnel, antillais, sélectionné en équipe de
France dans les années 1980, Luc Sonor est aujourd'hui adhérent de
l'Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP – syndicats des
joueurs professionnels), où il s'occupe des internationaux, notamment de
la reconversion des anciens de l'Equipe de France, et consultant sur
Canal Plus.
Dans un entretien à Mediapart, il explique être «choqué» des propos «indécents» tenus
par certains dirigeants du football sur la mise en place de quotas
discriminatoires dans la formation et la sélection des joueurs. Il «partage» le point de vue de Lilian Thuram, qui a estimé, dimanche, dans l'émission «Téléfoot» qu'il s'agissait d'un «scandale» «extrêmement grave» et que «certains (avaient) la mémoire courte». «Si la France avait fait une bonne coupe de monde en 2010, on
n'aurait jamais parlé de ça. Quand ça va bien, on (les noirs et les arabes)
est les meilleurs, quand ça va mal, on est les boucs émissaires», explique Luc Sonor.
Mediapart: Comment réagissez-vous aux propos tenus par des dirigeants du foot français sur la mise en place de politiques
discriminatoires?
Luc Sonor: Je trouve ces propos totalement indécents, surtout
dans un pays comme le nôtre. Le seul fait de parler de quotas est
indécent. Je suis antillais, français, black, ça me choque. Autour de
moi, beaucoup de footballeurs professionnels (ou anciens professionnels)
sont choqués, abasourdis et n'arrivent pas y croire. Mais si on suspend
François Blaquart, c'est qu'il y a eu confirmation de ce
qu'a écrit Mediapart.
Si la France avait fait une bonne coupe de monde (Ndlr: en 2010), on
n'aurait jamais parlé de ça. Quand ça va bien, on (les noirs et les
arabes)
est les meilleurs, quand ça va mal, on est les boucs émissaires. Là, il
y a eu un échec, on tape
sur nous et on pense que ça ira mieux, ça me fatigue! J'entends «les
noirs courent plus
vite», sont «plus costauds»? Non, on est comme les autres, on mange
comme
les autres... En fait, non, nous ne sommes pas comme les autres: nous
devons travailler plus que les autres pour réussir. Donc je partage le
point de vue de Lilian Thuram ou de Pape Diouf (Ndlr: l'ancien président
de l'Olympique de Marseille).
Les dirigeants de la FFF et Laurent Blanc se défendent en expliquant qu'ils parlaient des binationaux. Qu'en pensez-vous?
Luc Sonor: Les binationaux, ce ne sont pas les arabes et les
noirs, ce sont aussi les Italiens, les Polonais, etc. Et par ailleurs,
c'est aujourd'hui qu'on s'aperçoit que les jeunes partent (ndlr: jouer
dans des sélections étrangères)? Et en quoi cela dérange? S'ils partent,
c'est qu'on ne les a pas retenus en équipe de France. Pour moi, c'est
une fierté au contraire, c'est plutôt valorisant pour la France de
pouvoir se dire: «Tiens, c'est nous qui les avons formés.» Pourquoi tout
ce ramdam maintenant? Si l'on veut s'attaquer à ce problème des
binationaux qui partent jouer à l'étranger, il faut le faire à l'échelle
mondiale. Aujourd'hui, en tant que black, je suis solidaire de tous ces
jeunes qu'on veut écarter.
François Blaquart, le directeur technique national, a été suspendu. Laurent Blanc doit-il démissionner?
Luc Sonor: François Blaquart mérite la démission. S'il y a
faute, c'est normal qu'il y ait sanction. Et là visiblement, il y a une
grosse faute. Il y a des choses à ne pas dire, et surtout pas comme
cela. Je ne rentre pas dans le débat «raciste ou pas raciste», je
n'attaque pas les personnes, je dis juste que le seul fait d'avoir tenu
ces propos, c'est une faute énorme. Les excuses de Laurent Blanc m'ont
surpris, cela signifie qu'il a l'impression d'avoir commis une faute.
Maintenant, il doit s'expliquer, dire si oui ou non il a tenu ces
propos. En tout cas, l'image du foot va prendre une claque. Ces gens-là
sont partis sur un sujet qui les a dépassés.
Luc Sonor: «Quand ça va mal, les noirs et les arabes sont les boucs émissaires»
Ancien joueur professionnel, antillais, sélectionné en équipe de
France dans les années 1980, Luc Sonor est aujourd'hui adhérent de
l'Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP – syndicats des
joueurs professionnels), où il s'occupe des internationaux, notamment de
la reconversion des anciens de l'Equipe de France, et consultant sur
Canal Plus.
Dans un entretien à Mediapart, il explique être «choqué» des propos «indécents» tenus
par certains dirigeants du football sur la mise en place de quotas
discriminatoires dans la formation et la sélection des joueurs. Il «partage» le point de vue de Lilian Thuram, qui a estimé, dimanche, dans l'émission «Téléfoot» qu'il s'agissait d'un «scandale» «extrêmement grave» et que «certains (avaient) la mémoire courte». «Si la France avait fait une bonne coupe de monde en 2010, on
n'aurait jamais parlé de ça. Quand ça va bien, on (les noirs et les arabes)
est les meilleurs, quand ça va mal, on est les boucs émissaires», explique Luc Sonor.
Mediapart: Comment réagissez-vous aux propos tenus par des dirigeants du foot français sur la mise en place de politiques
discriminatoires?
Luc Sonor: Je trouve ces propos totalement indécents, surtout
dans un pays comme le nôtre. Le seul fait de parler de quotas est
indécent. Je suis antillais, français, black, ça me choque. Autour de
moi, beaucoup de footballeurs professionnels (ou anciens professionnels)
sont choqués, abasourdis et n'arrivent pas y croire. Mais si on suspend
François Blaquart, c'est qu'il y a eu confirmation de ce
qu'a écrit Mediapart.
Si la France avait fait une bonne coupe de monde (Ndlr: en 2010), on
n'aurait jamais parlé de ça. Quand ça va bien, on (les noirs et les
arabes)
est les meilleurs, quand ça va mal, on est les boucs émissaires. Là, il
y a eu un échec, on tape
sur nous et on pense que ça ira mieux, ça me fatigue! J'entends «les
noirs courent plus
vite», sont «plus costauds»? Non, on est comme les autres, on mange
comme
les autres... En fait, non, nous ne sommes pas comme les autres: nous
devons travailler plus que les autres pour réussir. Donc je partage le
point de vue de Lilian Thuram ou de Pape Diouf (Ndlr: l'ancien président
de l'Olympique de Marseille).
Les dirigeants de la FFF et Laurent Blanc se défendent en expliquant qu'ils parlaient des binationaux. Qu'en pensez-vous?
Luc Sonor: Les binationaux, ce ne sont pas les arabes et les
noirs, ce sont aussi les Italiens, les Polonais, etc. Et par ailleurs,
c'est aujourd'hui qu'on s'aperçoit que les jeunes partent (ndlr: jouer
dans des sélections étrangères)? Et en quoi cela dérange? S'ils partent,
c'est qu'on ne les a pas retenus en équipe de France. Pour moi, c'est
une fierté au contraire, c'est plutôt valorisant pour la France de
pouvoir se dire: «Tiens, c'est nous qui les avons formés.» Pourquoi tout
ce ramdam maintenant? Si l'on veut s'attaquer à ce problème des
binationaux qui partent jouer à l'étranger, il faut le faire à l'échelle
mondiale. Aujourd'hui, en tant que black, je suis solidaire de tous ces
jeunes qu'on veut écarter.
François Blaquart, le directeur technique national, a été suspendu. Laurent Blanc doit-il démissionner?
Luc Sonor: François Blaquart mérite la démission. S'il y a
faute, c'est normal qu'il y ait sanction. Et là visiblement, il y a une
grosse faute. Il y a des choses à ne pas dire, et surtout pas comme
cela. Je ne rentre pas dans le débat «raciste ou pas raciste», je
n'attaque pas les personnes, je dis juste que le seul fait d'avoir tenu
ces propos, c'est une faute énorme. Les excuses de Laurent Blanc m'ont
surpris, cela signifie qu'il a l'impression d'avoir commis une faute.
Maintenant, il doit s'expliquer, dire si oui ou non il a tenu ces
propos. En tout cas, l'image du foot va prendre une claque. Ces gens-là
sont partis sur un sujet qui les a dépassés.
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 68
Localisation : La terre
Re: Des quotas dans le foot ?
gérard menvussa a écrit:Je ne rentre pas dans le débat «raciste ou pas raciste»
il a particulièrement raison sur ce point je pense. Le plus flippant dans cette affaire, c'est que les gens qui ont envisagé ces quotas ne sont sans doute pas des gros fachos ni même des gens particulièrement droitiers, et ne se sont que partiellement rendu compte de l'énormité et du caractère scandaleux de ce qu'ils envisageaient...
ça illustre bien l'imprégnation de la société par le racisme...
louhans- Messages : 44
Date d'inscription : 28/11/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Encore pire : ils pourraient très bien être maintenus à leur poste et le seul à ramasser dans la gueule risque bien d'être celui ... qui a osé dévoiler l'affaire! (ô sacrilège! )louhans a écrit:il a particulièrement raison sur ce point je pense. Le plus flippant dans cette affaire, c'est que les gens qui ont envisagé ces quotas ne sont sans doute pas des gros fachos ni même des gens particulièrement droitiers, et ne se sont que partiellement rendu compte de l'énormité et du caractère scandaleux de ce qu'ils envisageaient...gérard menvussa a écrit:Je ne rentre pas dans le débat «raciste ou pas raciste»
ça illustre bien l'imprégnation de la société par le racisme...
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Duzgun a écrit:Encore pire : ils pourraient très bien être maintenus à leur poste et le seul à ramasser dans la gueule risque bien d'être celui ... qui a osé dévoiler l'affaire! (ô sacrilège! )louhans a écrit:il a particulièrement raison sur ce point je pense. Le plus flippant dans cette affaire, c'est que les gens qui ont envisagé ces quotas ne sont sans doute pas des gros fachos ni même des gens particulièrement droitiers, et ne se sont que partiellement rendu compte de l'énormité et du caractère scandaleux de ce qu'ils envisageaient...gérard menvussa a écrit:Je ne rentre pas dans le débat «raciste ou pas raciste»
ça illustre bien l'imprégnation de la société par le racisme...
? tu veux dire le journaliste de médiapart ? (ou alors celui qui a enregistré la réunion ? on le connaît ??)
louhans- Messages : 44
Date d'inscription : 28/11/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Je parlais de celui qui a enregistré la réunion, mais je vois qu'il nie être à l'origine de la fuite.louhans a écrit:? tu veux dire le journaliste de médiapart ? (ou alors celui qui a enregistré la réunion ? on le connaît ??)Duzgun a écrit:Encore pire : ils pourraient très bien être maintenus à leur poste et le seul à ramasser dans la gueule risque bien d'être celui ... qui a osé dévoiler l'affaire! (ô sacrilège! )
C'est de toute façon lamentable de voir qu'il leur paraît plus important de trouver "la taupe" plutôt que de se pencher sur les propos scandaleux qui ont été tenus...
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Roseau a écrit:Quand des photos d'une vingtaine d'équipes de jeunes de 15 ans sont projetées lors d'une réunion de la DTN, le 18 mars dernier, pour illustrer l'objectif à atteindre, on ne parle évidemment pas de nationalité, mais d'apparence. C'est la proportion importante de joueurs de types noirs ou arabes qui est soulignée, à un âge où ils rêvent tous de faire carrière sous le drapeau tricolore et où la question d'une nationalité de rechange ne se pose évidemment pas pour eux, et ne se posera pour la plupart jamais.
ça c'est presque pire que le contenu de la fameuse réunion
(d'ailleurs pour être juste, à propos de la fameuse réunion, je viens de relire le verbatim, et soit j'ai lu trop vite, soit le moment précis où le mot "quota" est lâché et où le chiffre des 30 % est mis en avant, c'est à propos de "joueurs susceptibles de changer de nationalité" d'une manière générale. auquel cas ça releverait de discrimination plutôt xénophobe que littéralement raciste - même si bon, dans les faits, si ce projet avait été mis en oeuvre, on peut penser que le "tri" aurait été fait (peut-être qu'il est actuellement à l'oeuvre d'ailleurs) sur la base de critères de couleur de peau, (mais peut-être aussi de nom de famille à consonance étrangère ?)).
y a un Français d'origine polonaise (Obraniak) qui a répondu favorablement aux sollicitations de la fédération polonaise et joue maintenant pour la pologne)
enfin tout ça confirme que médiapart a bien fait de parler d'une affaire de discrimination, plutôt que d'une affaire de racisme "stricto sensu" si je puis dire (en tout cas à propos des binationaux).
pour ce qui est de la dimension technique de la discussion (limiter le nombre de Noirs irait dans le sens du développement d'un jeu plus technique), là on est + explicitement dans une vision racialisée, reprenant certains clichés ultra-tendancieux (qui feront sourir - ou pleurer - Makelele, Kakuta, Malouda, Lassana Diarra, et quelques autres Noirs maigrichons qui jouent excellemment au foot.
(Après, si Blanc voulait se défendre, il se lancerait peut-être dans une théorie selon laquelle le développement physique chez un ado noir n'est pas le même que chez un ado blanc, et que Makelele, Kakuta ou Lassana Diarra, tout en étant petits à l'âge adulte, étaient plus grands que leurs camarades de promotion blancs quand ils avaient douze ans... enfin bref, il a dérapé : des kilotonnes de pseudo-scientifiques plus ou moins racialistes, au XIXe siècle, ont essayé d'élaborer des modèles de ce genre au XIXe, je pense pas qu'ils aient abouti à grand-ch', à part des clichés racistes...) .
à propos de Blanc, son dérapage a été repris par le sociologue Stéphane Beaud (cf. http://afrique-espoir.over-blog.com/article-quotas-a-la-fff-le-sociologue-et-le-morphotype-africain-par-michel-wieviorka-sociologue-ehess-01-05-2011-13h32-72917724.html texte de wieviorka)
sinon je comprends pas trop pourquoi plenel fait allusion à la religion musulmane dans le texte posté par roseau... (il me semble pas qu'il soit question de religion dans le verbatim de la fameuse réunion).
(en tout cas, décidément, médiapart fait du bon boulot ces derniers mois ; (on ne retrouvera plus le plenel de rouge, mais celui de médiapart vaut mieux que celui du monde :-)))
louhans- Messages : 44
Date d'inscription : 28/11/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Cette histoire fait pas mal réagir autour de moi. Bientôt les gros cons monteront au créneau pour dire que oui, nom de dieu, y a trop d'arabes et de noirs en équipe de France. Déjà des joueurs et personnalités du foot se succèdent pour minimiser les propos tenus par des membres de la fédé et Laurent " bien " Blanc, sur le mode : on va quand même pas inquiéter un aussi bon sélectionneur pour ces propos, bien sûr qu'il n'est pas raciste ect, ect.... Donc j'irai pas finasser sur ce qui tient du racisme, de la xénophobie, de l'imbécilité. Si la démarche et les propos tenus ne sont pas racistes, je sais pas ce qu'est le racisme. On retrouve dans le fond les idées que les arabes foutent la merde et que les noirs sont tous des Basile Boli. Que les noirs ont pour eux le physique et les blancs l'intelligence de jeu. Pour le coup on revient même au racisme de grand papa.
On se pose pas la question de savoir si Vieira et Evra sont nés au Sénégal, Desailly au Ghana, Makelele au Zaïre, Tigana au Mali, Larbi Ben Bareck au Maroc ect... Sans même parler des vagues d'immigration successives qui se retrouvent chez les N°10 de légende : Kopa, Platini, Zidane. Ils font semblant de pleurer parce que des joueurs vont jouer pour des équipes nationales autres que la France mais en quoi ça pose problème footbalistiquement parlant ? Les gars sont pas assez bons pour jouer en équipe de France, ils vont jouer pour le pays de leurs parents ou grands parents, très bien. C'est un prétexte ce truc. Pas un seul joueur de grande qualité n'a préféré jouer ailleurs si il avait l'opportunité de jouer en équipe de France. Ou alors faut remonter à Rachid Mekloufi qui a quitté clandestinement la France pour rejoindre en pleine guerre d'Algérie l'équipe du FLN.
On se pose pas la question de savoir si Vieira et Evra sont nés au Sénégal, Desailly au Ghana, Makelele au Zaïre, Tigana au Mali, Larbi Ben Bareck au Maroc ect... Sans même parler des vagues d'immigration successives qui se retrouvent chez les N°10 de légende : Kopa, Platini, Zidane. Ils font semblant de pleurer parce que des joueurs vont jouer pour des équipes nationales autres que la France mais en quoi ça pose problème footbalistiquement parlant ? Les gars sont pas assez bons pour jouer en équipe de France, ils vont jouer pour le pays de leurs parents ou grands parents, très bien. C'est un prétexte ce truc. Pas un seul joueur de grande qualité n'a préféré jouer ailleurs si il avait l'opportunité de jouer en équipe de France. Ou alors faut remonter à Rachid Mekloufi qui a quitté clandestinement la France pour rejoindre en pleine guerre d'Algérie l'équipe du FLN.
Zappa- Messages : 146
Date d'inscription : 25/07/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Et si Blanc partait ?
Et si l'affaire des quotas avait raison de Laurent Blanc ? Parti se ressourcer en Italie, le sélectionneur de l'équipe de France devrait être entendu en fin de semaine par les commissions d'enquête mises en place par la Fédération française de football et le ministère des Sports. Choqué par sa mise en cause, peu ménagé par son ancien partenaire Lilian Thuram, le Cévenol n'écarterait pas une démission, même si le monde du foot le soutient dans son ensemble.
Laurent Blanc traverse une sombre période... (Reuters) Laurent Blanc traverse une sombre période... (Reuters)
Et aussi...
* La taupe avait alerté ses supérieurs
* Deux enquêtes en une
* Affaire des quotas: Les réactions
* Le calendrier des Bleus
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L'affaire des quotas évoqués lors d'une réunion fédérale du 8 novembre 2010 n'en finit plus d'ébranler le football français qui semble voler en éclats au fur et à mesure des révélations ou interviews savamment distillées par le site Mediapart qui a lâché la «bombe» en fin de semaine dernière. Maintenant que les faits sont avérés et prouvés, enregistrements à l'appui, la question est de savoir quelles en seront les conséquences. A la Fédération française de football, des premières mesures ont été prises, telle la mise à pied provisoire du Directeur technique national, François Blaquart, l'un des principaux protagonistes de la fameuse réunion, elles seront suivies de décisions plus définitives une fois que Fernand Duchaussoy, le président de la FFF, aura reçu les conclusions de la commission d'enquête qu'il a diligentée.
Celle-ci, ainsi que celle placée sous l'égide du Ministère des sports, devrait entendre en fin de semaine Laurent Blanc qui s'est accordé quelques jours de repos dans le nord de l'Italie pour échapper à la pression médiatique et sans doute préparer dans le calme ces auditions qui pourraient bien décider de son avenir. Car l'image, jusqu'ici sans tâche, de l'intéressé, parvenu en quelques mois à redorer le blason de l'équipe de France, sort forcément écornée de cette affaire, d'autant qu'il a d'abord eu la maladresse de nier les propos qui lui étaient imputés avant de faire machine arrière devant les preuves apportées par Mediapart pour s'excuser mais aussi se défendre de toute intention raciste ou discriminatoire.
Le sélectionneur a d'ailleurs reçu le soutien de la «famille» du football français, qui, dans son ensemble, l'a défendu: Christian Gourcuff a ainsi parlé d'un "faux procès", l'Unecatef, le syndicat des entraîneurs, a mis en avant la "probité" et "l'honnêteté intellectuelle" de l'intéressé, Alou Diarra, capitaine des Girondins de Bordeaux et de l'équipe de France sous Laurent Blanc, a affirmé que ce dernier "n'est pas raciste", tandis que la plupart des anciens coéquipiers en équipe de France du «Président» sont également venus, témoignages à l'appui, à son secours. Sauf un et pas n'importe lequel, celui qu'on a le plus entendu dans l'affaire, Lilian Thuram.
Thuram estime que Blanc est "fragilisé"
A plusieurs reprises, l'ancien défenseur des Bleus s'en est pris plus ou moins directement à son ex-partenaire, notamment dans l'interview accordée le week-end dernier à Mediapart dans laquelle il demande que François Blaquart ne soit pas le «lampiste» de l'histoire: "Je suis lié à vie avec Laurent Blanc car il m'a offert le plus beau cadeau qu'un enfant puisse rêver, la Coupe du monde. Mais qu'il soit d'accord pour que l'on puisse discriminer des enfants de 12 ans, est-ce acceptable ? (...) Laurent Blanc a dit lui-même: «Si certains ont cautionné un projet avec des quotas, il faut les punir»."
Mercredi, invité du journal de France 2, le recordman tricolore de sélections (128) en a remis une couche, tout en ménageant un peu plus son ex-coéquipier: "Bien évidemment qu'il (Laurent Blanc) est fragilisé par ses propos. Sinon, je connais bien Laurent Blanc et je ne pense pas qu'il soit raciste. On en a discuté ensemble au téléphone, mais je pense que derrière, il y a une idéologie. Est-ce qu'il a été emmené sur un chemin qu'il ne maîtrisait pas ? Quand le DTN peut dire tranquillement dans une réunion qu'il est d'accord avec 30% de quotas, on est au coeur d'un problème." En clair, Lilian Thuram regrette que Laurent Blanc, contrairement à Francis Smerecki, entraîneur des moins de 20 ans, n'ait pas remis en cause les propos de François Blaquart, et il pense que, comme d'autres intervenants de cette réunion du 8 novembre, il doit être sanctionné, éventuellement démis de ses fonctions, si les commissions d'enquête viennent à prouver qu'il a effectivement plaidé pour l'instauration de quotas dans les centres de formation et écoles de foot français.
Dugarry contre-attaque
Ces accusations sont sans doute allées droit au coeur du sélectionneur qui a pris le parti de prendre du recul pour réfléchir à son avenir. Pourrait-il de lui-même décider de se retirer ? L'hypothèse fait son chemin, au point que certains tirent déjà la sonnette d'alarme, tel l'ancien international Daniel Bravo qui, mercredi soir dans Le Grand forum sur Infosport, a déclaré: "Je pense que ce serait un désastre si Laurent Blanc partait ou démissionnait de son poste de sélectionneur". Son de cloche identique dans la même émission pour Christophe Dugarry: "Je suis inquiet de voir Blanc s'en aller. On le met en énorme difficulté en pensant qu'on peut le virer, entre guillemets. Mais il peut également partir de lui-même. Il faut s'imaginer ce qu'était le football français ces quinze dernières années et ce qu'il a fait depuis son arrivée et les gens qu'il a emmenés derrière lui. J'espère qu'il n'est pas trop tard. Il y a pas mal de personnes qui sont tombées dans le panneau de la manipulation médiatique. Laurent n'a pas besoin de mon soutien mais j'ai peur pour le football français qu'il se retrouve encore dans le chaos."
Au nom de l'intérêt supérieur du football français mais également de son amitié avec Laurent Blanc, «Duga» n'hésite pas à lancer une véritable contre-offensive, s'en prenant en termes assez virulents à Lilian Thuram: "Lilian prône la tolérance, mais n'en fait pas beaucoup preuve. J'ai l'impression qu'il essaie de diviser le foot français. Je le trouve dur, agressif envers Laurent Blanc." Et l'ancien Girondin d'enfoncer le clou en racontant une anecdote: "Après la finale de la Coupe du monde 1998, on faisait des photos entre nous dans le vestiaire. Et là, j'entends Lilian Thuram dire: «Allez, les Blacks, on fait une photo tous ensemble». Frank Leboeuf lui dit: «Lilian, qu'est-ce que tu dis là ? Imagine si nous, on avait dit: Allez, les Blancs, on fait une photo ensemble. Comment aurais-tu réagi ?»" Si l'affaire des quotas n'a pas dit son dernier mot, elle aura en tout cas contribué à creuser encore davantage les fractures entre certaines composantes d'un foot français qui, quoi qu'il arrive, n'en sortira pas indemne...
http://www.sports.fr/cmc/football/201118/affaire-des-quotas-et-si-blanc-s-en-allait-_349386.html?sitemap
Laurent Blanc démission !
Vite, une manif devant le siège de la FFF !
Gauvain- Messages : 764
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Re: Des quotas dans le foot ?
A propos du dérapage de Stéphane Beaud, il a fait publier une rectification de ses propos initiaux :
http://www.rue89.com/wieviorka/2011/05/01/quotas-a-la-fff-le-sociologue-et-le-morphotype-africain-202009
Mis à jour le 1er mai à 19H30. Nous avons reçu de Stéphane Beaud la précision suivante :
« Je me permets la mise au point suivante et vous en remercie, si possible, d'en tenir compte pour la porter à la connaissance de vos lecteurs. Pour une raison fortuite (erreur dans l'envoi du fichier par Bruno Lesprit tôt
samedi matin), la version de mon interview dans le Monde papier était une version non corrigée.
Quand j'ai pris connaissance de cette erreur à 13H30 dans Le Monde, j'ai aussitôt alerté Bruno Lesprit qui était désolé de son erreur et a très vite remis la bonne version (“corrigée) de l'entretien sur le site du
monde.fr
Voici l'extrait dans la version corrigée :
‘Sur le premier, l'argument de la DTN n'est pas à rejeter : la précocité et la carrure des joueurs noirs les amènent à être rapidement recrutés. A un jeune âge, ce sont souvent des joueurs souples avec des capacités physiques exceptionnelles : Marius Trésor, Marcel Desailly, Lilian Thuram, Mamadou Sakho aujourd'hui. En même temps, point de déterminisme par morphotype : Jean Tigana a été exclu de la ligue 1 pendant des années parce qu'il était petit et chétif…’
http://www.rue89.com/wieviorka/2011/05/01/quotas-a-la-fff-le-sociologue-et-le-morphotype-africain-202009
Gauvain- Messages : 764
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Re: Des quotas dans le foot ?
si j'ai bien compris ce qu'a dit le gars qui a pris l'initiative d'enregistrer la fameuse réunion du 8 novembre, il l'a fait parce que, au cours d'autres réunions antérieures, il avait entendu des trucs qui l'avaient grave choqué.
auquel cas c'était loin d'être un coup de tonnerre dans un ciel serein, le contenu de cette réu du 8 novembre.
le racisme ambiant dans le football n'a rarement été aussi spectaculaire que ces jours-ci, où on voit des tas de mâles blancs (peut-être même hétéro :-)), sortir de réunions, siéger dans des instances, etc., jurer la main sur le coeur qu'il ne saurait y avoir de racisme dans le foot français. les instances de la fff, c'est pire qu'un conseil d'administration du cac40, du point de vue de la "diversité" comme on dit.
quand la candidature de tigana au poste de sélectionneur avait été repoussée, il avait clairement dit que sa couleur de peau l'avait desservi.
auquel cas c'était loin d'être un coup de tonnerre dans un ciel serein, le contenu de cette réu du 8 novembre.
le racisme ambiant dans le football n'a rarement été aussi spectaculaire que ces jours-ci, où on voit des tas de mâles blancs (peut-être même hétéro :-)), sortir de réunions, siéger dans des instances, etc., jurer la main sur le coeur qu'il ne saurait y avoir de racisme dans le foot français. les instances de la fff, c'est pire qu'un conseil d'administration du cac40, du point de vue de la "diversité" comme on dit.
quand la candidature de tigana au poste de sélectionneur avait été repoussée, il avait clairement dit que sa couleur de peau l'avait desservi.
louhans- Messages : 44
Date d'inscription : 28/11/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Tout à fait, c'était manifestement loin d'être nouveau pour qu'il en soit arrivé à enregistrer la réunion.louhans a écrit:si j'ai bien compris ce qu'a dit le gars qui a pris l'initiative d'enregistrer la fameuse réunion du 8 novembre, il l'a fait parce que, au cours d'autres réunions antérieures, il avait entendu des trucs qui l'avaient grave choqué.
auquel cas c'était loin d'être un coup de tonnerre dans un ciel serein, le contenu de cette réu du 8 novembre.
le racisme ambiant dans le football n'a rarement été aussi spectaculaire que ces jours-ci, où on voit des tas de mâles blancs (peut-être même hétéro :-)), sortir de réunions, siéger dans des instances, etc., jurer la main sur le coeur qu'il ne saurait y avoir de racisme dans le foot français. les instances de la fff, c'est pire qu'un conseil d'administration du cac40, du point de vue de la "diversité" comme on dit.
quand la candidature de tigana au poste de sélectionneur avait été repoussée, il avait clairement dit que sa couleur de peau l'avait desservi.
Difficile de savoir les responsabilités des uns et des autres en amont pour en être arrivé à une telle conversation, mais j'ai du mal à imaginer que le DTN ne puisse être directement impliqué (Laurent Blanc peut-être moins).
En tout cas, le seul qui garde un minimum le sens des réalités dans cette histoire, c'est Lilian Thuram. Quand je vois les autres faire tout pour minimiser, voire prendre ouvertement la défense des fautifs, j'hallucine!
Duzgun- Messages : 1629
Date d'inscription : 27/06/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
[/quote]Gauvain a écrit:Voici l'extrait dans la version corrigée :
‘Sur le premier, l'argument de la DTN n'est pas à rejeter : la précocité et la carrure des joueurs noirs les amènent à être rapidement recrutés. A un jeune âge, ce sont souvent des joueurs souples avec des capacités physiques exceptionnelles : Marius Trésor, Marcel Desailly, Lilian Thuram, Mamadou Sakho aujourd'hui. En même temps, point de déterminisme par morphotype : Jean Tigana a été exclu de la ligue 1 pendant des années parce qu'il était petit et chétif…’
donc en fait la rectification de beaud porte sur le "souvent" : il dit en substance que tous les Noirs ne sont pas souples et puissants ; mais il dit quand même que, à un jeune âge, les Noirs sont souvent [sous-entendu : plus souvent que les blancs] des joueurs souples avec des capacités physiques exceptionnelles.
qu'est-ce qu'il faut en penser camarades ?
où se termine la simple prise en compte du fait que il n'y a que dans les laboratoires de sciences dures, avec éprouvettes et blouses blanches, que des corps ont exactement les mêmes caractéristiques sur tous les points sauf sur un point (et que, dans la vraie vie, les différences entre deux corps sont des différences qui font système) ? où commence le racisme ?
louhans- Messages : 44
Date d'inscription : 28/11/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Duzgun a écrit:Tout à fait, c'était manifestement loin d'être nouveau pour qu'il en soit arrivé à enregistrer la réunion.louhans a écrit:si j'ai bien compris ce qu'a dit le gars qui a pris l'initiative d'enregistrer la fameuse réunion du 8 novembre, il l'a fait parce que, au cours d'autres réunions antérieures, il avait entendu des trucs qui l'avaient grave choqué.
auquel cas c'était loin d'être un coup de tonnerre dans un ciel serein, le contenu de cette réu du 8 novembre.
le racisme ambiant dans le football n'a rarement été aussi spectaculaire que ces jours-ci, où on voit des tas de mâles blancs (peut-être même hétéro :-)), sortir de réunions, siéger dans des instances, etc., jurer la main sur le coeur qu'il ne saurait y avoir de racisme dans le foot français. les instances de la fff, c'est pire qu'un conseil d'administration du cac40, du point de vue de la "diversité" comme on dit.
quand la candidature de tigana au poste de sélectionneur avait été repoussée, il avait clairement dit que sa couleur de peau l'avait desservi.
Difficile de savoir les responsabilités des uns et des autres en amont pour en être arrivé à une telle conversation, mais j'ai du mal à imaginer que le DTN ne puisse être directement impliqué (Laurent Blanc peut-être moins).
En tout cas, le seul qui garde un minimum le sens des réalités dans cette histoire, c'est Lilian Thuram. Quand je vois les autres faire tout pour minimiser, voire prendre ouvertement la défense des fautifs, j'hallucine!
Ouais, et moi j'aimerais bien que les joueurs, surtout les joueurs noirs et arabes, s'expriment un peu sur la question, mais je crois qu'on peut rêver ^^
Gauvain- Messages : 764
Date d'inscription : 23/06/2010
Localisation : 75/78
Re: Des quotas dans le foot ?
Excellent article !
http://www.cahiersdufootball.net/article.php?id=4077
AMALGAME OVER
Jérôme Latta - vendredi 6 mai 2011
icone_quotas3.jpgLes défenseurs de Laurent Blanc s'indignent, mais les obsessions identitaires de la DTN et du sélectionneur ne font aucun doute. Le cauchemar continue.
Au cours de la semaine écoulée, l'embarras général, la stupeur et les tensions ont attesté l'onde de choc et ses effets sur les principales institutions du football français – équipe de France comprise. Les enjeux sont tels que, quelle que soit la tournure des événements (en particulier concernant le maintien du sélectionneur), l'héritage sera amer.
quotas_2.jpg
Blanc victimisé
La plus grande entourloupe intellectuelle des derniers jours a obtenu une belle surface médiatique: elle a consisté à se scandaliser que Laurent Blanc soit traité de raciste. Les amis du sélectionneur ont rivalisé d'indignation: Bixente Lizarazu et Christophe Dugarry, qui est allé jusqu'à dire que Blanc était victime d'amalgames. Certes, mais avant tout des siens. L'un évoque la menace d'une démission, tous deux annoncent le "chaos" qui s'ensuivrait, tandis que Marcel Desailly affirme que les propos de Blanc ont été "déformés", ce qui est aussi peu pertinent que possible s'agissant d'un enregistrement. Dans un communiqué, Frédéric Thiriez y va de son habituelle prose bouffonne: "l'enjeu pour l'avenir du football français est-il de sacrifier des têtes, comme celle de Laurent Blanc qui serait soudain devenu raciste, au veau d'or du politiquement correct?"
Blanc, dont la première réponse à pourtant été un mensonge ("Je n'ai jamais entendu parler de projets qui prendraient en compte des quotas") est donc victime des "manipulations médiatiques", des "bien-pensants", des "professeurs de morale" et bien sûr du "politiquement correct" qui nous étouffe tous, ou encore d'une odieuse "chasse aux sorcières". Dont on cherche pourtant vainement les chasseurs: où diable sont ceux qui ont traité Blanc de raciste? À lire et relire les déclarations des uns et des autres, nulle part. Sa responsabilité est mise en cause au même titre que celle des membres de la DTN, sur la foi de cette conversation consternante qui a vu ses protagonistes manifester une obsession pour le cas des "binationaux" sans commune mesure avec la réalité de la question, proposer une solution (stupide) à ce faux problème sous la forme de quotas incontestablement discriminatoires et mobiliser pour les justifier des stéréotypes associant origine ethnique, style de jeu et mentalité (lire "Pas de Blacks, 'pas de problème'").
Diversions
Dire qu'à la fois le projet de discrimination et le discours qui l'a sous-tendu soulèvent de graves questions relève de l'évidence et même de la nécessité le plus impérieuse. Nul besoin d'accusations de racisme, surtout pas au nom de cette conception binaire qui vaudrait que l'on ne puisse être qu'absolument raciste ou absolument pas raciste. Car si la controverse est vive, c'est parce qu'elle porte sur des préjugés profondément ancrés, "de bon sens" et très largement partagés – dont il est donc difficile de prendre conscience et d'admettre qu'ils contiennent des précurseurs de racisme, aussi innocents soient-ils. On reviendra sur cet aspect-là, ainsi que sur l'inquiétant fossé des opinions creusé entre les "Noirs" (Thuram, Vieira, Lama...) d'un côté et les "Blancs" de l'autre (Dugarry, Lizarazu, Desailly...[1]).
En mettant en scène les antagonismes suscités notamment par les déclarations de Lilian Thuram ou Patrick Vieira, la polémique sur "l'explosion" de France 98 fait diversion au détriment du vrai débat, qui doit porter sur les propos tenus et sur la question de la mise en œuvre ou non de la politique de discrimination projetée (volet que l'enquête doit déterminer, et sur lequel Mediapart a peut-être encore des informations à distiller). Les mêmes manœuvres d'évitement ont présidé au dénigrement de celui qui a "trahi" le secret des discussions, qualifié de "taupe" par les journalistes plutôt que de lanceur d'alerte, sans considération pour ses états de service ni la légitimité éventuelle de sa démarche (lire l'article de panenka.fr).
quotas_4.jpg
Mélange des genres
Les événements récents doivent d'abord être mis en perspective avec le discours de la DTN et du sélectionneur au cours des derniers mois. Il est frappant de constater à quel point la question des binationaux a fait l'objet d'une lourde insistance de la part des uns et des autres, au point que la lutte contre la "fuite" des joueurs vers les sélections étrangères a été ressassée comme une priorité en dépit de ses conséquences limitées pour l'équipe de France A.
Dans une interview publié par le magazine de la FFF d'avril, Erick Mombaerts décrit la nouvelle politique menée en définissant notamment le "projet de jeu" des sélections de jeunes par "des exigences associant qualité de jeu, comportement et état d'esprit" ou encore "amour du maillot bleu". Toutes ces notions sont abordées pêle-mêle et présentées comme étroitement liées, et elles aboutissent encore sur la binationalité. "Quelle que soit sa valeur – et j'insiste – nous n'avons pas besoin d'un joueur qui ne soit pas attaché au maillot bleu. Ayons le courage d'aller au bout de nos idées dans ce domaine. Et n'oublions pas le problème abordé par Laurent Blanc: la déperdition de nos jeunes internationaux." Le même avait dit le 8 novembre: "Tout est lié, tout est lié!" Interrogé par Mediapart avant la révélation de l'affaire, le DTN François Blaquart a même évoqué la religion musulmane d'une partie des joueurs comme un critère ayant servi à établir à la bonne franquette de douteuses statistiques de binationaux au sein des sélections U16 à U21 (lire l'article de Mediapart - en accès payant).
Blanc et "l'origine sociale"
Aussi troublante encore est cette interview de Laurent Blanc, accordée à Eurosport... le soir de la fameuse réunion du 8 novembre (voir la vidéo). Évoquant la nécessaire réforme d'une formation à la française qui n'est plus "avant-gardiste", le sélectionneur part dans une explication qui empile "histoire", "culture", "classe sociale", "problèmes" et "puissance physique".
"Chaque pays a son histoire. Le football espagnol a sa propre histoire, sa propre culture. Ils n'ont pas les mêmes problèmes que peut avoir le football français. Je m'explique. Le football en France est très populaire, il attire une certaine couche sociale de nos jeunes. Pour être tous les samedis sur les terrains de foot amateur, je trouve que le football attire actuellement beaucoup de gens de la même classe sociale, avec tous les problèmes que cela peut amener. Je pense qu'il faut s'adapter à ça et surtout, dans cette préformation qui est si importante revenir à des critères de jeu et non pas de puissance physique de puissance athlétique pour faire de la Champions League et gagner sur le moment." Cette fois, sans allusion raciale, il établit un lien confus mais direct entre origine sociale et qualité de jeu, sur fond de "culture" et de "puissance physique" [2].
Alors Blanc n'est certainement pas raciste au sens où il serait par exemple capable de défavoriser les internationaux d'origine africaine (il a eu le temps de démontrer le contraire) ou de juger une personne particulière sur sa couleur de peau, mais il exprime des conceptions qui paraissent sérieusement perturbées par des stéréotypes et des amalgames grossiers. En quoi il est tout à fait en phase avec François Blaquart et Erick Mombaerts, qui touillent le même bouillon d'arguments.
Où mène le redressement national
Il est de plus en plus probable que leur projet de quotas désigne une cible un peu nébuleuse, mais qui ressemble au portrait-robot du "jeune de banlieue", obtenu en superposant divers stigmates à géométrie variable: binational, Noir ou Arabe, musulman, athlétique, peu attaché au maillot, "à problèmes", etc. En définitive, et sans surprise, le football français désigne le même bouc émissaire que la société française toute entière. Chose étonnante: les centres de préformation fédéraux, les centres de formation des clubs et les sélections de jeunes, qui prennent totalement en charge des jeunes entre leurs 12 et 20 ans, parviennent à les transformer en sportifs de haut niveau, mais pas en Français réglementaires.
Rappelons que la prise de fonction de Laurent Blanc et les missions qui lui ont été assignées (ce double impératif de restauration de l'état d'esprit et du beau jeu) se sont inscrites dans le contexte hystérique de l'après-Coupe du monde 2010, impliquant la diabolisation des "caïds" de Knysna, coupables d'avoir fait honte à la France aux yeux du monde entier, et charriant son lot d'amalgames et de moralisme réactionnaire (lire "Traitres à la nation?" de Stéphane Beaud, La Découverte). À quels écarts a pu pousser la rhétorique du redressement national et de la restauration de l'honneur de la France? Elle a sans nul doute créé des conditions favorables pour le discours décomplexé, mais bien conscient de la nécessité du secret, du nouveau DTN. Alors intérimaire, il a été pleinement investi en février dernier par une Fédération au sein de laquelle son discours était connu. Cette fois, la "honte nationale" n'est pas usurpée.
[1] On peut rire quand même un peu.
[2] Le 12 novembre, quatre jours après la réunion, L'Équipe publie une interview de Laurent Blanc axée sur la formation, dans laquelle il martèle ses convictions (jeu plus intelligent, état d'esprit, "problème d'identification à l'équipe de France (...) que les autres pays n'ont pas"). Un article intitulé "La déformation à la française?" accompagne l'entretien et donne la parole à Mombaerts, Blanquart et Smerecki. La DTN était bien en campagne médiatique à cette époque sur ces thèmes, et le sélectionneur indique lui-même son implication: "J'espère être associé [avec la DTN] à la mise en œuvre d'un projet validé par toutes les familles. Avec des critères de formation bien établis, une idée directrice et les personnes compétentes pour les faire appliquer."
http://www.cahiersdufootball.net/article.php?id=4077
Gauvain- Messages : 764
Date d'inscription : 23/06/2010
Localisation : 75/78
Re: Des quotas dans le foot ?
Toujours dans les "cahiers du football", un autre excellent article :
PAS DE BLACKS, "PAS DE PROBLÈME" ?
Jérôme Latta -
lundi 2 mai 2011
En
préconisant de traiter le (faux) problème de la binationalité avec des
mesures discriminatoires, certains membres de la DTN et le sélectionneur
national ont exprimé une piètre idée de leur mission, imprégnée de
préjugés désolants.
S'il a été vendu avec un
sensationnalisme qui a pu nuire à la crédibilité de la démarche, le
verbatim de la réunion du 8 novembre au siège de la Fédération, publié
par Mediapart samedi, n'est plus contesté à l'issue du week-end. Le
débat sur la légitimité de la publication de propos tenus dans un cadre
privé peut quant à lui être écarté en ne les jugeant justement pas comme
des propos publics. La question est surtout de savoir, maintenant, si
leur contenu légitimait ou non leur révélation. La retranscription ne
comporte pas de propos explicitement racistes, et elle n'apporte pas la
preuve que le système de quotas envisagé a été mis en chantier. Mais le
dialogue révèle des conceptions et des modes de pensée consternants à ce
niveau de responsabilité au sein du football français et, de glissement
en glissement, il témoigne d'une racialisation de la question initiale -
celle de la binationalité - au travers d'une inquiétante vision de la
formation des joueurs.
Binationalité : un faux problème
Il
est légitime que la DTN se pose la question des conséquences de la
double nationalité sportive, qui permet à des joueurs ayant effectué
toute leur formation en France et évolué dans les sélections nationales
de jeunes, d'opter pour une autre sélection à laquelle leur origine leur
donne droit. Cette mesure adoptée par la FIFA en deux temps (2005 et
2009) a créé un effet d'aubaine à la fois pour les joueurs et les
sélections concernés. Ces "défections" peuvent être amèrement vécues par
des formateurs qui, au sein de la FFF, ont pour mission de renforcer
l'équipe de France. Pourtant, le problème n'en est pas véritablement un:
pour un Moussa Sow, la plupart des joueurs optant pour un autre maillot
national évoluent à un niveau moyen et ne manqueront pas réellement à
l'équipe de France (même si le phénomène tend aujourd'hui à prendre de
l'ampleur – lire "Les 'binationaux', enquête sur ces footballeurs français qui ne jouent pas en bleu").
Les
protagonistes de la réunion ne l'ignorent pas, mais ils en font une
question de principe, au travers notamment de "l'attachement au maillot"
conçu sous un angle étroitement patriotique. Étroitement, car ces
joueurs, quelle que soit leur nationalité sportive, profitent aux clubs
français sur le terrain et dans leurs bilans comptables, l'exportation
de joueurs étant une ressource majeure pour eux. Ce rétrécissement
implique aussi de négliger totalement la satisfaction professionnelle et
personnelle de voir un joueur que l'on a formé accéder au haut niveau
et devenir international. Parallèlement, n'entre pas en ligne de compte,
aux yeux des débatteurs (en dehors de Francis Smerecki, entraîneur des
moins de 20 ans), le fait que les joueurs exercent là un droit légitime,
et que la France contribue ainsi à renforcer sportivement des pays dont
les enfants ont fait et font encore le bonheur du football français [1]. Inconcevable, aussi, semble l'idée que cela puisse être profitable à l'image de la France, pays formateur...
Une volonté de discrimination
Malheureusement,
la discussion ne s'arrête pas là. D'abord, la mesure proposée est
explicitement d'imposer des quotas de joueurs binationaux aux portes des
pôles de formation ("même pas" 30%): "Les
clubs pros, ils peuvent les prendre. Ils se répartissent! (...) Nous on
travaille pour le football français, on ne travaille pas pour les
sélections étrangères", dit ainsi Erick Mombaerts. Or, cela
revient mécaniquement à barrer l'accès des structures fédérales aux
jeunes ayant des origines africaines, ceux-ci étant très majoritaires
dans le vivier français.
La démarche est clairement discriminatoire,
comme le fait remarquer un Francis Smerecki manifestement perturbé par
la tournure du débat, et évidemment contraire au droit. Les
protagonistes ne s'y trompent pas, qui insistent sur la confidentialité à
respecter: "L'idéal effectivement,
c'est de dire, mais pas officiellement: de toute façon on ne prend pas
plus de tant de gamins qui sont susceptibles de changer (de nationalité,
NDLR) à terme" ; "il ne faut pas que ce soit dit" (François Blaquart) ; "On est obligé de le faire sous le coude" (Erick Mombaerts). Difficile, ensuite, de plaider la candeur.
Plus
inquiétant: il apparaît au fil des échanges qu'on n'en était pas
seulement au stade des intentions en novembre dernier. Selon Mediapart, le DTN François Blaquart "se
dit non seulement favorable à l'instauration d'un quota, mais lâche
qu'il a d'ores et déjà passé la consigne à Gérard Prêcheur",
directeur de l'INF Clairefontaine. Cette politique des quotas, loin
d'être une simple idée en l'air, est décrite par Mombaerts comme déjà à
l'œuvre au sein des clubs: "Il y a
bien des clubs comme Lyon qui le font dans leur centre de formation. Ils
le font systématiquement. J'étais à Marseille là. Et Henri Stambouli
(directeur du centre de formation de l'OM, NDLR) le met en place sur
Marseille. Pareil, ils vont limiter le nombre."
"Prototypes de joueurs"
Déjà
accablant, ce projet de discrimination sur le critère de la
(bi-)nationalité s'accompagne de fortes ambiguïtés dans le discours,
dans la mesure où la conversation finit par rapporter à l'origine la
question des critères de sélection qu'il s'agit de transformer: il est
bien question de mieux "sensibiliser" les jeunes, de les "aider à (s')identifier",
mais les intervenants en arrivent à amalgamer le physique des joueurs,
leurs qualités techniques et leur mentalité en les liant à leur origine –
et donc à leur couleur de peau (lire l'article du sociologue Éric Fassin, qui analyse ces glissements).
Démarrée
sur la question de la binationalité, la question dérive franchement.
Laurent Blanc, qui évoquait pourtant le souci de mieux sensibiliser les
jeunes à l'appartenance nationale, désigne "les Blacks" et verse tout
particulièrement dans cette confusion. Dans ses interventions, il boucle
le raisonnement en assimilant profils athlétiques, style de jeu et
origine africaine. "Je vois quelques
centres de formation: on a l'impression qu'on forme vraiment le même
prototype de joueurs: grands, costauds, puissants. (...) Qu'est-ce qu'il
y a actuellement comme grands, costauds, puissants? Les blacks".
On entend aussi Laurent Blanc recommander de "recentrer" la sélection "surtout pour des garçons de 13-14 ans, 12-13 ans" sur
des "critères, modifiés avec notre propre culture (...) avec notre
culture, notre histoire". Son invocation de l'exemple espagnol aggrave
l'impression: "Je vais vous citer les
Espagnols: ils n'ont pas ces problèmes-là. Ils ont des critères de jeu
qui sont très précis, à 12-13 ans. Les Espagnols, ils m'ont dit: «Nous,
on n'a pas de problème. Nous, des blacks, on n'en a pas»". Erick Mombaerts leur oppose les "petits gabarits blancs" et sa conclusion, même si le lien direct est incertain, parachève le malaise: "Le jeu, c'est l'intelligence, donc c'est d'autres types de joueurs. Donc tout est lié, tout est lié!"
Indigence du raisonnement
Si
Laurent Blanc ne parle que de culture footballistique, cela signifie
d'abord qu'il pense que "les Blacks" – déjà réduits au sempiternel
stéréotype du Noir "grand, costaud, puissant" (lire l'article de Michel Wieworka) et présumés peu enclins à s'identifier au maillot national – sont également en peine d'assimiler "notre culture"
du jeu. Dans l'hypothèse où le sélectionneur évoquerait dans le même
temps leur mentalité sous l'angle de leur caractère inassimilable, le
cas serait désespérant de la part d'une telle personnalité, investie
d'une telle fonction [2]. On se raccrochera à l'hypothèse d'une grande maladresse.
Tout
en laissant au DTN et au sélectionneur national le bénéfice du doute,
il faut clamer l'indigence du raisonnement suivi par les plus hauts
responsables de la formation française. Leur métier est de repérer et de
former les meilleurs jeunes et d'en faire les meilleurs footballeurs
possibles. Si leur projet est de redonner une dimension plus technique
et moins physique aux joueurs formés, de renouer avec des principes de
jeu plus ouverts, il leur incombe de changer les critères (physiques,
techniques, voire liés à la motivation) de sélection sans aucune autre
considération que l'impératif de recruter les meilleurs à cette aune [3].
Là,
au prétexte (largement fallacieux, répétons-le), de la "fuite" des
binationaux, non seulement ils prônent en amont de la démarche une
méthode de discrimination par la nationalité, mais de surcroît ils
l'accompagnent par des préjugés à la fois physiques, techniques et
moraux sur les joueurs concernés. Craignent-ils que "les Blacks"
puissent tout aussi bien fournir des petits gabarits techniques et
intelligents, ou pensent-ils vraiment qu'ils ne le pourraient pas? [4].
Discrimination négative
Le
but de l'enquête commanditée par le ministère au sein de la Fédération
est notamment de déterminer si ce programme de discrimination s'est
concrétisé, mais la controverse ne saurait s'arrêter là en cas de quitus
sur ce point. Si, une fois qu'ils sont révélés, on tolère de tels
propos tenus dans le secret des réunions, il n'y aura aucune surprise à
les voir devenir, dans quelques années, une politique officielle
parfaitement assumée.
Le choc né des révélations de Mediapart
procède moins du constat, hélas maintes fois attesté, de la
banalisation des préjugés simplistes qui font le lit du racisme
ordinaire, que de l'évidence que des programmes discriminatoires peuvent
être évoqués, voire mis en œuvre, en toute bonne conscience par des
personnes pour lesquelles on trouve déjà des flopées de témoins prêts à
jurer de leur impeccable moralité [5].
S'il faut le condamner, comment s'en étonner? Depuis une dizaine
d'années, le football a été instrumentalisé par une cause xénophobe qui
s'est nourrie des psychodrames nationaux survenus depuis France-Algérie
2001 jusqu'au fiasco de la Coupe du monde 2010. L'interprétation de ce
dernier comme une conséquence de la mentalité de joueurs issus des
banlieues a contribué à rendre possible les raisonnements tenus au siège
de la Fédération. Raisonnements dont la gravité apparaît d'une tout
autre ampleur que celle du vaudeville de Knysna, et bien plus "honteux"
pour notre pays...
L'obsession raciale s'est elle-même enracinée dans la société française tout entière [6].
À ce titre, les conversations de la DTN ne sont que le symptôme, non
pas de "dérapages" mais bien du déplacement de ce qui est devenu
tolérable ou imaginable. Avec ces projets de discrimination négative, le
message envoyé aux jeunes "issus de l'immigration" (puisqu'on les
renvoie toujours à cette identité) est absolument désastreux: il s'agit
de refermer la porte de cet ascenseur social – aussi illusoires et
réservées à une extrême minorité soient les possibilités d'ascension
qu'il offre –, en contradiction complète avec les "valeurs" incessamment
proclamées du sport, censé incarner une forme pure d'égalité des
chances.
On n'aura pas fait le tour de la question dans cet
article, et d'autres interprétations peuvent être faites du débat ainsi
révélé (lire par exemple les articles d'Olivier Villepreux ou Daniel Schneidermann).
Il reste difficile de se voiler suffisamment la face pour ne pas
éprouver une immense tristesse en découvrant la façon dont, fût-ce entre
eux, les responsables de la Direction technique nationale conçoivent
leur mission et élaborent des politiques de formation.
[1]
D'autant que préempter précocement des joueurs en les sélectionnant
dans les équipes nationales de jeunes ne constituait pas une pratique
très équitable.
[2] D'autres
citations l'exonèrent d'un racisme ouvert, notamment quand il s'en tient
à la question du choix de la nationalité sportive: "Moi
c'est pas les gens de couleur qui me posent un problème. C'est pas les
gens de couleur, c'est pas les gens nord-africains. Moi j'ai aucun
problème avec eux. Mais le problème, c'est que ces gens-là doivent se
déterminer et essayer qu'on les aide à se déterminer. S'il n'y a que des
– et je parle crûment – que des blacks dans les pôles (de préformation,
NDLR) et que ces blacks-là se sentent français et veulent jouer en
équipe de France, cela me va très bien."
[3]
Sans occulter non plus que leur institution est à l'origine d'un
recrutement orienté vers des morphotypes athlétiques et vers
l'enseignement d'une culture tactique défensive. Par ailleurs, ont-ils
renoncé à former les joueurs comme des citoyens responsables,
susceptibles d'être attachés au maillot et de manifester leur bon esprit
collectif?
[4] Plus
accessoirement, ils semblent ne pas avoir conscience de l'impasse dans
laquelle leur politique mènerait, notamment pour les sélections de
jeunes et les clubs. Francis Smerecki rappelle pourtant: "Si on enlève
la totalité des gens qui peuvent choisir, pour une autre sélection
éventuellement, je ne sais pas si on a une division. Parce que quelque
part, même s'ils vont jouer dans un autre pays, il y a des clubs de
Ligue 2 qui vivent avec ces joueurs-là."
[5] Notons la charge d'André Mérelle, ancien directeur de l'INF Clairefontaine qui a estimé que François Blaquart avait "ce qu'il mérite".
[6]
On peut impunément tenir des propos racistes au plus haut niveau de
l'État, la xénophobie est devenue un levier électoral comme un autre,
les pouvoirs publics ont légitimé la stigmatisation de populations
particulières et tenté d'inscrire dans la loi des mesures
discriminatoires, la montée du Front national est médiatisée comme un
excitant phénomène de marketing politique, etc.
PAS DE BLACKS, "PAS DE PROBLÈME" ?
Jérôme Latta -
lundi 2 mai 2011
En
préconisant de traiter le (faux) problème de la binationalité avec des
mesures discriminatoires, certains membres de la DTN et le sélectionneur
national ont exprimé une piètre idée de leur mission, imprégnée de
préjugés désolants.
S'il a été vendu avec un
sensationnalisme qui a pu nuire à la crédibilité de la démarche, le
verbatim de la réunion du 8 novembre au siège de la Fédération, publié
par Mediapart samedi, n'est plus contesté à l'issue du week-end. Le
débat sur la légitimité de la publication de propos tenus dans un cadre
privé peut quant à lui être écarté en ne les jugeant justement pas comme
des propos publics. La question est surtout de savoir, maintenant, si
leur contenu légitimait ou non leur révélation. La retranscription ne
comporte pas de propos explicitement racistes, et elle n'apporte pas la
preuve que le système de quotas envisagé a été mis en chantier. Mais le
dialogue révèle des conceptions et des modes de pensée consternants à ce
niveau de responsabilité au sein du football français et, de glissement
en glissement, il témoigne d'une racialisation de la question initiale -
celle de la binationalité - au travers d'une inquiétante vision de la
formation des joueurs.
Binationalité : un faux problème
Il
est légitime que la DTN se pose la question des conséquences de la
double nationalité sportive, qui permet à des joueurs ayant effectué
toute leur formation en France et évolué dans les sélections nationales
de jeunes, d'opter pour une autre sélection à laquelle leur origine leur
donne droit. Cette mesure adoptée par la FIFA en deux temps (2005 et
2009) a créé un effet d'aubaine à la fois pour les joueurs et les
sélections concernés. Ces "défections" peuvent être amèrement vécues par
des formateurs qui, au sein de la FFF, ont pour mission de renforcer
l'équipe de France. Pourtant, le problème n'en est pas véritablement un:
pour un Moussa Sow, la plupart des joueurs optant pour un autre maillot
national évoluent à un niveau moyen et ne manqueront pas réellement à
l'équipe de France (même si le phénomène tend aujourd'hui à prendre de
l'ampleur – lire "Les 'binationaux', enquête sur ces footballeurs français qui ne jouent pas en bleu").
Les
protagonistes de la réunion ne l'ignorent pas, mais ils en font une
question de principe, au travers notamment de "l'attachement au maillot"
conçu sous un angle étroitement patriotique. Étroitement, car ces
joueurs, quelle que soit leur nationalité sportive, profitent aux clubs
français sur le terrain et dans leurs bilans comptables, l'exportation
de joueurs étant une ressource majeure pour eux. Ce rétrécissement
implique aussi de négliger totalement la satisfaction professionnelle et
personnelle de voir un joueur que l'on a formé accéder au haut niveau
et devenir international. Parallèlement, n'entre pas en ligne de compte,
aux yeux des débatteurs (en dehors de Francis Smerecki, entraîneur des
moins de 20 ans), le fait que les joueurs exercent là un droit légitime,
et que la France contribue ainsi à renforcer sportivement des pays dont
les enfants ont fait et font encore le bonheur du football français [1]. Inconcevable, aussi, semble l'idée que cela puisse être profitable à l'image de la France, pays formateur...
Une volonté de discrimination
Malheureusement,
la discussion ne s'arrête pas là. D'abord, la mesure proposée est
explicitement d'imposer des quotas de joueurs binationaux aux portes des
pôles de formation ("même pas" 30%): "Les
clubs pros, ils peuvent les prendre. Ils se répartissent! (...) Nous on
travaille pour le football français, on ne travaille pas pour les
sélections étrangères", dit ainsi Erick Mombaerts. Or, cela
revient mécaniquement à barrer l'accès des structures fédérales aux
jeunes ayant des origines africaines, ceux-ci étant très majoritaires
dans le vivier français.
La démarche est clairement discriminatoire,
comme le fait remarquer un Francis Smerecki manifestement perturbé par
la tournure du débat, et évidemment contraire au droit. Les
protagonistes ne s'y trompent pas, qui insistent sur la confidentialité à
respecter: "L'idéal effectivement,
c'est de dire, mais pas officiellement: de toute façon on ne prend pas
plus de tant de gamins qui sont susceptibles de changer (de nationalité,
NDLR) à terme" ; "il ne faut pas que ce soit dit" (François Blaquart) ; "On est obligé de le faire sous le coude" (Erick Mombaerts). Difficile, ensuite, de plaider la candeur.
Plus
inquiétant: il apparaît au fil des échanges qu'on n'en était pas
seulement au stade des intentions en novembre dernier. Selon Mediapart, le DTN François Blaquart "se
dit non seulement favorable à l'instauration d'un quota, mais lâche
qu'il a d'ores et déjà passé la consigne à Gérard Prêcheur",
directeur de l'INF Clairefontaine. Cette politique des quotas, loin
d'être une simple idée en l'air, est décrite par Mombaerts comme déjà à
l'œuvre au sein des clubs: "Il y a
bien des clubs comme Lyon qui le font dans leur centre de formation. Ils
le font systématiquement. J'étais à Marseille là. Et Henri Stambouli
(directeur du centre de formation de l'OM, NDLR) le met en place sur
Marseille. Pareil, ils vont limiter le nombre."
"Prototypes de joueurs"
Déjà
accablant, ce projet de discrimination sur le critère de la
(bi-)nationalité s'accompagne de fortes ambiguïtés dans le discours,
dans la mesure où la conversation finit par rapporter à l'origine la
question des critères de sélection qu'il s'agit de transformer: il est
bien question de mieux "sensibiliser" les jeunes, de les "aider à (s')identifier",
mais les intervenants en arrivent à amalgamer le physique des joueurs,
leurs qualités techniques et leur mentalité en les liant à leur origine –
et donc à leur couleur de peau (lire l'article du sociologue Éric Fassin, qui analyse ces glissements).
Démarrée
sur la question de la binationalité, la question dérive franchement.
Laurent Blanc, qui évoquait pourtant le souci de mieux sensibiliser les
jeunes à l'appartenance nationale, désigne "les Blacks" et verse tout
particulièrement dans cette confusion. Dans ses interventions, il boucle
le raisonnement en assimilant profils athlétiques, style de jeu et
origine africaine. "Je vois quelques
centres de formation: on a l'impression qu'on forme vraiment le même
prototype de joueurs: grands, costauds, puissants. (...) Qu'est-ce qu'il
y a actuellement comme grands, costauds, puissants? Les blacks".
On entend aussi Laurent Blanc recommander de "recentrer" la sélection "surtout pour des garçons de 13-14 ans, 12-13 ans" sur
des "critères, modifiés avec notre propre culture (...) avec notre
culture, notre histoire". Son invocation de l'exemple espagnol aggrave
l'impression: "Je vais vous citer les
Espagnols: ils n'ont pas ces problèmes-là. Ils ont des critères de jeu
qui sont très précis, à 12-13 ans. Les Espagnols, ils m'ont dit: «Nous,
on n'a pas de problème. Nous, des blacks, on n'en a pas»". Erick Mombaerts leur oppose les "petits gabarits blancs" et sa conclusion, même si le lien direct est incertain, parachève le malaise: "Le jeu, c'est l'intelligence, donc c'est d'autres types de joueurs. Donc tout est lié, tout est lié!"
Indigence du raisonnement
Si
Laurent Blanc ne parle que de culture footballistique, cela signifie
d'abord qu'il pense que "les Blacks" – déjà réduits au sempiternel
stéréotype du Noir "grand, costaud, puissant" (lire l'article de Michel Wieworka) et présumés peu enclins à s'identifier au maillot national – sont également en peine d'assimiler "notre culture"
du jeu. Dans l'hypothèse où le sélectionneur évoquerait dans le même
temps leur mentalité sous l'angle de leur caractère inassimilable, le
cas serait désespérant de la part d'une telle personnalité, investie
d'une telle fonction [2]. On se raccrochera à l'hypothèse d'une grande maladresse.
Tout
en laissant au DTN et au sélectionneur national le bénéfice du doute,
il faut clamer l'indigence du raisonnement suivi par les plus hauts
responsables de la formation française. Leur métier est de repérer et de
former les meilleurs jeunes et d'en faire les meilleurs footballeurs
possibles. Si leur projet est de redonner une dimension plus technique
et moins physique aux joueurs formés, de renouer avec des principes de
jeu plus ouverts, il leur incombe de changer les critères (physiques,
techniques, voire liés à la motivation) de sélection sans aucune autre
considération que l'impératif de recruter les meilleurs à cette aune [3].
Là,
au prétexte (largement fallacieux, répétons-le), de la "fuite" des
binationaux, non seulement ils prônent en amont de la démarche une
méthode de discrimination par la nationalité, mais de surcroît ils
l'accompagnent par des préjugés à la fois physiques, techniques et
moraux sur les joueurs concernés. Craignent-ils que "les Blacks"
puissent tout aussi bien fournir des petits gabarits techniques et
intelligents, ou pensent-ils vraiment qu'ils ne le pourraient pas? [4].
Discrimination négative
Le
but de l'enquête commanditée par le ministère au sein de la Fédération
est notamment de déterminer si ce programme de discrimination s'est
concrétisé, mais la controverse ne saurait s'arrêter là en cas de quitus
sur ce point. Si, une fois qu'ils sont révélés, on tolère de tels
propos tenus dans le secret des réunions, il n'y aura aucune surprise à
les voir devenir, dans quelques années, une politique officielle
parfaitement assumée.
Le choc né des révélations de Mediapart
procède moins du constat, hélas maintes fois attesté, de la
banalisation des préjugés simplistes qui font le lit du racisme
ordinaire, que de l'évidence que des programmes discriminatoires peuvent
être évoqués, voire mis en œuvre, en toute bonne conscience par des
personnes pour lesquelles on trouve déjà des flopées de témoins prêts à
jurer de leur impeccable moralité [5].
S'il faut le condamner, comment s'en étonner? Depuis une dizaine
d'années, le football a été instrumentalisé par une cause xénophobe qui
s'est nourrie des psychodrames nationaux survenus depuis France-Algérie
2001 jusqu'au fiasco de la Coupe du monde 2010. L'interprétation de ce
dernier comme une conséquence de la mentalité de joueurs issus des
banlieues a contribué à rendre possible les raisonnements tenus au siège
de la Fédération. Raisonnements dont la gravité apparaît d'une tout
autre ampleur que celle du vaudeville de Knysna, et bien plus "honteux"
pour notre pays...
L'obsession raciale s'est elle-même enracinée dans la société française tout entière [6].
À ce titre, les conversations de la DTN ne sont que le symptôme, non
pas de "dérapages" mais bien du déplacement de ce qui est devenu
tolérable ou imaginable. Avec ces projets de discrimination négative, le
message envoyé aux jeunes "issus de l'immigration" (puisqu'on les
renvoie toujours à cette identité) est absolument désastreux: il s'agit
de refermer la porte de cet ascenseur social – aussi illusoires et
réservées à une extrême minorité soient les possibilités d'ascension
qu'il offre –, en contradiction complète avec les "valeurs" incessamment
proclamées du sport, censé incarner une forme pure d'égalité des
chances.
On n'aura pas fait le tour de la question dans cet
article, et d'autres interprétations peuvent être faites du débat ainsi
révélé (lire par exemple les articles d'Olivier Villepreux ou Daniel Schneidermann).
Il reste difficile de se voiler suffisamment la face pour ne pas
éprouver une immense tristesse en découvrant la façon dont, fût-ce entre
eux, les responsables de la Direction technique nationale conçoivent
leur mission et élaborent des politiques de formation.
[1]
D'autant que préempter précocement des joueurs en les sélectionnant
dans les équipes nationales de jeunes ne constituait pas une pratique
très équitable.
[2] D'autres
citations l'exonèrent d'un racisme ouvert, notamment quand il s'en tient
à la question du choix de la nationalité sportive: "Moi
c'est pas les gens de couleur qui me posent un problème. C'est pas les
gens de couleur, c'est pas les gens nord-africains. Moi j'ai aucun
problème avec eux. Mais le problème, c'est que ces gens-là doivent se
déterminer et essayer qu'on les aide à se déterminer. S'il n'y a que des
– et je parle crûment – que des blacks dans les pôles (de préformation,
NDLR) et que ces blacks-là se sentent français et veulent jouer en
équipe de France, cela me va très bien."
[3]
Sans occulter non plus que leur institution est à l'origine d'un
recrutement orienté vers des morphotypes athlétiques et vers
l'enseignement d'une culture tactique défensive. Par ailleurs, ont-ils
renoncé à former les joueurs comme des citoyens responsables,
susceptibles d'être attachés au maillot et de manifester leur bon esprit
collectif?
[4] Plus
accessoirement, ils semblent ne pas avoir conscience de l'impasse dans
laquelle leur politique mènerait, notamment pour les sélections de
jeunes et les clubs. Francis Smerecki rappelle pourtant: "Si on enlève
la totalité des gens qui peuvent choisir, pour une autre sélection
éventuellement, je ne sais pas si on a une division. Parce que quelque
part, même s'ils vont jouer dans un autre pays, il y a des clubs de
Ligue 2 qui vivent avec ces joueurs-là."
[5] Notons la charge d'André Mérelle, ancien directeur de l'INF Clairefontaine qui a estimé que François Blaquart avait "ce qu'il mérite".
[6]
On peut impunément tenir des propos racistes au plus haut niveau de
l'État, la xénophobie est devenue un levier électoral comme un autre,
les pouvoirs publics ont légitimé la stigmatisation de populations
particulières et tenté d'inscrire dans la loi des mesures
discriminatoires, la montée du Front national est médiatisée comme un
excitant phénomène de marketing politique, etc.
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 68
Localisation : La terre
Re: Des quotas dans le foot ?
L'article de dhorasso dans "so foot" me semble également intéressant (même si je ne suis pas d'accord avec certains éléments de sa réflexion)
On ne construit rien sur la peur de perdre
6 mai 2011
« On a perdu, on a gagné, on s’est bien amusés » disaient les jeunes de Callela de la Costa, dans « Le foot ombre et lumière » d’Eduardo Galeano.
A l’issue d’un match au cours duquel l’Uruguay écrasa le Chili 4 buts à 0, les autorités chiliennes demandèrent l’annulation
du match pour triche : l’équipe uruguayenne était accusée d’avoir utilisé deux joueurs africains, dont l’un des buteurs. Les joueurs en
question s’appelaient Isabelo Gradin et Juan Delgado, tous deux nés en Uruguay, arrières-petits-fils d’esclaves. Nous étions en 1916 et
l’Uruguay était la seule équipe au monde à aligner des joueurs dits de couleur. Près d’un siècle plus tard, une tragi-comédie anachronique vient démontrer une fois de plus que l’histoire n’est pas plus droite qu’un dribble de Garrincha.
Accuser de racisme les techniciens du football qui ont
participé à la fameuse réunion dite des « quotas » à la Fédération
Française de Football est absurde et empêche de réfléchir aux
enseignements de cette crise. Aussi absurde et stupide que de résumer
l’épisode du bus de Knysna à un caprice d’une bande de « caïds immatures »
et surpayés. De notre point de vue, ces deux événements médiatiques ont
mis un coup de projecteur sur les problèmes structurels de ce que l’on
appelle le foot français (il s’agit en réalité de la gestion de
l’industrie du football professionnel français).
- Anachronique
Nous vivons dans un monde dans lequel la France, dont
les qualités de terre d’accueil ont construit son identité, forme des
ingénieurs, des médecins, des artistes ou des mécaniciens qui font
parfois bénéficier d’autres pays, voire leur pays d’origine, de leurs
compétences et talents. Cela s’appelle la coopération, l’échange de
compétences, la solidarité. L’Inde, l’Allemagne, les Etats-Unis, le
Sénégal ou l’Uruguay font de même, et certains de leurs passeports
posent leurs valises en France. La France fait par ailleurs partie d’une
entité politique et économique qui s’appelle l’Europe, fruit des leçons
tirées de deux guerres mondiales, et à l’intérieur de laquelle on peut
étudier et se déplacer librement. C’est dans ce monde que naissent nos
enfants, et c’est quand même pas mal. Les réflexions de nos techniciens
du football autour de la binationalité sont gênantes lorsqu’elles
assimilent la binationalité à la détention potentielle d’un passeport
africain (les apprentis joueurs franco-allemands, franco-espagnols,
franco-polonais, franco-belges ou franco-argentins ne poseraient donc
pas de souci...). Ces réflexions sont surtout le symptôme d’une
déconnexion totale de la réalité du monde entourant le ballon. Le
football est le sport le plus populaire de France, un jeu riche en
enseignements et un lien social formidable. Malheureusement, la
Fédération Française de Football est aujourd’hui déconnectée de la
société française et de la planète. C’est embêtant.
- On ne construit rien sur la peur de perdre
« La société française, la mondialisation, mais on s’en fout ! On nous demande juste de gagner, et surtout de ne pas perdre… ».
Nous pensons que gagner n’est pas un objectif en soi. Le football est
riche parce qu’il est jeu, parce que le perdant peut avoir mieux joué
que le vainqueur, parce qu’on peut prendre un plaisir dingue et perdre,
parce qu’on est toujours le perdant de quelqu’un. Parce qu’on peut
gagner en s’emmerdant ou en emmerdant les autres. L’adhésion à un sport
ne peut être basée sur la victoire, par définition aléatoire et peu
prévisible, particulièrement dans un sport collectif. A contrario,
la manière dont on joue, dont on parle, dont on aime un sport peut
faire école. La discussion « quotas » a révélé que la peur de perdre
avait pu amener des gens censés et intelligents à envisager d’exclure
des adolescents d’une filière leur permettant de s’épanouir et de
s’exprimer ! « On ne va quand même pas dépenser nos moyens pour les autres ! Et si on formait des footballeurs pour ’rien’ » ? « « Rien » ?
c’est à dire pour qu’ils aillent jouer à l’étranger et « nous » battre
un jour…La belle affaire ! Il est vrai qu’en 2002 les meilleurs joueurs
formés en France avaient tous choisi le Sénégal…
- L’absence de démocratie mène à l’endogamie et aux difficultés respiratoires
La FFF, à l’image de notre société, se révèle incapable
de traduire la diversité de ses licenciés dans sa gouvernance. Tous les
statuts et autres règlements intérieurs semblent avoir été conçus pour
décourager les joueurs, la majorité du monde amateur et, plus que tout,
toute personne extérieure au monde du ballon rond de participer à la vie
de cette Fédération. Cette endogamie finit par sentir le renfermé, ne
favorise en aucun cas la créativité et la remontée d’informations du
terrain. Elle favorise par contre la surdité et l’aveuglement, comme
lors de la fameuse réunion incriminée. C’est l’ouverture et la mixité
qui permettent de se régénérer. Si la pièce avait, ce jour-là, été
remplie de personnes, hommes et femmes, jeunes et plus expérimentés,
représentant la diversité et la beauté de la société française, on peut
facilement imaginer que la discussion aurait pris une autre tournure. Si
ces techniciens du football ne comprennent en rien le procès qui leur
fait, c’est que leur formation et leur quotidien ne leur donnent pas
forcément les moyens de penser de type de problèmes.
Sanctionner de supposés coupables de racisme ou de
discrimination(s) ne nous semble pas forcément justifié ou opportun dans
cette affaire. Il nous semble en revanche plus qu’urgent de questionner
les objectifs, le fonctionnement et la politique d’une Fédération qui
ne fédère plus que ses dirigeants. Le Football est un lien social, nous
militons pour qu’il reste durable et joyeux.
Vikash Dhorasoo & Pierre Walfisz, cofondateurs du Mouvement Tatane
On ne construit rien sur la peur de perdre
6 mai 2011
« On a perdu, on a gagné, on s’est bien amusés » disaient les jeunes de Callela de la Costa, dans « Le foot ombre et lumière » d’Eduardo Galeano.
A l’issue d’un match au cours duquel l’Uruguay écrasa le Chili 4 buts à 0, les autorités chiliennes demandèrent l’annulation
du match pour triche : l’équipe uruguayenne était accusée d’avoir utilisé deux joueurs africains, dont l’un des buteurs. Les joueurs en
question s’appelaient Isabelo Gradin et Juan Delgado, tous deux nés en Uruguay, arrières-petits-fils d’esclaves. Nous étions en 1916 et
l’Uruguay était la seule équipe au monde à aligner des joueurs dits de couleur. Près d’un siècle plus tard, une tragi-comédie anachronique vient démontrer une fois de plus que l’histoire n’est pas plus droite qu’un dribble de Garrincha.
Accuser de racisme les techniciens du football qui ont
participé à la fameuse réunion dite des « quotas » à la Fédération
Française de Football est absurde et empêche de réfléchir aux
enseignements de cette crise. Aussi absurde et stupide que de résumer
l’épisode du bus de Knysna à un caprice d’une bande de « caïds immatures »
et surpayés. De notre point de vue, ces deux événements médiatiques ont
mis un coup de projecteur sur les problèmes structurels de ce que l’on
appelle le foot français (il s’agit en réalité de la gestion de
l’industrie du football professionnel français).
- Anachronique
Nous vivons dans un monde dans lequel la France, dont
les qualités de terre d’accueil ont construit son identité, forme des
ingénieurs, des médecins, des artistes ou des mécaniciens qui font
parfois bénéficier d’autres pays, voire leur pays d’origine, de leurs
compétences et talents. Cela s’appelle la coopération, l’échange de
compétences, la solidarité. L’Inde, l’Allemagne, les Etats-Unis, le
Sénégal ou l’Uruguay font de même, et certains de leurs passeports
posent leurs valises en France. La France fait par ailleurs partie d’une
entité politique et économique qui s’appelle l’Europe, fruit des leçons
tirées de deux guerres mondiales, et à l’intérieur de laquelle on peut
étudier et se déplacer librement. C’est dans ce monde que naissent nos
enfants, et c’est quand même pas mal. Les réflexions de nos techniciens
du football autour de la binationalité sont gênantes lorsqu’elles
assimilent la binationalité à la détention potentielle d’un passeport
africain (les apprentis joueurs franco-allemands, franco-espagnols,
franco-polonais, franco-belges ou franco-argentins ne poseraient donc
pas de souci...). Ces réflexions sont surtout le symptôme d’une
déconnexion totale de la réalité du monde entourant le ballon. Le
football est le sport le plus populaire de France, un jeu riche en
enseignements et un lien social formidable. Malheureusement, la
Fédération Française de Football est aujourd’hui déconnectée de la
société française et de la planète. C’est embêtant.
- On ne construit rien sur la peur de perdre
« La société française, la mondialisation, mais on s’en fout ! On nous demande juste de gagner, et surtout de ne pas perdre… ».
Nous pensons que gagner n’est pas un objectif en soi. Le football est
riche parce qu’il est jeu, parce que le perdant peut avoir mieux joué
que le vainqueur, parce qu’on peut prendre un plaisir dingue et perdre,
parce qu’on est toujours le perdant de quelqu’un. Parce qu’on peut
gagner en s’emmerdant ou en emmerdant les autres. L’adhésion à un sport
ne peut être basée sur la victoire, par définition aléatoire et peu
prévisible, particulièrement dans un sport collectif. A contrario,
la manière dont on joue, dont on parle, dont on aime un sport peut
faire école. La discussion « quotas » a révélé que la peur de perdre
avait pu amener des gens censés et intelligents à envisager d’exclure
des adolescents d’une filière leur permettant de s’épanouir et de
s’exprimer ! « On ne va quand même pas dépenser nos moyens pour les autres ! Et si on formait des footballeurs pour ’rien’ » ? « « Rien » ?
c’est à dire pour qu’ils aillent jouer à l’étranger et « nous » battre
un jour…La belle affaire ! Il est vrai qu’en 2002 les meilleurs joueurs
formés en France avaient tous choisi le Sénégal…
- L’absence de démocratie mène à l’endogamie et aux difficultés respiratoires
La FFF, à l’image de notre société, se révèle incapable
de traduire la diversité de ses licenciés dans sa gouvernance. Tous les
statuts et autres règlements intérieurs semblent avoir été conçus pour
décourager les joueurs, la majorité du monde amateur et, plus que tout,
toute personne extérieure au monde du ballon rond de participer à la vie
de cette Fédération. Cette endogamie finit par sentir le renfermé, ne
favorise en aucun cas la créativité et la remontée d’informations du
terrain. Elle favorise par contre la surdité et l’aveuglement, comme
lors de la fameuse réunion incriminée. C’est l’ouverture et la mixité
qui permettent de se régénérer. Si la pièce avait, ce jour-là, été
remplie de personnes, hommes et femmes, jeunes et plus expérimentés,
représentant la diversité et la beauté de la société française, on peut
facilement imaginer que la discussion aurait pris une autre tournure. Si
ces techniciens du football ne comprennent en rien le procès qui leur
fait, c’est que leur formation et leur quotidien ne leur donnent pas
forcément les moyens de penser de type de problèmes.
Sanctionner de supposés coupables de racisme ou de
discrimination(s) ne nous semble pas forcément justifié ou opportun dans
cette affaire. Il nous semble en revanche plus qu’urgent de questionner
les objectifs, le fonctionnement et la politique d’une Fédération qui
ne fédère plus que ses dirigeants. Le Football est un lien social, nous
militons pour qu’il reste durable et joyeux.
Vikash Dhorasoo & Pierre Walfisz, cofondateurs du Mouvement Tatane
gérard menvussa- Messages : 6658
Date d'inscription : 06/09/2010
Age : 68
Localisation : La terre
Re: Des quotas dans le foot ?
Une tribune sur le racisme et les classes populaires dans le football actuel.
"Race, classe, football: ne pas hurler avec la meute" Par GÉRARD NOIRIEL historien, EHESS, STÉPHANE BÉAUD Sociologue, Ecole normale supérieure, auteur de "Traîtres à la nation" (La Découverte)
Depuis la grève des Bleus en Afrique du Sud, le football d’élite est devenu un objet pour sociologues, et même l’objet d’une vive controverse. Samedi dernier, à rebours des analyses d’Eric Fassin et Pap Ndaye, le sociologue Stéphane Beaud refusait de taxer de «racistes» les propos des dirigeants de la FFF. Il persiste dans ce texte, cosigné avec l’historien de l’immigration Gérard Noiriel : la discrimination serait moins raciale que sociale. Eric Fassin répondra à cet article la semaine prochaine, dans nos colonnes.
avec cet extrait qui parle des classes populaires et du foot
Le football étant le sport de prédilection des classes populaires, depuis la Seconde Guerre mondiale il a toujours été massivement alimenté par les enfants d’immigrés. Ce qui s’est produit avec les Italiens, les Polonais, les Algériens se poursuit aujourd’hui avec les enfants des pays d’Afrique subsaharienne nés ou venus en France dans les années 1980-1990.
Le mot «Black» s’est progressivement imposé dans le football comme un terme générique pour désigner les joueurs issus de cette dernière vague d’immigration. Il renvoie moins à une catégorie raciale qu’à une catégorie sociale. La plupart des joueurs d’origine africaine qui se sont imposés au plus haut niveau ont en effet grandi dans les cités de la région parisienne (60 % des élèves des centres de formation en seraient issus), au sein de familles d’ouvriers (les pères de Diarra, Sagna, Diaby le sont). Ils ont connu la «culture de cité» qui s’est imposée dans la banlieue paupérisée et politiquement déstructurée des années 1990-2000. Cette histoire sociale particulière explique non seulement l’extraordinaire énergie que ces jeunes déploient pour s’en sortir par le sport, mais aussi, pour ceux qui sont les plus inscrits dans la culture de cité, certains traits de leur comportement qui contreviennent aux exigences du haut niveau (difficultés à respecter un certain nombre de normes : sociales, sportives, diététiques).
Une façon de dire «déviants»
Il est certain que les cadres de la FFF, dont beaucoup sont issus des précédentes générations de la classe ouvrière (cf. Laurent Blanc, Aimé Jacquet, etc.), ont parfois du mal à comprendre les attitudes de ces jeunes. Ce qui explique (mais n’excuse pas) les connotations péjoratives prises par le mot «Black». On peut penser que c’est cette acception du terme que Laurent Blanc a en tête lorsqu’il s’exprime dans cette réunion de la DTN en novembre 2010 dont le verbatim a été produit par Mediapart. En bref, son expérience de coach et ses discussions avec les éducateurs le conduisent à parler des «Blacks» pour désigner le groupe «déviant» des jeunes qu’il faut particulièrement surveiller et encadrer, non pas du fait de leur couleur de peau, mais de leurs caractéristiques sociales et de leur comportement modal dans la vie d’une équipe.
L’utilisation d’un mot emprunté au vocabulaire racial pour désigner ces jeunes est très critiquable d’un point de vue civique. Mais elle ne fait qu’illustrer le processus que nous avons décrit dans nos travaux sur l’ethnicisation/racialisation du discours social en France depuis les années 1980. Faut-il préciser que les responsables de la DTN n’ont pas eux-mêmes inventé ce vocabulaire ? Ce sont les politiciens, les journalistes, les intellectuels, bref les professionnels de la parole publique qui ont fabriqué, à partir des années 1980, par le biais des polémiques qui les ont opposés sur l’immigration, le lexique qui enferme les individus dans une identité ethnique ou raciale réifiée en occultant constamment leur identité sociale.
Lire la suite sur libé http://www.liberation.fr/sports/01012335716-race-classe-football-ne-pas-hurler-avec-la-meute
ramiro- Messages : 238
Date d'inscription : 01/04/2011
Re: Des quotas dans le foot ?
Le « gros » dérapage de Pierre Ménès, expert en football et en génétique
par Mathias Reymond, le 8 mai 2011
« Je ne pensais pas non plus que c’était raciste de dire que les noirs couraient plus vite que les blancs. »
Chaque vendredi, Pierre Ménès, ancien journaliste à l’Equipe, chroniqueur râleur sur Canal Plus dans l’émission « Canal Football Club », signe sa « Grosse Kronik » dans Direct Sport, l’hebdomadaire sportif de Vincent Bolloré. Connu pour ne pas avoir la langue de bois, il ne se gêne pas pour balancer sur les footballeurs qui ne sont pas ses copains…
Dans son papier du 6 mai 2011, Pierre Ménès joue les naïfs au grand cœur concernant l’affaire dite « des quotas » dans le football français, il flingue l’ « insupportable » Lilian Thuram et apporte un soutien indéfectible à Laurent Blanc qu’il « connaît depuis vingt-cinq ans ». Jusque là, rien de bien croustillant. Rien qui ne sorte de la polémique divisant le monde du football entre pro-Blanc et pro-Thuram. Une chronique de plus, serait-on tenté d’ajouter.
Mais le narcissique Ménès (la première personne du singulier est utilisée 15 fois dans sa chronique) fait aussi référence à l’Histoire : « Cette période nauséabonde où tout part d’une délation comme aux heures les plus sombres de notre histoire, laissera des traces. » Et surtout, l’expert es football appuie Laurent Blanc (« Lolo » comme il le nomme…) en employant une phrase de soutien dont le sélectionneur se serait bien passé : « Je ne pensais pas non plus que c’était raciste de dire que les noirs couraient plus vite que les blancs. »
Pierre Ménès ne peut pas avoir oublié que Jean-Marie Le Pen avait utilisé exactement ce même argument pour justifier l’existence des races. Si ce n’est pas raciste de dire que « les noirs » courent plus vite que « les blancs », parce qu’ils sont noirs, ce n’est pas raciste, alors, de dire que « les blancs » sont plus intelligents que « les noirs » parce que 99% des prix Nobels sont blancs…
Jean-Marie Le Pen a ouvert une porte. Eric Zemmour a tenu la porte. Robert Ménard et Ivan Rioufol sont entrés. Et Pierre Ménès les a suivis.
Mathias Reymond
http://www.acrimed.org/article3589.html
Gauvain- Messages : 764
Date d'inscription : 23/06/2010
Localisation : 75/78
Re: Des quotas dans le foot ?
[quote="ramiro"]
Une tribune sur le racisme et les classes populaires dans le football actuel.
[quote]
Ah ah, un sociologue qui découvre que le racisme actuellement n'a plus grand chose à voir avec le concept de race. Les mêmes qui sincèrement peuvent s'apitoyer sur le sort des africains auront une haine viscérale pour tout ce qui porte casquette, baskets, survêtement et vient d'un quartier populaire. Bien sûr qu'il y a encore une bonne part de racisme " à l'ancienne " mais sinon ça se confond beaucoup avec un racisme social. Un arabe en costard dans les rues de Saint Cloud, personne pensera que c'en est encore un qui vend de la drogue et fout la merde.
Dans cette affaire, il y a un parallèle à faire avec la NBA qui mène ouvertement depuis des années la guerre au côté ghetto du basket américain, la plupart des joueurs étant des noirs issus du prolétariat ou sous prolétariat. Interdiction du trash talking, interdiction d'avoir un comportement pouvant être interprété comme une intimidation vis à vis de l'adversaire, obligation de se présenter aux stades les jours de match en costumes-cravates ect... On pourrait ajouter la valorisation des joueurs qui ne sont pas issus des ghettos ou qui n'ont pas l'ethos du joueur issus d'un quartier populaire. L'instance dirigeante de la NBA ne dit pas qu'il faut moins de noirs dans ce sport mais fait la guerre à tout ce qui pourrait rappeler que ce sport a mille et un lien avec les ghettos noirs américains.
Une tribune sur le racisme et les classes populaires dans le football actuel.
[quote]
Ah ah, un sociologue qui découvre que le racisme actuellement n'a plus grand chose à voir avec le concept de race. Les mêmes qui sincèrement peuvent s'apitoyer sur le sort des africains auront une haine viscérale pour tout ce qui porte casquette, baskets, survêtement et vient d'un quartier populaire. Bien sûr qu'il y a encore une bonne part de racisme " à l'ancienne " mais sinon ça se confond beaucoup avec un racisme social. Un arabe en costard dans les rues de Saint Cloud, personne pensera que c'en est encore un qui vend de la drogue et fout la merde.
Dans cette affaire, il y a un parallèle à faire avec la NBA qui mène ouvertement depuis des années la guerre au côté ghetto du basket américain, la plupart des joueurs étant des noirs issus du prolétariat ou sous prolétariat. Interdiction du trash talking, interdiction d'avoir un comportement pouvant être interprété comme une intimidation vis à vis de l'adversaire, obligation de se présenter aux stades les jours de match en costumes-cravates ect... On pourrait ajouter la valorisation des joueurs qui ne sont pas issus des ghettos ou qui n'ont pas l'ethos du joueur issus d'un quartier populaire. L'instance dirigeante de la NBA ne dit pas qu'il faut moins de noirs dans ce sport mais fait la guerre à tout ce qui pourrait rappeler que ce sport a mille et un lien avec les ghettos noirs américains.
Zappa- Messages : 146
Date d'inscription : 25/07/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
Une saison de foot
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Sports 06/05/2011 à 14h58 (mise à jour à 19h28)
«L’immense majorité des joueurs est persuadée que les Noirs sont naturellement plus costauds»
514 réactions
Recueilli par Quentin Girard
Les joueurs de l'OM, Valbuena et Taiwo le 1er mai 2011, contre Auxerre.
Les joueurs de l'OM, Valbuena et Taiwo le 1er mai 2011, contre Auxerre. (REUTERS)
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Sébastien Chavigner, doctorant et chargé de cours à Sciences Po Paris, est l’auteur d’un mémoire de recherche portant sur les joueurs noirs dans le football français, réalisé en 2010 à partir d’une enquête de terrain dans les centres de formation. Il estime que les «croyances racialistes» imprègnent tout le football français, des encadrants techniques aux joueurs.
Lors de votre enquête de terrain avez-vous observé dans les centres de formation une surreprésentation des joueurs noirs?
Pour parler de surreprésentation, il faut se référer à la population totale, «non-footballeuse». D’après un sondage réalisé par l’institut TNS-Sofres pour le compte du Cran en 2007, la population noire de France, tout du moins la partie de la population française s’auto-identifiant comme «noire» ou «métisse» avec des «ascendants noirs», s’élèverait à 3,86%. Comme le fait remarquer l’historien Pap N’Diaye, ce chiffre est sans-doute sous-estimé, mais celui-ci n’excède pas 5%. Or, la proportion de joueurs noirs dans les effectifs des clubs professionnels français se situe aux alentours de 45%. En équipe de France, sur les années 2009 et 2010, on trouve environ 65% de joueurs noirs dans les listes de joueurs sélectionnés par Raymond Domenech. La surreprésentation de ces joueurs est donc énorme.
Comment l’expliquer?
Au-delà des facteurs sociaux comme les conditions socio-économiques d’existence des populations noires en France ou le «miroir aux alouettes» du sport professionnel qui ont été abondamment développés depuis que les sportifs noirs sont devenus majoritaires dans de nombreuses disciplines, j’ai souhaité montrer dans mon enquête que cette surreprésentation tenait aussi pour une bonne part à la croyance bien implantée, chez les recruteurs et formateurs, en une supériorité athlétique «innée» des Noirs par rapport aux Blancs.
Ces préjugés, souvent vagues dans leur formulation, s’articulent autour de «différences génétiques» supposées. Ces croyances racialistes expliqueraient par exemple le surcroît d’explosivité ou la puberté plus précoce des jeunes Noirs. Dans le contexte d’un football qui fait de plus en plus appel à des qualités physiques hors-normes, en particulier en France où ces qualités sont privilégiées par les formateurs, l’offre de joueurs noirs a donc aisément rencontré sa demande.
Dans les verbatim de réunions de la FFF diffusés par Mediapart, les participants parlent des Noirs grands et costaux et des Blancs techniques, ce discours se retrouve-t-il chez les joueurs dans les centres de formation? Et dans l’encadrement technique?
Lors de mes entretiens avec les joueurs, l’immense majorité était ainsi persuadée que les Noirs étaient naturellement plus costauds et rapides. Y compris les joueurs noirs, qui, du coup, cherchaient consciemment à adopter un style de jeu basé sur ces qualités. Chez les joueurs blancs, on remarque principalement une tendance à reconnaître et à accepter l’impossibilité, supposée, de lutter à armes égales avec les joueurs noirs sur le plan physique, parfois contre tout constat empirique. La logique dominante est donc une logique de soumission à un ordre «naturel», hérité là encore des dispositions génétiques supposées des uns et des autres. D’où une certaine spécialisation des joueurs à des postes précis en fonction de leur couleur de peau. Ces stéréotypes ont du coup tendance à s’auto-alimenter.
Pourquoi les joueurs intègrent-ils ces stéréotypes dès le plus jeune âge?
Par souci de maximiser leurs chances de se faire repérer, puis de percer dans un contexte d’hyper-concurrence et de stratégies individuelles qui prennent souvent le pas sur le collectif. Du reste, les stéréotypes raciaux ne sont certainement pas spécifiques au monde du football: dans un sondage réalisé en 2010 pour la Fondation Thuram, à la question «Selon vous, quelles sont les qualités spécifiques des personnes de couleur noire?», 22 % des Français répondent «les qualités physiques et athlétiques».
Lors de votre enquête sur le terrain aviez-vous déjà entendu parler du cas des binationaux?
Cette question concerne assez peu les clubs. Leur objectif prioritaire est de former des joueurs à même de renforcer l’équipe professionnelle et/ou d’être vendus à un bon prix. D’ailleurs, d’un point de vue strictement «commercial», il peut s’avérer intéressant pour un club de voir l’un de ses joueurs acquérir rapidement le statut d’international, même si c’est dans une sélection moins prestigieuse que la France. Un international voit immédiatement sa valeur marchande augmenter. Or, le modèle économique des clubs français repose pour une part non-négligeable sur l’exportation de joueurs vers d’autres championnats. L’idéal reste évidemment de former un joueur accédant à l’équipe de France, mais pour la plupart des clubs professionnels c’est un cas qui reste extrêmement rare.
http://www.liberation.fr/sports/01012335871-noirs-surrepresentation-racisme-racialisme-equipe-bleus-fff-laurent-blanc
Gauvain- Messages : 764
Date d'inscription : 23/06/2010
Localisation : 75/78
quotas dans le football ?
Ah ah, un sociologue qui découvre que le racisme actuellement n'a plus grand chose à voir avec le concept de race.
Salut Zappa, en fait ce n'est pas vraiment ce qu'ils disent (ils sont deux Gérard Noiriel et Stéphane Beaud. Le propos général de leur tribune est d'expliquer qu'il ne faut pas voir cette "affaire" comme une affaire de simple racisme mais plutôt - ou aussi - comme une affaire de "racisme de classe", de racisme social envers des joueurs issus des classes populaires pour la plupart.
Sinon. Je ne sais pas si tu es familier des lectures sociologiques mais il y a "sociologues" et "sociologues". En fait, ces deux intellectuels développent des idées qui peuvent nous servir au quotidien pour comprendre le monde qui nous entoure et nous forger un avis critique. Noiriel est historien de l'immigration et sait exactement ce qu'est le racisme quant à Stéphane Beaud c'est un des sociologues qui, dans son ouvrage intitulé "retour sur la condition ouvrière" a battu en brèche l'idée qu'il "n'existait plus de classe ouvrière. Il nous appartient de nous saisir de leurs travaux pour avancer politiquement.
Cordialement
Ramiro so foot...
ramiro- Messages : 238
Date d'inscription : 01/04/2011
Re: Des quotas dans le foot ?
Du racisme de classe il y en a évidemment. Mais je suis désolé, y a aucune considération sociale quand on dit qu'un noir est costaud et court vite et quand on dit qu'un blanc a l'intelligence de jeu. Donc leurs histoires de " black " qui désigne un groupe social plus qu'une couleur de peau, de Laurent Blanc et Jacquet enfants de la classe ouvrière qui ne comprennent pas les nouveaux enfants de la classe ouvrière et qui utilisent malgré eux un vocabulaire façonné par d'autres qui les dépasse... Ils peuvent remballer, tout cela est bien nébuleux, n'aide pas à la clarté du propos à un moment où il faut se montrer plus que ferme et direct.
Je ne suis pas anti-sociologie, bien au contraire. Je porte aux nues Duru Bellat sur l'éducation, Loïc Wacquant sur les prisons, Bourdieu sur à peu près tout et je te crois volontiers quand tu dis que Noiriel et Beaud ont écrit des choses très intéressantes. Mais là leur texte n'est pas assez offensif, trop sociologique pour le coup.
Je ne suis pas anti-sociologie, bien au contraire. Je porte aux nues Duru Bellat sur l'éducation, Loïc Wacquant sur les prisons, Bourdieu sur à peu près tout et je te crois volontiers quand tu dis que Noiriel et Beaud ont écrit des choses très intéressantes. Mais là leur texte n'est pas assez offensif, trop sociologique pour le coup.
Zappa- Messages : 146
Date d'inscription : 25/07/2010
Re: Des quotas dans le foot ?
D'accord avec Zappa. J'avais beaucoup aimé le livre de Stéphane Beaud et Younes Amrani Pays de malheur ! mais force est de constater que Beaud tombe ici dans une caricature d'analyse "lutte de classe" qui revient à nier la spécificité du racisme. Ce genre de vision a déjà fait beaucoup de dégâts et il est important de la pointer quand elle survient, c'est un poison pour le combat contre le racisme et l'exploitation, notamment parce qu'elle amène les victimes du racisme à en conclure que les lectures marxistes ou marxisantes du racisme sont déconnectées de la réalité.
sylvestre- Messages : 4489
Date d'inscription : 22/06/2010
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