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Droit à la non-mixité

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Droit à la non-mixité Empty Droit à la non-mixité

Message  MO2014 Mer 4 Mai - 22:04


Pour le droit à la non-mixité
4 mai 2016

Un appel collectif de défense du droit à la non-mixité est lancé pour dénoncer «une République qui nie les formes contemporaines de racisme et d'oppression post-coloniale, et dont les élu.e.s cherchent, par de curieux renversements, à transformer celles et ceux qui subissent quotidiennement le racisme et l'islamophobie en figures de la division».

Nous sommes engagé-e-s contre le racisme, et nous sommes blanc.he.s. En tant que tel.le.s, deux initiatives récentes, de débats sociaux et politiques, nous sont explicitement et volontairement fermées : la préparation de "paroles non-blanches" (mais non les conférences elles-mêmes, contrairement aux rumeurs malveillantes), dans le cadre de l'occupation de l'université Paris 8 ces derniers jours ; le camp d'été décolonial, qui doit se tenir au mois d’août.

Ces deux initiatives étaient discutées mercredi dernier à l'Assemblée Nationale, dans le cadre des questions au gouvernement.

Bernard Debré interpellait en effet la ministre de l'Éducation Nationale, Najat Vallaud-Belkacem.

Le premier affirmait son engagement à « barrer la route à des mouvements (...) qui mettent en danger notre démocratie, pronant le désordre, le racisme et l'antisémitisme ». La seconde expliquait partager l'indignation du député LR et dénonçait des « initiatives inacceptables, en ce qu'elles confortent une vision racisée et raciste de la société » et qui ne peuvent que déboucher sur du « repli sur soi, la division communautaire et le chacun chez soi ».

Nous sommes blanc.he.s, et nos valeurs sont celles de l'émancipation, notre horizon celui d'une égalité effective.

C'est précisément au nom de de ces valeurs, et parce que nous sommes attaché.e.s à cet horizon, parce que nous sommes engagé.e.s au quotidien dans la lutte contre le sexisme, l’homophobie, la transphobie, le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme, que nous soutenons ces deux initiatives.

Nous savons, en effet, qu'il est essentiel que les personnes qui subissent une oppression puissent se retrouver, s'organiser comme elles le souhaitent, débattre comme elles l'entendent de leurs revendications et de leurs stratégies. Nous savons que l'autonomie est un préalable déterminant pour construire des réponses à l'oppression et aux discriminations construire des alliances avec celles et ceux qui ne subissent pas ces formes spécifiques d'oppression mais sont déterminé-e-s à les transformer.

Nous savons ce que le mouvement féministe doit à sa capacité d'avoir construit, non sans avoir été et être encore attaqué, des espaces non-mixtes. Ces espaces sont indispensables pour mettre en lumière, par un effet de miroir, l'existence d'autres espaces non-mixtes, dont les femmes étaient et sont encore souvent exclues : les cercles de pouvoir, les assemblées parlementaires, les organisations politiques, etc. Ils permettent l'existence momentanée d'une parole délivrée du poids vécu de l'oppression et la création de liens de solidarité essentiels à la poursuite de la lutte.

Nous n'y voyons nulle division, nul chacun pour soi. Nous savons qu'il n'y a là aucune volonté de faire sécession, mais une autonomie et une reconnaissance indispensables. Et nous savons l'importance de l'autonomie dans la construction des chemins qui mènent à cet horizon d'égalité effective et de dignité pour tou-te-s. Nous comprenons et soutenons la formation de mouvements par et pour celles et ceux qui subissent l'oppression de genre, le racisme ou l'islamophobie dont nous, en tant qu'hommes et/ou en tant que blanc.he.s serons tenu.e.s à distance. Nous savons que ces différentes formes d'oppression portent atteinte à la dignité de tou.te.s en conférant un privilège à certain.e.s, dont nous faisons indéniablement partie.

Nous ferons donc notre possible pour permettre aux organisatrices et aux organisateurs de ces espaces de mener à bien leurs projets - ou plutôt : nous agirons en fonction de ce que ces organisatrices et organisateurs nous demanderont de faire pour les soutenir. Sans attendre, nous pouvons déjà dénoncer une République qui nie les formes contemporaines de racisme et d'oppression post-coloniale, et dont les élu.e.s cherchent, par de curieux renversements, à transformer celles et ceux qui subissent quotidiennement le racisme et l'islamophobie en figures de la division.

Nous ne sommes par ailleurs pas dupes de ces ministres, élu.e.s, éditorialistes et autres intellectuel.le.s qui, comme par enchantement, confronté.e.s à des portes qui leurs sont pour une fois fermées, tentent de se faire passer pour l'avant-garde de la lutte contre "les visions racisées et racistes de la société", alors que les politiques qu'elles et ils défendent renforcent le racisme et l'islamophobie.

Nous ne sommes pas les bienvenu.e.s dans ces espaces non-mixtes ?

Nous savons que les occasions de nous retrouver n’ont pas manqué et ne manqueront pas.



Le lien vers la pétition en ligne : https://www.change.org/p/le-gouvernement-pour-le-droit-à-la-non-mixité



Les signataires :

Catherine Achin, sociologue ; Armelle Andro, démographe ; Aurélie Audeval, docteure en histoire ;

Magali Bessone, professeure de philosophie ; Jean-Raphaël Bourge, chargé de cours à l’Université Paris 8 ; Sebastian Budgen, Editeur, Verso Books ;

Zoé Carle, enseignante ; Le Cercle des enseignants laïques (Anaïs Flores, Paul Guillibert, Caroline Izambert, Florine Leplâtre, Jérôme Martin); Maxime Cervulle, chercheur en sciences de l’information et de la communication ; Isabelle Clair, sociologue, chargée de recherche au CNRS ; Maxime Combes, économiste et militant associatif ; Vanessa Codaccioni, maître de conférences en sciences politiques ; Annick Coupé, militante syndicale ; Thomas Coutrot, économiste ;

Marion Dalibert, maître de conférences à l’Université de Lille ; Christine Delphy, sociologue et féministe ; Thomas Deltombe, éditeur ; Virginie Descoutures, sociologue ; Véronique Dubarry, membre d’EELV, adjointe au maire de l’Ile Saint Denis ;

Renaud Epstein, sociologue ;

Éric Fassin, professeur de sciences politiques ;

Claire Grino, docteure en Philosophie ; Julie Grisolla, professeure en lycée, organisatrice du festival Transposition ;

Émilie Hache, philosophe ; Nicolas Haeringer, militant associatif ; Marie-Pierre Harder, ATER Paris 8 ;

Irène Jami, professeure d’histoire ;

Olivier Le Cour Grandmaison, universitaire ;

Philippe Marlière, politiste ; Morgane Merteuil, porte-parole du STRASS ;

Nelly Quemener, Maître de conférences en SIC ;

Gianfranco Rebucini, anthropologue, enseignant à l'EHESS ; Matthieu Renault, Maître de conférences, Université Paris 8 ; Juliette Rennes, sociologue ; Julien Rivoire, militant syndical ; Olivier Roueff, sociologue ; Océane Rosemarie, auteure et comédienne ; Juliette Rousseau, militante associative ;

Isabelle Saint-Saens , militante associative ; Julien Salingue, docteur en sciences politiques ; Clément Sénéchal, essayiste ; Patrick Simon, démographe ;

Julien Talpin, sociologue ; Rémy Toulouse, éditeur ; Sylvie Tissot ; Benjamin Tubiana, militant associatif ;

Florian Voros, chercheur à l’université Paris 8.

MO2014

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Message  MO2014 Mar 10 Mai - 14:59


Camp décolonial: le scandale qu'il suscite n'est qu'une preuve de la suprématie blanche
Par Nacira Guénif-Souilamas
Sociologue

L'organisation, par deux jeunes femmes, d'un camp d'été "décolonial", du 25 au 28 août, en Champagne Ardenne, suscite la polémique, du fait qu'il est interdit aux personnes blanches, qui ne sont pas victimes du "racisme d'État". Pour la sociologue, anthropologue et professeure à l'Université Paris 8, Nacira Guénif, ces réactions sont la preuve-même que la tenue de ce camp est indispensable. Explications.

Tout le monde s’insurge devant l’annonce de ce camp décolonial, réservé uniquement aux personnes qui subissent le racisme d’État, qui sera organisé l’été prochain par deux jeunes femmes : comment, les Blancs ne sont pas conviés ? C’est "un racisme qui ne dit pas son nom !" ; un scandaleux "entre-soi".

Revenons un instant sur la notion de "racisme d’État". Il y a deux façons d’aborder le racisme. La première est morale, et consiste à considérer qu’il y a des personnes mal élevées, qui établissent une hiérarchie entre les individus, à raison de leur origine, leur religion, leur ethnicité ou leur couleur de peau. Face à cela, il suffirait de dénoncer et de corriger les dérives de personnes isolées ou d'acteurs déviants.

L’autre approche consiste à dire que le racisme n’est pas seulement une question de sujets qui manquent d’éducation, mais qu’il est hérité de structures coloniales et impériales, qui n’ont pas été démantelées au moment de la liquidation de l’empire colonial, notamment français.

Un racisme hérité de l’empire colonial français

Il s’agit à la fois de règles et d’habitudes qui ont fini par s’imposer dans toute une série de routines administratives et institutionnelles. L’exemple le plus frappant ? La loi de 2004, qui interdit le voile dans l’école publique, pour beaucoup considérée comme une mesure à la fois raciste et sexiste. Ou encore les contrôles policiers pratiqués au faciès. Deux productions typiques du racisme d’État.

Certains États sont ou ont été explicitement racistes. C’était le cas de l’Afrique du Sud, ça a longtemps été et continue d'être celui des États-Unis. Dans les deux cas, si ces états ne se fondent plus sur un racisme revendiqué, leur structure hiérarchisée et le système qui les organisent le restent profondément. Cela devient le cas d'Israël en raison de sa structure coloniale.

Par ailleurs, certaines pratiques racistes sont instaurées et profondément ancrées dans l’ensemble des fonctionnements de l’appareil d'État, qui ne sont absolument pas revendiquées, mais qui ont des effets comme la ségrégation spatiale qui suit une ligne de couleur, les discriminations dans l'accès à l’emploi, l’islamophobie…

Il faut construire un antiracisme politique

Par exemple, la Délégation interministérielle de lutte contre le racisme et l’antisémitisme (DILCRA) affirme qu’il n’y a pas d’islamophobie en France en jouant sur les mots, et en appelant cela du racisme "anti-musulman". Une argutie étrange, qui peut légitimer l'expression d'une forme de haine complètement dédouanée à l’égard des musulmans : puisque l’islamophobie n’existe pas, elle ne peut être qualifiée comme telle et fustigée, puis punie.

Par contre, la même DILCRA ne se prive pas de jeter la suspicion sur ledit camp décolonial ou la semaine de débat organisée à l'université Paris 8 par un collectif étudiants racisés, au prétexte qu'ils seraient initiés par des personnes subissant le racisme qui n'auraient pas le droit d'en parler entre elles pour s'organiser, afin de lutter contre les mécanismes structurels qui le génèrent.

C’est à ce racisme d’État, aujourd’hui identifié par de larges segments de la militance et des intellectuels qui ont accepté de chausser d'autres lunettes analytiques, que ces organisatrices font référence : face à un racisme structurel, il faut construire un antiracisme politique, qui n’est pas simplement moral. L’idée n’est pas de fustiger des individualités auxquelles il faudrait apprendre la bonne manière de se comporter avec les êtres humains, mais de construire des outils politiques pour s’émanciper de ce racisme d’État.

Être "Blanc", ce n’est pas qu’une couleur, c’est un statut politique

On s’est indigné que les personnes "non-racisées" n’aient pas accès à ce type de formation. Or c’est précisément parce que ce sont des pratiques tellement diffuses dans l’ensemble de la société que c’est à la fois très difficile de les qualifier et de les localiser.

Les personnes visées par le racisme d’État sont constituées comme des groupes racisés qui, étant directement confrontés à ce type de racisme, doivent pouvoir s’organiser, se former, prendre la mesure du phénomène, et développer à la fois des outils de compréhension et d’action pour lutter contre le racisme qu’ils subissent.

Les personnes blanches ne sont définitivement pas victimes d'un racisme d’État. Entendons-nous bien sur ce que veut dire "Blanc" : il ne s’agit pas d’une couleur, mais d’un statut politique qui renvoie à une position suprématiste de domination construite pendant des siècles de colonisation et d’esclavage. Qu'elle soit revendiquée ou pas, elle attribue des privilèges à certaines et en privent d'autres de droits fondamentaux attachés à la personne.

En revanche, une femme blanche convertie à l’islam est d’emblée racisée, car la religion musulmane est un vecteur de racialisation, une manière d’altériser la personne, de l’exclure du commun, du groupe dominant et légitime. En se convertissant, cette personne perd son privilège de personne blanche pour se voir attribuer des stigmates liés au fait qu’elle est devenue musulmane.

Raconter les expériences du racisme, c’est douloureux et difficile

Contrairement à ce qu’on a pu fustiger dans les médias, je ne vois pas en ce camp un facteur d’exclusion. Nous devons nous poser les questions de l’antériorité des mécanismes d’exclusion.

Ce n’est pas ce camp qui exclut, mais bien tous les mécanismes qui conduisent à ce qu’à un moment donné, ces personnes aient à s’organiser collectivement, parce qu’elles estiment qu’elles ont à apprendre les unes des autres, à comprendre ce qui leur arrive et à s’enrichir à travers des lectures et leur expérience mutuelle pour agir de façon décisive contre les racines du racisme.

Raconter sa confrontation au racisme, c’est quelque-chose de très douloureux et difficile. Ça ne peut pas se faire en face de n’importe qui. Certaines personnes ne comprennent pas le racisme et ont souvent développé, sans volonté particulière, une forme d’angle mort, qui fait qu’elles ne perçoivent pas de quoi il s’agit, voire qu'elles ne veulent pas en entendre parler, y compris dans des milieux éduqués et militants.

Cet "entre-soi" est une étape indispensable

Récemment, d’autres événements ont été dans le viseur de critiques virulentes, à l’instar d’une rencontre "Paroles non blanches", organisée en avril à l’université Paris 8, à laquelle j’ai participé. Le principe : des personnes racisées viennent échanger, devant un public assez nourri. Certains spectateurs blancs étaient particulièrement motivés pour entendre ce que ces personnes avaient à partager en terme d’analyse et d’action collective. Il n'y avait ni mise à l'écart, ni disqualification: toutes les paroles étaient les bienvenues dès lors qu'elles prenaient en considération le propos liminaire et les prises de paroles, avancées par des personnes racisées.

Le camp décolonial constitue une étape encore antérieure à ce processus. En effet, le groupe dominant fait partie du problème : les personnes blanches qui ne subissent pas le racisme et ne luttent pas contre, de fait, s’en accommodent et le légitiment. Il y a donc la volonté de construire un entre-soi protégé, pour monter en puissance et parvenir à s'organiser, comme ça a été le cas des femmes en France dans leur lutte féministe.

C’est un passage par lequel il faut passer, une étape. Cela ne veut pas dire que les personnes qui ne sont pas en butte au racisme ne peuvent pas devenir les alliés de cette lutte-là, au contraire. Mais dans un second temps, seulement, et selon les modalités qui auront été déterminées et définies par les personnes concernées au premier chef. C'est ce que nous apprennent les luttes d'émancipation des colonisés partout dans le monde et celles des esclaves et leur descendants aux États-Unis.

Décoloniser la lutte antiraciste

Beaucoup de ceux qui se sont mobilisés sur l’antiracisme en France ont, pendant longtemps, été ceux qui ne le subissaient pas. Ils parlaient "à la place de". Si Harlem Desir était positionné en première ligne de SOS racisme, l’association était pourtant essentiellement constituée de militants socialistes blancs, qui, suppose-t-on, avec toute la bienveillance du monde, parlaient de leurs "potes".

Aujourd’hui, ces "potes" veulent se réapproprier leur puissance d’action et construire une parole autonome, indépendante et souveraine, qui ne soit plus préemptée par ceux qui ne vivent pas la situation. L’objectif est de décoloniser la lutte antiraciste, en se libérant de la tutelle ou et de l’influence des collectifs qui existent déjà et pour beaucoup se sont révélés impuissants à lutter contre le racisme systémique.

La simple attitude de dire "vous n’avez pas le droit de vous réunir entre vous", participe de cette violence d’État raciste, qui entend dicter les termes dans lesquels les personnes qui subissent le racisme doivent lutter contre.

Les victimes deviennent coupables

Soit dit en passant, les initiatives de "l’entre-soi" abondent dans notre société, sans que personne ne les souligne. Qui s'offusque des réunions à l’hôtel Crillon, ouvertes qu’à quelques personnalités, triées sur le volet à partir de critères de fortune ? Personne ne se demande ce qu’il s’y raconte ou s'y fomente. Pourquoi l’entre-soi pose-t-il problème à certains moments et pour certains groupes censés demeurer subalternes et obéir aux injonctions qui leurs sont faites, à commencer par la transparence ?

A contrario, le fait qu’il y ait une volonté d’entre-soi de la part de personnes opprimées par un système de racisme inscrit au plus profond de l’État dérange.

La raison pour laquelle ce camp suscite autant de nervosité, c’est qu’une question politique majeure est désormais soulevée : sommes-nous capables de prendre la mesure des pratiques racistes qui banalisent l’islamophobie, le racisme contre les Roms, les Noirs, les Arabes… Et d’arrêter d’accuser les victimes d’être les coupables ?

MO2014

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